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Décisions

CA Aix-en-Provence, ch. 1-4, 12 septembre 2024, n° 23/03243

AIX-EN-PROVENCE

Arrêt

Autre

CA Aix-en-Provence n° 23/03243

12 septembre 2024

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-4

ARRET SUR RENVOI DE CASSATION

ARRÊT AU FOND

DU 12 SEPTEMBRE 2024

N°2024/

Rôle N° RG 23/03243 - N° Portalis DBVB-V-B7H-BK4MO

S.A. MAAF ASSURANCES

C/

S.C.I. SCI COMPI

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me Romain CHERFILS

Me Sonia OULED-CHEIKH

Arrêt en date du 12 Septembre 2024 prononcé sur saisine de la cour suite à l'arrêt n° 660 F-D rendu par la Cour de Cassation 3ème chambre civile le 21 Septembre 2022, qui a cassé et annulé partiellement l'arrêt n° RG 18/07840, minute N° 2021/69 rendu le 04 mars 2021 par la cour d'appel D'AIX-EN-PROVENCE (Chambre 1.3).

DEMANDERESSE SUR RENVOI DE CASSATION

S.A. MAAF ASSURANCES

, demeurant [Adresse 2]

représentée par Me Romain CHERFILS, avocat au barreau D'AIX-EN-PROVENCE (avocat postulant) et plaidant par Me Laura LOUSSARARIAN de la SELARL PLANTAVIN REINA ET ASSOCIES, avocat au barreau de MARSEILLE,

DEFENDERESSE SUR RENVOI DE CASSATION

S.C.I. COMPI

demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Sonia OULED-CHEIKH, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE (avocat postulant) et plaidant par Me Thierry MUNOS, avocat au barreau de MARSEILLE,

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 21 Mai 2024 en audience publique. Conformément à l'article 804 du code de procédure civile, Madame Inès BONAFOS, Présidente a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Madame Inès BONAFOS, Présidente

Mme Véronique MÖLLER, Conseillère

M. Adrian CANDAU, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Mme Patricia CARTHIEUX.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 12 Septembre 2024.

ARRÊT

FAITS ET PROCÉDURE

La SCI COMPI est propriétaire d'un immeuble situé [Adresse 1].

Par arrêté de permis de construire en date du 13 octobre 2011, [O] [S], en sa qualité de géant de la SCI COMPI, a obtenu l'autorisation de réaliser des travaux de « transformation et surélévation de locaux à usage d'un logement avec démolition d'une partie des locaux existants ».

Le lot gros-'uvre a été confié à l'association EIPS-BTP.

L'association EIPS-BTP a souscrit auprès de MAAF ASSURANCES un contrat d'assurance responsabilité décennale.

Le chantier a débuté le 3 avril 2012.

La réception des travaux a eu lieu le 24 octobre 2012. Elle est concomitante à un procès-verbal de constat d'huissier mentionnant des réserves.

Se plaignant de désordres, par acte d'huissier du 28 décembre 2012, la SCI COMPI a assigné devant le président du Tribunal de Grande Instance de MARSEILLE, statuant en référé l'association EIPS-BTP et la Compagnie d'assurances MMA IARD, aux fins de désignation d'un expert.

Par assignation en intervention du 8 janvier 2013, l'association EIPS-BTP a appelé en la cause son assureur MAAF ASSURANCES, la Société [Adresse 3], sous-traitant.

Par ordonnance du 8 février 2013, le président du tribunal de grande instance de MARSEILLE, a désigné [Z] [M] en qualité d'expert.

Le rapport a été déposé le 13 juillet 2015.

Par jugement du 10 avril 2018, le TGI de Marseille a :

Déclaré le présent jugement commun et opposable à Maître [P] [X], pris en sa qualité de mandataire judiciaire à la liquidation judiciaire de l'association ENTREPRISE D'INSERTION PROFESSIONNELLE ET SOCIALE DU BATIMENT (EIPS-BTP),

Fixé la créance de la SCI COMPI envers l'association ENTREPRISE D'INSERTION PROFESSIONNELLE ET SOCIALE DU BATIMENT (EIPS-BTP), aux sommes suivantes :

- 80266,36 € HT au titre des travaux de reprise, avec actualisation en fonction de la variation de l'index BT01 entre le 13 juillet 2015 et la date du présent jugement,

- 1605,33 € au titre de la souscription d'une assurance dommages-ouvrage,

- 8333 € au titre de l'indemnité de jouissance durant les travaux de reprise,

Dit que les intérêts n'ont pas couru,

Condamné MAAF ASSURANCES, SA, à payer à la SCI COMPI, solidairement avec l'association ENTREPRISE D'INSERTION PROFESSIONNELLE ET SOCIALE DU BATIMENT (EIPS-BTP), ces sommes, jusqu'à hauteur respective de :

- 62 761,36€ HT au titre des travaux de reprise, avec actualisation en fonction de la variation de l'index BT01 entre le 13 juillet 2015 et la date du présent jugement, ladite somme portant ensuite intérêts au taux légal,

- 1255,23 € au titre de la souscription d'une assurance dommages-ouvrage,

- 8333 € au titre de l'indemnité de jouissance durant les travaux de reprise,

Rappelé que ces sommes produiront, de droit, intérêts au taux légal à compter du présent jugement,

Condamné solidairement MAAF ASSURANCES, SA, et l'association ENTREPRISE D'INSERTION PROFESSIONNELLE ET SOCIALE DU BATIMENT (EIPS-BTP) à payer à la SCI COMPI 2500 € au titre des frais irrépétibles,

Débouté les parties de toutes leurs autres demandes,

Ordonné l'exécution provisoire du présent jugement,

Condamné in solidum MAAF ASSURANCES, SA, et l'association ENTREPRISE D'INSERTION PROFESSIONNELLE ET SOCIALE DU BATIMENT (EIPS-BTP) à payer les dépens de l'instance qui comprennent les frais d'expertise,

Dit que les dépens de l'instance seront inscrits en frais privilégiés de la procédure collective.

Par arrêt du 04 mars 2021, la Cour d'appel d'Aix-en-Provence a infirmé le jugement en ce qu'il a condamné la SA MAAF Assurances à payer à la SCI Compi diverses sommes au titre des travaux de reprise, de la souscription d'une assurance dommages-ouvrage, d'une indemnité de jouissance, de frais irrépétibles, et aux dépens ;

Et statuant à nouveau de ces chefs, mise hors de cause la SA MAAF Assurances ;

Confirmé le jugement pour le surplus ;

Dit n'y avoir lieu à faire application de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamné la SCI Compi aux dépens d'appel.

Par arrêt du 21 septembre 2022, la cour de cassation a cassé l'arrêt précité de la cour d'appel d'Aix-en-Provence et renvoyé l'affaire à cette même cour autrement composée considérant au visa des articles 1792 et 1792-6 du code civil que la cour ne pouvait dire que les désordres ne relevaient pas de la garantie décennale mais de la garantie de parfait achèvement et mettre hors de cause la MAAF sans rechercher si les désordres ne s'étaient pas révélés dans toute leur ampleur et leurs conséquences à la suite de la prise de possession de l'ouvrage par la SCI Compi et de la remise du dépôt du rapport d'expertise amiable ayant fait apparaître qu'il existait un risque réel d'affaissement de l'immeuble, mettant en péril sa structure.

Par déclaration au greffe de la cour d'appel d'Aix-en-Provence du 28 février 2023 la S.A. MAAF ASSURANCES a intimé la S.C.I. COMPI pour obtenir la réformation du jugement rendu le 10 avril 2018 par le tribunal de Grande Instance de Marseille, en ce qu'il a :

- Débouté MAAF ASSURANCES de sa demande de mise hors de cause.

- Retenu la mobilisation de la garantie responsabilité civile décennale souscrite auprès de la MAAF ASSURANCES par l'association EIPS BTP.

- Condamnée MAAF ASSURANCES, à payer à la SCI COMPI, solidairement avec l'association ENTREPRISE D'INSERTION PROFESSIONNELLE ET SOCIALE DU BATIMENT (EIPS-BTP), les sommes mises à la charge de cette dernière, jusqu'à hauteur respective de :

° 62.761,36€ HT au titre des travaux de reprise, avec actualisation en fonction de la variation de l'index BT01 entre le 13 juillet 2015 et la date du présent jugement, ladite somme portant ensuite intérêts au taux légal,

° 1.255,23 € au titre de la souscription d'une assurance dommages-ouvrage, ° 8.333 € au titre de l'indemnité de jouissance durant les travaux de reprise.

- Condamné solidairement MAAF ASSURANCES et l'association ENTREPRISE D'INSERTION PROFESSIONNELLE ET SOCIALE DU BATIMENT (EIPS-BTP) à payer à la SCI COMPI 2500 € au titre des frais irrépétibles.

- Ordonné l'exécution provisoire du présent jugement.

- Condamné in solidum MAAF ASSURANCES et l'association ENTREPRISE D'INSERTION PROFESSIONNELLE ET SOCIALE DU BATIMENT (EIPS-BTP) à payer les dépens de l'instance qui comprennent les frais d'expertise.

Par conclusions du 25 avril 2024, LA MAAF ASSURANCES demande à la Cour :

INFIRMER le Jugement rendu le 10 avril 2018 par le Tribunal de Grande Instance de MARSEILLE en ce qu'il a retenu la mobilisation de la garantie responsabilité civile décennale souscrite auprès de MAAF ASSURANCES par l'association EIPS BTP, et rejeté sa demande de mise hors de cause

STATUANT A NOUVEAU,

Vu les articles 1792 et suivants du Code civil,

Vu la jurisprudence de la Cour de cassation,

Vu le contrat d'assurance,

Vu le procès-verbal de réception avec réserves,

Vu le rapport d'expertise judiciaire de Madame [M],

JUGER que sur 29 griefs allégués par la SCI COMPI, 20 étaient apparus avant la réception et avaient fait l'objet de réserves lors de la réception intervenue le 24 octobre 2012, et 6 ont été écartés comme sans objet par l'Expert judiciaire,

JUGER que seul l'entrepreneur est tenu de réparer les désordres apparus dans le délai de la garantie de parfait achèvement ou ayant fait l'objet de réserves à la réception,

JUGER que MAAF ASSURANCES, prise en sa qualité d'assureur décennal de l'association EIPS BTP, ne saurait couvrir les désordres réservés à la réception,

JUGER que les griefs réservés ne sont pas manifestés dans toute leur ampleur postérieurement à la réception, de sorte qu'ils ne relèvent pas, en l'absence d'évolution, de la garantie responsabilité civile décennale souscrite auprès de MAAF ASSURANCES,

En conséquence,

DEBOUTER la SCI COMPI de ses demandes en tant que formulées à l'encontre de MAAF ASSURANCES, dans la mesure où ses garanties ne sauraient être mobilisables en présence de désordres réservés.

METTRE HORS DE CAUSE MAAF ASSURANCES.

' SUBSIDIAIREMENT,

JUGER que 3 griefs retenus par l'Expert judiciaire et n'ayant pas fait l'objet de réserves sont de nature purement esthétique et n'emportent aucune conséquence quant à la solidité de l'ouvrage ou son impropriété à destination,

JUGER que les points 1.7, 2.1 et 6.1 ne constituent pas des désordres de nature décennale, En conséquence,

DEBOUTER la société SCI COMPI de ses demandes en tant que formulées à l'encontre de MAAF ASSURANCES, dans la mesure où ses garanties ne sauraient être mobilisables en présence de désordres ne relevant pas de la nature décennale.

METTRE HORS DE CAUSE MAAF ASSURANCES.

' PLUS SUBSIDIAIREMENT,

Vu l'article 5 des conventions spéciales n°5 contenues dans les Conditions Générales du contrat d'assurance MULTIPRO souscrit par l'association EIPS BTP auprès de MAAF ASSURANCES,

JUGER que les conventions spéciales applicables au contrat souscrit par l'association EIPS BTP auprès de MAAF ASSURANCES contiennent une exclusion de garantie pour les travaux exécutés par l'assuré et au demeurant pour les désordres réservés à la réception,

En conséquence,

JUGER que MAAF ASSURANCES est fondée à faire état des exclusions de garantie contractuellement prévues,

REJETER les demandes en tant que formulées à l'encontre de MAAF ASSURANCES.

METTRE HORS DE CAUSE MAAF ASSURANCES.

' TRES SUBSIDIAIREMENT,

Vu la jurisprudence constante de la Cour de Cassation en matière de non-assurance pour activités non déclarées,

JUGER que l'association EIPS BTP n'a pas souscrit auprès de MAAF ASSURANCES l'activité «maîtrise d''uvre »,

JUGER que les travaux réalisés par l'association EIPS BTP ne correspondent pas aux activités souscrites au contrat d'assurance,

En conséquence,

JUGER que MAAF ASSURANCES est fondée à opposer une non-garantie,

REJETER l'ensemble des demandes de la SCI COMPI en tant que dirigées à l'encontre de MAAF ASSURANCES,

METTRE HORS DE CAUSE MAAF ASSURANCES,

EN TOUT ETAT DE CAUSE

JUGER que les garanties souscrites auprès de MAAF ASSURANCES, tant sur le volet responsabilité civile décennale que sur le volet responsabilité civile professionnelle, définissent le préjudice immatériel garanti comme un préjudice pécuniaire subi par un tiers au contrat,

JUGER que le préjudice de jouissance allégué par la SCI COMPI ne constitue pas un préjudice pécuniaire au sens du contrat d'assurance souscrit auprès de MAAF ASSURANCES,

Dès lors,

REJETER toute demande en tant que dirigée à l'encontre de MAAF ASSURANCES au titre du préjudice de jouissance prétendument subi par la SCI COMPI,

CONDAMNER la SCI COMPI à verser à MAAF ASSURANCES la somme de 5.000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile au titre de la première instance, ainsi que la somme de 5.000 € au titre des frais irrépétibles en cause d'appel, outre les entiers dépens de l'instance distraits au profit de Maître Romain CHERFILS de la SELARL LEXAVOUE AIX-EN-PROVENCE, Avocat au Barreau d'AIX EN PROVENCE, conformément aux termes de l'article 699 du Code de Procédure Civile.

L'assureur expose qu'il n'est pas contesté que l'association EIPS-BTP était uniquement en charge du lot gros-'uvre , qu' un procès-verbal de constat préalable à la réception des travaux a été établi le 24 octobre 2012 mentionnant un certain nombre de réserves , que ce document est signé par l'association EIPS-BTP en qualité de maître d''uvre activité non garantie par la MAAF , qu'au regard de l'arrêt de la cour de cassation la cour de renvoi est saisie de la question de la mise hors de cause de la MAAF , que ses demandes portant sur la mobilisation de sa garantie sont parfaitement recevables .

La réception, lorsqu'elle est prononcée avec réserves, empêche toute mobilisation de l'assurance responsabilité civile décennale au titre des désordres réservés, sauf à ce que ces derniers se soient révélés dans toute leur ampleur ultérieurement, ce qui n'est pas le cas en l'espèce, les désordres étant pleinement apparents et connus du maître d'ouvrage à la réception.

Dans le cadre de ses opérations d'expertise judiciaire, Madame [M] a examiné les différents documents qui lui étaient soumis, à savoir le procès-verbal de réception avec réserves, le rapport [Y] et les deux procès-verbaux de constat d'Huissier et, après avoir examiné les désordres n'a noté aucune évolution et ne retient aucun désordre de nature décennale.

Contrairement à ce qu'indique la cour de cassation, aucun risque réel d'affaissement ou autre désordre de cet ordre n'a été constaté par l'Expert judiciaire ni démontré ou même allégué a posteriori par la SCI COMPI.

La haute cour a jugé récemment que les vices devaient être retenus comme connus des maîtres d'ouvrage dans toute leur ampleur et leurs conséquences dommageables lorsque les désordres sont prévisibles ou en germe (Cass. 3e civ., 25 mai 2023, n° 22-10.734).

Ainsi, la garantie au titre de la responsabilité décennale de la MAAF ASSURANCES n'est pas mobilisable dès lors que les désordres ont été réservés lors de la réception.

Ensuite, les désordres constitués par l'absence de joint des fenêtres, la surépaisseur du plancher et aux trémies pour escaliers étaient apparents et /ou constitués des non finitions.

Enfin, l'association étant intervenue en tant que maître d''uvre, la garantie de la MAAF n'est pas due s'agissant d'une activité non assurée conformément à la jurisprudence applicable en la matière :

Si le contrat d'assurance de responsabilité obligatoire que doit souscrire tout constructeur ne peut comporter les clauses d'exclusion autres que celles prévues à l'article A.243-1 du Code des Assurances, la garantie de l'assureur ne concerne que le secteur d'activité professionnelle déclaré par le constructeur.

Enfin, le contrat d'assurance Responsabilité Civile « classique » ne couvre pas les travaux réalisés par l'assuré.

A titre complémentaire, l'assureur fait valoir que le dommage immatériel au sens du contrat d'assurance doit être un préjudice pécuniaire subi par le tiers au contrat, ce qui n'est pas le cas du préjudice de jouissance invoqué par la partie adverse.

Par conclusions du 15 mai 2024, la SCI COMBI demande à la Cour :

Vu les articles 1792 et suivants du Code Civil,

Vu l'arrêt du 21 septembre 2022 de la Cour de Cassation

Vu le procès-verbal de réception avec réserves

Vu le rapport d'expertise déposé par Madame [Z] [M] en date du 13 juillet 2015

CONFIRMER le jugement rendu par le Tribunal de Grande Instance de Marseille le 10 avril 2018 en ce qu'il a débouté MAAF ASSURANCES de sa demande de mise hors de cause et qu'il a retenu la mobilisation de sa garantie décennale souscrite par l'association EIPS-BTP.

En tout état de cause :

JUGER que les désordres apparents lors de la réception de l'ouvrage se sont révélés dans toute leur ampleur et leurs conséquences après cette réception ;

JUGER que les désordres réservés lors de la réception ne font pas obstacle à la responsabilité décennale du constructeur EIPS-BTP,

JUGER que MAAF ASSURANCES est assureur décennal du constructeur EIPS-BTP,

DEBOUTER MAAF ASSURANCES de se demande principale

JUGER que les griefs 1.7, 2.1 et 6.1 sont autant de désordres apparents réservés lors de la réception,

JUGER que ces désordres sont de nature décennale,

En tout état de cause :

JUGER que le jugement rendu par le Tribunal de Grande Instance de Marseille le 10 avril 2018 bénéficie de l'autorité de la chose définitivement jugé sur ce point

DECLARER irrecevable cette demande de MAAF ASSURANCES,

DEBOUTER MAAF ASSURANCES de sa demande subsidiaire

JUGER que les éventuelles exclusions de garantie au titre de la responsabilité contractuelle de EIPS BTP ne concernent pas la responsabilité légale décennale,

JUGER que les éventuelles exclusions de garantie au titre de la responsabilité contractuelle de EIPS BTP ne font pas obstacles à la responsabilité décennale du constructeur EIPS-BTP et à sa garantie par MAAF ASSURANCES assureur décennal du constructeur EIPS-BTP,

En tout état de cause :

JUGER que le jugement rendu par le Tribunal de Grande Instance de Marseille le 10 avril 2018 bénéficie de l'autorité de la chose définitivement jugé sur ce point

DECLARER irrecevable cette demande de MAAF ASSURANCES,

DEBOUTER MAAF ASSURANCES de sa demande plus subsidiaire

JUGER que les désordres affectant les travaux de gros 'uvre (maçonnerie, charpente-couverture, menuiseries), effectués dans le cadre du marché de travaux signé par EIPS-BTP, relèvent des activités garanties par MAAF ASSURANCES,

En tout état de cause :

JUGER que le jugement rendu par le Tribunal de Grande Instance de Marseille le 10 avril 2018 bénéficie de l'autorité de la chose définitivement jugé sur ce point

DECLARER irrecevable cette demande de MAAF ASSURANCES,

DEBOUTER MAAF ASSURANCES de sa demande très subsidiaire

En conséquence,

CONFIRMER le jugement du 10 avril 2018 en ce qu'il a CONDAMNE MAAF ASSURANCES à payer à la SCI COMPI, solidairement, avec l'association EIPS BTP :

- 62.761,36€ HT au titre des travaux de reprise, avec actualisation

- 1.255,23€ au titre de la souscription d'une assurance dommages ouvrage,

- 8.333€ au titre de l'indemnité de jouissance durant les travaux de reprise.

CONDAMNER MAAF ASSURANCES à payer à la SCI COMPI 5.000€ au titre des frais irrépétibles

CONDAMNER MAAF ASSURANCES aux entiers dépens,

L'intimé expose qu'aux termes des articles 1792, 1792-4-2, 1792-6 et de la jurisprudence ,le dommage signalés à la réception s'est révélé dans toute son ampleur postérieurement, que l'arrêt de la cour de cassation du 21/09/2022 s'inscrit dans la lignée de cette jurisprudence , que des réserves faites lors des opérations préalables à la réception le 24/12/2012 n'ont pas été levées , que ce n'est qu'après la prise de possession de l'ouvrage et l'intervention du rapport technique du 21/11/2012 que le risque d'affaissement de l'immeuble mettant en péril sa structure a été relevé motivant la saisine du juge des référés afin d'expertise.

Elle précise que son dirigeant, monsieur [S], n'avait aucune conscience des atteintes graves résultant des réserves faites à la réception de l'ouvrage.

Elle ajoute que dans le cadre de ses opérations d'expertise, madame [M] a constaté l'impropriété de l'immeuble à sa destination et recommandé la pose d'étais du plancher en urgence pour assurer la sécurité des personnes et des biens puis, dans son rapport du 13/07/2015 des travaux de consolidation de la structure , de reprise de la toiture ,de l'étanchéité ,la mise en place de micropieux sous longrines et recommande la réalisation d'une étude de sol, l'intervention d'un BET technique et d'un maître d''uvre.

En ce qui concerne les désordres qualifiés de sans objet par la MAAF, est irrecevable à contester l'autorité de la chose jugée du jugement sur ce point sur lequel la cour de cassation n'a pas statué.

Contrairement à ce qui est indiqué par la MAAF, les désordres constitués par l'absence de joint des fenêtres, la surépaisseur du plancher et aux trémies pour escaliers ont été retenus par l'expert au titre de la garantie décennale.

Enfin, s'agissant d'une garantie obligatoire, la MAAF ne peut opposer les clauses d'exclusions dont elle se prévaut.

La MAAF ne peut davantage arguer d'une non assurance relative à l'activité maîtrise d''uvre alors que la cour de cassation n'a pas été saisie de cette question et que la décision du juge du fond a autorité de la chose jugée sur ce point.

Il en est de même s'agissant du préjudice de jouissance dont il a été demandé réparation et sur lequel la décision du juge du fond a autorité de la chose jugée sur ce point.

Les parties ont pu être entendues à l'audience des plaidoiries du 21 mai 2024

MOTIVATION

A titre liminaire il convient de relever qu'il n'est pas contesté que l'association Entreprise d'insertion professionnelle et sociale du bâtiment (EIPS-BTP) est assurée auprès de la société MAAF assurances (la société MAAF) pour la garantie décennale et la responsabilité civile professionnelle, que les travaux objet du litige ont été réceptionnés avec réserves le 24 octobre 2012 et des désordres complémentaires ont été décrits par procès-verbaux de constat des 28 novembre et 12 décembre 2012.

Sur la recevabilité du moyen de non assurance de la MAAF

L'arrêt de la cour de cassation en date du 21 septembre 2022 prononce la cassation partielle de l'arrêt de la Cour d'appel d'Aix-en-Provence en date du 04 mars 2021 en ce qu'il met hors de cause la société MAAF, sans rechercher, comme il le lui était demandé, si les désordres ne s'étaient pas révélés dans toute leur ampleur et leurs conséquences à la suite de la prise de possession de l'ouvrage par la SCI Compi et de la remise du dépôt du rapport d'expertise amiable ayant fait apparaître qu'il existait un risque réel d'affaissement de l'immeuble, mettant en péril sa structure

La cour était saisie à l'initiative de la SCI Compi d'un seul moyen faisant grief à l'arrêt de la cour d'appel du 04 mars 2021 de mettre hors de cause la société MAAF, alors que les désordres réservés lors de la réception de l'ouvrage ne font pas obstacle à la responsabilité décennale du constructeur, lorsqu'ils ne se sont révélés dans toute leur ampleur et leurs conséquences qu'après cette réception.

La MAAF fait valoir que la garantie souscrite par l'association EIPS BTP au titre de la responsabilité décennale n'est pas mobilisable, l'entreprise n'étant assurée pour l'activité de maîtrise d''uvre.

La SCI Compi fait valoir que ce chef de demande n'est pas recevable, l'arrêt de la cour d'appel l'ayant écarté et ayant autorité de la chose jugée sur ce point.

Si l'on se réfère au jugement de première instance du Tribunal de Grande Instance de Marseille du 10 avril 2018, la MAAF a saisi cette juridiction du moyen de la non assurance de l'association EIPS BTP pour le marché de travaux objet du litige en raison de l'exercice de l'activité de maître d''uvre.

Le premier juge avait retenu que la garantie de l'assureur devait être mobilisée s'agissant des fautes d'exécution de l'entreprise qui a réalisé les travaux sans respecter les règles de l'art, souvent avec une grande désinvolture.

Si l'on se réfère à l'arrêt de la cour d'appel du 04 mars 2021, la MAAF a saisi cette juridiction d'une demande d'infirmation du jugement en ce qu'il a retenu la mobilisation de la garantie responsabilité civile décennale souscrite auprès de l'assureur par l'association EIPS BTP alors que l'activité maîtrise d''uvre n'était pas déclarée et que les désordres réservés ne sauraient être couverts par la garantie décennale.

Dans le dispositif de son arrêt, la cour a infirmé le jugement en ce qu'il a condamné la SA MAAF Assurances à payer à la SCI Compi diverses sommes au titre de travaux de reprise, de la souscription d'une assurance dommages-ouvrage, d'une indemnité de jouissance, de frais irrépétibles et aux dépens sans autre précision.

Elle indique dans sa motivation « qu'il est inexact de soutenir comme le fait l'assureur que les travaux réalisés par l'association EIPS BTP ne correspondent pas aux activités souscrites au contrat d'assurance alors même que les désordres affectant les travaux de gros-'uvre effectués dans le cadre du marché de travaux signé relèvent des activités garanties.

La garantie décennale de la SA MAAF assurances était donc mobilisable pour ces activités mais tous les désordres dont il est sollicité la reprise ayant été réservés, ils ne relèvent pas de la garantie décennale. »

Ainsi, à la lumière de la motivation, la cour n'a pas infirmé le jugement en ce qu'il a retenu que la garantie de l'assureur est mobilisable du fait que la garantie de l'assureur devait être mobilisée s'agissant des fautes d'exécution de l'entreprise qui a réalisé les travaux sans respecter les règles de l'art.

"Il résulte de la combinaison des articles 625, 631, 634 et 638 du code de procédure civile que la saisine de la juridiction de renvoi a pour objet de poursuivre la procédure antérieure et ne constitue pas un recours (cassation 23 Mars 2023 n° 21-19730), et, plus spécifiquement des articles 624 et 625 du code de procédure civile, que la portée de la cassation est déterminée par le dispositif de l'arrêt qui la prononce (cassation-14 Janvier 2021 - n° 19-14293)

En l'espèce, la MAAF n'a pas exercé de pourvoi en cassation principal ou incident conformément aux articles 612, 614, 550 et 1010 du code de procédure civile afin de critiquer l'arrêt de la cour d'appel de ce chef qui dès lors n'est pas dans le périmètre de la saisine de la cour de cassation.

Par voie de conséquence, la cour de cassation n'étant pas saisie de ce chef de demande, elle n'a pas statué sur ce point qui ainsi n'entre pas dans le périmètre de la saisine de la Cour d'appel sur renvoi après cassation et la décision est définitive sur ce point ;

C'est donc de manière fondée que l'association EIPS BTP se prévaut de l'irrecevabilité de ce chef de demande.

Pour la même raison toute demande sur le fondement de la garantie responsabilité civile professionnelle est irrecevable.

Sur la nature des désordres

L'expert indique dans son rapport que l'immeuble sis dans le 5ème arrondissement de la ville de Marseille est un bâtiment R+2 édifié suite à l'obtention Par la SCI Compi d'un permis de construire en date du 13/10/2011

Les travaux de gros-'uvre ont été confiés à l'association EIPS-BTP.

Le chantier a été réceptionné le 24/10/2012 avec réserves.

L'expert a repris les désordres dont il est fait état par le rapport technique du 05/11/2012 de monsieur [Y], des PV de constats du 28/11/2012 et du 12/12/2012.

L'expert constate :

* Gros-'uvre

- Au RDC, absence de pilier porteur figurant pourtant dans les plans de l'architecte et plancher supérieur composé d'une poutre centrale béton reposant sur un pilier composé partant du sol à une hauteur de 2 mètres de blocs de béton cellulaire visible type Siporex nécessitant la mise en place d'étais. (1.1)

- Absence de chaînage horizontal au second, de ceinture béton horizontale entourant les murs en partie supérieure ; il s'agit d'une non-conformité aux règles de l'art commise lors de la réalisation des murs du 2ème niveau. (1.2)

Ce désordre est acté au PV de réception

- absence de linteaux au-dessus des deux fenêtres (1.3) -à réaliser lorsque les fenêtres seront mises en place

- au niveau du studio du 1er étage, au niveau d'une fenêtre, présence d'un pilier béton ayant un rôle structurel reposant sur bloc de béton cellulaire type Siporex (1.4)

Le PV de réception que les linteaux et piliers sont en béton et non en Siporex

- absence de joint compribande autour des briques de verre avec risque de compression et fissures des briques- absence de joints de dilatation (1.5)

Le PV de réception indique que les pavés de verre du 1er et du 2ème étage sont dépourvus de joints

- défaut d'alignement des pavés de verre au dernier étage (1-6)

- absence de joint entre les blocs de siporex au niveau des fenêtres du dernier étage (1-7) il s'agit d'une non finition

* Maçonnerie

-épaisseurs de plancher fortes (2.1)

- Poutre centrale au RDC présentant une différence de hauteur (plus basse côté NE) 2.2

Il s'agit d'une malfaçon notée dans le CR de chantier de juillet et septembre 2012

Le PV de réception indique que les poutres et piliers ne sont ni droits ni à l'équerre

- pas de chevêtre au niveau de la cheminée (2.3)

Le PV de réception indique que la fixation des boisseaux semble précaire

-émergence de la dalle béton du sol de la g aine électrique au 1er étage

Le PV de réception indique que des gaines électriques sont apparentes et font sailli en surface de plancher

* Charpente et couverture

3-1 fixation des chapeaux de cheminée au mastic inapproprié

3-2 présence de mousse polyuréthane sous les tuiles, entre les tuiles et la faîtière inappropriée

3-3 absence de tuiles chatière en nombre suffisant (pas de désordre)

3-4 Noue insuffisamment large pour permettre l'évacuation des EP des 2 pentes de toit

3-5/3-6 Velux dépourvu d'encadrement porteur et de costière pour assurer une pente suffisante nuisant à l'étanchéité en cas d'intempéries

3-7/3-8 défaut d'alignement du faîtage central et débord des tuiles du faîtage dans le vide

3-9 défaut d'alignement des tuiles ;il s'agit d'un désordre esthétique

3-10 présence de matériaux divers et feuilles mortes ;il ne s'agit pas d'un désordre

* VRD

4-1 défaut de parallélisme des conduits de cheminées et absence de chevêtres au niveau de la toiture- entraîne un défaut de stabilité.

Le PV de réception indique que la fixation des boisseaux de cheminée semble précaire

4-2 étanchéité de cheminée n'est pas réalisée dans les règles de l'art

Le PV de réception indique que des éléments extérieurs des cheminées sont liés colle

4-3 défaut de ventilation par le mur en façade et le mur séparatif avec la cour intérieure / absence de ventilation avec tube au niveau de la toiture- absence de VMC -il s'agit d'une non réalisation mentionnée par le PV de réception

INTERFACE élévation des murs niveau 0 et Poste menuiserie intérieure/extérieure

5-1 défaut de largeur de la porte d'entrée de l'immeuble-il s'agit d'une mal façon

Le PV de réception mentionne une insuffisance des dimensions des réservations pour certaines huisseries

5-2 insuffisance de hauteur de la réservation d'une porte d'accès au garage

Le PV de réception mentionne une insuffisance des dimensions des réservations pour certaines huisseries

Escaliers

Inachèvement -présence de trémies pour escalier non équipées

Absence de garde-corps et de main courant de l'escalier installé

Divers

7-1 insuffisance de la largeur de la réservation pour mise en place de la porte de garage.

La porte mise en place ne permet pas l'usage de portail pour passage de véhicules

7-2 absence de volet roulant au niveau d'une terrasse -hors marché

L'arrêt de la Cour de cassation en date du 21 septembre 2022 prononce la cassation partielle de l'arrêt de la Cour d'appel d'Aix-en-Provence en date du 04 mars 2021 en ce qu'il met hors de cause la société MAAF, sans rechercher, comme il le lui était demandé, si les désordres ne s'étaient pas révélés dans toute leur ampleur et leurs conséquences à la suite de la prise de possession de l'ouvrage par la SCI Compi et de la remise du dépôt du rapport d'expertise amiable ayant fait apparaître qu'il existait un risque réel d'affaissement de l'immeuble, mettant en péril sa structure.

Le premier juge a, au visa de l'article 1792 du code civil et de la garantie des seules activités déclarées de l'entreprise, jugé que compromettent la solidité de l'ouvrage et ouvrent droit à la garantie de l'assureur les désordres 1-4 et 1-5, 1-7 ,2-1 à 2-4, 3-1, 3-2, 3-5 à 3-8, 4-1 à 4-3, 5-1 et 5-2.

La SCI COMPI demande la confirmation du jugement de première instance et ne conteste pas la liste des désordres retenus par le premier juge.

La MAAF fait valoir que contrairement à ce qu'indique la cour de cassation, aucun risque réel d'affaissement ou autre désordre de cet ordre n'a été constaté par l'Expert judiciaire ni démontré ou même allégué a posteriori par la SCI COMPI et il ne s'agit pas de désordres s'étant manifesté dans leur ampleur postérieurement à la réception des travaux puisque non évolutif.

Elle conteste que les désordres 17, 2/1 et 6/1 soient de nature décennale.

Aux termes de l'article 1792 du code civil , les désordres entrent dans le domaine de la responsabilité décennale dès lors que l'affectant dans l'un de ses éléments constitutifs ou l'un de ses éléments d'équipement, ils compromettent la solidité de l'ouvrage ou le rendent impropre à sa destination dans le délai de dix ans à compter de la date de la réception et sont cachés pour le maître d'ouvrage ou bien qu'apparents se sont révélés dans leur ampleur et leurs conséquences postérieurement à la réception.

Le désordre apparent révélé dans son ampleur et ses conséquences postérieurement à la réception se distingue du désordre évolutif qui est un désordre né postérieurement à l'expiration du délai de garantie mais qui trouve son origine dans un désordre décennal de même nature survenu avant l'expiration du délai de garantie.

Ainsi, la MAAF ne peut en l'espèce conditionner le jeu de la garantie décennale à la démonstration du caractère évolutif des désordres.

Il convient en outre de préciser que dès lors que des vices apparents sont indissociables de vices cachés rendant l'ouvrage dans sa totalité impropre à sa destination, l'ensemble de ces désordres relève de la garantie décennale.

En l'espèce, les travaux ont été réceptionnés avec réserves le 24/10/2012 entre le maître d'ouvrage et l'association EIPS BTP.

Dans la liste des désordres retenus par le premier juge, les travaux mettant en péril la structure de l'immeuble sont principalement ceux pour lesquels l'expert a demandé au maître d'ouvrage de procéder à la mise en place d'étais afin d'assureur la sécurité des personnes et des biens.

L'expert a relevé une poutre centrale béton sur le plancher haut du RDC supportée par un mur en blocs de béton cellulaire, un pilier en blocs de béton type Siporex , une épaisseur de planchers forte (25/26 cm) avec une flèche du plancher d'une salle de cours.(1/2,2 /1)

Il relève également qu'un piler du 1er étage béton repose sur un bloc béton cellulaire Siporex portant atteinte à la structure de l'immeuble. (1/4)

L'expert précise qu'une poutre en béton armé ne peut être supportée par un matériau béton cellulaire type Siporex.

Les désordres concernant le surplus du lot maçonnerie portent sur le défaut de verticalité et donc de stabilité des conduits de cheminée au dernier étage (4/1) , l'absence de ventilation (4/3), l'absence de joints compribande et de joints de dilatation autour de briques de verre (1/5).

Concernant les désordres en toiture retenus par le premier juge, l'expert relève :

- la fixation des chapeaux de cheminée au mastic alors que ce matériau est destiné à assurer l'étanchéité mais non à fixer l'ouvrage. (3/1)

- une étanchéité non conforme de la sortie de cheminée (4/2)

- mise en place de mousse polyuréthane sous les tuiles à une couverture en tuiles canal et terres cuites, procédé inapproprié au calfeutrage de l'ouvrage et donc à son étanchéité (3/2)

- défaut d'encadrement et de pente du velux, recouvrement par des tuiles à fleur de la structure métallique et ayant pour conséquence un défaut d'étanchéité. (3/5 à 3/8)

- faîtage central présentant un défaut d'alignement et un défaut d'étanchéité du fait du non-respect des règles de l'art (3/7)

Les désordres 3/1 et 3/2, 3/5 à 3/8 du rapport d'expertise étaient déjà relevés par le rapport technique du 05/11/2012 de monsieur [Y].

- la non-conformité des dimensions de la porte d'accès à l'immeuble et à la pièce atelier (5/1 et 5/2)

Nuisant à l'étanchéité (VELUX , tuiles et faîtage ,) ou à la solidité de l'ouvrage et/ou à la sécurité des biens et des personnes ( défaut de soutènement de la poutre porteuse du plancher haut, cheminée, absence de joints de dilatation, absence de ventilation )ces désordres présentent un aspect technique quant à leur signification en termes de conséquences sur la viabilité de l'immeuble , sur la santé et la sécurité des personnes non perceptibles pour un maître d'ouvrage non professionnel ;

Il en résulte que les désordres se sont révélés au maître d'ouvrage dans toute leur ampleur et leurs conséquences qu'à la suite de la prise de possession du bâtiment et de la remise du rapport de monsieur [Y] puis de l'intervention de l'expert judiciaire et non à la date de la réception.

S'agissant des désordres dont l'assureur conteste la nature décennale, la surépaisseur du plancher (2/1) nécessite un renforcement par la mise en place de poutres supplémentaires entre les murs Est Ouest à peine d'une portée trop importante sur la structure d'appui.

Elle participe ainsi d'une fragilisation de la structure non perceptible à la réception.

En revanche, l'absence de joint entre les blocs de Siporex doit être considéré comme un vice apparent dans toute sa portée au jours de la réception. (1/7)

Concernant le désordre 6.1 portant sur les trémies en vue de la pose d'un escalier il n'a pas été retenu par le premier juge comme étant un désordre de nature décennale.

Sur la réparation des préjudices

La SCI COMPI demande la confirmation du jugement de première instance et ne conteste pas la liste des désordres retenus par le premier juge.

L'assureur ne conteste pas davantage le quantum retenu par le premier juge qu'il conviendra de diminuer du coût des travaux de reprise du désordre 1/7 (8100€ HT)

Il en résulte que le jugement de 1ère instance doit être réformée sur le montant des sommes allouées comme suit :

Travaux de reprise :54661,36 euros HT actualisée en fonction de la variation de l'indice BT01 à compter de la date du rapport d'expertise soit le 13/07/2015 jusqu'à la date du présent arrêt, date d'évaluation du préjudice.

Majoration de 3% au titre de la souscription d'une assurance dommages ouvrage : 1639,85euros

En effet, l'assurance dommages ouvrage est obligatoire pour faire réaliser des travaux de construction ou de réhabilitation d'un bâtiment, ce qui correspond à la qualification du contrat exécuté en violation des règles de l'art objet du litige.

Sur le préjudice de jouissance :

L'expert retient sur ce point que les travaux de reprise à réaliser sont d'une durée de 96 jours.

Il s'agit d'un préjudice immatériels pécuniaires ayant pour conséquence la privation de jouissance d'un droit consécutif à des désordres relevant de la garantie décennale obligatoire puis que les travaux nécessitent que l'immeuble ne soit pas occupé.

La valeur locative à laquelle s'est référé le premier juge n'étant pas remise en cause de manière pertinente par l'une ou l'autre des parties, il y a lieu de confirmer la décision du premier juge allouant une somme de 8333€ de ce chef.

Par voie de conséquence, le jugement de première instance sera confirmé sur ce point.

Sur les autres demandes :

La décision de première instance étant globalement confirmée, il n'y a pas lieu de revenir sur les condamnations prononcées au titre des dépens et de l'application de l' article 700 du code de procédure civile.

Partie perdante, l'assureur paiera les dépens de la procédure d'appel.

L'équité commande par ailleurs d'allouer à la partie intimée une somme de 2500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement, contradictoirement et par mise à disposition au greffe :

Confirme le jugement du Tribunal de Grande Instance de MARSEILLE en date du 10 avril 2018 sauf en ce qu'il a retenu comme relevant de la garantie décennale le désordre d'absence de joints entre les blocs de Siporex au niveau des fenêtres du dernier étage (1-7) et alloué à la SCI Compi les sommes suivantes :

- 62 761,36€ HT au titre des travaux de reprise, avec actualisation en fonction de la variation de l'index BT01 entre le 13 juillet 2015 et la date du présent jugement, ladite somme portant ensuite intérêts au taux légal,

- 1255,23 € au titre de la souscription d'une assurance dommages-ouvrage,

Statuant à nouveau de ce chef,

Condamne la MAAF en sa qualité d'assureur de la responsabilité décennale de l'association à payer à la SCI Compi les sommes suivantes :

- 54661,36 euros HT au titre des travaux de reprise, avec actualisation en fonction de la variation de l'index BT01 entre le 13 juillet 2015 et la date du présent jugement, ladite somme portant ensuite intérêts au taux légal,

- 1639,85euros au titre de la souscription d'une assurance dommages-ouvrage,

Y ajoutant,

Condamne la MAAF en sa qualité d'assureur de la responsabilité décennale de l'association EIPS-BTP à payer à la SCI Compi la somme de 2500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Condamne la MAAF en sa qualité d'assureur de la responsabilité décennale de l'association EIPS-BTP à payer à la SCI Compi les dépens de la procédure d'appel.

Prononcé par mise à disposition au greffe le 12 Septembre 2024

Signé par Madame Inès BONAFOS, Présidente et Patricia CARTHIEUX, greffière auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

La Greffière, La Présidente,