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Décisions

CA Lyon, 3e ch. A, 12 septembre 2024, n° 21/04952

LYON

Arrêt

Infirmation partielle

PARTIES

Demandeur :

Lyon Archerie (SARL)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Gonzalez

Vice-président :

Mme Jullien

Conseiller :

Mme Le Gall

Avocats :

Me Hourse, Me Costa

T. com. Lyon, du 3 juin 2021, n° 2019j01…

3 juin 2021

EXPOSÉ DU LITIGE

La société Lyon Archerie est une société familiale créée en 1984. Les trois associés, [R], [E] et [T] [N], sont les fils du fondateur. L'actionnaire majoritaire, [R], détient 1.480 parts sociales, tandis que les deux minoritaires, [E] et [T], en détiennent 625 chacun.

Le 9 mars 2015, à la suite de dissensions récurrentes entre les deux co-gérants [E] et [R], par décision d'une assemblée générale extraordinaire, [E] [N] a été révoqué de son mandat de co-gérant.

Le 29 octobre 2019, M. [E] [N] a assigné M. [R] [N] et la société Lyon Archerie devant le tribunal de commerce de Lyon aux fins d'obtenir réparation de sa révocation de ses fonctions de gérant.

Par jugement contradictoire du 3 juin 2021, le tribunal de commerce de Lyon a :

- jugé la révocation de M. [E] [N], décidée lors de l'assemblée générale du 9 mars 2015, sans juste motif,

- condamné in solidum la société Lyon archerie et M. [R] [N] à payer à M. [E] [N] la somme de 41.320 euros à titre de dommages-intérêts en raison du préjudice matériel subi suite à sa révocation sans juste motif,

- condamné in solidum la société Lyon archerie et M. [R] [N] à payer à M. [E] [N] la somme de 10.000 euros à titre de dommages-intérêts en raison du préjudice moral subi suite à sa révocation abusive,

- débouté les parties de toutes leurs autres demandes, fins et prétentions,

- condamné in solidum la société Lyon archerie et M. [R] [N] à payer à M. [E] [N] la somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné in solidum la société Lyon archerie et M. [R] [N] aux dépens,

- ordonné l'exécution provisoire, nonobstant appel et sans caution.

La société Lyon Archerie et M. [R] [N] ont interjeté appel par déclaration du 7 juin 2021.

***

Par conclusions notifiées par voie dématérialisée le 20 octobre 2021, la société Lyon Archerie et M. [R] [N] demandent à la cour, de :

- réformer le jugement rendu par le tribunal de commerce de Lyon, en ce qu'il a :

' estimé que la révocation était dépourvue de juste motif,

' estimé que la révocation avait un caractère vexatoire,

' condamné Lyon archerie à payer 41.320 euros au titre de la perte de rémunération,

' condamné Lyon archerie à payer 10.000 euros pour une révocation vexatoire,

- dire et juger que la révocation de M. [E] [N] est dépourvue de caractère abusif ou vexatoire et repose sur de justes motifs,

- dire et juger que M. [R] [N] n'a commis aucune faute personnelle détachable de ses fonctions de gérant,

- confirmer le jugement en ce qu'il a mis hors de cause M.[R] [N] et a écarté la notion d'abus de majorité.

À tout le moins,

- ramener l'éventuel préjudice de M. [E] [N] à l'euro symbolique,

en conséquence,

- débouter M. [E] [N] de l'ensemble de ses prétentions et réclamations,

- écarter les appels incidents et la responsabilité de M. [R] [N] en sa qualité d'associé,

- condamner M. [E] [N] à verser 6. 000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive,

- le condamner aux entiers dépens outre la somme de 10.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par conclusions notifiées par voie dématérialisée le 6 octobre 2021, M. [E] [N] demande à la cour, au visa de l'article L. 223-25 du code de commerce, l'ancien article 1382 du code civil et des articles 548, 549 et 700 du code de procédure civile, de :

à titre principal et d'appel incident :

à titre principal : sur la confirmation du jugement portant sur la révocation sans juste motif :

- confirmer le jugement rendu par le tribunal commerce de Lyon le 3 juin 2021 en ce qu'il a jugé la révocation de M. [E] [N], décidée lors de l'assemblée générale du 9 mars 2015, sans juste motif,

À titre d'appel incident : sur l'infirmation du jugement quant au quantum,

- infirmer le jugement rendu par le tribunal commerce de Lyon le 3 juin 2021 en ce qu'il a fixé le montant des dommages et intérêts à la somme de 41.320 euros en raison du préjudice matériel subi suite à sa révocation sans juste motif,

- déclarer que le manque à gagner de M. [E] [N] correspond à la perte de revenus provoquée par sa révocation, pendant les dix mois qui ont suivi et sur la base de sa dernière rémunération mensuelle,

- condamner in solidum la société Lyon archerie et M.[R] [N] à verser à M. [E] [N] la somme de 94.540,91 euros à titre de dommages et intérêts en raison du préjudice matériel subi suite à sa révocation sans juste motif,

- infirmer le jugement rendu par le tribunal commerce de Lyon le 3 juin 2021 en ce qu'il a condamné la société Lyon archerie et M. [R] [N] à verser à M. [E] [N] la somme de 10.000 euros à titre de dommages et intérêts en raison du préjudice moral subi suite à sa révocation abusive,

- déclarer que les circonstances qui ont entouré la révocation sont abusives,

- déclarer que la décision brutale de révocation revêt un caractère vexatoire,

- condamner in solidum la société Lyon archerie et M. [R] [N] à verser à M. [E] [N] la somme de 50.000 euros à titre de dommages et intérêts en raison du préjudice moral subi suite à sa révocation abusive,

- infirmer le jugement rendu par le tribunal commerce de Lyon le 3 juin 2021 en ce qu'il a rejeté la demande de dommage et intérêts pour préjudice moral sur le fondement de l'article 1382 du code civil,

- déclarer que M. [R] [N] a commise une faute personnelle dans le dessein de nuire à M. [E] [N],

- condamner M. [R] [N] à verser la somme de 20.000 euros à M. [E] [N] à titre de dommages et intérêts en raison du préjudice moral subi sur le fondement de l'article 1382 du code civil,

- infirmer le jugement rendu par le tribunal commerce de Lyon le 3 juin 2021 en ce qu'il a rejeté la demande de dommage et intérêts en raison d'un préjudice subi du fait de l'abus de majorité,

- déclarer que M. [R] [N] a tiré un bénéfice de la révocation de M. [E] [N],

- condamner M. [R] [N] à verser la somme de 144.540,91 euros à M. [E] [N] à titre de dommages-intérêts en raison du préjudice subi du fait de l'abus de majorité.

à titre subsidiaire : sur la confirmation du jugement

- confirmer le jugement rendu par le tribunal commerce de Lyon le 3 juin 2021 en ce qu'il a jugé la révocation de M. [E] [N], décidée lors de l'assemblée générale du 9 mars 2015, sans juste motif,

- confirmer le jugement rendu par le tribunal commerce de Lyon le 3 juin 2021 en ce qu'il a fixé le montant des dommages et intérêts à la somme de 41.320 euros en raison du préjudice matériel subi suite à sa révocation sans juste motif,

- confirmer le jugement rendu par le tribunal commerce de Lyon le 3 juin 2021 en ce qu'il a condamné la société Lyon archerie et M. [R] [N] à verser à M. [E] [N] la somme de 10.000 euros à titre de dommages et intérêts en raison du préjudice moral subi suite à sa révocation abusive.

En tout état de cause,

- condamner in solidum la société Lyon Archerie et M [R] [N] à payer la somme de 6.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner in solidum la société Lyon archerie et M. [R] [N] aux dépens de l'instance.

La procédure a été clôturée par ordonnance du 20 décembre 2021, les débats étant fixés au 13 juin 2024.

Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, la cour se réfère, pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, à leurs conclusions écrites précitées.

MOTIFS DE LA DÉCISION

A titre liminaire, il sera rappelé que les demandes tendant à voir « constater » ne constituent pas des prétentions au sens de l'article 4 du code de procédure civile et ne saisissent pas la cour ; il en est de même des demandes tendant à voir « dire et juger » lorsque celles-ci développent en réalité des moyens.

Sur la révocation de M. [E] [N]

La société Lyon Archerie et M. [R] [N] font valoir que :

- M. [E] [N] a eu un comportement outrancier et dangereux, a agressé la comptable de la société et adressé des propos menaçants à l'égard de sa mère qui avait vendu ses parts dans la société à [R] ; [E] a dérobé des espèces dans la caisse ;

- la révocation a été votée lors d'une assemblée générale où [E] [N] était assisté de son avocat qui a validé la rédaction du procès-verbal ;

- la grave mésentente entre [R] et [E] est confirmée par ce dernier ; elle constitue un juste motif de révocation ;

- la révocation n'a pas été vexatoire en ce que la ligne téléphonique de [E] n'a été supprimée que le 31 août 2017 et non le lendemain de sa révocation, et la restitution des clés ne saurait être vexatoire, particulièrement au regard du contexte passionnel, voire violent.

M. [E] [N] réplique que :

- la révocation ne peut être prononcée que si l'action du gérant est de nature à compromettre l'intérêt social ou le fonctionnement de la société ; la plainte déposée par Mme [J] contre son épouse est donc indifférente ; son hostilité est due au fait que sa mère a revendu ses parts dans la société à son frère [R] pour un montant très sous-estimé ; il n'est pas démontré qu'il serait l'auteur des falsifications ; sa révocation est intervenue sans juste motif ;

- le procès-verbal de l'assemblée générale du 9 mars 2015 ne mentionne pas les motifs à l'origine de sa révocation, de sorte que celle-ci n'est fondée sur aucun motif ; aucune faute ne lui a été reprochée dans le cadre de sa gestion de la société ; il n'a jamais agi contre l'intérêt social ni mis en péril l'intérêt social ou le fonctionnement de la société ; la mésentente entre les co-gérants ne suffit pas à justifier sa révocation, dès lors qu'il n'est pas démontré que cette mésentente aurait mis en péril l'intérêt social ;

- il avait proposé la révocation de son frère [R] mais cette résolution a été rejetée lors de cette même assemblée générale du 9 mars 2015.

Sur ce,

Selon l'article L. 223-25, alinéa 1er, du code de commerce, le gérant d'une société à responsabilité limitée peut être révoqué par décision des associés. Si la révocation est décidée sans juste motif, elle peut donner lieu à des dommages-intérêts.

Il résulte de ce texte que la révocation du gérant d'une société à responsabilité limitée peut être justifiée, même en l'absence de faute démontrée, par l'existence, entre les associés et ce gérant, d'une mésentente de nature à compromettre l'intérêt social.

En l'espèce, s'agissant de l'agression de Mme [J], elle a eu lieu en avril 2010 alors que la révocation de [E] [N] est survenue en mars 2015. Les cinq années écoulées entre ces deux événements ne permettent pas de retenir l'agression de Mme [J] comme un juste motif de révocation.

Quant aux menaces qu'aurait proférées [E] [N] à l'égard de sa mère, l'attestation établie par cette dernière ne mentionne pas la date de ces faits, lesquels apparaissent sans lien avec la société Lyon Archerie, dès lors que Mme [C] [N] a revendu ses parts en avril 2014 et n'était donc plus associée au sein de la société Lyon archerie. Ce grief ne peut davantage être retenu.

S'agissant du non respect d'une décision de l'assemblée générale limitant la possibilité, pour M. [E] [N], de passer seul des commandes de plus de 14.000 euros HT par commande ou 40.000 euros HT sur trente jours glissant maximum, il n'est pas démontré que, postérieurement à cette délibération d'assemblée générale en date du 25 juin 2014, M. [E] [N] ait outrepassé ces limites sans la signature conjointe du co-gérant M. [R] [N]. Cette faute, qui serait de nature à entraîner la révocation du gérant, n'est pas établie.

En revanche, il résulte de l'attestation établie par M. [H] le 22 septembre 2014, que ce dernier a été témoin d'un échange entre MM. [R] et [E] [N], ce dernier menaçant son frère de lui planter un couteau dans le ventre. M. [R] [N] justifie avoir déposé une main courante le 6 octobre suivant.

Cet élément établit la très mauvaise entente entre les deux frères, laquelle est d'ailleurs confirmée par l'un et par l'autre, dans leurs conclusions respectives.

Or, dans un e-mail du 7 novembre 2014, M. [T] [N], également associé dans la société Lyon Archerie, indiquait à ses deux frères :

'depuis ce printemps vos relations se sont dégradées (mais elles n'étaient déjà pas au beau fixe auparavant !) et sont sur la place publique les employés étant pris comme témoins ou comme faire valoir cela veut dire des tensions dignes d'un « reality show » (...). cela ne peut qu'avoir un impact négatif sur l'entreprise. En effet les gens continuent de venir parce qu'ils ont peu de fournisseurs d'archerie mais à la première occasion ils iront vers un nouveau venu performant (...).

Quant au débat sur la valeur de l'entreprise je ne rentrerai pas dedans car je n'en ai pas les compétences, ceci dit si cela continue le débat sera vite ridicule car plus ou moins x % d'une valeur d'entreprise qui ne vaut plus rien par ce qu'elle est en dépôt de bilan dans deux ou trois ans cela ne change rien sur la valeur finale (...).

Alors oui je souhaite des mesures radicales car nous sommes là et que tout élément susceptible de diminuer le résultat de l'entreprise ou sa valeur [doit] être résolu dans les meilleurs délais même au prix de décisions difficiles à prendre (...).'

Il résulte de ce message que les tensions et conflits entre MM. [R] et [E] [N] étaient tels, qu'ils compromettaient manifestement l'intérêt social.

C'est ainsi que, lors de l'assemblée générale du 9 mars 2015, la révocation de M. [E] [N] a été soumise au vote, tout comme celle de M. [R] [N], cette dernière étant rejetée par le votre 'contre' de MM. [R] et [T] [N]. Il a également été décidé à l'unanimité de faire procéder à un audit des comptes de la société, ce qui tend à établir le questionnement des associés quant au bon fonctionnement de la société, étant précisé qu'aucun autre sujet n'était soumis à l'ordre du jour de cette assemblée générale.

Au vu de ces éléments et sans qu'il y ait lieu d'examiner les autres griefs tels les falsifications de factures ou encore le vol d'espèces, la révocation de M. [E] [N] est fondée sur un juste motif et aucune somme ne lui est donc due à ce titre. Le fait que le procès-verbal d'assemblée générale ne mentionne pas expressément le motif de la révocation de M. [E] [N] n'est pas de nature à rendre celle-ci dépourvue de motif, ce d'autant qu'il est expressément mentionné dans ce P.V., que 'chacun des co-gérants expose à l'assemblée les griefs qu'il a à l'encontre de son co-gérant'.

Il convient ainsi d'infirmer le jugement en ce qu'il juge la révocation sans juste motif et en ce qu'il condamne in solidum la société Lyon Archerie et M. [R] [N] à payer à M. [E] [N] la somme de 41.320 euros en réparation du préjudice subi du fait de cette révocation.

Quant au caractère brutal ou vexatoire de la révocation, les associés se sont réunis sur convocation par lettre recommandée du 20 février 2015 pour le 9 mars suivant, avec comme ordre du jour : 'étude de la situation actuelle de la société et de son administration' et 'gestions des dirigeants'. Lors de l'assemblée générale du 9 mars 2015, M. [E] [N] était assisté de son avocat. Il est indiqué, dans le procès-verbal d'assemblée générale, que la discussion a été ouverte et chaque co-gérant a exposé à l'assemblée générale les griefs qu'il avait à l'encontre de l'autre co-gérant, avant que ne soient soumises au vote les résolutions relatives à la révocation d'[R] puis de [E].

Il se déduit de ces éléments que M. [E] [N] a été mis en mesure de présenter ses observations préalablement à la décision le révoquant, de sorte la révocation a eu lieu dans le respect du principe de loyauté.

En revanche, il résulte du constat d'huissier dressé le 11 mars 2015, que la ligne de téléphone portable professionnel de M. [E] [N] a été suspendue dès le 10 mars 2015 à 10h42, ce qui caractérise une circonstance vexatoire de la révocation de M. [E] [N], co-gérant de la société depuis quinze ans. Toutefois, M. [E] [N] a fait rétablir la ligne téléphonique le jour-même à 19h48, cette ligne n'étant finalement résiliée qu'en 2017. Quant à la reprise des clés par la société Lyon Archerie deux jours après la révocation, ce fait n'est pas mentionné dans le constat d'huissier, contrairement à ce qui est soutenu dans les conclusions de M. [E] [N], de sorte que ce grief n'est pas démontré.

Dès lors, au vu de la seule suspension de la ligne téléphonique pendant une journée, il convient de réformer le jugement sur le montant des dommages-intérêts alloués à M. [E] [N] au titre de son préjudice moral, et de les fixer à la somme de 5.000 euros dont seule la société Lyon Archerie est redevable, à l'exclusion de M. [R] [N].

Sur la responsabilité personnelle de M. [R] [N]

M. [E] [N] fait valoir que son frère [R] a commis une faute personnelle au regard des conditions vexatoires et irrégulières entourant la révocation, engageant ainsi sa responsabilité et justifiant sa condamnation à une indemnisation distincte ainsi que sa condamnation in solidum avec la société Lyon archerie ; que M. [R] [N] a également commis un abus de majorité qui doit être réparé par l'octroi de dommages-intérêts.

M. [R] [N] réplique que la révocation de [E] ne constitue pas un abus de majorité, qu'il a gardé le même statut après le départ de son frère et n'a pas bénéficié à titre personnel de la révocation de ce dernier ; qu'il n'y a pas de faute personnelle distincte, [E] ayant agi contre lui pris en sa qualité d'associé et non de gérant, étant précisé que l'action contre le gérant serait prescrite en application des articles L. 223-22 et L. 223-23.

Sur ce,

Il a été précédemment retenu que la révocation de M. [E] [N] est fondée sur un juste motif dès lors qu'il était établi que la mésentente entre les deux co-gérants avait pour effet avéré de compromettre l'intérêt social. Il s'en déduit qu'il ne peut être reproché un abus de majorité à M. [R] [N], associé majoritaire, étant précisé que le troisième associé, M. [T] [N], n'a pas voté contre la révocation de M. [E] [N] mais s'est abstenu.

Quant aux conditions de la révocation, il n'a été retenu au titre d'une circonstance vexatoire que la suspension de la ligne téléphonique pour une durée d'une journée, dès le lendemain de l'assemblée générale décidant de la révocation.

Ce fait ne caractérise pas la volonté malveillante de M. [R] [N] ou son intention de nuire à M. [E] [N], ni sa faute personnelle, c'est-à-dire la faute intentionnelle, d'une particulière gravité, incompatible avec l'exercice normal des fonctions sociales.

S'agissant enfin du coût d'acquisition des parts sociales de Mme [N] par son fils M. [R] [N], le débat sur le point de savoir si le prix a été sous-estimé ou non est sans effet sur la révocation de M. [E] [N] et les circonstances de celle-ci.

Il convient donc de confirmer le jugement en ce qu'il rejette les demandes de M. [E] [N] formées contre M. [R] [N] au titre de fautes personnelles.

Sur la demande de dommages-intérêts pour procédure abusive

M. [R] [N] et la société Lyon Archerie ne développent aucun moyen au soutien de cette prétention.

En tout état de cause, bien que l'action de M. [E] [N] tendant à voire juger sa révocation sans juste motif ne prospère pas, l'abus dans le droit de recourir à un juge n'est pas caractérisé. Il convient donc de confirmer le jugement en ce qu'il rejette cette demande de dommages-intérêts.

Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile

M. [E] [N] succombant à l'instance, il sera condamné aux dépens d'appel.

En application de l'article 700 du code de procédure civile, l'équité commande de laisser à chaque partie la charge de ses propres frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant contradictoirement,

Infirme le jugement déféré mais seulement en ce qu'il juge sans juste motif la révocation de M. [E] [N] le 9 mars 2015, en ce qu'il condamne in solidum la société Lyon Archerie et M. [R] [N] à payer à M. [E] [N] la somme de 41.320 euros à titre de dommages-intérêts en raison du préjudice matériel résultant de la révocation sans juste motif, et en ce qu'il condamne in solidum la société Lyon archerie et M. [R] [N] à payer à M. [E] [N] la somme de 10.000 euros à titre de dommages-intérêts en raison du préjudice moral résultant de la révocation absive ;

Le confirme pour le surplus ;

Statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant,

Dit que la révocation de M. [E] [N], le 9 mars 2015, est fondée sur un juste motif ;

Rejette la demande de dommages-intérêts formée par M. [E] [N] au titre de son préjudice matériel ;

Condamne la société Lyon Archerie à payer à M. [E] [N] la somme de cinq mille euros (5.000 euros) à titre de dommages-intérêts en réparation de son préjudice moral pour la révocation vexatoire ;

Condamne M. [E] [N] aux dépens d'appel ;

Rejette les demandes formées par les parties au titre de l'article 700 du code de procédure civile.