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Décisions

CA Poitiers, 2e ch., 24 septembre 2024, n° 23/01510

POITIERS

Arrêt

Infirmation partielle

PARTIES

Demandeur :

Cofidis (SA)

Défendeur :

Selarl Athena (SELARL)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Pascot

Conseillers :

Mme Lafond, M. Lecler

Avocats :

Me Gallet, SELARL Haussmann Kainic Hascoet Helain, Me Pairaud

CA Poitiers n° 23/01510

23 septembre 2024

Par bon en date du 22 novembre 2018, Madame [G] [Y] épouse [K] a commandé la société Svh Energie la fourniture et l'installation d'un système de production d'électricité photovoltaïque, d'une pompe à chaleur, d'un pack d'ampoules LED, d'un pack de prises wifi domestiques et d'un ballon thermodynamique moyennant un prix total de 37.860 euros toutes taxes comprises.

Cet achat a été intégralement financé à l'aide d'un crédit souscrit par Madame [G] [Y] épouse [K] et Monsieur [C] [K] (les époux [K]) le même jour auprès de la société anonyme Cofidis pour un montant de 37.860 euros au taux annuel de 3,70 % remboursable en 175 mensualités de 288,06 euros, hors assurance, après un différé de 6 mois.

Le 11 décembre 2018, Madame [K] a signé une attestation de livraison et de mise en service à la suite de laquelle la société Cofidis a procédé au règlement des fonds entre les mains de la société Svh Energie par virement bancaire en date du 20 décembre 2018.

Le 23 juin 2021, le tribunal de commerce de Bobigny a prononcé l'ouverture d'une procédure de liquidation judiciaire à l'égard de la société Svh Energie et a désigné la société d'exercice libéral à responsabilité limitée Athena, prise en la personne de Maître [I] [P], en qualité de liquidateur judiciaire (le liquidateur judiciaire).

Le 17 septembre 2021 et le 29 octobre 2021, les époux [K] ont assigné la société Cofidis et le liquidateur judiciaire devant le tribunal de proximité de Fontenay-le-Comte aux fins d'obtenir l'annulation de leur contrat de vente et de leur contrat de crédit affecté.

Celui-ci s'est déclaré incompétent et l'affaire a été renvoyée devant le tribunal judiciaire compte tenu de la nature et du montant des demandes.

Dans le dernier état de ses demandes, les époux [K] ont demandé de :

- prononcer la nullité du contrat de vente du 22 novembre 2018 souscrit entre Madame [K] et société Svh Energie pour violation des dispositions d'ordre public du code de la consommation et subsidiairement pour dol ;

- donner acte à Madame [K] de ce qu'elle tenait à la disposition du liquidateur judiciaire, les matériels objets du contrat principal de vente ;

- dire qu'à défaut de réaction de la part du liquidateur judiciaire, dans un délai de trois mois à compter de la signification de la décision à intervenir, Madame [K] pourrait disposer librement de son installation ;

- prononcer en conséquence de la nullité du bon de commande, l'annulation du contrat de crédit affecté souscrit entre les époux [K] et la société Cofidis en date du 22 novembre 2018 ;

- prononcer à l'encontre de la société Cofidis la déchéance de son droit à obtenir la restitution du capital prêté et de tous frais annexes en conséquence des fautes par elle commises à l'origine du préjudice subi par les concluants;

- condamner la banque Cofidis à leur restituer l'indu, soit le montant total des échéances du prêt affecté déjà remboursées, soit la somme de 13.365,36 euros, à parfaire au jour du jugement,

- condamner la société Cofidis à leur verser une somme de 2.800 euros au titre des frais irrépétibles.

Dans le dernier état de ses demandes, la société Cofidis a demandé de :

- condamner solidairement les époux [K] à poursuivre l'exécution du contrat de prêt conformément aux stipulations contractuelles ;

A titre plus subsidiaire, si le tribunal vînt à prononcer la nullité du contrat de crédit par suite de la nullité du contrat de vente,

- condamner les époux [K] à lui payer le capital emprunté d'un montant de 37.680 euros au taux légal à compter du jugement à intervenir ;

En tout état de cause,

- condamner solidairement les époux [K] à lui payer une indemnité d'un montant de 1.200 au titre des frais irrépétibles.

Quoique régulièrement assigné, le liquidateur judiciaire n'a pas constitué avocat.

Par jugement en date du 14 avril 2023, le tribunal judiciaire de la Roche-sur-Yon a:

- prononcé la nullité du contrat de vente signé le 22 novembre 2018 entre Madame [K] et la société Svh Energie ;

- dit que le liquidateur judiciaire devrait reprendre possession des matériels installés et remettre en état les lieux dans un délai de 6 mois à compter de la signification de la décision, sous réserve d'avoir prévenu au moins quinze jours à l'avance de la date de son intervention, et que passé ce délai, Madame [K] pourrait le conserver et en disposer comme bon lui semblerait ;

- prononcé la nullité du contrat de crédit affecté souscrit le 22 novembre 2018 entre les époux [K], d'une part, et la société Cofidis, d'autre part, pour le financement du contrat de vente du même jour entre Madame [K] et la société Svh Energie ;

- exonéré les époux [K] de la restitution à la société Cofidis des fonds prêtés en exécution du contrat de crédit ainsi annulé ;

- condamné la société Cofidis à restituer aux époux [K] ;

- la somme de 13.365,36 euros au titre des sommes payées en exécution du contrat de crédit annulé, arrêtée au mois de juillet 2022 inclus ;

- ainsi que toutes sommes perçues par elle postérieurement;

- dit que ces sommes produiraient intérêts au taux légal à compter du présent jugement ;

- condamné la société Cofidis à verser aux époux [K] la somme de 2.000 euros au titre des frais irrépétibles.

Le 27 juin 2023, la société Cofidis a relevé appel de ce jugement en intimant les époux [K] ainsi que le liquidateur judiciaire.

Les intimés n'ont pas initialement constitué avocat.

Le 8 août 2023, le greffe a avisé la société Cofidis d'avoir à procéder à l'égard des intimés par voie de signification.

Le 22 août 2023, la société Cofidis a signifié sa déclaration d'appel au liquidateur judiciaire à sa personne.

Le 24 août 2023, les époux [K] ont constitué avocat.

Le 25 août 2023, la société Cofidis a notifié au conseil des époux [K] sa déclaration d'appel.

Le 12 septembre 2023, la société Cofidis a déposé ses premières écritures.

Le 20 septembre 2023, la société Cofidis a signifié ses premières écritures au liquidateur judiciaire à sa personne.

Le 12 décembre 2023, les époux [K] ont déposé leurs premières écritures.

Le 19 février 2024 à 18 heures 11, la société Cofidis a demandé :

A titre principal,

- d'infirmer le jugement en toutes ses dispositions ;

Statuant à nouveau :

- de débouter les époux [K] de leurs demandes ;

- de condamner solidairement les époux [K] à reprendre l'exécution du contrat de crédit conformément aux stipulations contractuelles ;

- de condamner solidairement les époux [K] à lui rembourser en une seule fois, l'arriéré des échéances impayées à partir de l'exécution provisoire au jour de l'arrêt à intervenir ;

A titre subsidiaire, si la cour vînt à confirmer le jugement sur la nullité des conventions, et statuant à nouveau,

- de condamner solidairement les époux [K] à lui rembourser le capital emprunté d'un montant de 37.680 euros, au taux légal à compter de l'arrêt à intervenir, en l'absence de faute de la concluante et en toute hypothèse en l'absence de préjudice et de lien de causalité ;

En tout état de cause,

- de condamner les époux [K] à lui payer la somme de 3.000 euros au titre des frais irrépétibles des deux instances.

Le 21 mai 2024, les époux [K] ont demandé de :

- confirmer le jugement en toutes ses dispositions :

- prononcer la nullité du contrat de vente signé le 22 novembre 2018 entre Madame [K] et la société Svh Energie ;

- dire que le liquidateur judiciaire devrait reprendre possession des matériels installés et remettre en état les lieux dans un délai de 6 mois à compter de la signification de l'arrêt, sous réserve d'avoir prévenu au moins quinze jours à l'avance de la date de son intervention, et que passé ce délai, Madame [K] pourrait le conserver et en disposer comme bon lui semblait ;

- prononcer la nullité du contrat de crédit affecté souscrit le 22 novembre 2018 entre les époux [K] et la société Cofidis,

- priver la société Cofidis de son droit à obtenir la restitution du capital prêté ;

- condamner la société Cofidis à restituer aux époux [K] la somme de 16.882,56 euros au titre des mensualités déjà payées au titre du crédit affecté sauf à déduire les sommes payées par la société Cofidis au titre de l'exécution provisoire attachée au premier jugement ;

- dire que ces sommes produiraient intérêts au taux légal à compter du présent arrêt ;

- débouter la société Cofidis de l'ensemble de ses demandes ;

En tout état de cause,

- confirmer le jugement en ce qu'il avait condamné la société Cofidis à leur verser la somme de 2.000 euros au titre des frais irrépétibles de première instance ;

- condamner la société Cofidis à leur verser la somme de 2.500 euros au titre des frais irrépétibles d'appel.

Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, la cour renvoie expressément aux dernières conclusions précitées pour plus ample exposé des situations et moyens des parties.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 3 juin 2024.

MOTIVATION:

Sur la nullité du contrat principal :

Selon l'article L. 111-1 du code de la consommation, dans sa version applicable au litige, issue de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016,

Avant que le consommateur ne soit lié par un contrat de vente de biens ou de fourniture de services, le professionnel communique au consommateur, de manière lisible et compréhensible, les informations suivantes:

1° les caractéristiques essentielles du bien ou du service, compte tenu du support de communication utilisée et du bien ou service concerné;

2° le prix du bien ou du service, en application des articles L. 112-1 à L. 112-4;

3° En l'absence d'exécution immédiate du contrat, la date où le délai auxquels le professionnel s'engage à livrer le bien ou à exécuter le service;

....

Sur les caractéristiques essentielles des biens et services:

Aucun texte n'exige la mention du prix unitaire de chaque élément constitutif du bien offert ou du service proposé, de sorte que l'annulation du bon de commande n'est pas encourue en l'absence d'une telle mention (Cass. 1ère civ., 2 juin 2021, n°19.22.607, publié).

Mais constitue une caractéristique essentielle du bien ou des services, au sens des articles L. 111-1, L. 121-17 et L. 121-18-1 du code de la consommation, la marque du bien ou du service faisant l'objet du contrat (Cass. 1ère civ., 24 janvier 2024, n°21-20.961, publié).

Il est constant entre parties que le contrat litigieux est un contrat conclu hors établissement.

Le bon de commande décrit les prestations fournies par référence exclusive à des packs dans le cadre d'une offre packagé Gse Transition Energétique, pour un montant total de 37 680 euros toutes taxes comprises.

Sont ainsi cochés les packs suivants :

- pack Gse Solar ;

- pack Gse Pac'Système ;

- pack Batterie de Stockage ;

- pack Ballon Thermodynamique ;

- pack Gse Led ;

- pack Gse-E-Connect ;

Le premier juge a retenu que l'absence de précision du coût de chacun des packs choisis, alors même que l'ensemble des packs constituait une prestation à part que le consommateur était ou non libre de choisir, ne satisfaisait pas à l'obligation d'information sur les caractéristiques essentielles du bien.

Mais le professionnel n'a pas l'obligation de mentionner sur le bon de commande le coût unitaire de chacun des biens proposés.

En revanche, avec le premier juge, il sera observé que la marque des matériels proposés n'y est pas mentionnée, de sorte que la consommatrice n'a pas été informée d'une de leur caractéristique essentielle.

En tout état de cause, le prêteur ne vient pas critiquer la nullité sur ce point.

La nullité du bon de commande est encourue de ce premier chef.

Sur les délais de livraison des biens et d'exécution des prestations :

Ayant relevé qu'au verso d'un bon de commande figurait la mention pré imprimée selon laquelle la livraison du ou des matériaux et la pose auraient lieu dans un délai maximum de 120 jours, une cour d'appel retient exactement que cette indication est insuffisante pour répondre aux exigences de l'article L. 111-1 3° du code de la consommation, dès lors qu'il n'est pas distingué entre le délai de pose des modules et celui de réalisation des prestations à caractère administratif, et qu'un tel délai global ne permet pas aux acquéreurs de déterminer de manière suffisamment précise quand le vendeur exécuterait ses différentes obligations, de sorte que la nullité du contrat principal est encourue (Cass 1ère civ., 15 juin 2022, n°21-11.747, publié).

Dans son paragraphe pré-imprimé sur les délais, le bon de commande énonce que :

- s'agissant de la pré-visite: la visite du technicien interviendra au plus tard dans les 2 mois à compter de la signature du bon de commande ;

- livraison des produits: elle interviendra dans les 3 mois de la pré-visite du technicien ;

- installation des produits : celle-ci sera réalisée le jour de la livraison des produits.

Il sera observé que l'offre pack Gse Solar, qui a été souscrite, comprend les démarches en vue du raccordement et les démarches administratives incluses suivant mandat.

Le premier juge avait considéré qu'aucun délai précis et individualisé de réalisation des prestations vendues n'avait été mentionné, car les simples mentions pré-imprimées susdites ne suffisaient pas à caractériser l'information exigée par l'article L. 111-1 3° du code de la consommation.

Cependant, il y a lieu de relever qu'en ajoutant l'un à l'autre ces deux délais, il en résultait que l'entrepreneur principal s'engageait à procéder à l'installation des biens commandés dans un délai maximum de 5 mois à compter du bon de commande.

La consommatrice a donc été suffisamment informée du délai de réalisation de ses prestations matérielles par l'entrepreneur.

Mais toutefois, s'agissant des délais de réalisation de prestations de nature administrative, le bon de commande avait prévu que l'entrepreneur s'engageait à adresser la demande de raccordement auprès d'Erdf et/ou des régies d'électricité dès réception du récépissé de la déclaration préalable de travaux et à procéder au règlement du devis.

Ainsi, l'entrepreneur a fait dépendre le point de départ du délai d'exécution de ses propres prestations administrative du délai mis par l'administration à délivrer le récépissé de la déclaration préalable de travaux.

En faisant dès lors dépendre le délai d'exécution de ses prestations administratives du délai mis par l'administration à délivrer le récépissé de déclaration de travaux, ce bon de commande ne comporte pas d'indication suffisamment précise sur leur délai d'exécution.

En tout état de cause, le prêteur ne vient pas discuter l'irrégularité du bon de commande sur ce point.

La nullité du contrat principal est encourue de ce second chef.

Sur la confirmation du contrat principal grevé de nullités :

Selon l'article 1181 du Code civil, dans sa version postérieure au 1er octobre 2016, applicable au litige, la nullité peut être couverte par la confirmation.

Selon l'article 1182 du même code, dans la même version,

La confirmation est l'acte par lequel celui qui pourrait se prévaloir de la nullité y renonce.

Cet acte mentionne l'objet de l'obligation et le vice affectant le contrat.

La confirmation ne peut intervenir qu'après la conclusion du contrat.

L'exécution volontaire du contrat, en connaissance de cause de la nullité, vaut confirmation. En cas de violence, la confirmation ne peut intervenir qu'après que la violence a cessé.

La confirmation emporte renonciation aux moyens et exceptions qui pouvaient être opposés, sans préjudice néanmoins des droits des tiers.

La confirmation d'un acte nul exige à la fois la connaissance du vice l'affectant et l'intention de le réparer.

La reproduction sur le contrat, même lisible, des dispositions du code de la consommation prescrivant le formalisme applicable à un contrat conclu hors établissement ne permet pas au consommateur d'avoir une connaissance effective du vice résultant de l'inobservation de ces dispositions et de caractériser la confirmation tacite de ce contrat, en l'absence de circonstances, qu'il appartient au juge de relever, permettant de justifier d'une telle connaissance (Cass. 1ère civ., 24 janvier 2024, n°22-16.115, publié).

L'établissement de crédit soutient que la consommatrice a ratifié le bon de commande argué de nullité.

Elle critique le premier juge qui a relevé que :

- même si, en application de l'article 14 des conditions générales de vente, la consommatrice avait reconnu avoir eu connaissance, préalablement à sa commande, des conditions générales de vente de l'entrepreneur principal et de toutes les informations et renseignements visés aux articles L. 111-1 et L. 111-2 du code de la consommation ainsi que ceux visés au I de l'article L. 221-5 du même code (en particulier le prix et les frais annexes, les délais de livraison, les informations et coordonnées du vendeur, les fonctionnalités du contenu numérique et son inter-opérabilité, la possibilité de recourir à une médiation conventionnelle en cas de litige, les informations relatives au droit de rétractation) ;

- ces informations étaient reproduites en très petits caractères et avec une couleur d'impression peu nette, n'incitant pas à la lecture et qui plus en toute fin de seconde page, après une somme importante d'autres informations relatives au prix, au paiement, aux garanties de responsabilité, etc.;

Car la banque rappelle que ces conditions générales comportent à leur verso l'ensemble des articles relatifs au démarchage à domicile.

Et elle soutient que les conditions générales de vente sont lisibles, et que l'application, faite par le premier juge, sur la police de corps 8 ne concerne que le crédit à la consommation, et non pas un bon de commande relevant d'autres dispositions.

La société Cofidis fait valoir à cet égard la prise de possession du bien (acceptation de la livraison, suivi des travaux, signature d'une attestation de fin de travaux), l'obtention des autorisations administratives et du certificat de conformité du Consuel, le règlement de l'intégralité des mensualités du prêt, ainsi que son utilisation (production de l'électricité et utilisation du matériel installé par les consommateurs).

Mais le prêteur n'apporte aucune explication quant au point de savoir en quoi l'acquéreur avait connaissance des vices grevant le contrat dont elle a poursuivi l'exécution.

Car la connaissance de ce vices ne peut se déduire de la seule reproduction, même intégrale et fidèle, des dispositions du code de la consommation en matière de démarchage, sans autre circonstance démontrée ou même alléguée par le prêteur.

Il sera donc retenu que les consommateurs n'ont pas pu confirmer le bon de commande grevée de nullités.

Il y aura donc lieu de prononcer la nullité du contrat de vente signé le 22 novembre 2018 entre Madame [K] et la société Svh Energie, et le jugement sera confirmé de ce chef.

En l'absence de présentation par le prêteur de tout moyen pertinent à cet égard, il y aura aussi lieu de confirmer le jugement en ce qu'il a dit que le liquidateur judiciaire devrait reprendre possession des matériels installés et remettre en état les lieux dans un délai de 6 mois à compter de la signification de la décision, sous réserve d'avoir prévenu au moins quinze jours à l'avance de la date de son intervention, et que passé ce délai, Madame [K] pourrait le conserver et en disposer comme bon lui semblerait.

Sur l'annulation du contrat de crédit affecté:

Selon l'article L. 312-55 du code de la consommation,

En cas de contestation sur l'exécution du contrat principal, le tribunal peut, jusqu'à la solution du litige, suspendre l'exécution du contrat de crédit. Celui-ci est résolu ou annulé de plein droit lorsque le contrat en vue duquel il a été conclu est lui-même judiciairement résolu ou annulé.

Les dispositions du premier alinéa ne sont applicables que si le prêteur est intervenu à l'instance ou s'il a été mis en cause par le vendeur ou l'emprunteur.

En conséquence de l'annulation du contrat principal, il y aura lieu d'annuler le contrat de crédit affecté, et le jugement sera confirmé de ce chef.

Sur les conséquences de l'annulation du contrat de crédit affecté:

Il résulte de l'article 1178 du code civil que le contrat annulé est censé n'avoir jamais existé; les prestations exécutées donnent lieu à restitution dans les conditions prévues aux articles 1352 à 1352-9; indépendamment de l'annulation du contrat, la partie lésée peut demander réparation des dommages subis dans les conditions du droit commun de la responsabilité extra-contractuelle.

Selon l'article 1352-8 du même code, la restitution d'une prestation de service a lieu en valeur; celle-ci est appréciée à la date à laquelle elle a été fournie.

Eu égard à la nature du contrat, consistant en travaux de construction ou de réparation, la seule remise en l'état antérieur ne peut que se résoudre en restitution de la valeur des travaux ainsi réalisés.

Sur les fautes de la banque lors de la libération des fonds:

Sur l'absence alléguée de contrôle de la régularité du contrat principal par la banque :

Selon l''article L. 311-48 du code de la consommation, dans sa version issue de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016 :

Les obligations de l'emprunteur ne prennent effet qu'à compter de la livraison du bien ou de la fourniture de la prestation; en cas de contrat de vente de prestations de services à exécution successives, elles prennent effet à compter du début de la livraison ou de la fourniture et cessent en cas d'interruption de celle-ci.

Commet une faute le prêteur qui verse les fonds sans procéder aux vérifications préalables lui permettant de relever que le contrat principal est affecté d'une cause de nullité; en revanche, l'emprunteur, qui n'établit pas avoir subi de préjudice consécutif à la faute de la banque demeure tenu de rembourser le capital emprunté.

Il s'évince de ce qui précède que la banque, avant de consentir à l'offre de crédit, n'a pas procédé à la vérification de la régularité formelle du contrat principal, dont le formulaire de rétractation n'est pas conforme aux exigences légales applicables.

Ainsi, la banque a commis une faute.

Sur l'absence alléguée de vérification de la parfaite exécution du contrat principal :

Il résulte de la teneur de la disposition légale susmentionnée que les obligations de l'emprunteur ne prennent effet qu'à compter de l'exécution de la prestation de services qui doit être complète, hors le cas d'une prestation de services à exécution successive, et que commet une faute à l'égard de l'emprunteur le prêteur qui délivre des fonds au vendeur sans s'assurer que celui-ci a exécuté son obligation (Cass. 1ère civ. 16 janvier 2013, n°12-13.022, Bull. 2013, I, n°6).

La libération des fonds intervient au vu d'une attestation de fin de travaux, laquelle est opposable à l'emprunteur si elle permet de vérifier l'exécution complète du contrat principal; elle lui est en revanche inopposable si son contenu ne permet pas se convaincre d'une telle exécution complète.

Il appartient au prêteur de démontrer l'exécution du contrat principal, et non à l'emprunteur d'en démontrer l'inexécution.

L'emprunteur qui détermine l'établissement de crédit à verser les fonds au vendeur au vu de la signature par lui du certificat de livraison du bien n'est plus ensuite recevable à soutenir, au détriment du prêteur, que le bien ne lui avait pas été livré (Cass. 1ère civ., 14 novembre 2001, n°99-15.690, Bull. 2001, I, n°280).

Les époux [K] font grief à la société Cofidis d'avoir libéré les fonds dès le 20 décembre 2018, alors même que l'ensemble des prestations de l'entrepreneur principal n'avait pas été exécuté.

Ils rappellent que selon mandat spécial en date du 7 novembre 2018, la signataire avait donné mandat à l'entrepreneur d'accomplir les démarches administratives tant auprès de la mairie (déclaration préalable de travaux, Dacct- déclaration attestant de l'achèvement et de la conformité des travaux- que de la Drire, et d'Erdf pour le raccordement de l'installation au réseau public, que du conseil général pour l'obtention des aides).

Mais ils soulignent qu'à la date de libération des fonds, la société Svh n'avait régularisé aucune Dacct auprès de la commune et n'avait pas justifié du dépôt d'un dossier de demande d'aide devant le conseil général.

Ils avancent qu'en l'absence de toute précision sur le contenu exact des travaux convenus,;l'attestation de livraison ne permettait pas de se convaincre de l'entière exécution de ses obligations par l'entrepreneur principal, de telle sorte qu'il appartenait au prêteur de procéder à des vérifications complémentaires.

Ils mettent en exergue, à cet égard, eu égard à la brièveté du délai séparant la signature du bon de commande le 22 novembre 2018 de l'attestation de fins de travaux du 11 décembre 2018, que la banque ne pouvait pas ignorer que l'ensemble des prestations, notamment administratives, afférentes au contrat principal, en particulier celle relative au raccordement au réseau, n'avaient pas toutes été entièrement exécutées.

Mais l'attestation de fin de travaux, signée par Madame [K], comporte la déclaration, par celle-ci, de ce que les travaux et prestations prévus au bon de commande au titre de l'installation des panneaux photovoltaïques avaient été réalisés par l'entrepreneur principal.

La seule teneur de ce document permet ainsi à la banque, qui n'est tenue à aucune autre vérification, d'être avisée de l'exécution totale des ventes et prestations objet des contrats de crédit sollicités.

Dès lors, la banque n'a pas commis de faute tenant à l'absence de vérification de la parfaite exécution du contrat principal.

Sur les préjudices des emprunteurs :

Aux termes de l'article 1178 du code civil, un contrat qui ne remplit pas les conditions requises pour sa validité est nul; la nullité doit être prononcée par le juge, à moins que les parties ne la constatent d'un commun accord; le contrat annulé est censé n'avoir jamais existé; les prestations exécutées donnent lieu à restitution dans les conditions prévues aux articles 1352 à 1352-9.

Indépendamment de l'annulation du contrat, la partie lésée peut demander réparation du dommage subi dans les conditions de droit commun de la responsabilité extra-contractuelle.

Selon l'article 1240 du code civil, tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.

Il se déduit de ces textes que la restitution à laquelle un contractant est condamné à la suite de l'annulation d'un contrat ne constitue pas, par elle-même, un préjudice indemnisable (Cass. 1ère civ., 20 décembre 2023, n°21-16.491, publié).

La responsabilité civile impose de caractériser un comportement fautif personnellement imputable à son auteur.

Il appartient à celui qui invoque un préjudice d'en rapporter la preuve.

Observations préliminaires:

Pour caractériser le préjudice des consommateurs, le premier juge avait retenu que le vendeur se trouvait dans l'impossibilité de restituer les sommes qu'il avaient reçues, voire d'assumer les travaux de reprise de la toiture après dépose de l'installation.

Ainsi, les consommateurs indiquent subir un préjudice égal au montant du capital emprunté (page 25 de leurs écritures).

Or, un tel quantum, portant sur la restitution consécutive à l'annulation des contrats susdits, qu'ils ont réclamé eux-mêmes, ne peut pas constituer par principe l'assiette de leur préjudice.

En outre, le placement en liquidation judiciaire de l'auteur du contrat principal n'est pas imputable à la faute de la banque.

Surabondamment, la liquidation judiciaire de l'entrepreneur principal implique, selon toute probabilité raisonnable, que les organes de la procédure collective ne procéderont jamais à la dépose de l'installation litigieuse, dont les consommateurs conserveront de fait la possession.

Il y aura donc lieu de rechercher d'autres éventuels dommages des consommateurs.

Sur le défaut de rentabilité de l'installation et la faute du prêteur à cet égard:

Constitue une caractéristique essentielle du bien ou du service, au sens de l'article L.111-1 du code de la consommation, les variations de productivité d'une installation photovoltaïque, dans le cas où une telle productivité a clairement déterminé le consentement du consommateur (Cass. 1ère civ., 21 mars 2018, n°16-24.179).

La rentabilité économique ne constitue une caractéristique essentielle d'une installation photovoltaïque au sens de l'article L. 111-1 du code de la consommation qu'à la condition que les parties l'aient fait entrer dans le champ contractuel (Cass. 1ère civ., 21 octobre 2020, n°18-26.761, publié).

Les époux [K] soulignent que leur préjudice est constitué par le défaut de productivité de l'installation photovoltaïque, qui ne couvre aucunement les prévisions contractuelles formalisées dans le bon de commande et dans son annexe manuscrite, aux termes desquelles, en raison de l'orientation de la toiture et du niveau d'ensoleillement, la production escomptée étaIt de 3746 kWh par an, tandis que cette production n'a jamais été astreinte et ne le sera probablement jamais.

Il y a lieu de relever que le bon de commande comporte, sur papier à en-tête de l'entrepreneur principal, une simulation faisant d'état d'une production escomptée de 3746 kWh par an.

Mais il sera relevé que le formulaire propre à cette simulation n'a été rempli et signé que par la seule Madame [K].

En outre, si la feuille manuscrite jointe comporte notamment l'indication d'une telle production escomptée, il n'est pas établi que le préposé de l'entrepreneur principal en serait l'auteur, comme le soutiennent les consommateurs.

La lecture des conditions générales ne mentionne pas la simulation susdite, ni en quoi celle-ci engagerait l'entrepreneur.

En tout état de cause, le bon de commande, seul document à valeur contractuelle engageant l'entrepreneur principal, ne comporte aucune prévision de production.

Bien plus encore, si les époux [K] soutiennent que la production escomptée n'a pas été atteinte (page 54) ou que l'installation ne leur fournit pas les performances attendues (page 25), ils ne viennent pas énoncer que la productivité de l'installation aurait déterminé leur propre consentement.

Les circonstances de l'espèce ne font donc pas ressortir que la productivité attendue de l'installation aurait été déterminante du consentement de Madame [K].

Et au contraire, les éléments du dossier font ressortir que l'installation est fonctionnelle, en état de marche, et produit de l'électricité.

Dès lors, les époux [K] défaillent à démontrer tout préjudice s'agissant du défaut allégué de productivité de l'installation photovoltaïque.

* * * * *

A l'issue de cette analyse, il y aura lieu de condamner les époux [K] à restituer à la société Cofidis la somme de 37 680 euros, avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt, déduction faite des intérêts et frais versés afférents à l'emprunt non causé, que les emprunteurs justifient avoir versée au prêteur, et de débouter les époux [K] de l'ensemble de leurs demandes formées contre la banque: le jugement sera infirmé de ces chefs.

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Il y aura lieu d'infirmer le jugement en ce qu'il a condamné la société Cofidis aux dépens de première instance, et l'a condamnée à payer aux époux [K] la somme de 2000 euros au titre des frais irrépétibles de première instance, en la déboutant de sa propre demande au même titre.

Il sera rappelé que le présent arrêt vaudra titre de restitution des sommes allouées en exécution du jugement déféré.

Les époux [K] seront déboutés de leur demande au titre des frais irrépétibles des deux instances.

Les époux [K] seront condamnés in solidum aux entiers dépens des deux instances et à payer à la société Cofidis la somme de 3000 euros au titre des frais irrépétibles des deux instances.

PAR CES MOTIFS:

La cour,

statuant publiquement, par arrêt réputé contradictoire, et après en avoir délibéré conformément à la loi,

Infirme le jugement déféré en toutes ses dispositions, sauf en ce qu'il a :

- prononcé la nullité du contrat de vente signé le 22 novembre 2018 entre Madame [G] [Y] épouse [K] et la société Svh Energie ;

- dit que la société d'exercice libéral à responsabilité limitée Athena, és qualités de liquidateur de la société Svh Energie, devrait reprendre possession des matériels installés et remettre en état les lieux dans un délai de 6 mois à compter de la signification de la décision, sous réserve d'avoir prévenu au moins quinze jours à l'avance de la date de son intervention, et que passé ce délai, Madame [G] [K] pourrait les conserver et en disposer comme bon lui semblerait ;

- prononcé la nullité du contrat de crédit affecté souscrit le 22 novembre 2018 entre Madame [G] [Y] épouse [K] et Monsieur [C] [K], d'une part, et la société Cofidis, d'autre part, pour le financement du contrat de vente du même jour entre Madame [K] et la société Svh Energie ;

Confirme le jugement de ces seuls chefs ;

Statuant à nouveau dans cette limite et y ajoutant:

Condamne solidairement Madame [G] [Y] épouse [K] et Monsieur [C] [K] à restituer à la société anonyme Cofidis la somme de 37 680 euros, avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt, déduction faite des frais et intérêts versés ;

Déboute Madame [G] [Y] épouse [K] et Monsieur [C] [K] de toutes leurs autres demandes dirigées contre la société anonyme Cofidis ;

Rappelle que le présent arrêt vaut titre de restitution des sommes allouées en exécution du jugement déféré ;

Déboute Madame [G] [Y] épouse [K] et Monsieur [C] [K] de leurs demandes au titre des frais irrépétibles de première instance et d'appel;

Condamne in solidum Madame [G] [Y] épouse [K] et Monsieur [C] [K] aux entiers dépens de première instance et d'appel et à payer à la société anonyme Cofidis la somme de 3000 euros au titre des frais irrépétibles de première instance et d'appel ;

Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.