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Décisions

CA Pau, 2e ch - sect. 1, 16 septembre 2024, n° 23/00763

PAU

Arrêt

Autre

CA Pau n° 23/00763

16 septembre 2024

LB/ND

Numéro 24/2749

COUR D'APPEL DE PAU

2ème CH - Section 1

ARRET DU 16/09/2024

Dossier : N° RG 23/00763 - N° Portalis DBVV-V-B7H-IPCM

Nature affaire :

Demande en paiement relative à un autre contrat

Affaire :

S.E.L.A.R.L. EKIP'

C/

S.A.S. CPP DECORATION

Grosse délivrée le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

A R R E T

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 16 septembre 2024, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile.

* * * * *

APRES DÉBATS

à l'audience publique tenue le 27 Mai 2024, devant :

Madame Laurence BAYLAUCQ, magistrat chargé du rapport,

assistée de Madame Nathalène DENIS, Greffière présente à l'appel des causes,

Laurence BAYLAUCQ, en application des articles 805 et 907 du Code de Procédure Civile et à défaut d'opposition a tenu l'audience pour entendre les plaidoiries, en présence de Joëlle GUIROY et en a rendu compte à la Cour composée de :

Madame Laurence BAYLAUCQ, Conseillère faisant fonction de Présidente

Madame Joëlle GUIROY, Conseillère

Monsieur Philippe DARRACQ, Conseiller

qui en ont délibéré conformément à la loi.

dans l'affaire opposant :

APPELANTE :

S.E.L.A.R.L. EKIP'

immatriculée au RCS de Bordeaux sous le n° 453 211 393, dont le siège social est situé [Adresse 3], prise en la personne de Maître [P] [B], prise en son établissement secondaire de [Localité 7] situé [Adresse 4],

Agissant ès qualités de Liquidateur de la SARLU BARBE,

société à responsabilité limitée à associé unique

immatriculée au RCS de Tarbes sous le n° 531 487 775, dont le siège social est situé [Adresse 2]

fonctions à elle conférées par jugement du tribunal de Commerce de Tarbes du 16 mai 2022

Représentée par Me Camille ESTRADE, avocat au barreau de Pau

INTIMEE :

S.A.S. CPP DECORATION

prise en la personne de son représentant légal, immatriculée au RCS de Pau sous le n° 0960980396

[Adresse 1]

[Localité 5]

Représentée par Me Céline PUCHEU-HORT de la SELARL CÉLINE PUCHEU-HORT, avocat au barreau de Tarbes

sur appel de la décision

en date du 20 JUIN 2022

rendue par le TRIBUNAL DE COMMERCE DE TARBES

RG : 2021000774

EXPOSE DU LITIGE :

La société Barbe, dont le siège social est situé à [Localité 6] exerçait l'activité de travaux de peinture, sol, pose de parquet et ravalement de façade. Dirigée par M. [U] [M] elle était une filiale du groupe [M], détenue à 100% par la SASU La Source, société holding dont M. [M] détient 100% des parts. Le groupe [M] regroupe plusieurs sociétés ayant chacune une activité dans le secteur du bâtiment.

Dans le cadre de son activité la société Barbe a passé des commandes de produits auprès de la société CPP Décoration, spécialisée dans le commerce de gros appareils sanitaires et de produits de décoration.

Suite à la requête déposée par la société CPP Décoration tendant au paiement de factures, par ordonnance du 11 février 2021, le Président du tribunal de commerce de Tarbes a enjoint à la SARLU Barbe de payer à la société CPP Décoration la somme principale de 18.971,97 euros, les sommes de 3.794,39 euros à titre de clause pénale, et de 320 euros à titre d'indemnité forfaitaire outre les intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure et les dépens de 33,47 euros TTC.

Cette ordonnance a été signifiée par acte d'huissier de justice du 8 mars 2021 à la société Barbe qui a formé opposition, faisant valoir que la société CPP Décoration lui avait facturé des marchandises qui ne lui étaient pas destinées et que malgré leurs relances elle n'avait pas pu obtenir les documents contractuels correspondant aux marchandises facturées.

La SARLU Barbe a fait l'objet d'une liquidation judiciaire simplifiée par jugement du 16 mai 2022 du tribunal de commerce de Tarbes qui a désigné la SELARL EKIP' en qualité de liquidateur sur résolution du plan de redressement dont elle avait fait l'objet.

Par jugement du 20 juin 2022, le tribunal de commerce de Tarbes a :

Dit que le présent jugement se substitue à l'ordonnance présidentielle du 11 février 2021 portant le numéro de répertoire général 2021000247,

Condamné la SARL Barbe à payer à la SAS CPP Décoration la somme en principal de dix-huit-mille-neuf-cent-soixante-et-onze euros et quatre-vingt-dix-sept centimes (18.971,97 €),

Condamné la SARL Barbe à payer à la SAS CPP Décoration les intérêts au taux légal produits à compter de la mise en demeure du 22 mars 2021,

Débouté la SAS CPP Décoration de sa demande de paiement au titre de la clause pénale,

Condamné la SARL Barbe à payer à la SAS CPP Décoration l'indemnité forfaitaire d'un montant de trois-cent-vingt euros (320 €),

Dit irrecevable la demande reconventionnelle formulée par la SARL Barbe,

Débouté la SARL Barbe de toutes ses demandes, fins et conclusions,

Débouté les parties pour le reste et le surplus de leurs demandes,

Condamné la SARL Barbe à payer à la SAS CPP Décoration la somme de mille-cinq-cents euros (1.500 €) au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Dit que l'exécution provisoire est de droit,

Condamné la SARL Barbe aux entiers dépens de l'instance, taxés et liquidés pour ce qui concerne le greffe à la somme de 105,44 € TTC.

Par déclaration en date du 14 mars 2023, la SELARL EKIP' agissant ès-qualités de liquidateur de la SARL Barbe a relevé appel de ce jugement.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 10 avril 2024.

***

Vu les dernières conclusions de la SELARL EKIP', agissant en qualité de liquidateur de la SARLU Barbe, notifiées le 17 octobre 2023 aux termes desquelles elle demande à la cour de :

Vu les articles 455 et 458 du code de procédure civile

Vu les articles 1302 et suivants, 1353 du Code civil

Vu la jurisprudence précitée.

In limine litis

Annuler le jugement entrepris pour défaut de motivation,

Sur le fond,

Dire et juger recevable et fondé l'appel qu'elle a interjeté ès-qualités de liquidateur judiciaire de la société Barbe.

Statuant à nouveau,

Réformer le jugement entrepris en ce qu'il a :

Dit que le présent jugement se substitue à l'ordonnance présidentielle du 11/02/2021,

portant le numéro de répertoire général 2021000247.

Condamné la SARL BARBE à payer à la SAS CPP DÉCORATION la somme en

principal de 18 971,97 €.

Condamné la SARL BARBE à payer à la SAS CPP DÉCORATION les intérêts au

taux légal produits à compter de la mise en demeure du 22/03/2021.

Condamné la SARL BARBE à payer à la SAS CPP DÉCORATION l'indemnité forfaitaire d'un montant de 320 €.

Dit irrecevable la demande reconventionnelle formulée par la SARL BARBE.

Débouté la SARL BARBE de toutes ses demandes, fins et conclusions.

Condamné la SARL BARBE à payer à la SAS CPP DÉCORATION la somme de 1500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Débouter la société CPP DÉCORATION de ses demandes,

Faire droit à sa demande reconventionnelle en paiement des factures ès qualités sur le fondement de la répétition de l'indu,

Prononcer la compensation judiciaire entre les sommes réclamées par la société CPP

DÉCORATION et les sommes dues à la SARL BARBE.

En conséquence, condamner la société CPP DÉCORATION à lui payer ès-qualités une somme de 34 721,02€, avec intérêts au taux légal qui commenceront à courir au plus tard à la date du 28 mars 2022.

À titre infiniment subsidiaire,

Réformer le jugement qui a prononcé des condamnations contre la SARL BARBE.

Dire et juger qu'aucune condamnation ne saurait être prononcée à son encontre ès-qualités du fait du prononcé de la liquidation judiciaire.

Fixer au passif de la liquidation judiciaire la créance de la société CPP DÉCORATION dans la limite de la somme de 18 971,97 € correspondant au montant

déclaré.

Débouter la société CPP DÉCORATION du surplus.

En tout état de cause,

Condamner la société CPP DÉCORATION à payer à la SELARL EKIP' ès-qualités

une indemnité de 3000€ sur le fondement de l'article 700 du CPC en règlement des

frais irrépétibles exposés en cause d'appel.

Condamner la société CPP DÉCORATION aux entiers dépens, de première instance

et d'appel avec distraction profit de Maître Camille ESTRADE en application de l'article 699 du CPC.

Débouter la société CPP DÉCORATION de toutes ses demandes, fins et prétentions

contraires

Vu les conclusions de la SAS CPP Décoration notifiées le 17 août 2023 aux termes desquelles elle demande à la cour de :

Vu l'article L 441-9 du Code de Commerce,

Vu les articles 1103 et 1231-1 du Code civil,

Vu les articles 1405 à 1422 du Code de procédure civile,

Vu l'ordonnance d'injonction de payer en date du 4 février 2020

Vu le jugement du Tribunal de Commerce de TARBES du 20 juin 2022

Vu les pièces versées aux débats,

Débouter la SELARL EKIP' de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions

Confirmer le jugement du Tribunal de Commerce de TARBES en date du 20 juin

2022 en toutes ses dispositions

Y ajoutant, condamner la SELARL EKIP', ès-qualités de liquidateur de la SARL BARBE au règlement de la somme supplémentaire de 3 000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile au titre des frais irrépétibles exposés en cause d'appel.

MOTIFS :

Sur la nullité du jugement

Avant toute défense au fond, la SELARL EKIP' sollicite l'annulation du jugement déféré pour défaut de motivation au visa de l'article 455 du code de procédure civile et 6-1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme. Elle explique que le tribunal de commerce a jugé irrecevable sa demande reconventionnelle en compensation et l'en a déboutée sans la moindre motivation en violation de ces dispositions.

La SAS CPP Décoration répond que le jugement déféré est parfaitement motivé en fait et en droit et que c'est en précisant que les bons de commande, les bons de livraison et les factures de la SARL CPP Décoration étaient en cohérence qu'il a motivé sa décision pour rejeter la demande reconventionnelle de compensation.

Il résulte des dispositions des articles 455 et 458 du code de procédure civile que le jugement doit être motivé, cette prescription devant être observée à peine de nullité.

Le défaut de réponse à conclusions constitue un défaut de motif.

En l'espèce si le tribunal de commerce a, dans le jugement déféré, motivé sa décision en ce qu'elle a statué sur la demande principale de la société CCP Décoration de condamnation de la société Barbe au paiement de la somme de 18.971,97 euros, il n'a pas en revanche motivé sa décision lorsqu'il a statué sur la demande reconventionnelle de la société Barbe. Sur ce point la décision critiquée se borne à indiquer en une phrase « Le tribunal dira la SARL BARBE irrecevable en sa demande reconventionnelle », sans donner aucune explication sur le motif de cette décision.

Par conséquent il convient, en application des dispositions précitées, d'annuler le chef du jugement déféré qui a dit irrecevable la demande reconventionnelle formulée par la SARL Barbe.

Dans cette hypothèse, conformément à l'article 562 alinéa 2 du code de procédure civile, l'effet dévolutif de l'appel s'opère relativement au chef de décision annulé.

Sur la demande principale en paiement et les demandes reconventionnelles

A titre liminaire il convient d'observer qu'il n'a pas été relevé appel du chef de décision ayant débouté la société CPP Décoration de sa demande en paiement au titre de la clause pénale, qui n'est par conséquent pas dévolu à la cour.

En outre sur la recevabilité de l'opposition à l'ordonnance d'injonction de payer du 11 février 2021 qui n'est pas critiquée, il convient de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a dit qu'il se substituait à l'ordonnance présidentielle du 11 février 2021 ;

L'appelante sollicite sur le fond le débouté de la société CPP Décoration de ses demandes.

Au visa de l'article 1353 du code civil, elle fait valoir qu'il appartient à la société CPP Décoration de démontrer la réalité de sa créance ce qu'elle échoue à prouver ; elle soutient que la société intimée ne démontre ni le principe de sa créance, ni son bien-fondé à hauteur des montants sollicités alors qu'aucun document contractuel signé par le dirigeant de la société Barbe ou une personne qui a qualité, dûment habilitée, ne prouve que le contrat a été passé. Elle précise que des bons de commande produits par la partie demanderesse sont signés par des personnes qui ne sont pas des salariés habilités par la société Barbe qui n'a donc pas passé valablement commande. Elle ajoute que devrait être produit un bon de livraison signé par son débiteur et sans réserve et que le fait que les sociétés aient entretenu des relations commerciales régulières ou « une relation de confiance » (ce qu'elle conteste), ne dispense pas la demanderesse de la charge de la preuve.

La société CCP Décoration sollicite la confirmation du jugement déféré en toutes ses dispositions et notamment en ce qu'elle a condamné la société Barbe à lui payer la somme de 18.971,97 euros.

Elle fait valoir qu'elle produit aux débats les factures correspondant aux commandes passées par la société Barbe ainsi que les bons de livraison correspondants. Elle explique que les sous-factures font référence aux noms des chantiers concernés donnés par la société Barbe à la suite de bon de commande à son entête, ou bien aux termes de courriels précisant qu'il s'agit de commandes passées pour l'entreprise Barbe pour tel chantier spécifique. Elle indique qu'il résulte de l'examen détaillé des pièces produites qu'elle s'est toujours assurée que les commandes étaient passées par la société Barbe. Elle ajoute qu'il ne lui a jamais été signalé de difficulté quant au défaut de qualité des salariés qui passaient commande pour la société Barbe, et relève que les salariés du groupe [M] semblent pouvoir passer d'une entité du groupe à l'autre. Elle considère ainsi rapporter la preuve de sa créance.

L'article 1353 du code civil dispose en son alinéa 1er que celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver.

Tous les modes de preuve sont admissibles en matière commerciale.

En l'espèce, la société CPP Décoration produit des bons de commande comportant l'entête de la société Barbe, le nom du chantier et le nom du salarié en bas de page, ainsi que des courriels aux fins de commandes visant expressément le nom du chantier concerné et/ou celui de la société Barbe dans le corps du message ou son intitulé. Les factures et bons de livraison émis par la société CPP Décoration se réfèrent très précisément aux chantiers visés par la société Barbe dans les bons de commande qu'elle a émis ou dans les commandes passées par courriels. Les sous-factures correspondant aux factures n° F200200089, n°2002200200, ainsi que la facture n°200200373 se réfèrent aux numéros de commande, noms des chantiers transmis par la société Barbe, aux numéros des bons de livraison et listent précisément les matériels facturés qui correspondent à ceux commandés par des bons de commande et courriels correspondants et à ceux livrés. L'appelante ne peut prétendre que les commandes passées par [C] [D] ne l'ont pas été pour le compte de la société Barbe mais pour celui d'une autre société du groupe [M] alors que les bons de commande sur lesquels figurent son nom sont émis à l'entête de la société Barbe, comme par exemple les bons de commande LAT 19 12 0038, LAT 19 12 0034 avec mention du chantier concerné, et qu'elle a envoyé un courriel le 19 décembre 2019 de commande en précisant « pour le chantier Barbé/Les Agalés ». De même Mr [S] [E] a passé une commande par courriel le 5 décembre 2019 visant dans son objet « Commande SAS BARBE-Diocese infirmerie ». Il en résulte que si ces salariés étaient embauchés par d'autres sociétés du groupe [M], ils ont néanmoins passé des commandes pour le compte de la société Barbe appartenant au même groupe.

Au regard de ces éléments, la société CPP Décoration rapporte la preuve de l'obligation contractuelle dont elle réclame l'exécution à l'encontre de la société Barbe dans son principe et son quantum par la production de factures, bons de commande, courriels de commande, et bons de livraison correspondants.

La SELARL EKIP' ès-qualités de liquidateur de la société Barbe sollicite à titre subsidiaire au visa des articles 1348, 1302 et suivants du code civil, la compensation des sommes réclamées par la société CPP Décoration (18.971,97 euros) avec les sommes dues selon elle à la société Barbe (53.953,30 euros) au titre de la restitution de sommes indûment payées. Elle explique avoir justifié en première instance avoir procédé par erreur au règlement de factures pour un montant total de 53.953,30 euros au profit de la société CPP Décoration alors que les sociétés qui avaient passé commande sont les sociétés EB SOLS et SARL EBP. Elle ajoute que la société CPP Décoration n'en n'a pas disconvenue. Elle considère que sa demande en compensation est légitime sur le fondement de la répétition de l'indu.

Toutefois elle ne produit aucune pièce à l'appui de ses allégations selon lesquelles la société Barbe a réglé par erreur des factures pour un montant total de 53.953,30 euros alors que les commandes avaient été passées par les sociétés EB SOLS et EBP. Ce fait est contesté par la société CPP Décoration contrairement aux allégations de l'appelante.

Faute de démontrer l'existence de paiements indus la SELARL EKIP' ès-qualités échoue à démontrer l'existence d'une créance de la société Barbe à l'encontre de la société CPP Décoration. Elle sera donc déboutée de sa demande de compensation et de condamnation de la société CPP Décoration au paiement de la somme de 34.721,02 euros.

A titre subsidiaire, la SELARL EKIP' fait valoir qu'aucune condamnation ne pourra être prononcée contre le liquidateur concluant ès-qualités en faisant valoir que le jugement d'ouverture de la procédure collective emporte l'interdiction de payer toute créance née antérieurement au jugement d'ouverture et emporte interdiction également de payer certaines créances nées après. Elle ajoute que la créance de la société CPP Décoration ne pourra être admise au passif de la liquidation judiciaire pour un montant supérieur au montant déclaré, à savoir dans la limite de 18.971,97 euros. Elle soutient que les intérêts au taux légal, l'indemnité forfaitaire de 320 euros n'ont pas été déclarés au passif de la liquidation judiciaire. Elle ajoute que l'indemnité d'article 700 et les dépens auraient dû être déclarés à la procédure collective, précisant que la cour de cassation juge désormais, concernant les contentieux initiés avant le jugement comme en l'espèce et pour lesquels la décision est prononcée ensuite, que la créance de dépens et d'article 700 est jugée comme antérieure.

La société CPP Décoration explique avoir déclaré, par l'intermédiaire de la SA Pouey international, mandatée à cet effet, sa créance à hauteur de 18.971,97 euros dès le 8 juin 2022 auprès de la SELARL EKIP' liquidateur judiciaire par lettre recommandée avec accusé de réception. Elle ajoute que par courrier du 24 juin, la SA Pouey international a adressé à la SELARL EKIP' le jugement déféré lui demandant de bien vouloir en prendre note.

Il convient de dire tout d'abord qu'il ne peut être prononcé de condamnation à paiement de la SELARL EKIP' ès-qualités en application des dispositions des articles L. 622-7 et L. 622-22 du code de commerce s'agissant de la créance de la société CPP Décoration, la créance ne pouvant qu'être constatée et fixée dans son montant au passif de la procédure collective. Le jugement déféré sera donc infirmé en ce qu'il a condamné la société Barbe, en violation de ces dispositions, à payer à la SAS CPP Décoration la somme de 18.971,97 euros, les intérêts légaux ayant couru à compter du 22 mars 2021, la somme de 320 euros au titre de l'indemnité forfaitaire, la somme de 1.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et les entiers dépens

Il résulte des pièces 12 à 14 de la société CPP Décoration qu'elle a déclaré sa créance à hauteur de la somme de 18.971,97 euros par courrier recommandé avec avis de réception du 8 juin 2022 adressé par la société Pouey International qu'elle avait mandatée à la SELARL EKIP' mais non les intérêts, l'indemnité de 320 euros au titre de l'indemnité forfaitaire, les dépens et l'indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Le courrier du 24 juin 2022 adressé à la SELARL EKIP se contente de transmettre la copie du jugement prononcé par le tribunal de commerce de Tarbes le 20 juin 2022 et demande d'en prendre note. Il ne s'agit pas d'une déclaration de créance complémentaire.

Pour fixer le montant de la créance, la juridiction doit le faire dans la limite du montant déclaré c'est-à-dire en l'espèce le montant de 18.971,97 euros.

En conséquence, il convient de fixer au passif de la procédure collective de la SARLU Barbe la créance de la SAS CPP Décoration à la somme de 18.971,97 euros et de débouter la société CPP Décoration de ses demandes au titre des intérêts et de l'indemnité forfaitaire.

Sur les dépens et les frais irrépétibles

En l'absence de déclaration de la créance de dépens à la procédure collective de la société Barbe, les dépens d'instance et d'appel ne peuvent être fixés au passif de celle-ci. Par conséquent, eu égard à la solution du litige, il convient de dire que chaque partie conservera la charge de ses propres dépens. La demande de Maître Estrade tendant au bénéfice des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile sera rejetée.

Pour le même motif de l'absence de déclaration au passif de la procédure collective la société CPP Décoration sera déboutée de ses demandes au titre des frais irrépétibles fondées sur l'article 700 du code de procédure civile.

Eu égard à la solution du litige, la SELARL EKIP' ès-qualités de liquidateur de la société Barbe sera également déboutée de sa demande fondée sur ces dispositions.

PAR CES MOTIFS,

La cour, statuant publiquement par mise à disposition au greffe, par arrêt contradictoire et en dernier ressort, dans les limites de sa saisine,

Prononce l'annulation du chef du jugement rendu le 20 juin 2022 par le tribunal de commerce de Tarbes qui a dit irrecevable la demande reconventionnelle formulée par la SARL Barbe ;

Confirme le jugement déféré en ce qu'il a dit qu'il se substituait à l'ordonnance présidentielle du 11 février 2021 ;

Infirme le jugement déféré en ce qu'il a condamné la SARL Barbe à payer à la SAS CPP Décoration la somme de 18.971,97 euros, les intérêts légaux ayant couru à compter du 22 mars 2021, la somme de 320 euros au titre de l'indemnité forfaitaire, la somme de 1.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et les entiers dépens ;

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Fixe au passif de la procédure collective de la SARLU Barbe la créance de la SAS CPP Décoration à la somme de 18.971,97 euros ;

Déboute la société CPP Décoration de ses demandes au titre des intérêts, de l'indemnité forfaitaire et des indemnités au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Déboute la SELARL EKIP' ès-qualités de liquidateur de la société Barbe de ses demandes en paiement des factures sur le fondement de la répétition de l'indu et de compensation judiciaire ;

En conséquence, déboute la SELARL EKIP' ès-qualités de liquidateur de la société Barbe de sa demande de condamnation de la société CPP Décoration à lui payer une somme de 34721,02€, avec intérêts au taux légal qui commenceront à courir au plus tard à la date du 28 mars 2022 ;

Dit que chaque partie conservera la charge de ses propres dépens.

Rejette la demande de Maître Estrade tendant au bénéfice des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile ;

Rejette les demandes formulées sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Le présent arrêt a été signé par Madame Laurence BAYLAUCQ, Conseillère faisant fonction de Présidente, et par Madame Nathalène DENIS, greffière suivant les dispositions de l'article 456 du Code de Procédure Civile.

La Greffière, La Présidente,