CA Orléans, ch. des urgences, 7 février 2024, n° 23/01230
ORLÉANS
Arrêt
PARTIES
Demandeur :
SCCV MARECHAL JUIN (Sté)
Défendeur :
LA SOCIÉTÉ TECHNIQUES DE SCIAGE AU DIAMANT (SAS)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. BLANC
Conseiller :
M. GRESSOT
Avocats :
SARL ARCOLE, SARL ORVA-VACCARO & ASSOCIES
Par acte en date du 10 janvier 2023, visant les dispositions de l'article 6 de la loi du 31 décembre 1975 relative à la sous- traitance, la SAS Techniques de Sciage du Diamant assignait devant le juge des référés du tribunal judiciaire de Tours la SCCV Maréchal Juin, afin de l'entendre condamner à lui payer la somme provisionnelle de 14'726,63 € hors-taxes outre pénalités.
Elle exposait avoir réalisé, en qualité de sous-traitant, des travaux d'un lot relatif au gros 'uvre, confiés par la société [E] Construction, entrepreneur principal, au profit de la SCCV Maréchal Juin, maître de l'ouvrage, le contrat prévoyant qu'elle devait être payée directement par le maître de l'ouvrage au moyen d'une délégation de paiement et que ce dernier l'avait agréée par courrier électronique.
La SCCV Maréchal Juin ne comparaissait pas.
Par une ordonnance réputée contradictoire en date du 21 mars 2023, le juge des référés du tribunal judiciaire d'Orléans condamnait la SCCV Maréchal Juin à verser à la société TSD la somme provisionnelle de 14'726,63 € hors-taxes, et ce avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 2 décembre 2022, outre la somme de 800 € titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Par une déclaration déposée au greffe le 5 mai 2023, la société SCCV Maréchal Juin interjetait appel de cette ordonnance.
Par ses dernières conclusions, elle en sollicite l'infirmation, demandant à la cour, statuant à nouveau, de décider que les demandes provisionnelles formées par la Société Techniques de Sciage du Diamant se heurtent à des contestations sérieuses ; elle sollicite en tant que de besoin de restitution des sommes versées dans le cadre de l'exécution provisoire.
Elle réclame le paiement de la somme de 3000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Par ses dernières conclusions, la société Techniques de Sciage au Diamant sollicite la confirmation de l'ordonnance du 21 mars 2023 et l'allocation de la somme de 5000 € à titre de dommages-intérêts pour résistance abusive et de la somme de 10'000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
L'ordonnance de clôture était rendue le 28 novembre 2023.
SUR QUOI :
Attendu que pour prononcer comme il l'a fait, le juge des référés, observant que la SAS Techniques de Sciage au Diamant se prévalait des dispositions de l'article 6 de la loi du 31 décembre 1975, mais qu'elle en avait visé, dans sa mise en demeure, les articles 12 et 13, citant les dispositions de l'article 835 alinéa 2 du code de procédure civile et celles des articles3 et 6 de la loi du 31 décembre 1975 ainsi que celle de l'article 1336 alinéa 1r du Code civil, a relevé que le contrat de sous-traitance du 28 septembre 2021 prévoit en son article 5 que le sous-traitant sera payé par le maître de l'ouvrage par une délégation de paiement, que la facture datée du 14 janvier 2022, établie par la société Techniques de Sciage au Diamant prendre''''''' la société [E] Construction mentionne à titre de modes règlement à paiement direct à hauteur de 14'726,63 €, et que si le maître de l'ouvrage n'est pas intervenu au contrat de sous-traitance, la société SCCV Maréchal Juin avait confirmé l'agrément du sous-traitant Techniques de Sciage au Diamant par un courrier électronique du 7 décembre 2021;
Que la juridiction du premier degré a donc considéré que ce document apparaît suffisant pour justifier d'un accord du maître de l'ouvrage en tant que débiteur délégué ;
Attendu que la SCCV Maréchal Juin prétend que les travaux dont le paiement est sollicité ne relèvent pas de ce qui avait été confié à la société [E], laquelle était titulaire du gros 'uvre ;
Qu'elle explique que la société [E] aurait sollicité la société Techniques de Sciage au Diamant à la suite d'une erreur de sa part, et qu'elle aurait tenté ensuite de lui faire prendre en charge des travaux dont la nécessité ne résultait que de cette erreur ;
Qu'elle déclare que ni la déclaration de sous-traitance D C4 ni la délégation de paiement n'ont été régularisées par elle- même en qualité de maître de l'ouvrage, et reproche au juge des référés de cette prévalue d'un simple mail adressé par le secrétariat de la société Face Sud, laquelle fait état en date du 6 décembre 2021 d' une confirmation d'agrément du sous-traitant Techniques de Sciage au Diamant ;
Attendu qu'il est constant que la signature du maître de l'ouvrage ne figure pas sur la déclaration de sous-traitance (pièce3 de la société Techniques de Sciage au Diamant ) et que le contrat de sous-traitance (pièce2) a été établi entre la SAS [E] et la société Techniques de Sciage au Diamant;
Attendu qu'il est exact, ainsi que le déclare la partie appelante, qu'en matière de marchés privés, si la loi ne prévoit aucune forme concernant l'acceptation et l'agrément du sous-traitant par le maître de l'ouvrage, la jurisprudence exige de manière constante lorsque le maître d'ouvrage invoque le défaut d'acceptation, que le sous-traitant établisse des actes manifestant sans équivoque la volonté du maître d'ouvrage ;
Attendu que la pièce 5, consistant en un courrier électronique en date du 6 décembre 2021, dont il est mentionné qu'il émane « De : Service Technique ' Face Sud Immobilier », et qui porte la signature d'[I] [S] , laquelle figure immédiatement avant le nom de « Face Sud Immobilier » et le sigle de cette société, mentionne seulement, sur trois lignes, « Bonjour Monsieur [E] / Nous vous confirmons l'agrément du sous-traitant TSD / Cordialement » ;
Que ce seul message électronique, établi par un tiers, et non par un représentant de la société appelante, et qui ne contient aucune précision, en particulier concernant les conditions de paiement, ne peut être regardé comme une « manifestation sans équivoque de la volonté du maître de l'ouvrage», et par là même comme une preuve de l'agrément de la société Techniques de Sciage au Diamant par le maître de l'ouvrage la SCCV Maréchal Juin ;
Que, pour prospérer en sa demande, la partie intimée devrait nécessairement produire d'autres éléments à l'appui de son argumentation relative à son agrément par le maître d'ouvrage ;
Attendu que les contestations invoquées par la partie appelante sont suffisamment sérieuses pour qu'il puisse être considéré que le litige excède le champ d'action du juge des référés ;
Attendu qu'il y a lieu d'infirmer l'ordonnance entreprise, de dire n'y avoir lieu à référé et de renvoyer les parties à mieux se pourvoir ;
Attendu que le présent appel a été fait du fait de la défaillance de la partie appelante en première instance, de sorte qu'aucune considération d'équité ne justifie qu'il soit fait application à son profit des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
PAR CES MOTIFS :
Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,
INFIRME l'ordonnance entreprise,
Statuant à nouveau,
DIT n'y avoir lieu à référé en la cause et renvoie les parties à mieux se pourvoir,
DIT n'y avoir lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
CONDAMNE la société Techniques de Sciage au Diamant aux dépens.