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Décisions

CA Aix-en-Provence, ch. 1-7, 19 septembre 2024, n° 21/13552

AIX-EN-PROVENCE

Arrêt

Autre

CA Aix-en-Provence n° 21/13552

19 septembre 2024

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-7

ARRÊT AU FOND

DU 19 SEPTEMBRE 2024

N°2024/334

Rôle N° RG 21/13552 - N° Portalis DBVB-V-B7F-BID5L

Syndicatdescopropriétaires [Adresse 4]

C/

S.C.I. [Adresse 3]

Copie exécutoire délivrée le :

à :

Me Sandra JUSTON

Me Alexandre-Guillaume TOLLINCHI

Décision déférée à la Cour :

Jugement du TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de Grasse en date du 30 Août 2021 enregistré(e) au répertoire général sous le n° 18/02528.

APPELANTE

Syndicatdescopropriétaires [Adresse 4] Représenté par son syndic en exercice le Cabinet EUROPAZUR, demeurant Cabinet EUROPAZUR - [Adresse 6] - [Localité 1]

représentée par Me Sandra JUSTON de la SCP BADIE, SIMON-THIBAUD, JUSTON, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

assisté de Me Thibault POZZO DI BORGO de la SCP DELPLANCKE-POZZO DI BORGO-ROMETTI & ASSOCIES, avocat au barreau de NICE,

INTIMEE

S.C.I. [Adresse 3], demeurant [Adresse 2] - [Localité 1] / FRANCE

représentée par Me Alexandre-Guillaume TOLLINCHI de la SELARL TOLLINCHI'S LAW FIRM, avocat au barreau de NICE, plaidant

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 804 et 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 12 Juin 2024 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Carole DAUX-HARAND, Présidente de chambre, et Madame Carole MENDOZA, Conseillère, chargées du rapport.

Madame Carole MENDOZA, Conseillère, a fait un rapport oral à l'audience, avant les plaidoiries.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Carole DAUX-HARAND, Présidente de chambre

Madame Carole MENDOZA, Conseillère

Monsieur Jean-Paul PATRIARCHE, Conseiller

Greffier lors des débats : Mme Natacha BARBE.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 19 Septembre 2024.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 19 Septembre 2024.

Signé par Madame Carole DAUX-HARAND, Présidente de chambre et Mme Natacha BARBE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSÉ DU LITIGE

La SCI [Adresse 3] est copropriétaire de divers lots au sein de l'ensemble immobilier [Adresse 4] à [Adresse 6].

Par acte sous seing privé du premier mars 2013, elle a donné à bail commercial à la SARL LE PHENICIEN, représentée par son gérant M.[V], le lot n° 20 formant un atelier à usage de garage, ainsi que des places de stationnement situées devant le garage, sous la condition suspensive d'obtenir l'autorisation de l'assemblée générale du 25 mars 2013 d'installer sur les trois places de parking un point ciseau élévateur.

Le 25 mars 2013, l'assemblée générale des copropriétaires a adopté la résolution n° 40 autorisant la SCI [Adresse 3] à 'installer un système pour permettre de lever des véhicules sur les places de parking face à son local du rez-de-chaussée afin de permettre des changements de roues', sous différentes conditions.

Par acte d'huissier du 15 février 2018, il était fait sommation au locataire commercial de la SCI [Adresse 3] d'avoir à cesser les travaux, sommation dénoncée à la SCI [Adresse 3].

Le 14 mars 2018, l'assemblée générale des copropriétaires a annulé, par la résolution n° 14, la résolution n° 40 de l'assemblée générale du 25 mars 2013, au motif qu'elle aurait été votée à une majorité insuffisante.

Par acte d'huissier du 09 mai 2018, la SCI [Adresse 3] a fait assigner le syndicat des copropriétaires aux fins de voir annuler la résolution n° 14 de l'assemblée générale du 14 mars 2018.

Par acte d'huissier du 22 août 2018, le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier [Adresse 4] a fait assigner la SCI [Adresse 3] et M.[V], aux fins de les voir condamner, sous astreinte, à retirer les constructions et remettre les lieux en état.

Par jugement du 09 juin 2021, le tribunal judiciaire de Grasse a débouté le syndicat des copropriétaires de ses demandes. Celui-ci a relevé appel de cette décision.

Par jugement contradictoire du 30 août 2021, le tribunal judiciaire de Grasse, saisi par l'assignation du 09 mai 2018, a :

- annulé la résolution n° 14 de l'assemblée générale du 14 mars 2018,

- débouté 'la SCI [Adresse 5]" de ses demandes de dommages et intérêts,

- condamné le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier [Adresse 4] à payer à la 'SCI [Adresse 5] 'la somme de 2000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier Espace Carrros aux dépens au profit de Maître Alexandre-Guillaume TOLLINCHI.

Le premier juge a annulé la résolution n° 14 en estimant qu'elle portait atteinte au droit acquis de la SCI [Adresse 3].

Il a rejeté la demande de dommages et intérêts formée par la SCI [Adresse 3] au motif qu'elle ne justifiait d'aucun préjudice distinct de celui réparé par l'allocation d'une indemnité fondée sur l'article 700 du code de procédure civile.

Par déclaration du 23 septembre 2021, le syndicat des copropriétaires a relevé appel de tous les chefs de cette décision, sauf en ce qu'elle a rejeté la demande de dommages et intérêts de la 'SCI [Adresse 5].

La société [Adresse 3] a constitué avocat.

Par conclusions notifiées par RPVA le 23 décembre 2021 auxquelles il convient de se reporter, le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier [Adresse 4] demande à la cour :

- d'infirmer le jugement déféré sauf en ce qu'il a rejeté la demande de dommages et intérêts de la SCI [Adresse 3],

- de débouter la SCI ESPCACE 225 de ses demandes,

- de condamner la SCI [Adresse 3] à lui verser la somme de 3000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- de condamner la SCI [Adresse 3] aux dépens.

Il soutient que les travaux effectués par la SCI [Adresse 3] ne sont pas conformes à l'autorisation qui avait été donnée à ce copropriétaire en 2013. Il souligne que le projet qui avait été soumis à l'assemblée générale n'était pas précis. Il fait valoir que la SCI [Adresse 3] n'avait sollicité, ni l'autorisation de pouvoir creuser des tranchées dans les emplacement de parkings pour y installer un élévateur, ni celle d'installer une couverture au-dessus de cet élévateur. Il déclare que l'assemblée générale n'avait pas autorisé l'installation d'un pont élévateur encastrable. Il précise que l'auvent modifie l'aspect extérieur de l'immeuble puisque les piliers métalliques sont ancrés sur la façade de l'immeuble. Il relève que l'assemblée générale ignorait en 2013 que l'installation portait sur un pont élévateur ciseaux.

Il conteste le fait qu'un pont élévateur non encastré génèrerait un risque supérieur d'atteinte à la sécurité des personnes et des biens, affirmation non démontrée.

Il expose que l'autorisation donnée en mars 2013 était devenue caduque, puisque les conditions posées à celles-ci n'ont pas été respectées. Il fait valoir que la SCI [Adresse 3] n'a jamais fourni les autorisations administratives et n'a jamais justifié du respect de la réglementation en vigueur, notamment au visa de l'arrêté du premier mars 2004 qui traite des appareils de levage. Il ajoute que cette dernière n'a pas justifié que les travaux avaient été effectués par un homme de l'art. Il souligne qu'elle n'a pas souscrit d'assurance dommages-ouvrages.

Il note que les travaux qu'il estime irréguliers se sont achevés postérieurement à l'assemblée générale du 14 mars 2018.

Il soutient que la résolution n° 14 ne porte pas atteinte à l'intérêt collectif.

Il conclut à l'absence de droit acquis.

Par conclusions notifiées par RPVA le 08 avril 2022 auxquelles il convient de se reporter, la SCI [Adresse 3] demande à la cour :

- de confirmer le jugement déféré,

- de rejeter les demandes du syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier [Adresse 4]

- de condamner le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier [Adresse 4] à verser la somme de 7000 euros au titre des frais irrépétibles de première instance et d'appel,

- de condamner le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier [Adresse 4] aux dépens, pouvait être recouvrés par Maître Guillaume-Alexandre TOLLINCHI.

Elle soutient avoir respecté les conditions fixées par la résolution n° 40 de l'assemblée générale du 25 mars 2013. Elle relève que son locataire commercial a obtenu une autorisation d'urbanisme et que les travaux, conformes aux règles de l'art, ont été entrepris avec une assurance. Elle expose que l'activité de son locataire commercial n'est pas soumise à un agrément préfectoral.

Elle affirme que la résolution n° 40 ne la limitait pas concernant le choix du pont-élévateur.

Elle soutient que l'installation de l'auvent est régulière, constitue un corollaire indispensable au pont élévateur et ne modifie pas l'aspect extérieur de l'immeuble.

Elle déclare que les travaux n'ont pas été effectués sur les parties communes.

Elle soulève la nullité de la résolution n° 14. Elle note que l'assemblée générale ne pouvait revenir sur la décision précédente que si elle avait démontré que la première résolution n'avait pas été exécutée et si la seconde résolution avait été prise dans le respect des intérêts collectifs et sans porter atteinte à son droit acquis, ce qui n'est pas le cas.

Elle soulève également un abus de majorité.

La clôture a été prononcée le 29 mai 2024.

MOTIVATION

A titre préliminaire, il convient de réparer l'erreur matérielle qui a affecté le jugement déféré en ce qu'il mentionne la SCI [Adresse 5] alors qu'il s'agit de la SCI [Adresse 3].

L'assemblée générale des copropriétaires du 25 mars 2013, dans sa résolution n° 40, a autorisé la SCI [Adresse 3] à 'installer un système pour permettre de lever des véhicules sur les places de parking face à son local du rez-de-chaussée afin de permettre des changements de roues sous réserve de :

- se conformer à la réglementation en vigueur et obtenir les autorisations administratives nécessaires

- faire effectuer les travaux par un homme de l'art sous contrôle de...

- souscrire une police dommages ouvrage dans le cas où la nature des travaux rendrait l'assurance obligatoire

- prendre en charge toutes les conséquences dommageables résultant des travaux, tant vis à vis des tiers que de la copropriété

** Le copropriétaire restera responsable vis à vis de la copropriété et des tiers de toutes les conséquences dommageables résultant de ces travaux'.

Cette résolution ne mentionnait aucune délai à respecter s'agissant de l'autorisation donnée à la SCI [Adresse 3] pour installer un système de levage de véhicule. Il n'était pas non plus évoqué de restriction relative au système de levage qui devait être placé sur les places de parking face au local de la SCI [Adresse 3].

Une assemblée générale ne peut revenir sur une précédente décision si cette dernière a déjà été exécutée ou si un copropriétaire bénéficie d'un droit acquis en vertu d'une décision initiale que le syndicat entendrait mettre à néant.

Le locataire commercial de la SCI [Adresse 3] a acquis un pont ciseaux le 04 janvier 2018.

Les travaux de maçonnerie pour la création du pont ciseaux ont débuté le 07 février 2018 et se sont achevés le 13 février 2018, selon la facture du 14 février 2018 de la société de maçonnerie générale.

Selon la facture de l'EURL MJ Technique du 08 mars 2018, une partie des travaux d'installation du pont ciseaux acquis a été effectuée à cette date.

Il n'est pas contesté que le pont ciseaux était installé à la date à laquelle s'est tenue l'assemblée générale du 14 mars 2018, à l'exception de la pose d'un abri (ou auvent), nécessaire pour éviter un risque de corrosion prématurée, selon les indications de M.[I], directeur des services techniques de la société Global pro services. Comme l'indique avec pertinence le premier juge, cet abri ou auvent est le corollaire nécessaire d'un pont élevateur placé à l'extérieur.

Le syndicat des copropriétaires ne démontre pas que les travaux effectués seraient en violation de ceux autorisés par l'assemblée générale du 25 mars 2013.

La SCI [Adresse 3] justifie d'une déclaration préalable de construction à laquelle le maire ne s'est pas opposé, de la conformité de l'installation, de la souscription d'une police d'assurance des sociétés chargées du gros oeuvre (maçonnerie) et de l'installation du pont. Elle démontre que l'installation obéissait aux réserves évoquées par la résolution 40 de l'assemblée générale du 25 mars 2013. Le fait que ces justificatifs aient été fournis postérieurement à la mise en oeuvre de l'installation et postérieurement à l'assemblée générale du 14 mars 2018 n'invalide pas le droit acquis de la SCI [Adresse 3] qui était autorisée à mettre en place un système de levage de véhicules sur ses places de parking et dont les travaux étaient terminés (à l'exception du corollaire à ces travaux concernant la pose d'un auvent) lors de la tenue de l'assemblée générale du 14 mars 2018.

Il convient en conséquence de confirmer le jugement déféré qui a prononcé l'annulation de la résolution n° 40 de l'assemblée générale au motif du droit acquis par la SCI [Adresse 3].

Sur les dépens et sur les frais irrépétibles

Le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier [Adresse 4] est essentiellement succombant. Il sera condamné aux dépens de première instance et d'appel, ces derniers pouvant être recouvrés par Maître Guillaume-Alexandre TOLLINCHI.

Le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier [Adresse 4] sera débouté des demandes qu'il forme au titre des frais irrépétibles.

Il n'est pas équitable de laisser à la charge de la SCI [Adresse 3] les frais irrépétibles qu'elle a exposés en première instance et en appel.

Le jugement déféré qui a condamné le syndicat des copropriétaires de l' ensemble immobilier [Adresse 4] aux dépens et à verser à la SCI [Adresse 3] la somme de 2000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile sera confirmé.

Le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier [Adresse 4] sera condamné à verser à la SCI [Adresse 3] la somme de 2000 euros au titre des frais irrépétibles d'appel.

PAR CES MOTIFS,

La cour, statuant par arrêt contradictoire, par mise à disposition au greffe,

RECTIFIE l'erreur matérielle qui entache le jugement déféré en ce qu'il évoque la SCI [Adresse 5] (pages 3, 4, 5, 6; et dans le dispositif de la décision).

DIT qu'il convient de lire, en lieu et place de la 'SCI [Adresse 5]", ' la SCI [Adresse 3]",

CONFIRME le jugement déféré,

Y AJOUTANT,

CONDAMNE le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier [Adresse 4] à verser à la SCI [Adresse 3] la somme de 2000 euros au titre des frais irrépétibles d'appel,

REJETTE la demande faite par le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier [Adresse 4] au titre des frais irrépétibles,

CONDAMNE le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier [Adresse 4] aux dépens de la présente instance, ces derniers pouvant être recouvrés par Maître Guillaume-Alexandre TOLLINCHI

LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,