Décisions
CA Paris, Pôle 1 - ch. 3, 24 septembre 2024, n° 23/16013
PARIS
Arrêt
Autre
Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 1 - Chambre 3
ARRÊT DU 24 SEPTEMBRE 2024
(n° 334 , 6 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 23/16013 - N° Portalis 35L7-V-B7H-CIJWM
Décision déférée à la cour : ordonnance du 05 septembre 2023 - JCP du Tprox de Pantin - RG n° 12-23-000085
APPELANTS
M. [J] [I] [S] [X]
[Adresse 2]
[Localité 4]
Mme [Z] [F]
[Adresse 2]
[Localité 4]
Représentés par Me Corinne GIUDICELLI JAHN, avocat au barreau de PARIS, toque : D0850
INTIMÉE
S.A.S. DU [Adresse 3], prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège
[Adresse 6]
[Localité 5]
Représentée par Me Sonia BEN REGUIGA de la SELEURL SBR AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : D 1471
Ayant pour avocat plaidant Me Saléha LAHIANI, avocat au barreau du VAL-D'OISE
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 02 septembre 2024, en audience publique, rapport ayant été fait par Anne-Gaël BLANC, conseillère, conformément aux articles 804, 805 et 905 du CPC, les avocats ne s'y étant pas opposés.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Michel RISPE, président de chambre
Anne-Gaël BLANC, conseillère
Valérie GEORGET, conseillère
Greffier lors des débats : Jeanne PAMBO
ARRÊT :
- CONTRADICTOIRE
- rendu publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Michel RISPE, président de chambre et par Jeanne PAMBO, greffier, présent lors de la mise à disposition.
********
Par jugement d'adjudication du 13 septembre 2022, la Société du [Adresse 3] a acquis la propriété d'un appartement situé [Adresse 2] (93).
Par acte extrajudiciaire du 31 mars 2023, elle a assigné M. [I] [S] et Mme [F] aux fins de voir constater qu'ils sont occupants sans droit ni titre de cet appartement et d'obtenir leur expulsion.
Par ordonnance réputée contradictoire du 4 juillet 2023, le juge des contentieux de la protection du tribunal de proximité de Pantin, statuant en référé, a :
constaté la qualité d'occupants sans droit ni titre de M. [I] [S] et de Mme [F] ;
ordonné l'expulsion de M. [I] [S] et de Mme [F] et de toute personne de leur chef, de leurs biens, du logement sis au [Adresse 2] avec le concours d'un serrurier et de la force publique des lieux occupés ;
rejeté la demande de suppression du délai prévu par l'article L.412-1 du code des procédures civiles d'exécution, en conséquence cette expulsion ne pourra être poursuivie qu'à l'expiration d'un délai de deux mois suivant la délivrance d'un commandement d'avoir à libérer les lieux ;
dit que le sort des meubles se trouvant dans les lieux sera régi selon les dispositions des articles L.433-1 et L.433-2 du code des procédures civiles d'exécution ;
condamné solidairement M. [I] [S] et Mme [F] à payer à la Société du [Adresse 3] une provision mensuelle de 977 euros au titre de l'indemnité d'occupation depuis le 3 février 2023 jusqu'à la libération totale des lieux ;
condamné solidairement M. [I] [S] et Mme [F] à payer à la Société du [Adresse 3] la somme de 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;
rappelé l'exécution provisoire de droit d'une ordonnance de référé ;
rejeté le surplus des demandes ;
condamné solidairement M. [I] [S] et Mme [F] aux dépens qui comprendront le coût du constat d'huissier du 3 février 2023.
Par déclaration du 28 septembre 2023, M. [I] [S] et Mme [F] ont relevé appel de cette décision en critiquant l'ensemble des chefs de son dispositif à l'exception du rejet de la demande de suppression du délai prévu par l'article L.412-1 du code des procédures civiles d'exécution.
Dans leurs dernières conclusions déposées et notifiées le 19 octobre 2023, ils demandent à la cour de :
réformer le jugement dont appel dans toutes ses dispositions ;
dire et juger qu'ils sont titulaires d'un bail depuis le 3 juillet 2016 ;
à titre subsidiaire :
leur accorder un délai de 24 mois à compter de l'arrêt à intervenir pour quitter les lieux ;
condamner les intimés à une somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 code de procédure civile et aux entiers dépens.
Dans ses dernières conclusions déposées et notifiées le 29 mai 2024 auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé détaillé des moyens développés, la Société du [Adresse 3] demande à la cour de :
confirmer l'ordonnance de référé rendue le 5 septembre 2023 par le tribunal de proximité de Pantin en ce qu'elle a :
constaté la qualité d'occupants sans droit ni titre de M. [I] [S] et de Mme [F] ;
ordonné l'expulsion de M. [I] [S] et de Mme [F] et de toute personne de leur chef, de leurs biens du logement sis au [Adresse 1] avec le concours d'un serrurier et de la force publique des lieux occupés ;
dit que le sort des meubles se trouvant dans les lieux sera régi selon les dispositions des articles L.433-1 et L.433-2 du code des procédures civiles d'exécution ;
condamné solidairement M. [I] [S] et Mme [F] à payer à la Société du [Adresse 3] une provision mensuelle de 977 euros au titre de l'indemnité d'occupation depuis le 3 février 2023 jusqu'à la libération totale des lieux ;
condamné solidairement M. [I] [S] et Mme [F] à payer à la Société du [Adresse 3] la somme de 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;
condamné solidairement M. [I] [S] et Mme [F] aux dépens qui comprendront le coût du constat d'huissier du 3 février 2023 ;
infirmer l'ordonnance de référé rendue le 5 septembre 2023 par le tribunal de proximité de Pantin en ce qu'elle a :
fixé le paiement de la provision mensuelle de 977 euros au titre de l'indemnité d'occupation à compter du 3 février 2023 jusqu'à la libération totale des lieux ;
et statuant à nouveau,
condamné solidairement M. [I] [S] et Mme [F] à payer à la Société du [Adresse 3] une provision mensuelle de 977 euros au titre de l'indemnité d'occupation depuis le 13 septembre 2022 jusqu'à la libération totale des lieux ;
à titre subsidiaire confirmer l'ordonnance de référé en ce qu'elle a fixé la date du paiement de l'indemnité d'occupation à compter du 3 février 2023 jusqu'à la libération des lieux ;
y ajoutant :
rejeter la demande de M. [I] [S] et de Mme [F] visant à se voir accorder un délai de 24 mois pour quitter les lieux ;
condamner solidairement M. [I] [S] et Mme [F] à payer à la Société du [Adresse 3] la somme de 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;
condamner solidairement M. [I] [S] et Mme [F] à l'ensemble des dépens au titre de la procédure d'appel y compris les coûts relatifs à la signification de l'ordonnance du 18 septembre 2023 et au commandement de quitter les lieux du 21 septembre 2023.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 02 septembre 2024, avant l'ouverture des débats.
Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux conclusions des parties susvisées pour un plus ample exposé de leurs prétentions et moyens.
Sur ce,
Selon l'article 834 du code de procédure civile, dans tous les cas d'urgence, le juge des contentieux de la protection peut, dans les limites de sa compétence, ordonner en référé toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l'existence d'un différend.
Aux termes de l'article 835, alinéa 1er, du même code, il peut toujours, même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent, soit pour prévenir un dommage imminent soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.
L'occupation sans droit ni titre d'un immeuble est ainsi de nature à constituer un trouble manifestement illicite, ou, à tout le moins, l'obligation de quitter les lieux est alors non sérieusement contestable.
Sur l'existence d'un titre d'occupation
Pour conclure à l'infirmation de la décision, les appelants font valoir que, depuis le 3 juillet 2016, ils sont titulaires d'un bail consenti par l'ancien propriétaire des lieux et qu'ils ne peuvent dès lors être expulsés comme occupants sans droit ni titre.
Cependant, le document présenté pour la première fois devant la cour comme étant un contrat de location présente des erreurs d'orthographe tant sur le nom du bailleur que sur celui du locataire. Il est incomplet puisqu'il manque plusieurs pages. Son authenticité, qui est contestée, n'est pas confirmée par d'autres pièces comme des quittances locatives ou toute autre preuve de paiement du loyer ou de perception d'allocations logement. Surtout, il n'a jamais été produit en amont malgré les demandes des auxiliaires de justice, une mise en demeure en ce sens et l'introduction de l'instance devant le premier juge. Enfin, la production de ce document n'est pas cohérente avec les allégations antérieures des appelants telles que rappelées dans les procès-verbaux de constat puisqu'ils indiquaient alors ne pouvoir remettre de bail au motif que celui-ci avait été perdu ou volé et soutenaient en dernier lieu qu'ils remettaient le loyer en liquide à un épicier en bas de l'immeuble.
En tout état de cause, si tout bail antérieur est opposable à l'adjudicataire ce n'est qu'à la condition que ce dernier en ait eu connaissance avant l'adjudication. Or, au cas présent, même à considérer comme authentique le contrat litigieux, cette connaissance n'est pas démontrée, aucun bail n'ayant été communiqué à l'intimée avant la procédure d'appel.
Il s'en déduit qu'en se prévalant d'un bail dont l'existence et l'opposabilité ne sont pas avérées, les appelants ne caractérisent pas une contestation sérieuse susceptible d'être opposée à la société intimée.
Il convient dès lors de confirmer la décision en ce qu'elle autorise l'expulsion des appelants.
Sur la demande de délais
Aux termes des articles 564 et suivants du code procédure civile, à peine d'irrecevabilité relevée d'office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d'un fait. Cependant, les prétentions ne sont pas nouvelles dès lors qu'elles tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge même si leur fondement juridique est différent. Les parties ne peuvent ajouter aux prétentions soumises au premier juge que les demandes qui en sont l'accessoire, la conséquence ou le complément nécessaire.
Cependant si dans le corps de ses écritures l'intimée invoque le caractère nouveau de la demande de délais, elle ne sollicite aucune irrecevabilité de ce chef dans son dispositif qui seul saisit la cour. Au surplus, la demande de délais tend à faire écarter la demande adverse d'expulsion immédiate et il n'y a pas lieu de la déclarer d'office irrecevable.
Par ailleurs, l'article L.412-3 du code des procédures civiles d'exécution, dans sa version issue de la loi n° 2023-668 du 27 juillet 2023, dispose que le juge qui ordonne l'expulsion peut accorder des délais renouvelables aux occupants de lieux habités ou de locaux à usage professionnel chaque fois que le relogement des intéressés ne peut avoir lieu dans des conditions normales. Cette faculté n'est cependant pas ouverte lorsque les occupants dont l'expulsion a été ordonnée sont entrés dans les locaux à l'aide de man'uvres, de menaces, de voies de fait ou de contrainte.
L'article L.412-4 du même code prévoit que la durée des délais susmentionnés ne peut, en aucun cas, être inférieure à un mois ni supérieure à un an et que pour leur fixation, il est tenu compte de la bonne ou mauvaise volonté manifestée par l'occupant dans l'exécution de ses obligations, des situations respectives du propriétaire et de l'occupant, notamment en ce qui concerne l'âge, l'état de santé, la qualité de sinistré par faits de guerre, la situation de famille ou de fortune de chacun d'eux, les circonstances atmosphériques, ainsi que des diligences que l'occupant justifie avoir faites en vue de son relogement. Il est également tenu compte du droit à un logement décent et indépendant, des délais liés aux recours engagés selon les modalités prévues aux articles L. 441-2-3 et L. 441-2-3-1 du code de la construction et de l'habitation et du délai prévisible de relogement des intéressés.
En l'espèce, la mention de la dégradation de la porte d'entrée dans le procès-verbal de constat est à elle seule insuffisante à établir avec certitude une entrée des occupants dans les lieux par voies de fait. Cependant, au soutien de leur demande de délais, ces derniers font uniquement valoir qu'ils ont trois enfants en bas âge et que ceux-ci sont scolarisés à proximité des lieux occupés. Aucune démarche aux fins de relogement n'est démontrée ni même alléguée.
Dès lors, la condition tenant au fait que le relogement des intéressés ne puisse avoir lieu dans des conditions normales n'étant pas remplie, il convient de rejeter la demande de délais, étant souligné que les appelants ont, en tout état de cause, d'ores et déjà bénéficié depuis la décision de première instance de plus d'une année pour quitter les lieux, durée légale maximale du délai susceptible de leur être accordé.
Sur l'appel incident sur l'indemnité d'occupation
En application de l'article 835, alinéa 2, du code de procédure civile, le juge des contentieux de la protection peut, dans les limites de sa compétence, dans les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, accorder une provision au créancier.
Au cas présent, la société intimée demande l'infirmation de l'ordonnance sur le point de départ de la condamnation provisionnelle au paiement d'une indemnité d'occupation au 3 février 2023 en considérant que celle-ci lui est incontestablement due à compter du 13 septembre 2022, date à laquelle elle a acquis le bien litigieux.
Dans la mesure où les appelants ont expressément reconnu occuper les lieux depuis juillet 2016, date du bail dont ils se prévalent et que leur occupation a été constatée par huissier dès le 20 décembre 2021, il convient de faire droit à la demande en fixant le point de départ de l'indemnité d'occupation au 13 septembre 2022, la décision devant être infirmée de ce chef.
Sur les demandes accessoires
L'ordonnance sera confirmée sur les dépens et les frais irrépétibles.
Les appelants seront condamnés in solidum aux dépens de l'appel ainsi qu'à payer une somme de 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
Confirme l'ordonnance entreprise dans ses dispositions soumises à la cour sauf en ce qu'elle fixe le point de départ de l'indemnité d'occupation au 3 février 2023 et l'infirme de ce chef ;
Statuant à nouveau et y ajoutant,
Rejette la demande de délais pour quitter les lieux ;
Dit que l'indemnité provisionnelle d'occupation sera due in solidum par M. [I] [S] et Mme [F] à compter du 13 septembre 2022 ;
Condamne in solidum M. [I] [S] et Mme [F] à payer à la société du [Adresse 3] la somme de 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamne in solidum M. [I] [S] et Mme [F] aux dépens de l'appel.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT
délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 1 - Chambre 3
ARRÊT DU 24 SEPTEMBRE 2024
(n° 334 , 6 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 23/16013 - N° Portalis 35L7-V-B7H-CIJWM
Décision déférée à la cour : ordonnance du 05 septembre 2023 - JCP du Tprox de Pantin - RG n° 12-23-000085
APPELANTS
M. [J] [I] [S] [X]
[Adresse 2]
[Localité 4]
Mme [Z] [F]
[Adresse 2]
[Localité 4]
Représentés par Me Corinne GIUDICELLI JAHN, avocat au barreau de PARIS, toque : D0850
INTIMÉE
S.A.S. DU [Adresse 3], prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège
[Adresse 6]
[Localité 5]
Représentée par Me Sonia BEN REGUIGA de la SELEURL SBR AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : D 1471
Ayant pour avocat plaidant Me Saléha LAHIANI, avocat au barreau du VAL-D'OISE
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 02 septembre 2024, en audience publique, rapport ayant été fait par Anne-Gaël BLANC, conseillère, conformément aux articles 804, 805 et 905 du CPC, les avocats ne s'y étant pas opposés.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Michel RISPE, président de chambre
Anne-Gaël BLANC, conseillère
Valérie GEORGET, conseillère
Greffier lors des débats : Jeanne PAMBO
ARRÊT :
- CONTRADICTOIRE
- rendu publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Michel RISPE, président de chambre et par Jeanne PAMBO, greffier, présent lors de la mise à disposition.
********
Par jugement d'adjudication du 13 septembre 2022, la Société du [Adresse 3] a acquis la propriété d'un appartement situé [Adresse 2] (93).
Par acte extrajudiciaire du 31 mars 2023, elle a assigné M. [I] [S] et Mme [F] aux fins de voir constater qu'ils sont occupants sans droit ni titre de cet appartement et d'obtenir leur expulsion.
Par ordonnance réputée contradictoire du 4 juillet 2023, le juge des contentieux de la protection du tribunal de proximité de Pantin, statuant en référé, a :
constaté la qualité d'occupants sans droit ni titre de M. [I] [S] et de Mme [F] ;
ordonné l'expulsion de M. [I] [S] et de Mme [F] et de toute personne de leur chef, de leurs biens, du logement sis au [Adresse 2] avec le concours d'un serrurier et de la force publique des lieux occupés ;
rejeté la demande de suppression du délai prévu par l'article L.412-1 du code des procédures civiles d'exécution, en conséquence cette expulsion ne pourra être poursuivie qu'à l'expiration d'un délai de deux mois suivant la délivrance d'un commandement d'avoir à libérer les lieux ;
dit que le sort des meubles se trouvant dans les lieux sera régi selon les dispositions des articles L.433-1 et L.433-2 du code des procédures civiles d'exécution ;
condamné solidairement M. [I] [S] et Mme [F] à payer à la Société du [Adresse 3] une provision mensuelle de 977 euros au titre de l'indemnité d'occupation depuis le 3 février 2023 jusqu'à la libération totale des lieux ;
condamné solidairement M. [I] [S] et Mme [F] à payer à la Société du [Adresse 3] la somme de 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;
rappelé l'exécution provisoire de droit d'une ordonnance de référé ;
rejeté le surplus des demandes ;
condamné solidairement M. [I] [S] et Mme [F] aux dépens qui comprendront le coût du constat d'huissier du 3 février 2023.
Par déclaration du 28 septembre 2023, M. [I] [S] et Mme [F] ont relevé appel de cette décision en critiquant l'ensemble des chefs de son dispositif à l'exception du rejet de la demande de suppression du délai prévu par l'article L.412-1 du code des procédures civiles d'exécution.
Dans leurs dernières conclusions déposées et notifiées le 19 octobre 2023, ils demandent à la cour de :
réformer le jugement dont appel dans toutes ses dispositions ;
dire et juger qu'ils sont titulaires d'un bail depuis le 3 juillet 2016 ;
à titre subsidiaire :
leur accorder un délai de 24 mois à compter de l'arrêt à intervenir pour quitter les lieux ;
condamner les intimés à une somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 code de procédure civile et aux entiers dépens.
Dans ses dernières conclusions déposées et notifiées le 29 mai 2024 auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé détaillé des moyens développés, la Société du [Adresse 3] demande à la cour de :
confirmer l'ordonnance de référé rendue le 5 septembre 2023 par le tribunal de proximité de Pantin en ce qu'elle a :
constaté la qualité d'occupants sans droit ni titre de M. [I] [S] et de Mme [F] ;
ordonné l'expulsion de M. [I] [S] et de Mme [F] et de toute personne de leur chef, de leurs biens du logement sis au [Adresse 1] avec le concours d'un serrurier et de la force publique des lieux occupés ;
dit que le sort des meubles se trouvant dans les lieux sera régi selon les dispositions des articles L.433-1 et L.433-2 du code des procédures civiles d'exécution ;
condamné solidairement M. [I] [S] et Mme [F] à payer à la Société du [Adresse 3] une provision mensuelle de 977 euros au titre de l'indemnité d'occupation depuis le 3 février 2023 jusqu'à la libération totale des lieux ;
condamné solidairement M. [I] [S] et Mme [F] à payer à la Société du [Adresse 3] la somme de 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;
condamné solidairement M. [I] [S] et Mme [F] aux dépens qui comprendront le coût du constat d'huissier du 3 février 2023 ;
infirmer l'ordonnance de référé rendue le 5 septembre 2023 par le tribunal de proximité de Pantin en ce qu'elle a :
fixé le paiement de la provision mensuelle de 977 euros au titre de l'indemnité d'occupation à compter du 3 février 2023 jusqu'à la libération totale des lieux ;
et statuant à nouveau,
condamné solidairement M. [I] [S] et Mme [F] à payer à la Société du [Adresse 3] une provision mensuelle de 977 euros au titre de l'indemnité d'occupation depuis le 13 septembre 2022 jusqu'à la libération totale des lieux ;
à titre subsidiaire confirmer l'ordonnance de référé en ce qu'elle a fixé la date du paiement de l'indemnité d'occupation à compter du 3 février 2023 jusqu'à la libération des lieux ;
y ajoutant :
rejeter la demande de M. [I] [S] et de Mme [F] visant à se voir accorder un délai de 24 mois pour quitter les lieux ;
condamner solidairement M. [I] [S] et Mme [F] à payer à la Société du [Adresse 3] la somme de 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;
condamner solidairement M. [I] [S] et Mme [F] à l'ensemble des dépens au titre de la procédure d'appel y compris les coûts relatifs à la signification de l'ordonnance du 18 septembre 2023 et au commandement de quitter les lieux du 21 septembre 2023.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 02 septembre 2024, avant l'ouverture des débats.
Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux conclusions des parties susvisées pour un plus ample exposé de leurs prétentions et moyens.
Sur ce,
Selon l'article 834 du code de procédure civile, dans tous les cas d'urgence, le juge des contentieux de la protection peut, dans les limites de sa compétence, ordonner en référé toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l'existence d'un différend.
Aux termes de l'article 835, alinéa 1er, du même code, il peut toujours, même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent, soit pour prévenir un dommage imminent soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.
L'occupation sans droit ni titre d'un immeuble est ainsi de nature à constituer un trouble manifestement illicite, ou, à tout le moins, l'obligation de quitter les lieux est alors non sérieusement contestable.
Sur l'existence d'un titre d'occupation
Pour conclure à l'infirmation de la décision, les appelants font valoir que, depuis le 3 juillet 2016, ils sont titulaires d'un bail consenti par l'ancien propriétaire des lieux et qu'ils ne peuvent dès lors être expulsés comme occupants sans droit ni titre.
Cependant, le document présenté pour la première fois devant la cour comme étant un contrat de location présente des erreurs d'orthographe tant sur le nom du bailleur que sur celui du locataire. Il est incomplet puisqu'il manque plusieurs pages. Son authenticité, qui est contestée, n'est pas confirmée par d'autres pièces comme des quittances locatives ou toute autre preuve de paiement du loyer ou de perception d'allocations logement. Surtout, il n'a jamais été produit en amont malgré les demandes des auxiliaires de justice, une mise en demeure en ce sens et l'introduction de l'instance devant le premier juge. Enfin, la production de ce document n'est pas cohérente avec les allégations antérieures des appelants telles que rappelées dans les procès-verbaux de constat puisqu'ils indiquaient alors ne pouvoir remettre de bail au motif que celui-ci avait été perdu ou volé et soutenaient en dernier lieu qu'ils remettaient le loyer en liquide à un épicier en bas de l'immeuble.
En tout état de cause, si tout bail antérieur est opposable à l'adjudicataire ce n'est qu'à la condition que ce dernier en ait eu connaissance avant l'adjudication. Or, au cas présent, même à considérer comme authentique le contrat litigieux, cette connaissance n'est pas démontrée, aucun bail n'ayant été communiqué à l'intimée avant la procédure d'appel.
Il s'en déduit qu'en se prévalant d'un bail dont l'existence et l'opposabilité ne sont pas avérées, les appelants ne caractérisent pas une contestation sérieuse susceptible d'être opposée à la société intimée.
Il convient dès lors de confirmer la décision en ce qu'elle autorise l'expulsion des appelants.
Sur la demande de délais
Aux termes des articles 564 et suivants du code procédure civile, à peine d'irrecevabilité relevée d'office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d'un fait. Cependant, les prétentions ne sont pas nouvelles dès lors qu'elles tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge même si leur fondement juridique est différent. Les parties ne peuvent ajouter aux prétentions soumises au premier juge que les demandes qui en sont l'accessoire, la conséquence ou le complément nécessaire.
Cependant si dans le corps de ses écritures l'intimée invoque le caractère nouveau de la demande de délais, elle ne sollicite aucune irrecevabilité de ce chef dans son dispositif qui seul saisit la cour. Au surplus, la demande de délais tend à faire écarter la demande adverse d'expulsion immédiate et il n'y a pas lieu de la déclarer d'office irrecevable.
Par ailleurs, l'article L.412-3 du code des procédures civiles d'exécution, dans sa version issue de la loi n° 2023-668 du 27 juillet 2023, dispose que le juge qui ordonne l'expulsion peut accorder des délais renouvelables aux occupants de lieux habités ou de locaux à usage professionnel chaque fois que le relogement des intéressés ne peut avoir lieu dans des conditions normales. Cette faculté n'est cependant pas ouverte lorsque les occupants dont l'expulsion a été ordonnée sont entrés dans les locaux à l'aide de man'uvres, de menaces, de voies de fait ou de contrainte.
L'article L.412-4 du même code prévoit que la durée des délais susmentionnés ne peut, en aucun cas, être inférieure à un mois ni supérieure à un an et que pour leur fixation, il est tenu compte de la bonne ou mauvaise volonté manifestée par l'occupant dans l'exécution de ses obligations, des situations respectives du propriétaire et de l'occupant, notamment en ce qui concerne l'âge, l'état de santé, la qualité de sinistré par faits de guerre, la situation de famille ou de fortune de chacun d'eux, les circonstances atmosphériques, ainsi que des diligences que l'occupant justifie avoir faites en vue de son relogement. Il est également tenu compte du droit à un logement décent et indépendant, des délais liés aux recours engagés selon les modalités prévues aux articles L. 441-2-3 et L. 441-2-3-1 du code de la construction et de l'habitation et du délai prévisible de relogement des intéressés.
En l'espèce, la mention de la dégradation de la porte d'entrée dans le procès-verbal de constat est à elle seule insuffisante à établir avec certitude une entrée des occupants dans les lieux par voies de fait. Cependant, au soutien de leur demande de délais, ces derniers font uniquement valoir qu'ils ont trois enfants en bas âge et que ceux-ci sont scolarisés à proximité des lieux occupés. Aucune démarche aux fins de relogement n'est démontrée ni même alléguée.
Dès lors, la condition tenant au fait que le relogement des intéressés ne puisse avoir lieu dans des conditions normales n'étant pas remplie, il convient de rejeter la demande de délais, étant souligné que les appelants ont, en tout état de cause, d'ores et déjà bénéficié depuis la décision de première instance de plus d'une année pour quitter les lieux, durée légale maximale du délai susceptible de leur être accordé.
Sur l'appel incident sur l'indemnité d'occupation
En application de l'article 835, alinéa 2, du code de procédure civile, le juge des contentieux de la protection peut, dans les limites de sa compétence, dans les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, accorder une provision au créancier.
Au cas présent, la société intimée demande l'infirmation de l'ordonnance sur le point de départ de la condamnation provisionnelle au paiement d'une indemnité d'occupation au 3 février 2023 en considérant que celle-ci lui est incontestablement due à compter du 13 septembre 2022, date à laquelle elle a acquis le bien litigieux.
Dans la mesure où les appelants ont expressément reconnu occuper les lieux depuis juillet 2016, date du bail dont ils se prévalent et que leur occupation a été constatée par huissier dès le 20 décembre 2021, il convient de faire droit à la demande en fixant le point de départ de l'indemnité d'occupation au 13 septembre 2022, la décision devant être infirmée de ce chef.
Sur les demandes accessoires
L'ordonnance sera confirmée sur les dépens et les frais irrépétibles.
Les appelants seront condamnés in solidum aux dépens de l'appel ainsi qu'à payer une somme de 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
Confirme l'ordonnance entreprise dans ses dispositions soumises à la cour sauf en ce qu'elle fixe le point de départ de l'indemnité d'occupation au 3 février 2023 et l'infirme de ce chef ;
Statuant à nouveau et y ajoutant,
Rejette la demande de délais pour quitter les lieux ;
Dit que l'indemnité provisionnelle d'occupation sera due in solidum par M. [I] [S] et Mme [F] à compter du 13 septembre 2022 ;
Condamne in solidum M. [I] [S] et Mme [F] à payer à la société du [Adresse 3] la somme de 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamne in solidum M. [I] [S] et Mme [F] aux dépens de l'appel.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT