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Décisions

CA Aix-en-Provence, ch. 1-1, 17 septembre 2024, n° 20/09383

AIX-EN-PROVENCE

Arrêt

Infirmation partielle

PARTIES

Demandeur :

LG Consult (SARL)

Défendeur :

Hertus (SCI)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Brue

Conseillers :

Mme Ouvrel, Mme Allard

Avocats :

Me Cherfils, Me Duponchel, Me Sider, Me Grimaldi

TGI Grasse, du 16 déc. 2019, n° 17/05502

16 décembre 2019

Exposé des faits et de la procédure

Par acte authentique reçu le 29 janvier 2016, la SCI Hertus a acquis de la SCI Ipso, moyennant le prix de 3 160 000 €, un bâtiment à usage industriel sis à Mouans-Sartoux, qui était loué à la société Fondalu exerçant une activité de fonderie et d'usinage de profilés d'aluminium.

L'acquéreur ayant déclaré dans l'acte qu'il entendait utiliser le bien à un usage industriel de création et production de parfums, une clause spécifique a été stipulée, retardant l'entrée en jouissance à la prise de possession réelle, fixée au 31 juillet 2016, après remise en état du site par un organisme spécialisé, sous peine d'indemnité journalière de 400 €.

Une somme de 12 000 € a été séquestrée, prélevée sur le prix, compte tenu de la réserve de jouissance.

La SCI Hertus a pris possession des locaux le 2 août 2016.

Le 24 octobre 2017, se plaignant du non respect de ses obligations par le vendeur, la SCI Hertus a assigné la SCI Ipso devant le tribunal de grande instance de Grasse afin d'obtenir des dommages-intérêts.

Par jugement du 16 décembre 2019, le tribunal judiciaire de Grasse a :

- retenu la responsabilité contractuelle de la SCI Ipso, faute d'avoir, avant le 31 juillet 2016, remis les lieux dans l'état prévu à l'acte de vente ;

- dit que la clause de non garantie des vices apparents ne s'applique pas ;

- dit qu'aucune circonstance extérieure n'exonère la SCI Ipso de sa responsabilité ;

- condamné la SCI Ipso à payer à la SCI Hertus la somme de 43 332,48 € en réparation du préjudice résultant des frais de remise en état et la somme de 54 400 € au titre de la clause pénale stipulée au contrat ;

- constaté que la SCI Hertus s'engage à donner mainlevée de la somme de 12 000 € séquestrée par le notaire ;

- débouté la SCI Hertus de sa demande de dommages-intérêts au titre d'un préjudice moral ;

- rejeté tout demande plus ample ou contraire ;

- condamné la SCI Ipso à payer à la SCI Hertus une indemnité de 2 000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné la SCI Ipso au paiement des entiers dépens.

Pour statuer ainsi, il a considéré que :

- la SCI Ipso a manqué à son obligation de délivrance, d'une part en ne remettant les clefs à l'acheteur que le 2 août 2016, d'autre part en ne faisant pas procéder à la remise en état du site, conformément aux stipulations contractuelles et à l'article R 512-66-1 du code de l'environnement afin de permettre un usage industriel de création et production de parfums ;

- la SCI Ipso n'est pas fondée à invoquer, pour s'exonérer de sa responsabilité, la prise des lieux dans l'état où ils se trouvent puisque, par courrier du 15 septembre 2016, adressé à la SCI Hertus, elle s'est engagée à faire procéder aux travaux de déblayage et de remise en état après la remise des clés ;

- la mise en liquidation judiciaire de l'exploitant du site et les difficultés pour obtenir la coupure du gaz sur le site ne caractérisent aucun cas de force majeure.

S'agissant du préjudice, le tribunal a pris en considération la facture de remise en état du local, supportée par la SCI Hertus et considéré, en ce qui concerne la clause pénale, que si les locaux n'étaient pas nettoyés au 28 février 2017, ils étaient vides depuis le 14 décembre 2016, de sorte que l'indemnité est due seulement jusqu'à cette date.

Par acte du 1er octobre 2020, dont la régularité et la recevabilité ne sont pas contestées, la SARL LG consult, venant aux droits de la SCI Ipso à la suite d'une dissolution avec transmission universelle de patrimoine, a relevé appel de cette décision en visant expressément tous les chefs de son dispositif, à l'exclusion de celui ayant débouté la SCI Hertus de sa demande de dommages-intérêts au titre d'un préjudice moral.

La procédure a été clôturée par ordonnance en date du 21 mai 2024.

Prétentions et moyens des parties

Dans ses dernières conclusions, régulièrement notifiées le 7 octobre 2021, auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé des moyens, la SARL LG consult demande à la cour de :

A titre principal,

' infirmer le jugement en ce qu'il a retenu la responsabilité de la société Ipso pour manquement à son obligation de remise en état des lieux avant le 31 juillet 2016, dit que la clause de non garantie des vices apparents ne s'appliquait pas et qu'aucune circonstance extérieure ne venait l'exonérer de sa responsabilité, a condamné la SCI Ipso au paiement de la somme de 43 332 € au titre de la réparation du préjudice lié aux frais de remise en état et 54 400 € au titre de la clause pénale ;

' confirmer le jugement en ce qu'il a débouté la SCI Hertus de sa demande au titre d'un préjudice moral ;

Statuant à nouveau,

' débouter la SCI Hertus de ses demandes ;

' fixer les dommages-intérêts dus au titre de la clause pénale à 800 € ;

' ordonner au séquestre de restituer la somme séquestrée de 12 000 € à la SCI Ipso ;

A titre subsidiaire,

' infirmer le jugement en ce qu'il a condamné la SCI Ipso à payer à la SCI Hertus la somme

54 400 € au titre de la clause pénale ;

Statuant à nouveau,

' réduire le montant de la clause pénale à la somme de 24 400 € ;

' ordonner l'imputation de la somme séquestrée de 12 000 € sur cette condamnation ;

' ordonner au séquestre de restituer la somme séquestrée de 12 000 € à la SCI Hertus ;

A titre très subsidiaire,

' infirmer le jugement en ce qu'il a condamné la SCI Ipso au paiement de la somme de 43 332 € au titre de la réparation de son préjudice lié aux frais de remise en état .

Statuant à nouveau,

' débouter la SCI Hertus de sa demande au titre des frais de remise en état ;

En tout état de cause,

' condamner la SCI Hertus à lui payer la somme de 3 000 € au titre de l'article 700 code de procédure civile ainsi qu'aux dépens, distraits au profit de son avocat.

Au soutien de son appel et de ses prétentions, elle fait valoir que :

- l'acte de vente stipule une clause d'exclusion de garantie concernant les vices apparents ou cachés au jour de l'entrée en jouissance, or elle a rempli son obligation de délivrance le 2 août 2016, date à laquelle elle a remis les clefs sans que l'acquéreur formule la moindre réserve, ni ne refuse de prendre livraison alors que la présence de poussières et de machines dans les locaux à cette date était apparente et que par courrier du 15 septembre 2016, la SCI Ipso a pris note que les travaux de balayage et remise en état ne pourraient reprendre qu'en septembre ;

- elle s'est heurtée à un cas de force majeure l'exonérant de toute responsabilité puisque les locaux n'étaient pas en état en raison d'une part de la liquidation judiciaire de l'exploitant, ouverte le 19 mai 2016, qui a retardé la possibilité de vider les lieux et de les remettre en état, le liquidateur ayant seul le pouvoir de réaliser les actifs, d'autre part de la nature de l'activité exercée auparavant, soumise à agrément du Préfet et qui nécessitait l'intervention des services du gaz pour l'arrêt des machines, avant enlèvement de celles-ci ;

- le gérant de la SCI Ipso et ancien président de la société Fondalu, a fait diligence pour libérer les lieux dans les meilleurs délais et restituer un local exempt de tous déchets, puisque l'élimination de ceux-ci et du matériel a eu lieu entre le 16 juillet 2016 et fin septembre 2016, permettant à la société Engie de couper le gaz avant enlèvement des machines et à la société Azur copropriétés travaux de procéder à la remise en état des locaux ;

- la société QCS Services a attesté du bon état des locaux au 14 décembre 2016 et la SCI Hertus ne produit aucune preuve contraire, les rapports d'intervention, non contradictoires, dressés plusieurs mois plus tard, étant à eux seuls insuffisants ;

- la clause pénale ne sanctionne que le retard de la date d'entrée en jouissance et non celui lié au défaut de remise en état du bien, de sorte que l'astreinte à laquelle elle peut être condamnée s'élève tout au plus à la somme de 800 €, correspondant aux deux jours de retard dans la remise des clefs mais, en tout état de cause, si la cour estimait que la libération des lieux s'entendait également de l'enlèvement des machines et de la remise en état des lieux, le retard doit être considéré comme indépendant de la volonté de la SCI Ipso, justifiant la modération de cette clause, manifestement excessive au regard du prix de vente des locaux et du préjudice réellement subi.

Elle précise, concernant le préjudice allégué, que la société Only fragrance était déjà tenue par un bail jusqu'en octobre 2018, pour d'autres locaux, que la SCI Hertus ne produit aucune facture acquittée du coût de l'enlèvement de déchets restants, qu'il n'existe aucun préjudice distinct de celui réparé par l'application de la clause pénale et que la société Hertus ne peut réclamer l'indemnisation d'un préjudice qui, à le supposer constitué, a été subi par la société Only fragrances.

Dans ses dernières conclusions d'intimée et d'appel incident, régulièrement notifiées le 16 avril 2021, auxquelles il convient de renvoyer pour un exposé plus exhaustif des moyens, la SCI Hertus demande à la cour de :

' confirmer le jugement en qu'il a dit que la SCI Ipso engage sa responsabilité contractuelle, faute d'avoir remis les lieux dans l'état prévu à l'acte de vente, avant le 31 juillet 2016, que la clause de non garantie des vices apparents ne trouve pas application et qu'aucune circonstance extérieure ne vient l'exonérer de sa responsabilité, et l'a condamnée à lui payer la somme de 43 332,48 € au titre de la réparation de son préjudice lié aux frais de remise en état ;

' infirmer le jugement pour le surplus ;

Statuant à nouveau,

' fixer le montant des sommes dues par la SARL LG Consult au titre de la clause pénale à 99 200 € (248 jours à 400 € par jour), le notaire remboursant les 12 000 € séquestrés ;

' condamner la SARL LG consult à lui verser la somme de 20 000 € à titre de dommages-intérêts en réparation de son préjudice moral ;

A titre subsidiaire,

' juger que la somme due par la SCI LG Consult au titre de la clause pénale, s'élève à 65 783,43 € au titre des loyers versés en trop à son ancien bailleur ;

A titre très subsidiaire

' confirmer la condamnation au titre de la clause pénale à 54 000 € ;

' condamner la SCI LG Consult aux entiers dépens de première instance et d'appel et à lui payer 3 000 € à l'intimée au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Elle fait valoir que :

- l'acte de vente contient un paragraphe spécifique aux termes duquel l'entrée en jouissance, qui devait avoir lieu au plus tard le 31 juillet 2016, impliquait la résiliation des baux en cours, l'arrêt définitif de l'installation à usage de fonderie et la remise en état du site, de sorte que la SCI Ipso avait pour obligation de notifier au Préfet la date de l'arrêt d'exploitation au plus tard le 31 juillet 2016 en précisant les mesures prises pour assurer la mise en sécurité du site (article R 512-66-1 du code de l'environnement), de faire procéder à la remise en état du site par un organisme spécialisé à cet effet et pour l'activité à venir, et de lui remettre une attestation de cet organisme, au plus tard le jour de la libération des lieux, confirmant que le site de l'installation avait été remis en état afin de permettre un usage futur du site compatible avec l'usage industriel de création et production de parfums ;

- la clause est assortie d'une sanction aux termes de laquelle, à défaut de respect de ces obligations au 31 juillet 2016, le vendeur s'acquittera d'une astreinte de 400 € par jour de retard;

- la procédure collective ouverte à l'encontre de la société Fondalu ne provient pas d'un créancier non payé, mais d'une initiative de son principal associé et dirigeant, M. [M], qui est également gérant de la SCI Ipso, qui a préféré la perspective d'une liquidation judiciaire plutôt qu'amiable, de sorte que, d'une part elle savait, lorsqu'elle a promis de libérer les lieux le 31 juillet, qu'elle ne serait pas en mesure de respecter cette obligation, d'autre part la procédure collective ne procède par d'une cause extérieure ;

- si la remise des clefs a eu lieu avec seulement deux jours de retard, le local livré ne correspond pas à ce qui était promis dans l'acte de vente puisque seul un nettoyage sommaire avait été assuré, et que l'attestation de la société QCS services est insuffisante en ce qu'elle atteste du bon état des locaux à l'issue d'un simple état visuel et n'évoque qu'un usage futur comparable à celui de la dernière période d'exploitation de l'installation alors que l'activité future devait être exploitée par une société de fragrance selon des conditions d'exercice très strictes ;

- la clause d'exclusion de garantie des vices apparents ou cachés est inopérante puisqu'elle se plaint de la non réalisation de l'obligation de délivrance et non de vices ;

- la clause pénale ne sanctionne pas uniquement le retard à la remise des clefs mais l'absence de délivrance conforme à cette date, étant souligné que les locaux ont été inutilisables, non pas deux jours, mais pendant près d'un an du fait de fait des quantités très importantes de limaille d'aluminium présentes à l'intérieur des locaux ;

- son préjudice ne se limite pas au seul retard dans l'exécution, réparé par la clause pénale, puisqu'il comprend également les frais de nettoyage que le vendeur devait supporter.

Motifs de la décision

Sur la responsabilité de la SCI Ipso

En application de l'article 1603 du code civil, le vendeur a l'obligation de délivrer une chose conforme à ce qui est stipulé au contrat, l'acheteur ne pouvant être tenu d'accepter une chose différente de celle qu'il entendait acheter.

Les qualités et caractéristiques que l'acquéreur est en droit d'en attendre sont celles en considération desquelles la vente a été conclue ou qui, au regard de sa nature sont présumées être entrées dans le champ contractuel en tenant compte des usages et du montant de la contrepartie.

La preuve de la non-conformité de la chose livrée incombe à l'acquéreur qui soulève cette exception.

Le régime de l'obligation de délivrance obéit également aux règles du droit général des contrats, étant rappelé que les contrats conclus avant l'entrée en vigueur de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, soit au 1er octobre 2016, demeurent soumis à la loi ancienne.

En l'espèce, le contrat de vente litigieux a été conclu par les parties le 29 janvier 2016.

L'acte de vente stipule que la SCI Hertus, acquéreur du bien, en sera propriétaire à compter de la vente, mais que, dans la mesure où vendeur, la SCI Ipso, aux droits de laquelle vient la SARL LG Consult, occupe le bien, l'entrée en jouissance aura lieu par prise de possession réelle à compter du 31 juillet 2016, date à laquelle elle s'oblige à le rendre libre.

Il ajoute qu'à défaut, le vendeur devra régler une indemnité journalière de 400 € à titre de clause pénale, due dès le premier jour de retard et que l'indemnité est stipulée non réductible même en cas de libération partielle du bien.

Suit la déclaration suivante : ' à ce sujet le vendeur déclare avoir résilié les baux en cours (...)' et 'en outre, le vendeur s'engage à faire procéder à ses frais à l'arrêt définitif de l'installation à usage de fonderie actuellement exploitée sur le site et à la remise en état du site au plus tard dans le délai ci-dessus prévue pour l'entrée en jouissance. A cet effet, le vendeur a notifié au préfet par lettre recommandée avec avis de réception du 7 janvier 2016 la date de l'arrêt de l'exploitation qui devra avoir lieu au plus tard le 31 juillet 2016 en indiquant dans la notification, conformément à l'article R 512-66-1 du code de l'environnement, les mesures prévues pour assurer la mise en sécurité du site.

A cet effet, le vendeur s'engage à :

- faire procéder à la remise en état du site conformément à l'article R. 512-66 précité par un organisme spécialisé à cet effet, pour l'activité ci après citée,

- remettre à l'acquéreur une attestation du dit organisme au plus tard le jour de la libération des lieux, confirmant que le site de l'installation a été remis en état conformément aux dispositions de l'article R. 512-66-1, afin de permettre un usage futur du site compatible avec l'activité qu'entend lui donner le bénéficiaire, savoir l'usage industriel de création et production de parfums'.

Il résulte des termes de ce contrat que l'entrée en jouissance des locaux devait avoir lieu au plus le 31 juillet 2016 et qu'elle impliquait, non seulement remise des clefs mais également la livraison d'un local remis en état afin que l'acquéreur puisse y exercer une activité de création et production de parfums.

L'acte précise, au paragraphe 'usage du bien', que le vendeur l'utilisait à un usage industriel de fonderie.

Dès lors que, d'une part, l'acquéreur a expressément indiqué qu'il entendait exercer dans les locaux une activité de création et production de parfums en lieu et place d'une activité industrielle de fonderie, d'autre part que le vendeur s'est engagé, dans les termes ci dessus rappelés, à livrer un local en état de servir à cette activité, le respect de ses obligations doit nécessairement s'apprécier au regard des diligences accomplies afin de remettre le site en état dans la perspective de l'activité à venir.

La remise des clefs a eu lieu le 2 août 2016, soit avec deux jours de retard, alors que selon l'article 1610 du code civil, la délivrance doit intervenir « dans le temps convenu entre les parties ».

Par ailleurs, s'agissant de l'état des locaux, il résulte des échanges de courriers produits aux débats et des factures de nettoyage produites par la SARL LG Consult elle même, en date des 16 novembre 2016 et 12 décembre 2016, que le nettoyage des locaux a eu lieu après le 2 août 2016.

Il en va de même des opérations de déménagement, ce que la société LG ne conteste pas, qui évoque des difficultés liées à la liquidation judiciaire de la société occupant précédemment les locaux et la nécessité de faire intervenir, avant tout déplacement de certaines machines, la société Engie afin de couper le gaz.

En conséquence, au jour convenu entre les parties à l'acte, soit le 31 juillet 2016, les locaux livrés n'étaient pas conformes et ne l'étaient pas davantage le 2 août 2016, lorsque les clefs du local lui ont été remis.

La SARL LG Consult ne le conteste pas, puisqu'elle se prévaut d'une attestation de la société QCS services certifiant le bon état des locaux au 14 décembre 2016 et invoque pour la période écoulée entre le 31 juillet et le 14 décembre 2016, des causes exonératoires de responsabilité, à savoir une clause d'exclusion de garantie stipulée à l'acte et un cas de force majeure.

Le contrat stipule une clause d'exclusion de garantie aux termes de laquelle 'l'acquéreur prend le bien dans l'état où il se trouve au jour de l'entrée en jouissance, sans recours contre le vendeur pour quelque cause que ce soit, notamment en raison des vices apparents ou des vices cachés'.

Cependant, cette clause n'exonère le vendeur que de la garantie à laquelle il est tenu en ce qui concerne les vices de la chose vendue.

Elle est indifférente pour apprécier si le vendeur a respecté son obligation de délivrance conforme, laquelle doit être appréciée au regard des stipulations contractuelle afférentes à l'état du bien au jour de l'entrée en jouissance.

La SCI Hertus ne se plaint pas d'un quelconque vice du bien acheté, mais seulement de l'état dans lequel il se trouvait au jour de l'entrée en jouissance, contrairement aux obligations que son co-contractant avait expressément souscrites sur ce point.

Cette clause est donc insuffisante pour exonérer la SARL LG consult de sa responsabilité.

S'agissant de la force majeure, qui, lorsqu'elle est caractérisée, exonère le vendeur défaillant de sa responsabilité, elle correspond à l'événement échappant au contrôle du débiteur, qui ne pouvait être raisonnablement prévu lors de la conclusion du contrat, dont les effets ne peuvent être évités par des mesures appropriées et qui empêche l'exécution de l'obligation.

En l'espèce, la SARL LG Consult soutient que la procédure collective ouverte le 17 mai 2016 au bénéfice de la société Fondalu, précédente exploitante, et les difficultés rencontrées pour faire cesser l'alimentation du local en gaz, consacrent un cas de force majeure.

Cependant, le courrier de M. [M] du 19 septembre 2016 établit tout au plus qu'il rencontrait une difficulté à cette date. Pour la suite, la SARL LG Consult ne saurait se prévaloir de la remise des clefs à la SCI Hertus pour soutenir que celle-ci est seule responsable du retard dans les opérations destinées à faire cesser l'alimentation en gaz alors qu'il lui appartenait de s'en préoccuper avant le 31 juillet 2016.

S'agissant de la procédure collective de la société Fondalu, si aucune pièce n'est produite pour démontrer qu'elle fait suite à demande de son gérant, M. [M], qui était également gérant de la SCI Ipso, les liens entre les deux sociétés, qui ne sont pas contestés, ne peuvent être ignorés et empêchent de considérer qu'il s'agit d'un événements échappant au contrôle de la société Ipso.

M. [M], gérant des deux sociétés ne pouvait ignorer que cette procédure de liquidation était susceptible d'affecter le respect par la SCI Ipso de son engagement de libérer les lieux au 31 juillet 2016 et de délivrer à cette date un local prêt à l'emploi par le successeur.

En tout état de cause, ses effets néfastes pouvaient être empêchés par des mesures appropriées, notamment des démarches auprès du liquidateur, et, en cas de nécessité, une démarche contentieuse à l'encontre de celui-ci, qu'elle ne démontre par aucune pièce avoir engagée.

C'est donc à juste titre que le tribunal a considéré qu'aucune pièce ne démontre l'impossibilité de faire cesser l'alimentation en gaz entre les mois de mai et juillet 2016, ni l'opposition du liquidateur à l'enlèvement des machines avant leur vente.

En conséquence, la SARL LG Consult ne peut utilement soutenir que le non respect par la SCI Ipso de son obligation de délivrance conforme au 31 juillet 2016, contractée en toute connaissance de ce qu'elles impliquaient en terme de délais et de charge de nettoyage, a pour cause exclusive la procédure collective ayant affecté le précédent exploitant et les difficultés rencontrées pour faire cesser l'alimentation en gaz des locaux.

La SCI Hertus fonde ses demandes, non seulement sur une retard dans l'exécution de l'obligation de délivrance, mais également sur une inexécution partielle de celle-ci.

Les termes de la clause de livraison, afférentes aux obligations du vendeur ont été rappelés plus haut.

L'article R. 512-66-1 du code de l'environnement dispose que :

« I. Lorsqu'une installation classée soumise à déclaration est mise à l'arrêt définitif, l'exploitant notifie au préfet la date de cet arrêt un mois au moins avant celui-ci. Il est donné récépissé sans frais de cette notification.

II. La notification prévue au I indique les mesures prises ou prévues pour assurer, dès l'arrêt de

l'exploitation, la mise en sécurité du site. Ces mesures comportent, notamment :

1° L'évacuation ou l'élimination des produits dangereux et des déchets présents sur le site ;

2° Des interdictions ou limitations d'accès au site ;

3° La suppression des risques d'incendie et d'explosion ;

4° La surveillance des effets de l'installation sur son environnement.

III. En outre, l'exploitant doit placer le site de l'installation dans un état tel qu'il ne puisse porter

atteinte aux intérêts mentionnés à l'article L. 511-1 et qu'il permette un usage futur du site comparable à celui de la dernière période d'exploitation de l'installation. Il en informe par écrit le propriétaire du terrain sur lequel est sise l'installation ainsi que le maire ou le président de l'établissement public de coopération intercommunale compétent en matière d'urbanisme ».

Le contrat conclu entre les parties renvoie expressément à cette disposition réglementaire.

Il résulte d'un rapport de visite d'état des lieux en vue de l'installation dans les lieux de la société Only Fragrances, établi le 14 mars 2017 à la suite d'une visite du 28 février 2017, par M. [E] [D] et Mme [F] [R] de la société Socotec, en compagnie de M. [S] de la société Only Fragrance, que les modules 1 et 2 du bâtiment, utilisés pour l'usinage des pièces d'aluminium, le stockage et le petit usinage des pièces contenaient une grande quantité de poussières d'aluminium sur le sol et les murs, spécialement au niveau des recoins, derrière les IP verticaux et sur les murs à proximité des anciens postes de travail. La présence de limailles a également été observée sur certains équipements et sur des excroissances du bâtiment (IP horizontaux et gaines électriques) ainsi qu'au niveau des joints de dalle. Dans le rapport des photographies illustrent les observations des auteurs du rapport. Enfin, dans le module 3, qui avait servi de fonderie, les auteurs du rapport ont relevé la présence de résidus de combustion collés au sol, sur les murs ainsi que sur les plafonds, les translucides étant en partie opacifiés, le sol était gras et glissant en raison de la présence de résidus d'huile. A ces éléments s'ajoutent la présence de limailles d'aluminium dans la mezzanine du module 1, et des traces de résidus de combustion dans la mezzanine du module 3.

Faisant état de la nécessité de respecter une formulation physico-chimique stricte pour la fabrication des eaux de toilette, cosmétiques, capillaires et parfums d'ambiance, et ajoutant que les produits étant constitués par mélange de composés, impliquant que les matières premières, voire les produits finis, doivent rester à l'air libre pendant certaines phases du procédé de fabrication, les auteurs du rapport en concluent que les poussières d'aluminium, les résidus de combustion et d'huile de coupe sont susceptibles d'être remobilisés et de polluer les produits fabriqués, avec un impact sur la qualité du produit fini.

Ce rapport n'a pas été établi au contradictoire des parties.

Pour autant, le juge peut tenir compte d'éléments techniques procédant d'un rapport non établi au contradictoire des parties au litige s'ils sont corroborés par des éléments extérieurs.

Or, la SCI Hertus produit également aux débats un rapport de la société SIS Primo, qui est intervenue sur le site entre le 9 mars 2017 et le 30 mars 2017. Son intervention a consisté après nettoyage, dégraissage, décapage par haute pression, à mettre en sac les limailles résultant du nettoyage, à aspirer et évacuer les eaux souillées dans la cuve entérrée avant que celles-ci soient pompées et fassent l'objet d'un traitement.

Ce rapport corrobore la présence persistante à cette date de limailles et de résidus souillés, puisque la société a retiré de l'opération quarante sacs contenant chacun entre 15 et 20 kilogrammes de limailles et a dû procéder au pompage de près de 500 kilogrammes de boues chargées de limailles et d'hydrocarbures mélangées, stagnantes au fond de la cuve enterrée.

La SARL LG Consult se prévaut de factures de la société Azur copropriété travaux, en date des 16 novembre et 12 décembre 2016 ayant pour objet l'enlèvement et l'évacuation des déchets présents sur le site appartenant à la SCI Ipso. Cependant, ces factures sont insuffisantes, à elles-seules, pour établir que le nettoyage du site a été conforme à ce qui en était attendu au regard de la clause contractuelle qui imposait le livraison d'un local nettoyé dans des conditions permettant l'exploitation d'une usine de parfums.

S'agissant de la fiche de visite établie par la société QCS services le 16 janvier 2017, après visite des locaux du 14 décembre 2016, elle a été réalisée, selon ses termes, après un diagnostic de 'l'état visuel' du bâtiment et de ses abords immédiats. Par ailleurs, sa conclusion, selon laquelle « les locaux de l'installation ['] sont apparus dans un état visuel tel qu'ils permettent un usage futur du site comparable à celui de la dernière période d'exploitation de l'installation », n'est pas suffisante pour contrer les observations des deux rapports de visite produits par la SCI Hertus, qui démontrent qu'en février et mars 2017 le site n'était pas prêt à être utilisé pour la production de parfums puisqu'elle évoque un local prêt à un usage comparable à celui de la dernière installation, à savoir une fonderie. Or, la SCI Ipso savait, puisque cet élément était entré dans le champ contractuel, que le local devait être utilisé pour exploiter une activité de production de parfums, totalement différente de l'activité précédente et nécessitant un nettoyage particulier.

Il résulte de l'ensemble de ces éléments, d'une part que le site n'était conforme aux exigences contractuelles au jour de la remise des clefs, d'autre part que les opérations de nettoyage auxquelles la SCI Ipso s'est livrée après l'expiration du délai qui lui était imparti, n'ont pas été suffisantes pour rendre le site exploitable par la société Only fragrance.

A cet égard, il convient de relever que la société SIS Primo précise avoir été contrainte d'utiliser des produits plus puissants que prévus initialement afin d'atteindre un résultat d'assainissement le meilleur possible dans les modules 1 et 2.

Il appartenait donc à la SCI Ipso, avant de s'engager à livrer un bien totalement nettoyé et apte à accueillir une activité de cosmétiques et parfums, de se renseigner sur l'importance des opérations de nettoyage et de s'adapter aux exigences induites par la nature de l'activité à venir puisque celle-ci conditionnait la qualité des opérations de nettoyage.

Dès lors qu'aux termes de la clause, dont la teneur a été rappelée plus haut, elle s'est expressément engagée, d'une part 'à faire procéder à ses frais à l'arrêt définitif de l'installation à usage de fonderie actuellement exploitée sur le site et à la remise en état du site au plus tard dans le délai ci-dessus prévue pour l'entrée en jouissance (...)', en faisant procéder à une remise en état conformément à l'article R. 512-66 précité par un organisme spécialisé à cet effet, pour l'activité de cosmétiques et parfums, d'autre part à 'remettre à l'acquéreur une attestation du dit organisme au plus tard le jour de la libération des lieux, confirmant que le site de l'installation a été remis en état conformément aux dispositions de l'article R. 512-66-1, afin de permettre un usage futur du site compatible avec l'activité qu'entend lui donner le bénéficiaire, savoir l'usage industriel de création et production de parfums', il doit être considéré qu'elle a manqué à son obligation de délivrance conforme.

C'est donc à juste titre que le premier juge a retenu la responsabilité contractuelle de la SARL LG Consult, venant aux droits de la SCI Ipso.

Sur l'indemnisation des préjudices

L'article 1611 du code civil dispose qu'en cas de manquement à son obligation de délivrance, le vendeur doit être condamné aux dommages et intérêts, s'il résulte un préjudice pour l'acquéreur, du défaut de délivrance au terme convenu.

Ce texte rejoint les termes de l'article 1147 du code civil dans sa version applicable avant l'entrée en vigueur de l'ordonnance n°2016-131 du 10 février 2016, qui dispose que le débiteur est condamné, s'il y a lieu, au paiement de dommages-intérêts, soit à raison de l'inexécution de l'obligation, soit à raison du retard dans l'exécution, toutes les fois qu'il ne justifie pas que l'inexécution provient d'une cause étrangère qui ne peut lui être imputée, encore qu'il n'y ait eu aucune mauvaise foi de sa part.

L'acquéreur doit établir que la défaillance du vendeur a été la cause, pour lui, d'un préjudice résidant dans une perte subie ou dans un manque à gagner, pourvu que ces chefs de dommage aient été prévisibles lors de la conclusion de la vente.

L'acheteur d'un bien immobilier est ainsi en droit de demander au vendeur le paiement du coût des travaux de nettoyage que le vendeur avait indiqué prendre à sa charge. Il est également comptable de tout retard dans l'exécution de son obligation.

En l'espèce, le contrat conclu entre les parties stipule qu'à défaut de prise de possession réelle à compter du 31 juillet 2016, date à laquelle la SCI Ipso s'est engagée rendre le bien libre de toute occupation, l'acquéreur pourra exiger le paiement d'une indemnité journalière de 400 € à titre de clause pénale, due dès le premier jour de retard et que l'indemnité est stipulée non réductible même en cas de libération partielle du bien.

En application de l'article 1152 du code civil, dans sa version antérieure à l'ordonnance n°2016-131 du 1er février 2016, lorsque la convention porte que celui qui manquera de l'exécuter payera une certaine somme à titre de dommages-intérêts, il ne peut être alloué à l'autre partie une somme plus forte, ni moindre. Néanmoins, le juge peut, même d'office, modérer ou augmenter la peine qui avait été convenue, si elle est manifestement excessive ou dérisoire. Toute stipulation contraire sera réputée non écrite.

Les dommages-intérêts ainsi stipulés s'analysent donc en une pénalité évaluée forfaitairement, ayant pour vocation de sanctionner le manquement par une partie à ses obligations.

Contrairement à ce que soutient la SARL LG Consult, les locaux n'étaient conformes à ce qu'en attendait la SCI Hertus ni le 2 août 2016, ni le 14 décembre 2016, même si, à cette date, ils étaient vides selon une attestation de la société QCS services.

En effet, leur état à ces dates ne permettait pas l'exploitation d'une activité de parfumerie en raison de la présence d'une quantité importante de limailles résiduelles et de la nécessité d'un nettoyage complémentaire.

La SARL LG Consult ne démontre pas davantage qu'ils l'étaient au 28 février 2017 puisque le rapport de visite d'état des lieux en vue de l'installation dans les lieux de la société Only Fragrances, établi le 14 mars 2017 à la suite d'une visite du 28 février 2017, de la société Socotec, fait état d'une grande quantité de poussières d'aluminium sur le sol et les murs, sur certains équipements et excroissances du bâtiment et au niveau des joints de dalle, outre, dans le module 3, la présente de résidus de combustion.

Alors que la SCI Hertus démontre que la clause relative à l'état des locaux n'était toujours pas respectée le 28 février 2017, la SARL LG consult ne produit aucun élément objectif contredisant ce rapport.

En revanche, la SCI Hertus justifie que la société SIS Primo est intervenue sur le site entre le 9 mars 2017 et le 30 mars 2017 afin de procéder au nettoyage et à l'enlèvement des limailles et au pompage des boues chargées de limailles et d'hydrocarbure, de sorte qu'à défaut d'autre élément probant, il doit être considéré que le site n'a été conforme à ce qui en était attendu que le 30 mars 2017.

La clause pénale stipulée dans le contrat ne saurait être interprète comme sanctionnant seulement l'obligation de vider les locaux puisque elle est suivie de la mention suivante : ' à ce sujet le vendeur déclare avoir résilié les baux en cours (...)' et 'en outre, le vendeur s'engage à faire procéder à ses frais à l'arrêt définitif de l'installation à usage de fonderie actuellement exploitée sur le site et à la remise en état du site au plus tard dans le délai ci-dessus prévue pour l'entrée en jouissance. A cet effet, le vendeur a notifié au préfet par lettre recommandée avec avis de réception du 7 janvier 2016 la date de l'arrêt de l'exploitation qui devra avoir lieu au plus tard le 31 juillet 2016 en indiquant dans la notification, conformément à l'article R 512-66-1 du code de l'environnement, les mesures prévues pour assurer la mise en sécurité du site'.

En conséquence, la clause pénale avait pour vocation de sanctionner l'absence de diligence du vendeur pour libérer les lieux et le remettre en état dans les conditions prévues par le contrat et le code de l'environnement.

Entre le 31 juillet 2016 et le 30 mars 2017, il s'est écoulé 242 jours.

En application de la clause pénale stipulée au contrat, le montant de l'indemnité due à la SCI Hertus s'élève donc à 96 800 €.

Si la clause pénale précise qu'elle est stipulée non réductible même en cas de libération partielle du bien, cette clause est réputée non écrite au regard des dispositions de l'article 1152 du code civil dont la teneur a été rappelée ci dessus.

Cependant, la réduction des obligations résultant d'une clause pénale, manifestement excessive constitue une simple faculté, le juge n'étant pas tenu, lorsqu'il fait application pure et simple de la convention, de motiver spécialement la décision par laquelle il refuse de modifier le montant de la «peine» forfaitairement prévue par le contrat.

En l'espèce, il n'y a pas lieu de modérer la clause pénale dont le montant n'est pas excessif, si on considère qu'elle avait vocation à garantir à l'acheteur la possibilité de débuter immédiatement l'activité économique expressément entrée dans le champs contractuel, que le vendeur avait près de six mois pour s'y préparer et que la SCI Hertus a été contrainte d'attendre près de sept mois et demi pour pouvoir commencer l'activité pour laquelle elle avait acheté.

En conséquence, la somme due par la SARL LG Consult au titre de la clause pénale s'élève à la somme de 96 800 €.

Selon le contrat de vente, le vendeur a affecté, spécialement à titre de gage et nantissement au profit de l'acquéreur qui l'a acceptée, une somme de 12 000 € jusqu'à libération des lieux. Le contrat stipule que le séquestre sera déchargé de sa mission par remise de la somme au vendeur sur justification de la libération des lieux à la date convenue et à l'acquéreur directement et hors la présence du vendeur à concurrence des indemnités qui lui seront dues sur la présentation d'un exploit d'huissier constatant la non libération des lieux par le vendeur à la date prévue.

Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a constaté que la SCI Hertus s'engageait dans ses écritures à donner mainlevée de la somme de 12000 € séquestrée par le notaire.

En sus de l'indemnité stipulée par la clause pénale, la SCI Hertus sollicite la confirmation du jugement en ce qu'il a condamné la SCI LG Consult à lui payer une somme de 43 332,48 € au titre des travaux de nettoyage du site et son infirmation en ce qu'il l'a déboutée de sa demande de dommages-intérêts en réparation de son préjudice moral.

En cas d'inexécution d'une obligation contractuelle, le créancier ne peut demander, en sus de la clause pénale des dommages et intérêts, quand bien même la somme prévue par le contrat à titre de dommages et intérêts ne couvrirait pas tous ses dommages, sauf si l'indemnisation est allouée pour un préjudice distinct de celui qui est réparé forfaitairement par la clause pénale.

Il lui appartient cependant de démontrer que les préjudices dont il demande réparation sont distincts de ceux réparés par l'indemnité stipulée à titre de clause pénale.

En l'espèce, la somme de 43 332,48 € est sollicitée en réparation de l'inexécution de l'obligation de délivrance et la somme de 20 000 € en réparation d'un préjudice moral.

Les frais de remise en état sont distincts du préjudice réparé par la clause pénale qui ne concerne que le retard dans l'exécution.

Ils sont dus, dès lors que la venderesse s'était expressément engagée à délivrer un bien prêt à l'usage, à savoir l'exploitation d'une unité de fabrication de cosmétiques, qu'il est démontré que la SCI Hertus a été contrainte de parfaire le nettoyage et que cette opération lui a coûté la somme de 43 332,48 €.

Quant au préjudice moral, si une personne morale peut, à l'instar d'une personne physique, subir un préjudice de nature morale, encore faut-il qu'elle en établisse la réalité. Il lui revient de démontrer que l'inexécution par son co-contractant de ses obligations a affecté sa réputation, son image ou son fonctionnement.

En l'espèce, s'il est démontré que la société Only fragrance n'a pu exploiter le site dès le 1er août 2016, la clause pénale a été expressément stipulée afin de compenser le retard de délivrance, lequel comprend l'aspect immatériel du préjudice causé par ce retard.

Dans ces conclusions, la SCI Hertus ne spécifie pas la nature du préjudice moral dont elle demande réparation, insistant uniquement sur la mauvaise foi de la SARL LG Consult dans l'exécution de ses obligations. Cependant, elle ne démontre par aucune pièce que cette inexécution procédait d'un dessein de lui nuire et n'établit pas la réalité d'une atteinte à sa réputation ou son image.

Au regard de ces éléments, le jugement sera confirmé en ce qu'il a rejeté la demande de dommages-intérêts au titre d'un préjudice moral.

Sur les dépens et frais irrépétibles

Les dispositions du jugement relatives aux dépens et aux frais irrépétibles sont confirmées.

La SARL LG Consult, qui succombe, supportera la charge des entiers dépens d'appel et n'est pas fondée à solliciter une indemnité au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

L'équité justifie d'allouer à la SCI Hertus une indemnité de 3 000 € au titre des frais irrépétibles exposés devant la cour.

Par ces motifs

La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort

Confirme le jugement en ce qu'il a retenu la responsabilité contractuelle de la SCI Ipso, dit que la clause de non garantie des vices apparents ne s'applique pas et qu'aucune circonstance extérieure n'exonère la SCI Ipso de sa responsabilité, condamné la SCI Ipso à payer à la SCI Hertus la somme de 43 332,48 € en réparation du préjudice résultant des frais de remise en état,

constaté que la SCI Hertus s'engage dans ses écritures à donner mainlevée de la somme de 12 000 € séquestrée par le notaire, débouté la SCI Hertus de sa demande de dommages-intérêts au titre d'un préjudice moral, rejeté tout demande plus ample ou contraire, condamné la SCI Ipso à payer à la SCI Hertus une indemnité de 2 000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens ;

L'infirme en ce qu'il a condamné la SCI Ipso à payer à la SCI Hertus la somme de 54 400 € au titre de la clause pénale stipulée au contrat ;

Statuant à nouveau sur le point infirmé et y ajoutant,

Condamne la SARL Lg Consult, venant aux droits de la SCI Ipso à payer à la SCI Hertus la somme de 96 800 € au titre de la clause pénale stipulée au contrat ;

Déboute la SARL LG Consult de sa demande au titre des frais irrépétibles exposés devant la cour ;

Condamne la SARL LG Consult à payer à la SCI Hertus une indemnité de 3 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais exposés devant la cour ;

Condamne la SARL LG Consult aux entiers dépens d'appel et accorde aux avocats, qui en ont fait la demande, le bénéfice de l'article 699 du code de procédure civile.