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Décisions

CA Riom, 1re ch., 24 septembre 2024, n° 22/01986

RIOM

Arrêt

Autre

CA Riom n° 22/01986

24 septembre 2024

COUR D'APPEL

DE RIOM

PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE

Du 24 septembre 2024

N° RG 22/01986 - N° Portalis DBVU-V-B7G-F4TX

- PV- Arrêt n° 382

[C] [Y] [U], [L] [I] épouse [U] / S.N.C. VINCI IMMOBILIER RESIDENTIEL

Jugement Au fond, origine TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de CLERMONT-FERRAND, décision attaquée en date du 04 Août 2022, enregistrée sous le n° 21/02590

Arrêt rendu le MARDI VINGT QUATRE SEPTEMBRE DEUX MILLE VINGT QUATRE

COMPOSITION DE LA COUR lors des débats et du délibéré :

M. Philippe VALLEIX, Président

M. Daniel ACQUARONE, Conseiller

Mme Laurence BEDOS, Conseiller

En présence de :

Mme Marlène BERTHET, greffier lors de l'appel des causes et du prononcé

ENTRE :

M. [C] [Y] [U]

et Mme [L] [I] épouse [U]

[Adresse 4]

[Localité 3]

Représentés par Maître Sophie VIGNANCOUR-DE-BARRUEL, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND

Timbre fiscal acquitté

APPELANTS

ET :

S.N.C. VINCI IMMOBILIER RESIDENTIEL

[Adresse 1]

[Localité 5]

Représentée par Maître Sophie LACQUIT, avocat au barreau de CLERMONT- FERRAND et par Maître Yann GUITTET de la SELARL ISEE, avocat au barreau de LYON

Timbre fiscal acquitté

INTIMEE

DÉBATS : A l'audience publique du 17 juin 2024

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 24 septembre 2024 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;

Signé par M. VALLEIX, président et par Mme Marlène BERTHET, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSÉ DU LITIGE

M. [C] [U] et Mme [L] [I] épouse [U] ont conclu sous seing privé le 20 septembre 2018 auprès de la SNC VINCI IMMOBILIER RÉSIDENTIEL un contrat de réservation d'un appartement et dépendance garage constituant les lots n° 42 et n° 26 d'une résidence de copropriété en construction dénommée [Adresse 7] et située [Adresse 2] à [Localité 6] (Puy-de-Dôme), dans le cadre d'une vente en l'état futur d'achèvement.

L'acte authentique de vente a été conclu le 18 avril 2019 auprès de Me [J] [S], notaire associé à [Localité 6] (Puy-de-Dôme), moyennant le prix total de 200.000,00 € conforme au compromis de vente. Ce prix a été payé comptant à hauteur de 90.000,00 € et financé pour le surplus à hauteur de 110.000,00 €, payable au fur et à mesure de l'avancement des travaux dans le cadre d'un concours bancaire. Cet acte de vente de vente prévoyait un délai de livraison de l'ouvrage au plus tard pour le 4ème trimestre de l'année 2019, la livraison avec remise des clés ayant en réalité été effectuée le 12 juin 2020 (et non le 8 juin 2020 comme mentionné par erreur).

La livraison de l'ouvrage n'ayant eu lieu que le 12 juin 2020, M. et Mme [U] considèrent avoir souffert d'un préjudice financier de frais bancaires et d'assurance de crédit pour avoir fait débloquer les fonds de leur emprunt immobilier prématurément le 19 mars 2019 sur la base d'un avis par courriel du 28 février 2019 qui leur avait annoncé une date de livraison au plus tard pour le 31 juillet 2019. Ils ont en conséquence demandé le remboursement de ses frais.

Par ailleurs, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 6 juillet 2020, M. et Mme [U] ont transmis à la société VINCI un certain nombre de réserves touchant à leur appartement (longue et imposante fissure au plafond, finition bâclée sous le lavabo, retouches de peintures nécessaires, bouts de plinthes sans finition, finition grossière) ainsi que les parties communes de l'immeuble (défaut d'évacuation de l'eau sur le toit du parking, ruissellement inapproprié ayant entraîné une couleur sâle sur le mur mitoyen à la terrasse de l'appartement, inondations répétées dans le hall de l'immeuble et dans les garages, plinthes détachées dans l'entrée de l'immeuble, fissure dans les marches de la cage d'escalier). Par lettre du 8 juillet 2020, la société VINCI a accusé réception de ses réserves, s'engageant à les traiter avant la fin du mois de juillet 2020.

Aucun accord amiable n'ayant été possible, M. et Mme [U] ont, par acte d'huissier de justice signifié le 8 juillet 2021, assigné devant le tribunal judiciaire de Clermont-Ferrand la société VINCI IMMOBILIER RESIDENTIEL, en réparation de préjudices subis du fait de son manquement à son obligation de délivrance telle que prévue au contrat de vente en l'état futur d'achèvement du 18 avril 2019. C'est dans ces conditions que cette dernière juridiction a, suivant un jugement n° RG-21/02590 rendu le 4 août 2022 :

débouté M. et Mme [U] de l'intégralité de leurs demandes ;

débouté la société VINCI de sa demande formée au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

condamné solidairement M. et Mme [U] aux dépens de l'instance, avec la création des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile au profit de Me Maud Rouchouse, avocat au barreau de Clermont-Ferrand ;

dit n'y avoir lieu à écarter l'exécution provisoire.

Par déclaration formalisée par le RPVA le 12 octobre 2022, le conseil de M. et Mme [U] a interjeté appel du jugement susmentionné. L'effet dévolutif de cet appel y est ainsi libellé :

' Appel limité aux chefs de jugement expressément critiqués : L'appel tend à obtenir la nullité ou, à tout le moins la réformation de la décision susvisée en ce qu'elle a : DEBOUTE Monsieur [C] [U] et Madame [L] [I] épouse [U] de l'intégralité de leurs demandes. CONDAMNE solidairement Monsieur [C] [U] et Madame [L] [I] épouse [U] aux dépens, dont distraction au profit de Maître ROUCHOUSE. Les appelants défèrent à la Cour ces chefs de jugement qu'ils critiquent expressément, ainsi que ceux qui en dépendent. Cet appel est fondé sur les pièces dont il a été fait état en première instance ou toute autre à produire devant la Cour. SOUS TOUTES RESERVES.'

' Par dernières conclusions d'appelant notifiées par le RPVA le 28 mai 2024, M. [C] [U] et Mme [L] [I] épouse [U] ont demandé de :

au visa de l'article L.261-1 du code de la construction et de l'habitation, des articles 1112-1, 1104, 1137, 1231-1, 1240, 1611 et suivants, 1642-1 et 1648 du Code civil, et des articles L.111-1 et L. 111-2 du code de la consommation ;

infirmer le jugement du 4 août 2022 du tribunal judiciaire de Clermont-Ferrand, sauf en ce qu'il a débouté la société VINCI de sa demande formée au titre de l'article 700 du code de procédure civile, et statuer à nouveau ;

déclarer les demandes de M. et Mme [U] recevables et bien fondées, et en conséquence ;

juger que le consentement des époux [U] a été vicié du fait d'un dol et de la violation par la société VINCI de son obligation précontractuelle d'information et retenir la responsabilité de la société VINCI à ce titre ;

juger que la société VINCI a manqué à son obligation de délivrance aux termes convenus dans l'acte de vente en l'état futur d'achèvement du 18 avril 2019 ;

constater que les réserves afférentes à la livraison de l'ouvrage n'ont toujours pas été levées ;

condamner la société VINCI à payer à M. et Mme [U], demeurés propriétaires du bien, la somme de 10.000,00 € à titre de dommages-intérêts en réparation de leur perte d'une chance de ne pas conclure le contrat ;

condamner la société VINCI à payer à M. et Mme [U] une somme de 630,00 € par mois de retard, assortie des intérêts au taux légal à compter du jour de la demande, avec capitalisation par année entière ;

condamner la société VINCI à payer aux époux [U] la somme de 4.000,00 en réparation de leur préjudice occasionné par le manquement de la société VINCI à sa promesse de leur fournir l'attestation fiscale ;

condamner la société VINCI à payer à M et Mme [C] [U] les sommes suivantes :

frais de dossier de prêt : 700,00 € ;

assurance prêt pour décembre, janvier, février et mars : 81,49 € ;

frais bancaires intercalaires : 100,00 € par mois de retard ;

condamner la société VINCI à procéder aux travaux de reprise des fissures et dégâts de peinture ainsi que de la finition grossière en pied d'huisserie, dans les règles de l'art, sous astreinte de 150,00 euros par jour de retard;

condamner la société VINCI à payer aux époux [U] la somme de 200,00 euros acquittée par eux pour l'intervention de M. [B] [R] (consultation technique) ;

condamner la société VINCI à payer aux époux [U] la somme de 1.500,00 € pour les propos injurieux, outrageants et diffamatoires qu'elle a tenus et dont la suppression doit être prononcée, en application de l'article 41 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse ;

condamner la société VINCI à payer à M. et Mme [U], une indemnité de 6.000,00 € en application de l'article 700 du Code de procédure civile ;

condamner la société VINCI aux dépens de première instance et d'appel, avec application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile dont distraction au profit de Me Sophie Vignancour de Barruel, au barreau de Clermont-Ferrand.

' Par dernières conclusions d'intimé et d'appel incident notifiées par le RPVA le 29 mai 2024, la SNC VINCI IMMOBILIER RESIDENTIEL a demandé de :

au visa de l'article L.261-11 du code de la construction et de l'habitation, de l'article 1642-1 du Code civil ainsi que de l'article 41 de la loi de la liberté de presse du 29 juillet 1881 ;

[à titre principal] ;

déclarer recevable mais mal fondé l'appel de M. et Mme [U] à l'encontre du jugement rendu par le tribunal judiciaire de Clermont-Ferrand le 4 août 2022 ;

confirmer ce même jugement en ce qu'il a débouté les époux [U] de l'intégralité de leurs demandes à l'encontre de la société VINCI ;

infirmer ce même jugement en ce qu'il a débouté la société VINCI de sa demande de condamnation des époux [U] sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ;

statuant à nouveau ;

condamner in solidum M. et Mme [U] à payer à la société VINCI une indemnité de 3.000,00 € en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile pour ses frais irrépétibles de première instance ;

[à titre subsidiaire], en cas d'infirmation du jugement déféré ;

rejeter la demande d'indemnisation de M. et Mme [U] au titre du retard de livraison en ce que le délai de livraison a été reporté conformément à la clause de report de délai de livraison figurant à l'acte authentique du 18 avril 2019 ;

rejeter la demande d'indemnisation de M. et Mme [U] au titre d'une prétendue perte de chance de ne pas conclure le contrat de vente immobilière en ce qu'il n'est nullement démontré une quelconque man'uvre dolosive ou une quelconque autre faute de la part de la société VINCI ;

rejeter les autres demandes d'indemnisation de M. et Mme [U] comme étant non justifiées ;

rejeter la demande de M. et Mme [U] tendant à la réalisation de travaux de reprise compte tenu de l'absence de démonstration de la réalité des vices allégués ;

débouter M. [C] [U] et Mme [L] [I] épouse [U] de l'intégralité de leurs demandes en cause d'appel ;

en tout état de cause ;

débouter les époux [U] de leurs demandes en paiement d'une somme de 1.500,00 € pour propos injurieux, outrageants ou injurieux ;

condamner in solidum M. et Mme [U] à payer à la société VINCI une indemnité de 3.500,00 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour l'instance d'appel ;

condamner M. et Mme [U] aux entiers dépens de l'instance, avec application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile au profit de Me Sophie Lacquit, avocat au barreau de Clermont-Ferrand.

Par application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, les moyens développés par les parties à l'appui de leurs prétentions sont directement énoncés dans la partie MOTIFS DE LA DÉCISION.

Par ordonnance rendue le 30 mai 2024, le Conseiller de la mise en état a ordonné la clôture de cette procédure. Lors de l'audience civile collégiale du 17 juin 2024 à 14h00, au cours de laquelle cette affaire a été évoquée, chacun des conseils des parties a réitéré et développé ses moyens et prétentions précédemment énoncés. La décision suivante a été mise en délibéré au 24 septembre 2024, par mise à disposition au greffe.

MOTIFS DE LA DÉCISION

1/ Sur les allégations de dol

L'article 1112-1 du Code civil dispose que « Celle des parties qui connaît une information dont l'importance est déterminante pour le consentement de l'autre doit l'en informer dès lors que, légitimement, cette dernière ignore cette information ou fait confiance à son cocontractant. / Néanmoins, ce devoir d'information ne porte pas sur l'estimation de la valeur de la prestation. / Ont une importance déterminante les informations qui ont un lien direct et nécessaire avec le contenu du contrat ou la qualité des parties. / Il incombe à celui qui prétend qu'une information lui était due de prouver que l'autre partie la lui devait, à charge pour cette autre partie de prouver qu'elle l'a fournie. / Les parties ne peuvent ni limiter, ni exclure ce devoir. / Outre la responsabilité de celui qui en était tenu, le manquement à ce devoir d'information peut entraîner l'annulation du contrat dans les conditions prévues aux articles 1130 et suivants. » tandis que l'article 1137 alinéa 2 du Code civil définit le donne comme étant également « (') la dissimulation intentionnelle par l'un des contractants d'une information dont il sait le caractère déterminant pour l'autre partie. ».

Alors que l'acte authentique de vente a été signé le 18 avril 2019 avec indication d'un délai de livraison reporté au plus tard au 4ème trimestre 2019, M. et Mme [U] reprochent à la société VINCI de ne leur avoir appris que le 22 mars 2019 que le délai de livraison de leur bien avait été reporté du 3ème au 4ème semestre 2019 et d'avoir pris cette décision de report avant le 28 février 2019 en la leur dissimulant. Ils considèrent avoir été ainsi victimes d'une pratique déloyale et trompeuse qui les a amenés dans des conditions de man'uvres dolosives à contracter définitivement avec la société VINCI et à perdre de ce fait une chance de contracter dans de meilleures conditions au regard de leurs intérêts.

En l'occurrence, force est de constater que M. et Mme [U] ne font pas davantage en cause d'appel qu'en première instance une quelconque offre de démonstration de preuve sur la matérialité des man'uvres dolosives dont ils font état et qu'ils se bornent en définitive à induire de ces simples décalages de calendrier du 3ème trimestre au 4ème trimestre en ce qui concerne la date de livraison de l'ouvrage et de la date du 25 mars 2019 à celle du 18 avril 2019 en ce qui concerne la signature de l'acte authentique de vente.

En tout état de cause, le temps qui s'est écoulé entre la date du 18 février 2019 d'information de délai de livraison au 3ème trimestre 2019 et celle du 22 mars 2019 d'information de la prorogation de ce délai de livraison au 4ème trimestre 2019 apparaît sans aucune incidence dans la mesure où il demeurait tout à fait loisible à compter de cette dernière date du 22 mars 2019 à M. et Mme [U] de reconsidérer leurs intérêts et de refuser le cas échéant de signer l'acte authentique de vente à la date du 18 avril 2019.

Enfin, M. et Mme [U] ne pouvaient raisonnablement considérer que comme une information visiblement erronée le courriel qui leur a été adressé le 28 février 2019 par un agent de la société VINCI, les informant d'une date de livraison fixée au 31 juillet 2019, compte tenu de l'information contraire du 22 mars 2019 fixant cette date de livraison au 4ème trimestre 2019.

Le jugement de première instance sera en conséquence confirmé en ce qu'il a rejeté cette recherche de responsabilité initiée par M. et Mme [U] à l'encontre de la société VINCI en allégation de man'uvres dolosives.

2/ Sur le délai de livraison

Conformément aux dispositions des articles L.261-1 du code de la construction et de l'habitation et 1601 du Code civil, la société VINCI se trouve effectivement dans l'obligation de s'expliquer envers M. et Mme [U] sur le dépassement du délai de livraison de l'ouvrage d'un peu plus de cinq mois en raison d'une livraison effective de l'ouvrage le 12 juin 2020 alors que celle-ci était contractuellement prévue dans l'acte authentique de vente au 4ème trimestre 2019, soit au plus tard le 31 décembre 2019, « (') sauf survenance d'un cas de force majeure ou de suspension du délai de livraison. », suivant les termes stipulés dans l'acte authentique de vente du 18 avril 2019. Il convient ici de préciser que le report du délai de livraison de l'ouvrage du 3ème trimestre au 4ème trimestre 2019 a été acquiescé par les acheteurs dans l'acte authentique de vente du 18 avril 2019 et n'entre donc plus en débat.

De plus, cette période de dépassement de délai de livraison doit en réalité être interrompue à la date du 12 mars 2020, correspondant à la date de mise en 'uvre de la période juridiquement protégée consécutive à la crise sanitaire provoquée la pandémie de covid-19 jusqu'à la date du 23 juin 2020, par application de l'ordonnance n° 2020-306 du 25 mars 2020. La livraison de l'ouvrage ayant été réalisée le 12 juin 2020, soit au cours de cette période juridiquement protégée qui été toujours pas achevé concernant tous actes, recours ou actions en justice, la durée réelle du dépassement de délai ne peut dès lors correspondre qu'à la période qui s'est écoulée entre le 1er janvier 2020 et le 12 mars 2020, soit 72 jours calendaires.

Or, la société VINCI justifie que le calendrier du chantier a été décalé de 49 jours calendaires, conformément à un courrier que lui a adressé le 9 septembre 2020 son maître d''uvre DHA AUVERGNE du fait d'un avis défavorable émis par un bureau de contrôle SOCOTEC au sujet d'un doublage périphérique qui avait été réalisé dans le cadre du lot Cloisonnement - Peinture par une entreprise GOUVEIA, incompatible avec la résistance au feu du bâtiment. La dépose et la remise en conformité de ce doublage a en conséquence nécessité ces 49 jours calendaires supplémentaires. La société VINCI est dès lors en en capacité juridique d'opposer à concurrence de cette durée supplémentaire la condition contractuelle de cause légitime de report de délai de livraison stipulée dans l'acte authentique de vente au titre du « Retard provenant de la défaillance d'une entreprise » (page 21). Elle peut également se prévaloir de la licéité et de l'opposabilité de la clause de doublement du délai effectivement enregistré, figurant également dans l'acte authentique de vente. Ces circonstances y sont en effet explicitement prévues « (') en raison de leur répercussion sur l'organisation générale du chantier. » (Page 21).

La société VINCI communique par ailleurs un courrier du 4 décembre 2019 de de ce même maître d''uvre DHA AUVERGNE, faisant état d'un autre retard de chantier d'une durée de cinq mois en raison du placement en liquidation judiciaire de l'entreprise [Z] titulaire du marché de gros-'uvre, de « La découverte de la chambre Orange sur l'emprise du chantier VINCI IMMOBILIER. », d'interventions non coordonnées des services de l'eau de la ville de [Localité 6] ainsi que d'une intervention ENEDIS décalée et sans justification concernant l'enfouissement du câble aérien. Ces causes entrent également dans les clauses d'exonération prévues en page 21 de l'acte authentique de vente.

Dans ces conditions, l'ampleur licite totale du décalage calendaire étant de 98 jours du fait de ce doublement, sans même compter les cinq mois supplémentaires précités et sans qu'il soit dès lors nécessaire de poursuivre cette vérification sur d'autres causes, force est de constater que le décalage calendaire précité de 72 jours s'en trouve complètement couvert. Le premier juge sera en conséquence confirmé en ce qu'il a rejeté cette recherche de responsabilité formée par M. et Mme [U] à l'encontre de la société VINCI en allégation de retard d'achèvement et de livraison de l'ouvrage.

3/ Sur les autres demandes

Si la société VINCI s'était engagée dans un courrier du 7 octobre 2019 envers M. et Mme [U] à lui délivrer une attestation fiscale d'achèvement des travaux à la date du 31 décembre 2019, force est de constater que cet engagement ne lui est plus opposable en raison du dépassement du délai d'achèvement du chantier et de livraison de l'ouvrage jusqu'à la date du 12 juin 2020 dans des conditions qui ne lui sont pas imputables pour les motifs précédemment énoncés. Il convient ici de rappeler que le raccordement de l'immeuble au gaz est une condition du constat d'achèvement des travaux et que ce raccordement, pour des motifs qui ne peuvent être imputés à la société VINCI, n'a pu être effectué que postérieurement au 31 décembre 2019 en cours d'année 2020. Une situation de force majeure s'oppose donc à la mise à exécution de cet engagement du 7 octobre 2019. Par ailleurs, M. et Mme [U] ne précisent pas en quoi ils se seraient abstenus de faire d'autres investissements de défiscalisation en 2019 en lecture du courrier précité du 7 octobre 2019. En tout état de cause, la société VINCI objecte par ailleurs à juste titre à ce sujet que l'avantage fiscal invoqué par M. et Mme [U] a été simplement différé sur l'année suivante. Le jugement de première instance sera en conséquence confirmé en ce qu'il a débouté M. et Mme [U] de leur demande d'indemnisation formée à l'encontre de la société VINCI en allégation de pertes d'avantages fiscaux pour l'année 2019.

M. et Mme [U] ne précisent ni ne détaillent en quoi ils auraient contracté le concours bancaire afférent à cette opération d'acquisition immobilière dans des circonstances ne leur permettant pas de négocier correctement les conditions du prêt et notamment le taux d'intérêt. Ils ne précisent d'ailleurs aucune date de contractualisation de ce concours bancaire permettant d'apprécier le délai écoulé à compter de la date du 7 novembre 2018 à laquelle ils disent avoir été pressés par la société VINCI pour mettre en 'uvre ce concours bancaire. Le jugement de première instance sera en conséquence confirmé en ce qu'il a rejeté leur demande de remboursement en allégation de frais bancaires et d'assurance de crédit injustifiés.

Les allégations M. et Mme [U] concernant l'existence de finitions grossières, l'apparition de fissures en divers endroits de l'appartement, des reprises non soignées et l'absence de levées de réserves ainsi que les demandes formées en conséquence par ces derniers en exécution sous astreinte de travaux de reprise sont formées au visa des articles 1642-1, 1646-1 et 1648 du Code civil sur la responsabilité du vendeur d'un immeuble à construire en cas de vices cachés ou apparents. Ces allégations ne reposent que sur des courriers de signalement du 9 mars 2021, du 11 avril 2021 et du 12 mai 2021 et sur un rapport de consultation technique établi par un architecte et expert judiciaire le 28 novembre 2022 à leur seule initiative et sans aucun processus contradictoire. Il importe de rappeler à ce sujet qu'un simple rapport d'expertise amiable non contradictoire ne peut avoir de valeur probatoire que s'il est corroboré par d'autres éléments de preuve. De plus, par un courrier du 20 avril 2021, la société VINCI a convenu de l'existence d'un certain nombre de réserves concernant le plafond du couloir, l'état du mur et du plafond suite à un dégât des eaux, le mur de la chambre et la jointure du mur plafond du salon, déclarant mobiliser un locateur d'ouvrage, l'entreprise [O], pour y remédier et objectant que la finition en pied d'huisserie avait été conforme aux règles de l'art. Il n'est pas démenti que ces interventions ont été effectuées, celles-ci ne pouvant être contestées sur la base d'un seul rapport d'expertise amiable non contradictoire pour les motifs précédemment énoncés. Le premier juge sera en conséquence confirmé en ce qu'il a rejeté l'ensemble de ces chefs de demandes.

La demande formée par M. et Mme [U] à l'encontre de la société VINCI dans le dispositif de leurs conclusions en allégation de manquement à l'obligation de délivrance ne donnent lieu à aucun développement particulier dans le corps de ces mêmes conclusions. Le jugement de première instance sera en conséquence confirmé en ce qu'il a rejeté ce chef de demande.

M. et Mme [U] échouant dans toutes leurs demandes formées au titre du dol et de la perte de chance, de l'obligation de délivrance, de l'attestation fiscale 2019, du retard de livraison, des frais bancaires prétendument injustifiés et des défauts cachés ou apparents, le jugement de première instance sera confirmé en ce qu'il a rejeté l'intégralité de leurs réclamations pécuniaires formées à titre principal.

En conséquence de ce qui précède, M. et Mme [U] seront purement et simplement déboutés de leur demande de remboursement de la somme de 200,00 € qu'ils ont acquittée en rémunération de l'intervention de M. [B] [R].

M. et Mme [U] ne précisent aucunement dans le dispositif de leurs conclusions la teneur des propos injurieux, outrageant et diffamatoires que la société VINCI aurait tenus à leur égard et dont ils demandent réparation à hauteur de 1.500,00 € avec suppression des propos incriminés. De plus, aucun paragraphe dédié de développement n'est consacré à ce poste de demande dans le corps de leurs conclusions. Dans ces conditions, l'ensemble de ces demandes sera purement et simplement rejeté.

Le jugement de première instance sera confirmé en ses décisions touchant au rejet d'application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et à l'imputation des dépens de première instance.

Il serait effectivement inéquitable, au sens des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, de laisser à la charge de la société VINCI les frais irrépétibles qu'elle a été contrainte d'engager à l'occasion de cette procédure d'appel et qu'il convient d'arbitrer à la somme de 2.000,00 €.

Enfin, succombant à l'instance, M. et Mme [U] seront purement et simplement déboutés de leur demande de défraiement formée au visa de l'article 700 du code de procédure civile et en supporteront les entiers dépens.

LA COUR,

STATUANT PUBLIQUEMENT

ET CONTRADICTOIREMENT.

CONFIRME en toutes ses dispositions le jugement n° RG-21/02590 rendu le 4 août 2022 par le tribunal judiciaire de Clermont-Ferrand.

Y ajoutant.

CONDAMNE M. [C] [U] et Mme [L] [I] épouse [U] à payer au profit de la SNC VINCI IMMOBILIER RÉSIDENTIEL une indemnité de 2.000,00 €, en dédommagement de ses frais irrépétibles prévus à l'article 700 du code de procédure civile.

REJETTE le surplus des demandes des parties.

CONDAMNE M. [C] [U] et Mme [L] [I] épouse [U] aux entiers dépens de l'instance, avec application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile au profit de Me Sophie Lacquit, avocat au barreau de Clermont-Ferrand.

Le greffier Le président