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Décisions

CA Nancy, 5e ch., 18 septembre 2024, n° 23/02042

NANCY

Arrêt

Autre

CA Nancy n° 23/02042

18 septembre 2024

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

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COUR D'APPEL DE NANCY

CINQUIEME CHAMBRE COMMERCIALE

ARRÊT N° /24 DU 18 SEPTEMBRE 2024

Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 23/02042 - N° Portalis DBVR-V-B7H-FHYA

Décision déférée à la Cour :

ordonnance du juge commissaire du tribunal judiciaire de VAL DE BRIEY, R.G. n°21/1103 , en date du 07 septembre 2023,

APPELANTE :

Société (SCEA) DU GRAND PRE prise en la personne de son représentant légal pour ce domicilié au siège social .

[Adresse 2] inscrite au Registre du Commerce et des Sociétés de Briey sous le numéro 320 880 792

Représentée par Me Ariane MILLOT-LOGIER de l'AARPI MILLOT-LOGIER, FONTAINE & THIRY, avocat au barreau de NANCY, ayant pour avocat plaidant Me Noelle OURTAU- VING, avocat au barreau de Metz

INTIMÉS :

Maître [F] [H] mandataire judiciaire demeurant [Adresse 1]

es qualité de mandataire judiciaire de la SCEA du GRAND PRE, désigné suite à un jugement prononcé le 4 octobre 2021 par le tribunal judiciaire de Val de Briey

régulièrement saisi par exploit d'huissier du 16/10/2023 à personne habilité et n'ayant pas constitué avocat

SCEA MACHET agissant poursuites et diligences de son représentant légal pour ce domicilié audit siège,1 [Adresse 3] inscrite au Registre du Commerce et des Sociétés de Chalons en Champagne sous le numéro 159 981 146

Représentée par Me Clarisse MOUTON de la SELARL LEINSTER WISNIEWSKI MOUTON LAGARRIGUE, avocat au barreau de NANCY

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 907 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 03 Juillet 2024, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Patrice BOURQUIN, Président de Chambre, chargé du rapport ;

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur Patrice BOURQUIN Président de Chambre,

Monsieur Olivier BEAUDIER, Conseiller,

Monsieur Jean-Louis FIRON Conseiller

Greffier, lors des débats : Monsieur Ali ADJAL.

A l'issue des débats, le Président a annoncé que la décision serait rendue par mise à disposition au greffe le 18 Septembre 2024, en application du deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;

ARRÊT : réputé contradictoire, rendu par mise à disposition publique au greffe le 18 Septembre 2024, par Monsieur Ali ADJAL, Greffier, conformément à l'article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile ;

signé par Monsieur Patrice BOURQUIN, Président de chambre, et par Monsieur Ali ADJAL, Greffier ;

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Copie exécutoire délivrée le à

Copie délivrée le à

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FAITS ET PROCEDURE

Par jugement du tribunal judiciaire de Val de Briey en date du 4 octobre 2021, la SCEA du Grand Pré a fait l'objet de l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire.

La SCEA Machet s'est prévalue de l'existence d'une créance d'un montant de 17.904,22 €, correspondant à trois livraisons de pommes de terre.

Lors de la vérification du passif, la SCEA du Grand Pré a contesté la décision du mandataire judiciaire de porter sur la liste des créances les factures de la SCEA Machet.

Par ordonnance rendue contradictoirement le 7 septembre 2023, le juge-commissaire du tribunal judiciaire de Val de Briey a rejeté la requête de la SCEA du Grand Pré et a en conséquence :

- déclaré conforme la déclaration de créance de la SCEA Machet pour un montant de 17904,22€ ;

- prononcé l'admission, à hauteur de 17 904,22 €, de la créance de la SCEA Machet au passif de la procédure de redressement judiciaire de la SCEA du Grand Pré ;

- ordonné l'emploi des dépens en frais privilégiés de procédure collective.

Par déclaration en date du 26 septembre 2023, la SCEA du Grand Pré a interjeté appel de l'ordonnance rendue par le juge-commissaire du tribunal judiciaire de Val de Briey le 7 septembre 2023.

Aux termes de ses dernières conclusions transmises le 29 mars 2024, la SCEA du Grand Pré demande à la cour de :

A titre principal,

- déclarer son appel recevable et bien fondé, y faisant droit;

- infirmer en toutes ses dispositions l'ordonnance du juge-commissaire ;

- déclarer irrecevable la SCEA Machet en toutes ses demandes, moyens et fins ;

- débouter la SCEA Machet de toutes demandes additionnelles, reconventionnelles ou incidentes;

- infirmer en totalité l'ordonnance du juge-commissaire ;

Et statuant à nouveau,

- juger que la SCEA Machet ne détenait aucune créance non prescrite à son encontre, au moment de l'ouverture de la procédure collective;

- juger qu'elle n'a pas dûment déclaré au passif, entre les mains du mandataire judiciaire, dans le délai prescrit ;

- en conséquence, juger que toute prétendue créance doit être rejetée et portée pour zéro sur l'état des créances.

Subsidiairement,

- juger que si des créances devaient être admises, elles ne pourraient l'être qu'après débat contradictoire sur des pièces démontrant éventuellement un bienfondé de créances, au demeurant, elle ne pourrait l'être au-delà de 500 € ;

- condamner la SCEA Machet au paiement de la somme de 3.000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel.

Aux termes de ses dernières conclusions transmises le 20 décembre 2023, la SCEA Machet demande à la cour de :

- déclarer la SCEA du Grand Pré mal fondée en son appel ;

- confirmer en toutes ses dispositions l'ordonnance du tribunal judiciaire de Val de Briey en date du 7 septembre 2023 ;

- condamner la SCEA du Grand Pré à lui payer la somme de 3 000 € au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et, aux entiers dépens dont distraction au profit de Maitre Clarisse Mouton.

En application de l' article 455 du code de procédure civile, la Cour se réfère, pour plus ample exposé des faits, moyens et prétentions des parties, à leurs conclusions précédemment visées.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 3 avril 2024.

MOTIFS ET MOYENS

1- Sur la régularité de la déclaration de créance

Aux termes de l'article L 622-24 du code de commerce, à partir de la publication du jugement, tous les créanciers dont la créance est née antérieurement au jugement d'ouverture, à l'exception des salariés, adressent la déclaration de leurs créances au mandataire judiciaire dans des délais fixés par décret en Conseil d'Etat (....).

La déclaration des créances peut être faite par le créancier ou par tout préposé ou mandataire de son choix. Le créancier peut ratifier la déclaration faite en son nom jusqu'à ce que le juge statue sur l'admission de la créance.

Lorsque le débiteur a porté une créance à la connaissance du mandataire judiciaire, il est présumé avoir agi pour le compte du créancier tant que celui-ci n'a pas adressé la déclaration de créance prévue au premier alinéa.

En l'espèce, il résulte des pièces produites que, par courrier du 21 octobre 2021, le mandataire judiciaire a adressé un courrier à la SCEA Machet l'invitant à lui adresser une déclaration de créance dans un délai de deux mois.

Le courrier précisait par ailleurs que conformément à l'article L 622-24 alinéa 3 du code de commerce, le débiteur avec déclaré au nom de la SCEA Machet une créance d'un montant de 14920,05€ et qu'il appartenait à cette dernière de modifier ou ratifier cette créance dans le délai de déclaration.

A la suite de ce courrier , la SCEA Machet a certes adressé le 25 octobre 2021un courrier à la SCEA du Grand Pré comportant l'intitulé 'déclaration de créance' et le montant de trois factures pour un montant total de 17904,22€.

Toutefois elle a également adressé au mandataire par courriel du 28 octobre 2021 (pièce n°3 de l'intimée avec ses annexes) le même document, un RIB et la photocopie des factures.

Il en résulte que la déclaration de créance a bien été adressée au mandataire dans le délai de deux mois.

2- Sur la contestation de la créance

2-1 Sur la prescription

En application de l'article L 110-4 du code de commerce, les obligations nées à l'occasion de leur commerce entre commerçants ou entre commerçants et non-commerçants se prescrivent par cinq ans si elles ne sont pas soumises à des prescriptions spéciales plus courtes.

En l'espèce, les factures sont datées des 18 et 24 avril 2017 ainsi que 29 mai 2017.

A la date de la déclaration le 28 octobre 2021, la créance n'était pas donc pas prescrite, le délai de prescription ayant par ailleurs été interrompue en application de l'article L 622-25-1 du code de commerce.

2-2 Sur le montant de la créance

La SCEA du Grand Pré fait valoir que pour justifier de sa demande, la SCEA Machet ne produit que des bons de livraison en copie et non en original, totalement illisibles ne démontrant aucune réception par la SCEA du Grand Pré ,aucun bon de commande n'étant par ailleurs produit.

Il est exact que la SCEA Machet s'appuie, outre les trois factures, sur trois bons de livraison, toutefois lisibles, qui ont émises par son propre préposé.

Il doit toutefois être rappelé que la SCEA du Grand Pré a elle-même déclaré être débitrice de la SCEA Machet.

Si cette déclaration ne lui interdit pas de contester la créance, il n'en reste pas moins qu'il lui appartient d'indiquer pour quelles raisons elle aurait déclaré une créance à présent contestée en sa totalité, alors qu'elle a nécessairement réalisé sa déclaration au vu des factures émises par la SCEA Machet et qu'elle ne justifie d'aucune contestation antérieure relative à l'existence même de la livraison.

Les pièces produites par la SCEA Machet corroborés par la déclaration de la SCEA du Grand Pré sont donc des éléments suffisants pour établir l'existence de la créance.

La simple production des factures et des bons de livraison non signés ne peut toutefois valoir pleine preuve du montant de la créance au-delà du montant reconnu par la SCEA du Grand Pré soit 14920,05€, l'ordonnance entreprise étant réformée en ce sens.

Compte-tenu de la solution donnée au litige, il n'y a pas lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au bénéfice de l'une ou l'autre des parties.

Pour les mêmes raisons chacune des parties conservera la charge de ses propres dépens.

PAR CES MOTIFS :

LA COUR, statuant par arrêt réputé contradictoire prononcé publiquement par mise à disposition au greffe, conformément aux dispositions de l'article 450 alinéa 2 du Code de procédure civile,

CONFIRME l'ordonnance entreprise, sauf en ce qu'elle a prononcé l'admission de la créance de la SCEA Machet à hauteur de 17904,22€

Statuant à nouveau du chef infirmé,

PRONONCE l'admission, à hauteur de 14920,05€ de la créance de la SCEA Machet au passif de la procédure de redressement judiciaire de la SCEA du Grand Pré,

DIT n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile,

DIT que chacune des parties supportera la charge de ses propres dépens.

Le présent arrêt a été signé par Monsieur Patrice BOURQUIN Président de Chambre, à la Cour d'Appel de NANCY, et par Monsieur Ali ADJAL, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,

Minute en cinq pages.