Décisions
CA Montpellier, ch. com., 17 septembre 2024, n° 24/01801
MONTPELLIER
Arrêt
Autre
ARRÊT n°
Grosse + copie
délivrées le
à
COUR D'APPEL DE MONTPELLIER
Chambre commerciale
ARRET DU 17 SEPTEMBRE 2024
Numéro d'inscription au répertoire général :
N° RG 24/01801 - N° Portalis DBVK-V-B7I-QGES
Décision déférée à la Cour :
Jugement du 27 MARS 2024
TRIBUNAL DE COMMERCE DE PERPIGNAN
N° RG 2023F01197
APPELANTE :
SCI TAILLOT prise en la personne de son représentant légal en exercice, domicilié en cette qualité
[Adresse 2]
[Localité 7]
Représentée par Me Philippe SENMARTIN de la SELARL CSA, avocat au barreau de MONTPELLIER
INTIMES :
Monsieur [X] [I]
[Adresse 3]
[Localité 5]
Assigné le 17 avril 2024 à étude
SARL [B] [Y] prise en la personne de son représentant légal en exercice, domicilié en cette qualité au siège social
[Adresse 1]
[Localité 7]
Assignée le 17 avril 2024 à personne habilitée
S.E.L.A.R.L. MJSA prise en la personne de Maître [L] [U], en sa qualité de liquidateur judiciaire à la liquidation de la société [B] [Y], nommé par jugement du Tribunal de Commerce de PERPIGNAN du 16 Novembre 2022, domicilié en cette qualité
[Adresse 6]
[Adresse 6]
[Localité 4]
Assignée le 17 avril 2024 à personne habilitée
S.E.L.A.R.L. MJSA prise en la personne de Maître [L] [U], en sa qualité de liquidateur judiciaire à la liquidation judiciaire de la SCI TAILLOT, nommé par Jugement du Tribunal de Commerce de PERPIGNAN du 15 Mars 2023, domicilié en cette qualité
[Adresse 6]
[Adresse 6]
[Localité 4]
Assignée le 17 avril 2024 à personne habilitée
Ordonnance de clôture du 25 Juin 2024
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 02 Juillet 2024, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Danielle DEMONT, Présidente de chambre chargée du rapport et Mme Anne-Claire BOURDON, Conseillère.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Mme Danielle DEMONT, Présidente de chambre
Mme Anne-Claire BOURDON, Conseillère
M. Patrice GELPI, conseiller désigné par ordonnance du Premier président de la cour d'appel de Montpellier du 4 avril 2024
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Mme Audrey VALERO
Ministère public :
L'affaire a été communiquée au ministère public, qui a fait connaître son avis le 3 mai 2024.
ARRET :
- Rendue par défaut
- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;
- signé par Mme Danielle DEMONT, présidente de chambre, et par Mme Audrey VALERO, greffière.
FAITS et PROCEDURE
La SCI Taillot, créée en 2006, est une SCI familiale composée de Mme [R] [Z], épouse [B], de M. [F] [B], et de leur fille, [G] [B].
La SARL [B] [Y], domiciliée [Adresse 2], à [Localité 7], inscrite au RCS de Perpignan sous le n° 488 855'008, exerçait une activité de crêperie-restaurant sous l'enseigne «'La Crêpe Rit'».
Le capital social était réparti entre':
- Mme [G] [B] avec 25 parts sociales (cogérante),
- M. [P] [Y]': 25 parts sociales (cogérant)
- Et Mme [R] [B]': 50 parts sociales.
La société [B] [Y] exploitait le fonds de commerce au sein d'un immeuble sis [Adresse 1], appartenant à la SCI Taillot depuis le 1er septembre 2017.
Aux termes d'un contrat de bail verbal passé entre la SCI Taillot et la société [B] [Y], celle-ci devait acquitter un loyer d'un montant de 500 € par mois, soit 6'000 € l'an.
Le 2 novembre 2022, Mme [G] [B] et M. [S] [Y] ont déposé auprès du greffe du tribunal de commerce de Perpignan, une déclaration de cessation des paiements et de liquidation judiciaire de la SARL [B] [Y].
Par jugement en date du 16 novembre 2022, le tribunal de commerce de Perpignan a prononcé la liquidation judiciaire de la société [B] [Y] et nommé la SELARL MJSA en la personne de M. [L] [U] en qualité de liquidateur.
Par procès-verbal de Me [N] daté du 22 décembre 2022, il a été constaté que les locaux de crêperie avaient été transformés par le bailleur, pour permettre la location d'appartements saisonniers ; M. [B] expliquant à l'huissier instrumentaire qu'il «'avait cassé le bail commercial le liant à la crêperie'».
Par exploit du 6 janvier 2023, le liquidateur, M. [U], a assigné la SCI Taillot devant le tribunal de commerce de Perpignan aux fins de voir prononcer l'extension de la procédure collective de la société [B] [Y] à la SCI Taillot, au visa de l'article L.621-2 du code de commerce, estimant que le gage des créanciers de la SARL avait été vidé de toute substance par les relations anormales entre la SARL et son bailleur.
Par jugement réputé contradictoire en date du 15 mars 2023, le tribunal de commerce de Perpignan a':
Vu l'article L 621-2 du code de commerce,
Le ministère public avisé, entendu,
- débouté la SCI Taillot de sa demande de renvoi de l'affaire devant le tribunal de commerce de Toulouse';
- constaté la confusion des patrimoines de la société [B] [Y] et la société Taillot';
- débouté la SCI Taillot de toutes ses demandes';
- prononcé l'extension de la procédure collective préalablement ouverte à l'encontre de la SARL [B] [Y] à la SCI Taillot,';
- confirmé la date de cessation des paiements au 2 novembre 2022 ;
- et ordonné l'emploi des dépens en frais privilégiés de liquidation.
Le 24 mars 2023, la SCI Taillot a relevé appel de ce jugement (n° RG 23/01615).
Par exploit du 3 avril 2023, la SCI Taillot a assigné la Selarl MJSA, en la personne de Me [U], en qualité de liquidateur de la société [B] [Y], devant le premier président de la cour d'appel de ce siège aux fins d'obtenir l'arrêt de l'exécution provisoire du jugement au visa de l'article R.661-14 du code de commerce (RG n°23/00058).
Par exploit du 13 avril 2023, elle a assigné en référé la société [B] [Y] et la société MJSA en qualité de liquidateur judiciaire de la société [B] [Y] (RG'n°23/00065).
Par ordonnance réputée contradictoire en date du 21 juin 2023, le délégataire du président de la cour d'appel de Montpellier a ordonné la jonction des dossiers, débouté la SCI Taillot de sa demande d'arrêt de l'exécution provisoire du jugement du 15 mars 2023 du tribunal de commerce de Perpignan, condamné la SCI Taillot aux dépens de l'instance, et dit n'y avoir lieu de faire application de l'article 700 du code de procédure civile.
Par arrêt du 17 octobre 2023 (RG n°23/01615), la cour d'appel de Montpellier a':
- rejeté la demande de médiation et la demande de renvoi de l'affaire devant le tribunal de commerce de Toulouse';
- confirmé le jugement du 15 mars 2023 en toutes ses dispositions';
- et dit que les dépens seront frais privilégiés de la procédure collective.
Le 30 octobre 2023 (RG n°23/05409), Mme [A] [K], épouse [E], a formé tierce opposition contre ledit arrêt, en qualité d'usufruitière des parts de la SCI Taillot.
Par ordonnance du 21 décembre 2023, le président de la chambre commerciale de la cour d'appel de Montpellier a prononcé la caducité partielle de la déclaration de tierce opposition à l'égard de la société [B] [Y], Mme [A] [E] n'ayant pas procédé par voie de signification de sa déclaration de tierce opposition dans le délai imparti.
Par arrêt du 27 juin 2024 (n° RG 24/00141), la cour d'appel de Montpellier a déclaré irrecevable la requête en déféré déposée plus de 15 jours après la date de l'ordonnance.
Par ordonnance du 15 novembre 2023, statuant sur une requête du liquidateur judiciaire, le juge-commissaire a désigné M. [X] [I] en qualité d'expert judiciaire aux fins d'effectuer une estimation des actifs immobiliers de la procédure et de tout autre bien appartenant à la SCI Taillot, qui n'aurait pas été porté à la connaissance du mandataire liquidateur.
Le 29 novembre 2023, la SCI Taillot et M. [F] [B] ont formé un recours contre cette ordonnance.
Par jugement réputé contradictoire en date du 27 mars 2024 le tribunal de commerce de Perpignan (le jugement déféré) a':
Vu les articles R.621-21, L.621-9 et L.640-1 du code de commerce,
Le ministère public entendu,
- déclaré recevable en la forme le recours formé par la société Taillot et M. [F] [B]';
- rejeté la demande de renvoi de l'affaire devant le tribunal de commerce de Toulouse';
- rejeté comme infondé ledit recours';
en conséquence,
- confirmé dans toutes ses dispositions, l'ordonnance du juge-commissaire, en date du 15 novembre 2023, numéro 2023JC1515';
- débouté la société Taillot de toutes ses demandes';
- et ordonné l'emploi des dépens en frais privilégiés de liquidation judiciaire.
Le 4 avril 2024, la SCI Taillot a relevé appel de ce jugement.
L'affaire a été fixée à bref délai.
Par conclusions du 15 mai 2024, elle demande à la cour, au visa des articles L.643-9, L.641-7, L.624-1 et L.624-2 du code de commerce, de l'article 6§1 de la Convention européenne des droits de l'Homme, de l'article 7-1 de l'ordonnance n°58-1270 du 22 décembre 1958 et de l'article L.111-6 du code de l'organisation judiciaire':
- d'infirmer le jugement entrepris';
- de renvoyer les parties devant le tribunal de commerce de Toulouse';
- de débouter la Selarl MJSA, ès qualités, de sa demande de désignation d'un expert';
- d'ordonner à la Selarl MJSA de communiquer sans délai au juge-commissaire ses propositions concernant la liste des créances';
- d'ordonner au juge-commissaire de décider de l'admission ou du rejet des créances dans les plus brefs délais';
- et de condamner la Selarl MJSA à lui payer la somme de 5'000 euros en application des articles 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance.
Dans son avis du 3 mai 2024, le ministère public a sollicité la confirmation du jugement attaqué, la SCI Taillot ne démontrant pas l'existence d'un conflit d'intérêt entre un conseiller de la chambre commerciale de la cour d'appel de Montpellier et la Selarl MJSA, liquidateur judiciaire des sociétés Taillot et [B] [Y].
Il est renvoyé, pour l'exposé exhaustif des moyens des parties, aux conclusions susvisées, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.
M. [X] [I], l'expert judiciaire désigné, assigné le 17 avril 2024 par acte déposé à l'étude, n'a pas constitué avocat.
La Selarl MJSA, en qualité de liquidateur judiciaire des sociétés [B] [Y] et Taillot, destinataire de la déclaration d'appel par acte d'huissier en date du 17 avril 2024, remis à personne morale, n'a pas constitué avocat.
La société [B] [Y], assignée le 17 avril 2024, n'a pas constitué avocat.
L'ordonnance de clôture est datée du 25 juin 2024.
MOTIFS
Sur la demande d'infirmation et de renvoi de l'affaire devant le tribunal de commerce de Toulouse
La SCI Taillot ne rapportant pas la preuve de l'existence d'un conflit d'intérêt entre l'un des conseillers, qui siège habituellement aux audiences de la chambre commerciale de céans, et le liquidateur, son conseil, la SCP SVA, ou encore Me [D] [C], la demande de renvoi dépourvue de fondement sera rejetée.
Ce conseiller ayant préféré, de sa propre initiative, se déporter, la demande est de surcroît sans objet.
Sur l'intérêt à agir du liquidateur judiciaire
La SCI Taillot fait valoir au soutien de son appel que le liquidateur n'a pas intérêt à agir ; et que les consorts [B], eu égard aux graves troubles psychologiques dont est affectée leur fille, au risque de perdre les biens immobiliers fruits d'une vie de travail et compte tenu de leur engagement par attestation à payer l'ensemble du passif de la société [B] [Y], ont payé 30'000 € sur le compte de liquidateur ; et que la Caisse d'épargne leur ayant réclamé de la somme de 141'597 € en qualité de cautions, ils ont payé 135'000 €.
Mais le tribunal a retenu à bon droit que la procédure de liquidation judiciaire de la société [B] [Y] a été étendue à la SCI Taillot par jugement du 15 mars 2023 du tribunal de commerce de Perpignan qui a été confirmé en appel ; qu'un pourvoi en cassation contre ledit arrêt n'a aucun effet suspensif à l'égard des effets de l'extension de la procédure collective à la SCI Taillot ; et que le passif de celle-ci s'ajouté au passif de la liquidation judiciaire de la société [B] [Y], de sorte que le liquidateur a intérêt, en cet état, à la requête qu'il a déposée aux fins de désignation d'un expert judiciaire en vue d'effectuer l'estimation des actifs immobiliers de la SCI Taillot.
Sur le caractère disproportionné de la demande d'expertise
La SCI Taillot soutient que le tribunal de commerce a prononcé l'extension sur la base de la déclaration de cessation des paiements effectuée par Mme [G] [B] pour un passif total de 17'419 € ; que le liquidateur a retenu des relations anormales et sollicité l'extension de la procédure collective, alors qu'au moins 71 % des créances déclarées sont des créances dont les bénéficiaires sont directement ou indirectement M. et Mme [B], ses père et mère ; que le liquidateur, le 23 mars 2023, a fini par communiquer l'état des créances de la société [B] [Y] dont le montant est de 35'900 € ; que la société Prefiloc a confirmé que la société [B] [Y] ne lui devait rien ; que le liquidateur, le 27 juillet 2023, a produit un nouvel état des créances intégrant le montant restant dû au titre du prêt contracté par la SCI Taillot en 2017 et la taxe foncière 2023, pour continuer sa politique de manipulation ; que l'état des créances produit devant la cour d'appel mentionne deux fois le même montant, cette fausse information reprise dans les conclusions adverses et constituant une escroquerie au jugement de la part du mandataire, la société MJSA.
Mais tous ces moyens sont en réalité des moyens qui pourraient avoir trait au pourvoi formé contre notre arrêt qui a confirmé l'extension de la procédure collective de la société [B] [Y] à la SCI Taillot.
Ils ne remettent pas en cause le bien-fondé de l'ordonnance rendue en ce qu'elle a justement retenu que l'état des créances de la société [B] [Y] étendues à la société Talliot fait apparaître un montant total du passif s'élevant à 155'759,45 €, et qu'il dépend de l'actif de cette procédure divers biens immobiliers sis à Formiguières appartenant à la SCI Taillot, de sorte que la demande d'expertise judiciaire afin d'estimer ces actifs immobiliers n'apparaît en rien disproportionnée.
Pour le surplus, le jugement déféré a exactement relevé en ses motifs que la SCI Taillot invoque une supposée escroquerie au jugement sans en tirer aucune conséquence, si ce n'est d'ordonner au liquidateur de communiquer sans délai au juge-commissaire ses propositions concernant la liste des créances et d'ordonner à ce dernier de décider de l'admission ou du rejet des créances dans les plus brefs délais, alors que ces demandes sont sans lien aucun avec le recours formé contre l'ordonnance du juge commissaire désignant un expert judiciaire afin d'estimer la valeur des immeubles appartenant la SCI Taillot et dont le tribunal a été saisi.
Le jugement déféré doit donc être entièrement confirmé.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement, par arrêt rendu par défaut,
Confirme le jugement rendu le 27 mars 2024 par le tribunal de commerce de Perpignan en toutes ses dispositions ;
Condamne la SCI Taillot aux dépens d'appel.
le greffier, la présidente,
Grosse + copie
délivrées le
à
COUR D'APPEL DE MONTPELLIER
Chambre commerciale
ARRET DU 17 SEPTEMBRE 2024
Numéro d'inscription au répertoire général :
N° RG 24/01801 - N° Portalis DBVK-V-B7I-QGES
Décision déférée à la Cour :
Jugement du 27 MARS 2024
TRIBUNAL DE COMMERCE DE PERPIGNAN
N° RG 2023F01197
APPELANTE :
SCI TAILLOT prise en la personne de son représentant légal en exercice, domicilié en cette qualité
[Adresse 2]
[Localité 7]
Représentée par Me Philippe SENMARTIN de la SELARL CSA, avocat au barreau de MONTPELLIER
INTIMES :
Monsieur [X] [I]
[Adresse 3]
[Localité 5]
Assigné le 17 avril 2024 à étude
SARL [B] [Y] prise en la personne de son représentant légal en exercice, domicilié en cette qualité au siège social
[Adresse 1]
[Localité 7]
Assignée le 17 avril 2024 à personne habilitée
S.E.L.A.R.L. MJSA prise en la personne de Maître [L] [U], en sa qualité de liquidateur judiciaire à la liquidation de la société [B] [Y], nommé par jugement du Tribunal de Commerce de PERPIGNAN du 16 Novembre 2022, domicilié en cette qualité
[Adresse 6]
[Adresse 6]
[Localité 4]
Assignée le 17 avril 2024 à personne habilitée
S.E.L.A.R.L. MJSA prise en la personne de Maître [L] [U], en sa qualité de liquidateur judiciaire à la liquidation judiciaire de la SCI TAILLOT, nommé par Jugement du Tribunal de Commerce de PERPIGNAN du 15 Mars 2023, domicilié en cette qualité
[Adresse 6]
[Adresse 6]
[Localité 4]
Assignée le 17 avril 2024 à personne habilitée
Ordonnance de clôture du 25 Juin 2024
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 02 Juillet 2024, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Danielle DEMONT, Présidente de chambre chargée du rapport et Mme Anne-Claire BOURDON, Conseillère.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Mme Danielle DEMONT, Présidente de chambre
Mme Anne-Claire BOURDON, Conseillère
M. Patrice GELPI, conseiller désigné par ordonnance du Premier président de la cour d'appel de Montpellier du 4 avril 2024
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Mme Audrey VALERO
Ministère public :
L'affaire a été communiquée au ministère public, qui a fait connaître son avis le 3 mai 2024.
ARRET :
- Rendue par défaut
- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;
- signé par Mme Danielle DEMONT, présidente de chambre, et par Mme Audrey VALERO, greffière.
FAITS et PROCEDURE
La SCI Taillot, créée en 2006, est une SCI familiale composée de Mme [R] [Z], épouse [B], de M. [F] [B], et de leur fille, [G] [B].
La SARL [B] [Y], domiciliée [Adresse 2], à [Localité 7], inscrite au RCS de Perpignan sous le n° 488 855'008, exerçait une activité de crêperie-restaurant sous l'enseigne «'La Crêpe Rit'».
Le capital social était réparti entre':
- Mme [G] [B] avec 25 parts sociales (cogérante),
- M. [P] [Y]': 25 parts sociales (cogérant)
- Et Mme [R] [B]': 50 parts sociales.
La société [B] [Y] exploitait le fonds de commerce au sein d'un immeuble sis [Adresse 1], appartenant à la SCI Taillot depuis le 1er septembre 2017.
Aux termes d'un contrat de bail verbal passé entre la SCI Taillot et la société [B] [Y], celle-ci devait acquitter un loyer d'un montant de 500 € par mois, soit 6'000 € l'an.
Le 2 novembre 2022, Mme [G] [B] et M. [S] [Y] ont déposé auprès du greffe du tribunal de commerce de Perpignan, une déclaration de cessation des paiements et de liquidation judiciaire de la SARL [B] [Y].
Par jugement en date du 16 novembre 2022, le tribunal de commerce de Perpignan a prononcé la liquidation judiciaire de la société [B] [Y] et nommé la SELARL MJSA en la personne de M. [L] [U] en qualité de liquidateur.
Par procès-verbal de Me [N] daté du 22 décembre 2022, il a été constaté que les locaux de crêperie avaient été transformés par le bailleur, pour permettre la location d'appartements saisonniers ; M. [B] expliquant à l'huissier instrumentaire qu'il «'avait cassé le bail commercial le liant à la crêperie'».
Par exploit du 6 janvier 2023, le liquidateur, M. [U], a assigné la SCI Taillot devant le tribunal de commerce de Perpignan aux fins de voir prononcer l'extension de la procédure collective de la société [B] [Y] à la SCI Taillot, au visa de l'article L.621-2 du code de commerce, estimant que le gage des créanciers de la SARL avait été vidé de toute substance par les relations anormales entre la SARL et son bailleur.
Par jugement réputé contradictoire en date du 15 mars 2023, le tribunal de commerce de Perpignan a':
Vu l'article L 621-2 du code de commerce,
Le ministère public avisé, entendu,
- débouté la SCI Taillot de sa demande de renvoi de l'affaire devant le tribunal de commerce de Toulouse';
- constaté la confusion des patrimoines de la société [B] [Y] et la société Taillot';
- débouté la SCI Taillot de toutes ses demandes';
- prononcé l'extension de la procédure collective préalablement ouverte à l'encontre de la SARL [B] [Y] à la SCI Taillot,';
- confirmé la date de cessation des paiements au 2 novembre 2022 ;
- et ordonné l'emploi des dépens en frais privilégiés de liquidation.
Le 24 mars 2023, la SCI Taillot a relevé appel de ce jugement (n° RG 23/01615).
Par exploit du 3 avril 2023, la SCI Taillot a assigné la Selarl MJSA, en la personne de Me [U], en qualité de liquidateur de la société [B] [Y], devant le premier président de la cour d'appel de ce siège aux fins d'obtenir l'arrêt de l'exécution provisoire du jugement au visa de l'article R.661-14 du code de commerce (RG n°23/00058).
Par exploit du 13 avril 2023, elle a assigné en référé la société [B] [Y] et la société MJSA en qualité de liquidateur judiciaire de la société [B] [Y] (RG'n°23/00065).
Par ordonnance réputée contradictoire en date du 21 juin 2023, le délégataire du président de la cour d'appel de Montpellier a ordonné la jonction des dossiers, débouté la SCI Taillot de sa demande d'arrêt de l'exécution provisoire du jugement du 15 mars 2023 du tribunal de commerce de Perpignan, condamné la SCI Taillot aux dépens de l'instance, et dit n'y avoir lieu de faire application de l'article 700 du code de procédure civile.
Par arrêt du 17 octobre 2023 (RG n°23/01615), la cour d'appel de Montpellier a':
- rejeté la demande de médiation et la demande de renvoi de l'affaire devant le tribunal de commerce de Toulouse';
- confirmé le jugement du 15 mars 2023 en toutes ses dispositions';
- et dit que les dépens seront frais privilégiés de la procédure collective.
Le 30 octobre 2023 (RG n°23/05409), Mme [A] [K], épouse [E], a formé tierce opposition contre ledit arrêt, en qualité d'usufruitière des parts de la SCI Taillot.
Par ordonnance du 21 décembre 2023, le président de la chambre commerciale de la cour d'appel de Montpellier a prononcé la caducité partielle de la déclaration de tierce opposition à l'égard de la société [B] [Y], Mme [A] [E] n'ayant pas procédé par voie de signification de sa déclaration de tierce opposition dans le délai imparti.
Par arrêt du 27 juin 2024 (n° RG 24/00141), la cour d'appel de Montpellier a déclaré irrecevable la requête en déféré déposée plus de 15 jours après la date de l'ordonnance.
Par ordonnance du 15 novembre 2023, statuant sur une requête du liquidateur judiciaire, le juge-commissaire a désigné M. [X] [I] en qualité d'expert judiciaire aux fins d'effectuer une estimation des actifs immobiliers de la procédure et de tout autre bien appartenant à la SCI Taillot, qui n'aurait pas été porté à la connaissance du mandataire liquidateur.
Le 29 novembre 2023, la SCI Taillot et M. [F] [B] ont formé un recours contre cette ordonnance.
Par jugement réputé contradictoire en date du 27 mars 2024 le tribunal de commerce de Perpignan (le jugement déféré) a':
Vu les articles R.621-21, L.621-9 et L.640-1 du code de commerce,
Le ministère public entendu,
- déclaré recevable en la forme le recours formé par la société Taillot et M. [F] [B]';
- rejeté la demande de renvoi de l'affaire devant le tribunal de commerce de Toulouse';
- rejeté comme infondé ledit recours';
en conséquence,
- confirmé dans toutes ses dispositions, l'ordonnance du juge-commissaire, en date du 15 novembre 2023, numéro 2023JC1515';
- débouté la société Taillot de toutes ses demandes';
- et ordonné l'emploi des dépens en frais privilégiés de liquidation judiciaire.
Le 4 avril 2024, la SCI Taillot a relevé appel de ce jugement.
L'affaire a été fixée à bref délai.
Par conclusions du 15 mai 2024, elle demande à la cour, au visa des articles L.643-9, L.641-7, L.624-1 et L.624-2 du code de commerce, de l'article 6§1 de la Convention européenne des droits de l'Homme, de l'article 7-1 de l'ordonnance n°58-1270 du 22 décembre 1958 et de l'article L.111-6 du code de l'organisation judiciaire':
- d'infirmer le jugement entrepris';
- de renvoyer les parties devant le tribunal de commerce de Toulouse';
- de débouter la Selarl MJSA, ès qualités, de sa demande de désignation d'un expert';
- d'ordonner à la Selarl MJSA de communiquer sans délai au juge-commissaire ses propositions concernant la liste des créances';
- d'ordonner au juge-commissaire de décider de l'admission ou du rejet des créances dans les plus brefs délais';
- et de condamner la Selarl MJSA à lui payer la somme de 5'000 euros en application des articles 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance.
Dans son avis du 3 mai 2024, le ministère public a sollicité la confirmation du jugement attaqué, la SCI Taillot ne démontrant pas l'existence d'un conflit d'intérêt entre un conseiller de la chambre commerciale de la cour d'appel de Montpellier et la Selarl MJSA, liquidateur judiciaire des sociétés Taillot et [B] [Y].
Il est renvoyé, pour l'exposé exhaustif des moyens des parties, aux conclusions susvisées, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.
M. [X] [I], l'expert judiciaire désigné, assigné le 17 avril 2024 par acte déposé à l'étude, n'a pas constitué avocat.
La Selarl MJSA, en qualité de liquidateur judiciaire des sociétés [B] [Y] et Taillot, destinataire de la déclaration d'appel par acte d'huissier en date du 17 avril 2024, remis à personne morale, n'a pas constitué avocat.
La société [B] [Y], assignée le 17 avril 2024, n'a pas constitué avocat.
L'ordonnance de clôture est datée du 25 juin 2024.
MOTIFS
Sur la demande d'infirmation et de renvoi de l'affaire devant le tribunal de commerce de Toulouse
La SCI Taillot ne rapportant pas la preuve de l'existence d'un conflit d'intérêt entre l'un des conseillers, qui siège habituellement aux audiences de la chambre commerciale de céans, et le liquidateur, son conseil, la SCP SVA, ou encore Me [D] [C], la demande de renvoi dépourvue de fondement sera rejetée.
Ce conseiller ayant préféré, de sa propre initiative, se déporter, la demande est de surcroît sans objet.
Sur l'intérêt à agir du liquidateur judiciaire
La SCI Taillot fait valoir au soutien de son appel que le liquidateur n'a pas intérêt à agir ; et que les consorts [B], eu égard aux graves troubles psychologiques dont est affectée leur fille, au risque de perdre les biens immobiliers fruits d'une vie de travail et compte tenu de leur engagement par attestation à payer l'ensemble du passif de la société [B] [Y], ont payé 30'000 € sur le compte de liquidateur ; et que la Caisse d'épargne leur ayant réclamé de la somme de 141'597 € en qualité de cautions, ils ont payé 135'000 €.
Mais le tribunal a retenu à bon droit que la procédure de liquidation judiciaire de la société [B] [Y] a été étendue à la SCI Taillot par jugement du 15 mars 2023 du tribunal de commerce de Perpignan qui a été confirmé en appel ; qu'un pourvoi en cassation contre ledit arrêt n'a aucun effet suspensif à l'égard des effets de l'extension de la procédure collective à la SCI Taillot ; et que le passif de celle-ci s'ajouté au passif de la liquidation judiciaire de la société [B] [Y], de sorte que le liquidateur a intérêt, en cet état, à la requête qu'il a déposée aux fins de désignation d'un expert judiciaire en vue d'effectuer l'estimation des actifs immobiliers de la SCI Taillot.
Sur le caractère disproportionné de la demande d'expertise
La SCI Taillot soutient que le tribunal de commerce a prononcé l'extension sur la base de la déclaration de cessation des paiements effectuée par Mme [G] [B] pour un passif total de 17'419 € ; que le liquidateur a retenu des relations anormales et sollicité l'extension de la procédure collective, alors qu'au moins 71 % des créances déclarées sont des créances dont les bénéficiaires sont directement ou indirectement M. et Mme [B], ses père et mère ; que le liquidateur, le 23 mars 2023, a fini par communiquer l'état des créances de la société [B] [Y] dont le montant est de 35'900 € ; que la société Prefiloc a confirmé que la société [B] [Y] ne lui devait rien ; que le liquidateur, le 27 juillet 2023, a produit un nouvel état des créances intégrant le montant restant dû au titre du prêt contracté par la SCI Taillot en 2017 et la taxe foncière 2023, pour continuer sa politique de manipulation ; que l'état des créances produit devant la cour d'appel mentionne deux fois le même montant, cette fausse information reprise dans les conclusions adverses et constituant une escroquerie au jugement de la part du mandataire, la société MJSA.
Mais tous ces moyens sont en réalité des moyens qui pourraient avoir trait au pourvoi formé contre notre arrêt qui a confirmé l'extension de la procédure collective de la société [B] [Y] à la SCI Taillot.
Ils ne remettent pas en cause le bien-fondé de l'ordonnance rendue en ce qu'elle a justement retenu que l'état des créances de la société [B] [Y] étendues à la société Talliot fait apparaître un montant total du passif s'élevant à 155'759,45 €, et qu'il dépend de l'actif de cette procédure divers biens immobiliers sis à Formiguières appartenant à la SCI Taillot, de sorte que la demande d'expertise judiciaire afin d'estimer ces actifs immobiliers n'apparaît en rien disproportionnée.
Pour le surplus, le jugement déféré a exactement relevé en ses motifs que la SCI Taillot invoque une supposée escroquerie au jugement sans en tirer aucune conséquence, si ce n'est d'ordonner au liquidateur de communiquer sans délai au juge-commissaire ses propositions concernant la liste des créances et d'ordonner à ce dernier de décider de l'admission ou du rejet des créances dans les plus brefs délais, alors que ces demandes sont sans lien aucun avec le recours formé contre l'ordonnance du juge commissaire désignant un expert judiciaire afin d'estimer la valeur des immeubles appartenant la SCI Taillot et dont le tribunal a été saisi.
Le jugement déféré doit donc être entièrement confirmé.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement, par arrêt rendu par défaut,
Confirme le jugement rendu le 27 mars 2024 par le tribunal de commerce de Perpignan en toutes ses dispositions ;
Condamne la SCI Taillot aux dépens d'appel.
le greffier, la présidente,