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Décisions

TUE, 6e ch., 11 septembre 2024, n° T-32/22

TRIBUNAL DE L'UNION EUROPÉENNE

Arrêt

Rejet

PARTIES

Demandeur :

Vyatsky Plywood Mill OOO

Défendeur :

Commission européenne

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme COSTEIRA

TUE n° T-32/22

10 septembre 2024

1 Par son recours fondé sur l'article 263 TFUE, la requérante, Vyatsky Plywood Mill OOO, demande l'annulation du règlement d'exécution (UE) 2021/1930 de la Commission, du 8 novembre 2021, instituant un droit antidumping définitif et portant perception définitive du droit provisoire institué sur les importations de contreplaqué de bouleau originaire de Russie (JO 2021, L 394, p. 7, ci-après le « règlement attaqué »).

Antécédents du litige

2 La requérante est un producteur-exportateur russe de contreplaqué de bouleau, qui exporte, entre autres, vers l'Union européenne.

3 À la suite d'une plainte déposée le 31 août 2020 au nom de l'industrie de l'Union du contreplaqué de bouleau par le Woodstock Consortium, conformément à l'article 5, paragraphe 4, du règlement (UE) 2016/1036 du Parlement européen et du Conseil, du 8 juin 2016, relatif à la défense contre les importations qui font l'objet d'un dumping de la part de pays non membres de l'Union européenne (JO 2016, L 176, p. 21, ci-après le « règlement de base »), entré en vigueur le 20 juillet 2016, la Commission européenne a, en date du 14 octobre 2020, ouvert une enquête antidumping concernant les importations de contreplaqué de bouleau originaire de Russie. Elle a publié un avis d'ouverture au Journal officiel de l'Union européenne (JO 2020, C 342, p. 2).

4 L'enquête relative au dumping et au préjudice en cause a porté sur la période comprise entre le 1er juillet 2019 et le 30 juin 2020 (ci-après la « période d'enquête »). L'examen des tendances pertinentes aux fins de l'évaluation dudit préjudice et du lien de causalité a porté sur la période comprise entre le 1er janvier 2017 et la fin de la période d'enquête (ci-après la « période considérée »).

5 Par son règlement d'exécution (UE) 2021/940 du 10 juin 2021, instituant un droit antidumping provisoire sur les importations de contreplaqué de bouleau originaire de Russie (JO 2021, L 205, p. 47, ci-après le « règlement provisoire »), la Commission a soumis à un droit antidumping provisoire de 15,7 % les importations de contreplaqué de bouleau constitué exclusivement de feuilles de bois dont chacune avait une épaisseur n'excédant pas 6 millimètres, ayant des plis extérieurs en bois des espèces spécifiées à la sous-position 441233 et au moins un pli extérieur en bois de bouleau, recouvert ou non, originaire de Russie et relevant du code NC ex 44123300 (code TARIC 4412330010) (ci-après le « produit concerné »), fabriqué par la requérante.

6 Le 31 août 2021, la Commission a communiqué les faits et considérations essentiels sur le fondement desquels elle envisageait d'instituer des mesures antidumping définitives.

7 Le 8 novembre 2021, la Commission a adopté le règlement attaqué, par lequel elle a institué un droit antidumping définitif de 14,85 % sur le produit concerné fabriqué par la requérante.

Conclusions des parties

8 La requérante conclut à ce qu'il plaise au Tribunal :

– annuler le règlement attaqué ;

– condamner la Commission aux dépens.

9 La Commission, soutenue par les intervenantes, Latvijas Finieris AS et Paged Pisz sp. z o.o, conclut à ce qu'il plaise au Tribunal :

– rejeter le recours ;

– condamner la requérante aux dépens.

En droit

10 À l'appui de son recours, la requérante soulève quatre moyens.

11 Le premier moyen est tiré d'erreurs manifestes d'appréciation ainsi que d'une violation de l'article 3, paragraphe 2, du règlement de base, relatif à la détermination de l'existence d'un préjudice, de l'article 4 du même règlement, portant sur le définition de l'industrie de l'Union, et du principe de bonne administration, en ce que, dans le cadre de la définition du produit et de l'industrie de l'Union, la Commission n'aurait pas examiné ou aurait négligé de vérifier les observations d'associations de l'Union du contreplaqué.

12 Le deuxième moyen est tiré d'erreurs manifestes d'appréciation ainsi que d'une violation de l'article 3 du règlement de base et du principe de non-discrimination, en ce que, dans le cadre de la détermination du préjudice concerné et de l'analyse du lien de causalité, la Commission aurait erronément omis de tenir compte de données postérieures à la période d'enquête ; refusé de reconnaître une segmentation du marché entre le contreplaqué de bouleau russe et le contreplaqué de bouleau produit dans l'Union ; écarté l'accès à la matière première comme facteur rompant le lien de causalité entre le préjudice et les importations litigieuses, et négligé d'inclure la Biélorussie et l'Ukraine dans les pays ciblés par l'enquête.

13 Le troisième moyen est tiré d'erreurs manifestes d'appréciation, ainsi que d'une violation de l'article 21 du règlement de base, relatif à l'intérêt de l'Union, et des droits de la défense de la requérante, en ce que l'imposition de mesures antidumping sur le produit concerné irait à l'encontre de l'intérêt de l'industrie de l'Union. À titre subsidiaire, le quatrième moyen est tiré d'une erreur manifeste d'appréciation, en ce que, en sa forme actuelle, la mesure antidumping imposée à l'encontre du produit concerné serait contraire à l'intérêt de l'Union.

Sur le premier moyen, tiré d'erreurs de droit, d'erreurs manifestes d'appréciation ainsi que de la violation du principe de bonne administration dans la définition du produit et de l'industrie de l'Union

14 La requérante soutient que des associations de l'Union du contreplaqué, à savoir l'Association espagnole des fabricants de contreplaqué (AEFCON), l'Association italienne des producteurs de panneaux et de produits semi-finis en bois pour l'industrie du meuble (ASSOPANNELLI) et l'Union française des industries du panneau contreplaqué (UICP) (ci-après, prises ensemble, les « associations de l'Union du contreplaqué »), ont indiqué que certains de leurs membres produisaient une large gamme de contreplaqué fabriqué, entre autres, en bois de bouleau ainsi que du contreplaqué d'autres essences de bois, qui faisaient concurrence au produit faisant l'objet de l'enquête.

15 Or, conformément à l'article 3, paragraphe 2, du règlement de base, il appartiendrait à la Commission de vérifier les données rendues publiques et de procéder à un examen objectif et impartial de tous les éléments de preuve positifs disponibles, dont des affirmations des associations de l'Union du contreplaqué.

16 Cependant, la Commission n'aurait pas vérifié ni évalué quels membres des associations de l'Union du contreplaqué, dont le producteur de contreplaqué de bouleau Garnica, produisaient des biens relevant de la définition du produit faisant l'objet de l'enquête et, dès lors, devaient être inclus dans la composition de l'industrie de l'Union. À cet égard, elle ne pourrait se contenter de contacter les producteurs potentiels connus et de soulever le défaut de production d'éléments de preuve de leur part.

17 En outre, selon la requérante, pour autant que les importations de contreplaqué de bouleau portent préjudice aux producteurs de contreplaqué d'autres essences de bois, ces produits doivent être considérés comme étant interchangeables, de sorte que le contreplaqué d'autres essences de bois devait être inclus dans la définition du produit en cause.

18 La requérante ajoute que, conformément à l'article 6.6 de l'accord sur la mise en œuvre de l'article VI de l'accord général sur les tarifs douaniers et le commerce de 1994 (GATT) (JO 1994, L 336, p. 103, ci-après l'« accord antidumping »), figurant à l'annexe 1 A de l'accord instituant l'Organisation mondiale du commerce (OMC) (JO 1994, L 336, p. 3), la Commission doit s'assurer de l'exactitude des renseignements fournis par les parties intéressées sur lesquels ses constatations sont fondées.

19 Or, il ressortirait du considérant 201 du règlement provisoire et du considérant 231 du règlement attaqué que, dans le cadre de l'analyse de l'intérêt de l'Union, la Commission aurait accepté les affirmations des associations de l'Union du contreplaqué portant sur l'existence d'un certain degré de substitution entre le contreplaqué de bouleau et le contreplaqué d'autres essences de bois, comme le peuplier, le pin et l'okoumé. La requérante en conclut que ces données ont été vérifiées et sont fiables. Elles auraient donc dû être également admissibles aux fins de l'évaluation de la définition du produit, de l'industrie de l'Union et des aspects de l'enquête liés à cette définition, ce que la Commission n'aurait pas fait.

20 Dès lors, la Commission n'aurait pas traité ces éléments de preuve de manière équitable et impartiale, aurait commis des erreurs manifestes d'appréciation ainsi qu'une violation des articles 3 et 4 du règlement de base et du principe de bonne administration, tel que consacré par l'article 41 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne (ci-après la « Charte »).

21 La Commission, soutenue par les intervenantes, conteste les arguments de la requérante.

22 Dans le domaine de la politique commerciale commune, et tout particulièrement en matière de mesures de défense commerciale, il ressort d'une jurisprudence constante de la Cour que les institutions de l'Union disposent d'un large pouvoir d'appréciation, de telle sorte que le contrôle juridictionnel doit être limité à la vérification du respect des règles de procédure, de l'exactitude matérielle des faits retenus pour opérer le choix contesté, de l'absence d'erreur manifeste d'appréciation de ces faits ou de l'absence de détournement de pouvoir (arrêt du 12 mai 2022, Commission/Hansol Paper, C‑260/20 P, EU:C:2022:370, point 58 ; voir, également, arrêt du 22 juin 2023, Vitol, C‑268/22, EU:C:2023:508, point 63 et jurisprudence citée).

23 Dans ce contexte, le contrôle par le Tribunal des éléments de preuve sur lesquels les institutions de l'Union fondent leurs constatations ne constitue pas une nouvelle appréciation des faits remplaçant celle de ces institutions. Ce contrôle n'empiète pas sur le large pouvoir d'appréciation desdites institutions dans le domaine de la politique commerciale, mais se limite à relever si ces éléments sont de nature à étayer les conclusions tirées par celles-ci. Il appartient, dès lors, au Tribunal non seulement de vérifier l'exactitude matérielle des éléments de preuve invoqués, leur fiabilité et leur cohérence, mais également de contrôler si ces éléments constituent l'ensemble des données pertinentes devant être prises en considération pour apprécier une situation complexe et s'ils sont de nature à fonder les conclusions qui en sont tirées [voir arrêts du 14 décembre 2017, EBMA/Giant (China), C‑61/16 P, EU:C:2017:968, point 69 et jurisprudence citée, et du 20 janvier 2022, Commission/Hubei Xinyegang Special Tube, C‑891/19 P, EU:C:2022:38, point 37 et jurisprudence citée].

24 En revanche, s'agissant des questions de droit, le Tribunal exerce un contrôle entier, ce qui inclut l'interprétation qu'il convient de faire de dispositions juridiques sur la base d'éléments objectifs ainsi que la vérification que les conditions d'application d'une telle disposition se trouvent ou non réunies (voir, en ce sens, arrêts du 11 juillet 1985, Remia e.a./Commission, 42/84, EU:C:1985:327, point 34, et du 9 novembre 2022, Cambodge et CRF/Commission, T‑246/19, EU:T:2022:694, point 45).

25 Aux termes de l'article 1er, paragraphe 1, du règlement de base, « [p]eut être soumis à un droit antidumping tout produit faisant l'objet d'un dumping lorsque sa mise en libre pratique dans l'Union cause un préjudice ».

26 Selon l'article 3, paragraphe 2, du règlement de base, l'examen de l'existence d'un préjudice se fonde sur des éléments de preuve positifs et comporte un examen objectif, d'une part, du volume des importations faisant l'objet d'un dumping et de l'effet de ces importations sur les prix des produits similaires sur le marché de l'Union et, d'autre part, de l'incidence de ces importations sur l'industrie de l'Union. Ladite disposition précise ainsi l'administration de la preuve et l'examen qui incombent à la Commission, en tant qu'autorité investigatrice, afin d'établir l'existence d'un préjudice pour pouvoir instituer des droits antidumping (arrêt du 21 septembre 2023, China Chamber of Commerce for Import and Export of Machinery and Electronic Products e.a./Commission, C‑478/21 P, EU:C:2023:685, point 117).

27 Le règlement de base ne définit cependant pas la notion d'« éléments de preuve positifs ». Compte tenu du sens littéral de cette notion, de son contexte et de la finalité de la détermination de l'existence d'un préjudice, à savoir permettre l'imposition d'un droit antidumping au regard des importations faisant l'objet d'un dumping, ladite notion désigne des éléments matériels qui établissent de façon affirmative, objective et vérifiable, ainsi que de manière crédible, la réalité des indicateurs de ce préjudice. Elle exclut de la sorte que de simples affirmations, des conjectures ou des considérations aléatoires puissent constituer de tels indicateurs (arrêt du 21 septembre 2023, China Chamber of Commerce for Import and Export of Machinery and Electronic Products e.a./Commission, C‑478/21 P, EU:C:2023:685, point 118).

28 L'article 4, paragraphe 1, du règlement de base définit l'« industrie de l'Union » soit comme l'« ensemble des producteurs de produits similaires de l'Union », soit comme « ceux d'entre eux dont les productions additionnées constituent une proportion majeure de la production totale de ces produits dans l'Union ».

29 Ainsi, la notion d'« industrie de l'Union » est par priorité définie par rapport aux « producteurs de produits similaires de l'Union ». Or, le « produit similaire », ainsi qu'il ressort de l'article 1er, paragraphe 4, du règlement de base, doit être entendu comme étant un produit identique, c'est-à-dire semblable à tous égards au produit considéré, ou, en l'absence d'un tel produit, un autre produit qui, bien qu'il ne lui soit pas semblable à tous égards, présente des caractéristiques ressemblant étroitement à celles du produit considéré.

30 Le choix du « produit considéré » détermine donc le champ de l'analyse de la branche de production nationale ou, en d'autres termes, des produits similaires de l'Union, ce qui, à son tour, permet d'identifier les « producteurs » de ces derniers, qui composent l'« industrie de l'Union ». Il y a donc un lien entre les produits importés et les producteurs de l'Union bénéficiant du droit antidumping. C'est sur cette base que la Commission détermine si les producteurs de l'Union ont subi ou risquent de subir un préjudice du fait des importations de produits faisant l'objet d'un dumping.

31 C'est à la lumière de ces considérations que le Tribunal examinera les griefs de la requérante portant, en premier lieu, sur des erreurs de droit et d'erreurs manifestes d'appréciation des faits dans le cadre de l'examen des déclarations des associations de l'Union du contreplaqué et, en second lieu, sur la violation du principe de bonne administration.

Sur l'examen des déclarations des associations de l'Union du contreplaqué

32 En l'espèce, la Commission a, aux considérants 13 à 17 du règlement provisoire, confirmés par le considérant 19 du règlement attaqué, indiqué avoir sélectionné un échantillon de trois producteurs de l'Union situés dans trois États membres différents, représentant près de 40 % de la production totale estimée et 35 % du volume total estimé des ventes du produit similaire dans l'Union. Elle a précisé que ces trois sociétés avaient été sélectionnées sur la base du plus grand volume de production et de ventes du produit similaire dans l'Union entre juillet 2019 et juin 2020 sur lequel l'enquête pouvait raisonnablement porter, sans négliger la répartition géographique.

33 S'agissant de la définition du produit concerné, il ressort du considérant 30 du règlement attaqué, qui renvoie aux considérants 32 et 33 du règlement provisoire, que la Commission a défini ledit produit comme étant le contreplaqué de bouleau constitué exclusivement de feuilles de bois dont chacune a une épaisseur n'excédant pas 6 millimètres, ayant des plis extérieurs en bois des espèces spécifiées à la sous-position 441233 et au moins un pli extérieur en bois de bouleau, recouvert ou non, originaire de Russie et relevant du code NC ex 44123300 (code TARIC 4412330010). Elle a ajouté que le contreplaqué de bouleau était un matériau en feuilles de bois constitué de couches ou de fibres de placage de bois pressées ensemble à l'aide d'une colle pour former de grandes feuilles plates. Selon elle, il était utilisé dans de nombreuses applications, telles que la construction, le conditionnement et l'ameublement, par exemple.

34 Aux considérants 34 et 35 du règlement provisoire, la Commission a indiqué que le produit concerné, le produit fabriqué et vendu sur le marché intérieur de la Russie ainsi que le produit fabriqué et vendu dans l'Union par l'industrie de l'Union présentaient les mêmes caractéristiques physiques, chimiques et techniques essentielles et étaient destinés aux mêmes utilisations de base, de sorte qu'ils constituaient des produits similaires au sens de l'article 1er, paragraphe 4, du règlement de base. La Commission a, en outre, aux considérants 24 à 26 du règlement attaqué, écarté les arguments visant à inclure dans la définition du produit concerné les contreplaqués d'autres essences de bois.

35 À titre liminaire, le Tribunal relève que la requérante a précisé ne pas contester le choix de la Commission quant à la définition du produit concerné ni l'ouverture de l'enquête sur le fondement de l'article 5 du règlement de base.

36 Elle fait en revanche valoir que la Commission n'a pas traité de manière équitable les éléments de preuve disponibles ni procédé à leur examen objectif, en ce sens qu'elle a rejeté ou négligé les déclarations des associations de l'Union du contreplaqué, qui portaient sur la production, par certains de leurs membres, dont Garnica, de contreplaqué de bouleau, ainsi que sur l'interchangeabilité et la concurrence entre le contreplaqué de bouleau et le contreplaqué d'autres essences de bois.

37 À cet égard, il ressort de l'annexe B1 du mémoire en défense que, dans le cadre de l'examen des producteurs soutenant la plainte, la Commission a envoyé à certains producteurs de l'Union un questionnaire afin de réunir les informations nécessaires lui permettant, d'une part, de vérifier si les producteurs de l'Union à l'origine de la plainte étaient suffisamment représentatifs et, d'autre part, d'établir, le cas échéant, un échantillon des producteurs de l'Union. À cet effet, elle a établi une liste des producteurs connus de contreplaqué de bouleau dans l'Union. Cinq producteurs italiens et deux producteurs espagnols, dont Garnica, y étaient mentionnés.

38 La Commission fait valoir que les producteurs espagnols et italiens auxquels elle s'est adressée, dont la société Garnica, n'ont pas complété le questionnaire qu'elle leur avait envoyé, ce que la requérante ne conteste pas.

39 Il ressort également des éléments du dossier que, à la suite de l'ouverture de la procédure, Garnica a contacté la Commission afin de se voir reconnaître le statut de partie intéressée à l'enquête antidumping en cause, ce qui lui a été accordé.

40 La Commission a donc initialement tenu compte de Garnica lors de l'ouverture de l'enquête et cette dernière a choisi de ne pas répondre au questionnaire qui lui avait été adressé, préférant le statut de partie intéressée à l'enquête. Cette circonstance n'apparaît pas de nature à invalider la méthode suivie lors de l'adoption du règlement attaqué, au sens de l'article 4 du règlement de base.

41 Certes, en application du règlement de base, c'est à la Commission qu'incombe, en tant qu'autorité investigatrice, la charge de la preuve d'établir l'existence d'un dumping, d'un préjudice et d'un lien de causalité entre les importations faisant l'objet d'un dumping et ledit préjudice. L'établissement de ces éléments doit se faire de façon objective à la suite d'une enquête fiable. Toutefois, aucune disposition de ce règlement ne confère à la Commission le pouvoir de contraindre les parties intéressées à participer à l'enquête ou à produire des renseignements (voir arrêt du 12 mai 2022, Commission/Hansol Paper, C‑260/20 P, EU:C:2022:370, point 47 et jurisprudence citée), la Commission étant tributaire de la coopération volontaire de ces parties pour lui fournir les informations nécessaires (voir arrêt du 3 décembre 2019, Yieh United Steel/Commission, T‑607/15, EU:T:2019:831, point 77 et jurisprudence citée).

42 Ainsi qu'il ressort d'une lecture combinée des articles 6, 16 et 18 du règlement de base, lorsque la Commission enquête sur l'existence d'un dumping et d'un préjudice, celle-ci doit prioritairement tendre à obtenir des renseignements pertinents sur la base d'une coopération volontaire des parties intéressées. À cette fin, elle transmet, en vertu de l'article 6, paragraphe 2, de ce règlement, des questionnaires antidumping à ces parties. Les réponses à ces questionnaires constituent une source de renseignements importante pour la Commission. Conformément à l'article 6, paragraphe 8, dudit règlement, qui transpose l'article 6.6 de l'accord antidumping en droit de l'Union, elle vérifie, dans la mesure du possible, les renseignements ainsi obtenus avant de fonder ses conclusions sur ceux-ci. Pour s'acquitter de cette obligation, la Commission dispose de la possibilité de procéder à des visites de vérification en application de l'article 16 du même règlement (arrêt du 12 mai 2022, Commission/Hansol Paper, C‑260/20 P, EU:C:2022:370, point 48).

43 Il ressort également de la jurisprudence que la Commission est tenue d'examiner d'office toutes les informations disponibles, dès lors que son rôle dans une enquête antidumping n'est pas celui d'un arbitre, dont la compétence se limiterait à trancher uniquement au vu des renseignements et des éléments de preuve fournis par les parties à l'enquête (arrêt du 22 mars 2012, GLS, C‑338/10, EU:C:2012:158, point 32).

44 Cette obligation d'examen d'office n'a trait qu'aux informations auxquelles elle peut elle-même avoir accès qui sont pertinentes pour son enquête antidumping. Une telle pertinence dépendra, notamment, du contenu ainsi que de la fiabilité des renseignements et des éléments de preuve dont elle dispose déjà à la suite de la coopération des parties intéressées à cette enquête. En effet, la Commission est tenue d'examiner avec toute la diligence requise toutes les informations dont elle dispose (voir arrêt du 21 septembre 2023, China Chamber of Commerce for Import and Export of Machinery and Electronic Products e.a./Commission, C‑478/21 P, EU:C:2023:685, point 139 et jurisprudence citée).

45 Cependant, la Commission ne saurait être obligée de définir l'industrie de l'Union par référence à l'ensemble des producteurs de l'Union. En outre, elle ne saurait être obligée d'inclure dans la définition de l'industrie de l'Union un producteur qui a décidé de ne pas coopérer à l'enquête, comme c'est le cas de Garnica (voir, par analogie, arrêt du 16 décembre 2020, Changmao Biochemical Engineering/Commission, T‑541/18, non publié, EU:T:2020:605, point 106).

46 La requérante n'identifie par ailleurs pas quels sont les autres producteurs espagnols, italiens ou français dont la Commission aurait dû tenir compte aux fins de la détermination et de la définition de l'industrie de l'Union.

47 Les arguments et les éléments de preuve avancés par la requérante ne permettent pas, en soi, et en l'absence de tout autre élément de nature à remettre en cause la représentativité des producteurs dont la Commission a tenu compte dans le cadre de l'enquête antidumping, de conclure qu'un ou plusieurs des membres des associations de l'Union du contreplaqué auraient dû faire partie de l'échantillon des producteurs de l'Union ni de considérer que la définition et la détermination, dans le règlement attaqué, de l'industrie de l'Union est erronée et ne comporte pas un examen objectif, au sens de l'article 3, paragraphe 2, du règlement de base.

48 C'est également à tort que la requérante reproche à la Commission d'avoir rejeté ou négligé d'examiner les déclarations des associations de l'Union du contreplaqué dans le cadre de la définition du produit concerné, voire de s'être fondée sur une approche contradictoire à cet égard.

49 En effet, d'une part, il ressort des considérants 39 et 201 du règlement provisoire et des considérants 25, 26 et 231 du règlement attaqué que la Commission a tenu compte des observations des associations de l'Union du contreplaqué. Cependant, il s'en dégage que les contreplaqués fabriqués à partir de différentes essences de bois sont des produits différents, qui ne présentent pas les mêmes caractéristiques physiques, techniques et chimiques essentielles que le contreplaqué de bouleau et ne peuvent pas être considérés comme un seul et même produit.

50 Ainsi, dans les observations relatives à l'intérêt de l'Union présentées par l'ASSOPANNELLI, figurant à l'annexe B.3 du mémoire en défense, cette dernière a indiqué que les producteurs italiens utilisaient principalement du bois de peuplier et, dans une moindre mesure, du bois de pin et de bouleau. Elle a précisé que, à première vue, le contreplaqué de peuplier ne devait pas être vu comme un substitut direct ou un concurrent du contreplaqué de bouleau en raison de leurs propriétés mécaniques différentes, relatives à leur poids (450 kg/m3 pour le peuplier contre 700 kg/m3 pour le bouleau), leur transformation (plus simple dans le cas du peuplier) et leurs usages spécifiques. Elle a ajouté que le contreplaqué de bouleau et le contreplaqué de peuplier occupaient une position dominante parmi les contreplaqués de feuillus produits en Europe, bien que chacun fût produit dans des zones géographiques distinctes et eût traditionnellement des objectifs ou des utilisations différentes.

51 Certes, l'ASSOPANNELLI a également indiqué que, malgré ces différences entre le contreplaqué de bouleau et le contreplaqué d'autres essences de bois, les importations à bas prix du premier avaient eu de graves répercussions sur les ventes des producteurs italiens depuis 2018, sur des marchés importants. Selon cette association, la substitution des contreplaqués d'autres essences de bois avec le contreplaqué de bouleau à bas prix, principalement originaire de Russie, avait donc eu des répercussions sans précédent au cours de la période comprise entre le dernier trimestre 2018 et le dernier trimestre 2020, provoquant un effondrement de la demande de contreplaqué de peuplier et menaçant toute la chaîne de production du secteur italien.

52 La Commission ne conteste pas que les observations de l'AEFCON rejoignent celles de l'ASSOPANNELLI à cet égard ni qu'il en était de même de l'UICP.

53 Toutefois, d'une part, il ne saurait être considéré qu'il ressort de ces déclarations que les associations de l'Union du contreplaqué auraient identifié un degré d'interchangeabilité suffisant entre le contreplaqué de bouleau et le contreplaqué d'autres essences de bois.

54 D'autre part, au considérant 39 du règlement provisoire et aux considérants 25 et 26 du règlement attaqué, la Commission a abordé la question de la substituabilité éventuelle entre le contreplaqué de bouleau et le contreplaqué d'autres essences de bois. Elle y a précisé, entre autres, que « le contreplaqué de pin, de peuplier, d'okoumé et de hêtre ne présent[ait] pas les mêmes caractéristiques physiques, techniques et chimiques essentielles que le contreplaqué de bouleau » et que « [l]e fait que d'autres produits et matériaux, présentant un degré de substituabilité indéterminé, [auraient pu] être utilisés dans certaines applications ne modifi[ait] pas la nature des différences physiques, techniques et chimiques » entre ces produits et le contreplaqué de bouleau.

55 Aux considérants 201 du règlement provisoire et 231 du règlement attaqué, la Commission a, par ailleurs, fait observer que les arguments des associations de l'Union du contreplaqué portaient sur le fait que les prix de dumping du contreplaqué de bouleau en provenance de Russie attiraient une demande traditionnellement tournée vers d'autres essences de bois, comme le peuplier, le pin et l'okoumé, de sorte que certains changements dans la demande de contreplaqués étaient dus à la baisse des prix du contreplaqué de bouleau par rapport aux prix du contreplaqué d'autres essences de bois.

56 Contrairement à ce que prétend la requérante, le considérant 201 du règlement provisoire et le considérant 231 du règlement attaqué ne contiennent pas d'admission du fait que les affirmations des associations de l'Union du contreplaqué, portant sur certains effets de substitution entre le contreplaqué de bouleau et le contreplaqué d'autres essences de bois, auraient été acceptées dans le cadre de l'analyse de l'intérêt de l'Union.

57 Il ressort tant du contexte du considérant 201 du règlement provisoire et du considérant 231 du règlement attaqué, s'inscrivant dans le cadre de l'analyse de l'intérêt d'autres parties intéressées, que de la formulation utilisée que la Commission a mentionné les arguments présentés par les associations de l'Union du contreplaqué et la requérante portant sur la substitution. Il n'en ressort cependant nullement que la Commission ait fait siennes ces affirmations ou les ait acceptées.

58 La Commission les a en revanche interprétées, dans le cadre de son pouvoir d'appréciation des faits, comme impliquant, d'une part, que les contreplaqués fabriqués à partir de différentes essences de bois ne devaient pas être vus comme un substitut direct ou un concurrent du contreplaqué de bouleau, du fait qu'ils présentaient des propriétés mécaniques différentes, une transformation et un usage spécifique et avaient traditionnellement des objectifs ou des utilisations différentes, et, d'autre part, que le dumping du contreplaqué de bouleau russe était à l'origine de certains effets de substitution.

59 La Commission a donc examiné les déclarations des associations de l'Union du contreplaqué, en étant toutefois parvenue, à l'issue de l'appréciation de l'ensemble des informations pertinentes, à la conclusion que le contreplaqué d'autres essences de bois était différent du contreplaqué de bouleau et que, partant, il ne convenait pas de l'inclure dans la définition du produit concerné, sans pour autant commettre d'erreurs manifestes d'appréciation des faits ni d'erreur de droit.

60 Il résulte de ce qui précède que les arguments de la requérante avancés pour soutenir que le règlement attaqué viole l'article 4, paragraphe 1, du règlement de base, lu à la lumière de l'article 3, paragraphe 2, de ce règlement, et que la Commission a commis des erreurs manifestes d'appréciation des faits en n'examinant pas de manière objective les déclarations des associations de l'Union du contreplaqué dans le cadre de la définition de l'industrie de l'Union et du produit concerné ne sauraient aboutir.

61 Les griefs de la requérante à cet égard doivent donc être rejetés comme étant non fondés.

Sur la violation du principe de bonne administration

62 Selon la jurisprudence, dans le cas où les institutions de l'Union disposent d'un large pouvoir d'appréciation, le respect des garanties conférées par l'ordre juridique de l'Union dans les procédures administratives revêt une importance d'autant plus fondamentale. Parmi ces garanties figure, notamment, l'obligation pour l'institution compétente d'examiner, avec soin et impartialité, tous les éléments pertinents du cas d'espèce (arrêts du 21 novembre 1991, Technische Universität München, C‑269/90, EU:C:1991:438, point 14, et du 13 juillet 2006, Shandong Reipu Biochemicals/Conseil, T‑413/03, EU:T:2006:211, point 63).

63 Ainsi, dans le cadre des enquêtes antidumping, il appartient aux institutions de veiller au respect du principe de bonne administration consacré par l'article 41, paragraphes 1 et 2, de la Charte, en vertu duquel toute personne a le droit de voir ses affaires traitées impartialement, équitablement et dans un délai raisonnable par les institutions, organes et organismes de l'Union. Cet article de la Charte régit la procédure administrative devant la Commission et le Conseil de l'Union européenne en matière de défense contre les importations qui font l'objet d'un dumping de la part de pays non membres de l'Union [voir arrêt du 12 décembre 2014, Crown Equipment (Suzhou) et Crown Gabelstapler/Conseil, T‑643/11, EU:T:2014:1076, point 45 et jurisprudence citée].

64 En l'espèce, il ressort de l'analyse effectuée ci-dessus que la Commission a examiné avec soin et impartialité les déclarations des associations de l'Union du contreplaqué et a répondu aux arguments de la requérante dans le cadre de la définition du produit concerné et de l'industrie de l'Union, de sorte que la Commission n'a pas méconnu le principe de bonne administration à cet égard.

65 Au vu de tout ce qui précède, il y a lieu de rejeter le premier moyen comme étant non fondé.

Sur le deuxième moyen, tiré d'erreurs manifestes d'appréciation ainsi que de la violation de l'article 3 du règlement de base et du principe de non-discrimination dans le cadre de la détermination du préjudice et du lien de causalité en cause

66 Tout d'abord, la requérante soutient que l'évolution des prix du contreplaqué dans l'Union, telle que rapportée par la Birch Plywood Alliance, montre que, entre la période d'enquête et mai 2021, les prix du produit concerné ont fait l'objet d'une hausse allant de 62 % à 88 %. En mai 2021, les prix dudit produit auraient été compris entre 800 et 1500 euros par mètres cubes, ce qui aurait été nettement supérieur au coût de production de l'industrie de l'Union, de 692 euros par mètres cubes, observé par la Commission pendant la période d'enquête. Les acteurs du marché du contreplaqué attribueraient principalement cette forte hausse des prix à la rapidité de la reprise économique après la pandémie et à l'essor de la construction dans l'Union, qui ne serait pas temporaire.

67 Ainsi, selon la requérante, la prise en considération de données au-delà de la période d'enquête (ci-après les « données postérieures à la période d'enquête ») aurait permis de démontrer une hausse des prix du contreplaqué de bouleau. La Commission aurait dû tenir compte de cette évolution significative du marché. Le refus d'évaluer ces données discréditerait son analyse globale et serait contraire à sa pratique antérieure.

68 Ensuite, la requérante fait valoir qu'il n'y a pas de lien de causalité entre les importations du produit concerné et la situation de l'industrie de l'Union. En effet, il existerait une segmentation entre le marché du contreplaqué de bouleau en provenance de Russie, qui serait un contreplaqué carré standard de grande consommation, et le contreplaqué produit par l'industrie de l'Union, qui serait un produit plus cher, car spécialisé et destiné à des applications spécifiques.

69 La différence de prix de 38 % entre les prix de vente de l'industrie de l'Union et les prix à l'exportation moyens pondérés des producteurs-exportateurs russes retenus dans l'échantillon confirmerait cette segmentation du marché. Le marché du contreplaqué étant très sensible aux prix, cette forte différence de prix aurait également pour conséquence d'évincer immédiatement et entièrement les producteurs de l'Union du marché. La segmentation du marché serait donc le seul facteur expliquant pourquoi l'industrie de l'Union détiendrait encore un tiers du marché de l'Union.

70 La requérante ajoute que la Commission n'a pas analysé la part des codes de produit mis en correspondance dans les ventes globales des producteurs russes et des producteurs de l'Union, ce qui aurait permis de confirmer que les importations en provenance de Russie et les ventes de l'industrie de l'Union appartenaient à des segments de marché différents. La Commission se contredirait par ailleurs lorsqu'elle reconnaîtrait une segmentation entre le marché du contreplaqué de bouleau en provenance de Biélorussie, du fait de ses prix moins élevés et de sa moindre qualité, mais estimerait qu'il n'en irait pas de même pour les marchés de contreplaqué de bouleau russe et de l'Union.

71 La Commission aurait donc violé l'article 3 du règlement de base et aurait commis des erreurs manifestes d'appréciation en ignorant la segmentation du marché dans le cadre de son analyse des indicateurs de préjudice.

72 Enfin, la requérante fait valoir que la Commission aurait erronément omis de tenir compte d'autres facteurs de préjudice ayant eu un impact sur la situation de l'industrie de l'Union.

73 À cet égard, d'une part, la requérante soutient que la disponibilité et les prix des rondins de bouleau, en tant que matière première du contreplaqué de bouleau, a eu une incidence directe sur la situation de l'industrie de l'Union. Or, pendant la période d'enquête, le volume des importations de matières premières dans l'Union aurait considérablement augmenté et le volume de production de l'industrie de l'Union aurait baissé. Les producteurs de l'Union auraient donc été fortement tributaires des importations de rondins de bouleau en provenance de Russie et la disponibilité des rondins aurait été perturbée du fait des conditions météorologiques et des retards d'approvisionnement survenus.

74 L'accès limité de l'industrie de l'Union à la principale matière première serait donc à l'origine du préjudice causé aux producteurs de l'Union et la Commission aurait commis une erreur manifeste d'appréciation en concluant le contraire.

75 D'autre part, la requérante fait valoir que, au vu du volume et des prix des importations en provenance de Biélorussie et d'Ukraine, ces pays auraient dû faire partie des pays exportateurs ciblés par l'enquête de la Commission.

76 Il serait donc discriminatoire d'instituer une mesure antidumping à l'encontre de la Russie et d'ignorer les indicateurs similaires concernant l'Ukraine et la Biélorussie.

77 La Commission, soutenue par les intervenantes, conteste les arguments de la requérante.

Sur l'augmentation des prix au cours de la période postérieure à la période d'enquête

78 Aux termes de l'article 6, paragraphe 1, du règlement de base, à la suite de l'ouverture de la procédure, la Commission, en coopération avec les États membres, commence l'enquête au niveau de l'Union. Cette enquête porte simultanément sur le dumping et le préjudice en cause. Aux fins d'une détermination représentative, une période d'enquête est choisie, qui, en cas de dumping, couvre normalement une période d'une durée minimale de six mois immédiatement antérieure à l'ouverture de la procédure. Les renseignements relatifs à une période postérieure à la période d'enquête ne sont pas, normalement, pris en compte.

79 À cet égard, le Tribunal a déjà eu l'occasion de souligner que, s'agissant de l'article 6, paragraphe 1, du règlement de base, la période d'enquête et l'interdiction de prendre en compte des éléments postérieurs à celle-ci visent à garantir que les résultats de l'enquête soient représentatifs et fiables en permettant que les éléments sur lesquels se fonde la détermination du dumping et du préjudice en cause ne soient pas influencés par le comportement des producteurs intéressés consécutif à l'ouverture de la procédure antidumping et donc que le droit définitif imposé à l'issue de la procédure soit de nature à remédier effectivement au préjudice résultant du dumping (voir arrêt du 17 décembre 2008, HEG et Graphite India/Conseil, T‑462/04, EU:T:2008:586, point 66 et jurisprudence citée).

80 En utilisant le terme « normalement », l'article 6, paragraphe 1, du règlement de base permet des exceptions à l'interdiction de prendre en considération des renseignements relatifs à une période postérieure à la période d'enquête. S'agissant de circonstances favorables aux entreprises concernées par l'enquête, il a été jugé qu'il ne peut incomber aux institutions de l'Union de prendre en compte des éléments relevant d'une période postérieure à la période d'enquête, à moins que ces éléments ne révèlent de nouveaux développements rendant manifestement inadaptée l'institution envisagée d'un droit antidumping. Si, en revanche, des éléments relatifs à une période postérieure à la période d'enquête rendent, du fait qu'ils reflètent le comportement actuel des entreprises concernées, justifiée l'imposition ou l'augmentation d'un droit antidumping, force est de constater, sur le fondement de ce qui précède, que les institutions ont le droit, voire l'obligation, d'en tenir compte (voir arrêt du 17 décembre 2008, HEG et Graphite India/Conseil, T‑462/04, EU:T:2008:586, point 67 et jurisprudence citée).

81 L'enquête doit être menée sur la base d'informations aussi actuelles que possible afin de pouvoir fixer des droits antidumping qui sont propres à protéger l'industrie de l'Union contre les pratiques de dumping (arrêts du 3 octobre 2000, Industrie des poudres sphériques/Conseil, C‑458/98 P, EU:C:2000:531, point 92, et du 28 janvier 2016, CM Eurologistik et GLS, C‑283/14 et C‑284/14, EU:C:2016:57, point 66).

82 En l'espèce, tout d'abord, le Tribunal constate que, au considérant 202 du règlement attaqué, la Commission a indiqué que « la situation postérieure à la période d'enquête était temporaire et résultait d'une reprise post-COVID rapide et inattendue ». Elle n'a donc pas estimé que ces circonstances temporaires étaient de nature à rendre inappropriée l'institution proposée de droits antidumping définitifs, même à la lumière de l'évolution de la situation après la période d'enquête. Elle a confirmé ce point de vue au considérant 228 du règlement attaqué et a renvoyé aux prévisions de la Banque mondiale à cet égard.

83 La Commission a également relevé, au considérant 229 du règlement attaqué, que, s'il semblait généralement admis que les prix se stabiliseraient à un certain moment, il lui était difficile de déterminer à quels niveaux et combien de temps durerait la situation de forte demande et de prix élevés. En tout état de cause, elle a demandé, à titre exceptionnel, des données postérieures à la période d'enquête concernant notamment le volume de production, le volume des ventes, les prix de vente et la rentabilité des producteurs de l'Union et a recueilli le point de vue des parties intéressées afin d'évaluer plus avant, et en temps utile, l'incidence de l'évolution récente du marché sur l'intérêt de l'Union.

84 Force est donc de constater que, contrairement à ce que soutient la requérante, la Commission n'a pas refusé d'évaluer les données postérieures à la période d'enquête.

85 Ensuite, la requérante n'étaye aucunement ses affirmations selon lesquelles il était manifeste que les intérêts concurrents des producteurs, des importateurs et des utilisateurs de l'Union nécessitaient une analyse des données postérieures à la période d'enquête dans le contexte de la détermination du préjudice et de l'intérêt de l'Union ou que les acteurs du marché du contreplaqué attribuaient principalement cette forte hausse des prix à la rapidité de la reprise économique après la pandémie et à l'essor de la construction dans l'Union, phénomène qui devrait durer longtemps. Si la requérante fait référence à une hausse de prix de l'ordre de 62 % à 88 % entre la période d'enquête et mai 2021 et renvoie à l'évolution des prix du contreplaqué dans l'Union, telle qu'elle aurait été rapportée par la Birch Plywood Alliance, elle ne produit pas le document en question.

86 Enfin, les règlements d'exécution auxquels la requérante renvoie pour établir que la Commission se serait départie de sa pratique habituelle en ce qui concerne l'acceptation de données postérieures à la période d'enquête n'apparaissent pas pertinents, dans la mesure où la légalité d'un règlement instituant des droits antidumping doit s'apprécier au regard des règles de droit et, notamment, des dispositions du règlement de base, et non sur la base de la prétendue pratique décisionnelle antérieure de la Commission (voir, en ce sens, arrêt du 6 juillet 2022, Zhejiang Hangtong Machinery Manufacture et Ningbo Hi-Tech Zone Tongcheng Auto Parts/Commission, T‑278/20, EU:T:2022:417, point 70 et jurisprudence citée).

87 La requérante n'a donc produit aucun élément de preuve susceptible de remettre en cause la validité de l'analyse de la Commission portant sur les données postérieures à la période d'enquête. Elle reste en défaut de démontrer que l'éventuelle augmentation des prix postérieure à la période d'enquête est un nouveau développement rendant manifestement inadaptée l'institution du droit antidumping.

88 Les griefs tirés d'une erreur manifeste d'appréciation et d'une violation de l'article 3 du règlement de base à cet égard doivent donc être rejetés.

Sur la segmentation du marché

89 Selon la Cour, il ressort des termes mêmes de l'article 3, paragraphe 3, du règlement de base que la méthode suivie pour déterminer une éventuelle sous-cotation des prix doit, en principe, être opérée au niveau du « produit similaire », au sens de l'article 1er, paragraphe 4, dudit règlement, même si celui-ci peut être composé de différents types de produit relevant de plusieurs segments de marché (voir, en ce sens, arrêt du 20 janvier 2022, Commission/Hubei Xinyegang Special Tube, C‑891/19 P, EU:C:2022:38, point 74 et jurisprudence citée).

90 Partant, le règlement de base n'impose, en principe, pas d'obligation à la Commission d'effectuer une analyse de l'existence de la sous-cotation des prix à un niveau autre que celui du produit similaire (arrêt du 20 janvier 2022, Commission/Hubei Xinyegang Special Tube, C‑891/19 P, EU:C:2022:38, point 75).

91 Toutefois, dès lors que, en vertu de l'article 3, paragraphe 2, du règlement de base, la Commission est tenue de procéder à un « examen objectif » de l'effet des importations faisant l'objet d'un dumping sur les prix des produits similaires de l'industrie de l'Union, elle est obligée de tenir compte dans son analyse de la sous-cotation des prix de tous les éléments de preuve positifs pertinents, y compris, le cas échéant, ceux relatifs aux différents segments de marché du produit considéré (arrêt du 20 janvier 2022, Commission/Hubei Xinyegang Special Tube, C‑891/19 P, EU:C:2022:38, point 77).

92 Dès lors, afin d'assurer l'objectivité de l'analyse de la sous-cotation des prix, la Commission peut, dans certaines circonstances, être tenue de procéder à une telle analyse au niveau des segments du marché du produit en cause, même si le large pouvoir d'appréciation dont dispose cette institution, notamment pour la détermination de l'existence d'un préjudice, s'étend à tout le moins, aux décisions relatives au choix de la méthode d'analyse, aux données et aux preuves à recueillir, à la méthode de calcul à utiliser pour déterminer la marge de sous-cotation ainsi qu'à l'interprétation et à l'évaluation des données recueillies (voir, en ce sens, arrêt du 20 janvier 2022, Commission/Hubei Xinyegang Special Tube, C‑891/19 P, EU:C:2022:38, point 78).

93 Au nombre des telles circonstances figure l'existence d'une situation caractérisée par le fait que les importations faisant l'objet de l'enquête antidumping étaient très majoritairement concentrées dans l'un des segments du marché du produit en cause. En effet, dans une telle situation de segmentation particulièrement caractérisée des importations concernées, l'article 3 du règlement de base ne fait pas obstacle à ce que les institutions de l'Union procèdent à l'évaluation du préjudice séparément au niveau du segment concerné, sous réserve, toutefois, que le produit similaire dans son ensemble soit dûment pris en compte (arrêt du 20 janvier 2022, Commission/Hubei Xinyegang Special Tube, C‑891/19 P, EU:C:2022:38, points 79 et 80).

94 Il a également déjà été jugé qu'une analyse par segment peut être justifiée lorsque les produits visés par l'enquête ne sont pas interchangeables et lorsqu'un ou plusieurs segments sont davantage susceptibles d'être concernés que d'autres par les importations faisant l'objet d'un dumping. En revanche, une telle analyse par segment n'est pas requise lorsque les produits sont suffisamment interchangeables. Ce n'est que dans l'hypothèse où les résultats se révéleraient biaisés, pour une raison ou une autre, qu'une analyse segmentée se justifierait en présence de produits pourtant interchangeables. Dans un tel cas, il appartient à la partie intéressée d'apporter des éléments concrets permettant d'étayer son affirmation selon laquelle différents produits ne sont pas suffisamment interchangeables ou selon laquelle l'absence d'une analyse segmentée en présence de produits suffisamment interchangeables aboutirait, en l'espèce, à des résultats biaisés (voir, en ce sens, arrêt du 19 mai 2021, China Chamber of Commerce for Import and Export of Machinery and Electronic Products e.a./Commission, T‑254/18, EU:T:2021:278, points 377 à 379 et jurisprudence citée).

95 En outre, l'appartenance de produits à des gammes différentes ne suffit pas pour établir, en soi, leur absence d'interchangeabilité et donc l'opportunité d'effectuer une analyse par segment, dès lors que des produits appartenant à des gammes distinctes peuvent avoir des fonctions identiques ou répondre aux mêmes besoins (voir, en ce sens, arrêt du 10 mars 1992, Sanyo Electric/Conseil, C‑177/87, EU:C:1992:111, point 12).

96 En l'espèce, le Tribunal considère que la requérante n'a pas apporté d'éléments de preuve suffisants de nature à démontrer que le contreplaqué de bouleau de l'Union et le contreplaqué de bouleau russe ne sont pas interchangeables et en concurrence l'un avec l'autre.

97 En effet, tout d'abord, la requérante n'étaye nullement ses affirmations selon lesquelles le marché du contreplaqué est très sensible au prix, de sorte que la forte différence entre les prix russes et les prix de l'Union aurait, en cas de concurrence entre l'industrie de l'Union et les importations en provenance de Russie, pour conséquence d'évincer totalement les producteurs de l'Union du marché. Elle n'apporte pas non plus d'éléments de preuve convaincants au soutien des allégations selon lesquelles les exportateurs russes vendent normalement des produits standard de grande consommation, notamment des contreplaqués carrés de niche bas de gamme, qui sont moins chers que les produits spécialisés destinés à des applications spécifiques vendus par les producteurs de l'Union, ou encore que la segmentation du marché serait le seul facteur susceptible d'expliquer pourquoi l'industrie de l'Union détient encore un tiers du marché de l'Union malgré un écart de prix de 38 % entre le contreplaqué de bouleau russe et le contreplaqué de bouleau de l'Union.

98 Force est par ailleurs de constater que la requérante reconnaît par là même que le contreplaqué de bouleau de forme carrée et bas de gamme n'est pas le seul produit par les producteurs-exportateurs russes.

99 Ensuite, la requérante se limite à procéder par de simples affirmations en indiquant qu'une évaluation objective de la Commission aurait confirmé que les importations en provenance de Russie et les ventes de l'industrie de l'Union appartiennent à des segments de marché différents et ne constituent pas une source essentielle de concurrence entre les producteurs russes et ceux de l'Union. Elle n'indique en revanche pas sur quels éléments ou documents la Commission aurait dû se fonder pour procéder à une telle évaluation et parvenir à une telle conclusion.

100 Enfin, s'agissant des importations en provenance de Biélorussie, la requérante se contente de soulever une contradiction avec le choix de la Commission de ne pas reconnaître une segmentation du marché. Elle ne conteste toutefois pas l'explication de la Commission, formulée au considérant 172 du règlement attaqué, selon laquelle la différence de prix entre le contreplaqué de bouleau russe et le contreplaqué de bouleau biélorusse serait due aux contraintes technologiques de Biélorussie, qui ne peut produire que du contreplaqué de bouleau très particulier et de moins bonne qualité, alors que les importations en provenance de Russie concerneraient un plus large éventail de produits et du contreplaqué de bouleau de qualité supérieure.

101 Les affirmations non étayées de la requérante ne permettent donc pas de déterminer dans quelle mesure la Commission aurait commis une erreur de droit ou dans l'appréciation matérielle des faits en ne procédant pas à une segmentation entre le marché russe de contreplaqué de bouleau et le marché de l'Union.

102 Dès lors, la requérante n'a pas démontré que la Commission a commis une erreur manifeste d'appréciation des faits ou une violation de l'article 3 du règlement de base, de sorte que ses griefs à cet égard doivent être rejetés comme étant non fondés.

Sur l'existence d'autres facteurs de préjudice

– Sur l'accès à la matière première

103 L'article 3, paragraphe 7, du règlement de base prévoit que les facteurs connus, autres que les importations faisant l'objet d'un dumping, qui, au même moment, causent un préjudice à l'industrie de l'Union sont aussi examinés de manière à ce que le préjudice causé par ces autres facteurs ne soit pas attribué aux importations faisant l'objet d'un dumping au sens du paragraphe 6 de cet article, lequel précise qu'il doit être démontré, à l'aide de tous les éléments de preuve pertinents présentés, que les importations faisant l'objet d'un dumping causent un préjudice important à l'industrie de l'Union (voir arrêt du 16 avril 2015, TMK Europe, C‑143/14, EU:C:2015:236, point 33 et jurisprudence citée).

104 Lors de sa détermination, les institutions de l'Union ont l'obligation d'examiner si le préjudice qu'elles entendent retenir découle effectivement des importations qui ont fait l'objet d'un dumping et d'écarter tout préjudice découlant d'autres facteurs, et, notamment, celui qui aurait sa cause dans le comportement propre des producteurs de l'Union (voir arrêt du 16 avril 2015, TMK Europe, C‑143/14, EU:C:2015:236, point 35 et jurisprudence citée).

105 Il appartient, à ce titre, aux institutions de l'Union de vérifier si les effets de ces autres facteurs n'ont pas été de nature à rompre le lien de causalité entre, d'une part, les importations en cause et, d'autre part, le préjudice subi par l'industrie de l'Union. Il leur appartient également de vérifier que le préjudice imputable à ces autres facteurs n'entre pas en ligne de compte dans la détermination du préjudice au sens de l'article 3, paragraphe 7, du règlement de base et que, par conséquent, le droit antidumping imposé n'excède pas ce qui est nécessaire pour éliminer le préjudice causé par les importations faisant l'objet d'un dumping (voir arrêt du 16 avril 2015, TMK Europe, C‑143/14, EU:C:2015:236, point 36 et jurisprudence citée).

106 Toutefois, si les institutions de l'Union constatent que, en dépit de tels facteurs, le préjudice causé par les importations faisant l'objet d'un dumping est important, en vertu de l'article 3, paragraphe 1, du règlement de base, le lien de causalité entre ces importations et le préjudice subi par l'industrie de l'Union peut en conséquence être établi (voir arrêt du 16 avril 2015, TMK Europe, C‑143/14, EU:C:2015:236, point 37 et jurisprudence citée).

107 Enfin, il appartient aux parties invoquant l'illégalité d'un règlement tel que le règlement attaqué de présenter les éléments de preuve de nature à démontrer l'incidence des facteurs susceptibles d'avoir un effet sur le préjudice causé à l'industrie de l'Union. Ces parties doivent notamment démontrer que lesdits facteurs ont pu avoir une incidence d'une telle importance que l'existence d'un préjudice causé à l'industrie de l'Union et celle du lien de causalité entre ce préjudice et les importations faisant l'objet d'un dumping n'étaient plus fiables (voir, en ce sens, arrêt du 19 décembre 2013, Transnational Company « Kazchrome » et ENRC Marketing/Conseil, C‑10/12 P, non publié, EU:C:2013:865, point 28).

108 En l'espèce, la Commission a analysé les niveaux de stocks des producteurs de l'Union retenus dans l'échantillon au cours de la période considérée. Au considérant 154 du règlement provisoire, auquel renvoie le considérant 184 du règlement attaqué, la Commission a relevé que l'accès à la matière première principale, les rondins de bouleau, n'expliquait pas le préjudice, car les producteurs de l'Union avaient un accès suffisant à l'approvisionnement en cette matière. Ainsi, le tableau 9 du règlement provisoire montre que les stocks ont évolué de 30 894 mètres cubes en 2017 à 37 685 mètres cubes au cours de la période d'enquête, soit une augmentation de 22 % durant la période considérée. La hausse la plus forte (41 %) était intervenue entre 2017 et 2018, le niveau maximal ayant été atteint en 2018.

109 La Commission a ajouté que, par la suite, l'industrie de l'Union a réussi à réduire ses stocks de 25 % en 2019 en ajustant sa production, mais que les stocks avaient à nouveau augmenté de 6 % entre 2019 et la période d'enquête en raison de la baisse continue des ventes de l'Union. Les stocks de clôture en pourcentage de la production étaient passés de 3,1 % en 2017 à 4,4 % au cours de la période d'enquête. Selon la Commission, l'augmentation des stocks démontrait donc que le problème ne tenait pas à la production, mais bien à la commercialisation, de sorte que la baisse de la production pendant la période considérée n'était pas liée à la disponibilité du bois.

110 Au soutien de ses affirmations, la requérante produit dans la requête un tableau relatif aux exportations russes de bois pour contreplaqué, duquel il ressort que les importations de cette matière première dans l'Union ont augmenté en 2020, par rapport à 2019, et renvoie à cet égard à l'annexe A.3 de la requête. Or, le Tribunal constate que le tableau en question n'y est pas mentionné. Le titre du tableau apparaît en revanche dans l'annexe A.6 de la requête, mais les informations qu'il est censé reproduire n'y figurent pas, pour des raisons de confidentialité. La requérante n'y renseigne également pas la source de ces informations.

111 La requérante n'explique en outre pas dans quelle mesure une éventuelle augmentation des importations de matière première en provenance de Russie dans l'Union remettrait en cause les constatations de la Commission selon lesquelles, pendant la période d'enquête, bien que les stocks de matière première aient augmenté, l'industrie de l'Union était devenue déficitaire, de sorte que le problème ne tenait pas à la production du contreplaqué, mais à sa commercialisation.

112 La requérante ne conteste par ailleurs pas l'examen que la Commission a fait de l'évolution des stocks de l'industrie de l'Union ni que ceux-ci ont augmenté au cours de la période considérée. Or, d'une part, il ressort du libellé du considérant 154 du règlement provisoire et du considérant 184 du règlement attaqué que c'est sur cette base que la Commission a estimé que l'accès à la matière première n'expliquait pas le préjudice. D'autre part, il ne semble pas ressortir du règlement provisoire et du règlement attaqué que la conclusion de la Commission relative à l'accès suffisant à la matière première principale visait uniquement ladite matière qui serait exclusivement originaire de l'Union.

113 La requérante reste donc en défaut de présenter des éléments de preuve suffisants, de nature à démontrer que l'accès aux matières premières dans l'Union est susceptible d'avoir un effet sur le préjudice causé à l'industrie de l'Union, voire de rompre le lien de causalité entre ledit préjudice et les importations litigieuses.

114 Quant à l'argument de la requérante relatif aux prix, il se fonde sur la prémisse d'une segmentation entre le marché de contreplaqué de bouleau russe et le marché de contreplaqué de bouleau de l'Union. Or, ainsi qu'il ressort de l'analyse effectuée ci-dessus, les griefs de la requérante à cet égard doivent être rejetés.

115 Dès lors, il y a lieu de conclure que la requérante reste en défaut de démontrer que la Commission a commis une erreur manifeste d'appréciation des faits ou une violation de l'article 3 du règlement de base en concluant que l'accès à la matière première n'expliquait pas le préjudice causé à l'industrie de l'Union. Les griefs de la requérante à cet égard doivent donc être rejetés comme étant non fondés.

– Sur les importations en provenance de Biélorussie et d'Ukraine

116 Sans même qu'il soit nécessaire d'examiner si les importations ukrainiennes et biélorusses sont dans des situations comparables, il suffit de rappeler que, selon une jurisprudence constante, le principe d'égalité de traitement doit se concilier avec le respect du principe de légalité, selon lequel nul ne peut invoquer, à son profit, une illégalité commise en faveur d'autrui. Or, tel est le sens de l'argumentation de la requérante, qui repose entièrement sur la circonstance qu'une enquête aurait également dû être diligentée à l'encontre d'autres importations. Partant, le principe d'égalité de traitement n'est pas applicable au cas d'espèce et l'absence d'ouverture d'une enquête à l'encontre d'autres sources éventuelles de dumping est sans incidence sur la légalité du règlement attaqué (voir, en ce sens, arrêts du 17 décembre 2008, HEG et Graphite India/Conseil, T‑462/04, EU:T:2008:586, point 42, et du 25 janvier 2017, Rusal Armenal/Conseil, T‑512/09 RENV, EU:T:2017:26, point 110).

117 Ce grief doit donc également être rejeté et, partant, le deuxième moyen dans son intégralité.

Sur les troisième et quatrième moyens, tirés d'erreurs manifestes d'appréciation, d'une erreur de droit ainsi que de la violation des droits de la défense quant à l'imposition de mesures antidumping contraires à l'intérêt de l'Union

118 À titre principal, la requérante soutient que la mesure antidumping adoptée à l'encontre du produit concerné est contraire aux intérêts de l'Union.

119 Tout d'abord, la requérante fait valoir que toute mesure antidumping risquera de limiter les importations du produit concerné en dessous de l'équilibre du marché et que les futures importations en provenance de Russie baisseront dans l'ensemble de 50 %. Or, les producteurs de Biélorussie et d'Ukraine ne pourraient remplacer les importations en provenance de Russie et répondre à la demande des utilisateurs de l'Union, ce qui serait préjudiciable à de nombreux utilisateurs et importateurs indépendants de l'Union. En outre, à moyen et long terme, le marché trouverait un nouvel équilibre et la consommation devrait évoluer vers des types de contreplaqué de moindre qualité et à l'empreinte carbone plus élevée, telle qu'une production venant en remplacement de Chine, d'Indonésie et du Brésil.

120 Ensuite, selon la requérante, les mesures antidumping dans leur forme et leur niveau actuel risquent d'inciter l'industrie de l'Union à accroître sa production et à augmenter les importations de matières premières. Or, un tel accroissement de la demande risquerait de ne pas pouvoir être satisfait par la Russie, qui pourrait introduire des restrictions temporaires à l'exportation.

121 Enfin, la requérante soutient que l'analyse que fait la Commission de l'intérêt des utilisateurs est limitée et superficielle. Elle n'aurait tenu compte que d'une réponse au questionnaire adressé aux utilisateurs, bien qu'elle en ait reçu d'autres, et se serait largement appuyée sur une analyse d'impact du droit antidumping sur les importations du produit concerné qui serait irrecevable, aucune version publique appropriée n'ayant été produite. À tout le moins, la Commission devrait retirer ce document du dossier, conformément à l'article 19, paragraphe 3, du règlement de base, et procéder à une nouvelle enquête. La requérante ajoute que les conclusions du règlement attaqué auraient pu être différentes si une telle version publique avait été produite et si les parties intéressées avaient eu la possibilité de faire part de leurs observations à cet égard.

122 La Commission aurait donc commis des erreurs manifestes d'appréciation ainsi qu'une violation de l'article 21 du règlement de base et des droits de la défense de la requérante.

123 À titre subsidiaire, la requérante fait valoir que, pour autant que le Tribunal considère que le règlement attaqué doive être maintenu, la Commission a commis une erreur manifeste d'appréciation en imposant la mesure antidumping dans sa forme actuelle, qui est la plus restrictive, alors qu'elle aurait pu adopter une mesure antidumping sous la forme d'un droit variable, fondé sur un droit ad valorem plafonné par un prix minimal à l'importation (ci-après le « PMI »).

124 La Commission, soutenue par les intervenantes, conteste les arguments de la requérante.

Sur l'imposition de mesures antidumping contraires aux intérêts de l'Union

125 Le Tribunal rappelle que, selon la jurisprudence, lorsque le montant du droit antidumping a été établi, il convient également d'apprécier si l'imposition de ce droit est justifiée au regard de l'intérêt de l'Union (voir arrêt du 3 décembre 2020, Changmao Biochemical Engineering/Distillerie Bonollo e.a., C‑461/18 P, EU:C:2020:979, point 67 et jurisprudence citée).

126 À cet égard, l'article 21, paragraphe 1, du règlement de base impose aux institutions de l'Union, appelées à déterminer s'il est de l'intérêt de l'Union d'adopter ou de proroger des mesures antidumping, d'apprécier tous les intérêts en jeu pris dans leur ensemble, y compris ceux de l'industrie nationale ainsi que ceux des utilisateurs et des consommateurs, en accordant une attention particulière à la nécessité d'éliminer les effets de distorsion des échanges d'un dumping préjudiciable et de restaurer une concurrence effective. Une telle détermination ne peut intervenir que si toutes les parties ont eu la possibilité de faire connaître leur point de vue, conformément à l'article 21, paragraphe 2 de ce règlement (voir arrêt du 3 décembre 2020, Changmao Biochemical Engineering/Distillerie Bonollo e.a., C‑461/18 P, EU:C:2020:979, point 68 et jurisprudence citée).

127 En l'espèce, si la requérante allègue que les mesures antidumping en cause sont contraires à l'intérêt de nombreux utilisateurs de l'Union, des producteurs de l'Union et des importateurs indépendants, ses affirmations ne sont pas suffisamment étayées.

128 En effet, la requérante n'apporte aucun élément de preuve convaincant au soutien des allégations selon lesquelles les futures importations en provenance de Russie devraient baisser de 50 % ou que le gouvernement russe risquerait d'introduire des restrictions temporaires à l'exportation sous la forme de quotas. Elle n'explique également pas les raisons pour lesquelles il serait attendu de l'industrie de l'Union qu'elle couvre l'intégralité de sa propre consommation ou qu'elle ne puisse qu'y ajouter la production de Biélorussie ou d'Ukraine.

129 Il en va de même des affirmations de la requérante portant sur le fait que, à moyen et à long terme, la consommation dans l'Union devrait évoluer vers des types de contreplaqués ou de matériaux de moindre qualité et à l'empreinte carbone plus élevée, originaires de Chine, d'Indonésie ou du Brésil, ou encore que l'élasticité de la demande ne permettrait pas de répercuter efficacement l'augmentation des coûts résultant des droits antidumping sur les utilisateurs finaux.

130 Par ailleurs, même à considérer que les ventes du produit concerné diminuent effectivement, il ne s'ensuit pas pour autant que les mesures en cause soient excessives ou privent les exportateurs d'un accès au marché de l'Union.

131 Force est également de constater que la Commission a examiné ces questions dans le règlement provisoire et le règlement attaqué.

132 Ainsi, en réponse à l'argument tiré du risque de représailles de la part du gouvernement russe et de probables restrictions à l'exportation de matières premières, la Commission a, au considérant 213 du règlement attaqué, indiqué ne pas disposer d'élément qui témoignerait de l'intention du gouvernement russe de prendre des mesures de rétorsion à la suite de la présente procédure.

133 Dans le cadre de l'examen du manque de capacités allégué de production de l'Union pour répondre à la demande de l'Union et de la poursuite des importations russes, la Commission a rappelé, aux considérants 214, 224 et 234 du règlement attaqué, que l'objectif des mesures n'était pas de faire cesser les importations de produits russes, mais d'établir des conditions de concurrence équitables permettant de maintenir un approvisionnement en contreplaqué de bouleau à des prix équitables en provenance de Russie.

134 La Commission a en substance également indiqué, aux considérants 224 et 225 du règlement attaqué ainsi qu'aux considérants 185 à 187 et 202 du règlement provisoire, auxquels renvoient les considérants 217, 224, 225 et 232 du règlement attaqué, que l'industrie de l'Union n'était pas tenue de répondre pleinement à la demande de l'Union, que les consommateurs pouvaient continuer à s'approvisionner auprès de producteurs russes et dans d'autres pays tiers, comme l'Ukraine et la Biélorussie, et qu'il n'avait pas été démontré que, si les importations en provenance de Russie devaient être remplacées par des importations en provenance d'un autre pays tiers, cet autre pays aurait été la Chine ni que la production d'autres essences de bois aurait été moins durable que la production de bouleau russe.

135 La Commission en a conclu, aux considérants 215, 219 et 221 du règlement attaqué, qui renvoient aux considérants 179 à 182, 189, 190, 194 et 195 du règlement provisoire, que l'institution des mesures en cause serait dans l'intérêt de l'industrie de l'Union, que l'éventuelle incidence négative des mesures en cause sur certains importateurs indépendants ou les utilisateurs ne devrait pas être significative dans l'ensemble et ne devrait pas l'emporter sur l'effet positif qu'auraient les mesures sur les producteurs de l'Union. Elle a ajouté, au considérant 236 du règlement attaqué, qui renvoie au considérant 204 du règlement provisoire, que l'institution de mesures définitives ne serait donc manifestement pas contraire à l'intérêt de l'Union, au sens de l'article 21 du règlement de base, et qu'il n'existait pas de raison impérieuse justifiant qu'il ne fût pas dans l'intérêt de l'Union d'instituer des mesures sur les importations du produit concerné.

136 Or, il a déjà été jugé que des mesures antidumping, tant par leur objet que par l'effet recherché, doivent permettre de restaurer la concurrence au sein d'un marché donné en visant à éliminer les distorsions qui affectent celui-ci et qui résultent de pratiques de dumping (arrêt du 30 avril 2015, VTZ e.a./Conseil, T‑432/12, non publié, EU:T:2015:248, point 167).

137 Il serait donc, en principe, contraire aux buts de la réglementation antidumping que, après avoir établi l'existence ou la probabilité de continuation ou de réapparition d'un dumping causant un préjudice, les institutions renoncent à imposer ou à maintenir des mesures antidumping, afin d'assurer que l'accès du produit concerné sur le marché de l'Union ne soit aucunement restreint. En effet, une telle option risquerait de restreindre la concurrence sur ce marché en accordant un avantage supplémentaire aux exportateurs vendant des produits faisant l'objet d'un dumping, ce qui pourrait leur permettre d'évincer les producteurs de l'Union.

138 Le Tribunal constate par ailleurs que les exigences découlant du respect des droits de la défense s'imposent non seulement dans le cadre de procédures susceptibles d'aboutir à des sanctions, mais également dans celui des procédures d'enquête précédant l'adoption de règlements antidumping, qui peuvent affecter les entreprises concernées de manière directe et individuelle et comporter pour elles des conséquences défavorables. En particulier, les entreprises intéressées doivent avoir été mises en mesure, au cours de la procédure administrative, de faire connaître utilement leur point de vue sur la réalité et la pertinence des faits et circonstances allégués et sur les éléments de preuve retenus par la Commission à l'appui de son allégation de l'existence d'une pratique de dumping et du préjudice qui en résulterait (arrêt du 27 juin 1991, Al-Jubail Fertilizer/Conseil, C‑49/88, EU:C:1991:276, points 15 et 17).

139 Il ne saurait être imposé à la partie requérante de démontrer que la décision des institutions aurait été différente, mais uniquement qu'une telle hypothèse n'est pas entièrement exclue dès lors qu'elle aurait pu mieux assurer sa défense en l'absence de l'irrégularité procédurale affectant ainsi concrètement les droits de la défense (voir arrêt du 14 décembre 2022, PT Ciliandra Perkasa/Commission, T‑138/20, non publié, EU:T:2022:810, point 224 et jurisprudence citée).

140 Autrement dit, l'existence d'une irrégularité se rapportant aux droits de la défense peut conduire à l'annulation de l'acte en cause dès lors qu'il existe une possibilité que, en raison de cette irrégularité, la procédure administrative aurait pu aboutir à un résultat différent, portant ainsi atteinte concrètement aux droits de la défense (voir arrêt du 5 mai 2022, Zhejiang Jiuli Hi-Tech Metals/Commission, C‑718/20 P, EU:C:2022:362, point 49 et jurisprudence citée).

141 En outre, aux termes de l'article 19, paragraphe 1, du règlement de base, toute information de nature confidentielle ou qui serait fournie à titre confidentiel par des parties à une enquête est, sur exposé de raisons valables, traitée comme telle par les autorités. L'article 19, paragraphe 2, de ce règlement prévoit notamment que les parties concernées qui fournissent des informations confidentielles sont tenues d'en donner des résumés non confidentiels. Selon l'article 19, paragraphe 3, du même règlement, s'il est considéré qu'une demande de traitement confidentiel n'est pas justifiée et si la personne qui a fourni l'information ne veut pas la rendre publique ni en autoriser la divulgation en termes généraux ou sous forme de résumé, l'information peut être écartée, sauf s'il peut être démontré de manière convaincante à partir de sources appropriées que l'information est correcte.

142 Le libellé de l'article 19, paragraphe 3, du règlement de base ne prévoit donc pour la Commission qu'une simple faculté d'écarter une information confidentielle dont aucun résumé non confidentiel n'est disponible. L'objectif de l'article 19 du règlement de base est de protéger non seulement les secrets d'affaires, mais également les droits de la défense des autres parties à la procédure antidumping. Cela implique, ainsi qu'il ressort de la jurisprudence, que, dans le cadre d'une procédure antidumping, des irrégularités dans la communication par la Commission des résumés non confidentiels ne sont de nature à constituer une violation des droits procéduraux justifiant l'annulation du règlement fixant les droits antidumping que si l'intéressé n'a pas eu une connaissance suffisante de l'essentiel du contenu du ou des documents en cause et, de ce fait, n'a pas pu exprimer valablement son point de vue sur leur réalité ou leur pertinence (voir arrêt du 10 mars 2009, Interpipe Niko Tube et Interpipe NTRP/Conseil, T‑249/06, EU:T:2009:62, point 130 et 131 et jurisprudence citée).

143 Dès lors, l'utilisation par la Commission d'informations dont un résumé non confidentiel a été fourni peut être invoquée, comme motif d'annulation d'une mesure antidumping, par des parties à une procédure antidumping, si elles peuvent démontrer que l'utilisation de ces informations a constitué une violation de leurs droits de la défense, en ce sens qu'elles n'ont pas pu exprimer valablement leur point de vue sur leur réalité ou leur pertinence et qu'il n'est pas entièrement exclu que, en l'absence de l'irrégularité commise, la procédure administrative aurait pu aboutir à un résultat différent.

144 En l'espèce, le Tribunal constate que, au stade du règlement provisoire, la Commission a indiqué que treize utilisateurs s'étaient fait connaître, que neuf d'entre eux avaient présenté des observations ou des réponses au questionnaire et qu'elle avait engagé une procédure de complément d'information envers la plupart des utilisateurs ayant répondu au questionnaire, ceux-ci n'ayant, à l'exception d'une société, pas fourni de versions pouvant être consultées par les parties intéressées. Dans le règlement attaqué, elle a indiqué avoir procédé à l'évaluation de l'intérêt de l'Union, y compris celui des utilisateurs, « sur la base des informations disponibles, à savoir les questionnaires adressés aux importateurs et aux utilisateurs, ainsi que les informations communiquées par les parties intéressées ».

145 La Commission a donc sollicité, conformément à l'article 21 du règlement de base, les observations de l'ensemble des acteurs susceptibles d'être concernés par des mesures antidumping. Elle s'est fondée sur ces observations pour indiquer, au considérant 194 du règlement provisoire et au considérant 221 du règlement attaqué, que « l'institution des mesures aura[it] vraisemblablement une incidence différente selon les utilisateurs, en fonction de la proportion des coûts associés au contreplaqué de bouleau dans le total des coûts du secteur et de la capacité à répercuter les coûts sur les consommateurs en aval ».

146 S'agissant du rapport d'analyse d'impact, aux considérants 194 et 195 du règlement provisoire, la Commission a indiqué que « le plaignant a[vait] fourni une étude indépendante analysant l'effet attendu des mesures sur les utilisateurs, en partant de droits théoriques fixés entre 20 % et 30 % ». Il ressortait de ces documents que « les principaux secteurs qui utilis[ai]ent du contreplaqué de bouleau dans l'Union [étaie]nt, par ordre de consommation : la construction (39 %), les transports (27 %), l'ameublement (10 %) et le conditionnement (8 %) », que, « [d]'après les informations disponibles, dans les secteurs qui représent[ai]ent la majorité de la consommation de contreplaqué de bouleau, l'incidence des mesures a[vait] été jugée provisoirement limitée ou négligeable », que « [l]es secteurs dans lesquels les droits [auraient pu] avoir la plus grande incidence [étaie]nt ceux du conditionnement et des producteurs de parquet », que, « [c]ela étant, même dans ces secteurs, l'incidence des mesures [était] limitée », que « [p]our le secteur du conditionnement, l'incidence [était] estimée à entre 2 % et 4 % de la structure des coûts, ce qui [aurait dû se répercuter sur les clients », et que, « [d]ans le secteur du parquet et du revêtement de sol, le contreplaqué de bouleau p[ouvai]ut être remplacé par plusieurs produits, comme d'autres essences de bois ou d'autres matériaux, ce qui expliqu[ait] aussi pourquoi l'incidence d'une éventuelle hausse légère du coût du contreplaqué de bouleau [aurait dû] rester limitée ». Eu égard à ces explications, la Commission a conclu, au considérant 196 du règlement provisoire et au considérant 221 du règlement attaqué, que « les incidences négatives produites par les mesures instituées sur les utilisateurs ne l'emporteraient pas sur l'effet positif qu'aur[aie]nt ces mesures sur les producteurs de l'Union ».

147 Les observations présentées par le Woodstock Consortium, dont la Commission indique qu'il s'agit de la version publique, à laquelle la requérante ne conteste pas avoir eu accès, présentent un résumé plus détaillé des principales conclusions de l'étude d'impact, portant sur le secteur de la construction, du transport, de l'ameublement et de l'emballage.

148 Or, la requérante n'a pas demandé l'accès à la version confidentielle du rapport d'analyse d'impact. Elle se borne à soutenir que la version publique dudit rapport n'était pas appropriée et que les conclusions du règlement attaqué auraient pu être différentes si la Commission en avait fourni une version publique appropriée et avait donné aux parties intéressées la possibilité de faire part de leurs observations à ce sujet. Ces affirmations ne satisfont pas à la nécessité de démontrer l'erreur d'appréciation qui aurait entaché le raisonnement de la Commission, ayant tenu compte de données confidentielles, la requérante n'ayant aucunement articulé les raisons pour lesquelles la version publique dudit rapport n'aurait pas été appropriée ni articulé les faits à prouver.

149 Dès lors, les griefs de la requérante tirés d'une violation de l'article 21 du règlement de base et d'erreurs manifestes d'appréciation doivent être rejetés, de même que ceux tirés d'une violation des droits de la défense.

150 Il résulte de ce qui précède que le troisième moyen doit être rejeté comme étant non fondé.

Sur la forme de la mesure antidumping

151 L'article 14, paragraphe 1, du règlement de base, dispose notamment que les droits antidumping, provisoires ou définitifs, sont imposés par voie de règlement et perçus par les États membres selon la forme, le taux et les autres éléments fixés par le règlement qui les impose.

152 Cette disposition laisse aux institutions de l'Union un large pouvoir d'appréciation pour déterminer, dans chaque cas, non seulement la forme et le taux de ces droits, mais également les autres éléments que les États membres doivent utiliser pour percevoir les droits en question (voir, par analogie, arrêt du 27 mars 1990, Cartorobica, C‑189/88, EU:C:1990:137, point 25, et du 28 septembre 1995, Ferchimex/Conseil, T‑164/94, EU:T:1995:173, point 141).

153 Il en résulte que le contrôle du juge de l'Union porte sur la question de savoir si la mesure arrêtée par la Commission, en l'espèce un droit antidumping définitif de 14,85 % sous la forme d'un droit ad valorem, est manifestement inappropriée par rapport au but poursuivi.

154 Aux considérants 237 et 238 du règlement attaqué, la Commission a indiqué que, à la suite de la communication des conclusions provisoires, certaines parties ont affirmé que, si des mesures étaient instituées, celles-ci devraient prendre la forme d'un PMI, car cela permettrait de concilier les intérêts des différentes parties, d'éviter une pénurie du produit concerné et de garantir le maintien de la concurrence sur le marché en cause. Dans le même ordre d'idées, il a été avancé que le PMI devrait tenir compte de la différence de prix entre le contreplaqué de forme carrée et celui de forme rectangulaire. En réponse, la Commission a estimé que, dans la mesure où le produit concerné était fabriqué et vendu dans un large éventail de types de produits, l'institution de mesures sous la forme d'un PMI n'était pas réalisable et ne correspondrait pas exactement au niveau de dumping constaté.

155 Devant le Tribunal, la requérante fait valoir qu'un droit variable, fondé sur un droit ad valorem plafonné par un PMI, contribuerait à un meilleur équilibre entre les intérêts des producteurs, des importateurs et des utilisateurs de l'Union.

156 Certes, il a déjà été jugé qu'il est généralement admis qu'un droit variable est plus favorable aux exportateurs et importateurs concernés qu'un droit spécifique ou un droit ad valorem. En effet, un droit variable permet d'éviter, dans certaines hypothèses, toute perception du droit antidumping (voir arrêt du 29 septembre 2000, International Potash Company/Conseil, T‑87/98, EU:T:2000:221, point 41 et jurisprudence citée).

157 Toutefois, avant d'imposer des droits antidumping, les institutions de l'Union mettent en balance différents intérêts divergents. Elles tiennent compte non seulement des intérêts des exportateurs et importateurs, faisant l'objet de l'enquête, mais également des intérêts de l'industrie de l'Union et, ainsi qu'il résulte de l'article 21 du règlement de base, des utilisateurs et des consommateurs. La mise en balance des différents intérêts se traduit dans le texte même de l'article 9, paragraphe 4, dudit règlement, qui dispose que le montant du droit antidumping n'excède pas la marge de dumping établie et devrait être inférieur à cette marge si ce droit moindre suffit à éliminer le préjudice causé à l'industrie de l'Union (voir, en ce sens, arrêt du 29 septembre 2000, International Potash Company/Conseil, T‑87/98, EU:T:2000:221, point 42).

158 Or, la requérante n'explique nullement en quoi les intérêts des différents acteurs du marché en cause différeraient au point d'exiger de la Commission qu'elle applique une forme avancée de droit variable associant un PMI et un droit ad valorem ou fixe. L'argumentation de la requérante part de la prémisse que les conditions du marché en cause mettent en danger de nombreuses parties intéressées dans l'Union et du risque de pénurie de produits, qui nécessitent une réponse stratégique adaptée, ce qui n'est pas étayé et n'a pas été démontré, ainsi qu'il ressort de l'analyse effectuée ci-dessus.

159 La requérante n'a par ailleurs pas fait valoir que le droit en cause dépassait la marge de dumping ni qu'il était, au moment de son adoption, supérieur à ce qui était nécessaire pour supprimer le préjudice, au sens de l'article 9, paragraphe 4, du règlement de base.

160 Dès lors, la requérante n'a pas démontré à suffisance de droit que la Commission a commis une erreur manifeste d'appréciation en imposant la mesure en cause dans sa forme actuelle, qui irait à l'encontre de l'intérêt de l'Union.

161 Le quatrième moyen doit donc être rejeté comme étant non fondé et, partant, le recours dans son intégralité.

Sur les dépens

162 Aux termes de l'article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s'il est conclu en ce sens.

163 La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de la Commission et des intervenantes.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (sixième chambre)

déclare et arrête :

1) Le recours est rejeté.

2) Vyatsky Plywood Mill OOO est condamnée aux dépens.