CA Montpellier, 3e ch. civ., 19 septembre 2024, n° 19/08036
MONTPELLIER
Arrêt
Infirmation
PARTIES
Défendeur :
L'Art et la Manière (EURL)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Sainati
Conseillers :
M. Carlier, Mme Wattraint
Avocats :
Me Andujar, Me Apollis, Me Dessalces
EXPOSE DU LITIGE
Monsieur [X] [E], gérant de l'EURL l'art et la manière, effectue divers travaux de maçonnerie, de plomberie et d'isolation dans le cadre de son activité professionnelle.
Afin que ce dernier puisse régler ses dettes professionnelles, Monsieur [Z] [O] et son épouse Madame [C] [M] épouse [O] lui ont prêté la somme de 10 000 euros remise sous forme d'un chèque tiré sur la banque postale n°100617045C daté du 10 avril 2011.
Sur assignation des époux [O], le tribunal de grand instance de Montpellier a, par jugement du 5 décembre 2016 confirmé par arrêt de la cour d'appel de Montpellier du 28 mai 2019, condamné monsieur [X] [E] aux dépens et à payer à monsieur et madame [Z] [O] la somme de 10 000 euros avec intérêts au taux légal, outre la somme de 2 000 euros à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive, et la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Invoquant que les travaux qu'il a effectué au domicile de la fille des époux [O], Madame [K] [O], ne lui ont pas été réglés, Monsieur [E] l'a fait assigner en intervention forcée devant le tribunal de grande instance de Montpellier par acte d'huissier du 10 juillet 2014.
Par ordonnance du 16 janvier 2015. le juge de la mise en état du tribunal de grande instance de Montpellier a rejeté la demande de jonction des deux procédures.
Par ordonnance du 02 octobre 2015, le tribunal de grande instance de Montpellier s'est déclaré incompétent et a renvoyé Monsieur [X] [E], l'EURL l'art et la manière ainsi que Madame [K] [O] devant le tribunal de grande instance de Béziers.
Par ordonnance du 29 août 2017, le juge de la mise en état près le tribunal de grande instance de Béziers a ordonné une expertise ayant notamment pour objectif de rechercher et d'évaluer les travaux effectués par Monsieur [E] au domicile de Madame [O].
Monsieur [L] [F], expert désigné, a déposé son rapport le 12 décembre 2017.
Par jugement contradictoire rendu le 18 novembre 2019, le tribunal de grande instance de Béziers a notamment :
- condamné madame [K] [O] à payer à monsieur [X] [E] ainsi qu'à l'EURL l'art et la manière, la somme globale de 44 000 euros au titre des travaux exécutés ;
- débouté monsieur [X] [E] et l'EURL l'art et la manière de leur demande en condamnation au titre de la résistance abusive ;
- condamné madame [K] [O] aux dépens;
- débouté monsieur [X] [E] et l'EURL l'art et la manière de leur demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Par déclaration d'appel enregistrée au greffe en date du 16 décembre 2019, Madame [K] [O] a régulièrement interjeté appel du jugement susvisé, l'acte d'appel précisant les chefs de jugement critiqués.
Par ses conclusions enregistrées au greffe en date du 11 mars 2020, Madame [K] [O] demande à la cour de confirmer le jugement dont appel en ce qu'il a débouté Monsieur [X] [E] et l'EURL l'art et la manière de leur demande de condamnation au titre de la résistance abusive et au titre des dispositions relatives à l'article 700 du code de procédure civile mais de réformer le jugement dont appel pour le surplus de ses dispositions et statuant à nouveau de :
- débouter Monsieur [X] [E] et l'EURL l'art et la manière de l'ensemble de leurs demandes comme étant infondées ;
- condamner solidairement Monsieur [X] [E] et l'EURL l'art et la manière prise en la personne de son représentant légal à lui payer la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamner solidairement Monsieur [X] [E] et l'EURL l'art et la manière aux entiers dépens en ce compris les dépens de première instance et les frais de l'expertise judiciaire.
Par ses conclusions enregistrées au greffe en date du 11 juin 2020, Monsieur [X] [E] et l'EURL l'art et la manière demandent à la cour de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a condamné madame [K] [O] à payer à Monsieur [X] [E] et à l'EURL l'art et la manière la somme de 44 000 euros au titre des travaux réalisés et d'infirmer le jugement entrepris en ce qu'il les a déboutés de leurs demandes en paiement de la somme de 5 000 euros au titre de sa résistance abusive et au titre de l'article 700 du code de procédure civile. Ils demandent à la cour de
- condamner madame [K] [O] à leur payer la somme de 5 000 euros à titre de dommages-intérêts pour résistance abusive ;
- condamner Madame [K] [O] à leur payer la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile en première instance et la somme de 3 000 euros supplémentaire en cause d'appel ;
- condamner Madame [K] [O] aux entiers dépens de première instance et d'appel en ce compris les frais d'expertise.
La clôture de la procédure a été prononcée par ordonnance du 06 mai 2024.
Pour un plus ample exposé des faits et prétentions des parties, il est expressément fait référence aux conclusions des parties et au jugement déféré.
MOTIFS :
Sur la demande de paiement de la somme de 44 000 euros :
Le tribunal a retenu l'existence d'un contrat d'entreprise entre M. [E] et Mme [O] eu égard aux éléments suivants :
Les messages de madame [K] [O] à monsieur [X] [E], d'octobre et novembre 2013, aux termes desquels elle demande les plans des branchements d'eau et d'électricité puis affirme qu'elle n'aurait jamais dû lui confier les travaux d'aggrandissement de sa maison,
La délivrance d'un permis de construire concomitamment aux travaux effectués et décrits sur les factures de l'EURL l'art et la manière (non signées de madame [K] [O]) et sur les attestations versées aux débats, et apparaissant sur les photographies versées aux débats.
Il a considéré que ces travaux justifiaient une rémunération à hauteur de la somme de 44 000 euros.
Madame [O] conteste fermement la réalisation des travaux tant par M. [E] que par l'EURL et soutient que les sms, attestations et photographies versés aux débats ne permettent pas, du fait de leur imprécision, de prouver l'existence d'un contrat d'entreprise.
Monsieur [X] [E] et l'EURL l'art et la manière considèrent pour leur part que les éléments du dossier (sms, obtention d'un permis de construire, présence d'un panonceau de l'entreprise de travaux art et la manière de M. [E], attestations, photographies, expertise, facture) caractérisent l'existence d'un contrat d'entreprise et que le montant de 40 000 euros évalué par l'expert est inférieur au montrant des frais réellement engagés.
Si les éléments du dossier (sms, permis de construire, attestations non conformes à l'article 202 du code de procédure civile mais qui constituent un commencement de preuve par écrit, photographies'..) (pièces 2 à 11 de monsieur [X] [E]) laissent apparaître clairement que monsieur [X] [E] a bien réalisé les travaux d'extension de la maison de madame [K] [O], pour autant aucun de ces éléments ne démontre que les parties avaient convenu d'une rémunération à ce titre (pas de devis, facture non signée par madame [K] [O]') dans un contexte où monsieur [X] [E] et madame [K] [O] entretenaient au moment des travaux des rapports personnels intimes.
Dans ces conditions, le jugement sera infirmé et monsieur [X] [E] et l'EURL l'art et la manière seront déboutés de leur demande en paiement.
Sur la demande de dommages et intérêts au titre de la résistance abusive :
Monsieur [X] [E] et l'EURL l'art et la manière étant déboutés de leur demande principale, le jugement sera confirmé en ce qu'ils les a déboutés de leur demande de dommages et intérêts.
Sur les demandes accessoires :
Eu égard à l'issue du litige, le jugement sera infirmé.
Monsieur [X] [E] et l'EURL l'art et la manière, qui succombent, seront solidairement condamnés à payer à madame [K] [O] la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Ils seront également condamnés aux dépens de première instance, qui comprendront notamment les frais de l'expertise judiciaire, et d'appel.
PAR CES MOTIFS
La cour,
Infirme le jugement rendu le 18 novembre 2019 par le tribunal de grande instance de Béziers, sauf en ce qu'il a débouté monsieur [X] [E] et l'EURL l'art et la manière de leur demande de condamnation au titre de la résistance abusive ;
Statuant des chefs infirmés,
Déboute monsieur [X] [E] et l'EURL l'art et la manière de l'ensemble de leurs demandes ;
Y ajoutant,
Condamne solidairement monsieur [X] [E] et l'EURL l'art et la manière à payer à madame [K] [O] la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamne solidairement monsieur [X] [E] et l'EURL l'art et la manière aux dépens de première instance, qui comprendront notamment les frais de l'expertise judiciaire, et d'appel.