Décisions
CA Aix-en-Provence, ch. 3-1, 11 septembre 2024, n° 23/10924
AIX-EN-PROVENCE
Arrêt
Autre
COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE
Chambre 3-1
ARRÊT AU FOND
DU 11 SEPTEMBRE 2024
N° 2024/ 168
Rôle N° RG 23/10924 - N° Portalis DBVB-V-B7H-BLZHX
[M] [F]
C/
[R] [B]
S.A.R.L. B&C PROMOTION
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
Me Charles TOLLINCHI
Me Philippe MEIFFRET-DELSANTO
Décision déférée à la Cour :
Ordonnance du Tribunal de Commerce de TOULON en date du 19 Juillet 2023 enregistrée au répertoire général sous le n° 2023R00028.
APPELANT
Monsieur [M] [F]
né le [Date naissance 1] 1978 à [Localité 7]
de nationalité Française,
demeurant [Adresse 3]
[Localité 5]
représenté par Me Charles TOLLINCHI de la SCP CHARLES TOLLINCHI - CORINNE PERRET-VIGNERON, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE
INTIMES
Monsieur [R] [B]
né le [Date naissance 2] 1981 à [Localité 8],
demeurant [Adresse 6]
[Localité 4]
représenté par Me Philippe MEIFFRET-DELSANTO de la SELARL CONSULTIS AVOCATS, avocat au barreau de TOULON, substitué par de Me Clémence LE GUEN GOZLAN, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, avocat plaidant.
S.A.R.L. B&C PROMOTION,
demeurant [Adresse 6]
[Localité 4]
représentée par Me Philippe MEIFFRET-DELSANTO de la SELARL CONSULTIS AVOCATS, avocat au barreau de TOULON substitué par Me Clémence LE GUEN GOZLAN, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, avocat plaidant.
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 23 Mai 2024 en audience publique. Conformément à l'article 804 du code de procédure civile, Mme Stéphanie COMBRIE a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.
La Cour était composée de :
Madame Valérie GERARD, Présidente de chambre
Madame Stéphanie COMBRIE, Conseillère
Mme Marie-Amélie VINCENT, Conseillère
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Madame Marielle JAMET
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 11 Septembre 2024.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 11 Septembre 2024,
Signé par Madame Valérie GERARD, Présidente de chambre et Madame Elodie BAYLE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
EXPOSE DU LITIGE
En 2011, M. [R] [B] et M. [M] [F] ont constitué à parts égales la société B&C Promotion, société à responsabilité limitée, dont M. [R] [B] est le gérant.
La société a une activité de marchand de biens et de lotisseur.
Elle est devenue par ailleurs l'unique associée de la société La Parisienne, société spécialisée dans la restauration rapide, dont M. [R] [B] est également le gérant.
En l'état des dissensions intervenues entre les associés, M. [M] [F] a souhaité se retirer de la société B&C Promotion.
Ainsi, un premier protocole de cession a été signé le 23 janvier 2020 mais n'a pas été suivi d'effet et le 12 avril 2022 les associés ont convenu de la cession, dans un premier temps, de 10 des 50 parts de M. [M] [F] au profit de la société MF Invest, détenue par M. [R] [B] et son épouse, et dans un second temps de la cession des 40 parts sociales restantes.
La première cession est intervenue mais la deuxième, prévue avant le 30 octobre 2022, n'a jamais eu lieu de sorte que M. [M] [F] est actuellement associé minoritaire à hauteur de 40%.
Une expertise judiciaire a été ordonnée le 27 octobre 2021 par le tribunal de commerce de Toulon, désignant M. [V].
Le 7 mars 2023, invoquant la gestion anormale de la société B&C Promotion, M. [M] [F] a sollicité la désignation d'un administrateur provisoire auprès du juge des référés du tribunal de commerce de Toulon sur le fondement des articles 872 et 873 du code de procédure civile en visant l'urgence et le péril caractérisé.
Par ordonnance en date du 19 juillet 2023 le juge des référés du tribunal de commerce de Toulon :
- s'est déclaré incompétent,
- a renvoyé les parties à trouver une solution amiable et à se pourvoir comme il appartiendra,
- a débouté les parties de leurs demandes respectives au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- a laissé à M. [M] [F] les entiers dépens de la procédure
-------
Par acte en date du 16 août 2023 M. [M] [F] a interjeté appel de la décision.
-------
Par conclusions enregistrées par voie dématérialisée le 12 novembre 2023, auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé détaillé de ses prétentions et moyens, M. [M] [F] demande à la cour de :
Infirmer en toutes ses dispositions de l'ordonnance de référé rendue par le Président du Tribunal de Commerce de Toulon en date du 19.07.2023 en ce que :
- Le juge s'est déclaré incompétent
- A renvoyé les parties à trouver une solution amiable et à se pourvoir comme il appartiendra
- Débouté les parties de leurs demandes respectives au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;
- Débouté Monsieur [F] de toutes ses autres demandes, fins et dépens ;
- Laissé à la charge de Monsieur [F] les entiers dépens ;
Et statuant à nouveau :
Vu l'urgence évidente et le péril caractérisé ;
Vu l'intérêt social de la SARL B&C Promotion ;
Vu la jurisprudence ;
Désigner tel Administrateur Provisoire qu'il plaira à la Cour avec les pouvoirs de gestion et d'administration les plus étendus comprenant notamment les missions de :
- Représenter la société B&C Promotion ;
- Prendre toutes les décisions rendues nécessaires par l'état de la société et dans l'intérêt de cette dernière en convoquant au besoin les assemblées générales nécessaires ;
- Représenter la société B&C Promotion tout au long de l'Expertise Judiciaire ordonnée par le Tribunal ;
- Dresser un bilan du fonctionnement de la société et des irrégularités éventuellement constatées ;
- Procéder à l'inventaire des actifs matériels et immatériels de la SARL B&C Promotion.
Mettre à la charge de la société B&C Promotion la rémunération de l'administrateur ;
Condamner Monsieur [B] à payer à Monsieur [M] [F], la somme de 4.000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;
Condamner Monsieur [B] aux entiers dépens.
Au soutien de son appel, M. [M] [F] fait valoir que :
- la société B&C Promotion rencontre des difficultés de gestion depuis 2016 avec la création de la société La Parisienne (difficultés d'approbation des comptes 2017, 2018, 2022, radiation d'office de la société B&C Promotion notamment),
- contrairement à ce qu'a estimé le juge des référés l'urgence est caractérisée compte-tenu des problématiques et de l'opacité de la gestion effectuée par M. [B], laquelle est gravement préjudiciable à la société B&C Promotion ; il existe un péril imminent dès lors que M. [B] méconnaît les règles légales du droit des sociétés et privilégie ses intérêts personnels et ceux de la société MF Invest au détriment de la société B&C Promotion,
- la désignation d'un administrateur provisoire suppose de rapporter la preuve de circonstances rendant impossible le fonctionnement normal de la société et menaçant celle-ci d'un péril grave ; en l'espèce, les associés sont dans une situation de blocage et l'intérêt social en pâtit (protocoles de cession en échec, expertise judiciaire bloquée)
------
Par conclusions enregistrées par voie dématérialisée le 12 décembre 2023 auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé détaillé de leurs prétentions et moyens, M. [R] [B] et la société B&C Promotion demandent à la cour de :
A titre principal :
Vu l'article 872 du Code de Procédure Civile ;
Vu les moyens qui précèdent et les pièces versées aux débats,
Confirmer dans toutes ses dispositions l'ordonnance rendue le 19 juillet 2023 par Monsieur Bruno Adet, Juge près le Tribunal de Commerce de Toulon.
Condamner Monsieur [M] [F] à payer à la SARL B&C Promotion et à Monsieur [R] [B] la somme de 2.500 € chacun sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile.
Condamner Monsieur [M] [F] aux entiers dépens.
M. [R] [B] et la société B&C Promotion soutiennent en réponse que :
- au contraire, M. [F] a été écarté de la société La Parisienne en raison de malversations commises et ils contestent la valeur probante des attestations produites par celui-ci,
- le juge des référés a valablement rejeté sa compétence en l'état de contestations sérieuses ; M. [B] a parfaitement géré la société B&C Promotion depuis sa création et aucun acte frauduleux n'est établi ; l'expertise est toujours en cours,
- ils contestent les allégations de M. [F], lequel est seul à l'origine de la mésentente entre les associés en raison de ses détournements au sein de la société La Parisienne et de ses abus au sein de la société B&C Promotion ; M. [F] n'a pas récupéré la convocation pour l'assemblée générale 2008 et tous les autres procès-verbaux sont produits, attestant de l'absence de difficultés ; aucun des autres griefs, tenant notamment à la constitution d'une servitude ou à la vente à vil prix de certains biens immobiliers n'est établi,
- des tentatives de résolution amiable ont été entreprises et l'expertise est toujours en cours.
MOTIFS
Sur la demande de révocation de l'ordonnance de clôture :
Par conclusions de procédure enregistrées le 14 mai 2024 les intimés ont sollicité la révocation de l'ordonnance de clôture rendue le 6 mai 2024, la réouverture des débats et le renvoi de l'affaire en faisant valoir que l'appelant avait conclu pour la dernière fois le 3 mai 2024, soit trois jours avant la clôture, faisant obstacle à ce qu'ils prennent connaissance des nouveaux arguments soulevés et puissent y répliquer dans les délais.
Par conclusions de procédure enregistrées le 18 mai 2024 l'appelant s'oppose à l'ensemble des demandes des intimés en faisant observer que ses conclusions sont antérieures à l'ordonnance de clôture, qu'elles ne contiennent aucune prétention nouvelle et développent des moyens déjà articulés dans les premières conclusions.
Sur ce, en application de l'article 16 du code de procédure civile le juge, doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction. Il ne peut retenir, dans sa décision, les moyens, les explications et les documents invoqués ou produits par les parties que si celles-ci ont été à même d'en débattre contradictoirement. Il ne peut fonder sa décision sur les moyens de droit qu'il a relevés d'office sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations.
En outre, conformément à l'article 15 du même code, les parties doivent se faire connaître mutuellement en temps utile les moyens de fait sur lesquels elles fondent leurs prétentions, les éléments de preuve qu'elles produisent et les moyens de droit qu'elles invoquent afin que chacune soit à même d'organiser sa défense.
En l'espèce, en prenant des écritures le 3 mai 2024, soit trois jours avant l'ordonnance de clôture, pour répliquer aux conclusions prises par les intimés dès le 12 décembre 2023, l'appelant n'a pas permis à la partie adverse de prendre connaissance en temps utile des nouveaux développements et pièces transmis par lesdites conclusions.
Si l'appelant indique qu'il n'a formulé aucune prétention nouvelle, il n'en demeure pas moins qu'il reconnaît avoir développé des moyens et transmis cinq pièces nouvelles, nonobstant le fait que certaines de ces pièces seraient déjà en possession des intimés.
En conséquence, considérant qu'aucun élément ne justifie la tardiveté des dernières conclusions prises par l'appelant, il y a lieu d'écarter des débats les conclusions prises le 3 mai 2024 afin d'assurer le nécessaire respect du contradictoire et d'écarter pour les mêmes motifs les pièces numérotées 47 à 51 incluses.
Les demandes de révocation de l'ordonnance de clôture et de réouverture des débats sont dès lors sans objet.
Sur la désignation d'un administrateur provisoire :
Aux termes de l'article 872 du code de procédure civile, dans tous les cas d'urgence, le président du tribunal de commerce peut, dans les limites de la compétence du tribunal, ordonner en référé toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l'existence d'un différend.
Par ailleurs, en application de l'article 873 du même code, le président peut, dans les mêmes limites et même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.
L'urgence ne constitue pas une condition nécessaire à l'application de l'alinéa 1 de l'article 873 du code de procédure civile dès lors que celle-ci se déduit de l'imminence du dommage invoqué et du caractère actuel du trouble manifestement illicite.
De même, les mesures conservatoires ou de remise en état peuvent être ordonnées, même en présence d'une contestation sérieuse, de sorte que les moyens soulevés à ce titre sont inopérants.
Au visa de l'article 873 du code de procédure civile la désignation d'un administrateur provisoire est une mesure exceptionnelle qui suppose que soit rapportée la preuve de circonstances rendant impossible le fonctionnement normal de la société et menaçant celle-ci d'un péril imminent.
Ainsi, le désaccord entre associés, sauf si le fonctionnement des organes sociaux est entravé et si une atteinte précise aux intérêts de la société sont établis, est insuffisant à justifier la désignation d'un administrateur provisoire.
En l'espèce, il apparaît que les deux associés de la société B&C Promotion, M. [R] [B] et M. [M] [F] se trouvent depuis plusieurs années dans une situation conflictuelle avérée, M. [R] [B], gérant, reprochant notamment à M. [M] [F] des faits de malversations au sein de la société La Parisienne, et l'absence de régularisation d'un compte-courant d'associé débiteur, tandis que M. [M] [F] met en exergue la dilution du capital social de la société au profit de M. [R] [B] et d'une autre société lui appartenant, MF Invest, ainsi que l'opacité et la mauvaise gestion de M. [R] [B], favorisant la société La Parisienne, par le biais de la création d'une servitude de passage et la vente de parcelles à des prix minorés.
Cette mésentente est en outre exacerbée par le processus inachevé de cession des parts entre les associés, initié en 2020, et matérialisé par la signature d'un protocole le 12 avril 2022, ayant placé M. [M] [F] dans une position d'associé minoritaire en l'attente de l'issue de la seconde tranche de cession des parts de la société B&C Promotion.
Par ailleurs si des assemblées générales ont eu lieu au titre des exercices 2017, 2018, 2019, 2020 et 2021 (procès-verbal dressé par huissier le 30 novembre 2018, procès-verbal du 17 février 2020, procès-verbal d'assemblée générale du 21 février 2022), de nombreux incidents ont émaillé l'organisation de ces assemblées, nécessitant le recours au tribunal de commerce afin d'obtenir des prorogations de délais, et la nomination de commissaires de justice, outre que certains comptes n'ont pas été approuvés par M. [M] [F] en l'état des dissensions.
Ces dysfonctionnements attestent d'une situation de blocage, dont l'ampleur est telle à ce jour que la pérennité de l'entreprise est susceptible d'être engagée, étant relevé qu'au-delà des difficultés d'organisation et de tenue des assemblées générales, la société B&C Promotion a fait l'objet d'une radiation d'office effectuée le 17 mars 2022 par le greffe en l'absence d'approbation des comptes. L'extrait du registre du commerce et des sociétés produit aux débats atteste de sa réinscription selon un extrait kbis daté du 14 mai 2023, soit plus d'une année après.
Il apparaît au surplus que la derrière assemblée générale, qui s'est tenue le 18 octobre 2023, dont la retranscription a été effectuée par procès-verbal de maître [Z], commissaire de justice, sur ordonnance du président du tribunal de commerce de Toulon, vient confirmer la situation délétère entre les associés et le risque encouru par la société du fait de la situation de blocage. Le commissaire de justice note ainsi qu'à l'issue de leurs échanges M. [R] [B] a donné lecture des résolutions mais n'a pas permis à M. [M] [F] de prendre part au vote. Ces circonstances sont de nature à fragiliser encore davantage les choix faits par M. [R] [B] au regard de l'absence de légitimité du vote.
Il résulte de ces éléments que si le péril imminent ne résulte pas des résultats de la société, lesquels seraient excédentaires, à l'exception de l'exercice 2019, en revanche, l'affectio societatis, fondant toute association et lui permettant de poser les bases d'une entente mutuelle fondée sur le respect et la confiance, est désormais absent de la société B&C Promotion, entravant son organisation et la prise de décisions dans le seul intérêt de la société.
De surcroît, la cession de parts envisagée, laquelle aurait permis de trouver une issue au conflit opposant les associés, se trouve dans une situation de blocage s'agissant de sa dernière phase, blocage qui perdure depuis l'année 2020 et que la désignation d'un expert par ordonnance du 27 octobre 2021 n'a pas permis à ce jour de faciliter, les notes émises par l'expert attestant d'un défaut de coopération du gérant (non-communication de documents dans les délais, non-présentation à une réunion).
Les mesures mises en place ont dès lors atteint leurs limites en l'état de la cristallisation du conflit, nécessitant la nomination d'un administrateur provisoire, dont la mission doit être limitée à une durée de six mois dans un premier temps, et n'a pas vocation à suppléer l'expertise judiciaire.
L'ordonnance doit donc être infirmée en ce que le juge des référés s'est déclaré incompétent, motifs pris de l'absence d'urgence, dès lors que le premier juge, saisi de mesures conservatoires ou de remise en état, a ajouté une condition ne figurant pas aux dispositions de l'article 873 alinéa 1 du code de procédure civile.
En tout état de cause, la nomination d'un administrateur s'impose en l'état des motifs susvisés.
Sur les frais et dépens :
L'équité commande de laisser à chaque partie la charge de ses frais et dépens, tant de première instance que d'appel.
PAR CES MOTIFS
La cour,
Rejette les demandes de révocation de l'ordonnance de clôture, de réouverture des débats et de renvoi de l'affaire formées par M. [R] [B] et la société B&C Promotion,
Écarte des débats les conclusions prises le 3 mai 2024 par M. [M] [F],
Écarte des débats les pièces numérotées 47 à 51 incluses communiquées par M. [M] [F] aux termes de ses conclusions du 3 mai 2024,
Infirme l'ordonnance rendue le 19 juillet 2023 par le juge des référés du tribunal de commerce de Toulon,
Statuant à nouveau,
Désigne la Selarl [X] [J] et associés, prise en la personne de Maître [X] [J], en qualité d'administrateur provisoire de la société B&C Promotion avec pour mission de:
- Se faire remettre par toutes personnes l'ensemble des documents et archives de la société nécessaires à sa mission,
- Administrer la société activement et passivement et plus généralement faire toutes opérations conformes aux statuts et entrant dans l'objet social de la société et permettant la conservation du patrimoine et le respect des obligations légales,
- Prendre toutes mesures utiles dans l'intérêt de la société,
- Rechercher toutes solutions envisageables aux fins de remédier à la situation actuelle de blocage et de paralysie, notamment avec l'aboutissement du rachat des parts sociales de M. [M] [F],
- Représenter la société aux opérations d'expertise en cours
Dit que cette mission est fixée à six mois, à charge pour les parties d'en solliciter le cas échéant le renouvellement auprès du tribunal de commerce de Toulon si les circonstances le justifient,
Fixe la rémunération de la Selarl [X] [J] et associés, prise en la personne de Maître [X] [J], à 3000 euros à titre provisionnel,
Dit que la rémunération de l'administrateur provisoire sera prise en charge par la société B&C Promotion,
Dit que l'administrateur provisoire devra rendre compte de sa mission au président du tribunal de commerce de Toulon ou à son délégataire, et solliciter la taxation de ses honoraires,
Dit que chaque partie conservera la charge de ses frais et dépens, de première instance et d'appel.
LA GREFFIERE, LA PRESIDENTE,
Chambre 3-1
ARRÊT AU FOND
DU 11 SEPTEMBRE 2024
N° 2024/ 168
Rôle N° RG 23/10924 - N° Portalis DBVB-V-B7H-BLZHX
[M] [F]
C/
[R] [B]
S.A.R.L. B&C PROMOTION
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
Me Charles TOLLINCHI
Me Philippe MEIFFRET-DELSANTO
Décision déférée à la Cour :
Ordonnance du Tribunal de Commerce de TOULON en date du 19 Juillet 2023 enregistrée au répertoire général sous le n° 2023R00028.
APPELANT
Monsieur [M] [F]
né le [Date naissance 1] 1978 à [Localité 7]
de nationalité Française,
demeurant [Adresse 3]
[Localité 5]
représenté par Me Charles TOLLINCHI de la SCP CHARLES TOLLINCHI - CORINNE PERRET-VIGNERON, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE
INTIMES
Monsieur [R] [B]
né le [Date naissance 2] 1981 à [Localité 8],
demeurant [Adresse 6]
[Localité 4]
représenté par Me Philippe MEIFFRET-DELSANTO de la SELARL CONSULTIS AVOCATS, avocat au barreau de TOULON, substitué par de Me Clémence LE GUEN GOZLAN, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, avocat plaidant.
S.A.R.L. B&C PROMOTION,
demeurant [Adresse 6]
[Localité 4]
représentée par Me Philippe MEIFFRET-DELSANTO de la SELARL CONSULTIS AVOCATS, avocat au barreau de TOULON substitué par Me Clémence LE GUEN GOZLAN, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, avocat plaidant.
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 23 Mai 2024 en audience publique. Conformément à l'article 804 du code de procédure civile, Mme Stéphanie COMBRIE a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.
La Cour était composée de :
Madame Valérie GERARD, Présidente de chambre
Madame Stéphanie COMBRIE, Conseillère
Mme Marie-Amélie VINCENT, Conseillère
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Madame Marielle JAMET
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 11 Septembre 2024.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 11 Septembre 2024,
Signé par Madame Valérie GERARD, Présidente de chambre et Madame Elodie BAYLE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
EXPOSE DU LITIGE
En 2011, M. [R] [B] et M. [M] [F] ont constitué à parts égales la société B&C Promotion, société à responsabilité limitée, dont M. [R] [B] est le gérant.
La société a une activité de marchand de biens et de lotisseur.
Elle est devenue par ailleurs l'unique associée de la société La Parisienne, société spécialisée dans la restauration rapide, dont M. [R] [B] est également le gérant.
En l'état des dissensions intervenues entre les associés, M. [M] [F] a souhaité se retirer de la société B&C Promotion.
Ainsi, un premier protocole de cession a été signé le 23 janvier 2020 mais n'a pas été suivi d'effet et le 12 avril 2022 les associés ont convenu de la cession, dans un premier temps, de 10 des 50 parts de M. [M] [F] au profit de la société MF Invest, détenue par M. [R] [B] et son épouse, et dans un second temps de la cession des 40 parts sociales restantes.
La première cession est intervenue mais la deuxième, prévue avant le 30 octobre 2022, n'a jamais eu lieu de sorte que M. [M] [F] est actuellement associé minoritaire à hauteur de 40%.
Une expertise judiciaire a été ordonnée le 27 octobre 2021 par le tribunal de commerce de Toulon, désignant M. [V].
Le 7 mars 2023, invoquant la gestion anormale de la société B&C Promotion, M. [M] [F] a sollicité la désignation d'un administrateur provisoire auprès du juge des référés du tribunal de commerce de Toulon sur le fondement des articles 872 et 873 du code de procédure civile en visant l'urgence et le péril caractérisé.
Par ordonnance en date du 19 juillet 2023 le juge des référés du tribunal de commerce de Toulon :
- s'est déclaré incompétent,
- a renvoyé les parties à trouver une solution amiable et à se pourvoir comme il appartiendra,
- a débouté les parties de leurs demandes respectives au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- a laissé à M. [M] [F] les entiers dépens de la procédure
-------
Par acte en date du 16 août 2023 M. [M] [F] a interjeté appel de la décision.
-------
Par conclusions enregistrées par voie dématérialisée le 12 novembre 2023, auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé détaillé de ses prétentions et moyens, M. [M] [F] demande à la cour de :
Infirmer en toutes ses dispositions de l'ordonnance de référé rendue par le Président du Tribunal de Commerce de Toulon en date du 19.07.2023 en ce que :
- Le juge s'est déclaré incompétent
- A renvoyé les parties à trouver une solution amiable et à se pourvoir comme il appartiendra
- Débouté les parties de leurs demandes respectives au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;
- Débouté Monsieur [F] de toutes ses autres demandes, fins et dépens ;
- Laissé à la charge de Monsieur [F] les entiers dépens ;
Et statuant à nouveau :
Vu l'urgence évidente et le péril caractérisé ;
Vu l'intérêt social de la SARL B&C Promotion ;
Vu la jurisprudence ;
Désigner tel Administrateur Provisoire qu'il plaira à la Cour avec les pouvoirs de gestion et d'administration les plus étendus comprenant notamment les missions de :
- Représenter la société B&C Promotion ;
- Prendre toutes les décisions rendues nécessaires par l'état de la société et dans l'intérêt de cette dernière en convoquant au besoin les assemblées générales nécessaires ;
- Représenter la société B&C Promotion tout au long de l'Expertise Judiciaire ordonnée par le Tribunal ;
- Dresser un bilan du fonctionnement de la société et des irrégularités éventuellement constatées ;
- Procéder à l'inventaire des actifs matériels et immatériels de la SARL B&C Promotion.
Mettre à la charge de la société B&C Promotion la rémunération de l'administrateur ;
Condamner Monsieur [B] à payer à Monsieur [M] [F], la somme de 4.000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;
Condamner Monsieur [B] aux entiers dépens.
Au soutien de son appel, M. [M] [F] fait valoir que :
- la société B&C Promotion rencontre des difficultés de gestion depuis 2016 avec la création de la société La Parisienne (difficultés d'approbation des comptes 2017, 2018, 2022, radiation d'office de la société B&C Promotion notamment),
- contrairement à ce qu'a estimé le juge des référés l'urgence est caractérisée compte-tenu des problématiques et de l'opacité de la gestion effectuée par M. [B], laquelle est gravement préjudiciable à la société B&C Promotion ; il existe un péril imminent dès lors que M. [B] méconnaît les règles légales du droit des sociétés et privilégie ses intérêts personnels et ceux de la société MF Invest au détriment de la société B&C Promotion,
- la désignation d'un administrateur provisoire suppose de rapporter la preuve de circonstances rendant impossible le fonctionnement normal de la société et menaçant celle-ci d'un péril grave ; en l'espèce, les associés sont dans une situation de blocage et l'intérêt social en pâtit (protocoles de cession en échec, expertise judiciaire bloquée)
------
Par conclusions enregistrées par voie dématérialisée le 12 décembre 2023 auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé détaillé de leurs prétentions et moyens, M. [R] [B] et la société B&C Promotion demandent à la cour de :
A titre principal :
Vu l'article 872 du Code de Procédure Civile ;
Vu les moyens qui précèdent et les pièces versées aux débats,
Confirmer dans toutes ses dispositions l'ordonnance rendue le 19 juillet 2023 par Monsieur Bruno Adet, Juge près le Tribunal de Commerce de Toulon.
Condamner Monsieur [M] [F] à payer à la SARL B&C Promotion et à Monsieur [R] [B] la somme de 2.500 € chacun sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile.
Condamner Monsieur [M] [F] aux entiers dépens.
M. [R] [B] et la société B&C Promotion soutiennent en réponse que :
- au contraire, M. [F] a été écarté de la société La Parisienne en raison de malversations commises et ils contestent la valeur probante des attestations produites par celui-ci,
- le juge des référés a valablement rejeté sa compétence en l'état de contestations sérieuses ; M. [B] a parfaitement géré la société B&C Promotion depuis sa création et aucun acte frauduleux n'est établi ; l'expertise est toujours en cours,
- ils contestent les allégations de M. [F], lequel est seul à l'origine de la mésentente entre les associés en raison de ses détournements au sein de la société La Parisienne et de ses abus au sein de la société B&C Promotion ; M. [F] n'a pas récupéré la convocation pour l'assemblée générale 2008 et tous les autres procès-verbaux sont produits, attestant de l'absence de difficultés ; aucun des autres griefs, tenant notamment à la constitution d'une servitude ou à la vente à vil prix de certains biens immobiliers n'est établi,
- des tentatives de résolution amiable ont été entreprises et l'expertise est toujours en cours.
MOTIFS
Sur la demande de révocation de l'ordonnance de clôture :
Par conclusions de procédure enregistrées le 14 mai 2024 les intimés ont sollicité la révocation de l'ordonnance de clôture rendue le 6 mai 2024, la réouverture des débats et le renvoi de l'affaire en faisant valoir que l'appelant avait conclu pour la dernière fois le 3 mai 2024, soit trois jours avant la clôture, faisant obstacle à ce qu'ils prennent connaissance des nouveaux arguments soulevés et puissent y répliquer dans les délais.
Par conclusions de procédure enregistrées le 18 mai 2024 l'appelant s'oppose à l'ensemble des demandes des intimés en faisant observer que ses conclusions sont antérieures à l'ordonnance de clôture, qu'elles ne contiennent aucune prétention nouvelle et développent des moyens déjà articulés dans les premières conclusions.
Sur ce, en application de l'article 16 du code de procédure civile le juge, doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction. Il ne peut retenir, dans sa décision, les moyens, les explications et les documents invoqués ou produits par les parties que si celles-ci ont été à même d'en débattre contradictoirement. Il ne peut fonder sa décision sur les moyens de droit qu'il a relevés d'office sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations.
En outre, conformément à l'article 15 du même code, les parties doivent se faire connaître mutuellement en temps utile les moyens de fait sur lesquels elles fondent leurs prétentions, les éléments de preuve qu'elles produisent et les moyens de droit qu'elles invoquent afin que chacune soit à même d'organiser sa défense.
En l'espèce, en prenant des écritures le 3 mai 2024, soit trois jours avant l'ordonnance de clôture, pour répliquer aux conclusions prises par les intimés dès le 12 décembre 2023, l'appelant n'a pas permis à la partie adverse de prendre connaissance en temps utile des nouveaux développements et pièces transmis par lesdites conclusions.
Si l'appelant indique qu'il n'a formulé aucune prétention nouvelle, il n'en demeure pas moins qu'il reconnaît avoir développé des moyens et transmis cinq pièces nouvelles, nonobstant le fait que certaines de ces pièces seraient déjà en possession des intimés.
En conséquence, considérant qu'aucun élément ne justifie la tardiveté des dernières conclusions prises par l'appelant, il y a lieu d'écarter des débats les conclusions prises le 3 mai 2024 afin d'assurer le nécessaire respect du contradictoire et d'écarter pour les mêmes motifs les pièces numérotées 47 à 51 incluses.
Les demandes de révocation de l'ordonnance de clôture et de réouverture des débats sont dès lors sans objet.
Sur la désignation d'un administrateur provisoire :
Aux termes de l'article 872 du code de procédure civile, dans tous les cas d'urgence, le président du tribunal de commerce peut, dans les limites de la compétence du tribunal, ordonner en référé toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l'existence d'un différend.
Par ailleurs, en application de l'article 873 du même code, le président peut, dans les mêmes limites et même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.
L'urgence ne constitue pas une condition nécessaire à l'application de l'alinéa 1 de l'article 873 du code de procédure civile dès lors que celle-ci se déduit de l'imminence du dommage invoqué et du caractère actuel du trouble manifestement illicite.
De même, les mesures conservatoires ou de remise en état peuvent être ordonnées, même en présence d'une contestation sérieuse, de sorte que les moyens soulevés à ce titre sont inopérants.
Au visa de l'article 873 du code de procédure civile la désignation d'un administrateur provisoire est une mesure exceptionnelle qui suppose que soit rapportée la preuve de circonstances rendant impossible le fonctionnement normal de la société et menaçant celle-ci d'un péril imminent.
Ainsi, le désaccord entre associés, sauf si le fonctionnement des organes sociaux est entravé et si une atteinte précise aux intérêts de la société sont établis, est insuffisant à justifier la désignation d'un administrateur provisoire.
En l'espèce, il apparaît que les deux associés de la société B&C Promotion, M. [R] [B] et M. [M] [F] se trouvent depuis plusieurs années dans une situation conflictuelle avérée, M. [R] [B], gérant, reprochant notamment à M. [M] [F] des faits de malversations au sein de la société La Parisienne, et l'absence de régularisation d'un compte-courant d'associé débiteur, tandis que M. [M] [F] met en exergue la dilution du capital social de la société au profit de M. [R] [B] et d'une autre société lui appartenant, MF Invest, ainsi que l'opacité et la mauvaise gestion de M. [R] [B], favorisant la société La Parisienne, par le biais de la création d'une servitude de passage et la vente de parcelles à des prix minorés.
Cette mésentente est en outre exacerbée par le processus inachevé de cession des parts entre les associés, initié en 2020, et matérialisé par la signature d'un protocole le 12 avril 2022, ayant placé M. [M] [F] dans une position d'associé minoritaire en l'attente de l'issue de la seconde tranche de cession des parts de la société B&C Promotion.
Par ailleurs si des assemblées générales ont eu lieu au titre des exercices 2017, 2018, 2019, 2020 et 2021 (procès-verbal dressé par huissier le 30 novembre 2018, procès-verbal du 17 février 2020, procès-verbal d'assemblée générale du 21 février 2022), de nombreux incidents ont émaillé l'organisation de ces assemblées, nécessitant le recours au tribunal de commerce afin d'obtenir des prorogations de délais, et la nomination de commissaires de justice, outre que certains comptes n'ont pas été approuvés par M. [M] [F] en l'état des dissensions.
Ces dysfonctionnements attestent d'une situation de blocage, dont l'ampleur est telle à ce jour que la pérennité de l'entreprise est susceptible d'être engagée, étant relevé qu'au-delà des difficultés d'organisation et de tenue des assemblées générales, la société B&C Promotion a fait l'objet d'une radiation d'office effectuée le 17 mars 2022 par le greffe en l'absence d'approbation des comptes. L'extrait du registre du commerce et des sociétés produit aux débats atteste de sa réinscription selon un extrait kbis daté du 14 mai 2023, soit plus d'une année après.
Il apparaît au surplus que la derrière assemblée générale, qui s'est tenue le 18 octobre 2023, dont la retranscription a été effectuée par procès-verbal de maître [Z], commissaire de justice, sur ordonnance du président du tribunal de commerce de Toulon, vient confirmer la situation délétère entre les associés et le risque encouru par la société du fait de la situation de blocage. Le commissaire de justice note ainsi qu'à l'issue de leurs échanges M. [R] [B] a donné lecture des résolutions mais n'a pas permis à M. [M] [F] de prendre part au vote. Ces circonstances sont de nature à fragiliser encore davantage les choix faits par M. [R] [B] au regard de l'absence de légitimité du vote.
Il résulte de ces éléments que si le péril imminent ne résulte pas des résultats de la société, lesquels seraient excédentaires, à l'exception de l'exercice 2019, en revanche, l'affectio societatis, fondant toute association et lui permettant de poser les bases d'une entente mutuelle fondée sur le respect et la confiance, est désormais absent de la société B&C Promotion, entravant son organisation et la prise de décisions dans le seul intérêt de la société.
De surcroît, la cession de parts envisagée, laquelle aurait permis de trouver une issue au conflit opposant les associés, se trouve dans une situation de blocage s'agissant de sa dernière phase, blocage qui perdure depuis l'année 2020 et que la désignation d'un expert par ordonnance du 27 octobre 2021 n'a pas permis à ce jour de faciliter, les notes émises par l'expert attestant d'un défaut de coopération du gérant (non-communication de documents dans les délais, non-présentation à une réunion).
Les mesures mises en place ont dès lors atteint leurs limites en l'état de la cristallisation du conflit, nécessitant la nomination d'un administrateur provisoire, dont la mission doit être limitée à une durée de six mois dans un premier temps, et n'a pas vocation à suppléer l'expertise judiciaire.
L'ordonnance doit donc être infirmée en ce que le juge des référés s'est déclaré incompétent, motifs pris de l'absence d'urgence, dès lors que le premier juge, saisi de mesures conservatoires ou de remise en état, a ajouté une condition ne figurant pas aux dispositions de l'article 873 alinéa 1 du code de procédure civile.
En tout état de cause, la nomination d'un administrateur s'impose en l'état des motifs susvisés.
Sur les frais et dépens :
L'équité commande de laisser à chaque partie la charge de ses frais et dépens, tant de première instance que d'appel.
PAR CES MOTIFS
La cour,
Rejette les demandes de révocation de l'ordonnance de clôture, de réouverture des débats et de renvoi de l'affaire formées par M. [R] [B] et la société B&C Promotion,
Écarte des débats les conclusions prises le 3 mai 2024 par M. [M] [F],
Écarte des débats les pièces numérotées 47 à 51 incluses communiquées par M. [M] [F] aux termes de ses conclusions du 3 mai 2024,
Infirme l'ordonnance rendue le 19 juillet 2023 par le juge des référés du tribunal de commerce de Toulon,
Statuant à nouveau,
Désigne la Selarl [X] [J] et associés, prise en la personne de Maître [X] [J], en qualité d'administrateur provisoire de la société B&C Promotion avec pour mission de:
- Se faire remettre par toutes personnes l'ensemble des documents et archives de la société nécessaires à sa mission,
- Administrer la société activement et passivement et plus généralement faire toutes opérations conformes aux statuts et entrant dans l'objet social de la société et permettant la conservation du patrimoine et le respect des obligations légales,
- Prendre toutes mesures utiles dans l'intérêt de la société,
- Rechercher toutes solutions envisageables aux fins de remédier à la situation actuelle de blocage et de paralysie, notamment avec l'aboutissement du rachat des parts sociales de M. [M] [F],
- Représenter la société aux opérations d'expertise en cours
Dit que cette mission est fixée à six mois, à charge pour les parties d'en solliciter le cas échéant le renouvellement auprès du tribunal de commerce de Toulon si les circonstances le justifient,
Fixe la rémunération de la Selarl [X] [J] et associés, prise en la personne de Maître [X] [J], à 3000 euros à titre provisionnel,
Dit que la rémunération de l'administrateur provisoire sera prise en charge par la société B&C Promotion,
Dit que l'administrateur provisoire devra rendre compte de sa mission au président du tribunal de commerce de Toulon ou à son délégataire, et solliciter la taxation de ses honoraires,
Dit que chaque partie conservera la charge de ses frais et dépens, de première instance et d'appel.
LA GREFFIERE, LA PRESIDENTE,