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Décisions

CA Toulouse, 2e ch., 3 septembre 2024, n° 22/02487

TOULOUSE

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Défendeur :

Somco (SARL)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Salmeron

Conseillers :

Mme Moulayes, Mme Norguet

Avocats :

Me Hortal, Me de Firmas de Peries

T. com. Toulouse, du 2 juin 2022, n° 202…

2 juin 2022

Faits et procédure

Par immatriculation au Registre du Commerce et des Sociétés de Toulouse le 19 novembre 2004, Monsieur Jean-[L] [P] et

Monsieur [U] [O] ont constitué la Sarl Somco - Société Menude Construction, pour une durée de 99 ans et avec pour objet social toutes activités commerciales et civiles et plus particulièrement la réalisation d'opérations immobilières, activités de marchands de biens, promoteur, lotisseur.

Le capital et la direction de la société ont été partagés à parts égales entre les deux associés :

- Monsieur [P] : 50 parts sociales et cogérant,

- Monsieur [O] : 50 parts sociales et cogérant.

Il a été convenu que les comptes de la société Somco soient établis par le cabinet Sdcg de [Localité 5] après le déménagement de Monsieur [O] dans cette ville.

Monsieur [P] a contesté la validité des assemblées générales de Somco des 17 mars 2017, 17 mars 2018 et 17 mars 2019 au motif que ces assemblées ont eu lieu en dehors de sa présence, sans qu'il y soit convoqué et sans que la comptabilité de la société Somco lui soit préalablement communiquée.

Exposé du litige

Par acte d'huissier de justice en date du 12 mars 2020, Monsieur [P] a assigné Monsieur [O] et la société Somco devant le tribunal de commerce de Toulouse afin que les assemblées générales de la société Somco en date des 17 mars 2017, 17 mars 2018 et 17 mars 2019 soient annulées.

Par jugement en date du 25 novembre 2021, le tribunal de commerce de Toulouse a ordonné la radiation administrative de l'affaire.

Par voie de conclusions, Monsieur [P] a sollicité sa réinscription au rôle.

Par jugement du 2 juin 2022, le tribunal de commerce de Toulouse a :

- dit irrecevables les conclusions de la Sarl Somco-Société Menude Construction,

- débouté Monsieur Jean-[L] [P] de toutes ses demandes,

- condamné Monsieur Jean-[L] [P] à payer à Monsieur [U] [O] la somme de 2 000 euros au titre l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné Monsieur Jean-[L] [P] aux dépens.

Par déclaration en date du 1er juillet 2022, Monsieur Jean-[L] [P] a relevé appel du jugement. La portée de l'appel est la réformation de l'ensemble des chefs du jugement, que la déclaration d'appel critique tous expressément.

La clôture est intervenue le 15 avril 2024.

Prétentions et moyens

Vu les conclusions devant la Cour d'appel n°2 notifiées le 5 avril 2023 auxquelles il est fait expressément référence pour l'énoncé du détail de l'argumentation, de Monsieur Jean-[L] [P] demandant, au visa des articles 381 et 383 du code de procédure civile, 16, 19, 20, 22 et 23 des statuts, L223-25 et L223-26 du code de commerce, de :

- réformer le jugement du tribunal de commerce de Toulouse du 2 Juin 2022 en toutes ses dispositions,

Et statuant à nouveau,

- sur l'annulation des assemblées générales de la Société Somco en date des 17 Mars 2017, 17 Mars 2018 et 17 Mars 2019 :

- annuler les Assemblées Générales de la Société Somco en date des 17 Mars 2017, 17 Mars 2018 et 17 Mars 2019 ;

- condamner Mr [U] [O], sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la signification du jugement à intervenir, à communiquer les documents suivants à compter du mois de janvier 2016 et jusqu'à la date de l'arrêt à intervenir :

- les bilans (sous forme de plaquettes) correspondant aux exercices clos du 31 décembre 2016 jusqu'à la date de l'arrêt à intervenir, liasses fiscales correspondant aux exercices clos du 31 décembre 2019 jusqu'à la date de l'arrêt à intervenir, balances arrêtées au proche de la date de l'arrêt à intervenir,

- grands livres avec factures correspondant aux exercices clos du 1er Janvier 2016 jusqu'à la date de l'arrêt à intervenir,

- factures émises par Somco correspondant aux exercices clos du 1er Janvier 2016 jusqu'à la date de l'arrêt à intervenir,

- factures des créanciers de la Société Somco correspondant aux exercices clos du 1er Janvier 2016 jusqu'à la date de l'arrêt à intervenir,

- détail des comptes courants correspondant aux exercices clos du 1er Janvier 2016 jusqu'à la date de l'arrêt à intervenir,

- tous contrats et engagement signés par la Société Somco par l'intermédiaire de Mr [O] correspondant aux exercices clos du 1er Janvier 2016 jusqu'à la date de l'Arrêt à intervenir,

- les relevés de comptes correspondant aux exercices clos du 1er Janvier 2016 jusqu'à la date de l'arrêt à intervenir,

- le registre des Assemblées et les rapports de la gérance correspondant aux exercices clos du 31 Décembre 2016 jusqu'à la date de l'Arrêt à intervenir ;

- sur la révocation de Mr [O] de ses fonctions de cogérant de la Société Somco ;

- révoquer Mr [U] [O] de ses fonctions de cogérant de la Société Somco ;

- en toutes hypothèses

- condamner Monsieur [U] [O] à payer à Monsieur [R] [L] [P] la somme de 5.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner Monsieur [U] [O] aux entiers dépens avec distraction au profit de Me Jérôme Hortal, avocat au Barreau de Toulouse, sur son affirmation de droit en application des dispositions de 699 du code de procédure civile.

En premier lieu il conteste l'application des dispositions de l'article 1848 du code civil faite par les premiers juges concernant la désignation de l'avocat de la société, et conclut à l'infirmation du chef de décision ayant déclaré irrecevables les conclusions de la société Somco.

Sur la demande en annulation des assemblées générales, il rappelle que Monsieur [O] n'a pas déféré à ses demandes de communication de la comptabilité, ce qui l'a privé d'une information régulière sur la bonne gestion de la société ; l'expert-comptable choisi par les gérants était sur le lieu de résidence de Monsieur [O], de sorte qu'il était seul à y avoir accès.

Il a par ailleurs réclamé en vain à plusieurs reprises la tenue d'assemblées générales ; Monsieur [O] a finalement tenu seul les assemblées d'approbation des comptes, sans le convoquer.

Il se fonde sur ces mêmes manquements pour solliciter la communication de pièces sous astreinte et la révocation de

Monsieur [O] de ses fonctions de gérant.

Vu les conclusions devant la cour d'appel de Toulouse notifiées le 2 janvier 2023 auxquelles il est fait expressément référence pour l'énoncé du détail de l'argumentation, de Monsieur [U] [O] demandant, au visa des articles 1848 du code civil, de :

- débouter Monsieur Jean-[L] [P] de toutes ses demandes, fins et conclusions,

- confirmer en toutes ses dispositions le jugement entrepris,

- condamner Monsieur Jean-[L] [P] à payer à Monsieur [U] [O] la somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner Monsieur Jean-[L] [P] aux entiers dépens de première instance et d'appel.

Sur la recevabilité des conclusions de la société Somco en première instance, il affirme que la représentation par un seul et même conseil des intérêts de Monsieur [P] et de la société, vient démontrer une confusion évidente entre intérêts personnel et intérêt social.

Du fait de son opposition en sa qualité de co-gérant, Monsieur [P] ne pouvait pas décider seul de représenter la société en justice.

Il rappelle le caractère facultatif de la nullité des assemblées, du fait de l'irrégularité des convocations, qui ressort des dispositions des articles L. 223-6 et L. 223-27 du code de commerce ; en l'espèce Monsieur [P] ne justifie d'aucun grief découlant de la tenue de ces assemblées, et du défaut de convocation, dans la mesure où il était parfaitement informé de leur tenue.

Il ajoute que chacun des co-gérants ayant autant de pouvoirs au sein de la société pour organiser et convoquer une assemblée, mais également pour accéder à la comptabilité de la société auprès du cabinet comptable.

Il conteste par ailleurs l'existence d'une cause légitime susceptible de fonder sa révocation en qualité de gérant.

La Sarl Somco, à qui la déclaration d'appel a été signifiée le 1er septembre 2022, par signification à étude, ainsi que les conclusions datées du 2 octobre 2022 de l'appelant le 17 octobre 2022 par signification à étude, n'a pas constitué avocat et n'a pas conclu.

MOTIFS

Sur la recevabilité des conclusions de la société Somco en première instance

La Cour constate que si Monsieur [P] développe dans le corps de ses conclusions, son appel quant à l'irrecevabilité prononcée en première instance, il ne formule pour autant aucune demande dans son dispositif de ce chef.

Il convient de rappeler qu'en application de l'article 954 alinéa 3 du code de procédure civile, la Cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n'examine les moyens au soutien de ces prétentions que s'ils sont invoqués dans la discussion.

Dès lors, la Cour n'est pas saisie des développements relatifs à la recevabilité des conclusions de la société Somco, dont

Monsieur [P] ne tire aucune conséquence dans son dispositif.

Sur la nullité des assemblées générales

Monsieur [P] demande la nullité des assemblées générales des 17 mars 2017, 17 mars 2018 et 17 mars 2019, aux motifs qu'il n'a pas été convoqué, que les éléments comptables nécessaires ne lui ont pas été communiqués au préalable, et que les procès-verbaux de ces assemblées générales ne respectent pas les formes prescrites.

Monsieur [O] ne conteste pas l'absence de convocation par courrier recommandé de son co-gérant aux assemblées générales contestées ; pour autant, il affirme que celui-ci avait connaissance de la tenue de ces assemblées, et qu'il ne démontre aucun grief.

Il ressort des dispositions de l'article 1844 du code civil, que tout associé a le droit de participer aux décisions collectives.

L'article L. 223-27 du code de commerce dispose que toute assemblée irrégulièrement convoquée peut être annulée ; toutefois, l'action en nullité n'est pas recevable lorsque tous les associés étaient présents ou représentés.

La sanction prévue par le texte est facultative et laissée à l'appréciation des juges qui doivent caractériser le grief qu'a causé à l'associé l'absence de convocation à l'assemblée.

Sur le plan formel, l'article L. 223-26 du code du commerce dispose que le rapport de gestion, l'inventaire et les comptes annuels établis par les gérants, sont soumis à l'approbation des associés réunis en assemblée, dans le délai de six mois à compter de la clôture de l'exercice.

Les documents visés à l'alinéa précédent, le texte des résolutions proposées ainsi que le cas échéant, le rapport des commissaires aux comptes, le rapport de certification des informations en matière de durabilité, les comptes consolidés et le rapport sur la gestion du groupe sont communiqués aux associés dans les conditions et délais déterminés par décret en Conseil d'État. Toute délibération, prise en violation des dispositions du présent alinéa et du décret pris pour son application, peut être annulée.

A compter de la communication prévue à l'alinéa précédent, tout associé a la faculté de poser par écrit des questions auxquelles le gérant est tenu de répondre au cours de l'assemblée.

L'associé peut, en outre, et à toute époque, obtenir communication, dans les conditions fixées par décret en Conseil d'État, des documents sociaux déterminés par ledit décret et concernant les trois derniers exercices.

Les dispositions de l'article 19 des statuts de la société Somco se conforment à ces dispositions, rappelant que la tenue d'une assemblée générale est obligatoire par statuer sur l'approbation annuelle des comptes.

Il est précisé que la convocation est faite par lettre recommandée adressée aux associés quinze jours au moins avant la date de réunion ; elle contient l'ordre du jour de l'assemblée arrêtée par l'auteur de la convocation.

Enfin, ce même article indique que les délibérations de l'assemblée générale des associés est constatée par un procès verbal contenant les mentions règlementaires, établi ou signé par le ou les gérants, et que s'il n'a pas été établi de feuille de présence, le procès-verbal doit être signé par tous les associés présents.

Selon l'article R. 223-24 du code de commerce, toute délibération de l'assemblée des associés est constatée par un procès-verbal qui indique la date et le lieu de réunion, les nom, prénoms et qualité du président, les nom et prénoms des associés présents ou représentés avec l'indication du nombre de parts sociales détenues par chacun, les documents et rapports soumis à l'assemblée, un résumé des débats, le texte des résolutions mises au[x] voix et le résultat des votes

En cas de consultation écrite, il en est fait mention dans le procès-verbal, auquel est annexée la réponse de chaque associé.

Les procès-verbaux sont établis et signés par les gérants et, le cas échéant, par le président de séance.

En l'espèce, il ne peut qu'être relevé que les trois procès-verbaux des assemblées générales critiquées ne respectent pas ces conditions formelles ; aucun ne mentionne l'identité des personnes présentes à ces Assemblées, et un seul gérant, dont le nom n'est pas précisé, a signé les procès-verbaux.

Ces procès-verbaux ne sont que partiels, en ce qu'ils ne reprennent que la « deuxième résolution ».

Il est indiqué que « cette résolution est adoptée à l'unanimité », sans qu'il soit possible d'identifier les personnes participant à cette « unanimité ».

Monsieur [O] ne conteste pas le défaut de respect des formes de la convocation adressée pour la tenue de l'assemblée générale ; il affirme que Monsieur [P] avait connaissance de la date fixée pour ces assemblées générales, sans pour autant en rapporter la preuve.

La société ne produit aucun élément de nature à démontrer que l'information relative à la tenue de ces assemblées générales, a bien été portée à la connaissance de Monsieur [P], même de manière informelle.

Le fait que les assemblées générales précédentes se soient tenues dans des conditions moins formelles que celles prévues aux statuts, ne légitiment pas cette pratique, d'autant plus lorsque les relations se sont tendues entre les cogérants.

L'absence de convocation de Monsieur [P] aux assemblées générales, alors que les procès-verbaux établis ne sont pas conformes et ne permettent pas de connaître les conditions d'un vote pourtant inscrit comme « à l'unanimité », lui a ainsi causé un préjudice certain dans la mesure où sa voix portait autant que celle de Monsieur [O], et que son vote n'était donc pas sans conséquence.

Les assemblées générales tenues dans ces conditions doivent donc être annulées, et le premier jugement sera infirmé de ce chef.

Sur la demande de communication de pièces sous astreinte

Monsieur [P] reproche à Monsieur [O] d'avoir refusé toute communication des documents comptables relatifs à la Sarl Somco, en dépit de ses demandes répétées ; il sollicite ainsi la production de ces pièces sous astreinte.

Il résulte de l'article 16 des statuts de la société Somco que Messieurs [P] et [O] sont tous deux gérants de la société pour une durée illimitée.

Selon l'article 8 de ces mêmes statuts, ils disposent chacun du même nombre de parts sociales, et se répartissent à eux deux l'intégralité du capital social de Somco.

Ainsi, les deux co-gérants disposaient des mêmes droits concernant la communication de ces pièces comptables, directement auprès de l'expert-comptable ou de la banque.

Monsieur [P] soutient sa prétention par la production de plusieurs courriers ou mails de demande de pièces adressés soit à Monsieur [O], soit à la banque ou à l'expert-comptable directement, qui sont d'après lui restés sans réponse.

Le défaut de communication par la banque des relevés de comptes de la société à un de ses gérants, ou l'absence de production de la comptabilité de cette même société par l'expert-comptable à un de ses gérants, relève de la responsabilité de ces professionnels, et ne peuvent pas être retenus comme des obstructions émanant de Monsieur [O].

En tout état de cause, il ressort de l'examen des pièces communiqués par l'appelant, que l'expert-comptable lui avait transmis directement, à sa demande, les comptes annuels 2015 de la société Somco.

Pour les années suivantes, Monsieur [P] ne justifie d'aucune autre démarche envers ces professionnels qu'une simple demande par courrier électronique, dont il n'est pas justifié de la réception.

En sa qualité de co-gérant, Monsieur [P] avait autant la possibilité que Monsieur [O] d'accéder aux pièces visées ; il ne justifie pas de démarches sérieuses en ce sens.

Par ailleurs, si Monsieur [P] invoque un refus répété de communication de la part de Monsieur [O], il ressort pourtant de sa pièce n°3 que l'intimé a procédé le 19 février 2018 à la production par message électronique de pièces qui lui avaient été demandées, en réponse à un courrier recommandé du 3 décembre 2017.

Monsieur [P] ne justifie pas des demandes vaines répétées dont il se prévaut, et ne rapporte pas la preuve d'une obstruction formée par Monsieur [O], à son accès aux pièces visées.

Dès lors il ne peut qu'être débouté de sa demande, et le premier jugement sera confirmé de ce chef.

Sur la révocation des fonctions de gérant de Monsieur [O]

Il ressort des dispositions de l'article L. 223-25 du code de commerce, que le gérant peut être révoqué par décision des associés représentant plus de la moitié des parts sociales, à moins que les statuts prévoient une majorité plus forte. Si la révocation est décidée sans juste motif, elle peut donner lieu à des dommages et intérêts.

En outre, le gérant est révocable par les tribunaux pour cause légitime, à la demande de tout associé.

L'article 16 des statuts de la société Somco reprend ces dispositions.

La notion de cause légitime est plus large que celle de faute, recouvrant également les cas dans lesquels l'attitude du gérant compromet l'intérêt social ou le fonctionnement de la société

Si la faute du dirigeant constitue un juste motif ou une cause légitime de révocation, encore faut-il que cette faute soit suffisamment grave.

La gravité du manquement du dirigeant est appréciée intrinsèquement et non au regard du dommage qui en est résulté pour la société.

Monsieur [P] fonde d'abord sa demande en révocation de Monsieur [O], sur les carences de ce dernier, qui n'a pas convoqué les assemblées générales obligatoires en dépit de ses demandes répétés, et qui n'a pas communiqué les comptes en vue de leur approbation.

Il insiste sur le fait qu'en dépit de la procédure en cours, l'intimé n'a pas procédé à la convocation d'assemblées générales pour l'approbation des comptes des exercices clos au 30 septembre 2019 et au 30 septembre 2020.

Sur ce point, il ne peut qu'être rappelé que les statuts accordent les mêmes droits et pouvoirs aux deux co-gérants ; aucune disposition de ces statuts ne fait peser la charge de la convocation des assemblées générales pour l'approbation des comptes, uniquement sur Monsieur [O].

Monsieur [P] était tout à fait en mesure de procéder lui-même à la convocation de ces assemblées générales ; or, il s'est limité à réclamer la tenue de telles assemblées, sans prendre aucune initiative.

Il n'est dès lors pas fondé à reprocher à Monsieur [O] un manquement de ce chef, alors qu'il n'a lui-même pris aucune disposition pour convoquer ces assemblées générales obligatoires.

Monsieur [P] réitère ses critiques quant au défaut de communication de la comptabilité par Monsieur [O], en indiquant que celui-ci est le seul à avoir ces documents en main.

Il a été précédemment rappelé que Monsieur [P] ne faisait pas la preuve de démarches sérieuses lui permettant d'avoir accès aux mêmes éléments, ou d'une obstruction quelconque de Monsieur [O].

Dès lors, ce moyen doit également être écarté.

Monsieur [P] reproche ensuite à Monsieur [O] d'avoir pris des décisions contraires à l'intérêt social, dans ses relations avec Monsieur [D] et la société de celui-ci.

Il expose que la société Somco a accepté un compromis concernant la vente d'un terrain à Monsieur [D], sous la condition suspensive d'obtention d'un prêt ; or, non seulement l'acquéreur n'a pas fait les démarches aux fins d'obtention d'un financement dans les délais fixés, mais par ailleurs, alors que la vente n'était pas réitérée, il a procédé à des constructions sur ledit terrain.

En outre, avant même le compromis de vente, la société Somco a donné en location, par des baux successifs de courte durée, le terrain à la société de Monsieur [D].

L'appelant estime ainsi que les décisions de Monsieur [O], qui a donné les locaux à bail à un prix inférieur au marché, en ne percevant pas la totalité des loyers, et qui a autorisé l'acquéreur à procéder à des constructions alors même que le compromis était caduque, sont contraires à l'intérêt social et justifient sa révocation.

Il n'est toutefois pas démontré qu'une telle autorisation a été donnée par Monsieur [O], Monsieur [P] se limitant à rapporter les propos tenus verbalement par Monsieur [D].

Le juge des référés, dans son ordonnance du 24 juin 2021, n'a d'ailleurs pas constaté une telle autorisation, et a condamné Monsieur [D] à procéder à l'enlèvement des constructions réalisées.

Il n'est pas plus rapporté la preuve de manquements du locataire dans le paiement du loyer, ou même d'un prix inférieur au prix du marché, l'appelant ne procédant que par affirmations.

La caducité du compromis de vente ne résulte par ailleurs pas d'un manquement de Monsieur [O], mais de la carence de l'acquéreur dans les démarches visant à lever la condition suspensive, selon les termes mêmes des conclusions de Monsieur [P].

Seule l'inaction de Monsieur [O], face aux manquements de Monsieur [D], peut lui être reprochée en sa qualité de gérant ; cette faute n'est toutefois pas suffisamment grave pour justifier de sa révocation, et ce d'autant plus que l'action en référé engagée par Monsieur [P], co-gérant, a permis de mettre fin aux difficultés constatées.

Monsieur [P] évoque enfin un désintérêt de Monsieur [O] pour la société, indiquant que l'administration fiscale est désormais contrainte de lui écrire à son adresse personnelle dans la mesure où l'intimé ne relève plus le courrier de la société ; il ajoute que le solde débiteur du compte de la société montre ce désintérêt.

Une nouvelle fois, en adressant ces reproches à Monsieur [O], l'appelant fait peser exclusivement sur celui-ci la charge de la gestion quotidienne de la société ; or, les statuts de Sarl Somco ont désigné deux co-gérants à égalité, et Monsieur [P] n'est pas plus diligent que Monsieur [O] pour gérer les comptes de la société ou relever son courrier.

En tout état de cause, le seul fait que le solde du compte de la société soit en position débitrice ne suffit pas à rapporter la preuve d'une faute suffisamment grave du gérant pour entraîner sa révocation ; il en va de même du relevé du courrier, qui peut être assuré par le co-gérant.

Dans ces conditions, Monsieur [P] ne démontre pas l'existence d'une cause légitime de révocation de Monsieur [O] de ses fonctions de gérant.

C'est à bon droit que le premier jugement a débouté Monsieur [P] de sa demande de ce chef, la Cour confirmera cette décision.

Sur les demandes accessoires

Monsieur [P], qui succombe en la majorité de ses demandes, doit assumer l'intégralité des dépens de la procédure ; le premier jugement ayant mis les dépens de première instance à sa charge sera confirmé, et il sera condamné aux entiers dépens d'appel, qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

En revanche, l'équité ne commande pas de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ; le premier jugement sera infirmé de ce chef, et les parties seront déboutées de leurs demandes sur ce fondement, au titre des frais irrépétibles de première instance et d'appel.

PAR CES MOTIFS

La Cour statuant dans les limites de sa saisine, en dernier ressort, par défaut, par mise à disposition au greffe,

Confirme le jugement déféré, sauf en ce qu'il a débouté Monsieur Jean-[L] [P] de sa demande en nullité des assemblées générales, et qu'il l'a condamné au paiement de la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Prononce la nullité des Assemblées Générales de la Sarl Somco en date des 17 Mars 2017, 17 Mars 2018 et 17 Mars 2019 ;

Déboute Monsieur Jean-[L] [P] et Monsieur [U] [O] de leurs demandes formées en application de l'article 700 du code de procédure civile, au titre des frais irrépétibles de première instance et d'appel ;

Condamne Monsieur Jean-[L] [P] aux entiers dépens d'appel, qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.