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Décisions

CA Paris, Pôle 5 ch. 4, 11 septembre 2024, n° 22/14884

PARIS

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Défendeur :

Pompes Funèbres de France (SAS)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Brun-Lallemand

Conseillers :

M. Richaud, Mme Dallery

Avocats :

Me Valentie, Me Boccon-Gibod

TJ Creteil, 4e ch., du 14 juin 2022, n° …

14 juin 2022

LES FAITS

Le 31 décembre 2020, la société Pompes Funèbres de France, qui a pour activité l'exploitation d'un réseau de franchise dans le secteur du funéraire, a signé six contrats de franchise avec une société en cours de constitution, représentée par [H] [J] et [G] [I] ainsi qu'avec ces derniers intervenant en leur nom personnel et pour leur compte, prévoyant l'ouverture et l'exploitation de six établissements.

Par lettre recommandée avec accusé de réception datée du 12 avril 2021, la société Pompes Funèbres de France a mis en demeure M. [I] et Mme [J] de payer les droits d'ouverture figurant à l'article 3-1 des six contrats.

Par lettre recommandée avec accusé de réception datée du 20 mai 2021, la société Pompes Funèbres de France a informé M [I] et Mme [J] de la résiliation de plein droit des six contrats de franchise et les a mis en demeure de payer les droits d'ouverture des contrats de franchise, les pénalités de retard depuis le 2 février 2021 et les royalties forfaitaires majorés de 30%.

LA PROCÉDURE

Par acte du 11 janvier 2022, la société Pompes Funèbres de France a assigné M. [I] et Mme [J] devant le tribunal de judiciaire de Créteil pour obtenir le paiement des droits d'ouverture et des pénalités de retard à hauteur de la somme de 5 820 € TTC au titre des contrats de franchise.

Par jugement du 14 juin 2022, le tribunal judiciaire de Créteil a :

- Condamné in solidum Mme [J] et M. [I] à payer à la société Pompes Funèbres de France la somme de 97 000€ hors taxes, soit 115 400€ TTC

- Rappelé qu'en application des articles 514-1 et 514-6 du code de procédure civile l'exécution provisoire est de droit

- Condamné in solidum Mme [J] et M. [I] aux dépens

- Condamné in solidum Mme [J] et M. [I] à payer à la société Pompes Funèbres de France la somme de 1 500€ en application de l'article 700 du code de procédure civile

- Rejeté toutes autres demandes, plus amples ou contraires, des parties

M. [I] et Mme [J] ont interjeté appel de ce jugement par déclaration reçue au greffe de la Cour le 8 août 2022. Ils prient la Cour, par leurs dernières conclusions déposées et notifiées par RPVA le 28 avril 2023, de :

Vu les articles 1355, 1842 et 1843 du code civil,

Vu l'article L.210-6 du code de commerce,

Vu les articles 75 à 91, 122 à 126, 565 à 567, 700, 789 et 907 du CPC,

Vu l'avis (n°15008 P) de la 2ème chambre civile de la Cour de cassation du 3 juin 2021

Vu leur jurisprudence y afférente,

- Recevoir M. [I] et Mme [J] en leurs conclusions et les déclarer bien fondées ;

- Infirmer, réformer, le jugement rendu le 14 juin 2022 par le tribunal judiciaire de Créteil, en ce qu'il a condamné in solidum M. [I] et Mme [J] à payer à la SAS Pompes Funèbres de France la somme de 116 400 TTC ainsi que celle de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article 700 du CPC

Et, statuant de nouveau,

A titre liminaire,

- Déclarer recevable la demande d'incompétence soulevée par M. [I] et Mme [J] ;

- Déclarer incompétent le tribunal judiciaire de Créteil et par voie de conséquence la cour d'appel de Paris pour connaître des demandes formées par la SAS Pompes Funèbres de France

- Renvoyer la connaissance de la cause à la cour d'appel de Versailles

- Débouter la SAS Pompes Funèbres de France de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions

A titre principal

- Déclarer irrecevables les demandes formées par la SAS Pompes Funèbres de France à l'encontre de M. [I] et Mme [J]

- Déclarer irrecevables les demandes de dommages et intérêts formées par la SAS Pompes Funèbres de France à l'encontre de M. [I] et Mme [J]

- Débouter la SAS Pompes Funèbres de France de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions

A titre subsidiaire - Au fond

- Prononcer la nullité absolue des six contrats de franchise en date du 31 décembre 2020

- Débouter la SAS Pompes Funèbres de France de ses demandes de dommages et intérêts

- Débouter la SAS Pompes Funèbres de France de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions

En tout état de cause

- Débouter la SAS Pompes Funèbres de France de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions

- Condamner la SAS Pompes Funèbres de France à payer à M. [I] et à Mme [J] la somme de 50 000 euros de dommages et intérêts au titre de leur préjudice financier

- Condamner la SAS Pompes Funèbres de France à payer à M. [I] et à Mme [J] la somme de 10 000 euros, chacun, au titre des dispositions de l'article 700 du CPC

- Condamner la SAS Pompes Funèbres de France aux entiers dépens de premières instance et d'appel dont distraction au profit de Maître Christian Valentie et ce dans les termes de l'article 699 du CPC

La société Pompes Funèbres de France par ses dernières conclusions déposées et notifiées par RPVA le 5 février 2023, demande à la Cour de :

Vu l'article 48 du code de procédure civile,

Vu l'article L.121-1 du code de commerce,

Vu l'article L.123-8 du code de commerce,

Vu l'article 1103 et 1104 nouveau du code civil,

Vu l'article 1231-2 nouveau du code civil,

Vu l'article 700 du code de procédure civile,

Vu les contrats de franchise,

Vu la jurisprudence,

Sur la compétence :

- Rejeter l'exception d'incompétence soulevée par Mme [J] et M. [I]

- Déclarer compétent le tribunal judiciaire de Créteil et la cour d'appel de Paris

Sur le fond :

- Juger recevables et bien fondées les demandes formées par la société Pompes Funèbres de France

- Juger que les contrats d'enseigne du 31 décembre 2020 pour les communes de [Localité 5], [Localité 6], [Localité 7], de [Localité 8], [Localité 10], et [Localité 9] ont été résiliées le 10 juillet aux torts exclusifs de M. [I] et de Mme [J]

En conséquence,

- Confirmer le jugement du tribunal judiciaire de Créteil en date du 14 juin 2022 en ce qu'il :

* Condamne in solidum Mme [J] et M. [I] à payer à la société Pompes Funèbres de France la somme de 97 000 euros HT soit 116 400 euros TTC

* Condamne in solidum Mme [J] et M. [I] aux dépens

* Condamne in solidum Mme [J] et M. [I] à payer à la société Pompes Funèbres de France la somme de 1500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile

- Infirmer le jugement du tribunal judiciaire de Créteil en date du 14 juin 2022 en ce qu'il :

* Rejette toutes les autres demandes plus amples ou contraires des parties

Statuant à nouveau sur les chefs infirmées :

- Condamner in solidum Mme [J] et M. [I] à payer à la société Pompes Funèbres de France les pénalités de 5% pour absence de paiement des DO pour un montant de 5 820€ TTC

- Condamner in solidum M. [J] et M. [I] aux frais de constats d'huissiers

Subsidiairement

- Condamner in solidum M. [I] et M. [J] à payer à la société Pompes Funèbres de France la somme de :

* 10 000 euros au titre du préjudice moral

* 116 400 € TTC au titre du préjudice financier immédiat

En tout état de cause et y ajoutant :

- Condamner in solidum Mme [J] et M. [I] à payer à la société Pompes Funèbres de France 6 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance d'appel.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 23 avril 2024.

MOTIVATION

Sur l'exception d'incompétence du tribunal de judiciaire de Créteil

M. [I] et Mme [J] soutiennent que :

- Les articles 11 des six contrats de franchises comportaient une clause de compétence au profit de tribunal de commerce de Nanterre.

- Ils ont signé les contrats en cause en tant que dirigeants de la société en formation et non pas à titre personnel.

- S'ils avaient voulu s'engager à titre personnel, comme le prétend la société Pompes Funèbres de France, ils ne pouvaient le faire qu'en tant que commerçant, ce qui justifierait la saisine du tribunal de commerce, de sorte que la société Pompes Funèbres de France ne pouvait les assigner valablement devant le tribunal judiciaire de Créteil.

- Ils n'ont pas été représentés en première instance et n'ont pas été en mesure de présenter cette exception d'incompétence au juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Créteil.

- Seule la cour peut statuer sur la présente exception d'incompétence du tribunal judiciaire de Créteil puisque selon l'avis n°15008 de la 2ème chambre civile de la Cour de cassation en date du 3 juin 2021 relatif aux fins de non-recevoir :

"Le conseiller de la mise en état ne peut connaître ni des fins de non-recevoir qui ont été tranchées par le juge de la mise en état, ou par le tribunal, ni de celles qui, bien que n'ayant pas été tranchées en première instance, auraient pour conséquence, si elles étaient accueillies, de remettre en cause ce qui a été jugé au fond par le premier juge."

- Aux termes de l'article 90 du code de procédure civile, "si elle n'est pas juridiction d'appel, la cour, en infirmant du chef de la compétence la décision attaquée, renvoie l'affaire devant la cour qui est juridiction d'appel relativement à la juridiction qui eût été compétente en première instance. Cette décision s'impose aux parties et à la cour de renvoi."

- La juridiction compétente pour connaitre des demandes de la société Pompes Funèbres de France était bien le tribunal de commerce de Nanterre relevant de la cour d'appel de Versailles et non le tribunal judicaire de Créteil.

- En conséquence, la cour devra déclarer recevable " la demande " d'incompétence, infirmer, réformer, le jugement rendu le 14 juin 2022 par le tribunal judiciaire de Créteil, se déclarer incompétente et renvoyer les causes devant la cour d'appel de Versailles.

La société Pompes Funèbres de France rétorque que :

- Conformément à l'article 75 du code de procédure civile, la partie qui soulève l'exception d'incompétence doit, à peine d'irrecevabilité, faire connaitre la juridiction devant laquelle elle demande que l'affaire soit portée.

- Aux termes du dispositifs des conclusions de l'appelant, la cour d'appel de Versailles est la seule juridiction désignée comme étant compétente et devant laquelle l'affaire doit être portée.

- Aux termes de l'article 88 du code de procédure civile, si la cour d'appel estime que la juridiction initialement saisie est incompétente, elle devra renvoyer l'affaire devant la juridiction compétente, soit la juridiction de premier degré qui aurait dû être saisie. La désignation par l'appelant de la cour d'appel de Versailles comme juridiction devant laquelle l'affaire doit être portée est donc erronée.

- Toute régularisation est désormais impossible, dès lors que la désignation de la juridiction compétente doit être faite avant toute défense au fond (article 74 CPC).

- En conséquence, la cour ne pourra que déclarer irrecevable l'appel interjeté et l'exception d'incompétence soulevée par les appelants.

- Si les contrats ont bien été souscrits au nom de la "société en cours de constitution", ils l'ont également été par M. [I] et Mme [J] en leur nom personnel et pour leur propre compte ainsi que cela figure en en-tête des contrats mentionnant que M. [I] et Mme [J], chacun, "intervenant aux présentes en son nom personnel et pour son compte".

- Dès lors, si elle avait accepté la société en cours de constitution comme débitrice, elle n'avait renoncé ni expressément ni tacitement à poursuivre le règlement de sa créance à l'encontre de M. [I] et de Mme [J]

- La clause attributive de compétence contenue au sein des contrats leur est inopposable sur le fondement de l'article 48 du code de procédure civile.

- Si la société ne reprend pas l'acte ou si la société n'est pas immatriculée lorsque survient le litige, l'application de la clause dépend de la qualité de l'auteur de l'acte.

- Si les personnes agissant au nom d'une société en formation n'ayant pas encore acquis la personnalité morale sont tenues solidairement et indéfiniment des actes accomplis, il n'en résulte pas qu'il leur soit nécessairement conféré la qualité de commerçant

- Si comme ils le prétendent, M. [I] et Mme [J] ont agi comme dirigeants, ils n'ont pas accompli d'acte de commerce en leur nom et pour leur compte et ne peuvent pas se prévaloir de la qualité de commerçant et ainsi relever de la compétence du tribunal de commerce de Nanterre, étant observé qu'il est de jurisprudence constante que les dirigeants ou associés n'ont pas la qualité de commerçants.

- En l'espèce, aucune société n'a été créée, aucun fonds de commerce n'a été exploité, aucun acte de commerce à titre de profession habituelle au nom des sociétés n'a été accompli, de sorte que M. [I] et Mme [J] n'ont jamais acquis la qualité de commerçants.

- En conséquence, Pompes Funèbres de France ne pouvait pas attraire M. [I] et Mme [J] devant le tribunal de commerce de Nanterre et le tribunal judiciaire de Créteil, lieu du seul domicile connu des appelants, était donc compétent.

Réponse de la Cour

Chacun des six contrats de franchise signés le 31 décembre 2020 entre la société Pompes Funèbres de France d'une part et M. [I] et Mme [J] d'autre part comporte en son article 11, une clause attributive de compétence rédigée en ces termes :

"Tout litige relatif à la formation, la conclusion, la validité, l'interprétation, l'exécution, la transmission, la cessation et/ou les conséquences de la cessation du contrat sera soumise à la compétence du Tribunal de commerce de Nanterre".

L'article 75 du code de procédure civile dispose :

"S'il est prétendu que la juridiction saisie en première instance ou en appel est incompétente, la partie qui soulève cette exception doit, à peine d'irrecevabilité, la motiver et faire connaître dans tous les cas devant quelle juridiction elle demande que l'affaire soit portée."

L'exception d'incompétence est recevable en ce qu'elle est soulevée in limine litis et désigne la juridiction estimée compétente, en l'espèce la Cour d'appel de Versailles.

Cependant, elle n'est pas fondée en ce que même à admettre la qualité alléguée de commerçant des appelants, la juridiction compétente serait le tribunal de commerce de Nanterre en vertu de la clause attributive de compétence et non la cour d'appel de Versailles, juridiction d'appel de cette dernière.

Il sera ajouté qu'en tout état de cause la qualité de commerçant de M [I] et de Mme [J] ne peut être retenue dès lors qu'ils ont signé les contrats de franchise en qualité de représentants légaux de la société franchisée, société en cours de constitution ainsi qu'en leur nom personnel et pour leur compte, étant observé que la société franchisée n'a pas vu le jour et qu'aucun acte de commerce n'a été réalisé par les appelants.

Par suite, en vertu de l'article 48 du code de procédure civile qui dispose : "Toute clause qui, directement ou indirectement, déroge aux règles de compétence territoriale est réputée non écrite à moins qu'elle n'ait été convenue entre des personnes ayant toutes contracté en qualité de commerçant et qu'elle n'ait été spécifiée de façon très apparente dans l'engagement de la partie à qui elle est opposée", le franchiseur a justement assigné M [I] et Mme [J] devant le tribunal judiciaire de Créteil, dans le ressort duquel ils étaient domiciliés.

La cour d'appel de Paris, juridiction d'appel du tribunal judiciaire de Créteil est compétente. L'exception d'incompétence territoriale est rejetée.

Sur l'irrecevabilité des demandes

M. [I] et Mme [J] invoquent le défaut d'intérêt à agir de la société Pompes Funèbres de France pour solliciter de leur part, pris en leur nom personnel, le paiement de droits d'ouverture des contrats de franchise.

Ils font valoir que :

- La société Pompes Funèbres de France les a assignés uniquement en leur nom propre et non en leur qualité de dirigeant ou en leur ancienne qualité de dirigeant alors qu'ils ont été signés les contrats uniquement en leur qualité de dirigeant d'une société en formation.

- Même si les en-têtes des contrats les mentionnent comme "intervenant aux présentes en leur nom et pour leur compte", ils ne les ont signés qu'en tant que "franchisé en cours de constitution" et en tant que "dirigeants".

- N'ayant pas été informés de la procédure de première instance, il convient, en application de l'avis n°15008 de la 2eme chambre civile de la Cour de cassation, que la cour est compétente au lieu du conseiller de la mise en état pour connaître de la présente fin de non-recevoir.

La société Pompes Funèbres de France rétorque que :

- Elle n'a fait preuve d'aucune déloyauté dans le traitement du précontentieux et du contentieux

- Les contrats de franchise font bien état de plusieurs signataires : d'une part la société en cours de constitution et d'autre part, en leur nom personnel et pour leur propre compte M. [I] et Mme [J]. Ces derniers sont donc bien engagés à titre personnel, à côté de la société en formation.

Réponse de la Cour

Il résulte des termes mêmes des contrats de franchise signés par M [I] et Mme [J] que chacun d'eux "exerce la fonction de représentant légal de la Société Franchisée" en cours de constitution et interviennent en leur nom personnel et pour leur compte ; leur signature figure dans la case "Le Franchisé" et dans celle "Le Dirigeant".

Par conséquent, la société franchisée est recevable en ses demandes dirigées contre M. [I] et Mme [J] en leur nom personnel.

Sur la nullité absolue des contrats de franchise

M. [I] et Mme [J] soutiennent que les six contrats de franchise sont entachés d'une nullité absolue qui s'étend à l'intégralité des clauses des contrats ainsi qu'à toutes les parties contractantes.

Ils font valoir que :

- Les contrats en cause ont été contractés dans l'intérêt et pour le compte d'une "société en cours de constitution" (page 2 des contrats) et d'une "société en cours de formation" (page 23 du contrat) ;

- Un contrat conclu par une société en formation représentée par son gérant, et non par le gérant agissant pour le compte de la société est nul, peu important qu'il ait été indiqué que la société était en cours d'immatriculation (Cass.com. 10 février 2021 pourvoi 19-10.006), de sorte que le gérant ne peut être tenu des obligations résultant du contrat ;

- C'est à tort que la société Pompes Funèbres de France tente d'obtenir l'exécution de contrats nuls de droits et d'effets à leur encontre, même pris en leur nom personnel.

La société Pompes Funèbres de France rétorque que :

- Les contrats n'ont pas été signés dans l'intérêt et pour le compte d'une société en formation. La page 2 des contrats, consacrée à l'identification des parties, est claire ;

- Les jurisprudences citées par l'appelant visent l'hypothèse dans laquelle seule la société en formation est signataire, or tel n'est pas le cas en l'espèce ;

- La société en cours de constitution n'est pas la seule signataire et le fait que le contrat ait été également signé par une société en cours de constitution ne modifie en rien l'indication selon laquelle M. [I] et Mme [J] ont signé les contrats à titre personnel et pour leur compte également ;

- Dès lors, le contrat produit bien des effets à l'égard de M. [I] et de Mme [J], de telle sorte que le contrat est parfaitement valable à l'égard de ces derniers.

Réponse de la Cour,

Ainsi qu'il a été dit, les contrats de franchise ont été conclus, outre par les sociétés franchisées en cours de constitution (P 2 et P 22 et 23 des contrats), par M. [I] et Mme [J] à titre personnel et pour leur compte, de sorte que le contrat produit des effets à l'égard de ces derniers.

La nullité absolue alléguée des contrats est rejetée.

Sur la résiliation des contrats de franchise aux torts exclusifs de M. [I] et Mme [J] et les sommes dues

La société Pompes Funèbres de France soutient que :

- M. [I] et Mme [J] se sont engagés, en tant que représentant légaux de la société franchisée, en leur nom personnel et pour leur propre compte aux termes des six contrats de franchise signés le 31 décembre 2020 :

- Les articles 3 des contrats ont prévu le versement d'un droit d'entrée versé à la signature qui s'élevait à 21 600€ TTC, soit un total de 129 600€ TTC ;

- M. [I] et Mme [J] ont bénéficier d'un délai de réflexion de deux fois supérieur au minimum légal avant la signature des contrats le 31 décembre 2020.

- Ce n'est que le 2 avril 2021 que les appelants l'ont informée la société Pompes Funèbres de France qu'ils ne donneraient pas suite aux contrats de franchise, résiliant ainsi clairement et sans équivoque ceux-ci ;

- Les contrats de franchise ont été valablement signés et sont entrés en vigueur, de sorte que les obligations qui en sont nées doivent être exécutées et que le paiement des droits d'ouverture prévus par l'article 3 des contrats qui est acquis ;

- En conséquence, M. [I] et Mme [J] sont redevables de la somme de 97 000€ HT, soit 116 400€ TTC au titre des seuls droits d'ouverture, ainsi que de la somme de 5 820€ TTC correspondant aux pénalités de retard de 5% depuis le 2 février 2016, date de la facture relative aux droits d'ouverture ;

- S'agissant des pénalités de retard sollicités, elle indique que, si elle a renoncé à la somme de 108 000€ HT, soit 120 960€ TTC correspondant au paiement des royalties forfaitaires en application des délais d'ouverture, majorées de 30%, soit 157 248€ TTC, due en vertu de l'article 10.2 -d des contrats, clause pénale en cas de résiliation des contrats imputables au franchisé ou aux dirigeants, elle réclame toutefois le paiement d'une pénalité de 5% de la somme due et d'une indemnité forfaitaire légale pour frais de recouvrement.

M. [I] et Mme [J] rétorquent que :

Pour fonder la demande au titre de la pénalité de 5% des sommes due et d'une indemnité forfaitaire légale pour frais de recouvrement en cas de retard de paiement de 40€, la société Pompes Funèbres de France invoque l'article 10.2 d des contrats qui ne correspond pas à cette demande, laquelle ne repose sur aucune disposition contractuelle.

Réponse de la Cour

L'article 3-1 "Droit d'Ouverture" de chacun des six contrats de franchise stipule :

"En contrepartie de l'entrée dans le réseau en ouvrant une agence sous l'enseigne Pompes Funèbres de France et de l'exclusivité d'utilisation des Marques sur le Territoire, le Franchisé s'engage à verser, au jour de la signature du Contrat, un droit d'ouverture qui s'élève à la somme de :

18 000,00€ HT - Dix-huit mille euros Hors Taxes (soit 21 600 €TTC - vingt et un mille six cents euros Toutes Charges Comprises)

Le droit d'ouverture est définitivement acquis au Franchiseur quel que soit le devenir du contrat".

M [I] et Mme [J] se sont abstenus de payer la somme de 97 000€ HT, soit 114 400 € TTC dont ils étaient redevables à ce titre en leur qualité de signataire de ces six contrats auxquels ils sont intervenus en leur nom personne et pour leur compte, ce en dépit de la mise en demeure de payer qui leur a été adressée le 12 avril 2021, justifiant la résiliation de plein droit desdits contrats à la date du 20 mai 2021.

Par conséquent, le jugement est confirmé en ce qu'il a condamné in solidum M [I] et Mme [J] à payer cette somme au titre des droits d'ouverture.

S'agissant de la clause pénale de 5% sollicitée au titre du retard de paiement, la société franchiseur ayant renoncé à sa demande fondée sur les dispositions de l'article 10-2 d du contrat, sa demande au titre de la clause pénale est dépourvue de fondement contractuelle et sera rejetée, le jugement étant confirmé de ce chef.

Le jugement est également confirmé en ce qu'il a rejeté les frais de constats d'huissier en l'absence de constats produits.

Enfin, il sera observé que la demande d'indemnité forfaitaire légale de 40 € pour frais de recouvrement n'est pas reprise au dispositif de l'arrêt, de sorte que la Cour n'en est pas saisie.

Sur les autres demandes

Sur les demandes subsidiaires de dommages intérêts de la société Pompes Funèbres de France,

Ces demandes formées par la société Pompes Funèbres de France pour le cas où la nullité du contrat serait retenue, n'a pas lieu d'être examinée, la nullité des contrats de franchise ayant été rejetée.

Sur la demande de M. [I] et Mme [J] en réparation du préjudice financier

Les appelants qui estiment avoir subi un préjudice du fait des actes d'exécution du jugement engagés par la société Pompes Funèbres de France, ne peut prospérer au regard du sens de l'arrêt confirmatif du jugement entrepris.

Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile

Le jugement est confirmé en ce qu'il a condamné M. [I] et Mme [J] in solidum aux dépens et en ce qu'il a mis à leur charge une indemnité procédurale.

M. [I] et Mme [J] qui succombent, sont condamnés in solidum aux dépens d'appel et à payer à la société Pompes Funèbres de France la somme de 5 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, leur demande à ce titre étant rejetée.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Rejette l'exception d'incompétence ;

Confirme le jugement en ses dispositions qui lui sont soumises ;

Y ajoutant,

Rejette la fin de non-recevoir des demandes principales de la société Pompes Funèbres de France soulevée par M. [I] et Mme [J] ;

Rejette la demande tendant à voir dire les six contrats de franchise entachés d'une nullité absolue ;

Déboute M. [I] et Mme [J] de leur demande de dommages-intérêts au titre de leur préjudice financier ainsi que leur demande au titre d'une indemnité procédurale ;

Condamne in solidum M. [I] et Mme [J] aux dépens d'appel et à payer à la société Pompes Funèbres de France la somme de 5 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Rejette toute autre demande.