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Décisions

CA Nîmes, 1re ch., 12 septembre 2024, n° 23/01629

NÎMES

Arrêt

Infirmation

PARTIES

Demandeur :

Madauto (SAS)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Defarge

Conseillers :

Mme Duprat, Mme Gentilini

Avocats :

Me Mendez, Me Candillon

TJ Alès, du 3 avr. 2023, n° 23/00216

3 avril 2023

EXPOSÉ DU LITIGE

Selon certificats de cession en date des 8 février 2022 et 9 avril 2022, M. [F] [H] a acheté auprès de la société Madauto aux [Localité 3] un véhicule d'occasion Ford Fiesta immatriculé CZ 450 GP dont le certificat d'immatriculation ne lui a pas été remis.

Par acte du 7 février 2023, il a assigné cette société afin d'obtenir la résolution de la vente devant le tribunal judiciaire d'Alès qui par jugement du 8 avril 2023 :

- a prononcé la résolution de vente,

- a condamné la société Madauto,

- à aller récupérer le véhicule à son domicile,

- à lui restituer le prix d'achat du véhicule,

- à lui payer les sommes de :

- 493,79 euros ( 82 + 23,71 + 388,08) au titre des frais de réparation réalisés,

- 1 522,30 euros au titre des frais relatifs à l'assurance obligatoire souscrite,

- a débouté M. [H] de ses autres demandes

- a condamné la société Madauto aux dépens et à payer à celui-ci la somme de 800 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Le 11 mai 2023 la société Madauto a interjeté appel de ce jugement dans des conditions de forme et de délai non contestées.

Au terme de ses dernières conclusions régulièrement notifiées le 10 août 2023 la société Madauto, appelante, demande à la cour :

Vu les articles L. 217-3 et suivants du code de la consommation, le décret du 9 août 2017 et l'article 1240 du code civil

- de dire et juger son appel interjeté le 11 mai 2023 recevable et bien fondé,

- de réformer le jugement en ce qu'il :

- a prononcé la résolution de la vente du véhicule Ford Fiesta immatriculé CZ C450 GF,

- l'a condamnée

- à aller récupérer le véhicule au domicile de M. [H],

- à lui restituer le prix d'achat du véhicule,

- à lui payer 493,79 euros au titre des frais de réparation réalisés sur le véhicule et 1 522,30 euros au titre des frais relatifs à l'assurance obligatoire souscrite sur le véhicule depuis son acquisition,

- a débouté M. [H] de ses demandes plus amples ou contraires

- l'a condamnée aux dépens et à payer à celui-ci la somme de 800 € au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Par conséquent

- de débouter M. [H] de sa demande de résolution de la vente sur le fondement de la garantie légale de conformité et de ses demandes conséquentes, soit les demandes :

- en paiement de la somme correspondant au prix de vente,

- en restitution des prix de réparations effectuées sur le véhicule litigieux,

- en paiement de la somme de 180 euros au titre des frais d'établissement de la carte grise,

- en remboursement des cotisations pour l'assurance du véhicule,

- d'aller récupérer le véhicule à son domicile,

- de le débouter de sa demande de condamnation aux dépens et au paiement de la somme de 800 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Y ajoutant

- de condamner M. [H] à lui payer la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.

Elle prétend que l'intimé ne rapporte pas la preuve de l'absence de remise de la carte grise alors qu'il a pu assurer le véhicule et que le certificat d'immatriculation doit obligatoirement être transmis à l'assureur pour ce faire.

Elle sollicite dans les motifs de ses conclusions le paiement de la somme de 375 euros au titre d'une contravention mais cette demande n'est pas reprise au dispositif qui seul saisit la cour.

Au terme de ses conclusions régulièrement notifiées le 2 novembre 2023 M. [F] [H] demande à la cour :

- de déclarer mal fondé l'appel de la société Madauto,

En conséquence

- de confirmer la décision en ce qu'elle :

- prononce la résolution de la vente du véhicule de marque Ford de type Fiesta immatriculé CZ 450 GF en date du 8 février 2022 et du 9 avril 2022,

- condamne la société Madauto

- à aller récupérer le véhicule,

- à lui restituer le prix d'achat du véhicule,

- à lui payer les sommes de 493, 79 euros au titre des frais de réparation réalisés sur le véhicule et 1 522, 30 euros au titre des frais relatifs à l'assurance obligatoire souscrite sur le véhicule depuis son acquisition,

- à lui payer la somme de 800 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile

Y ajoutant

- de condamner la société Madauto :

- à récupérer le véhicule là où il se trouvera au moment de l'exécution de la décision, à ses frais et sous astreinte de 100 euros par jour à compter de la signification de l'arrêt,

- à lui restituer le prix de vente du véhicule à savoir la somme de 4 250 euros,

- à lui payer les sommes de 180 euros au titre des frais d'établissement de la carte grise et 1 000 euros à titre de résistance abusive,

- de rejeter les entières demandes de la société Madauto,

- de la condamner à lui payer la somme de 2 500 euros au titre des frais irrépétibles et aux entiers dépens.

Il soutient que le véhicule qui lui a été délivré n'est pas conforme dès lors qu'il n'est pas habilité à circuler en l'absence de carte grise et de certificat de conformité.

En application de l'article 954 du code de procédure civile il est expressément référé aux dernières écritures des parties pour plus ample exposé de leur prétentions et moyens.

SUR CE

* sur la demande de résolution de la vente pour défaut de conformité du véhicule vendu

Pour dire M. [H] bien fondé à solliciter la résolution de la vente du véhicule, le tribunal a jugé que la preuve du défaut de délivrance du certificat d'immatriculation de celui-ci était rapportée par la production d'un courrier recommandé et d'un courriel adressé au vendeur attestant des difficultés rencontrées à cet égard.

Aux termes de l'article L. 217-3 al 1 et 2 du code de la consommation en vigueur depuis le 01 octobre 2021 ici applicable, le vendeur délivre un bien conforme au contrat ainsi qu'aux critères énoncés à l'article L. 217-5. Il répond des défauts de conformité existant au moment de la délivrance du bien au sens de l'article L. 216-1, qui apparaissent dans un délai de deux ans à compter de celle-ci.

Selon l'article L. 217-4 3° du même code, le bien est conforme au contrat s'il est délivré avec tous les accessoires et les instructions d'installation, devant être fournis conformément au contrat.

Selon l'article L. 217-5 I. 1° du même code en plus des critères de conformité au contrat, le bien est conforme s'il est propre à l'usage habituellement attendu d'un bien de même type, compte tenu, s'il y a lieu, de toute disposition du droit de l'Union européenne et du droit national ainsi que de toutes les normes techniques ou, en l'absence de telles normes techniques, des codes de conduite spécifiques applicables au secteur concerné.

Enfin, selon l'article L. 217-7 al 1 et 2 du même code les défauts de conformité qui apparaissent dans un délai de vingt-quatre mois à compter de la délivrance du bien, y compris du bien comportant des éléments numériques, sont, sauf preuve contraire, présumés exister au moment de la délivrance, à moins que cette présomption ne soit incompatible avec la nature du bien ou du défaut invoqué. Pour les biens d'occasion, ce délai est fixé à douze mois.

Il incombe à l'acheteur de démontrer le défaut de conformité du véhicule objet de la vente dont il se prévaut pour solliciter la résolution de celle-ci.

Le défaut allégué par l'intimé consiste ici dans le fait que le certificat d'immatriculation du véhicule ne lui a pas été remis par le vendeur, ce qu'il lui incombe de démontrer.

Il produit à cet égard le certificat daté du 8 février 2022 de cession par la société Madauto d'un véhicule Ford Fiesta 6 immatriculé pour la première fois le 7 octobre 2013 et présentant 179 718 km au compteur, ainsi que le certificat d'immatriculation du 22 février 2018 de ce véhicule sous le n° [Immatriculation 6] au nom de Somec [Adresse 2], barré avec la mention 'vendu le 08/02/2022" et comportant le tampon de la Sas Madauto, ainsi qu'un procès-verbal de contrôle technique du 7 février 2022.

Il produit également une copie non signée d'un contrat d'assurance n°AQ1790003790 (971) souscrit le 28 février 2022 auprès de la compagnie L'Equité par l'intermédiaire de LSA Courtage comportant la mention 'le souscripteur déclare être le titulaire de la carte grise du véhicule' et les relevés du compte bancaire ouvert à son nom dans les livres du Crédit Lyonnais pour la période du 2 février 2022 au 1er février 2023 faisant apparaître un paiement de 259,50 euros par carte bancaire le 1er mars 2022 et onze prélèvements mensuels sur la période au bénéfice de LSA Courtage de 114,80 euros comme mentionné à ce contrat.

Il produit encore un second certificat de cession concernant le même véhicule, établi entre la société Madauto et lui, daté du 9 avril 2022 ainsi que plusieurs courriels identiques reçus les 30 mai, 31 juillet, 5 août, 30 septembre et 30 novembre 2022 de [email protected] avec pour objet 'Assurance de votre FOR FIESTA - documents manquants - Police AQ1790003790" ainsi libellés : 'le dossier d'assurance de votre For Fiesta en référence du AQ1790003790 est toujours incomplet. Nous vous remercions de nous envoyer aussi rapidement que possible les documents repris en pièce jointe par email, fax ou courrier.

L'envoi de ces documents est nécessaire. Si votre dossier n'est pas complet, la gestion d'un éventuel sinistre sera retardée (...) Enfin, tant que ces pièces ne seront pas reçues, l'assureur se réserve le droit d'opposer à tout moment la nullité du contrat pour fausse déclaration au sens des article L113-8 et L113-9 du code des assurances : ' Le certificat d'immatriculation définitif de votre véhicule (avenant n° 0)

' Le mandat de prélèvement SEPA ( avenant n°0)'.

Il produit enfin le courriel de réponse du 5 août 2022 de [W] [M] ([Courriel 7]) ainsi libellé : ' bien reçu votre mail Oui on a pas le droit de faire la carte grise c'est pour ça on travail(le) avec Cartabox agréé par l'Etat. Votre carte grise est en cours par contre la préfecture réclame un(e) papier l(e) certificat de conformité ou il fau(t) expertis(er) la voiture avec un expert donc on a déjà commençé depuis mars m(ais) ça recule ça recule nous voulons faire rapidement c'est la préfecture qui blo(que) donc on attend. Par contre si vous voulez votre carte grise rapidement il fau(t) qu'on pren(ne) rdv entre le 01 sept et le 10 sept soit à [Localité 10] ou [Localité 5] pour vérifier (une) dernière fois la voiture (et) on a le certificat de conformité pour débloquer la situation votre carte grise arrive chez vous le 15 sept au plus tard. Pass(é) ce délai on vous remboursera la somme réel(le) et vous ramene(z) la voiture au garage pour le remboursement des pièces j(e) (vous ai déjà) dit que l'assurance a déjà rembours(é). Nous sommes fermé(s) pour congé annuel jusqu'au début sept après je fai(s) votre virement.'

Ce courriel doit s'apprécier au vu de la facture délivrée le 20 avril 2022 à la Sas Madauto par L'Atelier Pompignane à [Localité 8] pour la fourniture et la pose d'un démarreur sur le véhicule objet de la vente, pour un montant de 388,08 euros TTC, à une date où M. [H] en était déjà devenu propriétaire, pouvant expliquer 'le remboursement des pièces' annoncé.

M. [H] rapporte la preuve par la production des courriels adressés par sa compagnie d'assurance, d'une part de l'existence de son contrat d'assurance, d'autre part de l'incomplétude de celui-ci faute pour lui d'avoir pu fournir la carte grise définitive à son nom.

Selon les dispositions de l'article 1 de l'arrêté du 9 février 2009 relatif aux modalités d'immatriculation des véhicules dans sa version en vigueur du 23 septembre 2021 au 01 septembre 2023 ici applicable :

Dossiers de demande d'immatriculation.

Les demandes d'immatriculation d'un véhicule neuf ou d'occasion sont adressées au ministre de l'intérieur soit par voie électronique, soit par l'intermédiaire d'un professionnel de l'automobile habilité par le ministre de l'intérieur.

Les pièces suivantes, détaillées en annexe 1 du présent arrêté, doivent pouvoir être mises à disposition pour l'instruction d'une demande d'immatriculation.(...)

1. D.-Véhicules précédemment immatriculés en France

1. D. 1. Justificatifs administratifs

La demande de certificat d'immatriculation.

Les justificatifs d'identité et d'adresse.

Le justificatif de vente.

Le justificatif d'assurance du véhicule.

Le justificatif de permis de conduire lorsque la demande concerne une personne physique.

Le certificat d'immatriculation remis par l'ancien titulaire comportant la mention cédé le..../..../.... (date de la cession), suivie de sa signature.(...).

1. D. 2. Visite ou contrôle technique

La preuve d'un contrôle technique.

1. D. 3. Justificatifs fiscaux

Aucun justificatif fiscal n'est à produire sauf pour les véhicules se trouvant dans l'une des situations mentionnées au point II de l'article 6 et aux points C, D, F et G de l'article 12.

1. E.-Véhicules précédemment immatriculés hors du territoire métropolitain (hors cas particuliers visés à l'article 12)

1. E. 1. Justificatifs administratifs

La demande de certificat d'immatriculation,

Les justificatifs d'identité et d'adresse,

Le justificatif de vente, et soit :

- un certificat d'immatriculation CE ;

- un certificat d'immatriculation national ;

- une pièce officielle de propriété ;

- un certificat international pour automobiles.

Le justificatif d'assurance du véhicule.

Le justificatif de permis de conduire lorsque la demande concerne une personne physique.

Le justificatif de vente n'est réclamé que s'il y a eu changement de titulaire du certificat d'immatriculation.

1. E. 2. Justificatifs techniques de conformité

a) Pour les véhicules conformes à un type communautaire :

Un certificat de conformité à un type CE ou UE ou une attestation d'identification à un type communautaire si le certificat d'immatriculation CE n'est pas fourni, ne correspond pas au véhicule importé, ne permet pas de l'identifier, ou ne comporte pas toutes les données obligatoires, au sens de la directive 1999/37/ CE du Conseil du 29 avril 1999 relative aux documents d'immatriculation des véhicules.

Lorsque le certificat de conformité à un type CE ou UE est conforme à la directive 74/150/ CE, il est complété par les indications complémentaires au certificat de conformité 74/150/ CE.

Si le certificat de conformité à un type CE ou UE ou l'attestation d'identification à un type communautaire ne permettent pas d'immatriculer le véhicule, un procès-verbal de RTI est fourni.

Le certificat de conformité à un type CE ou UE pourra être le duplicata du certificat délivré par le constructeur ou son représentant dans l'Etat de première immatriculation ou d'immatriculation précédente, ou la copie du certificat certifiée conforme par les autorités de l'Etat de première immatriculation ou d'immatriculation précédente.

b) (...). c) (...). d) (...).

Le véhicule vendu étant précédemment immatriculé en France, aucun certificat de conformité n'était censé être nécessaire pour procéder à son changement d'immatriculation au nom du nouvel acquéreur qui pouvait faire la demande lui-même, ayant été mis en possession par le vendeur de toutes les pièces prévues au 1.D. de l'article précité.

M. [H] ne démontre pas avoir effectué ces démarches et s'être éventuellement heurté à des difficultés ayant pu le conduire à réclamer au vendeur un certificat de conformité, étant remarqué une différence entre les véhicules objet des deux certificats de cession des 8 février (Fiesta 6) et 9 avril 2022 (Fiesta).

Dès lors, il ne rapporte pas la preuve de la non-conformité du véhicule délivré aux stipulations de l'un ou l'autre de ces contrats de cession.

Et quoi qu'il en soit, la délivrance du certificat d'immatriculation à son nom ne figure ni au contrat de cession du 8 février 2022, ni à celui du 9 avril 2022, et ce certificat ne pouvait être considéré comme un accessoire du bien devant être fourni conformément au contrat comme stipulé à l'article L. 217-4 3° du code de la consommation précité.

Le jugement sera en conséquence infirmé et M. [F] [H] débouté de toutes ses demandes.

* autres demandes

M. [H] qui succombe devra supporter les dépens de l'entière instance.

L'équité ne commande pas ici de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour

Infirme le jugement n° 2043/48 du 3 avril 2023 du tribunal judiciaire d'Alès ( RG 23/0216 )

Statuant à nouveau

Déboute M. [F] [H] de toutes ses demandes

Constate que la société Madauto n'a pas repris au dispositif de ses conclusions sa demande au titre du remboursement du montant d'une contravention et que la cour n'est donc pas saisie de cette demande.

Y ajoutant

Condamne M. [F] [H] aux dépens de l'entière instance.

Dit n'y avoir lieu ici de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Arrêt signé par la présidente et par la greffière.