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Décisions

CA Chambéry, 1re ch., 24 septembre 2024, n° 23/01584

CHAMBÉRY

Autre

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Leman HA2C (SCI)

Défendeur :

MJ Alpes (SELARL), Salaisons du Cayon (SAS), Maison Lainé (SARL), Salaison 2 Savoie (SAS)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Pirat

Conseillers :

Mme Reaidy, M. Sauvage

Avocats :

Me Olivier Puig, SELARL JURISOPHIA SAVOIE, SELARL LX GRENOBLE-CHAMBERY, SELARL MLB AVOCATS, SELARL PIERRE MARTIN-DUCRUET

CA Chambéry n° 23/01584

23 septembre 2024

Faits et Procédure

Dans le cadre de la liquidation judiciaire de la société Salaison 2 Savoie, dont l'objet social était «la préparation industrielle de produit à base de viande, fabrication, transformation de charcuterie et de produits dérivés négoce de produits alimentaires divers', exercée au sein de locaux donnés à bail par la Sci Léman HA2C selon bail renouvelé en date du 2 mai 2023, liquidation judiciaire prononcée par le tribunal de commerce de Thonon les Bains en date du 13 juillet 2023, la mandataire liquidatrice, la selarl MJ Alpes, sollicitait, par requête en date du 18 septembre 2023, du juge commissaire l'autorisation de cession de gré à gré du fonds de commerce, la société Salaison 2 Savoie hors droit au bail.

Par ordonnance en date du 24 octobre 2023, le juge commissaire du tribunal de commerce de Thonon-les-Bains :

- prenait acte du retrait par la société Maison Chazal de son offre ;

- autorisait la cession de gré à gré du fonds de commerce de la société Salaison 2 Savoie sis à [Localité 5], [Adresse 7], composé de :

- l'enseigne ou le nom commercial,

- le matériel, les agencements et installations, les objets mobiliers servant à l'exploitation du fonds tels que visés dans le rapport d'inventaire dressé par le commissaire de justice le 09/08/2023,

- la clientèle et l'achalandage y attaché,

au profit de la société Salaisons du Cayon aux conditions contenues dans son offre en date du 18 octobre 2023 ;

- rappelait les dispositions de l'article L l224-1 du code du travail ;

- fixait le prix de vente à la somme de quatre-vingt-mille euros (80 000 euros) nets vendeur, répartis comme suit : 5 000 euros pour les éléments incorporels du fonds de commerce et 75 000 euros pour les éléments corporels ;

- fixait la date d'entrée en jouissance au lendemain de l'ordonnance ;

- disait que les parties passeront l'ensemble des actes nécessaires à la réalisation de la cession autorisée aux conditions fixées ci avant, dans un délai de deux mois à compter du jour où la présente décision sera passée en force de chose jugée, les frais inhérents étant à la charge du cessionnaire ;

- rappelait les dispositions des articles L642-3 et L642-20 du code de commerce ;

- rejetait l'offre présentée par la société Maison Lainé.

Par déclaration au greffe de la cour en date du 3 novembre 2023, la Sci Léman HA2C interjetait appel de cette décision.

Prétentions des parties

Par dernières écritures en date du 28 mars 2024 , régulièrement notifiées par voie de communication électronique, la Sci Léman HA2C sollicite de la cour de :

- juger recevable et bien fondé son recours ;

A titre principal,

- juger que le matériel, les agencements et installations, les objets mobiliers visés dans le rapport d'inventaire dressé par le commissaire de justice du 09/08/2023 inclus 12 éléments de sa propriété à savoir :

- n°14 : Banque d'accueil

- n°18 : Entier aménagement de laboratoire

- n°19 : Presse à jambon

- n°36 : Balance à palette avec compteur déporté de marque Bizerba

- n°37 : 3 laves-mains inox à commande au pied,

- n°55 : Pupitre en inox, servante de nettoyage et lave-main à commande au pied

- n°58 : 3 aménagement d'étuve avec groupe de marque Travaglini

- n°68 : Machine à laver les jambons

- n°75 : Aménagement de séchoir avec groupe de marque Travaglini

- n°76 :Double étuve fumoir de marque Thirode

- n°91 : Ensemble de compression comprenant :

- Compresseur de marque Renner

- Sécheur d'air de marque Belair

- Cuve verticale en acier galvanisé de marque Cordivari

- n° 92 : deux groupes froid (refroidisseur à condensation par air) de marque Trame

- juger que l'offre formalisée par la société Salaisons du Cayon le 18 octobre 2023 en vue de la cession à son profit du matériel, des agencements et installations, des objets mobiliers servant à l'exploitation du fonds de commerce de la société Salaison 2 Savoie tels que visés dans le rapport d'inventaire dressé par le commissaire de justice du 9 août 2023 implique la cession à son profit de 12 éléments qui ne constituent pas des éléments corporels du fonds de commerce de la société Salaison 2 Savoie et sont la propriété de la bailleresse ;

- juger que la cession du matériel, des agencements et installations, des objets mobiliers visés dans le rapport d'inventaire dressé par le commissaire de justice le 09/08/2023 au profit de la société Salaisons du Cayon aux conditions contenues dans son offre en date du 18 octobre 2023 porte atteinte à son droit de propriété ;

- infirmer l'ordonnance entreprise et statuant à nouveau,

- rejeter l'offre de la société Salaisons du Cayon en date du 18 octobre 2023,

- juger que la selarl MJ Alpes, ès qualités de liquidatrice judiciaire de la société Salaison 2 Savoie doit procéder à la réalisation des actifs de la société Salaison 2 Savoie dans le respect de son droit de propriété ;

Y ajoutant,

- débouter la selarl MJ Alpes, ès qualités de liquidatrice judiciaire de la société Salaison 2 Savoie et la société Salaisons du Cayon de l'intégralité de leurs demandes ;

- condamner la société Salaisons du Cayon à lui payer une indemnité procédurale de 4 000 euros ainsi qu'aux entiers dépens ;

Subsidiairement,

- juger que le matériel, les agencements et installations, les objets mobiliers visés dans le rapport d'inventaire dressé par le commissaire de justice en date du 9 août 2023 inclus 12 éléments lui appartenant à savoir (voir énumération ci-dessus) ;

- juger que l'offre formalisée par la société Salaisons du Cayon le 18 octobre 2023 en vue de la cession à son profit du matériel, des agencements et installations, des objets mobiliers servant à l'exploitation du fonds de commerce de la société Salaison 2 Savoie tels que visés dans le rapport d'inventaire dressé par le commissaire de justice du 9 août 2023 implique la cession à son profit de 12 éléments qui ne constituent pas des éléments corporels du fonds de commerce de la société Salaison 2 Savoie et sont la propriété de la Sci Léman HA2C ;

- juger que la cession du matériel, des agencements et installations, des objets mobiliers visés dans le rapport d'inventaire dressé par le commissaire de justice le 9 août 2023 au profit de la société Salaisons du Cayon aux conditions contenues dans son offre en date du 18 octobre 2023 porte atteinte à son droit de propriété ;

- infirmer l'ordonnance entreprise et statuant à nouveau,

- autoriser la cession de gré à gré du fonds de commerce de la société Salaison 2 Savoie sises à [Localité 5], [Adresse 7], composé de :

- l'enseigne ou le nom commercial,

- le matériel, les agencements et installations, les objets mobiliers visés dans le rapport d'inventaire dressé par le commissaire de justice du 9 août 2023 à l'exception des 12 éléments propriété de la Sci Léman HA2C à savoir (voir liste susvisée)

- la clientèle et l'achalandage y attaché,

au profit de la SAS Salaisons du Cayon pour un prix de vente de quatre-vingt-mille euros (80.000 euros) net vendeur ;

- fixer la date d'entrée en jouissance au lendemain de l'arrêt à intervenir,

- juger que les parties passeront l'ensemble des actes nécessaires à la réalisation de la cession autorisée aux conditions fixées ci-avant, dans un délai de deux mois à compter du jour où l'arrêt sera passée en force de chose jugée, les frais inhérents étant à la charge du cessionnaire ;

Y ajoutant,

- débouter la selarl MJ Alpes, ès qualités de liquidatrice judiciaire de la société Salaison 2 Savoie et la société Salaisons du Cayon de l'intégralité de leurs demandes ;

- condamner la société Salaisons du Cayon à lui payer une indemnité procédurale de 4 000 euros ainsi qu'aux entiers dépens.

Au soutien de ses prétentions, la Sci Léman HA2C fait valoir notamment que :

' l'inventaire en date du 9 août 2023 dressé par le commissaire de justice comprend en réalité de nombreux éléments lui appartenant en vertu de la clause d'accession contenue dans le bail de sorte que son droit de propriété est gravement affecté par la décision entreprise ;

' les termes de la clause d'accession du bail ne sont pas contradictoires mais démontrent une nouvelle fois que le droit au bail représente un élément constitutif du fonds de commerce ;

' tous les équipements constituent des immeubles par destination puisqu'ils sont entièrement et exclusivement attachés à l'usine et en constituent les accessoires indispensables puisque sans ces derniers, la production aurait été impossible.

Par dernières écritures en date du 29 mars 2024, régulièrement notifiées par voie de communication électronique, la selarl MJ Alpes, ès qualités de liquidatrice judiciaire de la société Salaison 2 Savoie sollicite de :

- déclarer irrecevables les demandes de la Sci Léman HA2C ;

Subsidiairement,

- rejeter les demandes de la Sci Léman HA2C ;

- confirmer l'ordonnance entreprise ;

- dire que la société Salaisons du Cayon fasse son affaire personnelle de la gestion de la vidange du glycol et de son enlèvement des locaux ou traitement en centre spécialisé le cas échéant ;

- condamner la Sci Léman HA2C à lui payer une indemnité procédurale de 3 000 euros, outre les dépens.

Au soutien de ses prétentions, la selarl MJ Alpes, ès qualités de liquidatrice judiciaire de la société Salaison 2 Savoie fait valoir notamment que :

' la Sci Léman HA2C avait été convoquée devant le juge commissaire ne s'est pas présentée. Ses demandes devant la cour sont donc des demandes nouvelles ;

' M. [W] [U], représentant légal de la société Chablais Salaison Finance, présidente de la société Salaison 2 Savoie, mais également gérant de la Sci Léman HA2C, présent lors de l'inventaire des éléments d'actifs de la société Salaison 2 Savoie et tout au long de la procédure n'a formulé aucune observation, aucune réserve ;

' le fonds de commerce a été vendu sans le droit au bail ;

' les éléments dont il est question ne constituent aucunement des immeubles par destination, et la Sci Léman HA2C ne démontre pas en être propriétaire ;

' les biens concernés, qui constituent donc des biens meubles, n'ont fait l'objet d'aucune revendication de la part de la Sci Léman HA2C dans le cadre de la procédure collective de la société Salaison 2 Savoie, de sorte qu'elle ne peut les revendiquer à ce jour.

' la clause d'accession contenue dans le contrat de bail se contredit en ce que d'une part le bailleur peut faire jouer la clause d'accession, mais d'autre part les éléments restent la propriété du locataire pendant la durée du bail et peuvent en outre être cédés à l'acquéreur du fonds de commerce ou du droit au bail.

Par dernières écritures en date du 26 mars 2024, régulièrement notifiées par voie de communication électronique, la société Salaisons du Cayon sollicite de la cour de :

- Déclarer irrecevables les demandes formulées par la Sci Léman HA2C ;

- confirmer l'ordonnance entreprise ;

- rejeter l'intégralité des demandes formulées par la Sci Léman HA2C à son encontre ;

Si par extraordinaire, la Cour d'Appel entendait recevoir les prétentions de celle-ci,

- limiter la propriété des biens par destination revenant à la Sci Léman HA2C uniquement aux points 14 et 36 ;

A titre infiniment subsidiaire, si la Cour d'Appel venait à réformer l'ordonnance rendue, en faisant droit à l'intégralité des demandes de la Sci Léman HA2C,

- rejeter son offre sachant que celle-ci ne correspondrait plus aux éléments pour lesquels elle avait été présentée et acceptée.

Dans tous les cas,

- condamner la Sci Léman HA2C à lui payer une indemnité procédurale de 4 000 euros et les dépens.

Au soutien de ses prétentions, la société Salaisons du Cayon fait valoir notamment que :

' les demandes de la Sci Léman HA2C devant la cour sont des demandes nouvelles ;

' M. [W] [U], représentant légal de la société Chablais Salaison Finance, présidente de la société Salaison 2 Savoie, mais également gérant de la Sci Léman HA2C, présent lors de l'inventaire des éléments d'actifs de la société Salaison 2 Savoie et tout au long de la procédure n'a formulé aucune observation, aucune réserve ;

' la cession du fonds de commerce n'emporte pas implicitement la cession du droit au bail, lequel n'est pas un élément indispensable du fonds ;

' lesdits locaux ne constituent pas un élément structurellement dépendant d'un tout indissociable permettant une unité d'exploitation et un changement d'affectation des lieux ne nécessiteraient pas des travaux importants du fait de la nature du bâtiment qui demeure industriel ;

' à l'exception de deux éléments, tous les autres matériels sont démontables, y compris le groupe froid ; Il ne s'agit donc pas d'immeubles par destination.

Par dernières écritures en date du 19 janvier 2024, régulièrement notifiées par voie de communication électronique, la société Maison Lainé solllicite de la cour de :

- statuer ce que de droit sur l'appel interjeté par la Sci Léman HA2C ;

- l'accueillir favorablement ;

- juger que les dépens seront employés en frais privilégiés de liquidation judiciaire.

Au soutien de ses observations, la société Maison Lainé fait valoir notamment que :

' le matériel ne pouvait être vendu sans le droit au bail auquel il était rattaché, jusqu'à constituer pour certains équipements des immeubles par destination et il convient donc de considérer en l'espèce que le droit au bail représentait un élément constitutif du fonds de commerce, de sorte que l'offre de la société Salaisons du Cayon ne correspondait pas à l'objet de la requête de la liquidatrice et ne pouvait être retenue par le juge commissaire ;

' par le jeu de la clause d'accession insérée dans le contrat de bail, certains éléments installés par la locataire devenaient automatiquement la propriété de la Sci bailleresse ;

' hormis le mobilier de bureau et les éléments équipant les vestiaires, tous les équipements étaient entièrement et exclusivement attachés à l'usine. Ils en constituaient les accessoires indispensables puisque sans ces derniers, la production aurait été impossible. Dès lors c'est l'intégralité du matériel d'exploitation qui doit être considéré comme immeuble par destination, devenant ainsi la propriété de la bailleresse par le jeu de la clause d'accession.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des prétentions des parties, la cour se réfère à leurs conclusions visées par le greffe et développées lors de l'audience ainsi qu'à la décision entreprise.

L'ordonnance de clôture était rendue le 2 avril 2024 et l'affaire était appelée à l'audience du 6 mai 2024.

MOTIFS ET DÉCISION

I - Sur la procédure

La selarl MJ Alpes, ès qualités de liquidatrice judiciaire de la société Salaison 2 Savoie et la société Salaisons du Cayon soutiennent que les demandes de la Sci Léman HA2C sont nouvelles en appel dès lors qu'elle n'était pas présente en première instance.

Dans un arrêt en date du 20 mai 2021, no 20-14339, la cour de cassation a estimé que la cour d'appel devait motiver sa décision déclarant recevable une demande d'une partie non comparante en première instance au regard des dispositions des articles 564 à 567 du code de procédure civile.

En vertu de l'article 564 du code de procédure civile, 'A peine d'irrecevabilité relevée d'office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d'un fait'.

En l'espèce, la Sci Léman HA2C n'a effectivement pas comparu, mais l'exclusion du droit au bail de la cession du fonds de commerce ne s'est révélée qu'au cours de l'audience, de sorte qu'elle ne pouvait soumettre au premier juge le fait qu'elle estimait que certains biens relevaient selon elle de la clause d'accession prévue dans le droit au bail.

En conséquence, la fin de non recevoir invoquée par la selarl MJ Alpes sera rejetée.

II - Sur le fond

En vertu des dispositions de l'article L642-19 du code de commerce ' Le juge-commissaire, soit ordonne la vente aux enchères publiques, soit autorise, aux prix et conditions qu'il détermine, la vente de gré à gré des autres biens du débiteur lorsqu'elle est de nature à garantir les intérêts de celui-ci. Lorsque la vente a lieu aux enchères publiques, il y est procédé dans les conditions prévues, selon le cas, au second alinéa de l'article L. 322-2 ou aux articles L. 322-4 ou L. 322-7".

Sur l'exclusion du droit au bail de la cession amiable

La requête déposée le 20 septembre 2023 auprès du juge commissaire par la mandataire liquidatrice aux fins de cession du fond de commerce de la société Salaison 2 Savoie visait 'la vente d'un fonds de commerce' sans autre précision sur les éléments composant ce fond mais l'offre initiale de la société Salaisons du Cayon incluait le droit au bail puisqu'elle avait formulé des conditions suspensives, l'offre de la maison Lainé ne contenant à ce sujet aucune précision.

En revanche, à l'audience devant le juge commissaire, la seconde offre de la société Salaisons du Cayon excluait le droit au bail et c'est cette offre qui a été retenue par le juge, puisque seuls certains éléments du fonds de commerce peuvent être vendus. En l'espèce, tous les éléments du fonds ont été vendus à l'exception du droit au bail ce qui était tout à fait possible.

Sur la clause d'accession contenue dans le bail renouvelé

Dans le contrat de bail renouvelé, la clause suivante a été insérée : 'en cas de départ effectif du locataire, tous les éléments d'équipement, tous les travaux, toutes les améliorations, transformations, constructions pouvant être des immeubles par nature ou par destination, qui auront pu être acquis ou effectués par le locataire à ses frais et sous sa responsabilité, deviendront de plein droit la propriété du bailleur sans indemnité'

Les biens litigieux dont la propriété est revendiquée par la Sci Léman HA2C sont les suivants : n°14 : Banque d'accueil ; n°18 : Entier aménagement de laboratoire ;n°19 : Presse à jambon ; n°36 : Balance à palette avec compteur déporté de marque Bizerba ; n°37 : 3 laves-mains inox à commande au pied ; n°55 : Pupitre en inox, servante de nettoyage et lave-main à commande au pied ; n°58 : 3 aménagement d'étuve avec groupe de marque Travaglini ; n°68 : Machine à laver les jambons ; n°75 : Aménagement de séchoir avec groupe de marque Travaglini ; n°76 :Double étuve fumoir de marque Thirode ; n°91 : Ensemble de compression comprenant : o Compresseur de marque Renner, o Sécheur d'air de marque Belair o Cuve verticale en acier galvanisé de marque Cordivari ; n° 92 : deux groupes froid (refroidisseur à condensation par air) de marque Trame , biens qui figurent dans l'inventaire du commissaire priseur Me [K] en date du 9 août 2023.

Compte tenu de la rédaction de cette clause, seule la catégorie des 'équipements' est concernée, sachant qu'aucun de ces biens ne constitue une construction ou des travaux. Cependant, si cette clause pouvait être applicable en l'espèce puisqu'il n'y a pas renouvellement ou établissement d'un nouveau bail ou cession du droit au bail, de sorte que le preneur ne peut en rester propriétaire, comme indiqué dans une autre disposition du bail, le contrat contient également la clause suivante : 'les équipements, matériels et installations démontables, sans dégradations installés par le preneur resteront sa propriété et devront être enlevés, lors de son départ, à charge pour lui de remettre les lieux en l'état de supprimer toute trace de leur emplacement'. La clause d'accession n'est pas contradictoire avec cette clause, dans la mesure où elle implique que les équipements fassent corps avec l'immeuble, tandis que dans la présente clause, les équipements doivent être démontables.

En l'espèce, au vu de l'inventaire réalisé par le commissaire priseur et quelque soit l'avis de ce dernier qui n'est qu'un avis au demeurant non motivé, au vu des photographies prises par ce dernier des lieux loués, au vu également de la nature des biens litigieux, il s'agit à l'évidence d'équipements démontables, sans dégradation, y compris pour la banque d'accueil visée dans la sol, ou encore les aménagements d'étuve ou de séchoirs, l'aménagement du laboratoire en panneaux sandwichs, les refroidisseurs à condensation à air situés à l'extérieur. En outre, la Sci Léman HA2C n'établit aucunement que l'enlèvement de ces équipements conduirait à endommager l'immeuble car incorporés dans le bâti. Enfin, il résulte du devis établi par la société Clauger en date du 21 février 2024 que le démontage des installations frigorifiques sera réalisé sans dégradation du bâtiment ou des plots béton, précisant qu'il s'agit d'un simple déboulonnage des ensembles.

En conséquence, ces éléments conduisent la cour, considérant que les biens litigieux sont des éléments d'équipement ou installations démontables au sens du contrat de bail, à rejeter l'application de la clause d'accession contenue par ailleurs dans ce même contrat et revendiquée par la bailleresse.

Il convient au surplus d'ajouter que si la Sci Léman HA2C entendait revendiquer la propriété de ces équipements démontables, il lui appartenait de suivre la procédure propre à la revendication des biens meubles en matière de procédure collective ce qu'elle n'a pas fait, étant précisé que le gérant, M. [W] [U], bien qu'ayant des responsabilités tant au sein de la société bailleresse qu'au sein de la société preneuse, n'a jamais fait de remarques ni au liquidateur, ni au commissaire priseur.

Sur l'exclusion dans la composition du fonds de commerce des immeubles par destination

Un fonds de commerce est habituellement composé d'éléments corporels tel que du matériel, de l'outillage ainsi que des marchandises, et incorporels. Ces derniers, susceptibles de composer le fonds de commerce, sont nombreux : clientèle et achalandage, nom commercial, enseigne, nom de domaine, droits de propriété intellectuelle, licences et autorisations administratives d'exploitation, droit au bail. Certains éléments sont cependant exclus : il s'agit des contrats en cours ainsi que des créances et dettes liées à l'exploitation mais aussi les immeubles par nature et les immeubles par destination dont le matériel affecté par le commerçant à l'exploitation de l'immeuble en application de l'article 524 du code civil, lequel prévoit notamment que : 'Les objets que le propriétaire d'un fonds y a placés pour le service et l'exploitation de ce fonds sont immeubles par destination.

Sont aussi immeubles par destination tous effets mobiliers que le propriétaire a attachés au fonds à perpétuelle demeure'.

Cependant, il est nécessaire que les biens susceptibles d'être concernés aient été mis en place dans le fonds par le propriétaire de ce fonds. Or en l'espèce, et surabondamment par rapport à la motivation précédente sur la nature démontable des biens litigieux, et ce quelque soit le bien concerné parmi ces douze biens litigieux, cette preuve n'est pas rapportée par la Sci Léman HA2C. En effet, aucun élément n'est produit aux débats sur l'origine des biens litigieux d'autant que si le bail renouvelé est récent, puisque datant d'à peine deux mois avant la liquidation, la société Salaison 2 Savoie et la Sci Léman HA2C étaient déjà liées par un bail plus ancien datant du 1er mai 2012.

En conséquence, les prétentions de la Sci Léman HA2C sur le fondement du droit de propriété ne peuvent qu'être rejetées.

Dès lors, l'ordonnance entreprise sera entièrement confirmée.

III - Sur les demandes accessoires

Succombant, la Sci Léman HA2C sera condamnée aux dépens de l'instance et déboutée de sa demande d'indemnité procédurale.

L'équité commande de faire droit à la demande d'indemnité procédurale de la selarl MJ Alpes, ès qualités de liquidatrice judiciaire de la société Salaison 2 Savoie et de la société Salaisons du Cayon à hauteur chacune de 1 500 euros.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, par défaut et après en avoir délibéré conformément à la loi,

Déboute la selarl MJ Alpes et la société Salaisons du Cayon de leur fin de non recevoir lié au caractère nouveau des prétentions de l'appelante,

Confirme l'ordonnance entreprise en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

Condamne la Sci Léman HA2C aux dépens de l'instance,

Déboute la Sci Léman HA2C de sa demande d'indemnité procédurale,

Condamne la Sci Léman HA2C à payer une indemnité procédurale de 1 500 euros chacune à la selarl MJ Alpes, ès qualités de liquidatrice judiciaire de la société Salaison 2 Savoie et à la société Salaisons du Cayon.

Arrêt de Défaut rendu publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,

et signé par Hélène PIRAT, Présidente et Sylvie LAVAL, Greffier.

Le Greffier, La Présidente,

Copie délivrée le 24 septembre 2024

à

la SELARL JURISOPHIA SAVOIE

la SELARL LEXAVOUE CHAMBERY GRENOBLE

la SELARL MLB AVOCATS

Me Olivier PUIG

Copie exécutoire délivrée le 24 septembre 2024

à

la SELARL LEXAVOUE CHAMBERY GRENOBLE

la SELARL MLB AVOCATS

Me Olivier PUIG