Décisions
CA Nîmes, 2e ch. A, 12 septembre 2024, n° 20/00979
NÎMES
Arrêt
Autre
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
ARRÊT N°
N° RG 20/00979 - N° Portalis DBVH-V-B7E-HV5D
VH
TJ HORS JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP DE NIMES
03 février 2020
RG:16/05173
[V]
C/
[J]
S.A. SWISS LIFE ASSURANCE DE BIENS
S.A.R.L. AG.S CONSTRUCTION
[J]
Grosse délivrée
le
à Me Bouillard
SCP GMC Avocats
Me Collion
COUR D'APPEL DE NÎMES
CHAMBRE CIVILE
2ème chambre section A
ARRÊT DU 12 SEPTEMBRE 2024
Décision déférée à la Cour : Jugement du TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de NIMES en date du 03 Février 2020, N°16/05173
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :
Mme Nathalie AZOUARD, Présidente de Chambre,
Madame Virginie HUET, Conseillère,
M. André LIEGEON, Conseiller,
GREFFIER :
Mme Céline DELCOURT, Greffière, lors des débats et Mme Véronique LAURENT-VICAL, Greffière, lors du prononcé de la décision
DÉBATS :
A l'audience publique du 28 Mai 2024, où l'affaire a été mise en délibéré au 12 Septembre 2024.
Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel.
APPELANT :
M. [O] [V]
né le 18 Mai 1963 à [Localité 8]
[Adresse 2]
[Localité 1]
Représenté par Me Alexandra BOUILLARD, Plaidant/Postulant, avocat au barreau d'AVIGNON
INTIMÉS :
M. [U] [J]
assigné à étude d'huissier le 15/06/2020
né le 28 Janvier 1970 à [Localité 7] (MAROC)
[Adresse 4]
[Localité 3]
S.A. SWISS LIFE ASSURANCE DE BIENS immatriculée au RCS de Nanterre sous le n° 391 277 878, prise en la personne de son rerpésentant légal en exercice domicilié ès qualités audit siège
[Adresse 5]
[Localité 6]
Représentée par Me Olivier GOUJON de la SCP GMC AVOCATS ASSOCIES, Postulant, avocat au barreau de NIMES
Représentée par Me Denis RIEU de la SELARL MBA & ASSOCIES, Plaidant, avocat au barreau de MONTPELLIER
S.A.R.L. AG.S CONSTRUCTION Société à responsabilité limitée à associé uniqueprise en la personne de Me [N] [Y], mandataire judiciaire (refus de l'acte - dossier clôturée depuis le 05/07/2017 - déposé à étude)
[Adresse 4]
[Localité 3]
INTERVENANT
M. [U] [J], en sa qualité de mandataire ad hoc de la SARL AG. S CONSTRUCTION, immatriculée au RCS deNîmes sous le numéro 799 255 898 dont le siège social est sis [Adresse 4].
assigné en intervention forçée, ès qualités, le 24/02/2022
né le 28 Janvier 1970 à [Localité 7] (MAROC) (MAROC)
[Adresse 4]
[Localité 3]
Représenté par Me Olivier COLLION, Plaidant/Postulant, avocat au barreau d'AVIGNON
ORDONNANCE DE CLÔTURE rendue le 02 Mai 2024
ARRÊT :
Arrêt réputé contradictoire, prononcé publiquement et signé par Mme Nathalie AZOUARD, Présidente de Chambre, le 12 Septembre 2024,par mise à disposition au greffe de la Cour
EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE
Suivant deux devis acceptés en date du 21 novembre 2011 respectivement pour un montant de 40 006,20 euros toutes taxes comprises et 45 089,20 euros toutes taxes comprises, M. [O] [V] a conclu avec la société AG N Construction, représentée par son gérant, M. [U] [J], un contrat portant sur la construction de deux logements sur un terrain situé à [Localité 9] (Gard).
Les travaux ont débuté à la fin du mois de novembre 2011 et ont été interrompus par l'entreprise le 20 mars 2012.
Une liste de réserves a été dressée dans le procès-verbal de réception du 20 avril 2012.
L'artisan qui avait ainsi fait savoir qu'il interrompait son activité a indiqué qu'en fait il reprenait celle-ci mais qu'il manquait de trésorerie.
M. [V] avait accepté, au mois d'août 2012, d'acheter lui-même les matériaux nécessaires à l'achèvement de la toiture et à la levée des réserves.
Toutefois, le chantier a subi de nombreux arrêts jusqu'au 19 juin 2013, date à laquelle la société AG N Construction a été placée en liquidation judiciaire.
M. [V], étant forclos pour produire sa créance, a contacté M. [J] qui lui a appris qu'il venait de créer une nouvelle société dénommée AG S Construction et le 9 juin 2014 les parties ont signé un protocole d'accord pour l'achèvement du chantier conformément au permis de construire.
Les travaux n'ayant pas été achevés et les malfaçons ayant subsisté, M. [V] a obtenu, par ordonnance de référé du 25 février 2015, la désignation de M. [P] [H] en qualité d'expert lequel a déposé son rapport le 14 novembre 2016 et chiffré le montant des désordres pouvant relever de la garantie décennale de la société AG N Construction à la somme de 26 766,40 euros toutes taxes comprises.
En l'état de ce rapport et par actes d'huissier en date des 6 et 7 décembre 2016, M. [V] a assigné M. [J], la société AG.S Construction et la société Swiss Life assurances de biens devant le tribunal de grande instance de Nîmes.
Par acte du 24 avril 2018, M. [V] a assigné Maître [N] [Y] en sa qualité de mandataire liquidateur de la société AG.S Construction.
Les deux procédures ont été jointes.
Aux termes de ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 22 janvier 2019, M. [V] demandait au tribunal, à titre principal, de condamner la société Swiss Life, assureur décennal de la société AGN Construction au paiement de la somme de 26 766,40 euros toutes taxes comprises et, à titre subsidiaire, de condamner M. [J] solidairement avec la société AG.S Construction :
* au paiement de la somme de 14 342 euros toutes taxes comprises au titre des non-conformités non reprises,
*à reprendre lesdits travaux sous le contrôle d'un maître d''uvre sous astreinte,
* au paiement de la somme de 43 200 euros au titre du préjudice de jouissance et 21 219,23 euros pour les matériaux achetés aux lieu et place de la société de construction,
* au paiement de la somme de 4 000 euros au titre des frais irrépétibles.
Le tribunal judiciaire de Nîmes, par jugement réputé contradictoire du 3 février 2020, a :
- déclaré irrecevables les demandes de condamnation formées à l'encontre de la société AG.S Construction,
- prononcé la mise hors de cause de la compagnie Swiss Life,
- condamné Monsieur [U] [J] à payer à Monsieur [O] [V] les sommes suivantes :
* 3 630 euros hors taxe au titre des désordres de nature décennale non garantis par une assurance,
* 3 000 euros au titre du préjudice de jouissance,
* 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- débouté Monsieur [O] [V] du surplus de ses demandes,
- débouté la compagnie Swiss Life et Monsieur [U] [J] de leur demande présentée sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné Monsieur [U] [J] aux entiers dépens qui comprendront les frais d'expertise,
- ordonné l'exécution provisoire du présent jugement.
Par acte du 16 mars 2020, M. [V] a régulièrement interjeté appel de cette décision.
Par avis du 18 mai 2020, M. [O] [V] a été invité à faire signifier la déclaration d'appel dans le mois de l'avis en vertu de l'article 902 du code de procédure civile.
Par décision en date du 3 septembre 2021, le président du tribunal de commerce de Nîmes a désigné M. [J] en qualité de mandataire ad hoc de la SARL AGS Construction.
Par assignation en intervention forcée en date du 24 février 2022, M. [U] [J] a été attrait à la procédure en sa qualité de mandataire ad hoc de la SARL AG S Construction, suite à sa désignation par ordonnance du tribunal de commerce de Nîmes du 3 septembre 2021.
Par conclusions d'incident du 15 novembre 2022, M. [O] [V] a saisi le conseiller de la mise en état aux fins de voir déclarer irrecevables, en application des articles 909 et 910 du code de procédure civile, les conclusions de M. [U] [J] notifiées le 7 juin 2022.
Par ordonnance rendue le 23 mai 2023, le conseiller de la mise en état a:
- débouté M. [U] [J] ès qualités de mandataire ad hoc de la SARL AGS Construction de l'ensemble de ses demandes,
- déclaré les conclusions de M. [U] [J] ès qualités de mandataire ad hoc de la SARL AGS Construction en date du 7 juin 2022 irrecevables,
- condamné M. [U] [J] ès qualités de mandataire ad hoc de la SARL AGS Construction aux dépens de l'incident.
Monsieur [V] a signifié sa déclaration d'appel et ses conclusions d'appel à Monsieur [U] [J], le 15 juin 2020, par remise de l'acte à l'étude d'huissier.
Monsieur [V] a signifié sa déclaration d'appel et ses conclusions d'appel à Monsieur [U] [J], en sa qualité d'ancien gérant de la société AG S Construction le 15 juin 2020, par remise de l'acte à l'étude d'huissier.
La SA Swisslife assurances de biens a signifié ses conclusions d'appel le 15 septembre 2020 à Monsieur [U] [J], à domicile, son épouse ayant accepté de recevoir la copie de l'acte.
Monsieur [V] a signifié la déclaration d'appel et ses conclusions d'appel à Maître [Y], en sa qualité de mandataire de la SARL AG S Construction le 15 juin 2020, par dépôt de l'acte à l'étude d'huissier, la personne rencontrée refusant de prendre la copie de l'acte au motif que le dossier AGS Construction est clôturé depuis le 5 juillet 2017.
La SA Swisslife assurances de biens a signifié ses conclusions le 28 septembre 2020, à la SARL AG S Construction, prise en la personne de son liquidateur Maître [N] [Y], l'acte indiquant qu'il n'a pu être signifié au motif que Maître [Y] a refusé de prendre l'acte, un jugement de clôture pour insuffisance d'actif ayant été rendu le 5 juillet 2017 le relevant de son rôle de liquidateur et entraînant la radiation de ladite société au registre du commerce et des sociétés.
Par ordonnance du 7 février 2024, la clôture de la procédure a été fixée au 2 mai 2024, l'affaire a été appelée à l'audience du 28 mai 2024 et mise en délibéré par mise à disposition au greffe au 12 septembre 2024.
EXPOSE DES MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES
Aux termes de ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 16 novembre 2022, Monsieur [V], appelant, demande à la cour de :
Vu le rapport d'expertise judiciaire de Monsieur [H] ;
Vu les dispositions des articles 1792, 1792-1 et 1792-2 du Code civil ;
Vu les dispositions des articles L.124-3 et L.241-1 du Code des assurances ;
Vu les dispositions de l'article L.223-22 du Code de commerce ;
Vu les dispositions des articles 1231-1 et 1240 du Code civil ;
Vu les dispositions de l'article L243-3 du Code de la construction et de l'habitation ;
Vu le jugement prononcé par le Tribunal judiciaire de Nîmes en date du 3 février 2020 ;
Vu les pièces versées au débat.
A titre principal
- recevoir l'appel partiel de Monsieur [V] comme étant bien fondé,
- déclarer irrecevables les demandes formées par Monsieur [J],
- rejeter l'appel incident de Monsieur [J] comme étant irrecevable celui-ci portant sur des demandes à titre personnel et en qualité d'ancien gérant qu'il aurait dû former au stade de l'appel,
- infirmer le jugement de première instance en ce qu'il a déclaré irrecevables les demandes dirigées par Monsieur [V] à l'encontre de la société Swiss Life,
- déclarer recevables et bien fondées les demandes formées par Monsieur [V] à l'encontre de la société Swiss Life, la société AGN Construction représentée par Monsieur [J], et Monsieur [J] à titre personnel,
- condamner la société Swiss Life, assureur décennal suivant police n°011142481 souscrite le 23/09/2010 par la société AGN Construction à garantir et indemniser Monsieur [V] [O] à hauteur de 26 766,40 euros au titre des désordres de nature décennale, avec intérêts au taux légal à compter de la décision à intervenir,
A défaut, si par extraordinaire la cour retenait des exclusions de garantie,
- condamner Monsieur [J] [U] à indemniser Monsieur [V] des dommages de nature décennale non couverts par l'assureur Swiss Life,
- infirmer le jugement de première instance en ce qu'il a déclaré irrecevables les demandes de condamnations formées à l'encontre de la société AGS Construction et Monsieur [J] en son nom personnel, et statuant à nouveau :
- condamner la société AGS Construction, prise en la personne de son mandataire ad hoc Monsieur [J], à indemniser M. [V] à hauteur de 14 342 euros, hors intérêts, conformément au rapport d'expertise et au regard de l'inexécution du protocole d'accord du 9 juin 2014,
- condamner Monsieur [J] à même hauteur soit 14 342 euros, en raison de sa responsabilité solidaire avec la société AGS Construction du fait du défaut d'assurance,
- infirmer le jugement en ce qu'il a débouté Monsieur [V] de sa demande de condamnation à l'encontre de Monsieur [J] en son nom personnel à hauteur de 21 219,23 au titre du matériel acheté en ses lieu et place, avec intérêts au taux légal à compter de la décision à intervenir,
- condamner Monsieur [J] à indemniser Monsieur [V] à hauteur de 21 219,23 euros correspondant à du matériel acheté en ses lieu et place, avec intérêts au taux légal à compter de la décision à intervenir,
- réformer le jugement de première instance sur le quantum en ce qu'il a condamné Monsieur [J] à 3000 euros au titre du préjudice de jouissance et statuant à nouveau :
- condamner Monsieur [J] à indemniser Monsieur [V] à hauteur de 93600 euros au titre du préjudice de jouissance arrêté au mois de novembre 2022, de la villa A à raison de 900 euros/Mois depuis le mois de janvier 2015, sauf à parfaire au jour de l'arrêt tenant compte d'une majoration de 9 mois de non-location le temps d'effectuer les travaux de reprise, le tout avec intérêts au taux légal à compter de la décision à intervenir,
- confirmer le jugement de première instance en ce qu'il a condamné Monsieur [J] au paiement de 4000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, et aux entiers dépens de première instance, en ce compris les frais d'expertise avancés par Monsieur [V],
Y ajouter :
- condamner Monsieur [J] à payer à Monsieur [V] la somme de 2500 euros au titre des frais irrépétibles engagés en cause d'appel.
A titre subsidiaire,
- confirmer le jugement de première instance en toutes ses dispositions,
- condamner Monsieur [J] à payer à Monsieur [V] la somme de 2500 euros au titre des frais irrépétibles engagés en cause d'appel.
Au soutien de ses prétentions, l'appelant fait essentiellement valoir que :
- M. [J] ne peut plus conclure en son nom personnel mais uniquement au nom de la société en sa qualité d'administrateur ad hoc. Ses conclusions en date du 3 juin 2022 sont donc irrecevables.
Sur les désordres relevant de la garantie décennale de la société AGN Construction
- il ressort du rapport de l'expert une liste de désordres qui relèvent de la garantie décennale du constructeur, la société AGN construction, en application des articles 1792, 1792-1 et 1792-2 du code civil, dans la mesure où ils affectent soit des éléments constitutifs de l'ouvrage, soit des éléments d'équipement indissociables faisant corps avec l'ouvrage et qu'ils causent une impropriété à destination ou une atteinte à la solidité. Il s'agit des désordres suivants : désordre 1 (menuiseries extérieures de la villa A : 2184 euros), désordre 3 (piliers et arcs cintrés terrasse ouest de la villa B : 2880 euros), désordre 7 (solins sur terrasse côté est : 750 euros), désordre 9 (charpente bois sur villa A : 4900 euros), désordre 11 (couverture et ouvrages singuliers :16 052,40 euros), dont le total est de 26 766,40 euros.
Sur la mise en 'uvre de l'assurance décennale Swiss Life du constructeur
- la société Swiss Life soutient à tort que :
* certains travaux affectés de désordres, inclus dans le chiffrage que l'expert judiciaire met à la charge de la société AGN Construction, auraient été effectués par M. [J] après la liquidation judiciaire de cette dernière et ne seraient en conséquence pas garantis, alors qu'il s'agit bien de travaux effectués par la société AGN Construction entre la date d'ouverture du chantier le 15 décembre 2011 et sa liquidation judiciaire en juin 2013, et qu'elle n'a pas contesté le rapport d'expertise sur ce point ;
* les travaux de couverture ne sont pas garantis, alors que la société AGN Construction était assurée pour des travaux de maçonnerie générale et de charpente et que les exclusions de garantie et les franchises stipulées au contrat d'assurance sont inopposables au maître d'ouvrage pour l'application de la garantie légale ;
* le caractère apparent de certains désordres à la réception fait échec à la mise en 'uvre de la garantie décennale, alors que la réception des travaux fait courir le délai de la garantie décennale, que le fait que des désordres apparaissent à l''il nu au maître de l'ouvrage non professionnel ne fait pas échec à la mise en 'uvre de la garantie décennale si l'expertise judiciaire révèle que lesdits désordres constituent des atteintes à la solidité de l'ouvrage comme c'est le cas en l'espèce, d'autant qu'il s'est avéré qu'outre les vices apparents la construction comportait des vices cachés portant atteinte à la solidité de l'ouvrage parfaitement indissociables ;
- dans ces conditions, les désordres relevant de la garantie décennale, chiffrés par l'expert à la somme de 26 766,40 euros, devront être couverts par la société Swiss Life, de sorte que cette dernière sera condamnée suivant police n°011142481 souscrite le 23 septembre 2010 par la société AGN construction à lui payer cette somme, avec intérêts au taux légal à compter de l'arrêt à intervenir.
A titre subsidiaire, sur la mise en 'uvre de la responsabilité personnelle du gérant dans l'hypothèse d'un défaut d'assurance sur certains postes
- M. [J], gérant de la société AGN Construction, qui n'a pas souscrit d'assurance décennale obligatoire, engage sa responsabilité civile à l'égard des tiers auxquels cette faute a porté préjudice sur le fondement de l'article L. 223-22 du code de commerce, de sorte qu'il sera condamné à l'indemniser des dommages de nature décennale non couverts par la société Swiss Life si certaines exclusions de garantie devaient prospérer.
Sur la responsabilité solidaire de la société AGS construction et de M. [J] au titre de l'inexécution du protocole d'accord daté du 9 juin 2014 portant achèvement des travaux et reprise des malfaçons
- en application des articles L. 243-3 du code de la construction et de l'habitation et L. 223-22 alinéa 1 du code de commerce, le gérant engage sa responsabilité civile personnelle en cas de faute détachable de ses fonctions ;
- il ressort du rapport d'expertise qu'en l'espèce, la société AGS Construction, représentée par son mandataire ad hoc en la personne de M. [J], n'a pas effectué les travaux prévus par le protocole d'accord signé le 9 juin 2014 ;
- après la liquidation judiciaire de la société AGN Construction, M. [J] a ouvert une seconde entreprise dénommée AGS Construction sans souscrire d'assurance décennale ; qu'il s'agit d'une infraction pénale et d'une faute détachable de ses fonctions qui engage sa responsabilité civile personnelle sur le fondement des dispositions de l'article L. 223-22 alinéa 1 du code de commerce ; que par conséquent M. [J] sera condamné solidairement avec la SARL AGS Construction à l'indemniser à hauteur de 14 342 euros au titre de l'inexécution dudit protocole d'accord.
Sur les préjudices économiques complémentaires
- il résulte du rapport d'expertise un préjudice de jouissance concernant la villa A et arrêté à la somme de 900 euros par mois depuis le mois de janvier 2015 imputable à M. [J], de sorte que ce dernier devra l'indemniser sur le fondement de l'article 1240 du code civil à hauteur de 93 600 euros correspondant au trouble de jouissance actualisé au mois de novembre 2022 ;
- il a subi un préjudice financier supplémentaire de 21 219,23 euros correspondant au matériel qu'il a acheté et remis entre les mains de M. [J] qui l'a détourné et n'a pas contesté cet état de fait au stade des opérations d'expertise ; que par conséquent M. [J] sera tenu de l'indemniser à hauteur de cette somme.
En l'état de ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 24 juin 2022, la société Swiss Life assurance de biens, intimée, demande à la cour de :
Vu les dispositions des articles 1315 et 1792 et suivants du Code civil,
Vu les dispositions de l'article L 241-1 du code des assurances,
Tenant le Jugement du Tribunal Judiciaire du 3 février 2020,
Rejetant l'appel interjeté par M. [V] et incident de M. [J],
- dire et juger que les désordres n°1, 3, 4, 5, 6, 7, 10 et 16 ne relèvent de la responsabilité de la société AG N Construction et rejeter en conséquence toutes actions à l'encontre de Swiss Life à ces titres,
- dire et juger que les désordres n°5, 6, 7, 11 et 16 concernent l'activité couverture non souscrite et rejeter en conséquence toutes actions à l'encontre de Swiss Life à ces titres,
- dire et juger que les désordres n°3, 4, 5, 9, 10, 11 et 16 ont été réservés à la réception ou était apparent à la réception et rejeter en conséquence toutes actions à l'encontre de Swiss Life à ces titres,
- dire et juger que les désordres n°2, 4, 5, 6, 7, 8, 12, 13, 14,15 et 17 ne portent pas plus atteinte à la destination qu'à la solidité de l'ouvrage et rejeter en conséquence toutes actions à l'encontre de Swiss Life à ces titres,
- confirmer le jugement du 3 février 2020 en ce qu'il a rejeté toutes actions dirigées à l'encontre de la société Swiss Life,
- condamner M. [V] au paiement de 2 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel.
Elle fait valoir en substance que :
Sur l'étendue des travaux réalisés par AG N Construction
- M. [J] a affirmé lui-même qu'au jour du procès-verbal de réception du 20 avril 2012 avec de nombreuses réserves seules les maçonnerie, charpente et plaques sous tuiles de la première partie de la villa et une partie de la maçonnerie de la seconde avaient été exécutées par la SARL AG N Construction, malgré les intitulés de certaines factures, et qu'il a exécuté en tant qu'entrepreneur, après l'ouverture de la liquidation judiciaire de la SARL AG N Construction, notamment la couverture de la première partie et la charpente ainsi que la toiture de la seconde ; que l'état d'avancement des travaux exécutés par la SARL AG N Construction est incontestable puisque résultant d'un document communiqué par le maître d'ouvrage selon un dire du 5 juin 2015 ; que M. [J] doit seul répondre des malfaçons des prestations qu'il a exécutées après l'abandon du chantier par sa société AG N Construction, la circonstance que des factures de la société AG N Construction existent étant indifférente puisqu'il convient de raisonner par rapport à la réalité des prestations effectuées par chacun et non des précisions erronées sur certaines factures ; qu'en application de l'article L. 241-1 du code des assurances, engage sa responsabilité personnelle le gérant dont la société qu'il gère n'a pas souscrit l'assurance décennale obligatoire ;
- les éventuelles non-conformités et malfaçons de la toiture des deux parties de la villa, de la charpente de la seconde partie de la villa litigieuse et des menuiseries n'ont pas été exécutées par la SARL AG N Construction, qu'il en est de même concernant les travaux de maçonnerie de la terrasse et auvents comme le mentionne le procès-verbal de réception ; que par conséquent les désordres n°1, 3, 4, 5, 6, 7, 10 et 16 ne peuvent relever de la responsabilité de la société AG N Construction et ne sauraient donc conduire à l'application des garanties du contrat d'assurance souscrit auprès d'elle ;
- l'appelant ne critique pas les motifs du jugement sur ce point.
Sur la non-garantie pour l'activité couverture
- il résulte du contrat d'assurance souscrit auprès d'elle par la société AG N Construction que l'activité « couverture » n'a pas été souscrite par cette dernière, de sorte que les désordres relatifs à cette activité, soit les désordres n° 5 (Villa A et B : toiture non conforme au permis de construire façade est Villa A et B), n°6 (Villa A et B : toiture non conforme au permis de construire pilier et cintre), n° 7 (solin inachevé), n°11 (défaut de couverture et des ouvrages de zinguerie ou points singuliers de la couverture des deux villas) et n°16 (infiltrations au plafond de la villa B en lien avec des problèmes de couverture) ne peuvent être garantis ;
- la jurisprudence citée par le maître de l'ouvrage ne remet pas en cause la jurisprudence constante de la Cour de cassation dans la mesure où elle ne porte que sur l'opposabilité de la franchise décennale au locateur d'ouvrage pour les réparations qui ne peut venir en déduction de l'indemnité ;
- l'appelant ne répond pas au moyen de non-garantie qu'elle invoque qui a été confirmé par le tribunal.
Sur le caractère apparent à la réception de certains désordres allégués
- tous les désordres qui étaient apparents au moment de la réception, qu'ils aient été ou non réservés par le maître d'ouvrage, ne peuvent donner lieu à application de la responsabilité décennale du constructeur, de sorte que l'assureur décennal ne peut être tenu de l'indemnisation desdits désordres ;
- contrairement à ce qu'énonce l'appelant, il existe deux conditions principales cumulatives à la responsabilité décennale, un vice caché à la réception c'est-à-dire non réservé à la réception par le maître d'ouvrage et une atteinte à la destination ou à la solidité de l'ouvrage ; qu'en conséquence en présence d'un vice apparent, même si la solidité est compromise, la responsabilité décennale ne s'applique pas ;
- l'appelant ne critique pas le jugement sur ce point, de sorte que celui-ci sera confirmé en ce qu'il a constaté le caractère apparent du désordre n° 9 et qu'il sera également constaté celui des désordres n° 3, 4, 5, 10, 11 et 16.
Sur l'absence de gravité décennale de certains désordres
- il résulte du rapport d'expertise que certains incidents de construction relevés par le maître d'ouvrage ne revêtent pas de caractère décennal, soit parce qu'ils n'ont qu'un caractère purement esthétique, soit parce qu'ils constituent de simples non-conformités contractuelles sans désordres ou dommages ; qu'il en est ainsi du désordre n°2 (villa A : défaut seuils et appui en terre cuite de la villa A qualifié de désordre esthétique par l'expert judiciaire), du désordre n°4 (villa B : toiture non conforme au permis de construire), du désordre n°5 (villa A et B : toiture non conforme au permis de construire façade est villa A et B), du désordre n°6 (villa A et B : toiture non conforme au permis de construire pilier et cintre), du désordre n°8 (défaut d'exécution des noues mal implantées, défaut d'ordre esthétique), du désordre n°12 (hauteurs non conformes par rapport au permis de construire des deux villas. Il s'agit d'un défaut d'ordre contractuel), du désordre n°13 (absence des escaliers d'accès aux terrasses. Il s'agit d'un défaut d'inachèvement, travail non effectué), du désordre n°14 (non-conformité au permis de construire de la baie façade est villa A. Il s'agit d'un défaut d'ordre contractuel), du désordre n°15 (joint de dilatation villa A et B façade est) et du désordre n°17 (fonctionnement défectueux du tablier des volets roulants) ;
- le désordre n°7, outre l'absence d'atteinte à la destination ou à la solidité, présente selon l'expert un « risque sérieux de pénétrations d'eaux » ; que ce risque ne s'est pas réalisé au jour de la rédaction de ces écritures ; que si la jurisprudence de la Cour de cassation permet l'indemnisation d'un dommage futur c'est à la condition que sa survenance future dans le délai décennal soit certaine ; qu'un risque sérieux n'est pas une certitude, d'autant qu'en l'espèce il ne s'est pas réalisé plus de 8 ans après la réception ; qu'il résulte de l'ensemble de ces éléments que toutes actions à son encontre au titre des désordres n°2, 4, 5, 6, 7, 8, 12, 13, 14, 15 et 17 seront rejetées et que le jugement sera confirmé sur ce point, étant relevé que le désordre n°7 a été écarté par le tribunal en ce qu'il relève d'une activité non souscrite auprès d'elle.
Il est fait renvoi aux écritures des parties pour plus ample exposé des éléments de la cause, des prétentions et moyens des parties, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.
MOTIVATION
1 . A titre préliminaire :
Depuis l'entrée en vigueur de l'article 34 du Décret n°2017-891 du 6 mai 2017, l'alinéa 2 de l'article 954 du code de procédure civile dispose que « les conclusions comprennent distinctement un exposé des faits et de la procédure, l'énoncé des chefs de jugement critiqués, une discussion des prétentions et des moyens ainsi qu'un dispositif récapitulant les prétentions ». Par ailleurs, selon l'alinéa 3, « la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif ».
La cour rappelle, à titre liminaire, qu'elle n'est pas tenue de statuer sur les demandes de 'constatations' ou de 'dire' lorsqu'elles constituent uniquement des moyens invoqués par les parties au soutien de leurs demandes.
2 . Sur la non comparution de M. [J] à titre personnel, ainsi que des deux sociétés :
Il résulte de l'article 472, alinéa 2, du code de procédure civile, que si l'intimé ne comparait pas le juge est tenu de vérifier si la demande de l'appelant est régulière recevable et bien fondée.
En application de l'article 954 alinéa 6 du code de procédure civile, la partie qui ne conclut pas est réputée s'approprier les motifs du jugement.
3 . Sur l'irrecevabilité des demandes de M. [J] es qualités de mandataire ad hoc de la SARL AGS Construction :
Par décision rendue le 23 mai 2023, le conseiller de la mise en état a déclaré les conclusions de M. [U] [J] es qualités de mandataire ad hoc de la SARL AGS Construction en date du 7 juin 2022 irrecevables.
La demande, formulée dans des conclusions antérieures au rendu de la décision du conseiller de la mise en état, est donc sans objet.
AU FOND :
Il ressort du rapport d'expertise en date du 14 novembre 2016 non sérieusement contesté par les parties les désordres suivants :
Désordre n°1 (villa A) : scellement non conforme des menuiseries et un défaut d'étanchéité à l'eau qui entraînent une impropriété à destination dans les deux cas.
- Désordre n°2 (villa A) : défaut seuils et appui en terre cuite de la villa A. Il est quali'é de désordre esthétique par l'expert judiciaire.
- Désordre n°3 (villa B) : présence des aciers d'armatures visibles en sous-face des deux poutres pour laquelle l'expert judiciaire attribue un caractère d'atteinte à la solidité + le cintre en béton sur la façade Sud comporte un défaut de coulage. Il attribue également à ce désordre, une atteinte à la solidité.
- Désordre n°4 (villa B) : toiture non conforme au permis de construire.
- Désordre n°5 (villa A et B) : toiture non conforme au permis de construire façade Est Villa A et B.
- Désordre n°6 : non-conformité au permis de construire pour les piliers et cintres de la terrasse est villas a et b.
- Désordre n°7 : solins sur terrasse coté Est, impropriété à destination selon l'expert judiciaire.
- Désordre n°8 : défaut d'exécution des noues mal implantées, défaut d'ordre esthétique.
- Désordre n°9 : défaut d'assemblage de la charpente de la villa A. L'expert relève une impropriété à destination.
- Désordre n°10 : Il est évoqué un défaut sur la charpente de la villa B mais celle-ci n'est pas visible.
- Désordre n°11 : défaut de couverture et des ouvrages de zinguerie ou points singuliers de la couverture des deux villas.
- Désordre n°12 : hauteurs non conformes par rapport au permis de construire des deux villas. Il s'agit d'un défaut d'ordre contractuel.
- Désordre n°13 : absence des escaliers d'accès aux terrasses. Il s'agit d'un défaut d'inachèvement, travail non effectué.
- Désordre n°14 : non-conformité au permis de construire de la baie façade Est villa A. Il s'agit d'un défaut d'ordre contractuel.
- Désordre n°15 : le joint de dilatation est manquant entre villa A et B façade Est. Il s'agit d'un défaut d'exécution lié à l'inachèvement.
- Désordre n°16 : infiltrations au plafond de la villa B en lien avec des problèmes de couverture.
- Désordre n°17 : fonctionnement défectueux du tablier des volets roulants.
4 . Sur les demandes contre La Swisslife en sa qualité d'assureur de AGN Construction :
M. [V] demande au titre de la garantie décennale le paiement de la somme de 26 766,40 euros, qu'il précise comme suit :
-(Des.1) menuiseries extérieures de la villa A : 2 184 €
-(Des.3) piliers et arcs cintrés terrasse ouest de la villa B : 2 880 €
-(Des.7) solins sur terrasse côté est : 750 €
-(Des.9) charpente bois sur villa A : 4 900 €
-(Des.11) couverture et ouvrages singuliers : 16 052,40 €
TOTAL : 26 766, 40€
Il ne précise pas les fondements de ses demandes, et formule une critique globale du jugement mais non poste par poste.
* * *
Réponse de la cour :
S'agissant du désordre n°1 (menuiseries de la villa A) :
Il ressort de l'expertise que les menuiseries ont été posées entre mars et avril 2014 par la société AGS Construction (AGN étant liquidée) en pages 4 et 51 du rapport dans la partie « repères chronologiques ».
L'assurance Swisslife n'assure que la société AGN Construction. Elle ne peut donc prendre en charge le sinistre lié à une autre entreprise. L'appelant se contente d'affirmer le contraire mais sans produire d'élément probant de sorte que le jugement de première instance sur ce point sera confirmé.
S'agissant du désordre n°3 (piliers et arcs cintrés de la terrasse ouest de la villa B) :
Il ressort du procès-verbal de réception que ce travail n'a pas été effectué ; « le gros 'uvre sur les parties terrasses et auvents indispensables pour l'obtention de la DAT non effectué ».
Comme pour le désordre n°1, le jugement sera confirmé en ce qu'il a exclu la prise en charge de la garantie décennale de l'assureur. L'appelant reste taisant sur ce désordre.
- S'agissant du désordre n°9 (charpente bois sur villa A) :
Il est constant que l'existence de réserves à la réception a pour conséquence de maintenir postérieurement à la réception de l'ouvrage le régime applicable avant la réception, sauf garantie de parfait achèvement. Les réserves à la réception excluent la responsabilité décennale.
Il ressort des propres conclusions de l'appelant qu'un procès-verbal de réception du chantier avec réserves était signé le 20 avril 2012.
Les réserves suivantes étaient listées :
- Charpentes mal posées (ce qui correspond au désordre n°9)
- Couvertures plaques sous tuiles non hermétiques
- Fermettes bois constituant l'ossature porteuses mal fixées
- Génoises mal posées
- PST en porte à faux car chevrons non identiques
- Tuiles de faîtage mal colmatées
- Toiture à reprendre
- Le gros 'uvre sur les parties terrasses et auvents indispensables pour l'obtention de la DAT non effectué.
En conséquence, ces désordres n°9, s'ils constituent bien des désordres de nature décennale, ils ont fait l'objet de réserves le 20 avril 2012. A ce titre, la garantie décennale ne peut s'appliquer.
Le jugement sera confirmé sur ce point.
- s'agissant du désordre n°7 (solins sur terrasse) et du désordre n°11 (couvertures) :
Le premier juge les a exclus en indiquant qu'ils n'étaient pas garantis par la compagnie d'assurance car ils concernent des travaux de toiture.
L'assureur demande la confirmation du jugement.
L'appelant considère que les exclusions de garantie et les franchises stipulées au contrat d'assurance sont inopposables au maître d'ouvrage pour l'application de la garantie légale. Il indique à la cour que ce principe a été rappelé au terme d'un arrêt « récent » rendu par la 3ème chambre civile de la Cour de cassation, le 29 septembre 2016.
Réponse de la cour :
Les franchises et exclusions de garanties sont inopposables au maitre de l'ouvrage. Mais une exclusion de garantie ou une franchise nécessite au préalable que l'objet soit garanti étant constant que seules les activités déclarées par l'assuré sont susceptibles de donner lieu à indemnisation de la part de l'assureur.
En l'espèce, les conditions particulières du contrat d'assurance souscrit par la société AG N CONSTRUCTION auprès de SWISS LIFE dé'nissent les activités garanties comme suit :
« 1.3 - Exercer lui-même ou avec le concours de sous-traitants les activités suivantes :
2.1 Maçonnerie et structures béton armé - Clôtures.
2.6 Pose de charpentes courantes et structures bois hors lamellé collé.
4.2 Fourniture et pose de menuiseries métalliques, PVC ou bois - Escaliers ' Volets roulants - Portes de garages.
4.9 Fourniture et pose de cloisons (placoplâtre, bois) à structures métalliques ou bois.
6.1 Toutes poses, en intérieur, de carrelages, mosaïques, pierres et marbres et, à l'extérieur, exclusivement en revêtement de sols ».
Les conditions particulières poursuivent en exposant que :
« Les activités non visées ci-dessus ne font l'objet d'aucune assurance ».
Ainsi, il ressort du contrat d'assurance SWISS LIFE souscrit par AG N CONSTRUCTION que l'activité « couverture » n'a pas été souscrite par cette dernière. L'appelant reste taisant sur l'absence de souscription de garantie liée à cette activité.
En conclusion, le jugement sera confirmé concernant les demandes formulées à l'encontre de la société SWISS LIFE.
5 . Sur les demandes concernant la responsabilité personnelle du gérant « dans l'hypothèse d'un défaut d'assurance sur certains postes » :
Au vu des précédents développements, cette demande est cantonnée aux postes 7 et 11 qui ne bénéficient pas d'une assurance décennale, les autres postes étant assurés par une assurance décennale mais non mobilisable au vu des circonstances de l'espèce.
La demande concerne donc :
- (Des.7) solins sur terrasse côté est : 750 €
- (Des.11) couverture et ouvrages singuliers : 16 052,40 €
Réponse de la cour :
Il est exact comme le souligne l'appelant que le gérant qui ne souscrit pas à l'assurance décennale obligatoire commet une faute constitutive d'un délit pénal (C. assur., art. L. 243-3) et engage sa responsabilité civile à l'égard des tiers auxquels cette faute a porté préjudice (Cass. com., 28 sept. 2010, n° 09-66.255, PB) sur le fondement de l'article L.223-22 du Code de commerce.
Le défaut de souscription d'une assurance construction obligatoire est une faute séparable des fonctions sociales, qui engage la responsabilité personnelle du dirigeant (Cour de cassation, 3ème chambre civile, 10 mars 2016 n°14-15.326).
Le défaut de solins (désordre n°7) rend l'ouvrage impropre à sa destination et aurait été pris en charge par l'assureur décennal, il convient donc que M. [J] soit condamné à sa remise en état à hauteur comme demandé et chiffré à la somme de 750 euros.
Il convient cependant de constater que le désordre n°11 est constitué en réalité de plusieurs désordres qui affectent plusieurs éléments de la toiture : seuls les PST (plaques sous tuiles), le calage, et le faitage, sont de nature à compromettre la solidité de l'ouvrage mais le bas de versant, les rives, les génoises, les noues et le collage des tuiles sont des désordres qui sont qualifiés par l'expert d'esthétique (tableau récapitulatif page 78) et n'auraient donc pas pu être pris en charge au titre de la responsabilité décennale.
Cependant le désordre relatif au faitage a fait l'objet de réserve à la réception (« tuiles de faitage mal colmatées », « toiture à reprendre »). Il n'aurait donc pas pu être pris en charge au titre de la responsabilité décennale.
Reste au titre des désordres n°11 qui auraient pu être pris en compte par l'assureur décennal si une assurance avait été souscrite une somme qu'il convient d'évaluer à 5 000 euros sur le poste global évalué à 16 052,40 euros.
* * *
M. [J] sera donc condamné au paiement de la somme de 5 000 euros + 750 euros soit 5 750 euros HT. La décision de première instance sera donc infirmée uniquement sur le quantum du montant alloué.
6. Sur la demande relative au préjudice de jouissance à hauteur de 93 600 euros :
L'appelant chiffre sa demande et se contente d'indiquer que M. [J] devra répondre personnellement sur le fondement des dispositions de l'article 1240 du code civil.
Réponse de la cour :
Si tout fait de l'homme qui cause à autrui un dommage oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer, encore faut-il démontrer la faute et le lien de causalité.
L'appelant reste complètement taisant sur l'imputabilité de son préjudice de jouissance à une quelconque faute de M. [J].
Le préjudice de jouissance indiqué dans l'expertise est sur l'entièreté des désordres et de l'absence de reprise des travaux. Un grand nombre de ces désordres sont de nature seulement esthétique, certains désordres ont été réservés ' et ne relèvent pas de l'absence de souscription de garantie décennale, seule faute imputable à M. [J].
Dans ces conditions, et en l'absence de tous éléments versés par les parties de nature contradictoire, il y a lieu de confirmer l'indemnisation à hauteur de 3 000 euros retenue par le premier juge au titre du préjudice de jouissance.
7 . Sur la demande de condamnation solidaire de la société AGS CONSTRUCTION, et de Monsieur [J] au titre de l'inexécution du protocole d'accord daté du 9 juin 2014 portant achèvement des travaux et reprise des malfaçons :
L'appelant sollicite la condamnation de la SARL AGS CONSTRUCTION, représentée par son mandataire ad hoc en la personne de M. [J], à hauteur de 14 342 euros, sur le fondement de l'article 1231-1 du code civil.
Il sollicite en parallèle au titre du défaut d'assurance décennale et ainsi de la faute détachable de ses fonctions que M. [J] soit condamné solidairement avec la SARL AGS CONSTRUCTION à indemniser M. [V] à hauteur de 14 342 euros au titre de l'inexécution du protocole d'accord susvisé.
Réponse de la cour :
L'article 1231-1 du code civil dispose que :
« Le débiteur est condamné, s'il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts soit à raison de l'inexécution de l'obligation, soit à raison du retard dans l'exécution, s'il ne justifie pas que l'exécution a été empêchée par la force majeure ».
Concernant AGS Construction :
Il n'est pas contesté que la société AG.S CONSTRUCTION a fait l'objet d'une procédure de liquidation judiciaire et que cette procédure a été clôturée en raison de l'insuffisance d'actif.
L'article L 622-21 du code de commerce interdit toute action en justice tendant à la condamnation du débiteur au paiement d'une somme d'argent.
L'article L 641-3 du code de commerce énonce que le jugement qui ouvre la liquidation judiciaire a les mêmes effets que ceux prévus par l'article L 622-21.
L'article L 643-11 du code de commerce prévoit que la clôture de la procédure de liquidation judiciaire pour insuffisance d'actif ne fait pas en principe recouvrer aux créanciers l'exercice individuel de leurs actions contre le débiteur, sauf exceptions prévues par ce texte.
Un jugement de clôture pour insuffisance d'actif a été rendu le 5 juillet 2017 entraînant la radiation de ladite société au registre du commerce et des sociétés.
La demande de condamnation de la société AGS Construction ne peut donc aboutir.
Le jugement sur ce point sera confirmé.
Concernant M. [J] :
Ce dernier ne peut être condamné que dans le cadre d'une faute détachable de ses fonctions de gérant.
Il ne peut être tenu du défaut d'exécution du protocole d'accord daté du 9 juin 2014 portant achèvement des travaux et reprise des malfaçons qui relève d'une responsabilité de nature contractuelle de la société et non d'une faute détachable de ses fonctions de gérant.
Il peut en revanche, comme indiqué précédemment être tenu du défaut de garantie décennale si celle-ci a été préjudiciable. En l'espèce, il est reproché à M. [J] un défaut de reprise ce qui ne peut constituer une faute détachable.
De la même manière, les travaux définis dans le protocole signé le 9 juin 2014, et dont l'appelant demande l'indemnisation pour non-exécution ne peuvent constituer un préjudice pour défaut d'assurance décennale, puisque précisément l'appelant invoque leur non-exécution. Ils sont donc par hypothèse inexistants.
Le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté l'appelant de ces demandes.
8. Sur la demande de paiement de l'achat des matériaux nécessaires à la toiture :
Le premier juge a parfaitement motivé sa décision sur le fait que l'appelant est intervenu alors même que la société AGS Construction n'était pas constituée, qu'il s'agit d'une décision de M. [V] et non de la société AGS Construction, ou de M. [J]. En outre comme le souligne le premier juge, il n'est pas établi que le maitre d'ouvrage n'ait pas bénéficié de ces matériaux. M. [J] n'a pas commis de faute intentionnelle d'une particulière gravité incompatible avec l'exercice normal de ses fonctions de gérant.
La décision du premier juge sera donc confirmée.
9 . Sur les frais du procès :
Concernant la première instance, il y a lieu de confirmer la décision du premier juge.
En appel, succombant au moins en partie à l'instance, M. [V] sera condamné à en régler les entiers dépens, en application des dispositions de l'article 696 du code de procédure civile.
Aucune considération d'équité ne commande en revanche de faire droit aux autres demandes présentées au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour, par arrêt contradictoire, statuant en matière civile, rendu publiquement en dernier ressort,
- Confirme le jugement en ses dispositions soumises à la cour sauf en ce que le premier juge a :
Condamné Monsieur [U] [J] à payer à Monsieur [O] [V] les sommes suivantes :
- 3 630 euros hors taxe au titre des désordres de nature décennale non garantis par une assurance,
Statuant à nouveau de ces chefs :
- Condamne M. [U] [J] à payer à M. [O] [V] la somme suivante :
- 5 750 euros hors taxe au titre des désordres de nature décennale non garantis par une assurance,
Y ajoutant,
- Condamne M. [O] [V] aux dépens d'appel,
- Dit n'y avoir lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Arrêt signé par la présidente et par la greffière.
LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
ARRÊT N°
N° RG 20/00979 - N° Portalis DBVH-V-B7E-HV5D
VH
TJ HORS JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP DE NIMES
03 février 2020
RG:16/05173
[V]
C/
[J]
S.A. SWISS LIFE ASSURANCE DE BIENS
S.A.R.L. AG.S CONSTRUCTION
[J]
Grosse délivrée
le
à Me Bouillard
SCP GMC Avocats
Me Collion
COUR D'APPEL DE NÎMES
CHAMBRE CIVILE
2ème chambre section A
ARRÊT DU 12 SEPTEMBRE 2024
Décision déférée à la Cour : Jugement du TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de NIMES en date du 03 Février 2020, N°16/05173
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :
Mme Nathalie AZOUARD, Présidente de Chambre,
Madame Virginie HUET, Conseillère,
M. André LIEGEON, Conseiller,
GREFFIER :
Mme Céline DELCOURT, Greffière, lors des débats et Mme Véronique LAURENT-VICAL, Greffière, lors du prononcé de la décision
DÉBATS :
A l'audience publique du 28 Mai 2024, où l'affaire a été mise en délibéré au 12 Septembre 2024.
Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel.
APPELANT :
M. [O] [V]
né le 18 Mai 1963 à [Localité 8]
[Adresse 2]
[Localité 1]
Représenté par Me Alexandra BOUILLARD, Plaidant/Postulant, avocat au barreau d'AVIGNON
INTIMÉS :
M. [U] [J]
assigné à étude d'huissier le 15/06/2020
né le 28 Janvier 1970 à [Localité 7] (MAROC)
[Adresse 4]
[Localité 3]
S.A. SWISS LIFE ASSURANCE DE BIENS immatriculée au RCS de Nanterre sous le n° 391 277 878, prise en la personne de son rerpésentant légal en exercice domicilié ès qualités audit siège
[Adresse 5]
[Localité 6]
Représentée par Me Olivier GOUJON de la SCP GMC AVOCATS ASSOCIES, Postulant, avocat au barreau de NIMES
Représentée par Me Denis RIEU de la SELARL MBA & ASSOCIES, Plaidant, avocat au barreau de MONTPELLIER
S.A.R.L. AG.S CONSTRUCTION Société à responsabilité limitée à associé uniqueprise en la personne de Me [N] [Y], mandataire judiciaire (refus de l'acte - dossier clôturée depuis le 05/07/2017 - déposé à étude)
[Adresse 4]
[Localité 3]
INTERVENANT
M. [U] [J], en sa qualité de mandataire ad hoc de la SARL AG. S CONSTRUCTION, immatriculée au RCS deNîmes sous le numéro 799 255 898 dont le siège social est sis [Adresse 4].
assigné en intervention forçée, ès qualités, le 24/02/2022
né le 28 Janvier 1970 à [Localité 7] (MAROC) (MAROC)
[Adresse 4]
[Localité 3]
Représenté par Me Olivier COLLION, Plaidant/Postulant, avocat au barreau d'AVIGNON
ORDONNANCE DE CLÔTURE rendue le 02 Mai 2024
ARRÊT :
Arrêt réputé contradictoire, prononcé publiquement et signé par Mme Nathalie AZOUARD, Présidente de Chambre, le 12 Septembre 2024,par mise à disposition au greffe de la Cour
EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE
Suivant deux devis acceptés en date du 21 novembre 2011 respectivement pour un montant de 40 006,20 euros toutes taxes comprises et 45 089,20 euros toutes taxes comprises, M. [O] [V] a conclu avec la société AG N Construction, représentée par son gérant, M. [U] [J], un contrat portant sur la construction de deux logements sur un terrain situé à [Localité 9] (Gard).
Les travaux ont débuté à la fin du mois de novembre 2011 et ont été interrompus par l'entreprise le 20 mars 2012.
Une liste de réserves a été dressée dans le procès-verbal de réception du 20 avril 2012.
L'artisan qui avait ainsi fait savoir qu'il interrompait son activité a indiqué qu'en fait il reprenait celle-ci mais qu'il manquait de trésorerie.
M. [V] avait accepté, au mois d'août 2012, d'acheter lui-même les matériaux nécessaires à l'achèvement de la toiture et à la levée des réserves.
Toutefois, le chantier a subi de nombreux arrêts jusqu'au 19 juin 2013, date à laquelle la société AG N Construction a été placée en liquidation judiciaire.
M. [V], étant forclos pour produire sa créance, a contacté M. [J] qui lui a appris qu'il venait de créer une nouvelle société dénommée AG S Construction et le 9 juin 2014 les parties ont signé un protocole d'accord pour l'achèvement du chantier conformément au permis de construire.
Les travaux n'ayant pas été achevés et les malfaçons ayant subsisté, M. [V] a obtenu, par ordonnance de référé du 25 février 2015, la désignation de M. [P] [H] en qualité d'expert lequel a déposé son rapport le 14 novembre 2016 et chiffré le montant des désordres pouvant relever de la garantie décennale de la société AG N Construction à la somme de 26 766,40 euros toutes taxes comprises.
En l'état de ce rapport et par actes d'huissier en date des 6 et 7 décembre 2016, M. [V] a assigné M. [J], la société AG.S Construction et la société Swiss Life assurances de biens devant le tribunal de grande instance de Nîmes.
Par acte du 24 avril 2018, M. [V] a assigné Maître [N] [Y] en sa qualité de mandataire liquidateur de la société AG.S Construction.
Les deux procédures ont été jointes.
Aux termes de ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 22 janvier 2019, M. [V] demandait au tribunal, à titre principal, de condamner la société Swiss Life, assureur décennal de la société AGN Construction au paiement de la somme de 26 766,40 euros toutes taxes comprises et, à titre subsidiaire, de condamner M. [J] solidairement avec la société AG.S Construction :
* au paiement de la somme de 14 342 euros toutes taxes comprises au titre des non-conformités non reprises,
*à reprendre lesdits travaux sous le contrôle d'un maître d''uvre sous astreinte,
* au paiement de la somme de 43 200 euros au titre du préjudice de jouissance et 21 219,23 euros pour les matériaux achetés aux lieu et place de la société de construction,
* au paiement de la somme de 4 000 euros au titre des frais irrépétibles.
Le tribunal judiciaire de Nîmes, par jugement réputé contradictoire du 3 février 2020, a :
- déclaré irrecevables les demandes de condamnation formées à l'encontre de la société AG.S Construction,
- prononcé la mise hors de cause de la compagnie Swiss Life,
- condamné Monsieur [U] [J] à payer à Monsieur [O] [V] les sommes suivantes :
* 3 630 euros hors taxe au titre des désordres de nature décennale non garantis par une assurance,
* 3 000 euros au titre du préjudice de jouissance,
* 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- débouté Monsieur [O] [V] du surplus de ses demandes,
- débouté la compagnie Swiss Life et Monsieur [U] [J] de leur demande présentée sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné Monsieur [U] [J] aux entiers dépens qui comprendront les frais d'expertise,
- ordonné l'exécution provisoire du présent jugement.
Par acte du 16 mars 2020, M. [V] a régulièrement interjeté appel de cette décision.
Par avis du 18 mai 2020, M. [O] [V] a été invité à faire signifier la déclaration d'appel dans le mois de l'avis en vertu de l'article 902 du code de procédure civile.
Par décision en date du 3 septembre 2021, le président du tribunal de commerce de Nîmes a désigné M. [J] en qualité de mandataire ad hoc de la SARL AGS Construction.
Par assignation en intervention forcée en date du 24 février 2022, M. [U] [J] a été attrait à la procédure en sa qualité de mandataire ad hoc de la SARL AG S Construction, suite à sa désignation par ordonnance du tribunal de commerce de Nîmes du 3 septembre 2021.
Par conclusions d'incident du 15 novembre 2022, M. [O] [V] a saisi le conseiller de la mise en état aux fins de voir déclarer irrecevables, en application des articles 909 et 910 du code de procédure civile, les conclusions de M. [U] [J] notifiées le 7 juin 2022.
Par ordonnance rendue le 23 mai 2023, le conseiller de la mise en état a:
- débouté M. [U] [J] ès qualités de mandataire ad hoc de la SARL AGS Construction de l'ensemble de ses demandes,
- déclaré les conclusions de M. [U] [J] ès qualités de mandataire ad hoc de la SARL AGS Construction en date du 7 juin 2022 irrecevables,
- condamné M. [U] [J] ès qualités de mandataire ad hoc de la SARL AGS Construction aux dépens de l'incident.
Monsieur [V] a signifié sa déclaration d'appel et ses conclusions d'appel à Monsieur [U] [J], le 15 juin 2020, par remise de l'acte à l'étude d'huissier.
Monsieur [V] a signifié sa déclaration d'appel et ses conclusions d'appel à Monsieur [U] [J], en sa qualité d'ancien gérant de la société AG S Construction le 15 juin 2020, par remise de l'acte à l'étude d'huissier.
La SA Swisslife assurances de biens a signifié ses conclusions d'appel le 15 septembre 2020 à Monsieur [U] [J], à domicile, son épouse ayant accepté de recevoir la copie de l'acte.
Monsieur [V] a signifié la déclaration d'appel et ses conclusions d'appel à Maître [Y], en sa qualité de mandataire de la SARL AG S Construction le 15 juin 2020, par dépôt de l'acte à l'étude d'huissier, la personne rencontrée refusant de prendre la copie de l'acte au motif que le dossier AGS Construction est clôturé depuis le 5 juillet 2017.
La SA Swisslife assurances de biens a signifié ses conclusions le 28 septembre 2020, à la SARL AG S Construction, prise en la personne de son liquidateur Maître [N] [Y], l'acte indiquant qu'il n'a pu être signifié au motif que Maître [Y] a refusé de prendre l'acte, un jugement de clôture pour insuffisance d'actif ayant été rendu le 5 juillet 2017 le relevant de son rôle de liquidateur et entraînant la radiation de ladite société au registre du commerce et des sociétés.
Par ordonnance du 7 février 2024, la clôture de la procédure a été fixée au 2 mai 2024, l'affaire a été appelée à l'audience du 28 mai 2024 et mise en délibéré par mise à disposition au greffe au 12 septembre 2024.
EXPOSE DES MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES
Aux termes de ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 16 novembre 2022, Monsieur [V], appelant, demande à la cour de :
Vu le rapport d'expertise judiciaire de Monsieur [H] ;
Vu les dispositions des articles 1792, 1792-1 et 1792-2 du Code civil ;
Vu les dispositions des articles L.124-3 et L.241-1 du Code des assurances ;
Vu les dispositions de l'article L.223-22 du Code de commerce ;
Vu les dispositions des articles 1231-1 et 1240 du Code civil ;
Vu les dispositions de l'article L243-3 du Code de la construction et de l'habitation ;
Vu le jugement prononcé par le Tribunal judiciaire de Nîmes en date du 3 février 2020 ;
Vu les pièces versées au débat.
A titre principal
- recevoir l'appel partiel de Monsieur [V] comme étant bien fondé,
- déclarer irrecevables les demandes formées par Monsieur [J],
- rejeter l'appel incident de Monsieur [J] comme étant irrecevable celui-ci portant sur des demandes à titre personnel et en qualité d'ancien gérant qu'il aurait dû former au stade de l'appel,
- infirmer le jugement de première instance en ce qu'il a déclaré irrecevables les demandes dirigées par Monsieur [V] à l'encontre de la société Swiss Life,
- déclarer recevables et bien fondées les demandes formées par Monsieur [V] à l'encontre de la société Swiss Life, la société AGN Construction représentée par Monsieur [J], et Monsieur [J] à titre personnel,
- condamner la société Swiss Life, assureur décennal suivant police n°011142481 souscrite le 23/09/2010 par la société AGN Construction à garantir et indemniser Monsieur [V] [O] à hauteur de 26 766,40 euros au titre des désordres de nature décennale, avec intérêts au taux légal à compter de la décision à intervenir,
A défaut, si par extraordinaire la cour retenait des exclusions de garantie,
- condamner Monsieur [J] [U] à indemniser Monsieur [V] des dommages de nature décennale non couverts par l'assureur Swiss Life,
- infirmer le jugement de première instance en ce qu'il a déclaré irrecevables les demandes de condamnations formées à l'encontre de la société AGS Construction et Monsieur [J] en son nom personnel, et statuant à nouveau :
- condamner la société AGS Construction, prise en la personne de son mandataire ad hoc Monsieur [J], à indemniser M. [V] à hauteur de 14 342 euros, hors intérêts, conformément au rapport d'expertise et au regard de l'inexécution du protocole d'accord du 9 juin 2014,
- condamner Monsieur [J] à même hauteur soit 14 342 euros, en raison de sa responsabilité solidaire avec la société AGS Construction du fait du défaut d'assurance,
- infirmer le jugement en ce qu'il a débouté Monsieur [V] de sa demande de condamnation à l'encontre de Monsieur [J] en son nom personnel à hauteur de 21 219,23 au titre du matériel acheté en ses lieu et place, avec intérêts au taux légal à compter de la décision à intervenir,
- condamner Monsieur [J] à indemniser Monsieur [V] à hauteur de 21 219,23 euros correspondant à du matériel acheté en ses lieu et place, avec intérêts au taux légal à compter de la décision à intervenir,
- réformer le jugement de première instance sur le quantum en ce qu'il a condamné Monsieur [J] à 3000 euros au titre du préjudice de jouissance et statuant à nouveau :
- condamner Monsieur [J] à indemniser Monsieur [V] à hauteur de 93600 euros au titre du préjudice de jouissance arrêté au mois de novembre 2022, de la villa A à raison de 900 euros/Mois depuis le mois de janvier 2015, sauf à parfaire au jour de l'arrêt tenant compte d'une majoration de 9 mois de non-location le temps d'effectuer les travaux de reprise, le tout avec intérêts au taux légal à compter de la décision à intervenir,
- confirmer le jugement de première instance en ce qu'il a condamné Monsieur [J] au paiement de 4000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, et aux entiers dépens de première instance, en ce compris les frais d'expertise avancés par Monsieur [V],
Y ajouter :
- condamner Monsieur [J] à payer à Monsieur [V] la somme de 2500 euros au titre des frais irrépétibles engagés en cause d'appel.
A titre subsidiaire,
- confirmer le jugement de première instance en toutes ses dispositions,
- condamner Monsieur [J] à payer à Monsieur [V] la somme de 2500 euros au titre des frais irrépétibles engagés en cause d'appel.
Au soutien de ses prétentions, l'appelant fait essentiellement valoir que :
- M. [J] ne peut plus conclure en son nom personnel mais uniquement au nom de la société en sa qualité d'administrateur ad hoc. Ses conclusions en date du 3 juin 2022 sont donc irrecevables.
Sur les désordres relevant de la garantie décennale de la société AGN Construction
- il ressort du rapport de l'expert une liste de désordres qui relèvent de la garantie décennale du constructeur, la société AGN construction, en application des articles 1792, 1792-1 et 1792-2 du code civil, dans la mesure où ils affectent soit des éléments constitutifs de l'ouvrage, soit des éléments d'équipement indissociables faisant corps avec l'ouvrage et qu'ils causent une impropriété à destination ou une atteinte à la solidité. Il s'agit des désordres suivants : désordre 1 (menuiseries extérieures de la villa A : 2184 euros), désordre 3 (piliers et arcs cintrés terrasse ouest de la villa B : 2880 euros), désordre 7 (solins sur terrasse côté est : 750 euros), désordre 9 (charpente bois sur villa A : 4900 euros), désordre 11 (couverture et ouvrages singuliers :16 052,40 euros), dont le total est de 26 766,40 euros.
Sur la mise en 'uvre de l'assurance décennale Swiss Life du constructeur
- la société Swiss Life soutient à tort que :
* certains travaux affectés de désordres, inclus dans le chiffrage que l'expert judiciaire met à la charge de la société AGN Construction, auraient été effectués par M. [J] après la liquidation judiciaire de cette dernière et ne seraient en conséquence pas garantis, alors qu'il s'agit bien de travaux effectués par la société AGN Construction entre la date d'ouverture du chantier le 15 décembre 2011 et sa liquidation judiciaire en juin 2013, et qu'elle n'a pas contesté le rapport d'expertise sur ce point ;
* les travaux de couverture ne sont pas garantis, alors que la société AGN Construction était assurée pour des travaux de maçonnerie générale et de charpente et que les exclusions de garantie et les franchises stipulées au contrat d'assurance sont inopposables au maître d'ouvrage pour l'application de la garantie légale ;
* le caractère apparent de certains désordres à la réception fait échec à la mise en 'uvre de la garantie décennale, alors que la réception des travaux fait courir le délai de la garantie décennale, que le fait que des désordres apparaissent à l''il nu au maître de l'ouvrage non professionnel ne fait pas échec à la mise en 'uvre de la garantie décennale si l'expertise judiciaire révèle que lesdits désordres constituent des atteintes à la solidité de l'ouvrage comme c'est le cas en l'espèce, d'autant qu'il s'est avéré qu'outre les vices apparents la construction comportait des vices cachés portant atteinte à la solidité de l'ouvrage parfaitement indissociables ;
- dans ces conditions, les désordres relevant de la garantie décennale, chiffrés par l'expert à la somme de 26 766,40 euros, devront être couverts par la société Swiss Life, de sorte que cette dernière sera condamnée suivant police n°011142481 souscrite le 23 septembre 2010 par la société AGN construction à lui payer cette somme, avec intérêts au taux légal à compter de l'arrêt à intervenir.
A titre subsidiaire, sur la mise en 'uvre de la responsabilité personnelle du gérant dans l'hypothèse d'un défaut d'assurance sur certains postes
- M. [J], gérant de la société AGN Construction, qui n'a pas souscrit d'assurance décennale obligatoire, engage sa responsabilité civile à l'égard des tiers auxquels cette faute a porté préjudice sur le fondement de l'article L. 223-22 du code de commerce, de sorte qu'il sera condamné à l'indemniser des dommages de nature décennale non couverts par la société Swiss Life si certaines exclusions de garantie devaient prospérer.
Sur la responsabilité solidaire de la société AGS construction et de M. [J] au titre de l'inexécution du protocole d'accord daté du 9 juin 2014 portant achèvement des travaux et reprise des malfaçons
- en application des articles L. 243-3 du code de la construction et de l'habitation et L. 223-22 alinéa 1 du code de commerce, le gérant engage sa responsabilité civile personnelle en cas de faute détachable de ses fonctions ;
- il ressort du rapport d'expertise qu'en l'espèce, la société AGS Construction, représentée par son mandataire ad hoc en la personne de M. [J], n'a pas effectué les travaux prévus par le protocole d'accord signé le 9 juin 2014 ;
- après la liquidation judiciaire de la société AGN Construction, M. [J] a ouvert une seconde entreprise dénommée AGS Construction sans souscrire d'assurance décennale ; qu'il s'agit d'une infraction pénale et d'une faute détachable de ses fonctions qui engage sa responsabilité civile personnelle sur le fondement des dispositions de l'article L. 223-22 alinéa 1 du code de commerce ; que par conséquent M. [J] sera condamné solidairement avec la SARL AGS Construction à l'indemniser à hauteur de 14 342 euros au titre de l'inexécution dudit protocole d'accord.
Sur les préjudices économiques complémentaires
- il résulte du rapport d'expertise un préjudice de jouissance concernant la villa A et arrêté à la somme de 900 euros par mois depuis le mois de janvier 2015 imputable à M. [J], de sorte que ce dernier devra l'indemniser sur le fondement de l'article 1240 du code civil à hauteur de 93 600 euros correspondant au trouble de jouissance actualisé au mois de novembre 2022 ;
- il a subi un préjudice financier supplémentaire de 21 219,23 euros correspondant au matériel qu'il a acheté et remis entre les mains de M. [J] qui l'a détourné et n'a pas contesté cet état de fait au stade des opérations d'expertise ; que par conséquent M. [J] sera tenu de l'indemniser à hauteur de cette somme.
En l'état de ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 24 juin 2022, la société Swiss Life assurance de biens, intimée, demande à la cour de :
Vu les dispositions des articles 1315 et 1792 et suivants du Code civil,
Vu les dispositions de l'article L 241-1 du code des assurances,
Tenant le Jugement du Tribunal Judiciaire du 3 février 2020,
Rejetant l'appel interjeté par M. [V] et incident de M. [J],
- dire et juger que les désordres n°1, 3, 4, 5, 6, 7, 10 et 16 ne relèvent de la responsabilité de la société AG N Construction et rejeter en conséquence toutes actions à l'encontre de Swiss Life à ces titres,
- dire et juger que les désordres n°5, 6, 7, 11 et 16 concernent l'activité couverture non souscrite et rejeter en conséquence toutes actions à l'encontre de Swiss Life à ces titres,
- dire et juger que les désordres n°3, 4, 5, 9, 10, 11 et 16 ont été réservés à la réception ou était apparent à la réception et rejeter en conséquence toutes actions à l'encontre de Swiss Life à ces titres,
- dire et juger que les désordres n°2, 4, 5, 6, 7, 8, 12, 13, 14,15 et 17 ne portent pas plus atteinte à la destination qu'à la solidité de l'ouvrage et rejeter en conséquence toutes actions à l'encontre de Swiss Life à ces titres,
- confirmer le jugement du 3 février 2020 en ce qu'il a rejeté toutes actions dirigées à l'encontre de la société Swiss Life,
- condamner M. [V] au paiement de 2 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel.
Elle fait valoir en substance que :
Sur l'étendue des travaux réalisés par AG N Construction
- M. [J] a affirmé lui-même qu'au jour du procès-verbal de réception du 20 avril 2012 avec de nombreuses réserves seules les maçonnerie, charpente et plaques sous tuiles de la première partie de la villa et une partie de la maçonnerie de la seconde avaient été exécutées par la SARL AG N Construction, malgré les intitulés de certaines factures, et qu'il a exécuté en tant qu'entrepreneur, après l'ouverture de la liquidation judiciaire de la SARL AG N Construction, notamment la couverture de la première partie et la charpente ainsi que la toiture de la seconde ; que l'état d'avancement des travaux exécutés par la SARL AG N Construction est incontestable puisque résultant d'un document communiqué par le maître d'ouvrage selon un dire du 5 juin 2015 ; que M. [J] doit seul répondre des malfaçons des prestations qu'il a exécutées après l'abandon du chantier par sa société AG N Construction, la circonstance que des factures de la société AG N Construction existent étant indifférente puisqu'il convient de raisonner par rapport à la réalité des prestations effectuées par chacun et non des précisions erronées sur certaines factures ; qu'en application de l'article L. 241-1 du code des assurances, engage sa responsabilité personnelle le gérant dont la société qu'il gère n'a pas souscrit l'assurance décennale obligatoire ;
- les éventuelles non-conformités et malfaçons de la toiture des deux parties de la villa, de la charpente de la seconde partie de la villa litigieuse et des menuiseries n'ont pas été exécutées par la SARL AG N Construction, qu'il en est de même concernant les travaux de maçonnerie de la terrasse et auvents comme le mentionne le procès-verbal de réception ; que par conséquent les désordres n°1, 3, 4, 5, 6, 7, 10 et 16 ne peuvent relever de la responsabilité de la société AG N Construction et ne sauraient donc conduire à l'application des garanties du contrat d'assurance souscrit auprès d'elle ;
- l'appelant ne critique pas les motifs du jugement sur ce point.
Sur la non-garantie pour l'activité couverture
- il résulte du contrat d'assurance souscrit auprès d'elle par la société AG N Construction que l'activité « couverture » n'a pas été souscrite par cette dernière, de sorte que les désordres relatifs à cette activité, soit les désordres n° 5 (Villa A et B : toiture non conforme au permis de construire façade est Villa A et B), n°6 (Villa A et B : toiture non conforme au permis de construire pilier et cintre), n° 7 (solin inachevé), n°11 (défaut de couverture et des ouvrages de zinguerie ou points singuliers de la couverture des deux villas) et n°16 (infiltrations au plafond de la villa B en lien avec des problèmes de couverture) ne peuvent être garantis ;
- la jurisprudence citée par le maître de l'ouvrage ne remet pas en cause la jurisprudence constante de la Cour de cassation dans la mesure où elle ne porte que sur l'opposabilité de la franchise décennale au locateur d'ouvrage pour les réparations qui ne peut venir en déduction de l'indemnité ;
- l'appelant ne répond pas au moyen de non-garantie qu'elle invoque qui a été confirmé par le tribunal.
Sur le caractère apparent à la réception de certains désordres allégués
- tous les désordres qui étaient apparents au moment de la réception, qu'ils aient été ou non réservés par le maître d'ouvrage, ne peuvent donner lieu à application de la responsabilité décennale du constructeur, de sorte que l'assureur décennal ne peut être tenu de l'indemnisation desdits désordres ;
- contrairement à ce qu'énonce l'appelant, il existe deux conditions principales cumulatives à la responsabilité décennale, un vice caché à la réception c'est-à-dire non réservé à la réception par le maître d'ouvrage et une atteinte à la destination ou à la solidité de l'ouvrage ; qu'en conséquence en présence d'un vice apparent, même si la solidité est compromise, la responsabilité décennale ne s'applique pas ;
- l'appelant ne critique pas le jugement sur ce point, de sorte que celui-ci sera confirmé en ce qu'il a constaté le caractère apparent du désordre n° 9 et qu'il sera également constaté celui des désordres n° 3, 4, 5, 10, 11 et 16.
Sur l'absence de gravité décennale de certains désordres
- il résulte du rapport d'expertise que certains incidents de construction relevés par le maître d'ouvrage ne revêtent pas de caractère décennal, soit parce qu'ils n'ont qu'un caractère purement esthétique, soit parce qu'ils constituent de simples non-conformités contractuelles sans désordres ou dommages ; qu'il en est ainsi du désordre n°2 (villa A : défaut seuils et appui en terre cuite de la villa A qualifié de désordre esthétique par l'expert judiciaire), du désordre n°4 (villa B : toiture non conforme au permis de construire), du désordre n°5 (villa A et B : toiture non conforme au permis de construire façade est villa A et B), du désordre n°6 (villa A et B : toiture non conforme au permis de construire pilier et cintre), du désordre n°8 (défaut d'exécution des noues mal implantées, défaut d'ordre esthétique), du désordre n°12 (hauteurs non conformes par rapport au permis de construire des deux villas. Il s'agit d'un défaut d'ordre contractuel), du désordre n°13 (absence des escaliers d'accès aux terrasses. Il s'agit d'un défaut d'inachèvement, travail non effectué), du désordre n°14 (non-conformité au permis de construire de la baie façade est villa A. Il s'agit d'un défaut d'ordre contractuel), du désordre n°15 (joint de dilatation villa A et B façade est) et du désordre n°17 (fonctionnement défectueux du tablier des volets roulants) ;
- le désordre n°7, outre l'absence d'atteinte à la destination ou à la solidité, présente selon l'expert un « risque sérieux de pénétrations d'eaux » ; que ce risque ne s'est pas réalisé au jour de la rédaction de ces écritures ; que si la jurisprudence de la Cour de cassation permet l'indemnisation d'un dommage futur c'est à la condition que sa survenance future dans le délai décennal soit certaine ; qu'un risque sérieux n'est pas une certitude, d'autant qu'en l'espèce il ne s'est pas réalisé plus de 8 ans après la réception ; qu'il résulte de l'ensemble de ces éléments que toutes actions à son encontre au titre des désordres n°2, 4, 5, 6, 7, 8, 12, 13, 14, 15 et 17 seront rejetées et que le jugement sera confirmé sur ce point, étant relevé que le désordre n°7 a été écarté par le tribunal en ce qu'il relève d'une activité non souscrite auprès d'elle.
Il est fait renvoi aux écritures des parties pour plus ample exposé des éléments de la cause, des prétentions et moyens des parties, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.
MOTIVATION
1 . A titre préliminaire :
Depuis l'entrée en vigueur de l'article 34 du Décret n°2017-891 du 6 mai 2017, l'alinéa 2 de l'article 954 du code de procédure civile dispose que « les conclusions comprennent distinctement un exposé des faits et de la procédure, l'énoncé des chefs de jugement critiqués, une discussion des prétentions et des moyens ainsi qu'un dispositif récapitulant les prétentions ». Par ailleurs, selon l'alinéa 3, « la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif ».
La cour rappelle, à titre liminaire, qu'elle n'est pas tenue de statuer sur les demandes de 'constatations' ou de 'dire' lorsqu'elles constituent uniquement des moyens invoqués par les parties au soutien de leurs demandes.
2 . Sur la non comparution de M. [J] à titre personnel, ainsi que des deux sociétés :
Il résulte de l'article 472, alinéa 2, du code de procédure civile, que si l'intimé ne comparait pas le juge est tenu de vérifier si la demande de l'appelant est régulière recevable et bien fondée.
En application de l'article 954 alinéa 6 du code de procédure civile, la partie qui ne conclut pas est réputée s'approprier les motifs du jugement.
3 . Sur l'irrecevabilité des demandes de M. [J] es qualités de mandataire ad hoc de la SARL AGS Construction :
Par décision rendue le 23 mai 2023, le conseiller de la mise en état a déclaré les conclusions de M. [U] [J] es qualités de mandataire ad hoc de la SARL AGS Construction en date du 7 juin 2022 irrecevables.
La demande, formulée dans des conclusions antérieures au rendu de la décision du conseiller de la mise en état, est donc sans objet.
AU FOND :
Il ressort du rapport d'expertise en date du 14 novembre 2016 non sérieusement contesté par les parties les désordres suivants :
Désordre n°1 (villa A) : scellement non conforme des menuiseries et un défaut d'étanchéité à l'eau qui entraînent une impropriété à destination dans les deux cas.
- Désordre n°2 (villa A) : défaut seuils et appui en terre cuite de la villa A. Il est quali'é de désordre esthétique par l'expert judiciaire.
- Désordre n°3 (villa B) : présence des aciers d'armatures visibles en sous-face des deux poutres pour laquelle l'expert judiciaire attribue un caractère d'atteinte à la solidité + le cintre en béton sur la façade Sud comporte un défaut de coulage. Il attribue également à ce désordre, une atteinte à la solidité.
- Désordre n°4 (villa B) : toiture non conforme au permis de construire.
- Désordre n°5 (villa A et B) : toiture non conforme au permis de construire façade Est Villa A et B.
- Désordre n°6 : non-conformité au permis de construire pour les piliers et cintres de la terrasse est villas a et b.
- Désordre n°7 : solins sur terrasse coté Est, impropriété à destination selon l'expert judiciaire.
- Désordre n°8 : défaut d'exécution des noues mal implantées, défaut d'ordre esthétique.
- Désordre n°9 : défaut d'assemblage de la charpente de la villa A. L'expert relève une impropriété à destination.
- Désordre n°10 : Il est évoqué un défaut sur la charpente de la villa B mais celle-ci n'est pas visible.
- Désordre n°11 : défaut de couverture et des ouvrages de zinguerie ou points singuliers de la couverture des deux villas.
- Désordre n°12 : hauteurs non conformes par rapport au permis de construire des deux villas. Il s'agit d'un défaut d'ordre contractuel.
- Désordre n°13 : absence des escaliers d'accès aux terrasses. Il s'agit d'un défaut d'inachèvement, travail non effectué.
- Désordre n°14 : non-conformité au permis de construire de la baie façade Est villa A. Il s'agit d'un défaut d'ordre contractuel.
- Désordre n°15 : le joint de dilatation est manquant entre villa A et B façade Est. Il s'agit d'un défaut d'exécution lié à l'inachèvement.
- Désordre n°16 : infiltrations au plafond de la villa B en lien avec des problèmes de couverture.
- Désordre n°17 : fonctionnement défectueux du tablier des volets roulants.
4 . Sur les demandes contre La Swisslife en sa qualité d'assureur de AGN Construction :
M. [V] demande au titre de la garantie décennale le paiement de la somme de 26 766,40 euros, qu'il précise comme suit :
-(Des.1) menuiseries extérieures de la villa A : 2 184 €
-(Des.3) piliers et arcs cintrés terrasse ouest de la villa B : 2 880 €
-(Des.7) solins sur terrasse côté est : 750 €
-(Des.9) charpente bois sur villa A : 4 900 €
-(Des.11) couverture et ouvrages singuliers : 16 052,40 €
TOTAL : 26 766, 40€
Il ne précise pas les fondements de ses demandes, et formule une critique globale du jugement mais non poste par poste.
* * *
Réponse de la cour :
S'agissant du désordre n°1 (menuiseries de la villa A) :
Il ressort de l'expertise que les menuiseries ont été posées entre mars et avril 2014 par la société AGS Construction (AGN étant liquidée) en pages 4 et 51 du rapport dans la partie « repères chronologiques ».
L'assurance Swisslife n'assure que la société AGN Construction. Elle ne peut donc prendre en charge le sinistre lié à une autre entreprise. L'appelant se contente d'affirmer le contraire mais sans produire d'élément probant de sorte que le jugement de première instance sur ce point sera confirmé.
S'agissant du désordre n°3 (piliers et arcs cintrés de la terrasse ouest de la villa B) :
Il ressort du procès-verbal de réception que ce travail n'a pas été effectué ; « le gros 'uvre sur les parties terrasses et auvents indispensables pour l'obtention de la DAT non effectué ».
Comme pour le désordre n°1, le jugement sera confirmé en ce qu'il a exclu la prise en charge de la garantie décennale de l'assureur. L'appelant reste taisant sur ce désordre.
- S'agissant du désordre n°9 (charpente bois sur villa A) :
Il est constant que l'existence de réserves à la réception a pour conséquence de maintenir postérieurement à la réception de l'ouvrage le régime applicable avant la réception, sauf garantie de parfait achèvement. Les réserves à la réception excluent la responsabilité décennale.
Il ressort des propres conclusions de l'appelant qu'un procès-verbal de réception du chantier avec réserves était signé le 20 avril 2012.
Les réserves suivantes étaient listées :
- Charpentes mal posées (ce qui correspond au désordre n°9)
- Couvertures plaques sous tuiles non hermétiques
- Fermettes bois constituant l'ossature porteuses mal fixées
- Génoises mal posées
- PST en porte à faux car chevrons non identiques
- Tuiles de faîtage mal colmatées
- Toiture à reprendre
- Le gros 'uvre sur les parties terrasses et auvents indispensables pour l'obtention de la DAT non effectué.
En conséquence, ces désordres n°9, s'ils constituent bien des désordres de nature décennale, ils ont fait l'objet de réserves le 20 avril 2012. A ce titre, la garantie décennale ne peut s'appliquer.
Le jugement sera confirmé sur ce point.
- s'agissant du désordre n°7 (solins sur terrasse) et du désordre n°11 (couvertures) :
Le premier juge les a exclus en indiquant qu'ils n'étaient pas garantis par la compagnie d'assurance car ils concernent des travaux de toiture.
L'assureur demande la confirmation du jugement.
L'appelant considère que les exclusions de garantie et les franchises stipulées au contrat d'assurance sont inopposables au maître d'ouvrage pour l'application de la garantie légale. Il indique à la cour que ce principe a été rappelé au terme d'un arrêt « récent » rendu par la 3ème chambre civile de la Cour de cassation, le 29 septembre 2016.
Réponse de la cour :
Les franchises et exclusions de garanties sont inopposables au maitre de l'ouvrage. Mais une exclusion de garantie ou une franchise nécessite au préalable que l'objet soit garanti étant constant que seules les activités déclarées par l'assuré sont susceptibles de donner lieu à indemnisation de la part de l'assureur.
En l'espèce, les conditions particulières du contrat d'assurance souscrit par la société AG N CONSTRUCTION auprès de SWISS LIFE dé'nissent les activités garanties comme suit :
« 1.3 - Exercer lui-même ou avec le concours de sous-traitants les activités suivantes :
2.1 Maçonnerie et structures béton armé - Clôtures.
2.6 Pose de charpentes courantes et structures bois hors lamellé collé.
4.2 Fourniture et pose de menuiseries métalliques, PVC ou bois - Escaliers ' Volets roulants - Portes de garages.
4.9 Fourniture et pose de cloisons (placoplâtre, bois) à structures métalliques ou bois.
6.1 Toutes poses, en intérieur, de carrelages, mosaïques, pierres et marbres et, à l'extérieur, exclusivement en revêtement de sols ».
Les conditions particulières poursuivent en exposant que :
« Les activités non visées ci-dessus ne font l'objet d'aucune assurance ».
Ainsi, il ressort du contrat d'assurance SWISS LIFE souscrit par AG N CONSTRUCTION que l'activité « couverture » n'a pas été souscrite par cette dernière. L'appelant reste taisant sur l'absence de souscription de garantie liée à cette activité.
En conclusion, le jugement sera confirmé concernant les demandes formulées à l'encontre de la société SWISS LIFE.
5 . Sur les demandes concernant la responsabilité personnelle du gérant « dans l'hypothèse d'un défaut d'assurance sur certains postes » :
Au vu des précédents développements, cette demande est cantonnée aux postes 7 et 11 qui ne bénéficient pas d'une assurance décennale, les autres postes étant assurés par une assurance décennale mais non mobilisable au vu des circonstances de l'espèce.
La demande concerne donc :
- (Des.7) solins sur terrasse côté est : 750 €
- (Des.11) couverture et ouvrages singuliers : 16 052,40 €
Réponse de la cour :
Il est exact comme le souligne l'appelant que le gérant qui ne souscrit pas à l'assurance décennale obligatoire commet une faute constitutive d'un délit pénal (C. assur., art. L. 243-3) et engage sa responsabilité civile à l'égard des tiers auxquels cette faute a porté préjudice (Cass. com., 28 sept. 2010, n° 09-66.255, PB) sur le fondement de l'article L.223-22 du Code de commerce.
Le défaut de souscription d'une assurance construction obligatoire est une faute séparable des fonctions sociales, qui engage la responsabilité personnelle du dirigeant (Cour de cassation, 3ème chambre civile, 10 mars 2016 n°14-15.326).
Le défaut de solins (désordre n°7) rend l'ouvrage impropre à sa destination et aurait été pris en charge par l'assureur décennal, il convient donc que M. [J] soit condamné à sa remise en état à hauteur comme demandé et chiffré à la somme de 750 euros.
Il convient cependant de constater que le désordre n°11 est constitué en réalité de plusieurs désordres qui affectent plusieurs éléments de la toiture : seuls les PST (plaques sous tuiles), le calage, et le faitage, sont de nature à compromettre la solidité de l'ouvrage mais le bas de versant, les rives, les génoises, les noues et le collage des tuiles sont des désordres qui sont qualifiés par l'expert d'esthétique (tableau récapitulatif page 78) et n'auraient donc pas pu être pris en charge au titre de la responsabilité décennale.
Cependant le désordre relatif au faitage a fait l'objet de réserve à la réception (« tuiles de faitage mal colmatées », « toiture à reprendre »). Il n'aurait donc pas pu être pris en charge au titre de la responsabilité décennale.
Reste au titre des désordres n°11 qui auraient pu être pris en compte par l'assureur décennal si une assurance avait été souscrite une somme qu'il convient d'évaluer à 5 000 euros sur le poste global évalué à 16 052,40 euros.
* * *
M. [J] sera donc condamné au paiement de la somme de 5 000 euros + 750 euros soit 5 750 euros HT. La décision de première instance sera donc infirmée uniquement sur le quantum du montant alloué.
6. Sur la demande relative au préjudice de jouissance à hauteur de 93 600 euros :
L'appelant chiffre sa demande et se contente d'indiquer que M. [J] devra répondre personnellement sur le fondement des dispositions de l'article 1240 du code civil.
Réponse de la cour :
Si tout fait de l'homme qui cause à autrui un dommage oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer, encore faut-il démontrer la faute et le lien de causalité.
L'appelant reste complètement taisant sur l'imputabilité de son préjudice de jouissance à une quelconque faute de M. [J].
Le préjudice de jouissance indiqué dans l'expertise est sur l'entièreté des désordres et de l'absence de reprise des travaux. Un grand nombre de ces désordres sont de nature seulement esthétique, certains désordres ont été réservés ' et ne relèvent pas de l'absence de souscription de garantie décennale, seule faute imputable à M. [J].
Dans ces conditions, et en l'absence de tous éléments versés par les parties de nature contradictoire, il y a lieu de confirmer l'indemnisation à hauteur de 3 000 euros retenue par le premier juge au titre du préjudice de jouissance.
7 . Sur la demande de condamnation solidaire de la société AGS CONSTRUCTION, et de Monsieur [J] au titre de l'inexécution du protocole d'accord daté du 9 juin 2014 portant achèvement des travaux et reprise des malfaçons :
L'appelant sollicite la condamnation de la SARL AGS CONSTRUCTION, représentée par son mandataire ad hoc en la personne de M. [J], à hauteur de 14 342 euros, sur le fondement de l'article 1231-1 du code civil.
Il sollicite en parallèle au titre du défaut d'assurance décennale et ainsi de la faute détachable de ses fonctions que M. [J] soit condamné solidairement avec la SARL AGS CONSTRUCTION à indemniser M. [V] à hauteur de 14 342 euros au titre de l'inexécution du protocole d'accord susvisé.
Réponse de la cour :
L'article 1231-1 du code civil dispose que :
« Le débiteur est condamné, s'il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts soit à raison de l'inexécution de l'obligation, soit à raison du retard dans l'exécution, s'il ne justifie pas que l'exécution a été empêchée par la force majeure ».
Concernant AGS Construction :
Il n'est pas contesté que la société AG.S CONSTRUCTION a fait l'objet d'une procédure de liquidation judiciaire et que cette procédure a été clôturée en raison de l'insuffisance d'actif.
L'article L 622-21 du code de commerce interdit toute action en justice tendant à la condamnation du débiteur au paiement d'une somme d'argent.
L'article L 641-3 du code de commerce énonce que le jugement qui ouvre la liquidation judiciaire a les mêmes effets que ceux prévus par l'article L 622-21.
L'article L 643-11 du code de commerce prévoit que la clôture de la procédure de liquidation judiciaire pour insuffisance d'actif ne fait pas en principe recouvrer aux créanciers l'exercice individuel de leurs actions contre le débiteur, sauf exceptions prévues par ce texte.
Un jugement de clôture pour insuffisance d'actif a été rendu le 5 juillet 2017 entraînant la radiation de ladite société au registre du commerce et des sociétés.
La demande de condamnation de la société AGS Construction ne peut donc aboutir.
Le jugement sur ce point sera confirmé.
Concernant M. [J] :
Ce dernier ne peut être condamné que dans le cadre d'une faute détachable de ses fonctions de gérant.
Il ne peut être tenu du défaut d'exécution du protocole d'accord daté du 9 juin 2014 portant achèvement des travaux et reprise des malfaçons qui relève d'une responsabilité de nature contractuelle de la société et non d'une faute détachable de ses fonctions de gérant.
Il peut en revanche, comme indiqué précédemment être tenu du défaut de garantie décennale si celle-ci a été préjudiciable. En l'espèce, il est reproché à M. [J] un défaut de reprise ce qui ne peut constituer une faute détachable.
De la même manière, les travaux définis dans le protocole signé le 9 juin 2014, et dont l'appelant demande l'indemnisation pour non-exécution ne peuvent constituer un préjudice pour défaut d'assurance décennale, puisque précisément l'appelant invoque leur non-exécution. Ils sont donc par hypothèse inexistants.
Le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté l'appelant de ces demandes.
8. Sur la demande de paiement de l'achat des matériaux nécessaires à la toiture :
Le premier juge a parfaitement motivé sa décision sur le fait que l'appelant est intervenu alors même que la société AGS Construction n'était pas constituée, qu'il s'agit d'une décision de M. [V] et non de la société AGS Construction, ou de M. [J]. En outre comme le souligne le premier juge, il n'est pas établi que le maitre d'ouvrage n'ait pas bénéficié de ces matériaux. M. [J] n'a pas commis de faute intentionnelle d'une particulière gravité incompatible avec l'exercice normal de ses fonctions de gérant.
La décision du premier juge sera donc confirmée.
9 . Sur les frais du procès :
Concernant la première instance, il y a lieu de confirmer la décision du premier juge.
En appel, succombant au moins en partie à l'instance, M. [V] sera condamné à en régler les entiers dépens, en application des dispositions de l'article 696 du code de procédure civile.
Aucune considération d'équité ne commande en revanche de faire droit aux autres demandes présentées au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour, par arrêt contradictoire, statuant en matière civile, rendu publiquement en dernier ressort,
- Confirme le jugement en ses dispositions soumises à la cour sauf en ce que le premier juge a :
Condamné Monsieur [U] [J] à payer à Monsieur [O] [V] les sommes suivantes :
- 3 630 euros hors taxe au titre des désordres de nature décennale non garantis par une assurance,
Statuant à nouveau de ces chefs :
- Condamne M. [U] [J] à payer à M. [O] [V] la somme suivante :
- 5 750 euros hors taxe au titre des désordres de nature décennale non garantis par une assurance,
Y ajoutant,
- Condamne M. [O] [V] aux dépens d'appel,
- Dit n'y avoir lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Arrêt signé par la présidente et par la greffière.
LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,