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Décisions

CA Paris, Pôle 5 ch. 2, 13 septembre 2024, n° 23/03501

PARIS

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Pêche Chasse Évasion (SARL)

Défendeur :

Société Nouvelle Europ'Arm (SAS), Simac (SAS)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Renard

Vice-président :

Mme Douillet

Conseiller :

Mme Marcade

Avocats :

Me Boidin, Me De Pontfarcy, Me Appfel, Me Mistral-Bernard

T. com. Paris, 15e ch., du 19 sept. 2022…

19 septembre 2022

ARRET :

Contradictoire

Par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile

Signé par Mme Véronique RENARD, Présidente de chambre, Présidente, et par Mme Carole TREJAUT, Greffière, présente lors de la mise à disposition.

Vu le jugement rendu le 19 septembre 2022 par le tribunal de commerce de Paris.

Vu l'appel principal interjeté le 14 février 2023 par la société Pêche Chasse Evasion.

Vu les dernières conclusions remises au greffe et notifiées par voie électronique le 23 octobre 2023 par la société Pêche Chasse Evasion, appelante à titre principal et intimée à titre incident.

Vu les dernières conclusions remises au greffe et notifiées par voie électronique le 2 mars 2024 par les sociétés Nouvelle Europ'Arm et Simac, intimées à titre principal et appelantes à titre incident.

Vu l'ordonnance de clôture rendue le 7 mars 2024.

SUR CE, LA COUR

Il est expressément renvoyé, pour un exposé complet des faits de la cause et de la procédure à la décision entreprise et aux écritures précédemment visées des parties.

La société Nouvelle Europ'arm (SNEA) distribue en France depuis 1973 auprès de détaillants armuriers des produits de chasse et de loisirs sportifs liés aux armes. Elle diffuse ses articles auprès des clients finaux via des revendeurs détaillants.

Elle entretient depuis 2014 des relations commerciales avec la société Pêche Chasse Evasion (PCE). Celle-ci publie sur son site internet www.chassezdiscount.com les offres promotionnelles des produits de ses fournisseurs qu'elle commercialise.

Le 25 mars 2019, le non-règlement de factures a conduit la société SNEA à mettre fin à ses relations commerciales avec la société PCE. Depuis cette date, la société PCE n'a passé aucune commande mais la société SNEA lui reproche de continuer à utiliser les photos et références de ses produits.

La société Simac distribue elle-aussi auprès de détaillants armuriers des produits de chasse et de loisirs sportifs liés aux armes, via son site internet, dans des conditions comparables à celles de la société SNEA.

La société PCE a rompu en juillet 2018 les relations commerciales nouées avec la société Simac en 2014, en refusant de régler des factures. La société Simac lui reproche également de continuer à utiliser les photos et références de ses produits.

La société Fabarm France commercialise en France des armes et des articles de chasse sous sa dénomination par l'intermédiaire de la société Simac. Elle reproche à la société PCE d'utiliser sans autorisation les photos et noms de ses produits.

Le 20 janvier 2022, les sociétés SNEA, Simac et Fabarm France ont vainement mis la société PCE en demeure de cesser d'utiliser leurs outils promotionnels et les dénominations de leurs produits.

Elles ont fait établir un procès-verbal de constat par huissier de justice le 24 janvier 2022.

Elles ont fait assigner à bref délai par acte du 13 avril 2022 la société PCE devant le tribunal de commerce de Paris en-cessation de pratiques illicites et réparation des préjudices qu'elles estiment avoir subis.

C'est dans ce contexte qu'a été rendu le jugement dont appel, qui a :

- dit les demandes de la société Simac et la société Fabarm France recevables,

- ordonné à la société Pêche Chasse Evasion de supprimer toutes les références quelles qu'elles soient, les mentions, sigles, photos et logos relatifs aux produits épuisés des demanderesses dans les huit jours de la signification du présent jugement, sous astreinte de cent (100) euros par infraction constatée, et ce pendant un délai de 30 jours, à l'issue duquel il pourra de nouveau être fait droit,

- s'est réservé la liquidation de l'astreinte,

- dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile,

- débouté les parties de leurs demandes autres, plus amples ou contraires,

- rappelé que l'exécution provisoire est de droit,

- condamné la société Pêche Chasse Evasion aux dépens, dont ceux à recouvrer par le greffe, liquidés à la somme de 111,01 euros dont 18,29 euros de TVA et les frais des PV de constat, de délivrance et de dénonciation de la présente assignation et de signification de la décision à venir dont distraction au profit de Me Mistral-Bernard, aux termes de l'article 699 du Code de procédure civile.

La société PCE a interjeté appel de ce jugement.

Par ses dernières conclusions, elle demande à la cour de :

- infirmer le jugement du tribunal de commerce de Paris du 19 octobre 2022, en ce qu'il a :

- ordonné à la société Pêche Chasse Evasion de supprimer toutes les références quelles qu'elles soient, les mentions, sigles, photos et logos relatifs aux produits épuisés des demanderesses dans les huit jours de la signification du présent jugement, sous astreinte de cent euros par infraction constatée et ce pendant un délai de 30 jours à l'issue duquel il pourra de nouveau être fait droit,

- dit n'y avoir lieu à l'application de l'article 700 du code de procédure civile,

- débouté la société Pêche Chasse Evasion de ses demandes,

- condamné la société Pêche Chasse Evasion aux dépens, dont ceux à recouvrer par le greffe, liquidés à la somme de 111,01 euros dont 18,29 euros de TVA et les frais de PV de constat, de délivrance et de dénonciation de la présente assignation et de signification de la décision à venir,

- confirmer le jugement du tribunal de commerce de Paris du 19 septembre 2022, en ce qu'il a :

- jugé qu'il n'y a pas de confusion ou de parasitisme,

- jugé que le préjudice allégué par Nouvelle Europ'Arm, Fabarm et Simac n'est pas justifié,

- condamner la société Nouvelle Europ'Arm au paiement de la somme de 10 000 euros sur le fondement de l'article 32-1 du code de procédure civile,

- condamner la société Simac au paiement de la somme de 10 000 euros sur le fondement de l'article 32-1 du code de procédure civile,

- condamner la société Nouvelle Europ'Arm au paiement de la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la société Simac au paiement de la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner les sociétés Nouvelle Europ'Arm et Simac aux entiers dépens

Par leurs dernières conclusions, les sociétés Nouvelle Europ'Arm et Simac demandent à la cour de :

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a :

« Ordonner de supprimer toutes les références quelles qu'elles soient, les mentions, sigles, photos et logos relatifs aux produits épuisés des demanderesses dans les huit jours de la signification du présent jugement, sous astreinte de cent (100) euros par infraction constatée, et ce pendant un délai de 30 jours, à I 'issue duquel il pourra de nouveau être fait droit ; »

- réformer le jugement entrepris pour le surplus et :

- prononcer l'irrecevabilité des conclusions en réponse sur incident de l'appelante signifiées le 23 octobre 2023, en réponse à celles des intimées signifiées le 21 juillet 2023 soit au-delà du délai de 3 mois de l'article 910 du code de procédure civile,

- juger que l'utilisation des noms et photographies des produits de la société Nouvelle Europ'Arm, de la société Simac et de la société Fabarm, sans leur autorisation constituent des actes de concurrence déloyale et parasitaire engageant la responsabilité de la société Pêche Chasse Evasion, et en conséquence,

- condamner la société Pêche Chasse Evasion sous astreinte de 500 euros par infraction constatée à cesser toute utilisation des noms et photographies sans autorisation de la société Nouvelle Europ'Arm, de la société Simac et de la société Fabarm, sous quelque forme et support que ce soit, à compter de la décision à intervenir,

- juger que l'utilisation du sigle « C.D » et/ou de la mention « chassez discount.com » sur les noms et photographies des produits de la société Nouvelle Europ'Arm et de la société Simac constituent des actes de concurrence déloyale et parasitaire engageant la responsabilité de la société Pêche Chasse Evasion, et en conséquence,

- condamner la société Pêche Chasse Evasion sous astreinte de 500 euros par infraction constatée à cesser toute utilisation du sigle « C.D » et/ou de la mention «chassez discount.com» sur les noms et photographies des produits de la société Nouvelle Europ'Arm et de la société Simac sous quelque forme et support que ce soit, à compter de la décision à intervenir,

- juger que toute utilisation du logo E.A de la société Nouvelle Europ'Arm, sans son autorisation, constituent des actes de concurrence déloyale et parasitaire engage la responsabilité de la société Pêche Chasse Evasion, et en conséquence,

- condamner la société Pêche Chasse Evasion sous astreinte de 500 euros par infraction constatée à cesser toute utilisation du logo E.A de la société Nouvelle Europ'Arm sans son autorisation, sous quelque forme et support que ce soit, à compter de la décision à intervenir,

- juger que l'usage de la mention « rupture de stock » et/ou « produit indisponible » avec les noms et photographies des produits de la société Nouvelle Europ'Arm, de la société Simac et Fabarm sous quelque forme et support que ce soit, constituent des actes de concurrence déloyale et parasitaire engageant la responsabilité de la société Pêche Chasse Evasion, et en conséquence,

- condamner la société Pêche Chasse Evasion sous astreinte de 500 euros par infraction constatée à cesser tout usage de la mention « rupture de stock » et/ou « produit indisponible » avec les noms et photographies des produits de la société Nouvelle Europ'Arm, de la société Simac et Fabarm sous quelque forme et support que ce soit, à compter de la décision à intervenir,

- juger que l'usage des termes « promo », « économiser » et des prix barrés avec les noms et photographies des produits de la société Nouvelle Europ'Arm, de la société Simac et Fabarm constituent des actes de concurrence déloyale et parasitaire engageant la responsabilité de la société Pêche Chasse Evasion, et en conséquence,

- condamner la société Pêche Chasse Evasion sous astreinte de 500 euros par infraction constatée à cesser tout usage des termes « promo », « économiser » et des prix barrés avec les noms et photographies des produits de la société Nouvelle Europ'Arm, de la société Simac et Fabarm sous quelque forme et support que ce soit, à compter de la décision à intervenir,

- se réservez la liquidation des astreintes,

- condamner la société Pêche Chasse Evasion à payer à titre de dommages et intérêt dus en réparation de leur préjudice matériel de perte de chance de marge subie à :

- à la société Nouvelle Europ'Arm une indemnité de 170 810,06 euros, et de 26 294,92 euros à la société Fabarm aux droits de laquelle elle vient,

- à la société Simac une indemnité de 28 768,55 euros,

- condamner la société Pêche Chasse Evasion à payer en réparation de leur préjudice matériel de la dévalorisation de leurs actifs matériels et immatériels :

- à la société Nouvelle Europ'Arm une indemnité de 29,211 euros,

- et de 5,546 euros à la société Fabarm aux droits de laquelle elle vient, à la société Simac une indemnité de 34 382 euros,

- condamner la société Pêche Chasse Evasion à payer en réparation de leur préjudice moral subi :

- à la société Nouvelle Europ'Arm une indemnité de 13 394 euros, et celle de 2 218 euros à la société Fabarm, aux droits de laquelle vient,

- à la société Simac une indemnité de 13 753 euros,

- ordonner la publication du dispositif de l'arrêt à intervenir sur la page d'accueil du site chassezdiscount.com, en format plein écran, pendant 3 mois à compter du délibéré sous astreinte de 1000 euros par jour de retard,

- condamner la société Pêche Chasse Evasion à payer au titre de l'article 700 du CPC tant au titre de la première instance qu'en cause d'appel :

- à société Nouvelle Europ'Arm la somme de 25 000 euros, et la somme de 10 000 euros à la sté Fabarm aux droits de laquelle elle vient,

- à la société Simac, la somme de 15 000 euros,

- condamner la société Pêche Chasse Evasion en tous les dépens, comprenant notamment les frais de PV de constat, de délivrance et de la signification de la décision à venir et de son exécution dont distraction au profit de Me Mistral-Bernard.

A la suite d'une fusion absorption par la société Nouvelle Europ'Arm, la société Fabarm, a fait l'objet d'une radiation du registre du commerce et des sociétés le 10 janvier 2023. Il sera constaté que la société Nouvelle Europ'Arm (SNEA) vient aux droits de la société Fabarm.

Sur la recevabilité des conclusions de la société PCE en réponse à l'appel incident des sociétés SNEA et Simac

Les sociétés SNEA et Simac sollicitent de la cour de déclarer irrecevables les conclusions de la société PCE en réponse sur leur appel incident au motif que ces conclusions ont été notifiées au-delà du délai de trois mois prévu à l'article 910 du code de procédure civile.

Les conclusions des intimées formant appel incident ont été notifiées par RPVA le 21 juillet 2023. Les conclusions en réponse à appel incident de la société PCE ont été notifiées par RPVA le lundi 23 octobre 2023

Si en application de l'article 914 du code de procédure civile, les parties ne sont plus recevables à invoquer devant la cour l'irrecevabilité des conclusions au fondement notamment de l'article 910 du même code, le conseiller de la mise en état étant seul compétent pour en connaître, la cour peut néanmoins relever d'office cette fin de non-recevoir.

Toutefois, le 21 octobre 2023 étant un samedi, et le 22 octobre 2023 un dimanche, les conclusions de la société PCE en réponse à l'appel incident sont recevables en application des articles 910 et 642 du code de procédure civile.

Sur les actes de concurrence déloyale

Les sociétés SNEA et Simac reprochent à la société PCE au fondement des articles 1240 du code civil et L. 121-1 du code de la consommation de continuer, sauf pour les produits encore en stock qui sont en nombre limité, à largement utiliser, sans leur accord, leurs outils promotionnels (noms, photos et références des produits) sur son site internet de vente en ligne chassezdiscount.com alors que les relations commerciales entre les parties sont rompues depuis juillet 2018 s'agissant des relations nouées avec la société Simac, et le 25 mars 2019 pour celles existant avec la société SNEA, ce dans l'intention de créer une confusion avec leurs revendeurs, d'évoquer un effet de gamme de produits et de capter les consommateurs pour les attirer vers ses propres produits ou ceux de sociétés concurrentes qu'elle revend. Elles indiquent également que la société PCE a apposé sur certaines photographies promotionnelles ses propres mentions « chasser discount.com » ou son monogramme CD laissant croire qu'elle est propriétaire des photographies de son ex fournisseur. Elles ajoutent que les offres de vente de la société PCE sont fictives et constituent des actes de dénigrement et de détournement de commandes. Elles invoquent également l'usage sans autorisation de la société SNEA du logo EA et l'usage de la mention « rupture de stock » et/ou « produit indisponible » avec les noms et photographies des produits de la société SNEA.

La société PCE critique le jugement entrepris qui lui a ordonné sous astreinte de supprimer toutes les références, mentions, sigles, photos et logos relatifs aux produits épuisés des sociétés SNEA et Simac, considérant que le tribunal avait décidé qu'il n'existait pas d'acte fautif de sa part. Elle explique que l'arrêt des relations commerciales qui n'étaient formalisées par aucun contrat ne peut la priver de la possibilité d'écouler les stocks dont elle dispose et qu'aucune pratique trompeuse ne peut lui être reprochée. Elle considère par ailleurs qu'en l'absence de contrat écrit, elle ne peut être sanctionnée pour sa pratique de remises promotionnelles sur les produits qu'elle distribue, ni pour l'utilisation des logos, marques et références de ces produits alors qu'elle informe clairement les consommateurs de la disponibilité de ceux-ci et que le nom du fabricant apparaît clairement.

Les sociétés SNEA et Simac critiquent la décision entreprise en ce qu'elle a retenu le principe d'un stock non chiffré de la société PCE (alors que ce stock est chiffré à 0,56% par un procès-verbal de constat) et considéré que la société PCE avait pu utiliser par le passé leurs outils promotionnels mais que cet usage lui serait interdit pour le futur. Elles considèrent que la détention d'un stock très résiduel ne légitime pas l'utilisation des photographies et références de 1 240 produits hors stock depuis 4 ou 5 ans. Elles relèvent que le jugement entrepris a interdit sous astreinte à la société PCE d'utiliser pour le futur leurs outils promotionnels pour les «produits épuisés», et a donc reconnu qu'elle n'en avait pas le droit durant les 4/5 années écoulées dans le passé, sans qualifier juridiquement les actes litigieux, ni en tirer les conséquences dommageables de leur utilisation déloyale et/ou parasitaire.

Le principe de la liberté du commerce implique qu'un produit qui n'est pas l'objet de droits privatifs peut être librement reproduit et commercialisé à moins de la caractérisation d'un comportement déloyal constitutif d'une faute au sens de l'article 1240 du code civil.

Le parasitisme consiste, pour un opérateur économique, à se placer dans le sillage d'un autre afin de tirer indûment profit de ses efforts, de son savoir-faire, de la notoriété acquise ou des investissements consentis.

La demande en concurrence déloyale et parasitaire présente un fondement délictuel et il incombe en conséquence aux sociétés SNEA et Simac de rapporter la preuve d'un agissement fautif de la société PCE commis à leur préjudice par la création d'un risque de confusion et/ou la captation des investissements consentis pour développer une valeur économique individualisée.

L'article L. 121-1 du code de la consommation prévoit que : « Les pratiques commerciales déloyales sont interdites. Une pratique commerciale est déloyale lorsqu'elle est contraire aux exigences de la diligence professionnelle et qu'elle altère ou est susceptible d'altérer de manière substantielle le comportement économique du consommateur normalement informé et raisonnablement attentif et avisé, à l'égard d'un bien ou d'un service. Le caractère déloyal d'une pratique commerciale visant une catégorie particulière de consommateurs ou un groupe de consommateurs vulnérables en raison d'une infirmité mentale ou physique, de leur âge ou de leur crédulité s'apprécie au regard de la capacité moyenne de discernement de la catégorie ou du groupe. Constituent, en particulier, des pratiques commerciales déloyales les pratiques commerciales trompeuses définies aux articles L. 121-2 à L. 121-4 et les pratiques commerciales agressives définies aux articles L. 121-6 et L. 121-7. »

Selon les éléments fournis au débat et les explications des parties, les sociétés SNEA et Simac sont des grossistes et la société PCE a été l'un de leurs revendeurs. Les relations entre les parties se sont détériorées au cours des années 2018 et 2019 pour aboutir à un rupture de leur relation d'affaires et entraîner plusieurs contentieux entre les intéressées notamment relatifs au règlement de factures et de contrefaçon de marques.

Le procès-verbal de constat dressé par huissier de justice le 24 janvier 2022 sur le site chassezdiscount.com exploité par la société PCE (pièce 11 intimées) montre que plusieurs produits présentés sous les dénominations telles Yildiz, UTG, Chiappa, Mossberg, Pedersoli, Beeman, Sig sauer, Nuprol, Lensolux, RTI, Daisy, Country sellerie, Barnett, Europ Arm, Guardian Angel, Guerini, Fair, Webley-Scott, Gamo, Nikko Stirling, Mak, Fabarm, qui sont présentés comme les produits fournis par les sociétés SNEA et Simac à la société PCE sont en rupture de stock sur le site. Quinze produits comportant le logo EA Europ Arm sont présentés avec un logo Chassez Discount accolé dont 5 sont en rupture de stock.

Les sociétés SNEA et Simac reprochent tout d'abord à la société PCE de continuer à utiliser les photographies, noms et références des produits alors que leurs relations d'affaires sont rompues depuis plusieurs années et que le stock de produits en cause de la société PCE est très réduit ce dont témoigne la mention « rupture de stock » pour plus de 99 % des produits présentés.

Toutefois, il n'est pas discuté que la société PCE a été le distributeur des sociétés SNEA et Simac qui sont des grossistes et qu'elle est légitime à écouler le stock de ses anciens fournisseurs. La société PCE indique également sans être démentie qu'elle se procure des produits auprès d'autres fournisseurs, les sociétés intimées n'alléguant ni ne prouvant être les seuls fournisseurs de ceux-ci. En outre, la seule reproduction de photographies, noms de produits et références au titre de laquelle les intimées n'allèguent aucun manquement contractuel ou sur lesquels elles ne revendiquent aucun droit privatif, n'est pas en soi déloyale, la société PCE étant libre de présenter ces produits sur son site internet en précisant qu'elle ne les a plus en stock, aucune tromperie du consommateur ni risque de confusion n'étant à ce titre caractérisés. Le détournement des consommateurs des autres revendeurs des sociétés SNEA et Simac n'est pas prouvé, le fait que deux produits présentés sur le site de la société PCE soient présentés comme disponibles alors qu'ils ne le sont pas ainsi que l'a constaté l'huissier de justice dans le procès-verbal susvisé, ne suffit pas à caractériser des man'uvres déloyales destinées à détourner la clientèle, aucun élément ne venant démontrer que la société PCE de par ses agissements dirige les consommateurs vers ses propres produits, l'usage de la mention « contactez-nous » étant à cet égard insuffisante.

Les sociétés SNEA et Simac invoquent ensuite l'utilisation du signe « CD » et/ou la mention « chasezdiscount.com » sur les noms et photographies de leurs produits.

Pour autant, la reproduction du logo de la société SNEA accolé à l'expression « ChassezDiscount.com » utilisée par la société PCE n'est pas fautive alors qu'il n'est pas discuté que le produit concerné a bien été fourni par la société SNEA à l'appelante pour qu'elle le distribue. Aucune tromperie ni aucun acte déloyal n'est donc démontré ce quand bien même les relations entre les parties sont désormais terminées et que certains produits ne sont plus disponibles ce qui est clairement indiqué au consommateur.

Il en va de même de la présence des lettres CD sur un produit présenté en page 17 du procès-verbal, ces lettres inscrites en très petits caractères n'ont pas pour le consommateur de signification particulière et ne lui laisse pas croire, comme le soutiennent à tort les intimées, que la photographie est la propriété de la société PCE ni qu'il s'agit d'un produit qu'elle fabrique.

Les sociétés SNEA et Simac échouent en outre à démontrer que la société PCE ne dispose plus de produits qu'elle lui a fourni et pour lesquels elle utilise les visuels et dénominations en cause. Les intimées n'invoquent pas utilement un détournement de photographies qui traduirait un « esprit de représailles » en suite de la rupture des relations commerciales entre les parties. Elles n'établissent pas plus la désorganisation de la distribution alléguée et le risque de confusion entre leurs produits comme les « fausses promotions » alléguées mais non établies.

Les sociétés SNEA et Simac invoquent également des actes de dénigrement sans toutefois les caractériser, un usage répété de la mention « rupture de stock » n'étant pas de nature à jeter le discrédit sur les société intimées.

L'usage répété de la mention susvisée n'établit pas plus les pratiques de prix et marques d'appel dénoncées par les sociétés SNEA et Simac comme de la mention « contactez-nous » dans le cas où certains produits sont indisponibles.

Aucun acte de concurrence déloyale n'est ainsi établi.

S'agissant des actes de parasitisme, les sociétés SNEA et Simac invoquent le détournement d'un important travail iconographique par la société PCE ainsi que des offres de vente fictives de celle-ci qui constituent des actes de dénigrement et de détournement de commande.

Pour autant, elle s'abstient de démontrer un quelconque investissement en la matière, le tableau sommaire comprenant les dépenses publicitaires des intimées entre 2016 et 2019 objet de la pièce 19, certes certifié conforme par un expert-comptable, ne permettant pas à la cour de déterminer l'objet de ces investissements publicitaires, ni n'identifie la valeur économique individualisée dont la société PCE aurait profité sans bourse déliée. A cet égard, la notoriété alléguée du logo « Europ Arm » ou de l'enseigne « Barrisol » sans être corroborée par une quelconque pièce, n'est pas établie.

Aussi, les sociétés SNEA et Simac échouent à démontrer les actes de parasitisme reprochés à la société PCE.

Enfin, les sociétés SNEA et Simac allèguent sans le démontrer des offres de vente fictives de la part de l'appelante ou encore une présentation fallacieuse de ses offres commerciales.

En effet, il n'est pas établi que le maintien sur le site de la société PCE de nombreux produits qui ne sont plus en stock est susceptible d'altérer de manière substantielle le comportement du consommateur normalement informé et raisonnablement attentif et notamment que celui-ci se tournera alors vers d'autres produits commercialisés par la société PCE.

De même, les sociétés SNEA et Simac qui ne procèdent que par affirmations, ne prouvent pas que la société PCE a fait usage d'indications ou de présentations fausses ou de nature à induire en erreur et portant sur le prix ou le mode de calcul du prix, le caractère promotionnel du prix et les conditions de vente, de paiement et de livraison du bien ou du service.

Aucune pratique commerciale trompeuse de la société PCE n'est ainsi établie.

C'est en conséquence à raison que le tribunal a débouté les sociétés SNEA et Simac de leurs demandes au titre des pratiques commerciales trompeuses ainsi que de la concurrence déloyale et parasitaire.

En revanche, aucune faute de la part de la société PCE n'étant caractérisée faute de preuves, la mesure de suppression ordonnée par le tribunal est sans fondement et doit être infirmée.

Sur la demande de la société PCE au titre de l'article 32-1 du code de procédure civile.

La société PCE demande que chacune des intimées soit condamnée au paiement de la somme de 10 000 euros au titre de l'article 32-1 du code de procédure civile.

Toutefois, il n'est nullement établi que les intimées ont agi en justice de manière dilatoire ou abusive.

Aucune faute n'étant caractérisée, ces demandes doivent être rejetées et le jugement confirmé de ce chef.

Sur les autres demandes

L'issue du litige commande de confirmer le jugement en ses dispositions relatives aux dépens et au remboursement de frais irrépétibles.

Parties perdantes, les sociétés SNEA et Simac seront condamnées aux dépens d'appel.

Enfin la société PCE a dû engager des frais non compris dans les dépens qu'il serait inéquitable de laisser en totalité à sa charge. Il y a lieu en conséquence de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile dans la mesure qui sera précisée au dispositif du présent arrêt.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Constate que la société Nouvelle Europ'Arm vient aux droits de la société Fabarm,

Dit recevables les conclusions de la société Pêche Chasse Evasion notifiées le 23 octobre 2023 en réponse à l'appel incident des sociétés Nouvelle Europ'Arm et Simac,

Confirme le jugement entrepris sauf en sa disposition ayant ordonné à la société Pêche Chasse Evasion de supprimer toutes les références quelles qu'elles soient, les mentions, sigles, photos et logos relatifs aux produits épuisés des demanderesses dans les huit jours de la signification du présent jugement, sous astreinte de cent euros par infraction constatée et ce pendant un délai de 30 jours à l'issue duquel il pourra de nouveau être fait droit,

Statuant à nouveau sur le chef infirmé,

Rejette l'ensemble des demandes des sociétés Nouvelle Europ'Arm et Simac,

Condamne les sociétés Nouvelle Europ'Arm et Simac à payer, chacune, à la société Pêche Chasse Evasion la somme de 5 000 euros au titre des frais irrépétibles d'appel,

Condamne les sociétés Nouvelle Europ'Arm et Simac aux dépens d'appel.