Décisions
CA Grenoble, ch. com., 12 septembre 2024, n° 23/04173
GRENOBLE
Arrêt
Autre
N° RG 23/04173 - N° Portalis DBVM-V-B7H-MBVL
C8
Minute N°
Copie exécutoire
délivrée le :
la SELARL RIONDET
la SELARL LEXAVOUE GRENOBLE-CHAMBERY
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE GRENOBLE
CHAMBRE COMMERCIALE
ARRÊT DU JEUDI 12 SEPTEMBRE 2024
Appel d'une ordonnance (N° RG 2023R00373)
rendue par le Tribunal de Commerce de GRENOBLE
en date du 21 novembre 2023
suivant déclaration d'appel du 12 décembre 2023
APPELANTE :
S.A.R.L. TEIXEIRA SDFP au capital de 15.000 €, inscrite au RCS de Grenoble sous le n°423 933 696, agissant poursuites et diligences de son dirigeant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège
[Adresse 1]
[Localité 3]
représentée par Me Michel DE GAUDEMARIS de la SELARL RIONDET, avocat au barreau de GRENOBLE, substitué et plaidant par Me PLOTTIN, avocat au barreau de GRENOBLE,
INTIMÉES :
Société R.T. ALPES-AURIS inscrite au RCS de Grenoble sous le n°880 306 550, agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège,
[Adresse 10]
[Localité 6]
Société SATA GROUP inscrite au RCS de Grenoble sous le n°775 595 960, agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège,
[Adresse 10]
[Localité 6]
représentées par Me Alexis GRIMAUD de la SELARL LEXAVOUE GRENOBLE-CHAMBERY, avocat au barreau de GRENOBLE, postulant et plaidant par Me DEBLIQUIS, avocat au barreau de LYON
S.A.R.L. TANDEM ARCHITECTES TANDEM ARCHITECTES, SARL immatriculée au RCS de GRENOBLE sous le n° 431 529 437, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège ;
[Adresse 2]
[Localité 3]
représentée par Me Benoit GERIN, avocat au barreau de GRENOBLE
S.A.S. ELECTRIC-TOLERIE agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux en exercice, domiciliés en cette qualité audit siège
[Adresse 7]
[Localité 4]
non représentée,
S.A.S. SOCIETE DE TRAVAUX DE GROS OEUVRE (S.T.G.O.) agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux en exercice, domiciliés en cette qualité audit siège
[Adresse 8]
[Localité 5]
non représentée,
COMPOSITION DE LA COUR :
LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :
Madame Marie-Pierre FIGUET, Présidente,
M. Lionel BRUNO, Conseiller,
Mme Raphaële FAIVRE, Conseillère,
Assistés lors des débats de Alice RICHET, Greffière,
DÉBATS :
A l'audience publique du 30 mai 2024, Mme FIGUET, Présidente, a été entendu en son rapport,
Les avocats ont été entendus en leurs conclusions et plaidoiries,
Puis l'affaire a été mise en délibéré pour que l'arrêt soit rendu ce jour,
Faits et procédure :
La société Sata a lancé une consultation pour la construction d'une résidence de tourisme à [Localité 9].
La maitrise d'oeuvre a été confiée à un groupement de sociétés dont la société Tandem.
La société Teixeira SDFP s'est vue confier les lots n°14 peintures intérieures et n°15 peintures extérieures.
La résidence devait être livrée le 18 décembre 2021.
En raison de retards de chantier et de malfaçons, la société Electric Tolerie, titulaire du lot 21 électricité, a vu son contrat résilié et le lot a été confié aux sociétés Electralpes et Bouygues Energie.
Alors même que les travaux n'étaient pas achevés, le maître de l'ouvrage a décidé d'une mise à disposition de l'ouvrage avant sa réception afin de pouvoir honorer des réservations de logements pour la saison hivernale 2021-2022. Des procès-verbaux d'état des lieux ont été dressés les 17 décembre 2021, 7 janvier 2022, 28 janvier 2022 et 4 février 2022.
Le 21 avril 2022, le maître d'ouvrage notifiait à la société Teixeira SDFP son approbation des procès-verbaux de réception prononcée avec réserves le 15 janvier 2022 et fixait la date limite pour la levée des réserves au 25 juin 2022.
Le 5 août 2022, il était notifié à la société Teixeira SDFP le procès-verbal de levée des réserves et la liste des réserves restant à lever. Il était appliqué une réfaction à hauteur de 34.510 euros. Cette réfaction était refusée par la société Teixeira SDFP.
Par courrier du 30 août 2022, la société Teixeira SDFP notifiait à la société Sata Group ainsi qu'au maître d'oeuvre ses projets de décompte final avec un solde restant dû de 235.302,61 euros pour le lot n°14 et un solde restant dû de 38.993,18 euros pour le lot n°15.
Par courrier recommandé du 13 octobre 2022, le maître de l'ouvrage a adressé à la société Teixeira SDFP le décompte général des travaux dont il résultait un solde de 81.493,56 euros ttc s'agissant du lot n°14 et un solde de 6.802,85 euros ttc s'agissant du lot n°15.
Par courriers recommandés du 14 novembre 2022, la société Teixeira SDFP maintenait ses demandes de paiement figurant dans son décompte et produisait un mémoire en réclamation.
Par acte du 15 juin 2023, la société Teixeira SDFP a saisi le juge des référés en paiement de provision.
Par ordonnance du 21 novembre 2023, le juge des référés du tribunal de commerce de Grenoble a:
- mis hors de cause la société Sata Group,
- débouté la société Teixeira SDFP de ses demandes de condamnations provisionnelles,
- désigné en qualité d'expert judiciaire M. [F],
- mis à la charge de la société Teixeira SDFP une consignation de 5.000 euros à valoir sur la rémunération de l'expert,
- condamné la société Teixeira SDFP à payer à la société RT Alpe-Auris la somme de 2.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné la société Teixeira SDFP aux entiers dépens.
Par déclaration du 12 décembre 2023, la société Teixeira SDFP a interjeté appel de cette ordonnance en ce qu'elle a mis hors de cause la société Sata Group, débouté la société Teixeira SDFP de ses demandes de condamnations provisionnelles et condamné la société Teixeira SDFP à payer à la société RT Alpe-Auris la somme de 2.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile en intimant la société Sata Group et la société RT Alpe-Auris.
Par actes d'huissier de justice du 20 février 2024, la société RT Alpe-Auris et la société Sata Group ont assigné la Sas Electric-Tolerie, la Sas Société de travaux de gros oeuvre (S.T.G.O) et la Sarl Tandem Architectes devant la cour d'appel de Grenoble en appel incident provoqué et ont saisi la cour de cet appel provoqué le 22 février 2024.
Les deux procédures ont été jointes le 14 mars 2024.
La clôture a été prononcée le 23 mai 2024.
Prétentions et moyens de la société Teixeira SDFP
Dans ses conclusions remises le 25 janvier 2024, elle demande à la cour de:
- réformer l'ordonnance attaquée en ce qu'elle a :
* mis hors de la cause la société Sata Group,
* débouté la société Teixeira SDFP de l'intégralité de ses demandes de condamnations provisionnelles,
* condamné la société Teixeira SDFP à payer à la société Sata Group la somme de 2.500 euros à titre d'indemnité sur le fondement de l'article 700,
Statuant à nouveau,
- rejeter la demande de mise hors de cause de la société Sata Group et étendre la mesure d'expertise ordonnée par la juridiction du premier degré à son contradictoire,
- condamner in solidum à titre provisionnel la société Sata Group et la société RT Alpe-Auris à payer à la société Teixeira SDFP la somme de 2.000 euros h.t. au titre de la prestation de nettoyage du parking réalisée,
- condamner in solidum à titre provisionnel la société Sata Group et la société RT Alpe-Auris à payer à la société Teixeira SDFP la somme de 11.340 euros h.t. au titre des travaux de reprises réalisés au r+2 et r+7,
- condamner in solidum à titre provisionnel la société Sata Group et la société RT Alpe-Auris à payer à la société Teixeira SDFP la somme de 9.107,20 euros h.t. au titre de la plusvalue pour l'application d'une peinture sur les plafonds et parois bétons intérieures,
- condamner in solidum à titre provisionnel la société Sata Group et la société RT Alpe-Auris à payer à la société Teixeira SDFP la somme de 1.968,44 euros h.t au titre de la prestation de marquage du parking réalisée,
- condamner in solidum à titre provisionnel la société Sata Group et la société RT Alpe-Auris à payer à la société Teixeira SDFP la somme de 18.000 euros h.t. au titre de la moins-value appliquée pour indemniser le préjudice de location du maître d'ouvrage,
- condamner in solidum à titre provisionnel la société Sata Group et la société RT Alpe-Auris à payer à la société Teixeira SDFP la somme de 1.940 € h.t. au titre de la moins-value correspondant au nettoyage des sols réalisés par un autre prestataire,
- condamner in solidum à titre provisionnel la société Sata Group et la société RT Alpe-Auris à payer à la société Teixeira SDFP la somme de 12.397,73 € h.t. au titre de la prestation d'application d'une lasure sur les menuiseries extérieures,
- condamner in solidum à titre provisionnel la société Sata Group et la société RT Alpe-Auris à payer à la société Teixeira SDFP la somme de 9.662,44 euros h.t. au titre de la plus-value pour l'application d'une peinture sur les plafonds bétons extérieures,
- condamner in solidum à titre provisionnel la société Sata Group et la société RT Alpe-Auris à payer à la société Teixeira SDFP la somme de 12.397,73 euros h.t. au titre de la prestation d'application d'une lasure sur les menuiseries extérieures,
- condamner in solidum à titre provisionnel la société Sata Group et la société RT Alpe-Auris à payer à la société Teixeira SDFP la somme de 34.510 € h.t. au titre de la réfaction appliquée en raison de réserves non levées ou traitées de manière non satisfaisante,
- condamner in solidum à titre provisionnel la société Sata Group et la société RT Alpe-Auris à payer à la société Teixeira SDFP la somme de 64.890 euros h.t. au titre des travaux de reprises suite à la détérioration de ses ouvrages réalisés dans le cadre des lots 14 et 15,
- condamner in solidum à titre provisionnel la société Sata Group et la société RT Alpe-Auris à payer à la société Teixeira SDFP la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Sur le caractère de co-contractant de la société Sata Group, elle fait valoir que:
- les deux actes d'engagement qui lui ont été adressés mentionnaient en en-tête : 'SATA ou toute filiale substituée',
- les actes d'engagement régularisés indiquaient en en-tête : 'Maître d'ouvrage SATA ou toute filiale substituée SASU RT ALPE AURIS', la substitution demeurant ainsi une faculté dont la mise en oeuvre n'avait pas été acté de manière certaine,
- ces documents ont été signés par la SATA,
- ce n'est que postérieurement à la conclusion des marchés que le maître d'ouvrage a mis en oeuvre la faculté de substitution, les ordres de services étant alors signés par la Sasu RT Alpes-Auris,
- la société Sata Group ne peut soutenir qu'elle a conclu un contrat pour le compte d'une société en formation alors que le contrat n'a pas été conclu pour le compte de la société en formation,
- seule une cession de contrat était susceptible d'ériger la société RT Alpe-Auris en qualité de co-contractant,
- l'ordonnance doit donc être réformée en ce qu'elle a mis la société Sata Group hors de cause.
Sur l'absence de caractère définitif des décomptes généraux, elle fait observer que:
- pour apprécier le respect du délai de 30 jours dont disposait la société Teixeira SDFP pour contester le projet de décompte général et notifier ses mémoires en réclamation, il convient de tenir compte de la date d'expédition en application de l'article 668 du code de procédure civile,
- le délai expirant le 14 novembre 2022 et les courriers recommandés ayant été expédiés le 14 novembre 2022, la contestation quant au caractère définitif et intangible du décompte qu'elles ont établi n'est donc pas sérieuse.
Sur ses demandes de provisions, elle indique que:
- dès lors que des travaux supplémentaires ou des travaux de reprise sont imputables à la défaillance ou à la dégradation commise par d'autres corps d'état, elle est bien fondée à solliciter leur condamnation in solidum avec le maître de l'ouvrage à l'indemniser à titre provisionnel du préjudice causé sur un fondement quasi-délictuel,
- s'agissant de la prestation de nettoyage du parking, elle a bien procédé au nettoyage de livraison de la zone parking, aucune réserve ne figure à ce titre dans le procès-verbal de réception, le maitre de l'ouvrage ne justifie pas avoir fait réaliser ce nettoyage par un autre prestataire, cette prestation effectuée doit donc être réglée,
- sur le coût de reprise des peintures au niveau R+7 et R+2, elle a dû réaliser une prestation complémentaire s'agissant des faux plafonds installés dans les coursives en raison des non-conformités des cablages électriques ainsi qu'il en résulte des comptes rendus du maître d'oeuvre, au demeurant le maître de l'ouvrage a bien appliqué une plus-value pour les reprises de peinture des niveaux 3, 4, 5 et 6, son refus d'appliquer une plus-value pour les niveaux 2 et 7 est donc infondée,
- le remplacement de la lasure sur béton par de la peinture hydropliolite a été rendu nécessaire par l'état insatisfaisant des sous-faces de dalles coursive, les parois des coursives ont dû aussi être peintes, le maître d'ouvrage a appliqué à tort une moins value alors que le coût de la peinture est supérieur à celui de la lasure,
- le traçage des places de parking doit être réglé en totalité dès lors qu'il n'est mentionné aucune réserve sur le procès-verbal de réception à ce titre et que la réception entraine la purge des défauts de conformité apparents,
- concernant l'application de pénalités de retard, elle indique que si elle s'était engagée à respecter la date d'achèvement de ses travaux au 22 octobre 2021, cet engagement était conditionné à l'absence de nouveaux retards, or la société Electric Tolerie a continué d'accumuler d'importants retards, les malfaçons de cette société ont nécessité des travaux supplémentaires, le maître d'oeuvre a noté dans son compte rendu l'incidence des non-conformités du lot électricité sur le planning du lot peinture intérieures, en outre le maître d'ouvrage ne démontre ni la réalité de son préjudice, ni son imputabilité à la société Teixeira SDFP, d'autant que les locaux étaient exploités par la société Vacancéole,
- sur l'imputation des factures de nettoyage, il lui a été demandé de ne pas procéder au nettoyage de livraison des appartements, dès lors elle n'a pas été réglée de cette prestation, elle ne peut donc supporter des factures de nettoyage,
- l'application de lasure sur les menuiseries extérieures a bien été réalisée et la société RT Alpe-Auris ne peut s'opposer au paiement au motif que la société Teixeira SDFP ne justifie pas du montant exact des prestations effectuées alors qu'il s'agit d'un montant forfaitaire, le fait que la prestation a déjà été confiée à un autre lot qui livrait ses matériaux lasurés d'usine ne peut lui être opposé,
- s'agissant pour les peintures extérieures du remplacement de la lasure sur béton par une peinture, celui-ci lui a été demandé par le maître d'oeuvre, or alors que le coût d'une peinture est supérieure à celui d'une peinture, le maitre d'ouvrage a refusé d'appliquer une plus value,
- concernant les réserves, elle n'a jamais été convoquée aux opérations de levées des réserves, elle n'a jamais été mise en demeure de procéder à la levée des réserves qui n'auraient pas été levées, le délai de la garantie de parfait achèvement est écoulé,
- la défaillance de la société Electric Tolerie a imposé une circulation permanente des intervenants dans les parties communes ce qui a conduit à des dégradations lui imposant des travaux de reprise pour un coût de 55.440 euros outre des travaux de reprise des peintures des parois extérieures après des manquements de la société STGO, le maître de l'ouvrage lui doit donc cette somme.
Prétentions et moyens de la société RT Alpe-Auris et de la société Sata Group
Dans leurs conclusions remises le 12 avril 2024, elles demandent à la cour de:
A titre principal :
- confirmer l'ordonnance entreprise en toutes ses dispositions,
- débouter la société Teixeira SDFP de son appel et de l'intégralité de ses prétentions à l'encontre des sociétés Sata Group et RT Alpe-Auris,
A titre subsidiaire, si par impossible, une condamnation devait intervenir à l'encontre de la société RT Alpe-Auris et de la société Sata Group, condamner:
* la société Electric Tolerie à la garantir de toute condamnation éventuelle au titre des coûts de reprise des peintures aux niveaux r+2 et r+7,
* la société STGO à la garantir de toute condamnation éventuelle au titre du remplacement de la lasure sur béton par de la peinture en plafond dans le cadre de l'exécution du lot n°14,
* la société Tandem Architecte à la garantir de toute condamnation éventuelle au titre des réfactions imputées à la société Teixeira SDFP en raison de la non-réalisation de traçage des places de parking,
* la société Tandem Architecte à garantir toute condamnation éventuelle au titre de l'application de lasure sur les menuiseries extérieures,
* la société STGO à la garantir de toute condamnation éventuelle au titre du remplacement de la lasure sur béton par de la peinture en plafond dans le cadre de l'exécution du lot n°15,
* la société Tandem Architecte à la garantir de toute condamnation éventuelle au titre des réfactions pour les réserves non levées,
* les sociétés Electric Tolerie et STGO à la garantir de toute condamnation éventuelle au titre des travaux de reprises effectuées par la société Teixeira à la suite de dégradations par d'autres corps d'état,
En tout état de cause :
- débouter la société Tandem Architecte de l'ensemble de ses demandes
- condamner la société Teixeira SDFP, et le cas échéant toute autre partie succombante, à payer à la société Sata Group et à la société RT Alpe-Auris chacune la somme de 6.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi que les entiers dépens de l'instance.
Sur l'absence de lien contractuel entre la société Teixeira SDFP et la société Sata Group, cette dernière relève que les actes d'engagements définitifs ont été signés par la société RT Alpe-Auris, nommément identifiée, après sa création, que la société Teixeira SDFP ne saurait faire grief aux actes d'engagements définitifs de porter le cachet de la Sata dans la mesure où cette dernière est l'associée unique de la société RT Alpe-Auris et d'être signés par M. [V], président de la société foncière SATA, qu'il n'y a jamais eu de substitution de maître d'ouvrage, qu'il existe une contestation sérieuse sur la mise en cause de la société Sata Group.
Par ailleurs, elles considèrent que:
- les réclamations de la société Teixeira SDFP n'ont été reçues que le 15 novembre 2022 par le maître de l'ouvrage, soit postérieurement au délai de 30 jours,
- c'est la date de réception du mémoire qui doit être prise en compte et non sa date d'envoi ainsi qu'il en résulte de la jurisprudence administrative,
- en l'absence de réclamations dans les délais, les décomptes généraux des lots n°14 et 15 sont devenus définitifs et intangibles.
Subsidiairement, elles font valoir que:
- le juge des référés ne peut accorder une provision sur une obligation qui résulte de l'exécution d'un marché de travaux nécessitant de procéder à un examen approfondi des pièces contractuelles, des documents versés et d'examiner les conditions de déroulement du chantier afin de déterminer les manquements respectifs des parties,
- en l'espèce, la société Teixeira SDFP a sollicité de multiples condamnations nécessitant d'analyser les rapports contractuels, d'examiner de façon détaillé les procès-verbaux de réception et l'historique de la construction et d'analyser les divers appels en garantie des parties entre elles,
- leur contestation est fondée et les demandes de provision doivent donc être rejetées.
Sur la prestation de nettoyage du parking, elles relèvent que le maître d'ouvrage a annoncé par courrier du 8 décembre 2021qu'il allait procéder à une réfaction pour des prestations de nettoyage non réalisées incluant le parking, que ce courrier n'a pas été contesté, que la société RT Alpe-Auris a fait réaliser le nettoyage des parkings par son personnel, que la prestation n'ayant pas été effectuée par la société Teixeira SDFP, la réfaction est justifiée.
Sur le coût de reprise des peintures R+2 et R+7, elles indiquent que les parties avaient convenu des modalités de prise en charge de certains surcoûts par le maître de l'ouvrage matérialisés par les factures des 12 novembre et 6 décembre 2021 qui ont été réglées, que la facture du 30 juin 2022 n'a jamais fait l'objet d'une commande de la société RT Alpe-Auris, qu'en tout état de cause, la société Electric Tolerie devra la garantir de toute condamnation en raison de ses manquements.
Sur le remplacement de la lasure par de la peinture, elles soulignent que la demande s'agissant des plafonds et des parois n'est justifiée par aucune pièce probante et qu'en outre la peinture est moins onéreuse que la lasure initialement prévue, que la société Teixeira SDFP n'apporte aucun élément pour justifier du contraire, qu'en tout état de cause, la société STGO devra la garantir de toute condamnation en raison de ses manquements.
Sur le traçage non terminé des places de parking, elles font observer que la société Teixeira SDFP reconnait ne pas avoir entièrement réalisé sa prestation, que le matériel entreposé sur le parking qui selon la société Teixeira SDFP ne lui a pas permis de finir sa prestation a nécessairement masqué les désordres lors de la réception, que ces désordres non visibles lors de la réception figurent dans un constat réalisé lors de la période de parfait achèvement, que la demande est donc sérieusement contestable, qu'en tout état de cause la société Tandem qui aurait dû inviter le maitre de l'ouvrage à formuler des réserves devra la garantir de toute condamnation en raison de ses manquements.
Sur la pénalité appliquée pour indisponibilité de 60 logements pendant une semaine, elles font valoir que la société Teixeira SDFP s'est engagée à terminer ses travaux pour le 22 octobre 2021, qu'elle n'apporte aucune indication sur l'impact précis des retards de la société Electric Tolerie sur l'avancement de ses propres prestations, qu'elle ne s'exonère pas de sa responsabilité contractuelle, que la société RT Alpe-Auris a subi un préjudice justifié dans son quantum, que la circonstance que certains logements soient exploités par une autre société est inopérante.
Sur l'imputation des factures de nettoyage, elles indiquent que la société RT Alpe-Auris n'a jamais demandé à la société RT Alpe-Auris de ne pas réaliser la prestation de nettoyage mais n'a fait que tirer la conséquence de son incapacité à la réaliser, qu'elle a dû faire appel à un tiers pour la réaliser.
Sur l'application de la lasure sur les menuiseries extérieures, elles font observer que la société Teixeira SDFP ne peut soutenir que sa prestation comprenait l'application de lasure sur l'ensemble des menuiseries extérieures dans la mesure où certaines d'entre elles ont été lasurées en usine par le fournisseur conformément au CCTP du lot concerné, que la société Teixeira SDFP ne justifie pas de l'exécution de sa prestation.
Sur le remplacement de la lasure par de la peinture, elles relèvent que la société Teixeira SDFP ne justifie pas du surcoût, qu'en tout état de cause, la société STGO devra la garantir de toute condamnation en raison de ses manquements.
Sur la réfaction au titre de la levée des réserves, elles soulignent que la société Teixeira SDFP a bien été conviée aux opérations de levée des réserves par le planning de levée des réserves, qu'elle ne démontre pas avoir effectivement procédé à la levée des réserves, que le maître de l'ouvrage a donc appliqué les réfactions justifiées, qu'en tout état de cause, si la cour considère que le maître de l'ouvrage n'était pas fondé à procéder à une réfaction en l'absence de mise en demeure, la société Tandem qui devait effectuer le suivi des réserves devra la garantir de toute condamnation en raison de ses manquements.
Sur les travaux supplémentaires au titre de la reprise des dégradations, elles font observer que la société Teixeira SDFP n'apporte aucun élément sur la nature et la portée des travaux de reprise qu'elle aurait été contrainte d'effectuer et son chiffrage n'est étayé par aucune pièce, qu'en tout état de cause, la société STGO et la société Electric Tolerie devront la garantir de toute condamnation en raison de leurs manquements.
En réponse aux moyens développés par la société Tandem Architecte, elles font remarquer que:
- le fait que le décompte général et définitif du maitre d'oeuvre a été réglé est inopérant,
- la responsabilité contractuelle du maître d'oeuvre peut être engagée pendant 10 ans,
- la société Tandem n'a pas reporté l'absence de finalisation de la prestation de traçage des places de parking malgré ses obligations au titre de l'assistance aux opérations de réception,
- la société Tandem n'apporte aucun élément s'agissant de sa responsabilité au sujet des menuiseries extérieures.
Sur la demande d'extension de la mesure d'expertise à la société Sata Group, celle-ci indique qu'aucune action n'est susceptible d'être intentée contre elle, que les décomptes généraux des lots n°14 et 15 sont devenus définitifs et intangibles, que l'action est manifestement vouée à l'échec, que la mesure d'instruction tend à pallier la carence de la société Teixeira SDFP.
La société RT Alpe-Auris conclut aussi que la demande de la société Tandem d'extension des mesures d'expertise à son encontre est infondée puisqu'aucune procédure au fond ne peut être engagée contre elle.
Prétentions et moyens de la société Tandem Architectes
Dans ses conclusions remises le 19 mars 2024, elle demande à la cour de:
- confirmer l'ordonnance de référé en ce qu'elle a dit que la mesure d'instruction interviendrait au contradictoire de la société RT Alpe-Auris,
- réformer l'ordonnance de référé en ce qu'elle a confié à l'expert judiciaire le chef de mission suivant :
« donner son avis sur le déroulement du chantier le planning d'intervention des entreprises notamment de la société Teixeira SDFP par rapport aux autres corps d'état; indiquer notamment l'éventuelle responsabilité de la maîtrise d'oeuvre, en l'espèce les sociétés Tandem Architectes et Sinequanon et des intervenants ' parties à la présente instance, dans le non-respect des délais contractuels et de ses conséquences » ,
- juger que la mission de l'expert portera uniquement sur les travaux des lots 3 (gros-oeuvre, STGO), 9 (menuiseries intérieures l'Art du bois), 14 peintures intérieures (Teixeira s DFP) et 21 (Electric-Tolerie) comme étant la cause des retards de chantier et le fondement des réclamations financières formulées par la société Teixeira SDFP dans le cadre de son décompte,
- rejeter toutes demandes formulées par la société RT Alpe-Auris au titre de sa demande de condamnation provisionnelle à la relever et garantir formulée à l'encontre de la société Tandem, cette dernière se heurtant à l'existence de contestations sérieuses, tant dans leur principe que dans leur quantum,
- confirmer en conséquence l'ordonnance de référé en ce qu'elle n'a prononcé à l'encontre de la société Tandem Architectes aucune condamnation,
- condamner la société RT Alpe-Auris et la société Sata Group ou qui mieux le devra, à payer à la société Tandem Architectes la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de la présente instance et les dépens de référé distraits au profit de maître Benoit Gerin, avocat sur son affirmation de droit, et ce par application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Sur les décomptes généraux des lots n°14 et 15, elle fait remarquer que le délai de contestation a expiré le 14 novembre et non pas le 13 novembre 2022 dès lors que ce dernier jour était un dimanche et qu'en outre, l'article 13.4.3 du CCAG fait état de l'envoi de la réponse dans le délai de 30 jours et non pas de la réception de cette réponse, qu'en tout état de cause ce débat relève du juge du fond, que les opérations d'expertise doivent impérativement se dérouler au contradictoire du maître de l'ouvrage.
Sur la mission de l'expertise, elle considère que la mission ne doit pas excéder le champs des réclamations formées par la société Teixeira SDFP et qu'en outre, il n'appartient pas à l'expert de se prononcer sur une éventuelle responsabilité du maître d'oeuvre.
Sur les demandes provisionnelles formées à son encontre par la société RT Alpe-Auris, elle relève que ces demandes se heurtent à une contestation sérieuse tant dans son principe que dans son quatum, que le maître de l'ouvrage a réglé le décompte général et définitif du maître d'oeuvre de sorte qu'il a mis fin aux relations contractuelles et qu'en outre, aucune faute n'est caractérisée à son encontre s'agissant de la non-réalisation du marquage des places de parking, qu'il a pris soin d'opérer une déduction dans le décompte général et définitif de l'entreprise.
Pour le surplus des demandes et des moyens développés, il convient de se reporter aux dernières écritures des parties en application de l'article 455 du code de procédure civile.
La Sas Electric-Tolerie et la Sas Société de travaux de gros oeuvre (S.T.G.O) n'ont pas constitué avocat.
Motifs de la décision :
1) Sur la mise hors de cause de la société Sata Group et l'extension de la mesure d'expertise à son égard
En vertu de l'article 145 du code de procédure civile, toute personne disposant d'un motif légitime peut obtenir sur requête ou en référé la désignation d'un expert pour rechercher et établir la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d'un litige.
Il est justifié d'un motif légitime lorsqu'il existe un litige potentiel entre les parties, que l'action au fond qui motive la mesure d'instruction n'est pas manifestement irrecevable ou dénuée de fondement.
En l'espèce, par deux courriers, la société Sata a informé la société Teixeira SDFP qu'elle était la mieux classée à l'issue de la consultation, qu'elle l'avait retenue pour la réalisation du lot 14 peintures intérieures et du lot 15 peintures extérieures et que le maître d'oeuvre allait lui transmettre les projets de marché dans les jours suivants qu'elle devait retourner signés.
Les marchés de travaux transmis à la société Teixeira SDFP et signés par elle mentionnaient comme maître de l'ouvrage la société Sata ou toute filiale substituée. Le CCAP faisait apparaître le nom de Sata comme maître de l'ouvrage.
Les marchés de travaux signés par les deux parties et produit par la société Sata Group et la société RT Alpe-Auris mentionnaient comme maître de l'ouvrage la Sata ou toute filiale substituée Sasu TR Alpe-Auris. Ils étaient signés par M. [V] et portait le cachet de la société Sata.
Ce n'est que postérieurement aux actes d'engagement que la société RT Alpe-Auris apparaît comme maître de l'ouvrage dans les ordres de service.
Dans la mesure où les pièces contractuelles liant les parties mentionnent la société Sata comme maître de l'ouvrage, tout procès à son encontre n'est pas manifestement irrecevable ou dénué de fondement.
La contestation sérieuse alléguée par les intimées est inopérante dès lors qu'il suffit qu'il existe un motif légitime pour mettre en oeuvre une mesure d'instruction sur le fondement de l'article 145 du code de procédure civile.
Par ailleurs, il existe un litige entre les parties sur le règlement des travaux.
Aux terme de l'article 13.4.3 du CCAG applicable au marché, dans un délai de trente jours compté à partir de la date à laquelle ce décompte général lui a été notifié, le titulaire envoie au représentant du pouvoir adjudicateur, avec copie au maître d''uvre, ce décompte revêtu de sa signature, avec ou sans réserves, ou fait connaître les motifs pour lesquels il refuse de le signer.
En application de l'article 668 du code de procédure civile, la date de notification par voie postale est, à l'égard de celui qui y procède, celle de l'expédition, et à l'égard de celui à qui elle est faite, la date de réception de la lettre.
Il se déduit de ces dispositions qu'il convient de prendre en compte la date d'expédition des mémoires en réclamation pour apprécier si le délai de 30 jours a été respecté par la société Teixeira SDFP.
Les décomptes généraux des lots 14 et 15 ont été notifiés à la société Teixeira SDFP le 14 octobre 2022. Le délai de réclamation commençant à courir le 15 octobre 2022 expirait le 14 novembre 2022, le 13 novembre étant un dimanche. La société Teixeira SDFP justifie avoir envoyé ses mémoires de contestation le 14 novembre 2022.
Dès lors, contrairement à ce qu'a retenu le premier juge, la société Teixeira SDFP ne se trouvait pas hors délai pour contester les décomptes généraux et ceux-ci n'ont pas acquis un caractère définitif.
En conséquence, la société Teixeira SDFP justifie bien d'un motif légitime pour voir organiser une mesure d'expertise en présence de la société Sata Group.
L'ordonnance sera infirmée en ce qu'elle a mis hors de cause la société Teixeira SDFP. L'expertise sera organisée au contradictoire de la société Sata Group.
2) Sur le contenu de la mission d'expertise
Dès lors que le litige porte sur l'application de pénalités de retard, la mission confiée à l'expert de donner son avis sur le déroulement du chantier et le planning d'intervention des entreprises, notamment de la société Teixeira SDFP par rapport aux autres corps d'état est parfaitement justifié. De même, il est loisible au juge de solliciter de l'expert des éléments pour apprécier les responsabilités des intervenants, étant précisé que le juge n'est pas tenu par l'avis de l'expert.
3) Sur la demande de provision
En application de l'article 873 du code de procédure civile, le président du tribunal de commerce peut accorder en référé une provision au créancier dans les cas où l'obligation n'est pas sérieusement contestable.
En l'espèce, la société Teixeira SDFP sollicite diverses provisions au titre de travaux supplémentaires, de travaux de reprise qui auraient été rendus nécessaires en raison des défaillances ou dégradations imputables à d'autres entreprises, de l'utilisation d'un matériau plus onéreux à la demande du maître d'oeuvre, de travaux qu'elle considère comme réalisés au regard du procès-verbal de réception, de travaux concernant des réserves et au titre des pénalités de retard appliquées selon elle de manière injustifiée, le retard étant imputable à d'autres corps d'état.
Ces demandes qui sont contestées et nécessitent d'analyser les rapports contractuels existant entre les parties, le procès-verbal de réception des travaux pour déterminer ou non le caractère apparent de certains désordres, les responsabilités des divers intervenants au chantier dans la survenue de certaine dégradations et leurs reprise ne relèvent pas de l'office du juge des référés.
En conséquence, l'ordonnance du 21 novembre 2023 sera confirmée en ce qu'elle a déboutée la société Teixeira SDFP de ses demandes de provision.
4) Sur les mesures accessoires
L'ordonnance sera infirmée en ce qu'elle a alloué la somme de 2.500 euros à la société RT Alpe-Auris au titre de l'article 700 du code de procédure civile. Il n'y a pas lieu d'allouer une somme à ce titre aux parties s'agissant de la première instance.
La société Sata Group succombant pour partie en appel sera condamnée aux dépens d'appel.
En équité, les parties seront déboutées de leur demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile au titre de l'appel.
PAR CES MOTIFS:
Statuant publiquement, par défaut, par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile et après en avoir délibéré conformément à la loi,
Infirme l'ordonnance rendue le 21 novembre 2023 par le juge des référés du tribunal de commerce de Grenoble en ce qu'elle a mis hors de la cause la société Sata Group et en ce qu'elle a condamné la société Teixeira SDFP à payer à la société RT Alpe-Auris la somme de 2.500 euros au titre de l'indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
La confirme en ses autres dispositions soumises à la cour.
Statuant à nouveau et ajoutant,
Déboute la société Sata Group de sa demande de mise hors de cause.
Dit que l'expertise ordonnée par l'ordonnance du 21 novembre 2023 sera réalisée au contradictoire de la société Sata Group.
Déboute la société Tandem Architectes de sa demande de modification de la mission d'expertise.
Condamne la société Sata Group aux dépens d'appel.
Déboute les parties de leur demande formée en application de l'article 700 du code de procédure civile tant en première instance qu'en appel.
Signé par Mme FIGUET, Présidente et par Mme RICHET, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
La Greffière La Présidente
C8
Minute N°
Copie exécutoire
délivrée le :
la SELARL RIONDET
la SELARL LEXAVOUE GRENOBLE-CHAMBERY
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE GRENOBLE
CHAMBRE COMMERCIALE
ARRÊT DU JEUDI 12 SEPTEMBRE 2024
Appel d'une ordonnance (N° RG 2023R00373)
rendue par le Tribunal de Commerce de GRENOBLE
en date du 21 novembre 2023
suivant déclaration d'appel du 12 décembre 2023
APPELANTE :
S.A.R.L. TEIXEIRA SDFP au capital de 15.000 €, inscrite au RCS de Grenoble sous le n°423 933 696, agissant poursuites et diligences de son dirigeant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège
[Adresse 1]
[Localité 3]
représentée par Me Michel DE GAUDEMARIS de la SELARL RIONDET, avocat au barreau de GRENOBLE, substitué et plaidant par Me PLOTTIN, avocat au barreau de GRENOBLE,
INTIMÉES :
Société R.T. ALPES-AURIS inscrite au RCS de Grenoble sous le n°880 306 550, agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège,
[Adresse 10]
[Localité 6]
Société SATA GROUP inscrite au RCS de Grenoble sous le n°775 595 960, agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège,
[Adresse 10]
[Localité 6]
représentées par Me Alexis GRIMAUD de la SELARL LEXAVOUE GRENOBLE-CHAMBERY, avocat au barreau de GRENOBLE, postulant et plaidant par Me DEBLIQUIS, avocat au barreau de LYON
S.A.R.L. TANDEM ARCHITECTES TANDEM ARCHITECTES, SARL immatriculée au RCS de GRENOBLE sous le n° 431 529 437, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège ;
[Adresse 2]
[Localité 3]
représentée par Me Benoit GERIN, avocat au barreau de GRENOBLE
S.A.S. ELECTRIC-TOLERIE agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux en exercice, domiciliés en cette qualité audit siège
[Adresse 7]
[Localité 4]
non représentée,
S.A.S. SOCIETE DE TRAVAUX DE GROS OEUVRE (S.T.G.O.) agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux en exercice, domiciliés en cette qualité audit siège
[Adresse 8]
[Localité 5]
non représentée,
COMPOSITION DE LA COUR :
LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :
Madame Marie-Pierre FIGUET, Présidente,
M. Lionel BRUNO, Conseiller,
Mme Raphaële FAIVRE, Conseillère,
Assistés lors des débats de Alice RICHET, Greffière,
DÉBATS :
A l'audience publique du 30 mai 2024, Mme FIGUET, Présidente, a été entendu en son rapport,
Les avocats ont été entendus en leurs conclusions et plaidoiries,
Puis l'affaire a été mise en délibéré pour que l'arrêt soit rendu ce jour,
Faits et procédure :
La société Sata a lancé une consultation pour la construction d'une résidence de tourisme à [Localité 9].
La maitrise d'oeuvre a été confiée à un groupement de sociétés dont la société Tandem.
La société Teixeira SDFP s'est vue confier les lots n°14 peintures intérieures et n°15 peintures extérieures.
La résidence devait être livrée le 18 décembre 2021.
En raison de retards de chantier et de malfaçons, la société Electric Tolerie, titulaire du lot 21 électricité, a vu son contrat résilié et le lot a été confié aux sociétés Electralpes et Bouygues Energie.
Alors même que les travaux n'étaient pas achevés, le maître de l'ouvrage a décidé d'une mise à disposition de l'ouvrage avant sa réception afin de pouvoir honorer des réservations de logements pour la saison hivernale 2021-2022. Des procès-verbaux d'état des lieux ont été dressés les 17 décembre 2021, 7 janvier 2022, 28 janvier 2022 et 4 février 2022.
Le 21 avril 2022, le maître d'ouvrage notifiait à la société Teixeira SDFP son approbation des procès-verbaux de réception prononcée avec réserves le 15 janvier 2022 et fixait la date limite pour la levée des réserves au 25 juin 2022.
Le 5 août 2022, il était notifié à la société Teixeira SDFP le procès-verbal de levée des réserves et la liste des réserves restant à lever. Il était appliqué une réfaction à hauteur de 34.510 euros. Cette réfaction était refusée par la société Teixeira SDFP.
Par courrier du 30 août 2022, la société Teixeira SDFP notifiait à la société Sata Group ainsi qu'au maître d'oeuvre ses projets de décompte final avec un solde restant dû de 235.302,61 euros pour le lot n°14 et un solde restant dû de 38.993,18 euros pour le lot n°15.
Par courrier recommandé du 13 octobre 2022, le maître de l'ouvrage a adressé à la société Teixeira SDFP le décompte général des travaux dont il résultait un solde de 81.493,56 euros ttc s'agissant du lot n°14 et un solde de 6.802,85 euros ttc s'agissant du lot n°15.
Par courriers recommandés du 14 novembre 2022, la société Teixeira SDFP maintenait ses demandes de paiement figurant dans son décompte et produisait un mémoire en réclamation.
Par acte du 15 juin 2023, la société Teixeira SDFP a saisi le juge des référés en paiement de provision.
Par ordonnance du 21 novembre 2023, le juge des référés du tribunal de commerce de Grenoble a:
- mis hors de cause la société Sata Group,
- débouté la société Teixeira SDFP de ses demandes de condamnations provisionnelles,
- désigné en qualité d'expert judiciaire M. [F],
- mis à la charge de la société Teixeira SDFP une consignation de 5.000 euros à valoir sur la rémunération de l'expert,
- condamné la société Teixeira SDFP à payer à la société RT Alpe-Auris la somme de 2.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné la société Teixeira SDFP aux entiers dépens.
Par déclaration du 12 décembre 2023, la société Teixeira SDFP a interjeté appel de cette ordonnance en ce qu'elle a mis hors de cause la société Sata Group, débouté la société Teixeira SDFP de ses demandes de condamnations provisionnelles et condamné la société Teixeira SDFP à payer à la société RT Alpe-Auris la somme de 2.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile en intimant la société Sata Group et la société RT Alpe-Auris.
Par actes d'huissier de justice du 20 février 2024, la société RT Alpe-Auris et la société Sata Group ont assigné la Sas Electric-Tolerie, la Sas Société de travaux de gros oeuvre (S.T.G.O) et la Sarl Tandem Architectes devant la cour d'appel de Grenoble en appel incident provoqué et ont saisi la cour de cet appel provoqué le 22 février 2024.
Les deux procédures ont été jointes le 14 mars 2024.
La clôture a été prononcée le 23 mai 2024.
Prétentions et moyens de la société Teixeira SDFP
Dans ses conclusions remises le 25 janvier 2024, elle demande à la cour de:
- réformer l'ordonnance attaquée en ce qu'elle a :
* mis hors de la cause la société Sata Group,
* débouté la société Teixeira SDFP de l'intégralité de ses demandes de condamnations provisionnelles,
* condamné la société Teixeira SDFP à payer à la société Sata Group la somme de 2.500 euros à titre d'indemnité sur le fondement de l'article 700,
Statuant à nouveau,
- rejeter la demande de mise hors de cause de la société Sata Group et étendre la mesure d'expertise ordonnée par la juridiction du premier degré à son contradictoire,
- condamner in solidum à titre provisionnel la société Sata Group et la société RT Alpe-Auris à payer à la société Teixeira SDFP la somme de 2.000 euros h.t. au titre de la prestation de nettoyage du parking réalisée,
- condamner in solidum à titre provisionnel la société Sata Group et la société RT Alpe-Auris à payer à la société Teixeira SDFP la somme de 11.340 euros h.t. au titre des travaux de reprises réalisés au r+2 et r+7,
- condamner in solidum à titre provisionnel la société Sata Group et la société RT Alpe-Auris à payer à la société Teixeira SDFP la somme de 9.107,20 euros h.t. au titre de la plusvalue pour l'application d'une peinture sur les plafonds et parois bétons intérieures,
- condamner in solidum à titre provisionnel la société Sata Group et la société RT Alpe-Auris à payer à la société Teixeira SDFP la somme de 1.968,44 euros h.t au titre de la prestation de marquage du parking réalisée,
- condamner in solidum à titre provisionnel la société Sata Group et la société RT Alpe-Auris à payer à la société Teixeira SDFP la somme de 18.000 euros h.t. au titre de la moins-value appliquée pour indemniser le préjudice de location du maître d'ouvrage,
- condamner in solidum à titre provisionnel la société Sata Group et la société RT Alpe-Auris à payer à la société Teixeira SDFP la somme de 1.940 € h.t. au titre de la moins-value correspondant au nettoyage des sols réalisés par un autre prestataire,
- condamner in solidum à titre provisionnel la société Sata Group et la société RT Alpe-Auris à payer à la société Teixeira SDFP la somme de 12.397,73 € h.t. au titre de la prestation d'application d'une lasure sur les menuiseries extérieures,
- condamner in solidum à titre provisionnel la société Sata Group et la société RT Alpe-Auris à payer à la société Teixeira SDFP la somme de 9.662,44 euros h.t. au titre de la plus-value pour l'application d'une peinture sur les plafonds bétons extérieures,
- condamner in solidum à titre provisionnel la société Sata Group et la société RT Alpe-Auris à payer à la société Teixeira SDFP la somme de 12.397,73 euros h.t. au titre de la prestation d'application d'une lasure sur les menuiseries extérieures,
- condamner in solidum à titre provisionnel la société Sata Group et la société RT Alpe-Auris à payer à la société Teixeira SDFP la somme de 34.510 € h.t. au titre de la réfaction appliquée en raison de réserves non levées ou traitées de manière non satisfaisante,
- condamner in solidum à titre provisionnel la société Sata Group et la société RT Alpe-Auris à payer à la société Teixeira SDFP la somme de 64.890 euros h.t. au titre des travaux de reprises suite à la détérioration de ses ouvrages réalisés dans le cadre des lots 14 et 15,
- condamner in solidum à titre provisionnel la société Sata Group et la société RT Alpe-Auris à payer à la société Teixeira SDFP la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Sur le caractère de co-contractant de la société Sata Group, elle fait valoir que:
- les deux actes d'engagement qui lui ont été adressés mentionnaient en en-tête : 'SATA ou toute filiale substituée',
- les actes d'engagement régularisés indiquaient en en-tête : 'Maître d'ouvrage SATA ou toute filiale substituée SASU RT ALPE AURIS', la substitution demeurant ainsi une faculté dont la mise en oeuvre n'avait pas été acté de manière certaine,
- ces documents ont été signés par la SATA,
- ce n'est que postérieurement à la conclusion des marchés que le maître d'ouvrage a mis en oeuvre la faculté de substitution, les ordres de services étant alors signés par la Sasu RT Alpes-Auris,
- la société Sata Group ne peut soutenir qu'elle a conclu un contrat pour le compte d'une société en formation alors que le contrat n'a pas été conclu pour le compte de la société en formation,
- seule une cession de contrat était susceptible d'ériger la société RT Alpe-Auris en qualité de co-contractant,
- l'ordonnance doit donc être réformée en ce qu'elle a mis la société Sata Group hors de cause.
Sur l'absence de caractère définitif des décomptes généraux, elle fait observer que:
- pour apprécier le respect du délai de 30 jours dont disposait la société Teixeira SDFP pour contester le projet de décompte général et notifier ses mémoires en réclamation, il convient de tenir compte de la date d'expédition en application de l'article 668 du code de procédure civile,
- le délai expirant le 14 novembre 2022 et les courriers recommandés ayant été expédiés le 14 novembre 2022, la contestation quant au caractère définitif et intangible du décompte qu'elles ont établi n'est donc pas sérieuse.
Sur ses demandes de provisions, elle indique que:
- dès lors que des travaux supplémentaires ou des travaux de reprise sont imputables à la défaillance ou à la dégradation commise par d'autres corps d'état, elle est bien fondée à solliciter leur condamnation in solidum avec le maître de l'ouvrage à l'indemniser à titre provisionnel du préjudice causé sur un fondement quasi-délictuel,
- s'agissant de la prestation de nettoyage du parking, elle a bien procédé au nettoyage de livraison de la zone parking, aucune réserve ne figure à ce titre dans le procès-verbal de réception, le maitre de l'ouvrage ne justifie pas avoir fait réaliser ce nettoyage par un autre prestataire, cette prestation effectuée doit donc être réglée,
- sur le coût de reprise des peintures au niveau R+7 et R+2, elle a dû réaliser une prestation complémentaire s'agissant des faux plafonds installés dans les coursives en raison des non-conformités des cablages électriques ainsi qu'il en résulte des comptes rendus du maître d'oeuvre, au demeurant le maître de l'ouvrage a bien appliqué une plus-value pour les reprises de peinture des niveaux 3, 4, 5 et 6, son refus d'appliquer une plus-value pour les niveaux 2 et 7 est donc infondée,
- le remplacement de la lasure sur béton par de la peinture hydropliolite a été rendu nécessaire par l'état insatisfaisant des sous-faces de dalles coursive, les parois des coursives ont dû aussi être peintes, le maître d'ouvrage a appliqué à tort une moins value alors que le coût de la peinture est supérieur à celui de la lasure,
- le traçage des places de parking doit être réglé en totalité dès lors qu'il n'est mentionné aucune réserve sur le procès-verbal de réception à ce titre et que la réception entraine la purge des défauts de conformité apparents,
- concernant l'application de pénalités de retard, elle indique que si elle s'était engagée à respecter la date d'achèvement de ses travaux au 22 octobre 2021, cet engagement était conditionné à l'absence de nouveaux retards, or la société Electric Tolerie a continué d'accumuler d'importants retards, les malfaçons de cette société ont nécessité des travaux supplémentaires, le maître d'oeuvre a noté dans son compte rendu l'incidence des non-conformités du lot électricité sur le planning du lot peinture intérieures, en outre le maître d'ouvrage ne démontre ni la réalité de son préjudice, ni son imputabilité à la société Teixeira SDFP, d'autant que les locaux étaient exploités par la société Vacancéole,
- sur l'imputation des factures de nettoyage, il lui a été demandé de ne pas procéder au nettoyage de livraison des appartements, dès lors elle n'a pas été réglée de cette prestation, elle ne peut donc supporter des factures de nettoyage,
- l'application de lasure sur les menuiseries extérieures a bien été réalisée et la société RT Alpe-Auris ne peut s'opposer au paiement au motif que la société Teixeira SDFP ne justifie pas du montant exact des prestations effectuées alors qu'il s'agit d'un montant forfaitaire, le fait que la prestation a déjà été confiée à un autre lot qui livrait ses matériaux lasurés d'usine ne peut lui être opposé,
- s'agissant pour les peintures extérieures du remplacement de la lasure sur béton par une peinture, celui-ci lui a été demandé par le maître d'oeuvre, or alors que le coût d'une peinture est supérieure à celui d'une peinture, le maitre d'ouvrage a refusé d'appliquer une plus value,
- concernant les réserves, elle n'a jamais été convoquée aux opérations de levées des réserves, elle n'a jamais été mise en demeure de procéder à la levée des réserves qui n'auraient pas été levées, le délai de la garantie de parfait achèvement est écoulé,
- la défaillance de la société Electric Tolerie a imposé une circulation permanente des intervenants dans les parties communes ce qui a conduit à des dégradations lui imposant des travaux de reprise pour un coût de 55.440 euros outre des travaux de reprise des peintures des parois extérieures après des manquements de la société STGO, le maître de l'ouvrage lui doit donc cette somme.
Prétentions et moyens de la société RT Alpe-Auris et de la société Sata Group
Dans leurs conclusions remises le 12 avril 2024, elles demandent à la cour de:
A titre principal :
- confirmer l'ordonnance entreprise en toutes ses dispositions,
- débouter la société Teixeira SDFP de son appel et de l'intégralité de ses prétentions à l'encontre des sociétés Sata Group et RT Alpe-Auris,
A titre subsidiaire, si par impossible, une condamnation devait intervenir à l'encontre de la société RT Alpe-Auris et de la société Sata Group, condamner:
* la société Electric Tolerie à la garantir de toute condamnation éventuelle au titre des coûts de reprise des peintures aux niveaux r+2 et r+7,
* la société STGO à la garantir de toute condamnation éventuelle au titre du remplacement de la lasure sur béton par de la peinture en plafond dans le cadre de l'exécution du lot n°14,
* la société Tandem Architecte à la garantir de toute condamnation éventuelle au titre des réfactions imputées à la société Teixeira SDFP en raison de la non-réalisation de traçage des places de parking,
* la société Tandem Architecte à garantir toute condamnation éventuelle au titre de l'application de lasure sur les menuiseries extérieures,
* la société STGO à la garantir de toute condamnation éventuelle au titre du remplacement de la lasure sur béton par de la peinture en plafond dans le cadre de l'exécution du lot n°15,
* la société Tandem Architecte à la garantir de toute condamnation éventuelle au titre des réfactions pour les réserves non levées,
* les sociétés Electric Tolerie et STGO à la garantir de toute condamnation éventuelle au titre des travaux de reprises effectuées par la société Teixeira à la suite de dégradations par d'autres corps d'état,
En tout état de cause :
- débouter la société Tandem Architecte de l'ensemble de ses demandes
- condamner la société Teixeira SDFP, et le cas échéant toute autre partie succombante, à payer à la société Sata Group et à la société RT Alpe-Auris chacune la somme de 6.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi que les entiers dépens de l'instance.
Sur l'absence de lien contractuel entre la société Teixeira SDFP et la société Sata Group, cette dernière relève que les actes d'engagements définitifs ont été signés par la société RT Alpe-Auris, nommément identifiée, après sa création, que la société Teixeira SDFP ne saurait faire grief aux actes d'engagements définitifs de porter le cachet de la Sata dans la mesure où cette dernière est l'associée unique de la société RT Alpe-Auris et d'être signés par M. [V], président de la société foncière SATA, qu'il n'y a jamais eu de substitution de maître d'ouvrage, qu'il existe une contestation sérieuse sur la mise en cause de la société Sata Group.
Par ailleurs, elles considèrent que:
- les réclamations de la société Teixeira SDFP n'ont été reçues que le 15 novembre 2022 par le maître de l'ouvrage, soit postérieurement au délai de 30 jours,
- c'est la date de réception du mémoire qui doit être prise en compte et non sa date d'envoi ainsi qu'il en résulte de la jurisprudence administrative,
- en l'absence de réclamations dans les délais, les décomptes généraux des lots n°14 et 15 sont devenus définitifs et intangibles.
Subsidiairement, elles font valoir que:
- le juge des référés ne peut accorder une provision sur une obligation qui résulte de l'exécution d'un marché de travaux nécessitant de procéder à un examen approfondi des pièces contractuelles, des documents versés et d'examiner les conditions de déroulement du chantier afin de déterminer les manquements respectifs des parties,
- en l'espèce, la société Teixeira SDFP a sollicité de multiples condamnations nécessitant d'analyser les rapports contractuels, d'examiner de façon détaillé les procès-verbaux de réception et l'historique de la construction et d'analyser les divers appels en garantie des parties entre elles,
- leur contestation est fondée et les demandes de provision doivent donc être rejetées.
Sur la prestation de nettoyage du parking, elles relèvent que le maître d'ouvrage a annoncé par courrier du 8 décembre 2021qu'il allait procéder à une réfaction pour des prestations de nettoyage non réalisées incluant le parking, que ce courrier n'a pas été contesté, que la société RT Alpe-Auris a fait réaliser le nettoyage des parkings par son personnel, que la prestation n'ayant pas été effectuée par la société Teixeira SDFP, la réfaction est justifiée.
Sur le coût de reprise des peintures R+2 et R+7, elles indiquent que les parties avaient convenu des modalités de prise en charge de certains surcoûts par le maître de l'ouvrage matérialisés par les factures des 12 novembre et 6 décembre 2021 qui ont été réglées, que la facture du 30 juin 2022 n'a jamais fait l'objet d'une commande de la société RT Alpe-Auris, qu'en tout état de cause, la société Electric Tolerie devra la garantir de toute condamnation en raison de ses manquements.
Sur le remplacement de la lasure par de la peinture, elles soulignent que la demande s'agissant des plafonds et des parois n'est justifiée par aucune pièce probante et qu'en outre la peinture est moins onéreuse que la lasure initialement prévue, que la société Teixeira SDFP n'apporte aucun élément pour justifier du contraire, qu'en tout état de cause, la société STGO devra la garantir de toute condamnation en raison de ses manquements.
Sur le traçage non terminé des places de parking, elles font observer que la société Teixeira SDFP reconnait ne pas avoir entièrement réalisé sa prestation, que le matériel entreposé sur le parking qui selon la société Teixeira SDFP ne lui a pas permis de finir sa prestation a nécessairement masqué les désordres lors de la réception, que ces désordres non visibles lors de la réception figurent dans un constat réalisé lors de la période de parfait achèvement, que la demande est donc sérieusement contestable, qu'en tout état de cause la société Tandem qui aurait dû inviter le maitre de l'ouvrage à formuler des réserves devra la garantir de toute condamnation en raison de ses manquements.
Sur la pénalité appliquée pour indisponibilité de 60 logements pendant une semaine, elles font valoir que la société Teixeira SDFP s'est engagée à terminer ses travaux pour le 22 octobre 2021, qu'elle n'apporte aucune indication sur l'impact précis des retards de la société Electric Tolerie sur l'avancement de ses propres prestations, qu'elle ne s'exonère pas de sa responsabilité contractuelle, que la société RT Alpe-Auris a subi un préjudice justifié dans son quantum, que la circonstance que certains logements soient exploités par une autre société est inopérante.
Sur l'imputation des factures de nettoyage, elles indiquent que la société RT Alpe-Auris n'a jamais demandé à la société RT Alpe-Auris de ne pas réaliser la prestation de nettoyage mais n'a fait que tirer la conséquence de son incapacité à la réaliser, qu'elle a dû faire appel à un tiers pour la réaliser.
Sur l'application de la lasure sur les menuiseries extérieures, elles font observer que la société Teixeira SDFP ne peut soutenir que sa prestation comprenait l'application de lasure sur l'ensemble des menuiseries extérieures dans la mesure où certaines d'entre elles ont été lasurées en usine par le fournisseur conformément au CCTP du lot concerné, que la société Teixeira SDFP ne justifie pas de l'exécution de sa prestation.
Sur le remplacement de la lasure par de la peinture, elles relèvent que la société Teixeira SDFP ne justifie pas du surcoût, qu'en tout état de cause, la société STGO devra la garantir de toute condamnation en raison de ses manquements.
Sur la réfaction au titre de la levée des réserves, elles soulignent que la société Teixeira SDFP a bien été conviée aux opérations de levée des réserves par le planning de levée des réserves, qu'elle ne démontre pas avoir effectivement procédé à la levée des réserves, que le maître de l'ouvrage a donc appliqué les réfactions justifiées, qu'en tout état de cause, si la cour considère que le maître de l'ouvrage n'était pas fondé à procéder à une réfaction en l'absence de mise en demeure, la société Tandem qui devait effectuer le suivi des réserves devra la garantir de toute condamnation en raison de ses manquements.
Sur les travaux supplémentaires au titre de la reprise des dégradations, elles font observer que la société Teixeira SDFP n'apporte aucun élément sur la nature et la portée des travaux de reprise qu'elle aurait été contrainte d'effectuer et son chiffrage n'est étayé par aucune pièce, qu'en tout état de cause, la société STGO et la société Electric Tolerie devront la garantir de toute condamnation en raison de leurs manquements.
En réponse aux moyens développés par la société Tandem Architecte, elles font remarquer que:
- le fait que le décompte général et définitif du maitre d'oeuvre a été réglé est inopérant,
- la responsabilité contractuelle du maître d'oeuvre peut être engagée pendant 10 ans,
- la société Tandem n'a pas reporté l'absence de finalisation de la prestation de traçage des places de parking malgré ses obligations au titre de l'assistance aux opérations de réception,
- la société Tandem n'apporte aucun élément s'agissant de sa responsabilité au sujet des menuiseries extérieures.
Sur la demande d'extension de la mesure d'expertise à la société Sata Group, celle-ci indique qu'aucune action n'est susceptible d'être intentée contre elle, que les décomptes généraux des lots n°14 et 15 sont devenus définitifs et intangibles, que l'action est manifestement vouée à l'échec, que la mesure d'instruction tend à pallier la carence de la société Teixeira SDFP.
La société RT Alpe-Auris conclut aussi que la demande de la société Tandem d'extension des mesures d'expertise à son encontre est infondée puisqu'aucune procédure au fond ne peut être engagée contre elle.
Prétentions et moyens de la société Tandem Architectes
Dans ses conclusions remises le 19 mars 2024, elle demande à la cour de:
- confirmer l'ordonnance de référé en ce qu'elle a dit que la mesure d'instruction interviendrait au contradictoire de la société RT Alpe-Auris,
- réformer l'ordonnance de référé en ce qu'elle a confié à l'expert judiciaire le chef de mission suivant :
« donner son avis sur le déroulement du chantier le planning d'intervention des entreprises notamment de la société Teixeira SDFP par rapport aux autres corps d'état; indiquer notamment l'éventuelle responsabilité de la maîtrise d'oeuvre, en l'espèce les sociétés Tandem Architectes et Sinequanon et des intervenants ' parties à la présente instance, dans le non-respect des délais contractuels et de ses conséquences » ,
- juger que la mission de l'expert portera uniquement sur les travaux des lots 3 (gros-oeuvre, STGO), 9 (menuiseries intérieures l'Art du bois), 14 peintures intérieures (Teixeira s DFP) et 21 (Electric-Tolerie) comme étant la cause des retards de chantier et le fondement des réclamations financières formulées par la société Teixeira SDFP dans le cadre de son décompte,
- rejeter toutes demandes formulées par la société RT Alpe-Auris au titre de sa demande de condamnation provisionnelle à la relever et garantir formulée à l'encontre de la société Tandem, cette dernière se heurtant à l'existence de contestations sérieuses, tant dans leur principe que dans leur quantum,
- confirmer en conséquence l'ordonnance de référé en ce qu'elle n'a prononcé à l'encontre de la société Tandem Architectes aucune condamnation,
- condamner la société RT Alpe-Auris et la société Sata Group ou qui mieux le devra, à payer à la société Tandem Architectes la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de la présente instance et les dépens de référé distraits au profit de maître Benoit Gerin, avocat sur son affirmation de droit, et ce par application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Sur les décomptes généraux des lots n°14 et 15, elle fait remarquer que le délai de contestation a expiré le 14 novembre et non pas le 13 novembre 2022 dès lors que ce dernier jour était un dimanche et qu'en outre, l'article 13.4.3 du CCAG fait état de l'envoi de la réponse dans le délai de 30 jours et non pas de la réception de cette réponse, qu'en tout état de cause ce débat relève du juge du fond, que les opérations d'expertise doivent impérativement se dérouler au contradictoire du maître de l'ouvrage.
Sur la mission de l'expertise, elle considère que la mission ne doit pas excéder le champs des réclamations formées par la société Teixeira SDFP et qu'en outre, il n'appartient pas à l'expert de se prononcer sur une éventuelle responsabilité du maître d'oeuvre.
Sur les demandes provisionnelles formées à son encontre par la société RT Alpe-Auris, elle relève que ces demandes se heurtent à une contestation sérieuse tant dans son principe que dans son quatum, que le maître de l'ouvrage a réglé le décompte général et définitif du maître d'oeuvre de sorte qu'il a mis fin aux relations contractuelles et qu'en outre, aucune faute n'est caractérisée à son encontre s'agissant de la non-réalisation du marquage des places de parking, qu'il a pris soin d'opérer une déduction dans le décompte général et définitif de l'entreprise.
Pour le surplus des demandes et des moyens développés, il convient de se reporter aux dernières écritures des parties en application de l'article 455 du code de procédure civile.
La Sas Electric-Tolerie et la Sas Société de travaux de gros oeuvre (S.T.G.O) n'ont pas constitué avocat.
Motifs de la décision :
1) Sur la mise hors de cause de la société Sata Group et l'extension de la mesure d'expertise à son égard
En vertu de l'article 145 du code de procédure civile, toute personne disposant d'un motif légitime peut obtenir sur requête ou en référé la désignation d'un expert pour rechercher et établir la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d'un litige.
Il est justifié d'un motif légitime lorsqu'il existe un litige potentiel entre les parties, que l'action au fond qui motive la mesure d'instruction n'est pas manifestement irrecevable ou dénuée de fondement.
En l'espèce, par deux courriers, la société Sata a informé la société Teixeira SDFP qu'elle était la mieux classée à l'issue de la consultation, qu'elle l'avait retenue pour la réalisation du lot 14 peintures intérieures et du lot 15 peintures extérieures et que le maître d'oeuvre allait lui transmettre les projets de marché dans les jours suivants qu'elle devait retourner signés.
Les marchés de travaux transmis à la société Teixeira SDFP et signés par elle mentionnaient comme maître de l'ouvrage la société Sata ou toute filiale substituée. Le CCAP faisait apparaître le nom de Sata comme maître de l'ouvrage.
Les marchés de travaux signés par les deux parties et produit par la société Sata Group et la société RT Alpe-Auris mentionnaient comme maître de l'ouvrage la Sata ou toute filiale substituée Sasu TR Alpe-Auris. Ils étaient signés par M. [V] et portait le cachet de la société Sata.
Ce n'est que postérieurement aux actes d'engagement que la société RT Alpe-Auris apparaît comme maître de l'ouvrage dans les ordres de service.
Dans la mesure où les pièces contractuelles liant les parties mentionnent la société Sata comme maître de l'ouvrage, tout procès à son encontre n'est pas manifestement irrecevable ou dénué de fondement.
La contestation sérieuse alléguée par les intimées est inopérante dès lors qu'il suffit qu'il existe un motif légitime pour mettre en oeuvre une mesure d'instruction sur le fondement de l'article 145 du code de procédure civile.
Par ailleurs, il existe un litige entre les parties sur le règlement des travaux.
Aux terme de l'article 13.4.3 du CCAG applicable au marché, dans un délai de trente jours compté à partir de la date à laquelle ce décompte général lui a été notifié, le titulaire envoie au représentant du pouvoir adjudicateur, avec copie au maître d''uvre, ce décompte revêtu de sa signature, avec ou sans réserves, ou fait connaître les motifs pour lesquels il refuse de le signer.
En application de l'article 668 du code de procédure civile, la date de notification par voie postale est, à l'égard de celui qui y procède, celle de l'expédition, et à l'égard de celui à qui elle est faite, la date de réception de la lettre.
Il se déduit de ces dispositions qu'il convient de prendre en compte la date d'expédition des mémoires en réclamation pour apprécier si le délai de 30 jours a été respecté par la société Teixeira SDFP.
Les décomptes généraux des lots 14 et 15 ont été notifiés à la société Teixeira SDFP le 14 octobre 2022. Le délai de réclamation commençant à courir le 15 octobre 2022 expirait le 14 novembre 2022, le 13 novembre étant un dimanche. La société Teixeira SDFP justifie avoir envoyé ses mémoires de contestation le 14 novembre 2022.
Dès lors, contrairement à ce qu'a retenu le premier juge, la société Teixeira SDFP ne se trouvait pas hors délai pour contester les décomptes généraux et ceux-ci n'ont pas acquis un caractère définitif.
En conséquence, la société Teixeira SDFP justifie bien d'un motif légitime pour voir organiser une mesure d'expertise en présence de la société Sata Group.
L'ordonnance sera infirmée en ce qu'elle a mis hors de cause la société Teixeira SDFP. L'expertise sera organisée au contradictoire de la société Sata Group.
2) Sur le contenu de la mission d'expertise
Dès lors que le litige porte sur l'application de pénalités de retard, la mission confiée à l'expert de donner son avis sur le déroulement du chantier et le planning d'intervention des entreprises, notamment de la société Teixeira SDFP par rapport aux autres corps d'état est parfaitement justifié. De même, il est loisible au juge de solliciter de l'expert des éléments pour apprécier les responsabilités des intervenants, étant précisé que le juge n'est pas tenu par l'avis de l'expert.
3) Sur la demande de provision
En application de l'article 873 du code de procédure civile, le président du tribunal de commerce peut accorder en référé une provision au créancier dans les cas où l'obligation n'est pas sérieusement contestable.
En l'espèce, la société Teixeira SDFP sollicite diverses provisions au titre de travaux supplémentaires, de travaux de reprise qui auraient été rendus nécessaires en raison des défaillances ou dégradations imputables à d'autres entreprises, de l'utilisation d'un matériau plus onéreux à la demande du maître d'oeuvre, de travaux qu'elle considère comme réalisés au regard du procès-verbal de réception, de travaux concernant des réserves et au titre des pénalités de retard appliquées selon elle de manière injustifiée, le retard étant imputable à d'autres corps d'état.
Ces demandes qui sont contestées et nécessitent d'analyser les rapports contractuels existant entre les parties, le procès-verbal de réception des travaux pour déterminer ou non le caractère apparent de certains désordres, les responsabilités des divers intervenants au chantier dans la survenue de certaine dégradations et leurs reprise ne relèvent pas de l'office du juge des référés.
En conséquence, l'ordonnance du 21 novembre 2023 sera confirmée en ce qu'elle a déboutée la société Teixeira SDFP de ses demandes de provision.
4) Sur les mesures accessoires
L'ordonnance sera infirmée en ce qu'elle a alloué la somme de 2.500 euros à la société RT Alpe-Auris au titre de l'article 700 du code de procédure civile. Il n'y a pas lieu d'allouer une somme à ce titre aux parties s'agissant de la première instance.
La société Sata Group succombant pour partie en appel sera condamnée aux dépens d'appel.
En équité, les parties seront déboutées de leur demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile au titre de l'appel.
PAR CES MOTIFS:
Statuant publiquement, par défaut, par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile et après en avoir délibéré conformément à la loi,
Infirme l'ordonnance rendue le 21 novembre 2023 par le juge des référés du tribunal de commerce de Grenoble en ce qu'elle a mis hors de la cause la société Sata Group et en ce qu'elle a condamné la société Teixeira SDFP à payer à la société RT Alpe-Auris la somme de 2.500 euros au titre de l'indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
La confirme en ses autres dispositions soumises à la cour.
Statuant à nouveau et ajoutant,
Déboute la société Sata Group de sa demande de mise hors de cause.
Dit que l'expertise ordonnée par l'ordonnance du 21 novembre 2023 sera réalisée au contradictoire de la société Sata Group.
Déboute la société Tandem Architectes de sa demande de modification de la mission d'expertise.
Condamne la société Sata Group aux dépens d'appel.
Déboute les parties de leur demande formée en application de l'article 700 du code de procédure civile tant en première instance qu'en appel.
Signé par Mme FIGUET, Présidente et par Mme RICHET, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
La Greffière La Présidente