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Décisions

CA Paris, Pôle 5 - ch. 8, 17 septembre 2024, n° 24/07961

PARIS

Arrêt

Autre

CA Paris n° 24/07961

17 septembre 2024

Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 8

ARRÊT DU 17 SEPTEMBRE 2024

(n° / 2024, 7 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 24/07961 - N° Portalis 35L7-V-B7I-CJK2J

Décision déférée à la Cour : Jugement du 23 avril 2024 -Tribunal de commerce de PARIS - RG n° 2024005730

APPELANTE

S.A.S. A.R.O., prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés audit siège en cette qualité,

Immatriculée au registre du commerce et des sociétés de PARIS sous le numéro 512 213 273,

Dont le siège social est situé [Adresse 3]

[Localité 4]

Représentée Me Luca DE MARIA de la SELARL PELLERIN - DE MARIA - GUERRE, avocat au barreau de PARIS, toque : L0018,

Assistée de Me Julien ANDREZ de la SCP AyacheSalama, avocat au barreau de PARIS, toque : P334,

INTIMÉS

S.E.L.A.F.A. MJA, prise en la personne de Maître [X] [O], comparante à l'audience, en qualité de mandataire judiciaire de la société ARO,

Immatriculée au registre du commerce et des sociétés de PARIS sous le numéro 440 672 509,

Dont le siège social est situé [Adresse 1]

[Localité 5]

S.E.L.A.R.L. FHBX, prise en la personne de Maître [T] [J], en qualité d'administrateur judiciaire de la société ARO,

Immatriculée au registre du commerce et des sociétés de NANTERRE sous le numéro 491 975 041,

Dont le siège social est situé [Adresse 2]

[Localité 6]

Représentées et assistées de Me François DUPUY de la SCP HADENGUE et Associés, avocat au barreau de PARIS, toque : B0873,

LE PROCUREUR GÉNÉRAL PRÈS LA COUR D'APPEL DE PARIS

4 boulevard du Palais

75001 PARIS

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 18 juin 2024, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Marie-Christine HÉBERT-PAGEOT, présidente de chambre, et Mme Constance LACHEZE, conseillère.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Mme Marie-Christine HÉBERT-PAGEOT, présidente de chambre

Mme Sophie MOLLAT, présidente de chambre,

Mme Constance LACHEZE, conseillère.

Un rapport a été présenté à l'audience par Marie-Christine HÉBERT-PAGEOT dans le respect des conditions prévues à l'article 804 du code de procédure civile.

Greffier, lors des débats : Mme Liselotte FENOUIL

MINISTÈRE PUBLIC : L'affaire a été communiquée au ministère public, représenté lors des débats par Monsieur François VAISSETTE, avocat général, qui a fait connaître ses observations orales confirmant son avis écrit du 6 juin 2024.

ARRÊT :

- Contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Marie-Christine HÉBERT-PAGEOT, présidente de chambre et par Liselotte FENOUIL, greffière, présente lors de la mise à disposition.

***

FAITS ET PROCÉDURE:

La SAS Aro, constituée en 2009, exerce, outre une activité de holding, celle de conseil en management, gestion et organisation.

Le groupe 3S Informatique, travaillant dans le domaine des services informatiques, est composé de six sociétés, dont les sociétés 3S informatique et 3S Consulting, toutes directement ou indirectement rattachées à la société CMS Group, filiale de la société Aro.

Le tribunal de commerce de Paris a:

- le 7 mai 2014, ouvert des procédures de sauvegarde à l'égard des sociétés 3S Consulting et 3S Informatique.

- le 20 octobre 2014, arrêté les plans de sauvegarde sur 10 ans des sociétés 3S Informatique et 3S Consulting, et désigné le SELARL FHBX, en la personne de Maître [J] en qualité de commissaire à l'exécution du plan,

- le 16 février 2015, autorisé la fusion absorption des titres de la société 3S Consulting par la société 3S Informatique, ainsi que la fusion absorption des titres de la sociétés 3S Informatique par sa holding CMS Group. Cette dernière a ainsi absorbé une société soumise à un plan de sauvegarde en cours d'exécution, qui avait elle-même absorbé une société dans la même configuration.

En mars 2018, le dirigeant de la société CMS Group a informé le commissaire à l'exécution du plan d'un projet de cession de son fonds de commerce. A la suite de cette cession, la SAS Aro a absorbé la société CMS Group dans le cadre d'une transmission universelle du patrimoine, le 13 décembre 2018.

A compter de cette transmission universelle de patrimoine, la société Aro a procédé au paiement des dividendes dus en exécution des plans de sauvegarde des sociétés 3S Informatique et 3S Consulting. Le dernier règlement au titre des plans est intervenu en octobre 2022.

Dans le cadre d'un litige relatif au paiement de factures de la société XdP Conseil, relatives à des prestations en matière de crédit d'impôt, que la société CMS Group avait refusé de régler, la cour d'appel d'Angers, par arrêt du 16 décembre 2022, a condamné la société Aro à verser à la société XdP Conseil la somme de 287.000 euros outre intérêts.

La société Aro a alors sollicité, le 25 janvier 2023, l'ouverture d'une sauvegarde. Par jugement du 14 février 2023, le tribunal de commerce de Paris a ouvert une procédure de sauvegarde au bénéfice de la société Aro et désigné la société FHBX en la personne de Maître [J] en qualité d'administrateur judiciaire avec une mission de surveillance et la SELAFA MJA prise en la personne de Maître [O] en qualité de mandataire judiciaire.

Le 6 mars 2023, le commissaire à l'exécution des plans de sauvegarde des sociétés 3S Consulting et 3S Informatique, a saisi le tribunal de commerce de Paris de requêtes en résolution des deux plans arrêtés en 2014.

Dans le cadre de la procédure de sauvegarde de la société Aro, le tribunal a par jugement du 5 septembre 2023 autorisé le renouvellement de la période d'observation pour une durée de six mois, soit jusqu'au 14 février 2024.

La société Aro a présenté un plan de sauvegarde d'une durée de deux ans, qui prévoit le paiement:

- des créances inférieures ou égales à 500 euros dès l'arrêté du plan,

- de la créance salariale de M.[R] (61.920 euros) dans le mois,

- de la créance XdP à hauteur de 140.000 euros dans le mois de l'arrêté du plan, de 180.000 euros à la date d'anniversaire de l'arrêté du plan et le solde, soit 266.909,95 euros, deux ans après l'arrêté du plan,

- des créances privilégiées et chirographaires définitivement admises à hauteur de 100 % en 3 échéances : 33 % dans le mois de l'arrêté du plan ; 33 % à la date d'anniversaire du plan ; 33 % deux ans après l'arrêté du plan.

Par trois jugements du 23 avril 2024, le tribunal de commerce de Paris a respectivement:

- prononcé la résolution du plan de sauvegarde de la société 3S Consulting,

- prononcé la résolution du plan de sauvegarde de la société 3S Informatique,

- rejeté le plan de sauvegarde présenté par la société Aro.

Ces trois jugements ont été frappés d'appel.

La présente instance concerne l'appel relevé le 3 mai 2024 par la société Aro à l'encontre du jugement du 23 avril 2024, qui a rejeté son plan de sauvegarde, maintenu M.[H] en qualité de juge-commissaire, la SELARL FHBX, en la personne de Maître [J], en qualité d'administrateur judiciaire avec une mission de surveillance, la SELAFA MJA, en la personne de Maître [O], en qualité de mandataire judiciaire de la société Aro, dit le jugement exécutoire de plein droit à titre provisoire et que les dépens seront employés en frais de sauvegarde.

Pour statuer ainsi, les premiers juges ont considéré que le plan de sauvegarde présenté par la société Aro n'apparaissait pas crédible au regard de l'objectif fixé par la loi en ce qu'il ne prévoyait pas l'apurement de l'entièreté du passif.

Ainsi qu'elle y avait été autorisée par ordonnance du 7 mai 2024, la société Aro a, par acte du 13 mai 2024, fait assigner à jour fixe devant la présente cour, pour l'audience du 18 juin 2024, l'administrateur judiciaire ès-qualités, le mandataire judiciaire ès-qualités et le procureur général pour voir infirmer le jugement en ce qu'il a rejeté le plan de sauvegarde, et statuant à nouveau, adopter le plan de sauvegarde visé dans la liste des pièces annexées à la requête et dire que les dépens de la présente procédure seront employés en frais de la procédure de sauvegarde.

Dans ses conclusions déposées au greffe et notifiées par RPVA le 18 juin 2024, la SAS Aro demande à la cour d'infirmer le jugement en ce qu'il a rejeté son plan de sauvegarde et d'adopter le plan de sauvegarde visé dans la liste des pièces annexées et de dire que les dépens seront employés en frais de procédure de sauvegarde.

Par conclusions déposées au greffe et notifiées par RPVA le 18 juin 2024, la SELARL FHBX en la personne de Maître [J], ès qualités d'administrateur judiciaire et la SELAFA MJA, en la personne de Maître [O], ès qualités de mandataire judiciaire de la société Aro demandent à la cour de leur donner acte de ce qu'elles s'en rapportent sur les mérites de l'appel et de statuer ce que de droit sur les dépens.

Dans son avis remis au greffe et notifié par voie électronique le 6 juin 2024, le ministère public invite la cour à confirmer le jugement ayant rejeté le plan de sauvegarde de la société Aro.

En cours de délibéré, ainsi que la cour l'avait sollicité, la société Aro a communiqué la requête en ouverture de sauvegarde présentée par la société Aro, ainsi que le jugement d'ouverture de la sauvegarde.

SUR CE,

Au soutien de sa demande d'adoption du plan de sauvegarde qu'elle présente à hauteur d'appel dans les mêmes termes que devant le tribunal, la société Aro fait valoir que si par l'effet des fusions-absorptions, elle était tenue en sa qualité de société aborbante d'exécuter les plans des sociétés absorbées au sens de l'article L626-10 du code de commerce, elle ne doit pas pour autant être confondue avec le débiteur placé sous procédure collective, n'étant pas devenue l'objet des plans.

Elle en déduit que les plans de sauvegarde, qui étaient personnels aux sociétés 3SI et 3SC, ont disparu en même temps que les sociétés absorbées, qu'il n'y a plus de plans à résoudre et que les dettes des sociétés 3SI et 3SC, dont elle était devenue débitrice en 2015, constituent des créances antérieures à l'ouverture de sa propre sauvegarde, soumises à la discipline de la procédure collective, de sorte que les échéances des plans de sauvegarde des sociétés absorbées se trouvaient soumises à l'interdiction du paiement des créances antérieures en vertu de l'article L 622-7- I alinéa 1er du code de commerce, qu'ainsi le tribunal ne pouvait lui reprocher un défaut de paiement des échéances des plans à compter d'octobre 2022. Elle précise qu'il ne peut davantage lui être reproché de ne pas avoir inclus les dettes fiscales d'un montant total de 1.378.336,05 euros dans son projet de plan, alors que ces créances fiscales n'ont pas été déclarées au passif de sa sauvegarde, n'ont pas fait l'objet d'une demande de relevé de forclusion dans le délai légal, et qu'elles sont en conséquence inopposables à sa sauvegarde.

Elle ajoute que les créances déclarées à sa sauvegarde à hauteur de 6.171.002,15 euros sont contestées ou font l'objet d'instance en cours pour un montant de 6.100.095,07 euros, de sorte qu'elles ne relèvent ni de la première catégorie des créances visées par l'article L626-10 alinéa 2 du code de commerce issu de l'ordonnance du 15 septembre 2021, qui ne concerne que les créances déclarées admises ou non contestées, ni de la seconde catégorie des créances, dites créances identifiables, qui exclut les créances déclarées, toute autre interprétation, qui reviendrait à imposer d'inclure dans le plan des créances déclarées et contestées, reviendrait à priver de tout objet ou de toute utilité la contestation élevée.

Les organes de la procédure de sauvegarde, qui s'en rapportent à justice sur les mérites de l'appel, exposent:

- s'agissant du passif fiscal, que les créances du PRS Parisien avaient été déclarées et admises au passif des sociétés 3SC et 3SI (303.684,78 euros et 1.074.561,27 euros), que la société Aro, société absorbante, était tenue d'exécuter les plans de sauvegarde des sociétés absorbées, qu'en vertu de l'article L626-27, III du code de commerce les créanciers admis au passif d'une première procédure ne sont pas tenus de déclarer au passif après résolution du plan et ouverture d'une nouvelle procédure, les créances admises au plan étant admises de plein droit, sous déduction des sommes perçues et que le passif résiduel des plans avait été mentionné dans la requête en ouverture de sauvegarde présentée par la société Aro,

- s'agissant des créances déclarées au passif de la sauvegarde de la société Aro, qu'il résulte de l'article L626-10 alinéa 2 du code de commerce issu de l'ordonnance du 15 septembre 2021, que pour établir son plan, le débiteur peut ne prendre en compte que les créances déclarées admises ou non contestées ainsi que les créances identifiables non encore déclarées sous réserve que les engagements de remboursement au passif soient établis sur la base d'une attestation de l'expert-comptable, l'objectif de cette disposition étant d'accélérer le déroulement de la période d'observation et de l'examen du plan de sauvegarde. Ils en concluent qu'il appartient à la cour de vérifier si le passif contesté, qui correspond pour l'essentiel à la créance déclarée par la société Octopus Holding pour un montant de 5.500.000 euros constitue un passif prévisible et suffisamment vraisemblable pour être inclus dans le plan de sauvegarde étant précisé que cette société a fait l'objet d'un relevé de forclusion au titre d'une créance de 6.500.000 euros, qui a donné lieu à recours.

Le ministère public relève qu'à la suite des différentes fusions la société Aro est tenue d'exécuter les dettes des sociétés 3SI et 3SC parmi lesquelles les dettes fiscales et en déduit que ce passif doit être intégré dans le plan de sauvegarde et n'avait pas à être déclaré à l'ouverture de la procédure collective de la société absorbante.

Il sera liminairement relevé, que le jugement ayant ouvert une procédure de sauvegard à l'égard de la société Aro étant devenu définitif en l'absence de recours, la cour est amenée à trancher la contestation relative à l'adoption du plan de sauvegarde dans le cadre juridique d'une procédure de sauvegarde propre à la société Aro.

Il résulte du premier alinéa de l'article L626-10 du code de commerce que les engagements pris dans le cadre du plan 'portent sur l'avenir de l'activité, les modalités du maintien et du financement de l'entreprise, le règlement du passif soumis à déclaration, ainsi que, s'il y a lieu, les garanties fournies pour en assurer l'exécution.' et du second alinéa, issu de l'ordonnance 2021-1193 du 15 septembre 2021: ' Lorsque les engagements pour le règlement du passif peuvent être établis sur la base d'une attestation de l'expert-comptable ou du commissaire aux comptes, ils portent sur les créances déclarées admises ou non contestées, ainsi que sur les créances identifiables, notamment celles dont le délai de déclaration n'est pas expiré.'

Le projet de plan de sauvegarde indique que le passif déclaré s'élève à 6.171.002,15 euros, qu'il fait l'objet de contestations et d'instance en cours pour un montant de 6.137.321,07 euros, que le tableau joint à l'attestation de l'expert-comptable de la société Aro retient les créances de Xdp dette plan (586.909,95 euros), FHBX (32.000 euros), Allo [Localité 6] (110,59 euros) CVAE/CFE (1.865 euros) et de M.[R] (61.920 euros) représentant un total de 682.805,54 euros.

C'est ce dernier montant qui correspond au périmètre du passif pris en compte dans le projet de plan.

L'appréciation de la pertinence du projet de plan suppose en premier lieu de déterminer si le passif à rembourser dans le cadre du plan répond aux exigences de la loi. A cet égard deux points sont à examiner: 1/ la situation du passif déclaré et contesté et 2/ la situation du passif, non déclaré à date au passif de la sauvegarde d'Aro, qui avait été pris en compte dans le cadre des plans de sauvegarde des sociétés 3SI et 3SC.

1/Le passif déclaré à la sauvegarde de la société Aro à hauteur de 6.171.002,15 euros, inclut une créance déclarée par la société Octopus Participation pour un montant très important.

Reprochant à la société Aro d'avoir commis des dissimulations dans le cadre de négociations ayant conduit en 2020 à l'acquisition d'actions (le montant allégué de l'opération étant de l'ordre de 5 millions d'euros), la société Octopus Participation a, par acte du 10 juillet 2023, fait assigner la société Aro et son dirigeant devant le tribunal de commerce de Paris en sollicitant l'annulation de cette opération d'acquisition, la restitution en résultant, ainsi que le paiement de 1 million d'euros de dommages et intérêts.

Outre le fait que la société Octopus Participation a dû solliciter un relevé de forclusion pour déclarer sa créance et que l'ordonnance du juge-commissaire y ayant fait droit le 15 février 2024 fait l'objet d'un recours actuellement pendant, la cour relève que la créance dont se prévaut la société Octopus Participation est, à date, hypothétique, puisqu'elle suppose qu'une décision judiciaire, à intervenir à une date inconnue, prononce l'annulation d'un acte de cession d'actions après qu'a été démontré l'existence de dissimulations du cédant. Cette créance, contestée par la société Aro, ne constitue pas une créance identifiable au sens des dispositions sus visées, et il ne peut être reproché à la société appelante de ne pas l'avoir intégrée dans le périmètre de son projet de plan.

2/ Il est acquis aux débats que le passif pris en compte dans les plans de sauvegarde des sociétés 3SI et 3SC intégrait des créances fiscales importantes, qui avaient été admises. A la date d'ouverture de la sauvegarde de la société Aro, il restait dû au titre de ce passif fiscal 1.074.651,27 euros (3SI) et 303.684,78 euros (3SC). Si ces montants ne sont pas en eux-mêmes discutés, la société Aro considère cependant que ces créances, n'ayant pas été déclarées par l'administration fiscale au passif de sa propre sauvegarde et n'étant plus susceptibles, compte tenu de l'expiration du délai, de faire l'objet d'un relevé de forclusion, elles sont inopposables à sa sauvegarde et n'ont pas à être intégrées au passif de son plan.

Dans sa requête du 25 janvier 2023 en ouverture d'une procédure de sauvegarde, la société Aro, qui considère être tenue du passif des sociétés absorbées, a mentionné à la rubrique 'passif', 'créanciers garantis par des privilèges spéciaux', un montant à échoir de 1.448.386 euros ainsi composé:

' Dettes redressement judiciaire 3SI et 3SC ( plans du 20 octobre 2014)

3S INFORMATIQUE ( A Echoir): 1.143.000,87 euros

3S CONSULTING ( A échoir) : 305.384,96 euros.'

Ce passif correspond quasi intégralement au passif fiscal résiduel des sociétés absorbées, soit 1.074.651,27 euros pour 3SI et 303.684,78 euros pour 3SC. Il résulte de cette mention que la société Aro avait parfaitement identifié dans son passif les sommes restant dues à l'administration fiscale. Au travers de sa requête, la société Aro a porté ces créances à la connaissance du mandataire judiciaire .

L'article L622-6 du code de commerce dispose que ' Le débiteur remet à l'administrateur et au mandataire judiciaire pour les besoins de leur mandat, la liste des créanciers, du montant des dettes et des principaux contrats en cours.[...]'. En exécution de ces dispositions, la société Aro a dû ou aurait dû établir et remettre au mandataire judiciaire la liste de ses créanciers, parmi lesquels l'administration fiscale, quand bien même elle considérait qu'il s'agissait de créances à échoir au regard des plans arrêtés en 2014.

Il résulte par ailleurs de l'article L 622-24 du code de commerce, en son troisième alinéa, que 'Lorsque le débiteur a porté une créance à la connaissance du mandataire judiciaire, il est présumé avoir agi pour le compte du créancier, tant que celui-ci n'a pas adressé la déclaration de créance prévue au premier alinéa.'.

La société Aro ayant exclu de son projet de plan le passif fiscal des sociétés 3SIet 3SC au motif que ces créances n'ont pas été déclarées au passif de sa sauvegarde, la cour estime devoir ordonner la réouverture des débats afin de permettre aux parties de s'expliquer sur les conséquences qu'il y a lieu de tirer, selon elles, d'une part, des déclarations effectuées ou non par la société Aro, ainsi d'autre part, que des textes sus visés quant au défaut de déclaration de créance allégué et par ailleurs de produire la liste des créanciers établie par la société Aro en vertu de l'article L622-6 du code de commerce.

PAR CES MOTIFS,

Avant dire droit, ordonne la réouverture des débats à l'audience du 5 novembre 2024 à 14H,

Invite les parties à s'expliquer sur les conséquences qu'il y a lieu de tirer, selon elles, d'une part, des déclarations effectuées ou non par la société Aro, ainsi d'autre part, que des textes sus visés quant au défaut de déclaration de créance allégué et par ailleurs de produire la liste des créanciers établie par la société Aro en vertu de l'article L622-6 du code de commerce, à la suite de l'ouverture de sa procédure de sauvegarde,

Réserve toutes les demandes et moyens des parties et les dépens.

La greffière,

Liselotte FENOUIL

La présidente,

Marie-Christine HÉBERT-PAGEOT