CA Paris, Pôle 4 ch. 9, 19 septembre 2024, n° 23/03667
PARIS
Arrêt
Infirmation
PARTIES
Demandeur :
Cours de France (SAS)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Durand
Conseillers :
Mme Arbellot, Mme Coulibeuf
Avocats :
Me Lambert, Me Lacaud
FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES
Le 22 mai 2020, Mme [L] [J] née [H] a inscrit sa fille [D] [J] auprès de la société d'exploitation de l'institut européen de langues (ci-après société SEIEL) en qualité d'étudiante, dans le cadre de sa préparation au concours de l'école de santé des armées ("Prépa ESA"). Le coût de la formation était fixé à 7 030 euros.
[D] [J] a également souscrit le 1er juillet 2020 une inscription pour un stage de pré-rentrée du 24 au 28 août 2020 au prix de 690 euros.
Le 26 août 2020, Mme [L] [J] a indiqué par courriel à l'organisme de formation que sa fille avait suivi pendant 2 jours le stage de pré-rentrée, qu'elle s'était rendue compte que le niveau était beaucoup trop élevé pour elle et avait choisi d'arrêter le cursus, c'est pourquoi elle sollicitait l'annulation de son inscription annuelle en demandant de ne pas encaisser le chèque remis.
Les frais de scolarité ont été encaissés et l'organisme de formation a refusé tout remboursement dès le 14 septembre 2020 évoquant le caractère tardif de l'annulation.
Par acte du 10 mai 2022, Mme [L] [J] et Mme [D] [J] ont fait assigner la société SEIEL devant le pôle de proximité du tribunal judiciaire de Paris aux fins principalement de voir dire que l'organisme n'a pas respecté son obligation précontractuelle d'information et d'annuler en conséquence le contrat avec restitution de la somme versée de 7 030 euros et à titre subsidiaire, de juger abusif et inopposable l'article 11 du contrat, de juger qu'elles pouvaient valablement résilier le contrat et de condamner l'organisme à restituer la somme versée.
Suivant jugement réputé contradictoire du 10 février 2023, le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Paris a annulé le contrat conclu le 22 mai 2020 et a condamné la société SEIEL à payer à Mme [L] [J] la somme de 7 030 euros en remboursement des sommes versées et une somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.
Pour statuer ainsi, le juge a considéré, se fondant sur les articles L. 221-5, L. 221-7, L. 111-1 du code de la consommation relatifs aux contrats conclus à distance et 1112-1 du code civil, que la société SEIEL avait manqué à son obligation d'information précontractuelle dans la mesure où il n'était pas mentionné les prérequis pour accéder à la formation ni le déroulé de la formation (nature, volume horaire des enseignements notamment) et alors que Mme [D] [J] n'aurait pas postulé à cette formation si elle avait su que le niveau exigé était trop élevé pour elle en ce qu'elle était titulaire d'un bac STSS.
La société SEIEL dénommée désormais Cours de France a relevé appel de ce jugement par déclaration enregistrée le 16 février 2023.
Aux termes de ses dernières conclusions remises le 20 octobre 2023, elle demande à la cour :
- d'annuler le jugement et statuant à nouveau,
- de débouter Mme [L] [J] et Mme [D] [J] de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions,
- de les condamner au paiement de la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.
Elle conteste la motivation retenue par le premier juge et affirme avoir bien renvoyée aux intimées le 19 mai 2020, la brochure, laquelle décrit parfaitement le cursus et les prérequis, notamment en ses pages 6 et 7. Elle ajoute qu'il en est de même à la page 14 de la brochure, "Prépa annuelle intensive en présentiel", qui contient ces mêmes informations et qu'il est indiqué que "cette formule s'adresse aux étudiants qui souhaitent se préparer pendant une année pleine après l'obtention de leur BAC" en joignant un tableau du nombre d'heures de cours par semaine et par matière (principalement scientifiques et sportives). Elle fait remarquer qu'il semble compliqué de soutenir que l'intimée ne savait pas que des études de médecine pouvaient demander un certain niveau scientifique, ce qu'elle invoque à plusieurs reprises. Elle insiste sur le fait qu'il ressortait de la brochure que la filière dont elle provenait n'était pas forcément un obstacle et que le fait que les élèves proviennent majoritairement de la filière scientifique du baccalauréat n'aurait pas dû être de nature à la surprendre.
Elle affirme ne pas avoir été au courant de la reconnaissance de handicap de [D] et soutient qu'on ne voit pas très bien en quoi cela l'empêche de suivre une formation, laquelle aurait pu être aménagée si l'étudiante ou sa mère en avait fait part à l'école. Elle observe qu'être reconnue comme handicapée en avril et s'inscrire à une formation pour devenir médecin militaire en mai est un choix qui effectivement interroge, mais n'engage nullement la responsabilité de l'institut. Elle ajoute que comme l'intimée ne peut demander à l'organisme de formation de "l'assigner socialement", elle ne peut pas non plus exiger de lui qu'il procède à une discrimination basée sur sa condition physique et ne peut pas non plus attendre de lui qu'il connaisse ses limites et sa situation physique et administrative sans l'en informer. Elle conteste tout rôle tendant à voir évaluer les capacités de la candidate d'autant qu'en l'espèce, et malgré la clarté de la brochure, ce n'est qu'après deux jours de pré-rentrée que l'élève a considéré qu'elle n'y arriverait pas. Elle note que d'autres étudiants ayant eu le même parcours que [D] ont pu suivre le cursus avec succès.
Sur le moyen tiré d'une clause abusive, elle fait valoir en substance que les intimées renvoient à l'article 11 du contrat de formation, qu'elles le mettent en parallèle avec son article 4, sans démontrer en quoi ils seraient incompatibles et explique que si une formation est annulée, comme le permet l'article 4, rien ne dit que les personnes victimes de cette annulation ne se verraient pas rembourser deux fois le prix déboursé pour pouvoir la suivre, comme le prévoit l'article 11 et que rien ne dit non plus qu'un tribunal ne le verrait pas de cet 'il sauf s'il devait juger que l'article 11 était une clause abusive, ce qui démontre bien qu'il ne l'est pas, puisque dans cette hypothèse, c'est le consommateur qui serait privé d'une compensation en raison de la non-exécution du contrat. Elle rappelle que ce n'est pas au titre de l'article 11 que le règlement de la formation a été encaissé, mais bien du fait de la tardiveté de l'annulation unilatérale du contrat par les intimées, pour des raisons qui ne sont ni légitimes ni sérieuses puisque tenant exclusivement à une situation qu'elles avaient mal évaluée et qui était pourtant connue avant l'inscription, et connue d'elles seules.
Aux termes de leurs ultimes conclusions remises le 15 mai 2024, Mme [L] [J] et Mme [D] [J] demandent à la cour :
- de confirmer le jugement,
- de débouter la société Cours de France venant aux droits de la société d'exploitation de l'institut européen de langues de l'ensemble de ses demandes,
- par conséquent, de juger que Cours de France n'a pas respecté son obligation précontractuelle d'information,
- de juger nul le contrat d'inscription Prépa ESA du 22 mai 2020,
- de condamner la société Cours de France venant aux droits de la société d'exploitation de l'institut européen de langues au paiement de la somme de 7 030 euros en remboursement des sommes versées au titre du contrat d'inscription Prépa ESA du 22 mai 2020,
- à titre subsidiaire :
- de juger abusive et inopposable l'article 11 du contrat d'inscription Prépa ESA du 22 mai 2020,
- de juger qu'elles pouvaient valablement résilier le contrat d'inscription et de condamner la société Cours de France venant aux droits de la société d'exploitation de l'institut européen de langues au paiement de la somme de 7 030 euros en remboursement des sommes versées,
- en tout état de cause, de la condamner au paiement de la somme de 1 700 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens de l'instance.
Elles demandent confirmation du jugement en ce qu'il a reconnu applicables les dispositions du code de la consommation et soutiennent que l'institut a violé son obligation d'information précontractuelle au sens de l'article L. 111-1 dudit code, en ce qu'il était tenu de faire connaître à l'élève avant signature de l'engagement les caractéristiques essentielles de l'enseignement dispensé. Elles font observer que la brochure de moins de vingt-cinq pages telle que communiquée par email parmi d'autres documents ne permet pas de délivrer une information suffisamment claire et concise et que l'ensemble des informations requises par la jurisprudence ne sont pas présentes.
Elles font valoir que si le baccalauréat est requis pour la préparation semi-intensive, ce qui est bien indiqué, tel n'est pas le cas pour la préparation intensive de sorte qu'il est difficile de savoir comment elles pouvaient penser que cette préparation ne s'adressait qu'aux titulaires d'un baccalauréat scientifique. Elles ajoutent que la plaquette ne contient pas les matières essentielles ayant dû être suivies, les travaux à effectuer, la cadence de travail, les conditions d'aptitude physique exigées et de manière générale le niveau de connaissance requis pour intégrer cette préparation.
Elles notent également que l'organisme s'engage dans la plaquette à garantir aux candidats retenus d'évoluer dans des classes homogènes en niveau et en implication alors que cet engagement n'a pas été tenu. Elles déplorent de n'avoir reçu aucune information détaillée sur le contenu de la formation, sur le niveau ou les critères physiques requis et alors qu'elles se sont rendues compte que le handicap physique de [D] ne lui permettrait pas d'accéder aux postes visés dans l'armée pour lesquels elle devait suivre la formation dispensée par la SEIEL. Selon elles, l'organisme inverse la charge de la preuve en alléguant à tort qu'il appartenait Mme [J] de donner toutes les informations sur sa situation alors qu'elle avait bien indiqué suivre une terminale STSS et que le rôle la société SEIEL en tant que professionnel est d'orienter les personnes avec qui elle contracte et de ne pas leur vendre à tout prix une formation qui ne leur convient pas.
Elles poursuivent donc l'annulation du contrat et considèrent à titre subsidiaire qu'elles étaient en droit de résilier le contrat puisqu'elles se prévalaient d'un motif sérieux et légitime et en raison du caractère abusif de l'article 11 dudit contrat, lequel devra être écarté. Elles affirment que Mme [J] a invoqué à plusieurs reprises l'absence d'adéquation de la formation avec le cursus de sa fille, ce dont la société SEIEL ne les avait pas informées ainsi que ses problèmes de santé lui interdisant de prétendre aux postes visés dans l'armée.
Pour un plus ample exposé des faits, moyens et prétentions des parties, il est renvoyé aux écritures de celles-ci conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 21 mai 2024 et l'affaire a été appelée à l'audience le 5 juin 2024.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Si la société Cours de France demande aux termes de ses écritures l'annulation du jugement, elle ne développe aucun moyen à ce titre de sorte qu'il ne sera pas statué spécifiquement sur ce point, étant observé qu'elle ne demande jamais l'infirmation du jugement critiqué ni dans sa déclaration d'appel ni aux termes de ses conclusions numéros 2.
Sur la délivrance des informations précontractuelles
Aux termes de leurs dernières écritures, les intimées soutiennent ne pas avoir été destinataires avant la conclusion du contrat, des caractéristiques essentielles de l'enseignement dispensé se fondant sur les dispositions de l'article L. 111-1 du code de la consommation, pour demander confirmation de l'annulation du contrat.
Il n'est pas contesté que le contrat a été conclu à distance puisque Mme [J] a pris contact avec l'établissement le 19 mai 2020 par courriel et qu'un courriel lui a été adressé en réponse le même jour afin de lui adresser la brochure de la formation Cap ESA ainsi que divers renseignements, avant qu'elle ne renvoie le contrat validé le 22 mai 2020. La structure a pris acte de l'acceptation de l'offre suivant courriel du 15 juin 2020 indiquant transmettre sans la produire la facture de la formation.
Il en résulte que les dispositions relatives aux contrats conclus hors établissement trouvent à s'appliquer sans que cela ne soit contesté.
En application de l'article L. 221-5 du code de la consommation en sa version applicable au contrat, préalablement à la conclusion d'un contrat de vente ou de fourniture de services, le professionnel communique au consommateur, de manière lisible et compréhensible, notamment les informations prévues aux articles L. 111-1 et L. 111-2, lorsque le droit de rétractation existe, les conditions, le délai et les modalités d'exercice de ce droit ainsi que le formulaire type de rétractation conforme à l'annexe de l'article R. 221-1 du même code.
L'article L. 221-9 dispose que le professionnel fournit au consommateur un exemplaire daté du contrat conclu hors établissement, sur papier signé par les parties ou, avec l'accord du consommateur, sur un autre support durable, confirmant l'engagement exprès des parties. Ce contrat comprend toutes les informations prévues à l'article L. 221-5.
Selon l'article L. 111-1 dans sa version applicable au litige, avant que le consommateur ne soit lié par un contrat de vente de biens ou de fourniture de services, le professionnel communique au consommateur, de manière lisible et compréhensible, les informations suivantes :
1° Les caractéristiques essentielles du bien ou du service, compte tenu du support de communication utilisé et du bien ou service concerné ;
2° Le prix du bien ou du service, en application des articles L. 112-1 à L. 112-4 ;
3° En l'absence d'exécution immédiate du contrat, la date ou le délai auquel le professionnel s'engage à livrer le bien ou à exécuter le service ;
4° Les informations relatives à son identité, à ses coordonnées postales, téléphoniques et électroniques et à ses activités, pour autant qu'elles ne ressortent pas du contexte ;
5° S'il y a lieu, les informations relatives aux garanties légales, aux fonctionnalités du contenu numérique et, le cas échéant, à son interopérabilité, à l'existence de toute restriction d'installation de logiciel, à l'existence et aux modalités de mise en 'uvre des garanties et aux autres conditions contractuelles ;
6° La possibilité de recourir à un médiateur de la consommation dans les conditions prévues au titre Ier du livre VI.
Selon l'article L. 242-1 du code de la consommation, les dispositions de l'article L. 221-9 sont prévues à peine de nullité du contrat conclu hors établissement.
En application de l'article 9 du code de procédure civile, il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention.
Les intimées soutiennent principalement que les caractéristiques essentielles de la formation ne leur ont pas été délivrées et en particulier pour ce qui concerne les matières essentielles, les travaux à effectuer, la cadence de travail, les conditions d'aptitude physique exigées et de manière générale le niveau de connaissance requis pour intégrer cette préparation.
Mme [J] et sa fille reconnaissent avoir réceptionné la brochure communiquée par la société Cours de France telle que produite aux débats.
La cour constate que cette brochure intitulée "Cap'ESA, la Prépa de référence au concours médecin militaire" contient 25 pages et est rédigée en termes clairs et parfaitement compréhensibles.
Il est précisé en première page que sont proposées des préparations annuelles soit en présentiel, soit en distanciel et des stages intensifs. Le sommaire détaille les 21 chapitres de la plaquette.
Après avoir présenté l'École de santé des armées, le concours ESA et ses épreuves, le métier de médecin militaire puis l'Institut, la brochure décrit le cursus et les prérequis, notamment en ses pages 7, 8 et 11 où il est indiqué que la formule prépa annuelle intensive en présentiel choisie par [D] [J] s'adresse aux étudiants qui souhaitent se préparer pendant une année entière après l'obtention de leur baccalauréat et permet de consolider et de parfaire les connaissances et d'acquérir les méthodes en vue de réussir ses études de médecine (civiles ou militaires) avant de détailler la répartition hebdomadaire des cours de septembre à avril (mathématiques 8 h, physique 7 h 30, SVT 7 h 30, chimie 7 h 30, français 6 h, préparation à l'entretien avec le jury 1 h 30, devoirs sur table 3 h, sport 2 h, étude 3 h) et de mai à juin (entraînement sportif et préparation à l'oral).
Le cursus est ouvert à tous les titulaires du baccalauréat sans qu'il ne soit dissimulé le fait que les matières principales abordées (mathématiques, physique-chimie et SVT) sont celles qui constituent l'intégralité du programme de terminale S puisque c'est précisément l'étendue du programme des épreuves écrites du concours de médecine.
La page 4 de la brochure explique le métier de médecin militaire et indique que "le médecin militaire est avant toute chose ...un médecin. (..) Il doit en outre disposer d'une excellente condition physique et morale pour pourvoir intégrer une zone de guerre".
Enfin, les méthodes pédagogiques et les travaux requis des étudiants sont expliqués en page 9 de la plaquette qui indique qu'il existe un espace numérique dédié et expose les conditions de travail et l'organisation de deux concours blancs.
Contrairement à ce que soutiennent les intimées, la société Cours de France démontre ainsi avoir délivré les caractéristiques essentielles de la formation avant validation de l'inscription, et en particulier l'information selon laquelle la prépa Cap ESA était ouverte à tous les titulaires d'un baccalauréat sans la réserver spécifiquement aux titulaires d'un baccalauréat scientifique, sachant que serait abordée dans l'année l'intégralité du programme de terminale S servant de base aux futures épreuves du concours de médecine.
La candidate ne pouvait dans ces conditions ignorer que le cursus nécessitait un certain niveau scientifique outre des prérequis physiques pour ensuite exercer des métiers au sein de l'armée de sorte qu'elle ne peut invoquer une erreur sur le niveau requis.
Les intimées reprochent également à la société Cours de France de ne pas les avoir suffisamment orientées ou conseillées en amont alors qu'elles se sont rendues compte que le handicap physique de [D] ne lui permettrait pas d'accéder aux postes visés dans l'armée pour lesquels elle devait suivre la formation. Force est de constater que la situation de handicap de [D] reconnue au mois d'avril 2020 n'a jamais été abordée avec l'établissement avant la validation du contrat ni même pour fonder une annulation du contrat le 26 août 2020 et ce n'est que face au refus de l'organisme de formation d'annuler le contrat, que Mme [J] a mis en avant dans un courriel du 14 septembre 2020 la reconnaissance de handicap de sa fille avec remise d'une carte de personne à mobilité réduite.
C'est donc à tort que le premier juge a estimé que le manquement à l'obligation d'information précontractuelle était constitué et que le contrat encourait l'annulation. Le jugement doit être infirmé sur ce point.
Sur l'existence d'une clause abusive
Aux termes des dispositions de l'article L. 212-1 du code de la consommation en sa version applicable au contrat, dans les contrats conclus entre professionnels et consommateurs, sont abusives les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer, au détriment du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat. Le caractère abusif d'une clause s'apprécie en se référant, au moment de la conclusion du contrat, à toutes les circonstances qui entourent sa conclusion, de même qu'à toutes les autres clauses du contrat. Il s'apprécie également au regard de celles contenues dans un autre contrat lorsque les deux contrats sont juridiquement liés dans leur conclusion ou leur exécution. L'appréciation du caractère abusif des clauses ne porte ni sur la définition de l'objet principal du contrat ni sur l'adéquation du prix ou de la rémunération au bien vendu ou au service offert pour autant que les clauses soient rédigées de façon claire et compréhensible.
En l'espèce, le contrat validé le 22 mai 2020 contient des conditions générales de vente et en signant le contrat, Mme [D] [J] a certifié avoir pris connaissance de l'offre signée et des conditions générales de vente. Elle a également validé le règlement intérieur et aux côtés de sa mère les conditions financières.
L'article 11 desdites conditions est relatif aux modalités financières, et prévoit : "Toute prestation achetée est due dans son intégralité. Réciproquement SEIEL s'oblige au remboursement du montant versé par le client augmenté d'une indemnité égale à celui-ci si elle renonce à la fournir. Le présent article est opposable aux parties qu'il s'agisse d'un cas de force majeure ou non".
L'article 4 précise que la transmission à SEIEL du présent dossier signé vaut acceptation de l'offre et constitue le point de départ du délai de rétractation prévu par la loi dans le seul cas de la vente à distance.
L'offre de contrat est pourvue d'un bordereau de rétractation et l'article 12 précise bien que le client dispose d'un délai de rétractation de 14 jours à compter l'acceptation de l'offre.
Pour autant, une fois passé le délai de rétractation, le contrat ne ménage aucune possibilité de sortir du contrat pour l'étudiant mis à part le cas de l'interruption de la formation pour maladie qui entraîne "un report" tel que prévu à l'article 6 et la somme versée en contrepartie de l'inscription est donc acquise définitivement à l'organisme à l'issue du délai de rétractation.
Il doit donc être considéré que cette stipulation contractuelle qui fait du prix total de la scolarité un forfait intégralement acquis à l'école dès la signature du contrat et qui ne réserve pas la possibilité d'une résiliation pour un motif légitime ou impérieux et les modalités de dispense partielle de règlement de la formation a pour effet de créer, au détriment de l'étudiant, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat. Elle est donc abusive.
Aux termes de l'article L. 241-1 du code de la consommation en sa version applicable au contrat, les clauses abusives sont réputées non écrites et le contrat reste applicable dans toutes ses dispositions autres que celles jugées abusives s'il peut subsister sans ces clauses.
Il convient d'écarter la clause litigieuse (clause numéro 11) et de la réputer non écrite.
Il est justifié que [D] [J] est atteinte d'un handicap réduisant de manière importante et durable sa capacité et son autonomie de déplacement à pied et impose qu'elle soit accompagnée par une tierce personne dans ses déplacements, tel que cela résulte de la notification de la MDPH du 14 avril 2020 lui attribuant une carte mobilité inclusion. Cela constitue un motif parfaitement légitime de résiliation du contrat dans la mesure où il est acquis qu'elle ne peut remplir les conditions physiques requises pour intégrer des postes au sein de l'armée.
La demande de remboursement doit donc être accueillie à hauteur de 80 % du montant de la scolarité soit 80 % de 6 950 euros soit une somme de 5 560 euros, les frais d'inscription de 80 euros restant acquis à la société Cours de France.
Il convient donc de condamner la société Cours de France à rembourser à Mme [J] la somme de 5 560 euros.
Les dispositions relatives aux dépens et frais irrépétibles sont confirmées. Chacune des parties supportera la charge de ses dépens et frais irrépétibles.
PAR CES MOTIFS
LA COUR,
Statuant contradictoirement et en dernier ressort,
Infirme le jugement sauf quant au sort des dépens et frais irrépétibles ;
Statuant à nouveau et y ajoutant,
Dit n'y avoir lieu à annulation du contrat ;
Dit que l'article 11 des conditions générales du contrat d'inscription Prépa ESA du 22 mai 2020 est abusif et doit être réputé non écrit ;
Condamne la société Cours de France anciennement dénommée société d'exploitation de l'institut européen de langues à payer à Mme [L] [J] la somme de 5 560 euros en remboursement des sommes versées au titre du contrat d'inscription Prépa ESA du 22 mai 2020 ;
Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile ;
Dit que chaque partie conservera la charge de ses propres dépens ;
Rejette toute demande plus ample ou contraire.