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Décisions

CA Paris, Pôle 4 ch. 5, 25 septembre 2024, n° 22/19218

PARIS

Arrêt

Infirmation partielle

PARTIES

Demandeur :

Trigone (SCI)

Défendeur :

Suez RV Yonne Metaux (SASU), Trigone (SA)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Jariel

Vice-président :

Mme Delacourt

Conseiller :

Mme Szlamovicz

Avocats :

Me Boccon Gibod, Me Bourgoin, Me Grappotte-Benetreau, Me Grobon

T. com. Auxerre, du 18 sept. 2017, n° 20…

18 septembre 2017

EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCEDURE

Le 4 mars 1996, par arrêté, le préfet de l'Yonne a autorisé le gérant de la société Dechets'tri 89, à exploiter un centre de tri de déchets industriels banals, à [Localité 17] (Yonne), sur un terrain cadastré section AE, parcelles n° [Cadastre 13], [Cadastre 14] et [Cadastre 2] au [Adresse 1], appartenant à la société civile immobilière Trigone.

Le 25 juin 1996, le préfet de l'Yonne a donné récépissé au directeur de la société anonyme Trigone de sa déclaration attestant de sa qualité de nouvel exploitant du centre de tri de déchets banals.

Le 3 septembre 1996, la société Natio énergie a pris à bail avec autorisation de construire, le terrain appartenant à la société civile immobilière Trigone.

Les 12 et 16 décembre 2008, la société civile immobilière Trigone a conclu avec la société anonyme Trigone un contrat de bail commercial portant sur l'immeuble cadastré section AE numéros [Cadastre 13], [Cadastre 14] et [Cadastre 2] pour un usage de centre de tri de déchets industriels banals, moyennant un loyer annuel de 45 000 euros HT, soit 15 000 euros HT par trimestre (ou encore 3 750 euros HT par mois) à effet au 15 novembre 2008.

Depuis 1996, la société anonyme Trigone a donc exploité sur ce site un fonds de négoce, de récupération et de recyclage de déchets industriels banals et des matières premières secondaires, activités relevant de la législation sur les installations classées pour la protection de l'environnement (ICPE).

Le 3 septembre 2010, lors de l'assemblée générale extraordinaire, les actionnaires de la société anonyme Trigone ont décidé sa dissolution et sa mise en liquidation amiable.

Ils ont désigné la société [L]-Carboni (Me [L]) en qualité de liquidateur amiable.

Dans le cadre de cette liquidation :

- le fonds de commerce de la société anonyme Trigone a été cédé à la société Shamrock environnement, actionnaire, par actes des 15 octobre et 8 novembre 2010 sans reprise du droit au bail,

- le bail des 12 et 16 décembre 2008 conclu avec la société civile immobilière Trigone a été résilié par anticipation par acte du 20 mars 2012, avec effet au 31 mars 2012.

Le 22 juin 2012, la société civile immobilière Trigone a fait dresser un procès-verbal de constat pour établir l'état des lieux, au motif que la société anonyme Trigone avait donné congé sans remettre les clés.

Le 15 janvier 2013, par décision de son associé unique, afin de permettre la clôture des opérations de liquidation de la société anonyme Trigone, la société Shamrock environnement s'est substituée à celle-ci dans toutes ses obligations vis-à-vis de la société civile immobilière Trigone.

Le 19 décembre 2014, par courriers recommandés, la société Shamrock environnement a notifié au préfet de l'Yonne, au maire de [Localité 17] et à la société civile immobilière Trigone la mise à l'arrêt définitif de l'ensemble de ses activités sur l'installation située [Adresse 1], indiquant que ces activités avaient " fait l'objet d'une cessation complète ".

Le 19 mars 2015, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, la société civile immobilière Trigone, arguant du non-respect par la société anonyme Trigone de ses obligations, de l'absence de libération des lieux, l'a mise en demeure de lui régler des indemnités d'occupation.

Le même jour, elle a adressé par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, une copie de ce courrier à la société Shamrock environnement.

Le 27 octobre 2015, la société civile immobilière Trigone a fait assigner en indemnisation de son préjudice devant le tribunal de commerce d'Auxerre, la société anonyme Trigone, représentée par son liquidateur la société [L]-Carboni, devenue la société Bauland-Carboni-Martinez & associés, et la société Suez RV Yonne métaux, anciennement Shamrock environnement.

Le 1er décembre 2015, la société [L]-Carboni a démissionné de son mandat de liquidateur amiable de la société anonyme Trigone.

Par jugement du 18 septembre 2017, le tribunal de commerce d'Auxerre a statué en ces termes:

Met hors de cause la société [L]-Carboni, devenue la société Bauland-Carboni-Martinez & associé, celle-ci n'est plus le liquidateur amiable de la société Trigone,

Prend acte que les clés des locaux n'ont toujours pas été restituées à la société civile immobilière Trigone,

Condamne in solidum la société Suez RV Yonne métaux anciennement Shamrock environnement et la société anonyme Trigone à payer à la société civile immobilière Trigone la somme de cent onze mille quarante euros et quatre-vingt-dix-neuf centimes (111 040,99 euros) au titre des travaux de réfection des systèmes électriques et de chauffage,

Condamne in solidum la société Suez RV Yonne métaux anciennement Shamrock environnement et la société anonyme Trigone à payer à la société civile immobilière Trigone la somme de cinquante mille euros (50 000 euros) pour la période du 1er avril 2012 au 31 décembre 2014,

Condamne in solidum la société Suez RV Yonne métaux anciennement Shamrock environnement et la société anonyme Trigone à payer à la société civile immobilière Trigone la somme de trente mille euros (30 000 euros) pour la période du 1er janvier 2015 au 31 décembre 2016,

Condamne in solidum la société Suez RV Yonne métaux anciennement Shamrock environnement et la société anonyme Trigone à payer à la société civile immobilière Trigone la somme de trente-trois mille neuf cent cinquante-quatre euros (33 954 euros) au titre de la taxe foncière 2013, 2014, 2015 et 2016,

Dit que ces sommes porteront intérêts à compter de notre décision,

Dit qu'il n'y a pas lieu à capitalisation des intérêts,

Condamne la société Suez RV Yonne métaux anciennement Shamrock environnement à payer une indemnité mensuelle de trois mille sept cent cinquante euros HT (3750 euros HT) à la société civile immobilière Trigone à compter du 1er janvier 2017 et ce, jusqu'à ce qu'elle ait satisfait à ses obligations réglementaires au titre de la police des ICPE au moyen d'une confirmation écrite du préfet de l'Yonne,

Condamne in solidum la société Suez RV Yonne métaux anciennement Shamrock environnement et la société anonyme Trigone à payer à la société civile immobilière Trigone la somme de trois mille euros (3 000 euros) au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne in solidum la société Suez RV Yonne métaux anciennement Shamrock environnement et la société anonyme Trigone aux dépens.

Le 27 octobre 2017, la société Suez RV Yonne métaux et la société anonyme Trigone ont interjeté appel de ce jugement intimant la société civile immobilière Trigone devant la cour d'appel de Paris.

Par arrêt du 31 mars 2021, la cour d'appel de Paris a statué en ces termes :

Confirme le jugement en ce qu'il a mis hors de cause la société [L]-Carboni, devenue la société Bauland-Carboni-Martinez & associés,

Infirme le jugement en toutes ses autres dispositions,

Statuant à nouveau et y ajoutsant,

Condamne la société Suez RV Yonne métaux à payer à la société civile immobilière Trigone la somme de 74 423,47 euros TTC en réparation du préjudice subi du fait de la détérioration de l'installation de chauffage du bâtiment de bureaux restitué,

Déboute la société civile immobilière Trigone du surplus de ses demandes et de sa demande supplémentaire d'indemnisation d'une perte de valeur de son bien,

Condamne la société civile immobilière Trigone aux dépens de première instance et d'appel,

Condamne la société civile immobilière Trigone à payer à la société Suez RV Yonne métaux la somme de 6 000 euros en indemnisation de ses frais irrépétibles de première instance et d'appel.

Par arrêt du 21 septembre 2022 (pourvoi n° 21-17.431), la troisième chambre civile de la Cour de cassation a statué en ces termes :

Casse et annule, mais seulement en ce qu'il rejette les demandes de la société civile immobilière Trigone en paiement d'une indemnité d'occupation pour la période comprise entre le 1er avril 2012 et le 31 août 2018, en remboursement de la taxe foncière et en indemnisation de la perte de valeur de son bien, l'arrêt rendu le 31 mars 2021, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;

Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Paris autrement composée ;

Condamne la société anonyme Trigone et la société Suez RV Yonne métaux aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société anonyme Trigone et la société Suez RV Yonne métaux et les condamne à payer à la société civile immobilière Trigone somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé.

Par déclaration du 10 novembre 2022, la société civile immobilière Trigone a saisi la cour d'appel de Paris, en tant que cour de renvoi.

EXPOSE DES PRÉTENTIONS DES PARTIES

Dans ses conclusions notifiées par voie électronique le 9 janvier 2023, la société civile immobilière Trigone demande à la cour de :

Confirmer la décision du tribunal de commerce d'Auxerre en ce qu'elle a reconnu la responsabilité des sociétés Suez RV Yonne Métaux et société anonyme Trigone et, dans ce contexte :

Constater que la société Suez RV Yonne Métaux (anciennement dénommée Shamrock environnement) s'est engagée à reprendre tous les engagements et obligations de la société anonyme Trigone vis-à-vis de la société civile immobilière Trigone,

Constater que la société anonyme Trigone n'a pas restitué les locaux loués (ni les clefs) à ce jour,

Constater que la société anonyme Trigone est responsable des dégradations constatées selon constat d'huissier du 22 juin 2012,

Constater que la société Suez RV Yonne Métaux ne démontre pas avoir satisfait aux obligations lui incombant au titre de la police des installations classées pour la protection de l'environnement en ce qui concerne tant la date de notification en préfecture de la mise à l'arrêt définitif de ses installations classées que les mesures de mise en sécurité et de remise en état du site ;

Constater que la société civile immobilière Trigone a subi un préjudice du fait des dégradations constatées, de l'absence de remise en état des biens loués, de l'indisponibilité des locaux loués résultant notamment du non-respect par la société anonyme Trigone de ses obligations au titre de l'article 1732 du code civil et du contrat de bail de 2008, et du non-respect par la société Suez RV Yonne Métaux de ses obligations au titre de la police des installations classées pour la protection de l'environnement ;

Réformer la décision du tribunal de commerce d'Auxerre sur le quantum de l'indemnisation et, statuant à nouveau, condamner in solidum la société Suez RV Yonne Métaux et la société anonyme Trigone à indemniser la société civile immobilière Trigone de l'intégralité de son préjudice et, en conséquence :

Condamner in solidum la société Suez RV Yonne Métaux et la société anonyme Trigone à payer à la société civile immobilière Trigone les sommes suivantes :

- 265 423 euros de dommages et intérêts du fait de la perte de valeur des biens immobiliers,

- 288 750 euros de dommages et intérêts du fait du non-respect de la procédure de cessation d'activité et de l'indisponibilité des locaux loués pour la période comprise entre le 1er avril 2012 et le 31 août 2018,

- 55 420 euros de dommages et intérêts au titre du remboursement de la taxe foncière ;

Dire et juger que ces sommes porteront intérêt au taux légal à compter du 19 mars 2015 ou, subsidiairement, à compter de la date du jugement du tribunal de commerce d'Auxerre ou de celle de l'arrêt à intervenir ;

Ordonner la capitalisation annuelle des intérêts et dire que les intérêts capitalisés produiront eux-mêmes intérêts, conformément aux dispositions de l'article 1154 du code civil ;

Condamner in solidum la société Suez RV Yonne Métaux et la société anonyme Trigone à payer à la société civile immobilière Trigone la somme de 10 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamner in solidum la société Suez RV Yonne Métaux et la société anonyme Trigone aux entiers dépens de première instance et d'appel.

Dans leurs conclusions notifiées par voie électronique le 7 mars 2023, la société Suez RV Yonne métaux et la société anonyme Trigone demandent à la cour de :

Réformant le jugement déféré en ce qu'il a :

- Dit qu'il ne peut être tenu compte du diagnostic réalisé en 2007, que la preuve n'était pas rapportée d'un nouveau diagnostic et qu'il incombait à la société Suez RV Yonne métaux, anciennement Shamrock environnement de remettre le site en état,

- Dit que les clefs des locaux n'ont toujours pas été restituées à la société civile immobilière Trigone,

- Condamné in solidum la société Suez RV Yonne métaux, anciennement Shamrock environnement et la société anonyme Trigone à payer à la société civile immobilière Trigone :

- 111 040,99 euros au titre des travaux de réfection des systèmes électriques et de chauffage,

- 50 000 euros pour la période du 1er avril 2012 au 31 décembre 2014,

- 30 000 euros pour la période du 1er janvier 2015 au 31 décembre 2016,

- 33 954 euros au titre de la taxe foncière 2013, 2014, 2015 et 2016,

- 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- Condamné la société Suez RV Yonne métaux, anciennement Shamrock environnement, à payer une indemnité mensuelle de 3 750 euros HT à la société civile immobilière Trigone à compter du 1er janvier 2017 et ce, jusqu'à ce qu'elle ait satisfait à ses obligations règlementaires au titre de la police ICPE au moyen d'une confirmation écrite du préfet de l'Yonne,

- Condamné in solidum la société Suez RV Yonne métaux, anciennement Shamrock environnement et la société anonyme Trigone aux entiers dépens,

Et, déboutant la société civile immobilière Trigone de son appel incident ainsi que de ses demandes actualisées en cause d'appel et statuant à nouveau,

Dire et juger que les demandes présentées par la société civile immobilière Trigone ne sont ni fondées ni justifiées et la débouter de l'intégralité de ses demandes,

Condamner la société civile immobilière Trigone à payer à la société Suez RV Yonne métaux, anciennement Shamrock environnement une indemnité de 8 000 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile

Condamner la société civile immobilière Trigone aux entiers dépens dont distraction au profit de la société Grappotte Benetreau en application de l'article 699 du code de procédure civile.

La clôture a été prononcée par ordonnance du 12 mars 2024 et l'affaire a été appelée à l'audience du 12 mars 2024, à l'issue de laquelle elle a été mise en délibéré.

MOTIVATION

Sur les obligations de la société anonyme trigone découlant du bail commercial

Moyens des parties

La société civile immobilière Trigone fait valoir que le contrat d'arrêt du 20 mars 2012 qui a fixé la date de résiliation anticipée du bail au 31 mars 2012 prévoyait uniquement le règlement du passif mais ne contenait aucune exonération, expresse ou tacite, concernant les obligations du locataire avant ou après la résiliation effective du contrat.

Il n'était aucunement prévu que le bailleur reprenne le bien en l'état, les parties s'accordant seulement sur le fait de ne pas établir d'état des lieux.

Elle soutient que les lieux n'ont pas été libérés par la société preneuse qui certes les a quittés mais ne les a pas restitués au propriétaire en lui remettant les clefs.

Elle fait valoir que la vente intervenue en septembre 2018 ne dispensait pas la société anonyme Trigone, aux droits de laquelle se trouve la société Shamrock Environnement devenue Suez RV Yonne métaux, de l'indemniser au titre de son occupation des lieux.

Elle réclame ainsi 288 750 euros à titre de dommages et intérêts du fait du non-respect de la procédure de cessation d'activité et de l'indisponibilité des lieux loués pour la période comprise du 1er avril 2012 au 31 août 2018 qu'elle calcule sur la base du loyer mensuel et la taxe foncière sur les années correspondantes pour 55 420 euros.

La société Suez RV Yonne métaux et la société anonyme Trigone représentée par son liquidateur amiable M. [C] [M] rappellent que la société civile immobilière Trigone n'est propriétaire que de trois parcelles sur le site ICPE et qu'elle opère une confusion avec les parcelles [Cadastre 4], [Cadastre 5], [Cadastre 6], [Cadastre 7] et [Cadastre 8] appartenant à la société anonyme Trigone.

Elles soutiennent que l'acte d'arrêt par anticipation du bail limitait les obligations de la société anonyme Trigone au 31 mars 2012.

Cet acte ne permettait pas la poursuite du contrat de bail d'origine mais réglait définitivement la situation entre les parties et que la société civile immobilière Trigone a ainsi repris ses biens sans réserve.

Réponse de la cour

Le bail commercial des 12 et 16 décembre 2008

L'acte sous seing privé identifie les parcelles louées par la société civile immobilière Trigone à la société anonyme Trigone au sein de l'emprise ICPE et ces parcelles sont identifiables sur les plans produits par les intimées.

Le moyen tenant à la confusion existant entre les parcelles sur le site ne peut donc prospérer.

La portée de l'arrêt par anticipation du bail du 20 mars 2012

Selon l'article 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 applicable en raison de la date du contrat de bail et de l'accord d'arrêt par anticipation, les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites et doivent être exécutées de bonne foi.

Selon l'article L. 145-4, alinéa 1er du code de commerce, dans sa version en vigueur du 16 juillet 2006 au 20 juin 2014, compte tenu de la date de la convention entre les parties, la durée du contrat de location ne peut être inférieure à neuf ans.

En l'espèce, l'accord entre la société civile immobilière Trigone et la société anonyme Trigone en date du 20 mars 2012 a eu exclusivement pour objet de mettre fin au bail commercial sans attendre l'expiration du délai de 9 ans.

Cet accord est intervenu du fait de la dissolution amiable de la société anonyme Trigone décidée le 3 septembre 2010.

En fixant la date de fin du bail au 31 mars 2012, les parties ont prévu dans l'acte des modalités pratiques de départ de la société anonyme Trigone qui devait s'effectuer onze jours après sa signature.

C'est par une interprétation erronée que les intimées entendent donner à cette convention d'arrêt par anticipation une portée qu'elle n'a pas, puisqu'elle se borne à modifier le terme du bail commercial initial sans le modifier dans ses autres clauses.

La preuve de la libération des lieux

Selon l'article 1737 du code civil, le bail cesse de plein droit à l'expiration du terme fixé, lorsqu'il a été fait par écrit, sans qu'il soit nécessaire de donner congé.

C'est la remise des clés au domicile du bailleur ou de son représentant qui matérialise la restitution des lieux loués (3e Civ., 16 mars 2023, pourvoi n° 21-25.002 ; 3e Civ., 13 octobre 1999, pourvoi n° 97-21.683, Bull. civ. 1999, III, n° 202) et le simple fait consistant pour le locataire, à quitter matériellement le logement ne le libère pas de ses obligations ne s'agissant pas d'une restitution régulière et légitime des locaux loués.

En l'espèce, il appartient aux intimées de rapporter la preuve de la remise des clés au bailleur au 31 mars 2012 ou à tout autre moment permettant de fixer la date de restitution des lieux loués.

Les intimées ne rapportent pas la preuve qu'elles ont rempli cette obligation de restitution et l'absence d'état des lieux de sortie convenue entre les parties ne pouvait les dispenser de cette obligation.

La date de la libération des lieux et le préjudice de la société civile immobilière Trigone

Il est constant que le preneur se maintenant dans les lieux postérieurement à la résiliation du bail est redevable d'une indemnité d'occupation laquelle constitue la contrepartie de la jouissance des lieux (Ch. mixte, 9 novembre 2007, pourvoi n° 06-19.508, Bull. 2007, Ch. Mixte, n° 10 ; 3e Civ.,18 novembre 2014, pourvoi n° 13-21.652 ; 3e Civ., 4 juillet 2019, pourvoi n° 18-15.082).

Il ne peut ainsi être reproché au bailleur de ne pas s'être montré diligent pour prendre possession de son bien (3e Civ., 15 juin 2004, pourvoi n° 03-14.285).

En l'espèce, la société civile immobilière Trigone a vendu les parcelles AE n° [Cadastre 13] et [Cadastre 14] à la commune de [Localité 17] par acte notarié du 4 septembre 2018 et les parcelles AE n° [Cadastre 9], [Cadastre 10] et [Cadastre 11] provenant d'une division de la parcelle originairement cadastrée AE n° [Cadastre 2], dont l'acquéreur a pris possession le même jour.

Il s'en infère qu'à cette date seulement, il est établi que les lieux appartenant à la société civile immobilière Trigone et loués à la société anonyme Trigone étaient libres de toute occupation.

S'agissant de son préjudice, la société civile immobilière Trigone réclame la somme de 288 750 euros à titre de dommages et intérêts au regard de l'indisponibilité des locaux pour la période allant du 1er avril 2012 au 31 août 2018.

Le calcul proposé correspond au montant des loyers sur la période d'indisponibilité, l'indemnité d'occupation sera donc fixée à la somme de 288 750 euros du 1er avril 2012 au 31 août 2018.

S'agissant des taxes foncières, le bail commercial prévoit que le bailleur rembourse chaque année la totalité de la taxe foncière concernant les lieux loués.

Il est mentionné dans l'acte d'arrêt par anticipation de 2012, que la taxe foncière de 2012 a été versée à sa signature.

La société civile immobilière Trigone justifie du paiement des taxes foncières sur les périodes de 2013 à 2018 pour 52 735 euros.

En conséquence, c'est par une juste appréciation que le tribunal de commerce a condamné in solidum la société anonyme Trigone et la société Suez RV Yonne métaux à indemniser la société civile immobilière Trigone du fait de l'indisponibilité des locaux et au titre de la taxe foncière mais il sera infirmé en ce qui concerne le quantum lequel sera fixé à 288 750 euros au titre de l'indemnité d'occupation.

Les taxes foncières de 2017 et 2018 seront ajoutées à hauteur de 18 781 euros.

Sur l'obligation légale au titre de la police des ICPE

Moyen des parties

La société civile immobilière Trigone forme sa demande sur le fondement de l'article 1382, devenu 1240 du code civil pour solliciter la condamnation des intimées à lui payer la somme de 265 423 euros de dommages et intérêts du fait de la perte de valeur des biens immobiliers.

Elle soutient qu'en application de l'article L. 512-6-1 du code de l'environnement, le dernier exploitant d'une installation classée pour la protection de l'environnement (ICPE) doit remettre en état le site ayant accueilli l'installation tel qu'il ne s'y manifeste aucun danger ou inconvénients pour l'environnement, la santé publique ou le voisinage.

Elle fait valoir que l'exploitant n'a fourni aucun justificatif de cette remise en état, le diagnostic des sols de 2007 produit ne pouvant remplir cette justification et ce d'autant qu'elle ne concerne pas les parcelles de la société civile immobilière Trigone, mais celle de la société anonyme Trigone.

Elle soutient également que la société Shamrock environnement qui exploitait le site n'a pas fourni au préfet les documents réclamés concernant la reconnaissance de la qualité des sols.

Pour établir l'estimation de la perte de valeur du bien, elle procède à trois estimations sur la base desquelles elle calcule une valeur moyenne entre l'estimation la plus basse et celle la plus haute et une valeur médiane par l'application d'une moyenne entre les trois estimations.

La société anonyme Trigone et la société Suez RV Yonne métaux contestent être à l'origine de la perte de valeur puisque le bailleur avait accepté la remise des lieux en l'état sans procéder à un état des lieux.

Elles font valoir qu'elles n'ont pris aucun engagement concernant le devenir des terrains appartenant à la société civile immobilière Trigone compte tenu de la restitution effective opérée à son profit.

Elles soutiennent que le dossier de cessation d'activité faisait état d'un site propre et vidé de ses derniers déchets résiduels ainsi que d'une absence de pollution des sols et des eaux ainsi qu'en atteste le dossier établi en mars 2007 par la société Tauw.

Elles font valoir que la société civile immobilière Trigone n'a jamais fait procéder à des travaux dans les locaux dont elle avait repris la libre disposition.

Elles soutiennent que la société civile immobilière Trigone a vendu le bien à la commune au prix du marché et qu'elle ne peut pas s'appuyer sur l'estimation des biens de 2008 réalisée par la société L.2H qui n'avait pour objet qu'une valorisation de ses parts.

Elles contestent la méthode de calcul de la société civile immobilière Trigone en ce qui concerne les estimations de perte de valeur du bien qui retient notamment les travaux de la commune, s'agissant d'éléments non objectifs.

Réponse de la cour

L'obligation légale à la charge de la société Shamrock environnement

Aux termes de l'article L. 512-6-1, alinéa 1er et 2, du code de l'environnement, dans sa version en vigueur du 13 juin 2009 au 1er mars 2017, lorsque l'installation soumise à autorisation est mise à l'arrêt définitif, son exploitant place son site dans un état tel qu'il ne puisse porter atteinte aux intérêts mentionnés à l'article L. 511-1 et qu'il permette un usage futur du site déterminé conjointement avec le maire ou le président de l'établissement public de coopération intercommunale compétent en matière d'urbanisme et, s'il ne s'agit pas de l'exploitant, le propriétaire du terrain sur lequel est sise l'installation.

A défaut d'accord entre les personnes mentionnées au premier alinéa, lorsque l'installation est mise à l'arrêt définitif, son exploitant place son site dans un état tel qu'il ne puisse porter atteinte aux intérêts mentionnés à l'article L. 511-1 et qu'il permette un usage futur du site comparable à celui de la dernière période d'exploitation de l'installation mise à l'arrêt.

Aux termes de l'article L. 511-1, alinéa 1er, du même code, dans sa rédaction en vigueur du 1er mars 2011 au 25 août 2021, sont soumis aux dispositions du présent titre les usines, ateliers, dépôts, chantiers et, d'une manière générale, les installations exploitées ou détenues par toute personne physique ou morale, publique ou privée, qui peuvent présenter des dangers ou des inconvénients soit pour la commodité du voisinage, soit pour la santé, la sécurité, la salubrité publiques, soit pour l'agriculture, soit pour la protection de la nature, de l'environnement et des paysages, soit pour l'utilisation rationnelle de l'énergie, soit pour la conservation des sites et des monuments ainsi que des éléments du patrimoine archéologique.

L'article R. 512-39-1 de ce code, dans sa version en vigueur du 12 juillet 2011 au 1er juin 2022, dispose :

" I.- Lorsqu'une installation classée soumise à autorisation est mise à l'arrêt définitif, l'exploitant notifie au préfet la date de cet arrêt trois mois au moins avant celui-ci. Ce délai est porté à six mois dans le cas des installations visées à l'article R. 512-35. Il est donné récépissé sans frais de cette notification.

II.- La notification prévue au I indique les mesures prises ou prévues pour assurer, dès l'arrêt de l'exploitation, la mise en sécurité du site. Ces mesures comportent, notamment :

1° L'évacuation des produits dangereux, et, pour les installations autres que les installations de stockage de déchets, gestion des déchets présents sur le site ;

2° Des interdictions ou limitations d'accès au site ;

3° La suppression des risques d'incendie et d'explosion ;

4° La surveillance des effets de l'installation sur son environnement.

III.- En outre, l'exploitant doit placer le site de l'installation dans un état tel qu'il ne puisse porter atteinte aux intérêts mentionnés à l'article L. 511-1 et qu'il permette un usage futur du site déterminé selon les dispositions des articles R. 512-39-2 et R. 512-39-3. "

Aux termes de l'article 1382, devenu 1240 du code civil, tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.

La remise en état d'un site pollué imposée, par les dispositions de l'article 34-1 du décret du 21 septembre 1977 pris en application de la loi du 19 juillet 1976, au dernier exploitant de l'installation classée, résultant d'une obligation légale particulière, est à la charge du locataire, dernier exploitant (3e Civ., 2 avril 2008, pourvoi n° 07-12.155, 07-13.158, Bull. 2008, III, n° 63 ; 3e Civ., 19 mai 2010, pourvoi n° 09-15.255, Bull. 2010, III, n° 101).

L'obligation administrative est une mesure de police administrative distincte d'une l'obligation de remise en état au titre du contrat de bail.

L'arrêt définitif de l'installation constitue le fait générateur de la remise en état.

La déclaration de cessation d'activité déclenche l'obligation de remise en état, sans qu'il y ait besoin d'une mise en demeure (3e Civ., 16 janvier 2013, pourvoi n° 11-27.101, Bull. 2013, III, n° 4).

Le non-respect de cette obligation qui répond à un intérêt général de conservation et de protection du sol, est constitutif d'une faute et engage la responsabilité quasi-délictuelle de l'exploitant à l'égard du propriétaire du terrain ou des tiers (3e Civ., 15 décembre 2010, pourvoi n° 09-70.538, Bull. 2010, III, n° 223 ; 3e Civ., 16 mars 2005, pourvoi n° 03-17.875, Bull. 2005, III, n° 67).

En l'espèce, l'emprise cadastrale de l'ICPE inclut les parcelles AE [Cadastre 13], [Cadastre 14] et [Cadastre 2] de la société civile immobilière Trigone et le dernier exploitant est la société Shamrock environnement, devenue Suez RV Yonne métaux, laquelle est seule responsable de l'exécution de l'obligation.

Aucune demande de condamnation in solidum ne peut donc dans le cas présent, être sollicitée.

Par lettres recommandées avec demande d'avis de réception en date du 19 décembre 2014, la société Shamrock environnement a notifié au préfet de l'Yonne, à la société immobilière Trigone, au maire de [Localité 17], la mise en arrêt définitif de l'ensemble de ses activités sur son installation sise [Adresse 1] à [Localité 17] en application de l'article R. 512-39-1 du code de l'environnement.

A cette notification, était joint un dossier présentant notamment les mesures prises ou prévues pour assurer la mise en sécurité du site, la gestion des déchets présents sur le site, les interdictions et limitations d'accès au site ainsi que la suppression des risques éventuels.

Le service environnement de la préfecture de l'Yonne a répondu le 26 janvier 2016, que les opérations de mises en sécurité des installations avaient bien été réalisés conformément à l'article R. 512-39-1 du code de l'environnement, que l'ensemble des déchets avait été évacué, les risques d'incendie et d'explosion supprimés et que le site était inaccessible.

Une réserve était émise concernant la qualité des sols puisque l'étude de 2007, qui n'avait pas mis en évidence de source de pollution nécessitant des travaux de dépollution était jugée insuffisante et devait être mise à jour et complétée sur plusieurs parcelles dont la parcelle AE [Cadastre 2].

Pour répondre à la demande du préfet, la société Shamrock environnement, seule débitrice de l'obligation légale, produit un rapport d'activité d'octobre 2016 intitulé " remédiation sites et sols pollués " relatif au site Shamrock environnement situé [Adresse 16] à [Localité 17] réalisé par Suez RR IWS (Industrial Waste Specialties) Remediation France concernant l'emprise ICPE et notamment les parcelles [Cadastre 13], [Cadastre 14] et [Cadastre 2].

Ce rapport a été transmis au préfet par lettre recommandée avec demande d'avis de réception le 25 octobre 2016.

Il fait état de trois sondages à 2 m de profondeur effectués le 25 juillet 2016, dont un est effectué dans la section AE [Cadastre 2] et analyses des sols pour les paramètres HC C10-C40 (hydrocarbures), BTEX (Benzène B, Toluène T, Éthylbenzène E, Xylènes X), HAP 5 Hydrocarbures aromatiques polycycliques), COHV(Composés Organiques Halogénés Volatils) et métaux.

Il conclut que les résultats d'analyses concernant les sondages S1 et S2, ont mis en évidence l'absence d'impact significatif au droit du site sous réserve de deux anomalies en cuivre et une teneur modérée en HAP qui sont présentes dans les sols.

Aucune mention spécifique ne concerne les seuils d'analyses du sondage S3 effectué sur la parcelle [Cadastre 2].

La cour considère que ce rapport n'établit pas que la société Shamrock environnement a rempli son obligation de remise en état en ce que :

- la comparaison avec l'analyse de 2007 ne peut pas être faite concernant la parcelle [Cadastre 2],

- le rapport d'octobre 2016 fait état de trois sondages alors que 8 avaient été réalisés en 2007,

- les conclusions ne sont pas affirmatives : " [']la poursuite de l'activité de 2007 à 2012 par Shamrock ne semble pas avoir engendré de pollution supplémentaire dans les sols par rapport à 2007 ".

En ne justifiant pas avoir rempli son obligation légale, la société Shamrock environnement a engagé sa responsabilité quasi-délictuelle à l'égard de la société civile immobilière Trigone à laquelle elle doit réparation pour le préjudice subi jusqu'au 31 août 2018.

Le préjudice de la société civile immobilière Trigone

Le principe de la réparation intégrale du préjudice impose d'évaluer la perte subie ou le gain manqué en permettant à la victime de se retrouver, sans frais, dans une situation la plus proche possible de celle qui était la sienne avant le dommage.

Doit être réparé le préjudice occasionné par la non-exécution des travaux de remise en état, laquelle engage la responsabilité de l'exploitant tant à l'égard du propriétaire que des tiers.

Le preneur à bail d'une installation classée pour la protection de l'environnement étant tenu, comme dernier exploitant, de prendre toutes dispositions utiles pour la mise en sécurité du site et, s'agissant des réservoirs de carburant et de leurs équipements annexes, de les neutraliser, conformément aux dispositions de l'arrêté du 22 juin 1998, l'indemnité d'occupation qu'il doit suite à la délivrance d'un congé court, non jusqu'à la cessation de l'activité, mais jusqu'à ce qu'il justifie avoir pris les mesures nécessaires (3e Civ., 19 mai 2010, pourvoi n° 09-15.255, Bull. 2010, III, n° 101).

En l'espèce, la société Suez RV Yonne métaux doit réparation à la société civile immobilière Trigone au titre du préjudice issu du défaut de remise en état des parcelles n° [Cadastre 13], [Cadastre 14] et [Cadastre 2] à la suite de sa cessation d'activité annoncée en décembre 2014 avec prise d'effet au 19 mars 2015.

Les méthodes de calcul mises en place par la société civile immobilière Trigone pour justifier de la perte de valeur de son bien et aboutissant à une valeur médiane ou à une valeur moyenne, prennent en compte des travaux de remises en état qui découlent des obligations du preneur et qui sont donc sans lien avec l'obligation légale de remise en état incombant seulement à la société Shamrock environnement et d'autres sommes résultant de calculs hypothétiques.

Les montants auxquels ils aboutissent ne seront donc pas retenus.

La société dispose d'une valorisation des biens par la société L.2H en janvier 2008 de 489 000 euros pour le terrain et les bâtiments des parcelles section AE [Cadastre 13],[Cadastre 14] et [Cadastre 2], lesquels ont été vendus un peu moins de dix ans plus tard pour le prix de 100 000 euros.

L'acte de vente mentionne que le hangar était ouvert et que des bâtiments étaient en ruine.

La différence entre l'estimation pour la valorisation des parts et le prix de vente à la commune ne peut que servir de référence mais n'est pas déterminant de la part de dévalorisation du bien due au défaut de remise en état de l'exploitant.

En conséquence, la perte de valeur du bien peut être raisonnablement fixée à 153 750 euros correspondant à la valeur locative du bien sur une période de 41 mois.

Les autres demandes

Moyens des parties

La société civile immobilière Trigone réclame les intérêts sur ces sommes à compter du 19 mars 2015 et la capitalisation de ceux-ci.

Les intimées s'y opposent.

Réponse de la cour

En application de l'article 1153-1 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016, les intérêts pourront être comptabilisés sur le montant des condamnations à compter du prononcé de l'arrêt.

En application de l'article 1154 du même code, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016, il est fait droit à la demande d'intérêts sur les intérêts échus des capitaux dus pour une année entière.

Sur les frais du procès

En application de l'article 639 du code de procédure civile, la cour confirmera le jugement sur la charge des dépens et des frais irrépétibles.

En cause d'appel, la société anonyme Trigone et la société Suez RV Yonne métaux sont condamnées aux dépens.

L'équité commande de condamner la société anonyme Trigone et la société Suez RV Yonne métaux à payer à la société civile immobilière Trigone la somme de 6 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile dans le cadre de la procédure d'appel.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Confirme le jugement en ce qu'il condamne in solidum la société anonyme Trigone et la société Suez RV Yonne métaux au titre de l'indisponibilité des locaux pour défaut de remise des clés et de la taxe foncière 2013, 2014, 2015 et 2016 (33 954 euros),

Confirme le jugement en ce qu'il condamne la société Suez RV Yonne métaux du chef du non-respect de ses obligations règlementaires au titre de la police ICPE,

L'infirme dans les montants fixés du chef de l'indisponibilité des locaux et du non-respect des obligations règlementaires au titre de la police ICPE,

Confirme le jugement sur la charge des dépens de première instance et celle des frais irrépétibles,

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Condamne in solidum la société anonyme Trigone et la société Suez RV Yonne métaux à payer à la société civile immobilière Trigone la somme de 288 750 euros au titre de l'indisponibilité des locaux pour défaut de remise des clés ;

Condamne la société Suez RV Yonne métaux à payer à la société civile immobilière Trigone la somme de 153 750 euros au titre de la réparation de son préjudice découlant du non-respect de l'obligation légale de remise en état de l'exploitant ICPE ;

Condamne in solidum la société anonyme Trigone et la Suez RV Yonne métaux à payer à la société civile immobilière Trigone la somme de 18 781 au titre de la taxe foncière pour les années 2017 et 2018 ;

Dit que ces sommes porteront intérêts à compter du présent arrêt ;

Dit que les intérêts échus sur une année entière porteront intérêts ;

Condamne in solidum la société anonyme Trigone et la société Suez RV Yonne métaux aux dépens d'appel ;

Condamne in solidum la société anonyme Trigone et la société Suez RV Yonne métaux à payer à la société civile immobilière Trigone la somme de 6 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et rejette les autres demandes.