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Décisions

CA Nîmes, 1re ch., 19 septembre 2024, n° 23/01972

NÎMES

Arrêt

Autre

CA Nîmes n° 23/01972

19 septembre 2024

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

ARRÊT N°

N° RG 23/01972 - N°Portalis DBVH-V-B7H-I3DO

ID

JUGE DES CONTENTIEUX DE LA PROTECTION D'ALES

13 mars 2023 RG:22/00589

[Y]

[Y]

C/

[T]

SA COFIDIS

Grosse délivrée

le 19/09/2024

à Me Coralie Garcia Brengou

à Me Frédéric Mansat Jaffré

COUR D'APPEL DE NÎMES

CHAMBRE CIVILE

1ère chambre

ARRÊT DU 19 SEPTEMBRE 2024

Décision déférée à la cour : jugement du juge des contentieux de la protection d'Alès en date du 13 mars 2023, N°22/00589

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :

Mme Isabelle Defarge, présidente de chambre, a entendu les plaidoiries, en application de l'article 805 du code de procédure civile, sans opposition des avocats, et en a rendu compte à la cour lors de son délibéré.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Mme Isabelle Defarge, présidente de chambre,

Mme Delphine Duprat, conseillère,

Mme Audrey Gentilini, conseillère,

GREFFIER :

Mme Audrey Bachimont, greffière, lors des débats et du prononcé de la décision

DÉBATS :

A l'audience publique du 20 juin 2024, où l'affaire a été mise en délibéré au 19 septembre 2024.

Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel.

APPELANTS :

M. [V] [Y]

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représenté par Me Coralie Garcia Brengou de la Scp Tournier & Associés, postulante, avocate au barreau de Nîmes

Représenté par Me Océanne Auffret de Peyrelongue de la Selarl Auffret de Peyrelongue, plaidante, avocate au barreau de Bordeaux

Mme [W] [Y]

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représenté par Me Coralie Garcia Brengou de la Scp Tournier & Associés, postulante, avocate au barreau de Nîmes

Représenté par Me Océanne Auffret de Peyrelongue de la Selarl Auffret de Peyrelongue, plaidante, avocate au barreau de Bordeaux

INTIMÉS :

La Selarl Etude Balincourt représentée par Me [G] [T] en qualité de mandataire liquidateur judiciaire de la société Francenergy Sarl immatriculée au RCS Montpellier sous le n°531 035 939 dont le siège social est [Adresse 5] [Localité 4]

[Adresse 7]

[Localité 3]

Assigné à domicile le 12 septembre 2023

Sans avocat constitué

La Sa COFIDIS

prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité

[Adresse 8]

[Adresse 8]

[Localité 6]

Représentée par Me Frédéric Mansat Jaffré de la Selarl Mansat Jaffré, postulant, avocat au barreau de Nîmes

ARRÊT :

Arrêt rendu par défaut, prononcé publiquement et signé par Mme Isabelle Defarge, présidente de chambre, le 19 septembre 2024, par mise à disposition au greffe de la cour

EXPOSÉ DES FAITS DE LA PROCÉDURE ET DES MOYENS DES PARTIES

Le 16 mai 2017 après démarchage à domicile, M. [V] [Y] et son épouse [W] née [K] ont commandé à la société Francenergy la fourniture, l'installation et la mise en service :

- d'un gestionnaire de consommation d'énergie de chauffage et d'eau chaude sanitaire FHE pour maison individuelle,

- d'un générateur photovoltaïque auto-consommation en superposition toiture de 1kWc,

- d'une batterie Enphase,

au prix total de 16 000 euros financée par un crédit affecté Projexio souscrit le même jour auprès de la société Cofidis par l'intermédiaire du vendeur.

Le 2 juin 2017 a été signée l'attestation de livraison et d'installation et le 14 juin 2017 la société Francenergy a établi une facture détaillée.

Cette société a été placée en redressement judiciaire converti en liquidation le 8 janvier 2021 par jugement du tribunal de commerce de Montpellier désignant la Selarl Etude Balincourt représentée par Me [T] en qualité de mandataire liquidateur.

Les 15 et 22 avril 2022 M. et Mme [Y] ont assigné celui-ci es qualité et la société Cofidis en nullité ou résolution de la vente et du contrat de crédit, et sollicité l'indemnisation de leur préjudice financier devant le tribunal judiciaire d'Alès qui par jugement contradictoire du 13 mars 2023 :

- les a déboutés de l'ensemble de leurs demandes,

- a rejeté toute autre demande,

- a déclaré sa décision opposable à Me [T] en qualité de liquidateur judiciaire de la société Francernergy,

- a condamné M. et Mme [Y] aux dépens.

M. et Mme [Y] ont interjeté appel de ce jugement par déclaration du 9 juin 2023.

Au terme de leurs conclusions responsives régulièrement notifiées le 23 février 2024 ils demandent à la cour :

- de les déclarer recevables et bien fondés en leur appel,

- d'infirmer le jugement,

Statuant à nouveau

A titre principal

- de prononcer la nullité du contrat principal de vente en raison des irrégularités affectant le bon de commande,

Subsidiairement

- de l'annuler pour dol,

En conséquence

- de condamner la Selarl Etude Balincourt représentée par Me [T] en qualité de liquidateur judiciaire de la société Francenergy à procéder, aux frais de liquidation, à la dépose et la reprise du matériel installé à leur domicile dans le délai de 2 mois à compter de la signification de la décision à intervenir, en prévenant 15 jours à l'avance par LRAR et sans opérer de dégradations,

- de dire et juger qu'à défaut, ils pourront disposer à leur guise de ce matériel,

- de prononcer la nullité du contrat de crédit à la consommation conclu entre eux et la société Cofidis,

- de condamner cette société à leur payer les sommes de :

- 20 322,80 euros correspondant au montant du prêt remboursé, sans compensation avec la restitution du capital prêté, outre intérêts au taux légal à compter du 10 juillet 2021,

- 10 000 euros de dommages et intérêts au titre de la perte de chance de ne pas contracter avec la société France Energy,

En tout état de cause

- de débouter la société Cofidis de toutes ses demandes,

- de condamner solidairement la Selarl Etude Balincourt es qualité et la société Cofidis à leur payer la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.

La société Francenergy représentée par son mandataire liquidateur n'a pas constitué avocat.

Les appelants lui ont fait signifier leur déclaration d'appel par acte du 12 septembre 2023.

Au terme de ses conclusions n°1 régulièrement notifiées le 21 novembre 2023 la société Cofidis demande à la cour :

A titre principal

- de confirmer le jugement dont appel en toutes ses dispositions,

A titre subsidiaire

- de condamner solidairement M. [V] [Y] et son épouse [W] née [K] à lui rembourser le capital emprunté d'un montant de 16 000 euros, avec intérêts au taux légal à compter de l'arrêt à intervenir, déduction à faire des échéances payées,

En tout état de cause

- de les condamner solidairement à lui payer la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.

En application des dispositions des articles 455 et 954 du code de procédure civile il est expressément fait référence aux dernières écritures des parties pour plus ample exposé de leurs prétentions et moyens.

MOTIVATION

* sur la nullité du bon de commande et sa confirmation tacite par les acquéreurs

Pour débouter les appelants de leur demande d'annulation du contrat pour non-respect des dispositions de l'article L.111-1 du code de la consommation, le tribunal a jugé que l'imprécision du bon de commande avait été compensée par la précision de la facture émise après réception de l'installation le 14 (juin) 2017 qui détaillait également le prix de vente poste par poste ; que M. [Y] avait signé sans réserves l'attestation de livraison et d'installation ; que nonobstant le fait que le bon de rétractation faisait référence à des textes obsolètes, le délai de quinze jours qui y était mentionné expressément, seule information pertinente pour le profane, n'était pas erroné ; qu'enfin les emprunteurs avaient exécuté le contrat de crédit jusqu'à son terme de sorte qu'ayant exécuté volontairement et sans réserve le contrat de vente et le contrat de crédit, ils avaient ainsi confirmé le bon de commande entaché de nullité.

La qualification de contrat 'hors établissement' du bon de commande litigieux du 16 mai 2017 n'est pas discutée.

La nullité de ce bon de commande n'est pas contestée par l'intimée, qui soutient :

- que les nullités édictées par le code de la consommation sont relatives et sujettes à réitération du consentement, dès lors que les emprunteurs ont eu connaissance du vice et l'intention de le réparer,

- que la reproduction des articles du code de la consommation dans les conditions générales de vente permettait à l'emprunteur de prendre connaissance du vice et que cette connaissance jointe à l'exécution volontaire du contrat emporte la confirmation de l'acte nul,

- qu'en l'espèce les appelants versent eux-mêmes aux débats un bon de commande sur lequel figurent au verso tous les articles relatifs au démarchage à domicile,

- qu'il leur suffisait de procéder à une simple comparaison entre le recto et le verso de ce bon de commande pour prendre connaissance de ses prétendues carences,

- que c'est donc en parfaite connaissance de cause qu'ils ont réitéré leur consentement en acceptant la livraison des marchandises, suivant les travaux, obtenant les autorisations administratives, signant une attestation de livraison sans réserve et payant l'intégralité des mensualités.

Les appelants soutiennent

- que seule une volonté non équivoque peut valoir confirmation, qu'en l'espèce ils n'ont pas pu avoir connaissance des vices affectant le bon de commande dès lors que les textes qui y figuraient n'étaient plus en vigueur,

- que seuls quatre articles du code de la consommation figuraient au verso de ce bon de commande, ne leur permettant pas d'en prendre connaissance le jour de sa signature et de relever un quelconque manquement,

- que la notion de 'caractéristiques essentielles du produit' n'était pas détaillée,

- que leur volonté de confirmer le bon de commande nul ne peut être déduite du seul fait qu'ils se sont contenté de respecter leurs obligations contractuelles.

Selon l'article 1182 du code civil modifié par l'ordonnance n°2016-131 du 10 février 2016 - art. 2 la confirmation est l'acte par lequel celui qui pourrait se prévaloir de la nullité y renonce.

La confirmation ne peut intervenir qu'après la conclusion du contrat.

L'exécution volontaire du contrat, en connaissance de la cause de nullité, vaut confirmation.

La confirmation emporte renonciation aux moyens et exceptions qui pouvaient être opposés, sans préjudice néanmoins des droits des tiers.

L'article 1183 du même code énonce qu'une partie peut demander par écrit à celle qui pourrait se prévaloir de la nullité soit de confirmer le contrat soit d'agir en nullité dans un délai de six mois à peine de forclusion.

La Cour de cassation juge désormais que la reproduction même lisible des dispositions du code de la consommation prescrivant le formalisme applicable à un contrat conclu hors établissement ne permet pas au consommateur d'avoir une connaissance effective du vice résultant de l'inobservation de ces dispositions et de caractériser la confirmation tacite du contrat, en l'absence de circonstances, qu'il appartient au juge de relever, permettant de justifier d'une telle connaissance et pouvant résulter, en particulier, de l'envoi par le professionnel d'une demande de confirmation, conformément aux dispositions de l'article 1183 du code civil, dans sa rédaction issue l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, applicable, en vertu de l'article 9 de cette ordonnance, aux contrats conclus dès son entrée en vigueur.

(CIV1 14 janvier 2024 n° 22.16-115)

En l'espèce la société Francernergy ne comparaît pas et la société Cofidis ne démontre ni n'allègue que celle-ci aurait sollicité de ses contractants la confirmation du bon de commande nul dont elle ne verse aux débats, comme les appelants contrairement à ses allégations, que le recto.

Le seul texte qui y figure est l'article L.121-6 du code de la consommation ainsi reproduit :

'avant l'expiration du délai de réflexion prévu à l'article L.125-25, nul ne peut exiger ou obtenir du client, directement ou indirectement, à quelque titre ni sous quelque forme que ce soit une contrepartie quelconque ni aucun engagement ni effectuer des prestations de services de quelque natures que ce soit'

alors qu'à compter du 1er juillet 2016 ce texte est le suivant :

'Une pratique commerciale est agressive lorsque du fait de sollicitations répétées et insistantes ou de l'usage d'une contrainte physique ou morale, et compte tenu des circonstances qui l'entourent

1° Elle altère ou est de nature à altérer de manière significative la liberté de choix d'un consommateur ;

2° Elle vicie ou est de nature à vicier le consentement d'un consommateur ;

3° Elle entrave l'exercice des droits contractuels d'un consommateur.

Afin de déterminer si une pratique commerciale recourt au harcèlement, à la contrainte, y compris la force physique, ou à une influence injustifiée, les éléments suivants sont pris en considération

1° Le moment et l'endroit où la pratique est mise en 'uvre, sa nature et sa persistance ;

2° Le recours à la menace physique ou verbale ;

3° L'exploitation, en connaissance de cause, par le professionnel, de tout malheur ou circonstance particulière d'une gravité propre à altérer le jugement du consommateur, dans le but d'influencer la décision du consommateur à l'égard du produit ;

4° Tout obstacle non contractuel important ou disproportionné imposé par le professionnel lorsque le consommateur souhaite faire valoir ses droits contractuels, et notamment celui de mettre fin au contrat ou de changer de produit ou de fournisseur ;

5° Toute menace d'action alors que cette action n'est pas légalement possible.',

que l'exercice du droit de rétractation n'a jamais été prévu par l'article L121-6 du code de la consommation dans ses versions successives,

et que ce code ne comporte aucun article L125-25 mais seulement un article L121-25 en vigueur du 27 juillet 1993 au 14 juin 2014 abrogé par la loi n°2014-344 du 17 mars 2014 - art. 9 (V) aux termes duquel

'Dans les sept jours, jours fériés compris, à compter de la commande ou de l'engagement d'achat, le client a la faculté d'y renoncer par lettre recommandée avec accusé de réception. Si ce délai expire normalement un samedi, un dimanche ou un jour férié ou chômé, il est prorogé jusqu'au premier jour ouvrable suivant.

Toute clause du contrat par laquelle le client abandonne son droit de renoncer à sa commande ou à son engagement d'achat est nulle et non avenue.

Le présent article ne s'applique pas aux contrats conclus dans les conditions prévues à l'article L. 121-27.'

Au jour de la signature du bon de commande litigieux, était en vigueur l'article L.221-18 du code de la consommation créé par l'ordonnance n°2016-301 du 14 mars 2016 selon lequel le consommateur dispose d'un délai de quatorze jours pour exercer son droit de rétractation d'un contrat conclu (...) hors établissement, sans avoir à motiver sa décision ni à supporter d'autres coûts que ceux prévus aux articles L. 221-23 à L. 221-25. Le délai mentionné au premier alinéa court à compter du jour :

1° De la conclusion du contrat, pour les contrats de prestation de services et ceux mentionnés à l'article L. 221-4 ;

2° De la réception du bien par le consommateur ou un tiers, autre que le transporteur, désigné par lui, pour les contrats de vente de biens. Pour les contrats conclus hors établissement, le consommateur peut exercer son droit de rétractation à compter de la conclusion du contrat.

La nullité du bon de commande, pour relative qu'elle soit, ne pouvait donc ici être considérée comme confirmée, aucune circonstance ne permettant de justifier la connaissance effective par les acquéreurs du vice résultant de l'inobservation des dispositions obsolètes ou erronées y figurant au recto.

Le jugement sera en conséquence infirmé et le contrat conclu le 16 mai 2017 entre les appelants et la société Francenergy annulé sans qu'il soit besoin d'examiner leur demande subsidiaire fondée sur le dol.

* sur la nullité subséquente du contrat de prêt

Ce contrat, souscrit le même jour que le contrat de vente, est comme indiqué au formulaire produit un contrat de crédit affecté et cette qualification n'est pas discutée par les parties.

Aux termes de l'article L.312-55 du code de la consommation en vigueur depuis le 01 juillet 2016, en cas de contestation sur l'exécution du contrat principal, le tribunal peut, jusqu'à la solution du litige, suspendre l'exécution du contrat de crédit. Celui-ci est résolu ou annulé de plein droit lorsque le contrat en vue duquel il a été conclu est lui-même judiciairement résolu ou annulé.

Les dispositions du premier alinéa ne sont applicables que si le prêteur est intervenu à l'instance ou s'il a été mis en cause par le vendeur ou l'emprunteur.

Le prêteur est ici intimé et ce contrat doit en conséquence de l'annulation du bon de commande du 16 mai 2017 être également annulé.

* conséquences de l'annulation du contrat de vente

L'annulation du contrat de vente emporte obligation pour le vendeur de restituer le prix, ce que les appelants ne demandent pas, et obligation pour les acquéreurs de restituer la chose vendue, ce que le mandataire du vendeur en liquidation judiciaire, non comparant, ne demande pas mais sera ordonné en tant que de besoin, en disant qu'à défaut d'exécution de l'arrêt sur ce point, ils pourront disposer à leur guise de ce matériel.

* conséquences de l'annulation du contrat de crédit affecté

L'annulation du contrat de crédit affecté, en conséquence de celle du contrat constatant la vente ou la prestation de services qu'il finance, emporte pour l'emprunteur l'obligation de restituer au prêteur le capital prêté.

Les appelants soutiennent qu'en présence d'un document imprécis (en l'espèce l'attestation de livraison du 14 juin 2017) leur obligation de remboursement du prêt affecté n'a pas pris effet et qu'en conséquence ils ne se trouvent pas dans l'obligation de démontrer leur préjudice pour obtenir la restitution des sommes versées.

Cependant, si le prêteur qui a versé les fonds sans s'être assuré, comme il y était tenu, de la régularité formelle du contrat principal ou de sa complète exécution, peut être privé en tout ou partie de sa créance de restitution, c'est seulement dès lors que l'emprunteur justifie avoir subi un préjudice en lien avec cette faute.

Il incombe donc ici aux appelants de démontrer le préjudice qu'ils ont subi en lien avec une faute commise par l'intimée, alors qu'ils ne contestent pas avoir pris livraison de la chose vendue, dont ils sollicitent la restitution au vendeur à ses frais.

**faute de la société Cofidis

Les appelants prétendent

- que la société Cofidis, en acceptant de financer l'opération au vu d'un bon de commande violant le formalisme légal en vigueur à la date de son établissement, a commis une faute alors qu'elle aurait dû relever ces irrégularités et refuser de financer l'opération avant la mise en conformité du contrat avec les prescriptions légales d'ordre public,

- que l'intimée a commis une faute en ne s'assurant pas de l'exécution correcte du contrat de vente, dont l'attestation de livraison et d'installation ne précisant ni la nature des biens livrés ni le contenu des travaux effectués ne constituait pas la preuve.

En l'espèce l'offre de crédit a été souscrite par l'intermédiaire du vendeur Francernergy le même jour qu'a été signé le bon de commande annulé.

Elle précise être faite 'sous condition de l'agrément du prêteur qui fera connaître par écrit sa décision d'accorder le crédit dans un délai de 7 jours, étant précisé que la mise à disposition des fonds au delà de ce délai vaut agrément de l'emprunteur par le prêteur'.

La société Cofidis a consulté le FICP le 2 juin 2017, jour de la signature par l'emprunteur de l'attestation de livraison et d'installation/demande de financement ainsi rédigée de sa main 'je confirme avoir obtenu et accepté sans réserve la livraison des marchandises. Je (confirme') expressément que tous les travaux et prestations qui devaient être effectués à ce titre ont été pleinement réalisés et que les démarches de raccordement au réseau ont bien été engagées. En conséquence je demande à Cofidis de bien vouloir procéder au décaissement de ce crédit et d'en verser le montant directement entre les mains de la société'.

La preuve est donc ici rapportée que l'intimée a commis deux fautes susceptibles d'engager sa responsabilité contractuelle :

- en ne vérifiant pas la conformité du bon de commande aux prescriptions légales, par la simple vérification que le formulaire de rétractation comportait les textes du code de la consommation en vigueur au jour de sa signature,

- en acceptant de débloquer les fonds au seul vu d'une attestation de livraison rédigée en termes généraux ne permettant pas, par comparaison avec le bon de commande en ses mentions relatives à la consistance des biens vendus et des prestations à réaliser (qui n'y figurent d'ailleurs pas).

En effet, la société Cofidis ne démontre pas avoir été rendue destinataire

de la facture détaillée du 14 juin 2017 produites par les seuls appelants sur laquelle sont précisées ces prestations ainsi que la marque et la puissance du matériel livré et installé.

**préjudice des emprunteurs

Les appelants allèguent à cet égard 's'être endettés pour de nombreuses années et ce pour une opération qui non seulement n'est pas profitable mais qui n'est même pas neutre financièrement', et que 'l'absence de rentabilité de l'investissement, s'ajoutant aux futures dépenses d'entretien et de maintenance ne feront qu'aggraver la situation'.

Toutefois leur pièce 12 (historique du prêt Cofidis) démontre qu'ils ont procédé au remboursement anticipé du prêt en versant la somme de 17 155,91 euros générant un trop-perçu de 299,70 euros pour le prêteur.

C'est donc de manière erronée qu'ils allèguent s'être endettés pour de nombreuses années.

Par ailleurs, ils ne démontrent pas avoir fait de la rentabilité de l'installation photovoltaïque de leur maison individuelle un élément substantiel de leur consentement ni à son achat et sa pose, ni de leur consentement au crédit affecté souscrit.

En l'espèce, les panneaux photovoltaïques ont été installés et il n'est pas allégué qu'ils ne soient pas fonctionnels, les appelants ne déplorant qu'une insuffisance de production ne couvrant pas leurs besoins énergétiques, étant précisé que l'installation était destinée à être utilisée en autoconsommation et non pour la revente d'une partie de la production à EDF.

Les appelants allèguent ensuite d'un préjudice découlant de la liquidation judiciaire de la société venderesse, d'où il résulte qu'ils ne seront en mesure ni de récupérer le prix d'achat ni de restituer le matériel, alors que si la banque avait été vigilante, elle aurait pu les aviser des irrégularités commises et les empêcher d'aller au bout de leurs intentions.

Contrairement à ce qu'ils soutiennent, ce préjudice ne s'analyse pas en une perte de chance de ne pas avoir contracté avec la société Francenergy et ils seront déboutés de leur demande de dommages et intérêts sur ce fondement.

Toutefois la Cour de cassation juge désormais que lorsque la restitution du prix à laquelle le vendeur est tenu par suite de l'annulation du contrat de vente ou de prestation de service, est devenue impossible du fait de son insolvabilité, caractérisée ici par le placement en liquidation judiciaire de la société Francenergy, le consommateur, privé de la contrepartie de la restitution du bien vendu, justifie d'une perte subie équivalente au montant du crédit souscrit pour le financement du prix du contrat de vente ou de prestation de service annulé en lien de causalité avec la faute de la banque qui, avant de verser au vendeur le capital emprunté, n'a pas vérifié la régularité formelle du contrat principal. (Civ1 10 juillet 2024 n° 23.16-303).

En libérant le capital emprunté sans vérifier la régularité du contrat principal, la banque a ici manqué à ses obligations, et les emprunteurs justifient d'un préjudice consistant à ne pas pouvoir obtenir, auprès d'un vendeur placé en liquidation judiciaire, la restitution du prix de vente du matériel.

Il sera en conséquence fait droit à leur demande tendant à voir condamner la Selarl Etude Balincourt représentée par Me [T] en qualité de liquidateur judiciaire de la société France Energy à procéder, aux frais de liquidation, à la dépose et la reprise du matériel installé à leur domicile dans le délai de 2 mois à compter de la signification de la décision à intervenir, en prévenant 15 jours à l'avance par LRAR et sans opérer de dégradations, à défaut de quoi il pourront conserver le matériel.

La société Cofidis sera en outre condamnée à leur restituer le capital prêté soit la somme de 16 000 + 299,70 au titre du trop perçu soit la somme de 16 299,70euros, outre intérêts au taux légal à compter du 10 juillet 2021.

* autres demandes

La société Cofidis qui succombe devra supporter les dépens de l'entière instance.

L'équité commande de la condamner à verser aux appelants la somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour

Infirme le jugement du 13 mars 2023 du juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire d'Alès ( N°RG 22/00589),

Statuant à nouveau

Annule le contrat de vente matérialisé par le bon de commande n° 035392 du 16 mai 2017 à la société France Energy d'une installation photovoltaïque par M.et Mme [Y],

Annule en conséquence le contrat de crédit affecté Projexio conclu le 16 mai 2017 entre ceux-ci et la société Cofidis,

Condamne la Selarl Etude Balincourt représentée par Me [T] en qualité de liquidateur judiciaire de la société France Energy à procéder, aux frais de liquidation, à la dépose et la reprise du matériel installé à leur domicile,

Dit qu'à défaut, M.et Mme [Y] pourront disposer à leur guise du matériel,

Déboute M.et Mme [Y] de leur demande de condamnation de la société Cofidis à leur payer la somme de 10 000 euros de dommages et intérêts au titre de la perte de chance de ne pas contracter avec la société France Energy,

Condamne la société Codidis à payer à M.et Mme [Y] la somme de 16 299,70 euros en conséquence de l'annulation du contrat de prêt affecté au contrat de vente du 16 mai 2017 conclu avec la société France Energy,

Dit que cette somme portera intérêts au taux légal à compter du 10 juillet 2021,

Y ajoutant

Condamne la société Cofidis aux dépens de l'entière instance,

La condamne à verser à M.et Mme [Y] la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Arrêt signé par la présidente et par la greffière.

LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,