CA Toulouse, 1re ch. sect. 1, 28 novembre 2023, n° 20/02986
TOULOUSE
Arrêt
Confirmation
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Defix
Conseillers :
M. Rouger, M. Robert
Avocats :
Me Houll, Me Matsitsila
EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE
Suivant acte sous seing privé en date du 23 octobre 2017, Mme [T] [W] a donné en location à Mme [N] [E] une maison individuelle d'habitation située commune de [Localité 4], [Adresse 3].
En janvier 2018, M. [P] [Y], artisan exerçant sous l'enseigne Asm 82, a réalisé des travaux dans la salle de bains, avec notamment mise en place d'une baignoire.
Un avenant au bail de location a été signé le 24 septembre 2018 entre Mme [T] [W] et le compagnon de la locataire, M. [P] [Y], M. [Y] devenant colocataire.
Par ordonnance portant injonction de payer en date du 11 avril 2019 le tribunal d'instance de Montauban a condamné Mme [T] [W] à payer à M. [Y] diverses sommes au titre des travaux effectués.
Mme [T] [W] a fait opposition à cette ordonnance le 2 mai 2019.
Par jugement réputé contradictoire en date du 5 octobre 2020, le tribunal judiciaire de Montauban a :
-déclaré recevable l'opposition à injonction de payer formée par Mme [T] [W] ;
-déclaré non avenue l'ordonnance d'injonction de payer du 11 avril 2019 ;
Statuant à nouveau,
-débouté M. [Y] de sa demande en paiement des travaux ;
-débouté Mme [T] [W] et M. [P] [Y] de leurs demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
-laissé à chacune des parties la charge des dépens ;
-rappelé que l'exécution provisoire est de droit.
Pour statuer ainsi, le tribunal a considéré qu'il n'était pas démontré que la propriétaire de la maison avait donné son accord pour la réalisation des travaux et qu'en l'absence de tout contrat elle ne pouvait être retenue comme débitrice de leur coût.
Par déclaration en date du 5 novembre 2020, M. [P] [Y] a relevé appel de ce jugement en critiquant l'ensemble de ses dispositions.
EXPOSE DES PRÉTENTIONS DES PARTIES
Dans ses dernières conclusions transmises par voie électronique le 6 avril 2021, M. [P] [Y], appelant, demande à la cour de :
-réformer le jugement dont appel en ce qu'il l'a débouté de sa demande en paiement des travaux réalisés par lui dans le logement propriété de Mme [W] ;
Statuant à nouveau,
-condamner Mme [W] au règlement de la somme de 3.379 euros avec intérêts à compter de la sommation de payer, signifiée le 14 décembre 2018 ;
-condamner Mme [W] au règlement de la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens de première instance et d'appel dont distraction au profit de Maître Houll, avocat, de la Selas ATCM.
Dans ses dernières conclusions transmises par voie électronique le 10 janvier 2023, Mme [T] [W], intimée et sur appel incident, demande à la cour de :
Rejetant toutes conclusions contraires comme injustes et mal fondées ;
-confirmer le jugement dont appel en ce qu'il a :
* déclaré recevable son opposition à injonction de payer ;
* déclaré non avenue l'ordonnance d'injonction de payer du 11 avril 2019 ;
* débouté M. [P] [Y] de sa demande en paiement des travaux ;
Statuant à nouveau sur la demande formée au titre de l'article 700 du code de procédure et sur les dépens,
-condamner M. [P] [Y] à régler la somme de 2.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;
-le condamner aux entiers dépens de l'instance.
L'ordonnance de clôture est intervenue le 15 mai 2023 et l'affaire a été examinée à l'audience du 23 mai 2023.
Par arrêt avant-dire-droit en date du 31 octobre 2023 il a été ordonné la réouverture des débats à l'audience du 20 novembre 2023 en raison d'une difficulté de composition de la juridiction d'appel.
MOTIFS DE LA DÉCISION
La demande en paiement
En vertu des dispositions de l'article 1315 ancien du code civil applicable en l'espèce au regard de la date du contrat, celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver et réciproquement celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation.
Le contrat de louage d'ouvrage est un contrat consensuel qui n'est soumis à aucune forme déterminée et dont l'existence peut être établie par tous moyens de preuve, l'établissement d'un devis descriptif n'étant pas nécessaire à son existence.
La somme de 3379 € Ttc dont paiement est réclamé par M. [Y] correspond au montant d'une facture no 3157 en date du 5 février 2018 établie au nom de Mme [W] et relative à des travaux dans une chambre et la salle de bain de la maison lui appartenant et louée à cette date à Mme [N] [E] seule.
Il est précisé que ces travaux portent sur «dépose paroi verre + faïences + receveur à carreler + placo sdb et chambre, fourniture placo + laine de verre + kit étanchéité + panneauwedi+faïences(15,60m2)+colle+joint+receveurwedi+galetsdoucheitalienne+kérapoxy+ peinture chambre, suite dégâts des eaux ».
Mme [W] ne conteste pas la réalité de ces travaux effectués dans la maison lui appartenant concernant une fuite d'eau dans la salle de bains constatée par les locataires précédant Mme [E], ni ne pas les avoir payés, mais fait valoir que suite à l'insistance de Mme [E] elle a accepté qu'elle entre dans les lieux immédiatement et qu'elle fasse une déclaration de sinistre auprès de sa propre assurance habitation et prenne en charge ces travaux de sorte que M. [Y] n'est pas intervenu à sa demande mais à celle de sa locataire alors qu'elle ne l'avait pas mandatée pour signer le devis et donner son accord pour les travaux.
Ces éléments sont confortés par les nombreux sms échangés entre Mme [N] [E], à l'époque seule locataire de Mme [T] [W], et cette dernière entre le 23 octobre 2017 et le 6 février 2018, notamment celui du 6 février 2018 où Mme [E] écrit : « je vous montre mon « devis » vous allez tomber » (suit une photographie de la facture no 3157 de M. [Y] avec le logo Asm 82 établie le 5 février 2018 au nom de Mme [E] pour la somme de 3379 € Ttc).
M. [Y] ne justifie d'aucune commande de travaux par Mme [W] et il ne peut invoquer le mandat apparent puisque à la date de réalisation des travaux c'est bien à la demande de Mme [E], après passage de l'expert de son propre assureur, qu'il est intervenu.
En l'absence de preuve de toute commande de travaux par Mme [W] et de mandat apparent de la locataire, Mme [W] ne peut être tenue au paiement de ces travaux de sorte que M. [Y] doit être débouté de sa demande en paiement, le jugement étant confirmé.
Les demandes annexes
Eu égard aux circonstances de la cause et le jugement entrepris étant confirmé en toutes ses dispositions principales, ce dernier doit aussi être confirmé quant à ses dispositions relatives aux dépens de première instance et à l'application de l'article 700 du code de procédure civile.
Succombant en appel, M. [Y] supportera les dépens d'appel et se trouve redevable d'une indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre de la procédure d'appel dans les conditions définies au dispositif du présent arrêt, sans pouvoir lui-même prétendre à l'application de ce texte à son profit.
PAR CES MOTIFS
La Cour,
Vu l'arrêt avant-dire-droit prononcé le 31 octobre 2023,
-Confirme le jugement rendu le 5 octobre 2020 par le tribunal judiciaire de Montauban ;
Y ajoutant,
-Condamne M. [P] [Y] aux dépens d'appel ;
-Condamne M. [P] [Y] à payer à Mme [T] [W] la somme de 1000 € au titre des frais irrépétibles exposés en cause d'appel ;
-Déboute M. [P] [Y] de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile.