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Décisions

CA Paris, Pôle 5 - ch. 10, 16 septembre 2024, n° 22/14143

PARIS

Arrêt

Autre

CA Paris n° 22/14143

16 septembre 2024

Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 10

ARRÊT DU 16 SEPTEMBRE 2024

(n° , 9 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 22/14143 - N° Portalis 35L7-V-B7G-CGHXJ

Décision déférée à la Cour : Jugement du 17 Juin 2022 - TJ de Paris - RG n° 20/12413

APPELANTE

Madame [H] [N] Veuve [Y]

[Adresse 1]

[Localité 3] - SUISSE

représentée par Me Audrey SCHWAB de la SELARL SELARL 2H Avocats à la cour, avocat au barreau de PARIS, toque : L0056

INTIME

LE DIRECTEUR RÉGIONAL DES FINANCES PUBLIQUES D'ILE DE FRANCE Le Directeur Régional des Finances Publiques d'Ile de France et du département de Paris

en ses bureaux du Pôle Fiscal Parisien

[Adresse 2]

[Adresse 2]

[Localité 4]

représenté par Me Guillaume MIGAUD de la SELARL ABM DROIT ET CONSEIL AVOCATS E.BOCCALINI & MIGAUD, avocat au barreau de VAL-DE-MARNE, toque : PC129

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 905 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 23 Mai 2024, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Edouard LOOS, Magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Christine SIMON-ROSSENTHAL, Présidente

Monsieur Jacques LE VAILLANT, Conseiller

Monsieur Edouard LOOS, Magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles

Greffier, lors des débats : Madame Sylvie MOLLÉ

ARRÊT :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signée par Madame Christine SIMON ROSSENTHAL Présidente et par Sylvie MOLLÉ, Greffier, présent lors de la mise à disposition.

FAITS ET PROCEDURE

Faisant suite à la transmission d'informations émanant de l'autorité judiciaire effectuée les 2 septembre 2009 et le 12 janvier 2010 à destination de la Direction nationale des vérifications de situations fiscales (DNVSF), après perquisition et saisie au domicile de Monsieur [Z] [E] de fichiers de clients de la filiale genevoise de la banque HSBC, son ancien employeur, l'administration a, le 30 novembre 2012, déposé plainte contre Madame [H] [N], veuve [Y], ci-après Madame [Y], notamment pour fraude fiscale auprès du Procureur de la République près le tribunal de grande instance de Paris, après avis conforme de la Commission des infractions fiscales donné le 9 novembre 2012.

Le 15 février 2013, le Procureur de la République près le tribunal de grande instance de Paris a ouvert une enquête préliminaire à la suite de ce dépôt de plainte et confié les investigations à la brigade nationale de répression de la délinquance fiscale (BNRDF).

Le 2 mai 2016, la juge d'instruction près le tribunal de grande instance de Paris a autorisé l'administration à prendre copie des pièces de la procédure pénale ouverte à l'encontre de Madame [Y]. Au regard des éléments figurant dans la procédure, l'administration a émis le 1 juin 2016 une proposition de rectification à l'attention de Madame [Y] portant rehaussement des valeurs afférentes à l'impôt de solidarité sur la fortune au titre des années 2007 à 2010.

Par courrier du 20 juillet 2017, Madame [Y] a contesté ces rehaussements.

L'administration ayant néanmoins maintenu sa position par réponse du 31 octobre 2017, les impositions issues des rehaussements ont été mises en recouvrement suivant avis du 15 mars 2018 au titre de l'impôt de solidarité sur la fortune des années 2007, 2008, 2009 et 2010 pour des droits d'un montant global de 862.039 euros, outre des pénalités d'un montant total de 1.037.868 euros.

La réclamation contentieuse formée par Madame [Y] le 27 juillet 2018 a été rejetée par décision du 9 juillet 2020.

Par exploit d'huissier de justice en date du 14 septembre 2020, Madame [Y] a fait assigner l'administration fiscale devant le tribunal judiciaire de Paris.

Par jugement du tribunal correctionnel de Paris du 30 octobre 2020, frappé d'appel, Madame [Y] a été déclarée coupable, dans le volet pénal du même litige.

* * *

Vu le jugement prononcé le 17 juin 2022 par le tribunal judiciaire de Paris qui a statué comme suit :

- Déboute Madame [H] [N], veuve [Y], de l'ensemble de ses demandes

- La condamne aux dépens.

Vu l'appel déclaré par Madame [Y] le 26 juillet 2022,

Vu les dernières conclusions signifiées le 13 décembre 2022 par Madame [Y],

Vu les dernières conclusions signifiées le 13 mars 2023 par l'Etat représenté par le directeur général des finances publiques,

Mme [Y] demande à la cour de statuer comme suit :

Vu les articles L 180, L 186, L 188B, L 188 C, L 228, L 10-0 AA, L 57 et suivants du LPF ; vu les articles 6-1 6, 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les moyens qui précèdent et les pièces versées aux débats.

- Déclarer recevable et bien fondée son action à l'encontre du Directeur Régional des Finances Publiques de l'Ile de France et de [Localité 6] ;

Y faisant droit,

- Infirmer le jugement du Tribunal judiciaire de Paris du 17 juin 2022 ;

- Juger que Madame [Y] n'a pas été avisée de la saisine de la CIF ;

- Juger que la plaine pénale déposée le 30 novembre 2012 par l'administration fiscale ne visait que l'ISF des années 2009 à 2011 ;

- Par suite, dire et juger que le délai de reprise ne pouvait être prorogé ;

- Juger que l'administration n'a pas communiqué à Madame [Y] les documents - et notamment les fichiers volés par Monsieur [E] - et qu'aucune contradiction ne peut être apportée ;

- Juger l'absence de véracité des documents servant de motivation à l'administration ;

- Juger que les fichiers à l'origine de la plaine pénale ne peuvent servir de fondement aux rectifications proposées ;

- Juger le défaut de loyauté de l'administration fiscale ;

- Juger l'absence de preuve sur la prétendue détention par Madame [Y] de comptes à l'étranger ;

- Par suite dire et juger que la proposition de rectification n'est ni fondée ni motivée ;

- Par suite, dire et juger que la procédure est viciée entraînant sa nullité ;

- Dire que l'application de la majoration pour man'uvre frauduleuse de 80% n'est ni fondée ni motivée ;

Et par voie de conséquence,

- Prononcer la décharge totale des droits rappelés ;

- Prononcer la décharge totale de la majoration de 80% pour man'uvres frauduleuses ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile,

- Condamner le directeur Régional des Finances Publiques d'Ile de France et de [Localité 6] à lui verser la somme de 8.000 €, qui sera éventuellement révisée en cours d'instance

- Enfin, le condamner aux entiers dépens dont distraction, pour ceux-là concernant, au profit de la Selarl 2H Avocats prise en la personne de Maître Audrey Schwab et ce, conformément aux dispositions de l'article 699 du CPC.

L'Etat représenté par le directeur général des finances publiques demande à la Cour de statuer comme suit :

- Dire et juger Madame [Y] recevable mais mal fondée en son appel du jugement rendu le 17 juin 2022 par le Tribunal judiciaire de PARIS ;

- Confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté Madame [Y] de l'ensemble de ses demandes et l'a condamnée aux dépens ;

- Confirmer la décision de rejet du 9 juillet 2020 ;

- Reconnaître les rappels effectués par l'administration fondés en droit et en fait ;

- Confirmer les rappels de droits et de pénalités effectués par l'administration ;

En conséquence,

- Rejeter toutes les demandes, fins et conclusions de Madame [Y] ;

- Rejeter la demande formée par Madame [Y] au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;

- Condamner Madame [Y] aux entiers dépens d'appel ;

- Condamner Madame [Y] à verser à l'État la somme de 3 000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 22 avril 2024.

SUR CE, LA COUR

a) Sur la saisine de la commision des infractions fiscales (CIF)

Mme [Y] souligne qu'en application de l'article L228 II du Livre des procédures fiscales (LPF), sous réserve de faire valoir l'existence de présomptions caractérisées d'une infraction fiscale pour laquelle existe un risque de dépérissement des preuves, la commission peut examiner l'affaire sans que le contribuable soit avisé de la saisine. A défaut de l'applicabilité de cette disposition, le contribuable est, en général, avisé de la saisine de la CIF.

Mme [Y] soutient que l'administration fiscale ne disposait pas d'éléments suffisants justifiant l'absence d'information de l'appelante lors de la saisine du CIF, soit le 4 octobre 2012.

De plus, Mme [Y] affirme que le risque de dépérissement des preuves n'est pas démontré, au motif que les informations fournies par M. [E] sont dépourvues de fiabilité.

Par conséquent, au motif qu'aucun élément tangible ne justifie le recours à la procédure du CIF sans en aviser le contribuable, Mme [Y] considère que l'administration ne pouvait se prévaloir du délai de reprise de 10 ans visé à l'article 188 B du LPF.

La Direction Régionale des finances publiques d'Ile de France et de [Localité 6] (DRFIP) souligne que l'analyse par l'administration fiscale des données transmises par l'autorité judiciaire en date du 2 septembre 2009 et du 12 janvier 2010 permet d'établir une présomption caractérisée de fraude fiscale avant la saisine du CIF.

Concernant le risque de dépérissement des preuves, la DRFIP réplique que, en matière délictuelle, les auteurs étant conscients de commettre une infraction et d'être passibles de poursuites pénales, ces derniers peuvent être tentés de faire disparaitre les éléments matériels de leur infraction.

Ceci étant exposé, il résulte des dispositions de l'article L228 du livre des procédures fiscales dans sa rédaction applicable aux faits en l'espèce celle issue de la loi du 28 décembre 2011 que :

" (') la commission examine l'affaire sans que le contribuable soit avisé de la saisine ni informé de son avis lorsque le ministre chargé du budget fait valoir qu'existent des présomptions caractérisées qu'une infraction fiscale pour laquelle existe un risque de dépérissement des preuves résulte :

1° Soit de l'utilisation, aux fins de se soustraire à l'impôt, de comptes ou de contrats souscrits auprès d'organismes établis dans un Etat ou territoire qui n'a pas conclu avec la France, depuis au moins trois ans au moment des faits, une convention d'assistance administrative permettant l'échange de tout renseignement nécessaire à l'application de la législation fiscale française ; (')

Dans la présente espèce la CIF qui a émis un avis conforme le 9 novembre 2012 a été saisie cette même année par l'administration fiscale qui disposait de deux procès-verbaux des services de la gendarmerie nationale datés du 2 septembre 2009 et du 12 janvier 2010 transmis par le procureur de la république de Nice suite à la perquisition au domicile de M. [E] dont l'analyse laissait présumer au vu d'une fiche de synthèse BUP que Mme [Y] était titulaire de plusieurs comptes non déclarés ouvert auprès de la " HSBC Private Bank SA " par l'intermédiaire de 2 structures interposées dénommées " Joystone Investments Limited " et " 34687LP Roseport Holding Sa " domiciliées à [Localité 7] -Iles vierges britanniques .

Cette situation a caractérisé une présomption caractérisée d'infraction fiscale avec risque de dépérissement des preuves au sens de l'article L.228 du livre de procédures fiscales précité.

Mme [Y] est ainsi mal fondée à soutenir qu'elle devait être informée de la saisine de la CIF et de son avis favorable ayant conduit l'administration fiscale a déposé plainte le 30 novembre 2012 auprès du procureur de la République du tribunal de grande instance de Paris.

b) Sur le droit de reprise

Mme [Y] expose que le délai spécial de reprise concerne l'ensemble des impositions dues par le contribuable au titre de la période visée par la plainte pour présomption de fraude fiscale déposée par l'administration fiscale.

Mme [Y] souligne que l'administration a procédé à des rehaussements au titre de l'ISF des années 2007 à 2010, tandis que la plainte pénale déposée par l'administration fiscale vise l'ISF au titre des années 2009 à 2011.

Mme [Y] en conclut que l'administration a rectifié les années 2007 et 2008 non visées par la plainte pénale.

La DRFIP réplique que, à la lecture de l'article L.188 B du LPF, le dispositif ne se limite pas la propagation du délai de reprise aux impôts et taxes spécifiquement visés par la procédure judiciaire et aux impôts et taxes dues au titre des années visées par la plainte pénale. Selon la DRFIP, bien que non visées dans la plainte, l'assiette de la rectification a pu inclure les années 2007 et 2008.

Ceci étant exposé, il résulte des dispositions de l'article L188 B du livre des procédures fiscales que :

" Lorsque l'administration a, dans le délai de reprise, déposé une plainte ayant abouti à l'ouverture d'une enquête judiciaire pour fraude fiscale dans les cas visés aux 1° à 3° de l'article L.228, les omissions ou insuffisances d'imposition afférentes à la période couverte par le délai de reprise peuvent, même si celui-ci est écoulé, être réparées jusqu'à la fin de l'année qui suit la décision qui met fin à la procédure et, au plus tard, jusqu'à la fin de la dixième année qui suit celle au titre de laquelle l'imposition est due. "

Dans la présente espèce l'administration fiscale a porté plainte contre Mme [Y] le 30 novembre 2012 pour fraude fiscale pour déclaration minorée en matière d'IR au titre des années 2008 et 2010 et en matière d'ISF au titre des années 2009 et 2010 et a adressé à Mme [Y] une proposition de rectification le 1er juin 2017. Les conditions posées par l'article L188 B du livre des procédures fiscales sont ainsi réunies et ont permis à l'administration de procéder à une rectification à compter de 2007, soit sur les 10 années antérieures. Le texte ne prévoit aucunement une limitation du droit de reprise de 10 années aux seules années visées dans la plainte pénale. Le moyen ainsi soulevé par l'appelante doit être écarté.

c) Sur l'absence de fondement de la proposition de rectification

Mme [Y] soutient que les documents et informations sur lesquels se fonde le jugement du 17 juin 2022 ont été portés à la connaissance de l'administration fiscale de façon irrégulière.

Mme [Y] soutient que l'administration fiscale motive l'intégralité de la procédure suivie et les rectifications subséquentes sur l'exploitation de documents et d'informations obtenus de façon irrégulière, en contrariété avec l'article L. 10-0 AA du LPF.

La DRFIP réplique que le service vérificateur ne s'est pas fondé uniquement sur les éléments de preuve transmis par le Procureur de la République pour asseoir ses rehaussements, mais aussi sur les différents éléments recueillis dans le cadre de l'enquête judiciaire concernant par Mme [Y] ayant permis de corroborer l'ensemble des preuves à des éléments précis.

La DRFIP soutient que les informations ont été régulièrement obtenues par l'administration fiscale, et il importe peu de l'origine licite ou illicite des informations au regard de leur opposabilité dans le cadre de la procédure d'assiette.

Ceci étant exposé , s'il n'est pas contesté que les données informatiques versées au soutien de la plainte de l'administration fiscale contre Mme [Y] le 20 novembre 2012 dont des extraits ont été transmis à l'appui des propositions de rectification avaient été dérobées par M. [E], ancien informaticien salarié de la filiale suisse de la banque HSBC, ces pièces ont été obtenues par la perquisition légalement effectuée au domicile de M. [E] à [Localité 5] le 20 janvier 2009 dans le cadre de l'exécution d'une commission rogatoire internationale délivrée à l'initiative des autorités judiciaires helvétiques et ont fait l'objet d'une communication régulière à l'administration fiscale les 9 juillet 2009, 2 septembre 2009 et 12 janvier 2010 conformément aux dispositions des articles L 101 et L 135 du livre des procédures fiscales.

Il n'est d'ailleurs pas établi que l'administration fiscale aurait confectionné les pièces litigieuses ni participé directement ou indirectement à la leur production, le rapprochement et le décryptage des données informatiques ne pouvant s'analyser comme une confection d'éléments de preuve par une autorité publique. Ces données ne peuvent donc pas constituer des preuves illicites.

La proposition de rectification de l'administration fiscale est fondée non seulement sur les documents qui lui ont été transmis par l'autorité judiciaire provenant d'une perquisition régulièrement effectuée mais aussi sur les éléments tirés de l'enquête pénale pour fraude fiscale diligentée à l'encontre de Mme [Y]

L'appelante est ainsi mal fondée à soutenir que les preuves réunies contre elle seraient irrégulières et présenteraient un caractère déloyal.

d) Sur la communication des documents

Mme [Y] expose ne pas avoir eu accès aux informations et documents sur lesquels se fonde l'administration fiscale et ne pas avoir eu la capacité d'en apprécier l'authenticité ou la fiabilité.

Mme [Y] en déduit donc que l'administration a manqué au principe de loyauté de la preuve en intervenant hors du cadre légal pour obtenir les informations lors d'une perquisition organisée préalablement.

Enfin, Mme [Y] fait valoir la nécessité d'interroger la qualité de la transcription et de la transmission des informations par les experts de l'administration fiscale.

La DRFIP expose que le service a produit en annexe de la proposition de rectification du 1er juin 2017 une synthèse individuelle comprenant l'ensemble des informations utiles concernant Mme [Y].

Quant aux informations résultant du fichier informatique, la DRFIP soutient que, au regard du volume représenté par ces données et de la complexité de leur décryptage, leur communication à un non-expert apparaît totalement inefficace. Pour ces raisons, la Conseillère chargée de la mise en état auprès de la cour d'appel de Paris a rejeté la demande de communication du fichier.

Concernant la violation du principe d'équité dans la procédure ainsi que de la violation du principe de loyauté dans l'administration de la preuve garantis par les dispositions de l'article 6§1 de la Convention européenne des droits de l'homme, la DRFIP fait valoir l'inapplicabilité de ladite Convention aux contestations ayant traits exclusivement au domaine du droit public, et notamment aux procédures fiscales.

Ceci étant exposé, Il n'est pas contesté que les données informatiques versées au soutien de la plainte de l'administration fiscale contre M [V], dont des extraits ont été transmis à l'appui des propositions de rectification, avaient été dérobées par M. [E], ancien informaticien salarié de la filiale suisse de la banque HSBC. Ces pièces ont été obtenues par la perquisition légalement effectuée au domicile de M. [E] à [Localité 5] le 20 janvier 2009 dans le cadre de l'exécution d'une commission rogatoire internationale délivrée à l'initiative des autorités judiciaires helvétiques et ont fait l'objet d'une communication régulière à l'administration fiscale les 9 juillet 2009, 2 septembre 2009 et 12 janvier 2010.

Aucun élément susceptible de faire douter de leur fiabilité, de leur exactitude ou de leur authenticité n'est versé aux débats.

Il n'est aucunement nécessaire d'ordonner la production de l'ensemble des fichiers informatiques qui concernent non seulement Mme [Y] mais d'autres titulaires de comptes.

La proposition de rectification du 1er juin 2017 comporte les éléments d'identification de Mme [Y] au sein de la banque HSBC, les numéros de comptes associés et les montants y figurant.

En conséquence, Mme [Y] doit être déboutée de sa contestation relative à l'absence de fourniture de documents précis.

e) Sur les rehaussements proposés

Mme [Y] soutient que la proposition de rectification n°2120-SD du 1er juin 2017 portant sur l'ISF des années 2007 à 2010 ne serait pas suffisamment motivée au regard des dispositions de l'article L.57 du LPF.

Selon la DRFIP, la proposition de rectification n°2120-SD du 1er juin 2017 répondrait pleinement aux dispositions de l'article L. 57 du LPF en termes de clarté des motifs de droit ou de fait des rectifications.

Ceci étant exposé la proposition de rectification du 1er juin 2017 reprend la procédure judiciaire ayant permis d'établir qu'au titre des années 2005, 2006, 2007, 2008, 2009, 2020 et 2011 Mme [Y] était détentrice d'avoirs à l'étranger par l'intermédiaire des structures interposées Joystone Investments Limited et 34687 LP Roseport Holding SA établis aux Iles Vierges Britanniques. Les divers comptes sont détaillés et sont reprises les déclarations de l'intéressée qui n'a pas contesté la titularité des comptes. La méthode de détermination des avoirs à l'étranger est explicitée année par année (2007 à 2010). Ont été joints en annexes le BUP, et les procès- verbaux d'audition de l'intéressée au cours de procédure pénal.

L'administration fiscale a ainsi adressé à Mme [Y] une proposition de rectification motivée qui lui a permis de formuler le 20 juillet 2017 des observations selon les termes de l'article L57 du livre des procédures fiscales.

Le moyen relatif à l'absence de motivation de la proposition de rectification doit être écarté

f) Sur les man'uvres frauduleuses

Mme [Y] conteste l'application par le service de la majoration de 80% pour man'uvres frauduleuses prévues à l'article 1729-c du CGI.

Mme [Y] soutient que l'administration fiscale a mis en place un système frauduleux de preuve justifiant l'application des majorations de 80%, sans en apporter la preuve.

La DRFIP demande la confirmation du jugement du tribunal judiciaire rendu le 17 juin 2022 prononçant l'application de la majoration de 80% pour man'uvres frauduleuses prévu à l'article 1729-c du CGI.

Ceci état exposé, il résulte des dispositions de l'article 1729 du code général des impôts que :

" Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de :

(')

c. 80 % en cas de man'uvres frauduleuses ou de dissimulation d'une partie du prix stipulé dans un contrat ou en cas d'application de l'article 792 bis. "

Dans la présente espèce il résulte de la procédure pénale que Mme [Y] était titulaire de 8 comptes ouverts auprès de la banque HSBC Private Bank de [Localité 3] abritant des avoirs détenus par l'intermédiaire de 2 structures interposées situées dans les Iles Vierges Britannique pour un montant global de 19 200 480 US dollars. Cette détention a dans un premier temps été reconnue par l'intéressée.

Le montant des avoirs, l'élaboration du montage et l'implication de l'intéressée confirmée par l'exactitude de l'ensemble de ses données personnelle fournies à la banque caractérisent des man'uvres frauduleuses imputables à Me [Y] et justifient l'application de la majoration de 80% prévue par l'article1729-c du CGI précité.

Le jugement déféré doit ainsi être confirmé en toutes ses dispositions.

g) Sur les dépens et frais irrépétibles

Mme [Y] condamnée aux dépens sera déboutée de sa demande d'indemnité de procédure et devra verser à la DRFIP une indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Confirme le jugement déféré ;

Condamne Madame [H] [N], veuve [Y] aux dépens ;

Condamne Madame [H] [N], veuve [Y] à verser L'Etat représenté par le directeur général des finances publiques la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Rejette toutes autres demandes.

LE GREFFIER LA PRESIDENTE

S. MOLLÉ C.SIMON-ROSSENTHAL