Livv
Décisions

CA Dijon, 1re ch. civ., 24 septembre 2024, n° 24/00134

DIJON

Arrêt

Autre

PARTIES

Demandeur :

Époux

Défendeur :

Cabinet (SAS)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Caullireau-Forel

Conseillers :

Mme Charbonnier, Mme Kuentz

Avocats :

Me Ruther, Me Renevey - Laissus, Me Millot-Morin, Me Stéphane

TGI Chalon sur Saône, du 15 janv. 2019, …

15 janvier 2019

FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES

Par acte authentique du 12 juillet 2013, M. et Mme [F] ont vendu à M. et Mme [I], avec le concours de l'agence immobilière société Cabinet [A] [U], un immeuble situé [Adresse 7] à [Localité 15] (71) moyennant le prix de 432 000 euros, bien qu'ils avaient eux mêmes acquis en septembre 2006.

Se plaignant d'infiltrations en provenance de la toiture, les époux [I] ont, par acte du 2 avril 2014, fait assigner en référé les vendeurs aux fins d'expertise judiciaire.

Par ordonnance du 27 mai 2014, le juge des référés a fait droit à leur demande et désigné M. [H] comme expert.

Par ordonnance du 12 mai 2015, rendue à la demande des époux [I], les opérations d'expertise ont été déclarées communes et opposables à la société Cabinet [A] [U].

L'expert a rendu son rapport le 17 février 2016.

Par actes des 20 et 22 juin 2016, M. et Mme [I] ont assigné M. et Mme [F] ainsi que la SARL Cabinet [A] [U] devant le tribunal de grande instance de Chalon sur Saône afin d'obtenir leur condamnation in solidum au paiement des sommes de 83 186,39 euros et 2 570,70 euros au titre des travaux de couverture et de linteau nécessaires à remédier aux désordres ainsi que des dommages-intérêts.

Par jugement du 15 janvier 2019, le tribunal judiciaire de Chalon sur Saône a :

- condamné M. et Mme [F] à payer à M. et Mme [I] les sommes suivantes':

* 85 757,09 euros et 3 366 euros en réparation de leur préjudice matériel,

* 10 000 euros en réparation de leur préjudice moral et de jouissance,

- rejeté la demande de M. et Mme [I] de dommages-intérêts formée à l'encontre du Cabinet [A] [U],

- rejeté la demande de M. et Mme [F] visant à être relevés et garantis par la SARL Cabinet [A] [U] de toute condamnation prononcée à leur encontre,

- débouté les parties du surplus de leurs demandes,

- condamné M. et Mme [F] à payer à M. et Mme [I] la somme de 1 800 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- rejeté la demande formulée par M. et Mme [F] au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné M. et Mme [F] aux entiers dépens en ce compris les frais d'expertise ('),

- ordonné l'exécution provisoire de la décision.

M. et Mme [F] ont relevé appel de cette décision par déclaration au greffe du 6 mars 2019.

Les époux [I] ont revendu, selon acte du 18 juillet 2019, le bien immobilier à Mme [O] et M. [J] qui sont intervenus à la procédure.

Par arrêt du 4 janvier 2022, la présente cour a infirmé le jugement et débouté les époux [I] de leurs demandes, les condamnant aux dépens.

Les époux [I] ont formé un pourvoi en cassation à l'encontre de cet arrêt.

Par arrêt du 23 novembre 2023, la 3ème chambre civile de la Cour de cassation a :

- cassé et annulé en toutes ses dispositions l'arrêt rendu le 4 janvier 2022 par la cour d'appel de Dijon

- mis hors de cause la société Cabinet [A] [U],

- remis l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les a renvoyées devant la cour d'appel de Dijon, autrement composée,

- condamné M. et Mme [F] aux dépens,

- en application de l'article 700 du code de procédure civile, rejeté la demande formée par les époux [F] et les a condamnés à payer à M. et Mme [I] la somme globale de 3 000 euros et à la société Cabinet [A] [U] la somme de 2 000 euros.

Les époux [F] ont saisi cette cour par déclaration du 22 janvier 2024.

Selon conclusions notifiées par voie électronique le 6 juin 2024, les époux [F] demandent à la cour de :

' Statuant sur leur appel interjeté à l'encontre du jugement rendu le janvier 2019 par le tribunal de grande instance de Chalon sur Saone,

- dire qu'il a été bien appelé, et mal jugé,

- en conséquence, réformer le jugement entrepris en toutes ses dispositions et statuant à nouveau,

' En ce qui concerne la demande au titre de la garantie des vices cachés à leur égard,

' A titre principal,

- déclarer que les conditions cumulatives des vices cachés ne sont pas remplies,

- en conséquence, réformer le jugement entrepris en ce qu'il les a condamnés sur le fondement des vices cachés à régler aux époux [I] les sommes suivantes :

. 85 757,09 euros au titre des travaux de couverture et du linteau,

. 3 366,00 euros au titre des travaux de réparation intérieurs,

. 10 000,00 euros à titre de réparation du préjudice moral et de jouissance,

- statuant à nouveau, débouter les époux [I] de l'intégralité de leurs demandes,

' A titre subsidiaire,

- déclarer que la clause exonératoire de garantie stipulée dans l'acte de vente du 12 juillet 2013 doit recevoir application,

- en conséquence, réformer le jugement entrepris en ce qu'il les a condamnés sur le fondement des vices cachés à régler aux époux [I] les sommes susvisées,

- statuant à nouveau, débouter les époux [I] de l'intégralité de leurs demandes,

' A titre infiniment subsidiaire,

- réformer le jugement entrepris en ce qu'il les a condamnés sur le fondement des vices cachés à régler aux époux [I] les sommes susvisées,

- déclarer que les époux [I] n'ont pas réalisé les travaux prescrits par l'expert judiciaire,

- déclarer que le époux [I] n'ont subi aucun préjudice de jouissance et moral correspondant à des travaux qu'ils n'ont pas réalisés,

- en conséquence, débouter les époux [I] en leur appel incident et les débouter l'intégralité de leurs demandes,

' En ce qui concerne la demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile et les dépens,

- réformer le jugement entrepris en ce qu'il les a condamnés à régler aux époux [I] la somme de 1 800 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et les dépens et ce compris les frais d'expertise judiciaire.

- statuant à nouveau, débouter les époux [I] en leurs demandes,

' En ce qui concerne la société Cabinet [A] [U], dans l'hypothèse d'une condamnation de leur part au profit des époux [I],

- réformer le jugement entrepris en ce qu'il les a déboutés de leurs demandes à l'encontre de la société Cabinet [A] [U],

- statuant à nouveau, déclarer que le Cabinet [A] [U] a manqué à son obligation de conseil,

- en conséquence, condamner la SARL Cabinet [A] [U] à les relever et garantir de toutes condamnations qui pourraient être prononcées à leur encontre tant en principal, intérêts, frais et dépens,

- condamner in solidum les époux [I] et la SARL Cabinet [A] [U], ou qui mieux d'entre eux le devra, à leur régler la somme de 12 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner enfin in solidum les époux [I] et la SARL Cabinet [A] [U], ou qui mieux d'entre eux le devra, aux dépens de première instance et d'appel, qui comprendront les frais de l'expertise judiciaire.

Selon conclusions notifiées le 3 mai 2024, les époux [I] demandent à la cour de':

> infirmer le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Chalon-sur-Saône le 15 janvier 2019 en ce qu'il a :

- condamné les seuls époux [F] (à l'exclusion du Cabinet [A] [U]) à leur verser au titre de leur préjudice matériel, la somme de 85 757,09 euros et la seule somme de 3 366 euros (au lieu de 3 906 euros réclamés) sans indexation,

- condamné les seuls époux [F] (à l'exclusion du Cabinet [A] [U]) à leur verser la seule somme de 10 000 euros en réparation de leur préjudice moral et de jouissance,

- rejeté leur demande de dommages et intérêts formée à l'encontre de la SARL Cabinet [A] [U],

- rejeté la demande des époux [F] visant à être relevés et garantis par la SARL Cabinet [A] [U] de toute condamnation prononcée à leur encontre,

- limité la somme allouée au titre de l'article 700 du code de procédure civile à 1 800 euros,

- débouté les parties du surplus de leurs demandes,

Statuant à nouveau,

Vu le rapport d 'expertise judiciaire de M. [H] du 17 février 2016,

Vu l'article 1641 du code civil,

Vu l'ancien article 1382 du code civil,

- condamner in solidum M. et Mme [X] [F] (solidairement entre eux) et la SARL Cabinet [A] [U] à leur payer, les sommes suivantes :

* Au titre du préjudice matériel :

- travaux de reprise en couverture (83 186,39 euros TTC) et linteau 2 570,70 euros : 85 757,09 euros TTC,

- travaux de réfection intérieurs : 3 906,00 euros TTC,

outre indexation en fonction de l'évolution de l'indice BT01 entre février 2016 et l'arrêt à intervenir,

* Au titre du préjudice de jouissance : 12 000 euros,

* Au titre du préjudice moral : 8 000 euros,

- condamner la SARL Cabinet [A] [U] à leur verser la somme de 18 000 euros à titre de dommages-intérêts correspondant aux frais d'agence acquittés,

- rejeter toutes demandes formées à leur l'encontre,

- condamner in solidum les époux [F] et la SARL Cabinet [A] [U] à leur verser la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile au titre de la procédure de 1ere instance et celle de 10 000 euros au titre de la procédure d'appel,

- condamner in solidum M. et Mme [X] [F] et la SARL Cabinet [A] [U] aux dépens comprenant ceux de référé, de 1ere instance et d'appel, et incluant les frais d'expertise judiciaire (M. [H] 5 845,04 euros / entreprise Barletta sapiteur 1 518 euros), outre les frais d'exécution provisoire (6 379,04 euros, dont distraction au profit de la SCP Galland & Associés, lesquels pourront les recouvrer conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile).

Selon conclusions notifiées le 24 mai 2024, la SARL Cabinet [A] [U] demande à la cour de':

- déclarer les époux [F] et les époux [I] irrecevables ou, à tout le moins mal fondés, en leurs demandes telles que dirigées à son encontre,

- en conséquence, les en débouter,

- condamner solidairement M. [X] [F], Mme [S] [F], M. [Y] [I] et Mme [M] [I] à lui payer la somme de 2 000 euros au titre des frais irrépétibles, ainsi qu'aux dépens.

En application de l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux conclusions des parties pour un exposé complet de leurs moyens.

La clôture a été prononcée le 11 juin 2024.

Sur ce la cour,

1/ Sur l'étendue de la saisine de la cour

La saisine de cette cour n'est pas étendue aux nouveaux propriétaires du bien. Les consorts [O]/[J] ne sont donc pas concernés par cette instance.

2/ Sur la recevabilité de la déclaration de saisine à l'égard de la société cabinet [U]

Au terme de leurs écritures, les époux [F] demandent notamment la condamnation de la SARL Cabinet [U] à les garantir de toutes condamnations qui pourraient être prononcées à leur encontre tandis que les consorts [I] demandent la condamnation in solidum de M. et Mme [F] et de la SARL Cabinet [U] à la prise en charge de leur préjudice matériel.

La SARL Cabinet [U] conclut à l'irrecevabilité de leurs demandes au motif que la Cour de cassation l'a mise hors de cause.

Selon l'article 625 alinéa 3 du code de procédure civile 'si elle en est requise, la Cour peut dans le dispositif de l'arrêt de cassation prononcer la mise hors de cause des parties dont la présence devant la cour de renvoi n'est plus nécessaire à la solution du litige'.

En l'espèce, par son arrêt du 23 novembre 2023, la Cour de cassation a mis hors de cause la société [A] [U] estimant ainsi que sa présence n'était plus nécessaire à la solution du litige devant le cour de renvoi.

La cour observe que les consorts [F], tout comme les consorts [I], ne soulèvent pas devant cette cour des moyens différents de ceux présentés devant la précédente pour mettre en cause la responsabilité de la SARL Cabinet [U].

Il résulte de ce qui précède que la déclaration de saisine est irrecevable en ce qu'elle est dirigée à l'encontre de la SARL Cabinet [U].

3/ Sur la demande au titre de la garantie des vices cachés dans les rapports entre les consorts [I] et les époux [F]

Selon l'article 1641 du code civil, le vendeur est tenu de la garantie à raison des défauts cachés de la chose vendue qui la rendent impropre à l'usage auquel on la destine, ou qui diminuent tellement cet usage que l'acheteur ne l'aurait pas acquise, ou n'en aurait donné qu'un moindre prix, s'il les avait connus.

L'article 1642 du même code prévoit que le vendeur n'est pas tenu des vices apparents et dont l'acheteur a pu se convaincre lui-même.

La cour observe, à l'instar des premiers juges, que l'existence des infiltrations alléguées de juillet et novembre 2013 est confirmée par le procès verbal de constat du 28 février 2014, les photographies produites mais également par le rapport d'expertise judiciaire.

Les effets de ces dernières ont été constatés au plafond du séjour, au droit des pannes, des tabatières, dans un local technique et dans les chambres ce qui démontre leur étendue.

L'expert judiciaire a relevé, lors de la visite de la couverture au moyen d'une nacelle et après exécution de sondages :

- la couverture est vétuste,

- la présence plus importante de mousse au droit de l'isolation intérieure,

- l'isolation n'est pas continue ce qui provoque des ponts thermiques,

- l'isolation touche les tuiles qui composent la couverture, son épaisseur est inadaptée à l'espace réservé,

- un manque de soin dans la pose de l'isolation (l'isolation est tassée entre le placoplatre et la couverture),

- la noue est incomplète (on voit les lattes à tuiles, il manque une surface de zinc) et elle n'est pas étanche,

- le linteau de la baie vitrée arrière est simplement composé d'un pré-linteau en béton, il manque le linteau porteur.

L'expert judiciaire conclut que les désordres constatés proviennent de malfaçons dans la mise en 'uvre de l'isolation et d'une méconnaissance dans les normes en vigueur.

Il estime que le développement rapide des mousses sur les pans de couvertures isolés est directement lié au manque de ventilation sous la couverture en tuile qui est source d'humidité constante dans les tuiles et précipite la destruction irréversible des éléments en terre cuite de la couverture (tuiles cassées et détériorées) tandis que les infiltrations dans la noue constituent un facteur aggravant.

Il ajoute que tous les désordres constatés concernant la couverture, l'isolation, la noue et le linteau affectent directement la solidité de l'habitation, la stabilité du linteau étant douteuse et un risque d'effondrement ne pouvant être exclu en cas de mouvement dans la structure de l'habitation.

La cour constate que les arguments des époux [F] visant à critiquer le rapport d'expertise sont sans incidence sur l'existence des vices.

En effet, le fait que l'expert ait pu prêter à M. et Mme [F] des propos selon lequels M. [F] avait remanié la toiture alors que seule Mme [F], assistée de son avocat, était présente aux opérations d'expertise, ne saurait remettre en cause l'existence des vices, seule leur connaissance pouvant être discutée.

De même, le fait que l'expert judiciaire ait pu relever un désordre (celui du linteau) qui n'était pas mentionné dans l'assignation en référé ne saurait remettre en cause les autres vices directement liés aux infiltrations dénoncées.

Enfin, le commentaire de M. [E], «'expert en construction -Immobilière'» sur le pré-rapport de M. [H], effectué de manière non contradictoire et sur pièce sans constatation in situ ne saurait en aucune manière remettre en cause les conclusions de l'expert judiciaire.

De même, l'avis technique de mai 2019 de M. [R], architecte DPLG, expert prés la cour d'appel de Dijon, donné après visite extérieure de la toiture du bâtiment plus de quatre ans après les réunions techniques d'expertise judiciaire et alors que le bien avait été revendu entre temps ne saurait davantage contredire les conclusions de l'expert judiciaire alors, au demeurant, que ces avis tendent essentiellement à marquer le caractère apparent des vices.

De même l'argument selon lequel durant le temps d'occupation du bien, les vendeurs n'auraient jamais subi d'infiltrations est inopérant dès lors que s'il est certain que les combles ont été aménagés ce qui a induit un remaniement de la toiture avec mise en place d'une isolation, aucune pièce n'a été produite par leurs soins pour déterminer la date de ces travaux qui ont été décrits comme récents par l'expert.

Les appelants, au regard des constatations de l'expert, ne peuvent valablement soutenir que les désordres étaient limités au droit de la noue et des tabatières, l'ensemble de la toiture étant concernée par une vétusté accélérée par le manque de ventilation.

Il en résulte que c'est à bon droit que les premiers juges, au regard des conclusions de l'expert, ont considéré que les désordres affectant la zinguerie, la couverture et le linteau de l'immeuble vendu rendaient ce dernier impropre à sa destination d'habitation en ce que la toiture ne remplit plus sa fonction comme n'étant pas étanche et que sa solidité est en cause s'agissant du linteau non conforme.

C'est par des motifs pertinents que la cour adopte que les premiers juges ont considéré que les premiers désordres étaient apparus quelques jours après la vente et que si les forts orages de juillet 2013 avaient pu permettre d'en déceler l'existence, ils n'en étaient pas pour autant la cause, les conditions climatiques n'ayant eu pour effet que d'amplifier les infiltrations générées par les désordres affectant la toiture.

Ils en ont justement déduit que les vices étaient antérieurs à la vente.

Enfin, il ressort du rapport d'expertise que pour visualiser les désordres et l'état de la toiture, l'expert a fait appel à un sapiteur avec une nacelle.

Si la présence de mousse était détectable par les époux [I] au moment de l'acquisition du bien, l'existence du désordre affectant la toiture cause d'un vieillissement accéléré n'était pas détectable par des profanes, qualité qui n'est pas déniée aux intimés de sorte que les premiers juges ont à bon droit retenu que les vices constatés n'étaient pas apparents.

Les consorts [F] invoquent encore l'existence d'une clause conventionnelle d'exclusion de garantie au sens de l'article 1643 du code civil.

La clause insérée à l'acte authentique du 12 juillet 2013 ne peut toutefois trouver à s'appliquer si les vendeurs ont la qualité de professionnel ou se sont comportés comme tel ou encore s'il est prouvé qu'ils n'ont pas révélé les vices connus par eux.

Il n'est pas contesté que les époux [F] ont effectué personnellement des travaux de rénovation intérieur du bien et que M. [F] a démoussé la toiture courant 2008.

L'expert judiciaire en page 12 de son rapport indique que selon les propos tenus lors de l'ouverture des opérations d'expertise et retranscrits dans le procès verbal de réouverture des opérations d'expertise :

«les époux [F] ont réalisé l'ensemble des travaux sans l'intervention d'entreprise, ils sont donc à la fois les maîtres de l'ouvrage, les maîtres d'oeuvre et les entreprises, notamment au niveau de la couverture et de la plâtrerie intérieure.»

«la toiture est d'origine mais M. [F] l'a remaniée en 2008 notamment il a nettoyé l'ensemble de la surface de la couverture pour enlever toutes les mousses et reposé quelques tuiles cassées.»

L'expert a constaté la présence de quelques tuiles plus récentes sur la toiture, confirmant l'intervention de M. [F] sur la couverture mais également que la noue était neuve.

L'expert en page 22 de son rapport ajoute qu'il n'y a aucun doute sur l'intervention de M. [F] sur les éléments de la couverture ainsi que sur la fourniture et la pose de l'isolation.

Les déclarations de l'expert judiciaire, qui est assermenté, ne sont contredites par aucun élément au dossier puisque les époux [F] ne produisent aucune pièce concernant les travaux qu'ils ont effectués sur le bien qui viendraient démontrer que les travaux d'isolation de la toiture et de reprise de la couverture ont été confiés à un professionnel.

Par ailleurs, si M. [F] explique être électricien et non professionnel du bâtiment tandis que Mme [F] est décoratrice d'intérieur, il ressort pourtant d'une revue (Stemp) que le couple [F] travaille en équipe (M. [F] étant chargé des travaux de bâtiment et Mme [F] des travaux de décoration), M. [F] étant présenté au terme du magazine comme chef d'entreprise dans le bâtiment depuis 20 ans.

L'activité déclarée au registre du commerce et des sociétés de la SARL E2CA, dont M. [F] est gérant, est «toutes prestations de service et plus particulièrement en travaux électriques».

Il en résulte qu'alors que M. [F], qui est incontestablement un professionnel du bâtiment, a réalisé les travaux d'isolation à l'origine des désordres constatés constitutifs de vices cachés au sens de l'article 1641 du code civil, il ne peut valablement soutenir avoir ignoré les vices et les appelants ne peuvent être considérés comme étant de bonne foi de sorte qu'ils sont tenus à la garantie des vices cachés.

4/ Sur le préjudice et son indemnisation

Les époux [I] demandent la condamnation des appelants à leur régler le coût des travaux de reprise en couverture (83 186,39 euros) et du linteau (2 570,70 euros), le montant des travaux de réfection intérieur (3 906 euros TTC), outre indexation, ainsi que la réparation des préjudices de jouissance et moral.

Or, il est constant que les époux [I] ont revendu le bien immobilier litigieux selon acte du 18 juillet 2019.

Ils expliquent à l'appui de leur demande d'indemnisation qu'ils ont subi ces infiltrations pendant leur temps d'occupation de l'immeuble et revendu 330 000 euros un bien qu'ils ont acquis au prix de 450 000 euros.

Ils ajoutent qu'ils auraient pu faire le choix, concernant le préjudice matériel, de solliciter le paiement de la somme de 120 000 euros, correspondant à la différence entre ces deux prix, mais que pour éviter toute contestation, ils s'en réfèrent au chiffrage retenu par l'expert au titre des travaux de reprise.

Or, le préjudice subi par les époux [I], qui ne justifient aucunement avoir engagé des travaux de réparation des vices constatés avant de revendre le bien litigieux, s'analyse en une perte de chance de vendre le bien à un meilleur prix et ce d'autant que le mandat de vente donné à l'agence immobilière d'abord signé pour 490 000 euros en 2016 a été finalement réduit au prix de 349 000 euros en septembre 2018, le bien été finalement vendu au prix de 330 000 euros en juillet 2019.

Ce point n'ayant pas été soumis au débat contradictoire, la cour ordonne la réouverture des débats afin de permettre aux parties de donner leurs observations.

Il y a donc lieu dans l'attente de surseoir sur le préjudice des intimés et de réserver les dépens.

PAR CES MOTIFS

La cour, dans les limites de sa saisine,

Déclare irrecevable la déclaration de saisine en ce qu'elle est dirigée à l'encontre de la SARL Cabinet [U],

Constate que le bien immobilier est affecté de vices cachés au sens de l'article 1641 du code civil,

Dit que les consorts [F] sont tenus à la garantie des vices cachés,

Met dans les débats la question de la nature du préjudice des époux [I], constitué d'une perte de chance de revendre le bien à un meilleur prix que celui obtenu,

Ordonne la réouverture des débats, les parties étant invitées à prendre de nouvelles conclusions, notamment pour présenter leurs observations sur ce point :

- pour le 15 novembre 2024 s'agissant des époux [I]

- pour le 10 janvier 2025 s'agissant des époux [F],

Réserve les dépens et les demandes accessoires.