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Décisions

CA Toulouse, 1re ch. sect. 1, 28 mai 2024, n° 23/01788

TOULOUSE

Arrêt

Infirmation

PARTIES

Demandeur :

BATIMENT SERVICES TOULOUSAIN (SAS)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. DEFIX

Conseillers :

M. ROUGER, M. ROBERT

Avocats :

SCP CAMILLE ET ASSOCIES, Me NEROT

Toulouse, du 13 avr. 2023

13 avril 2023

EXPOSÉ DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE

Mme [N] [T] a confié à la société Maisons bois 31, présentée dans le devis comme la 'filiale de la société Bâtiment Service Toulousain', les travaux de surélévation de sa maison d'habitation située à Ramonville

St Agne (31), [Adresse 1], suivant devis accepté le 27 mars 2009 pour un montant de 56 685,82 euros toutes taxes comprises.

Par courrier du 1er juillet 2017, Mme [N] [T] a déclaré un sinistre auprès de son assurance Multirisque Habitation, la société Groupama, au titre de la catastrophe naturelle sécheresse et fait établir un devis de reprise en sous-oeuvre par micropieux, par la société Grand Sud Ouvrage, pour un montant de 94 165,40 euros.

À la suite de l'expertise réalisée par le cabinet Eurexo Sud-ouest [Localité 5], la société Groupama a refusé sa garantie, le 21 novembre 2018, exposant que les fissurations ne sont pas imputables à des mouvements de terrain différentiels consécutifs à la sécheresse.

Suivant courrier recommandé du 25 novembre 2018, Mme [N] [T] a informé la société Maisons bois 31 de l'apparition de fissures affectant le rez-de-chaussée et l'étage et a invité cette dernière à venir constater les désordres et effectuer les travaux de réparation.

La société 'Bâtiment Service Toiture' ayant reçu la transmission universelle du patrimoine de la société Bâtiment Service Habitat dont elle était l'associée unique et portant nouvelle dénomination de la Société Bâtiment Service Toulousain, en a accusé réception le 20 décembre 2018, précisant avoir procédé à une déclaration de sinistre auprès de la société Mma.

Par courrier du 1er juillet 2019, la compagnie d'assurance Mma a dénié sa garantie dans le règlement de ce sinistre, au motif que la société Bâtiment Services Toiture n'était pas assurée pour les travaux de surélévation comprenant des ouvrages de maçonnerie.

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Par actes d'huissier des 11 et 12 juillet 2019, Mme [N] [T] a fait assigner devant le tribunal judiciaire de Toulouse, la société Groupama, la Sarl Bâtiment Services Habitat et M. [P] [H], son gérant, aux fins d'obtenir l'indemnisation de ses préjudices, et avant-dire droit, l'organisation d'une mesure d'expertise judiciaire.

Par ordonnance du 16 janvier 2020, le juge de la mise en état a ordonné une mesure d'expertise, confiée à M. [K] [U], au contradictoire de ces sociétés.

Les opérations d'expertise ont été ultérieurement rendues communes, les 8 octobre 2020 et 11 mars 2021, respectivement à la Maaf, assureur multirisques habitation de

Mme [N] [T] avant 2017, puis aux Mma, appelées en intervention forcée aux fins de garantie par la Société Bâtiment Services Habitat.

M. [K] [U] n'ayant pas mené à son terme la mission qui lui avait été confiée, il a été remplacé par M. [C], suivant ordonnance du 15 septembre 2022. M. [C] a adressé au tribunal sa note n° 1 ainsi que sa fiche de liaison le 14 novembre 2022.

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Par acte du 21 décembre 2022, Mme [N] [T] a fait assigner devant le tribunal judiciaire, la compagnie Axa, les Mma ainsi que la société Bâtiment Services Toiture aux fins d'interrompre les délais à leur égard, sollicitant que cette procédure soit jointe à l'instance principale et que les opérations d'expertise en cours leur soient déclarées communes.

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Par ordonnance réputée contradictoire du juge de la mise en état du 13 avril 2023, le tribunal judiciaire de Toulouse, a :

- rejeté la fin de non-recevoir tirée de la forclusion soulevée par la société Bâtiment Services Toiture,

- prononcé la jonction entre la procédure enrôlée sous le numéro 23/0006 et la procédure enrôlée sous le n° RG 19/2314, sous ce seul dernier numéro de rôle,

- déclaré commune à la société Axa, à la société Mma iard Assurances Mutuelles et à la Sa Mma iard ainsi qu'à la société Bâtiment Services Toiture la mission confiée à l'expert [W] [C] par l'ordonnance l'ayant commis le 15 septembre 2022,

- dit que l'expertise concerne l'ensemble des parties figurant dans l'entête de la présente ordonnance et invite les parties à s'échanger l'ensemble des pièces en débat,

- ordonné un sursis à statuer dans l'attente du dépôt du rapport d'expertise de M. [C], expert judiciaire désigné suivant ordonnance en date du 15 septembre 2022,

- dit que le sursis sera révoqué ou abrégé à la demande de la partie la plus diligente,

- dit que le dossier sera rappelé à l'audience de mise en état électronique du 05 octobre 2023 à 8h30 pour en assurer le suivi et conclusions de la demanderesse en lecture de rapport,

- réservé les frais irrépétibles et les dépens.

Pour statuer ainsi, le premier juge a retenu que l'assignation délivrée par Mme [N] [T] à l'encontre de la société Bâtiment Services Toiture et de ses assureurs apparaît comme fondée sur les dispositions des articles 1240 et 2224 du code civil, dont le point de départ peut être fixé à la connaissance par [N] [T] de l'existence de ce contrat de sous-traitance, étant relevé la confusion existant entre les sociétés Maisons Bois 31 et Bâtiment Services Toiture, outre la société Bâtiment Service Toulousain et Bâtiment Service Habitat n'ayant pas permis à [N] [T] d'appréhender antérieurement cette problématique.

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Par déclaration du 17 mai 2023, la Sas Bâtiment Services Toulousain a relevé appel de ce jugement en ce qu'il a :

- rejeté la fin de non-recevoir tirée de la forclusion soulevée par la Société Bâtiment Service Toiture,

- prononcé la jonction entre la procédure enrôlée sous le numéro 23/0006 et la procédure enrôlée sous le n° RG 19/2314, sous ce seul dernier numéro de rôle,

- déclaré commune à la société Axa, à la société Mma Iard Assurances Mutuelles et à la Sa Mma Iard ainsi qu'à la société Bâtiment Services Toiture la mission confiée à l'expert [W] [C] par l'ordonnance l'ayant commis le 15 septembre 2022,

- dit que l'expertise concerne l'ensemble des parties figurant dans l'entête de la présente ordonnance et invite les parties à s'échanger l'ensemble des pièces en débat.

PRÉTENTIONS DES PARTIES

Dans ses dernières conclusions transmises par voie électronique le 25 juillet 2023 et prises au nom de la 'Sas Bâtiment Services Toulousain', la société appelante demande à la cour, au visa de l'article 789 du code de procédure civile et de l'article 1792-4-3 du code civil, de :

- réformer l'ordonnance rendue le 13 avril 2023 par le juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Toulouse en ce qu'elle a :

rejeté la fin de non-recevoir tirée de la forclusion soulevée par la société Bâtiment Service Toiture,

prononcé la jonction entre la procédure enrôlée sous le numéro 23/0006 et la procédure enrôlée sous le n° RG 19/2314, sous ce seul dernier numéro de rôle,

déclaré commune à la société Axa, à la société Mma Iard Assurances Mutuelles et à la Sa Mma Iard ainsi qu'à la société Bâtiment Services Toiture la mission confiée à l'expert [W] [C] par l'ordonnance l'ayant commis le 15 septembre 2022,

dit que l'expertise concerne l'ensemble des parties figurant dans l'entête de la présente ordonnance et invité les parties à s'échanger l'ensemble des pièces en débat,

Et statuant à nouveau :

- déclarer irrecevable l'action de Mme [T] pour cause de forclusion,

- rejeter la demande de jonction et d'expertise commune,

- condamner Mme [T] à verser une somme de 3 000 euros à la société Bâtiment Service Toiture au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner Mme [T] aux entiers dépens.
' l'appui de ses prétentions, l'appelant soutient que :

- en vertu de l'article 1792-4-3 du code civil, les actions du maître de l'ouvrage à l'encontre des locateurs d'ouvrage et de leurs sous-traitants sont soumises à une forclusion de dix ans, les dispositions relatives au cours de la prescription ne s'appliquant pas à ce type de recours,

- par conséquent, Mme [T] ne peut se prévaloir de la suspension de la prescription prévue par l'article 2234 du code civil pour indiquer que le délai de l'article 1792-4-3 n'a pas commencé à courir ou a été suspendu jusqu'en 2020,

- l'article 1792-4-3 vise à régir les actions du maître de l'ouvrage hors celles fondées sur les garanties légales prévues par les articles 1792-3, 1792-4-1 et 1792-4-2, de sorte qu'en application de cet article, le maître d'ouvrage ne peut agir contre un constructeur ou un sous-traitant que dans le délai de dix ans à compter de la réception, et ce à peine de forclusion,

- il n'existe pas de coexistence de deux régimes distincts, la totalité des actions d'un maître d'ouvrage contre le constructeur ou le sous-traitant ayant été unifiée sous un même délai depuis la loi du 17 juin 2008 et la création de l'article 1792-4-3 du code civil,

- la volonté non-équivoque du maître de l'ouvrage de le recevoir est présumée dès lors que ce dernier a pris possession de l'ouvrage et a payé les travaux (Civ. 3ème, 18 avril 2019, n° 18-13734),

- les travaux réalisés par la société Maisons bois 31 ont été tacitement réceptionnés le 4 juillet 2009 dès lors qu'à cette date ils étaient achevés depuis le 1er juillet 2009, date de la dernière facture de la société Maisons bois 31, que le marché de travaux était réglé à hauteur de 98% avec un solde de 577 euros sur 56 685,82 euros toutes taxes comprises, précision faite qu'en contrepartie de ce solde, certaines prestations (ponçage de poutres et peinture en plafond) seront retirées du marché pour être directement réalisées par le maître de l'ouvrage, que Mme [T] avait pris possession de l'ouvrage et n'avait jamais émis de quelconque remarque sur les travaux réalisés,

- les travaux de la Maisons bois 31 étaient soldés dès l'émission de la facture précédente le 13 juin 2009 dès lors que le solde de 577 euros correspond à des prestations exclues du marché, de telle sorte que la réception tacite a eu lieu le 4 juillet 2019, date de la réunion entre Maisons bois 31 et Mme [T],

- à défaut, la date de réception est intervenue le 4 juillet 2009, date de l'achèvement des travaux,

- le juge de la mise en état est compétent pour statuer sur les fins de non-recevoir même si celles-ci nécessitant de trancher une question de fond, l'arrêt de la cour d'appel d'Aix-en-Provence du 23 février 2023, visé par Mme [T], n'étant pas relatif à la compétence du juge de la mise en état mais à la question de la caractérisation du motif légitime de l'article 145 du code de procédure civile,

- l'assignation d'appel en cause régularisée par Mme [T] le 21 décembre 2021 est donc manifestement irrecevable.

Dans ses dernières conclusions transmises par voie électronique le 27 juillet 2023,

Mme [N] [T], intimée, demande à la cour, au visa des articles 1792-4-3, 2224, 2234 et suivants du code civil et les articles 122 et suivants, 789 et suivants du code de procédure civile, de :

À titre principal

- confirmer l'ordonnance rendu par le juge de la mise en état du 13 avril 2023 en ce qu'elle a :

rejeté la fin de non-recevoir tirée de la forclusion soulevée par la Société Bâtiment Service Toiture,

prononcé la jonction entre la procédure enrôlée sous le numéro 23/006 et la procédure enrôlée sous le n° RG 19/2314, sous ce seul dernier numéro,

déclaré commune à la société Axa, à la société Mma Iard Assurances Mutuelles et à la Sa Mma Iard ainsi qu'à la société Bâtiment Services Toiture la mission confiée à l'expert [W] [C] par l'ordonnance commis le 15 septembre 2022,

dit que l'expertise concerne l'ensemble des parties figurant dans l'entête de la présente ordonnance et invité les parties à s'échanger l'ensemble des pièces en débat.

À titre subsidiaire
- rejeter l'incident d'irrecevabilité soulevé par la Sas Batiment Service Toiture,

- juger que l'examen de la recevabilité de l'action initiée par Mme [T] relève de la compétence du tribunal judiciaire de Toulouse au fond,

En tout état de cause
- rejeter l'ensemble des demandes formulées à l'encontre de Mme [T],

- condamner la Sas Bâtiment Service Toiture aux entiers dépens et à verser à Mme [T] la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

' l'appui de ses prétentions, l'intimée soutient que :

- l'assignation délivrée par Mme [T] à l'encontre de la société Bâtiment service Toiture et de ses assureurs le 21 décembre 2022 est fondée sur les dispositions des articles 1240 et 2224 du code civil, soit sur la responsabilité délictuelle,

- cette action générale de responsabilité n'entre pas dans le champ d'application des dispositions de l'article 1792-4-3 du code civil et relève de la prescription quinquennale,

- la société Bâtiment service Habitat, exerçant a priori sous l'enseigne Maisons bois 31 a manqué à ses obligations à l'égard de Mme [T] en ayant recours à un sous-traitant sans lui 'faire accepter chaque sous- traitant et agréer les conditions de paiement de chaque contrat de sous-traitance' en méconnaissance de l'article 3 de la loi n° 75-1334 du 31 décembre 1975 relative à la sous-traitance,

- une confusion existe entre les sociétés Maisons bois 31, Bâtiment service toulousain, Bâtiment service habitat dont le siège social était situé à la même adresse et pour lesquelles M. [H] était gérant,

- Mme [T] était donc dans l'impossibilité d'agir à l'encontre de la société Bâtiment services Toiture, sous- traitante de la société Bâtiment service habitat dont elle ignorait l'existence et l'identité jusqu'à la production du contrat de sous-traitance, le point de départ du délai de prescription n'ayant donc pu

commencer à courir qu'à compter du jour où Mme [T] a eu connaissance de l'existence dudit contrat de sous-traitance,

- la fin de non-recevoir tirée de la prescription de l'action de Mme [T] nécessite que soit tranchée au préalable, a minima, une question de fond, à savoir la date de la réception des travaux,

- Mme [T] conteste que la réception ait pu être prononcée, même tacitement, le 4 juillet 2009 dès lors que cette date n'émane d'aucun autre document qu'un courrier établi par le locateur d'ouvrage le 15 juillet 2009 faisant état, au demeurant, d'un solde de chantier de 577 euros non réglé en raison de prestations non réalisées,

- la réception s'apprécie au regard de la volonté du maître de l'ouvrage, et c'est de façon unilatérale que la société Maison Bois 31 a considéré que 'à part la descente d'eau mal positionnée', l'ensemble des prestations devait être considéré comme terminé,

- l'absence de paiement intégral des travaux empêche que la réception puisse être retenue à cette date hypothétique,

- l'irrecevabilité soulevée doit conduire à déterminer la date de réception qui relève de la compétence du juge du fond au sens de l'article 122 du code de procédure civile,

- de même, le débat sur la responsabilité et sur la prescription des actions relève du fond et nécessite un examen approfondi notamment sur le point de départ du délai de prescription.

L'affaire a été examinée à l'audience du 6 février 2024 à 14h.

MOTIVATION DE LA DÉCISION

- sur la fin de non-recevoir

1. Il ressort des pièces du dossier que l'assignation portant appel devant le juge du fond de la société Bâtiment Services Toiture et signifiée le 21 décembre 2022, indique : 'vu l'article 1240 et 2224 du code civil, les moyens qui précédent et les pièces versées au débat, Il est demandé au Tribunal Judiciaire pour les causes et raisons sus-énoncées (...)'. Il s'en déduit que l'action de Mme [T], dont la cour n'a pas à

apprécier le bien-fondé dans le cadre de la question dont elle est saisie relativement à sa recevabilité, relève de la responsabilité civile délictuelle.

2. La société Bâtiment Services Toiture a produit un contrat de sous-traitance signé entre 'la Sarl Maisons Bois 31" et la Sarl Bâtiment Services Toulousain le 15 avril 2009 pour l'exécution des travaux commandés par Mme [T]. La Société Bâtiment Services Toiture, nouvelle dénomination de la Société Bâtiment Services Toulousain a donc été assignée en qualité de société sous-traitante de la prétendue société Maisons Bois 31 dont le n° Siret figurant au devis des travaux litigieux correspond à celui de la société Bâtiment Service Habitat au sujet de laquelle la société Bâtiment Services Toiture s'est présentée au cours de l'instance comme venant aux droits de celle-ci qui avait été attraite dans la procédure en juillet 2019.

Il s'en suit que la société Bâtiment Services Toiture se trouve à l'instance à la fois en qualité de locateur d'ouvrage par reprise des obligations de l'entreprise ayant accepté l'exécution du marché et en qualité de sous-traitante de cette dernière, l'ensemble de ces sociétés étant animées par M. [H]. La cour relèvera qu'en dépit de l'ensemble des constatations déjà possibles dès la première instance, l'appel a été formé au nom de la Sarl Bâtiment Services Toulousain et il est toujours conclu sous cette dénomination contrairement à l'exacte dénomination visée à l'assignation du 21 décembre 2022 et dans l'entête de l'ordonnance entreprise. La réelle dénomination sera donc substituée à celle devenue obsolète.

3. La saisine de la cour porte exclusivement sur l'appel de la décision du juge de la mise en état ayant rejeté la fin de non-recevoir opposée par la société Bâtiment Services Toiture et tirée de la forclusion tirée des dispositions de l'article 1792-4-3 du code civil au motif que l'action formée par Mme [T] est présentée sur le terrain de la responsabilité délictuelle dont le point de départ de la prescription pouvait être fixé à la connaissance par le maître de l'ouvrage de l'existence du contrat de sous-traitance dans un contexte de confusion existant entre les diverses sociétés.

4. Il doit être rappelé quen vertu de l'article 1792-4-3 précité et créé par la loi n 2008-561 du 17 juin 2008, les actions en responsabilité contre les constructeurs et leurs sous-traitants, à l'exception de celles qui sont régies par les articles 1792-3, 1794-1 et 1792-4-2 du même code, se prescivent par dix ans à compter de la réception des travaux (Civ. 3ème, 16 septembre 2021, n° 20-12.372), mais qu'en l'absence de réception, l'action en responsabilité du maître de l'ouvrage à l'encontre du sous-traitant se prescrit par cinq ans à compter la manifestation du dommage (Civ. 3ème, 19 mars 2020, n° 19-13.459 ; Civ. 3ème, 16 septembre 2021, n° 20-12.372).

4.1. Cette action du maître de l'ouvrage contre le sous-traitant, peu important qu'elle soit de nature délictuelle, fait donc l'objet d'une forclusion après un délai de dix ans qui court à compter de la réception de l'ouvrage et obéit au régime de cette forclusion, sauf en l'absence de réception, hypothèse dans laquelle l'action en responsabilité délictuelle se prescrit par cinq ans à compter de la date où le maître de l'ouvrage a eu connaissance des faits lui permettant d'exercer ladite action.

4.2. La réception est l'acte par lequel le maître de l'ouvrage déclare accepter l'ouvrage avec ou sans réserves, la jurisprudence ayant consacré le principe d'une réception tacite (Civ. 3ème, 16 juillet 1987, n° 86-11.455 ; Civ. 3ème, 12 octobre 1988, n° 87-11.174). La prise de possession par le maître de l'ouvrage et le paiement de la quasi intégralité du prix vaut présomption de la volonté non équivoque de celui-ci de recevoir l'ouvrage (Civ. 3ème, 13 juillet 2016, n° 15-17.208 ; Civ. 3ème, 18 mai 2017, n° 16-11.260), avec ou sans réserves (Civ. 3ème, 18 avril 2019, n° 18-13.734). Cette présomption est une présomption simple et peut être combattue par la partie adverse lorsque la prise de possession est équivoque et le paiement du marché s'élève à 65% (Civ. 3ème, 13 juin 2019, n° 18-14.817) ou en l'absence de justification de paiement du prix et la contestation persistante de la qualité des travaux (Civ. 3ème, 16 mai 2019, n° 18-15.187).

4.3. Selon l'article 789 du code de procédure civile, en sa dernière rédaction applicable à l'instance engagée par Mme [T] à l'endroit de la Sas Bâtiment Services Toiture le 21 décembre 2022, postérieurement à l'entrée en vigueur au 1er janvier 2020 du décret n° 2019-1333 du 11 décembre 2019, le juge de la mise en état, saisi d'une fin de non-recevoir, est compétent pour connaître de la question de fond dont dépend la solution de cette fin de non-recevoir, le renvoi devant la formation de jugement n'étant obligatoire que lorsqu'une partie s'est opposée à l'examen de cette question de fond par le juge de la mise en état.

En l'espèce, Mme [T] ne produit pas ses conclusions déposées devant le juge de la mise en état et il ne résulte d'aucune pièce versée au dossier qu'elle a conclu, dans le dispositif de ses conclusions, à l'incompétence du juge de la mise en état étant seulement relevé dans l'exposé des moyens développés par Mme [T], en page 5 de l'ordonnance entreprise, la formule suivante : 'Elle fait valoir que l'analyse de cette irrecevabilité conduit à celle de la date de réception, dont la détermination, en l'absence de tout procès-verbal de réception, relève de la compétence du juge du fond' sans aucune mention d'une opposition expresse à l'exercice par le juge de la mise en état de sa compétence concurrente en pareille hypothèse. De surcroît, l'exception d'incompétence est soulevée en appel, seulement à titre subsidiaire, alors que l'incident porte sur la demande par la société Bâtiment Services Toiture d'application de l'article 1792-4-3 du code civil supposant par définition l'examen de la question de la réalité de la réception de l'ouvrage alors que l'exception d'incompétence appliquée à l'exercice de ses pouvoirs par juge de la mise en état, doit être soulevée avant toute défense au fond. Cette prétention subsidiaire sera donc écartée.

4.4. La cour relève que n'est produit aucun procès-verbal de réception de travaux et que:

- le 25 novembre 2018 Mme [T] a adressé à M. [H] un courrier dans lequel elle date la livraison au 15 juillet 2009,

- un courrier établi par le locateur d'ouvrage le 15 juillet 2009 et par lequel M. [H] considérait que l'ensemble des prestations était terminé et qu'un accord était intervenu sur le sort d'un solde de chantier de 577 euros non réglé relativement à des prestations dont Mme [T] conserverait la charge avec fourniture de la colle par l'entreprise,

- Mme [T] ne conteste pas avoir payé la somme de 56'108,82 soit la quasi-totalité du marché, et a pris possession de l'ouvrage dont elle ne démontre pas avoir contesté la qualité des travaux de façon

persistante dès la fin du chantier ni qu'il demeurerait des réserves en lien avec les désordres à l'origine de la procédure.

Par conséquent, il convient de retenir l'existence d'une réception tacite au jour de la livraison, soit le 15 juillet 2009.

4.5. L'assignation d'appel en cause de la Sas Bâtiment Services Toiture en sa qualité d'entreprise sous- traitante, régularisée par Mme [T] le 21 décembre 2022, est donc irrecevable dès lors que plus de dix ans se sont écoulés entre le 15 juillet 2009 et le 21 décembre 2022. L'ordonnance entreprise devra donc être réformée sur ce point.

5. Par voie de conséquence, la déclaration d'expertise commune à la Sas Bâtiment Services Toiture ne peut s'entendre qu'en sa qualité de société venant aux droits de la Sarl Bâtiment Services Habitat déjà présente aux opérations d'expertise en vertu de l'ordonnance du juge de la mise en état du 16 janvier 2020 qui avait acté son intervention volontaire à l'instance en constatant la dissolution de la société Bâtiment Services Habitat par décision de son associée unique, la Sas Bâtiment Services Toiture, le 26 février 2018. Ensuite, la jonction, mesure de pure administration judiciaire dont cette dernière société ne pouvait faire appel concerne une instance dans laquelle d'autres parties ont été appelées. Elle ne peut de surcroît demander à être mise hors de cause d'une instance jointe à une autre instance où elle est déjà intervenue volontairement. Elle ne pourra simplement pas être condamnée en sa qualité de sous-traitante de la société dont elle a reçu le patrimoine.

La décision entreprise sera réformée pour apporter les précisions dénuées d'ambiguîté sur la présence de cette partie à l'instance au fond et à l'expertise.

6. La cour n'étant pas saisie des autres dispositions de l'ordonnance entreprise, il convient de condamner Mme [T] aux dépens d'appel et de juger qu'il n'est pas inéquitable de débouter la Sas Bâtiment Services Toiture de sa demande présentée sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile. Tenue aux dépens d'appel, Mme [T] ne peut prétendre au bénéfice de ces mêmes dispositions.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant, dans la limite de sa saisine, publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,

Constate que le n° Siret 480 047 521 visé au devis de surélévation établi par Maisons Bois 31 au nom de 'M. et Mme [T]' le 17 février 2009 correspondait à celui de la Sarl Bâtiment Services Habitat suite à un changement de dénomination, radiée depuis le 3 octobre 2018 et ayant fait l'objet d'une transmission universelle de patrimoine à son associée unique la Sarl Bâtiment Services Toulousain ayant changé de dénomination suivant acte du 21 novembre 2016, publié le 14 février 2017 en prenant celle de Bâtiment Services Toiture.

Constate en conséquence que la société appelante se dénomme en réalité Sas Bâtiment Services Toiture et retient en conséquence cette dénomination de l'appelante dans l'entête du présent arrêt.

Infirme, dans toutes ses dispositions dont la cour est saisie, l'ordonnance du juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Toulouse rendue le 13 avril 2023.

Et statuant à nouveau,

Écarte la prétention de Mme [N] [T] tendant à voir juger que l'examen de la recevabilité de l'action relève du tribunal judiciaire de Toulouse statuant au fond.

Déclare irrecevable, l'action introduite par Mme [N] [T] le 21 décembre 2022 à l'encontre de la Sarl Bâtiment Services Toiture prise en sa qualité de sous-traitante de la Sarl Maisons Bois 31.

Dit que l'expertise confiée à M. [W] [C] en vertu de l'ordonnance du juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Toulouse le 16 janvier 2020 se poursuivra en la présence de la Sarl Bâtiment Services Toiture en sa seule qualité de société venant aux droits de la Sarl Bâtiment Services Toulousain.

Condamne Mme [N] [T] aux dépens d'appel.

Déboute la Sas Bâtiment Services Toiture de sa demande présentée au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Déboute Mme [N] [T] de sa demande présentée au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.