Décisions
CA Colmar, ch. 2 a, 25 septembre 2024, n° 22/03189
COLMAR
Arrêt
Autre
MINUTE N° 341/2024
Copie exécutoire
aux avocats
Le 25 septembre 2024
La greffière
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE COLMAR
DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE
ARRÊT DU 25 SEPTEMBRE 2024
Numéro d'inscription au répertoire général : 2 A N° RG 22/03189 -
N° Portalis DBVW-V-B7G-H45V
Décision déférée à la cour : 29 Juin 2022 par le tribunal judiciaire de Strasbourg
APPELANTE et INTIMÉE SUR APPEL INCIDENT :
Madame [B] [X]
demeurant [Adresse 2] à [Localité 3]
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2022/002713 du 11/10/2022 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de COLMAR)
représentée par Me Nadine HEICHELBECH, Avocat à la cour
INTIMÉE et APPELANTE SUR APPEL INCDENT :
La S.A.R.L. LES JARDINS D'ATHENA, prise en la personne de son représentant légal
ayant siège [Adresse 1] à [Localité 3]
représentée par Me Pégah HOSSEINI SARADJEH, Avocat à la cour
plaidant : Me COLTAT, Avocat au barreau de Strasbourg
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 28 Février 2024, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Nathalie HERY, Conseillère, chargée du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Madame Nathalie HERY, Conseillère faisant fonction de présidente
Madame Myriam DENORT, Conseillère
Madame Murielle ROBERT-NICOUD, Conseillère
qui en ont délibéré.
Greffière, lors des débats : Madame Corinne ARMSPACH-SENGLE
ARRÊT contradictoire
- prononcé publiquement, après prorogation le 3 juillet 2024, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.
- signé par Madame Nathalie HERY, Conseillère faisant fonction de présidente, et Madame Corinne ARMSPACH-SENGLE, greffère, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
* * * * *
FAITS ET PROCÉDURE
Le 23 octobre 2019, Mme [B] [X] et la SARL Les Jardins d'Athéna exploitant une micro-crèche ont signé un devis portant sur l'accueil de l'enfant [G] [X] né le 3 avril 2018 du lundi au vendredi à compter du 23 octobre 2019 et jusqu'au 22 octobre 2020.
Le 24 octobre 2019, Mme [X] et la société Les Jardins d'Athéna ont signé le contrat d'accueil régulier de l'enfant.
Après une période d'adaptation, l'enfant a été accueilli au sein de la micro-crèche.
Par une lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 14 novembre 2019 adressée à la société Les Jardins d'Athéna laquelle n'a pas retirée, Mme [X] a dénoncé la rupture du contrat intervenue du fait de la société et s'est refusée à payer une somme au titre du préavis que la société l'a empêchée d'exécuter.
Le 28 novembre 2019, elle a adressé un deuxième courrier à la société Les Jardins d'Athéna pour lui rappeler le précédent et indiquer que si un délai de préavis devait être appliqué, son point de départ devait être fixé au 14 novembre 2019.
Le 27 février 2020, la société Les Jardins d'Athéna a fait assigner Mme [B] [X] devant le tribunal judiciaire de Strasbourg afin de la voir condamner notamment, à lui payer factures et indemnité.
Par jugement du 29 juin 2022, le tribunal a :
condamné Mme [B] [X] à payer à l'EURL Les Jardins d'Athéna la somme de 5 805,88 euros avec intérêt légal à compter du jour du jugement;
débouté Mme [B] [X] de sa demande de dommages et intérêts ;
débouté l'EURL Les Jardins d'Athéna de sa demande de dommages-intérêts ;
condamné Mme [B] [X] aux dépens et à payer à l'EURL Les Jardins d'Athéna la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Le tribunal a qualifié de léonin le contrat liant les parties et, au regard des circonstances, a considéré que c'était Mme [B] [X] qui était l'origine de la rupture.
Il a retenu que le contrat s'imposait à cette dernière, après avoir fait état de ce que, d'une part, Mme [B] [X] avait pris connaissance du règlement de fonctionnement et du projet éducatif et s'était engagée à le respecter, tel que cela résulte du contrat d'accueil signé, et, d'autre part, ledit règlement n'avait pas été modifié suite à la demande de Mme [B] [X].
Il n'a pas déclaré abusive la clause indemnitaire du contrat mais l'a revue à la baisse après l'avoir qualifiée de clause pénale.
Mme [B] [X] a formé appel à l'encontre de ce jugement par voie électronique le 9 août 2022.
Par ordonnance de référé du 8 mars 2023, la présidente de la chambre des urgences de la cour d'appel de Colmar, agissant sur délégation de Mme la Première Présidente a rejeté la demande de Mme [B] [X] tendant au sursis à l'exécution du jugement.
L'instruction a été clôturée le 4 juillet 2023.
PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
Aux termes de ses conclusions transmises par voie électronique le 27 avril 2023, Mme [X] demande à la cour de :
infirmer le jugement du 29 juin 2022 ;
et statuant à nouveau :
débouter la SARL Les Jardins d'Athéna de ses demandes ;
constater le défaut d'informations précontractuelles quant aux modalités de résiliation du contrat ;
juger que :
l'avenant au règlement de fonctionnement de la micro-crèche «Les Jardins d'Athéna » n'a pas été approuvé, ni signé par les parties et n'a donc aucune valeur contractuelle,
la société Les Jardins d'Athéna est à l'origine de la rupture brutale et unilatérale du contrat d'accueil du 24 octobre 2019 ;
en conséquence :
juger qu'il n'y a pas lieu à paiement par elle d'une indemnité de préavis ni d'une indemnité de rupture ;
débouter la société Les Jardins d'Athéna de l'intégralité de ses fins et conclusions ;
subsidiairement :
constater le refus de la SARL Les Jardins d'Athéna d'effectuer le préavis et donc l'absence de contrepartie au paiement d'une indemnité à ce titre,
débouter la SARL Les Jardins d'Athéna de sa demande en paiement du préavis;
plus subsidiairement :
juger que la lettre recommandée avec accusé de réception du 14 novembre 2019 constitue la date de départ du délai de préavis prétendument allégué, et, plus subsidiairement, le fixer au 15 novembre 2019 date acceptée par la demanderesse dans son courriel du 14 novembre 2019 ;
en conséquence, débouter la demanderesse de toutes conclusions tendant à se voir allouer des montants complémentaires la débouter de toutes autres conclusions plus amples ou contraires ;
plus subsidiairement :
juger que par application des alinéas 1° et 5° de l'article R.212-1 du code de la consommation, la clause d'indemnisation figurant en II 3.1 « résiliation du contrat » du règlement de fonctionnement est inopposable et réputée non écrite ;
en conséquence :
débouter la société Les Jardins d'Athéna de ses conclusions tendant à se voir allouer un montant au titre de cette clause ;
plus subsidiairement encore :
constater que l'indemnité calculée au visa de l'article 3.1 résiliation du contrat à l'avenant de la micro-crèche s'analyse en une clause pénale ;
juger que cette clause sera réduite à 1 euro ;
en conséquence :
débouter la société Les Jardins d'Athéna de toutes fins et conclusions contraires de ce chef ;
sur demande reconventionnelle :
juger que la rupture unilatérale et brutale émanant de la société Les Jardins d'Athéna en date du 14 novembre 2019 constitue une rupture abusive du contrat, et qu'en tout état de cause la société a refusé abusivement d'effectuer le préavis,
en conséquence :
condamner la SARL Les Jardins d'Athéna à lui payer le montant de 3339,12 euros à titre de dommages et intérêts ;
condamner la SARL Les Jardins d'Athéna à payer à Me Heichelbech la somme de 2000 euros au titre de l'article 700 alinéa 2 du code de procédure civile et aux dépens ;
débouter la SARL Les Jardins d'Athéna de son appel incident et de ses demandes en paiement d'une indemnité de résiliation, de dommages et intérêts, indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile et dépens.
Sur la rupture du contrat et le préavis, Mme [X] fait état de ce que les attestations produites par la société Les Jardins d'Athéna émanent de subordonnés de la crèche et qu'elle n'est pas en mesure d'en produire puisqu'elle était seule le 14 novembre 2019.
Elle considère que la lecture des SMS échangés permet de réaliser que la gérante de la société Les Jardins d'Athéna a du ressentiment et refuse toute communication et solution à l'amiable alors qu'elle a proposé de revenir avec son fils pour effectuer le préavis et signer les papiers relatifs à l'avenant.
Elle argue de ce que les attestations produites par la société Les Jardins d'Athéna comportent des contradictions.
Elle demande à la cour de la faire profiter du doute sur l'origine de la rupture du fait de sa position de faiblesse.
Mme [X] fait valoir que la SARL Les Jardins d'Athéna ne pouvait imposer un préavis de deux mois à défaut d'information précontractuelle et qu'elle a, cependant, accepté de faire ce préavis ; la gérante de la société s'y est opposée alors que la « transmission » administrative et informatique de son fils avait débuté dans les locaux de la crèche, en restituant toutes ses affaires et en supprimant administrativement son fils de l'application MEEKO. Elle en déduit que la société Les Jardins d'Athéna ne peut demander le paiement du préavis.
Elle souligne que le contrat d'accueil prévoit la possibilité pour la crèche de résilier le contrat en cas d'atteinte morale des parents sur le personnel, laquelle semble lui être reprochée, aucun préavis n'étant dû dans cette hypothèse.
Elle soutient que la crèche a gravement manqué à son obligation d'information précontractuelle et qu'elle n'a pas approuvé le règlement qui n'a donc aucune valeur contractuelle, soulignant qu'il contenait des clauses contraires au droit de la consommation.
Mme [X] expose encore que la clause indemnitaire est contraire aux articles R.212-1- 1° et R.212-1-5° du code de la consommation et doit donc être déclarée abusive puisqu'elle est de nature à contraindre le consommateur à exécuter ses obligations alors que, réciproquement, le professionnel n'exécuterait pas ses obligations de délivrance ou de garantie d'un bien ou son obligation de fourniture d'un service.
Mme [X] considère que la clause pénale doit être réduite à 1 euro au regard des situations respectives des parties.
Elle ajoute que la société Les Jardins d'Athéna n'ayant bénéficié d'aucun mandat de prélèvement pour les factures contestées, les frais de rejet d'un montant de 31,20 euros ne doivent pas être accordés.
Elle conteste l'abus de procédure reproché puisqu'elle n'a fait qu'exercer son droit d'appel pour contester de lourdes condamnations et mettre en lumière les conditions de signature du contrat.
Aux termes de ses conclusions transmises par voie électronique le 31 janvier 2023, la société Les Jardins d'Athéna demande à la cour de :
Sur l'appel principal :
le déclarer mal fondé ;
débouter Mme [B] [X] de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions ;
confirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Strasbourg en date du 29 juin 2022 en ce qu'il a :
condamné Mme [X] à :
* lui payer la somme de 4 274,68 euros au titre des cinq factures non acquittées,
* lui payer la somme de 31,20 euros au titre des frais de rejet de prélèvements,
* une indemnité de résiliation,
débouté Mme [X] de sa demande de dommages et intérêts,
condamné Mme [X] au paiement de la somme de 3000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers frais et dépens;
Sur son appel incident :
infirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Strasbourg le 29 juin 2022 en ce qu'il a limité la condamnation de Mme [X] à la somme de 1500 euros au titre de l'indemnité de résiliation équivalente à la moitié de la somme totale des mois restants ;
statuant à nouveau, condamner Mme [B] [X] à lui payer :
la somme de 7 684,72 euros au titre de l'indemnité de résiliation équivalente à la moitié de la somme totale des mois restants,
la somme de 500 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice matériel subi du fait de la résistance abusive de Mme [X] dans le règlement des montants mis à sa charge ;
- en tout état de cause, condamner Mme [B] [X] :
à lui payer la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure à hauteur d'appel,
aux entiers frais et dépens nés de la procédure à hauteur d'appel, y compris l'intégralité des frais, émoluments et honoraires liés à une éventuelle exécution de la décision à intervenir par voie d'huissier.
Rappelant les dispositions des articles 1194 et 1217 du code civil, la société Les Jardins d'Athéna expose qu'un contrat d'accueil régulier a été signé par les parties le 24 octobre 2019 lequel s'impose à elles, les modalités de résiliation étant prévues en son article 6 ; ce contrat renvoie expressément au règlement de fonctionnement de la micro-crèche qui prévoit en son paragraphe 3.1 des dispositions sur la résiliation du contrat d'accueil à l'initiative des parents dans le cadre d'un accueil régulier et notamment un préavis dont la durée est fixée à deux mois à compter de la date de réception de la lettre recommandée avec accusé de réception notifiant la résiliation adressée à la société Les Jardins d'Athéna, la période de préavis donnant lieu à la même facturation que le montant habituel et une indemnité en cas de non-respect du préavis correspondant à 50 % de la somme totale des mois restants, dans l'hypothèse d'une résiliation à l'initiative des parents.
Elle fait valoir que Mme [X] n'a subi aucune contrainte lorsqu'elle a signé le contrat qui renvoie expressément au règlement de fonctionnement dont elle a nécessairement eu connaissance puisqu'elle a souhaité vouloir le modifier par avenant lequel, au final, n'a pas été signé.
La société Les Jardins d'Athéna entend rappeler que le 14 novembre 2019, Mme [X] a manifesté, oralement, sa volonté de mettre fin au contrat et donc de retirer son enfant de la crèche.
Elle indique qu'elle a précisé à Mme [X], oralement et par courriel du 18 novembre 2019, les modalités de résiliation du contrat à l'initiative des parents, l'intéressée n'ayant jamais justifié d'un des cas prévus au contrat permettant de résilier le contrat d'accueil.
Elle ajoute qu'elle n'a jamais manifesté sa volonté de mettre fin au contrat et conteste, d'ailleurs, y avoir mis fin. Elle se prévaut de l'existence de témoignages de ses salariés de nature à donner des éclaircissements sur le comportement déplacé adopté par Mme [X] le 14 novembre 2019 laquelle n'a jamais plus redéposé son enfant à la crèche par la suite.
Elle souligne qu'en décembre 2019, alors que Mme [X] avait retiré son enfant depuis plus de quinze jours, elle-même a retiré l'enfant de l'application informatique MEEKO.
Elle argue de ce que, compte tenu des stipulations contractuelles, Mme [X] était tenue de s'acquitter des factures mensuelles sur la totalité de la période de son engagement, soit jusqu'au 22 octobre 2020.
Elle indique que pour favoriser la résolution amiable du litige, alors même qu'aucun écrit n'avait été adressé par Mme [X], elle a accepté d'enregistrer la demande de résiliation du contrat à l'initiative du parent malgré l'absence de motif prévu au contrat, en fixant le point de départ du délai de préavis au 15 novembre 2019.
Elle précise que le préavis ayant débuté le 15 novembre 2019, Mme [X] est redevable des différentes factures mises en compte sur la période du 23 octobre 2019 (date d'accueil de l'enfant) au 14 janvier 2020 inclus (terme du préavis de deux mois), soit un montant total de 4 274,68 euros qu'elle détaille comme suit :
- 75 euros au titre des frais d'inscription (facture du 23 octobre 2019)
- 72,25 euros au titre de l'adaptation sur la période du 23 au 25 octobre 2019 (facture du 31 octobre 2019)
- 1 669,56 euros au titre du mois de novembre 2019 (facture du 30 novembre 2019)
- 1 664,56 euros au titre du mois de décembre 2019 (facture du 31 décembre 2019)
- 793,31 euros au titre de la période du 1er au 14 janvier 2020 inclus (facture du 14 janvier 2020).
Elle expose qu'à ce montant s'ajoutent :
des frais de rejet de prélèvements de 31,20 euros dans la mesure où Mme [X] a fait opposition au prélèvement automatique mis en place auprès de sa banque,
une indemnité d'un montant égal à 50 % de la somme totale des mois restants soit 7 684,72 euros ; le contrat devant courir jusqu'au 22 octobre « 2019 », il restait donc, au 15 janvier « 2019 », date du terme du préavis, 9 mois et 7 jours à courir, soit un montant total de 15 369,44 euros ((1 664,56 euros x 9 mois) + 1 664,56 euros x 7/30 = 14 981,04 + 388,40).
La société Les Jardins d'Athéna invoque la résistance abusive et injustifiée de Mme [X], ce qui l'a :
contrainte à accomplir de nombreuses diligences pour tenter d'obtenir le paiement de ses factures impayées, ce qui a mobilisé le personnel et donc des heures de travail inutilement dans la mesure où la vocation de la crèche est de s'occuper des enfants,
privée de la jouissance des fonds pourtant indispensables à la bonne conduite de la crèche qui venait tout juste d'ouvrir ses portes.
Elle fait état de ce qu'elle n'a pu réattribuer la place à un autre enfant, ce qui lui a occasionné une perte de chiffre d'affaires, de ce que, par son comportement inacceptable dans une telle institution, Mme [X] a perturbé les enfants et personnes travaillant sur place.
La société Les Jardins d'Athéna prétend que les articles R .212-1 1° et R.212-1 5° du code de la consommation ne permettent pas de retenir que les articles 6 du contrat d'accueil et 3 du règlement de fonctionnement s'analysent en des clauses abusives puisque :
le contrat d'accueil régulier soumis à Mme [X] fait expressément référence au règlement de fonctionnement, l'intéressée ayant pris connaissance des deux documents avant signature,
l'article 3 en cause prévoit que la résiliation à l'initiative des parents ouvre droit à une indemnité au profit de la micro-crèche d'un montant égal à 50 % de la somme totale des mois restants et n'est pas une clause entrant dans le champ d'application de l'article R.212-1 5° susvisé puisqu'elle ne créé pas de déséquilibre manifeste mais est destinée à compenser le préjudice subi par la crèche du fait de la résiliation du contrat et s'analyse donc comme une clause pénale parfaitement licite.
S'agissant de la demande indemnitaire de Mme [X], la société Les Jardins d'Athéna entend rappeler que celle-ci est à l'initiative de la rupture.
En application de l'article 455 du code de procédure civile, la cour renvoie expressément, pour plus ample exposé des prétentions et moyens des parties aux conclusions transmises aux dates susvisées.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Au préalable, il y a lieu d'indiquer qu'aux termes de l'article 954, alinéa 3, du code de procédure civile, la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n'examine les moyens au soutien de ces prétentions que s'ils sont invoqués dans la discussion.
Ne constituent pas des prétentions au sens de l'article 4 du code de procédure civile les demandes des parties tendant à « juger» ou «constater», en ce que, hors les cas prévus par la loi, elles ne sont pas susceptibles d'emporter de conséquences juridiques mais constituent en réalité des moyens ou arguments, de sorte que la cour doit y répondre qu'à la condition qu'ils viennent au soutien de la prétention formulée dans le dispositif des conclusions et, en tout état de cause pas dans son dispositif mais dans ses motifs.
I) Sur les demandes formulées au titre du contrat du 24 octobre 2019
Aux termes des dispositions combinées de l'article 1194 du code civil, les contrats obligent non seulement à ce qui y est exprimé mais encore à toutes les suites que leur donnent l'équité, l'usage ou la loi.
L'article 3 du contrat liant les parties signé le 24 octobre 2019 et consacré aux modalités d'accueil de l'enfant fait état de l'existence d'un règlement de fonctionnement qui détaille les conditions globales d'accueil ; il mentionne que les parents déclarent avoir pris connaissance dudit règlement et du projet éducatif de la micro-crèche et s'engagent à les respecter dans leur intégralité.
S'il est vrai que Mme [X] n'a pas signé le règlement en cause, il n'en demeure pas moins qu'à la signature du contrat, elle a reconnu avoir pris cette connaissance et s'est engagée à le respecter ; elle ne démontre pas ne pas avoir été mise en mesure d'avoir connaissance de la teneur de ce règlement avant de signer le contrat, de sorte que ce document lui est opposable.
Le contrat du 24 octobre 2019 prévoit plusieurs hypothèses de résiliation libellées comme suit : « Résiliation du contrat d'accueil à l'initiative des parents », « Résiliation du contrat d'accueil à l'initiative de la crèche » et « Autres cas de résiliations », cette dernière hypothèse renvoyant au seul cas de la résiliation d'un commun accord.
L'analyse des pièces produites par les parties permet de vérifier que le 14 novembre 2019, sans avoir, au préalable, notifié dans les formes et pour les motifs prévus au contrat, sa volonté de résilier ce dernier, Mme [X] a adressé un SMS à la SARL Les Jardins d'Athéna aux termes duquel elle indiquait que pendant le préavis de deux mois, son fils allait continuer à venir à la crèche.
Dès lors qu'elle a invoqué l'exécution du préavis, Mme [X] a nécessairement exclu l'hypothèse de la résiliation du contrat à l'initiative de la crèche prévue en l'article 6 dudit contrat lequel précise clairement que, dans ce cas, il n'y a pas de préavis et a donc entendu se placer dans un des deux autres cas de résiliation à savoir celui de « la résiliation du contrat d'accueil à l'initiative des parents » ou celui des « autres cas de résiliations ».
De son côté, la société Les Jardins d'Athéna, bien qu'elle ne se soit pas vue notifier par Mme [X] la résiliation du contrat dans les formes et pour les motifs qui y sont prévus en cas de résiliation à l'initiative des parents, n'en a pas, pour autant, exigé la poursuite jusqu'à son terme, ce dont il se déduit qu'elle a accepté le principe même de la résiliation, étant souligné que la situation n'entrait dans aucun de ces cas de résiliation.
Il y a donc lieu de considérer que les parties se sont placées dans l'hypothèse des « Autres cas de résiliations » visant la résiliation d'un commun accord.
Mme [X] soutient qu'étant disposée à exécuter ce préavis, elle s'est présentée à la crèche, le 14 novembre 2019, dans l'après-midi, pour y déposer son enfant mais que la gérante ne l'a pas autorisée à le faire et lui en a restitué les affaires, ce qu'elle ne démontre, cependant, pas.
Dès lors, elle est tenue au paiement des sommes dues au titre des deux mois de préavis lequel court à compter du 15 novembre 2019 jusqu'au 14 janvier 2020 tel que demandé. La société Les Jardins d'Athéna réclame également à juste titre le paiement de factures antérieures au préavis que Mme [X] n'a pas réglées, le total des sommes dues au titre du préavis et des sommes antérieures étant justifié à hauteur de 4 274,68 euros.
L'indemnité prévue à l'article 3 du règlement de fonctionnement pour le cas de résiliation à l'initiative des parents n'est pas due par Mme [X] dès lors qu'il a été retenu que la résiliation ne devait pas être considérée comme une résiliation à l'initiative de cette dernière.
S'agissant des frais liés au rejet des prélèvements effectués par la société Les Jardins d'Athéna sur le compte bancaire de Mme [X], cette dernière a indiqué dans ses conclusions qu'elle n'avait pas de carnets de chèques, de sorte que le paiement des factures à la société Les Jardins d'Athéna ne pouvait se faire que par prélèvements tel que cela résulte de l'article 5 du règlement de fonctionnement qui précise qu'en cas de défaut de paiement, les frais bancaires sont à la charge des parents. Mme [X] est donc redevable envers la société Les Jardins d'Athéna, à ce titre, de la somme de 31,20 euros justifiée par les extraits de compte bancaire de la société.
* Il y a lieu de condamner Mme [X] à payer à la société Les Jardins d'Athéna la somme de 4 305,88 euros (4 274,68 € + 31,20 €) avec intérêts au taux légal à compter du 29 juin 2022, date du jugement entrepris. La société Les Jardins d'Athéna est déboutée du surplus de ses demandes.
Le jugement entrepris est donc infirmé de ce chef.
II) Sur les demandes de dommages et intérêts
La résistance de Mme [X] au paiement était en partie justifiée, de sorte qu'il y a lieu de débouter la société Les Jardins d'Athéna de sa demande de dommages et intérêts. Le jugement entrepris est confirmé de ce chef.
Il a été considéré que l'initiative de la résiliation du contrat avait été commune et que Mme [X] ne démontrait pas avoir été empêchée d'exécuter le préavis, de sorte qu'il n'y a pas lieu de faire droit à sa demande de dommages et intérêts. Le jugement entrepris est confirmé de ce chef.
III) Sur les dépens et les frais de procédure non compris dans les dépens
Le jugement entrepris est infirmé de ces chefs.
Chaque partie est condamnée à supporter la charge de ses propres dépens exposés en premier ressort et en appel.
Les demandes d'indemnités sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile sont rejetées.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe, après débats en audience publique et après en avoir délibéré :
INFIRME le jugement du tribunal judiciaire de Strasbourg du 29 juin 2022 en ce qu'il a :
condamné Mme [B] [X] à payer à l'EURL Les Jardins d'Athéna la somme de 5 805,88 euros avec intérêt légal à compter du jour du jugement;
condamné Mme [B] [X] aux dépens et à payer à l'EURL Les Jardins d'Athéna la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
LE CONFIRME pour le surplus, dans les limites de l'appel ;
Statuant de nouveau sur les seuls points infirmés et y ajoutant :
CONDAMNE Mme [B] [X] à payer à la SARL Les Jardins d'Athéna la somme de 4 305,88 euros (quatre mille trois cent cinq euros et quatre-vingt-huit centimes) avec intérêts au taux légal à compter du 29 juin 2022 ;
DÉBOUTE la SARL Les Jardins d'Athéna du surplus de ses demandes formulées au titre de la résiliation du contrat du 24 octobre 2019 ;
CONDAMNE chaque partie à supporter la charge de ses propres dépens exposés en premier ressort et en appel ;
REJETTE les demandes d'indemnités fondées sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais de procédure non compris dans les dépens exposés par les parties en premier ressort et à hauteur d'appel.
La greffière, La conseillère,
Copie exécutoire
aux avocats
Le 25 septembre 2024
La greffière
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE COLMAR
DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE
ARRÊT DU 25 SEPTEMBRE 2024
Numéro d'inscription au répertoire général : 2 A N° RG 22/03189 -
N° Portalis DBVW-V-B7G-H45V
Décision déférée à la cour : 29 Juin 2022 par le tribunal judiciaire de Strasbourg
APPELANTE et INTIMÉE SUR APPEL INCIDENT :
Madame [B] [X]
demeurant [Adresse 2] à [Localité 3]
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2022/002713 du 11/10/2022 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de COLMAR)
représentée par Me Nadine HEICHELBECH, Avocat à la cour
INTIMÉE et APPELANTE SUR APPEL INCDENT :
La S.A.R.L. LES JARDINS D'ATHENA, prise en la personne de son représentant légal
ayant siège [Adresse 1] à [Localité 3]
représentée par Me Pégah HOSSEINI SARADJEH, Avocat à la cour
plaidant : Me COLTAT, Avocat au barreau de Strasbourg
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 28 Février 2024, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Nathalie HERY, Conseillère, chargée du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Madame Nathalie HERY, Conseillère faisant fonction de présidente
Madame Myriam DENORT, Conseillère
Madame Murielle ROBERT-NICOUD, Conseillère
qui en ont délibéré.
Greffière, lors des débats : Madame Corinne ARMSPACH-SENGLE
ARRÊT contradictoire
- prononcé publiquement, après prorogation le 3 juillet 2024, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.
- signé par Madame Nathalie HERY, Conseillère faisant fonction de présidente, et Madame Corinne ARMSPACH-SENGLE, greffère, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
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FAITS ET PROCÉDURE
Le 23 octobre 2019, Mme [B] [X] et la SARL Les Jardins d'Athéna exploitant une micro-crèche ont signé un devis portant sur l'accueil de l'enfant [G] [X] né le 3 avril 2018 du lundi au vendredi à compter du 23 octobre 2019 et jusqu'au 22 octobre 2020.
Le 24 octobre 2019, Mme [X] et la société Les Jardins d'Athéna ont signé le contrat d'accueil régulier de l'enfant.
Après une période d'adaptation, l'enfant a été accueilli au sein de la micro-crèche.
Par une lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 14 novembre 2019 adressée à la société Les Jardins d'Athéna laquelle n'a pas retirée, Mme [X] a dénoncé la rupture du contrat intervenue du fait de la société et s'est refusée à payer une somme au titre du préavis que la société l'a empêchée d'exécuter.
Le 28 novembre 2019, elle a adressé un deuxième courrier à la société Les Jardins d'Athéna pour lui rappeler le précédent et indiquer que si un délai de préavis devait être appliqué, son point de départ devait être fixé au 14 novembre 2019.
Le 27 février 2020, la société Les Jardins d'Athéna a fait assigner Mme [B] [X] devant le tribunal judiciaire de Strasbourg afin de la voir condamner notamment, à lui payer factures et indemnité.
Par jugement du 29 juin 2022, le tribunal a :
condamné Mme [B] [X] à payer à l'EURL Les Jardins d'Athéna la somme de 5 805,88 euros avec intérêt légal à compter du jour du jugement;
débouté Mme [B] [X] de sa demande de dommages et intérêts ;
débouté l'EURL Les Jardins d'Athéna de sa demande de dommages-intérêts ;
condamné Mme [B] [X] aux dépens et à payer à l'EURL Les Jardins d'Athéna la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Le tribunal a qualifié de léonin le contrat liant les parties et, au regard des circonstances, a considéré que c'était Mme [B] [X] qui était l'origine de la rupture.
Il a retenu que le contrat s'imposait à cette dernière, après avoir fait état de ce que, d'une part, Mme [B] [X] avait pris connaissance du règlement de fonctionnement et du projet éducatif et s'était engagée à le respecter, tel que cela résulte du contrat d'accueil signé, et, d'autre part, ledit règlement n'avait pas été modifié suite à la demande de Mme [B] [X].
Il n'a pas déclaré abusive la clause indemnitaire du contrat mais l'a revue à la baisse après l'avoir qualifiée de clause pénale.
Mme [B] [X] a formé appel à l'encontre de ce jugement par voie électronique le 9 août 2022.
Par ordonnance de référé du 8 mars 2023, la présidente de la chambre des urgences de la cour d'appel de Colmar, agissant sur délégation de Mme la Première Présidente a rejeté la demande de Mme [B] [X] tendant au sursis à l'exécution du jugement.
L'instruction a été clôturée le 4 juillet 2023.
PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
Aux termes de ses conclusions transmises par voie électronique le 27 avril 2023, Mme [X] demande à la cour de :
infirmer le jugement du 29 juin 2022 ;
et statuant à nouveau :
débouter la SARL Les Jardins d'Athéna de ses demandes ;
constater le défaut d'informations précontractuelles quant aux modalités de résiliation du contrat ;
juger que :
l'avenant au règlement de fonctionnement de la micro-crèche «Les Jardins d'Athéna » n'a pas été approuvé, ni signé par les parties et n'a donc aucune valeur contractuelle,
la société Les Jardins d'Athéna est à l'origine de la rupture brutale et unilatérale du contrat d'accueil du 24 octobre 2019 ;
en conséquence :
juger qu'il n'y a pas lieu à paiement par elle d'une indemnité de préavis ni d'une indemnité de rupture ;
débouter la société Les Jardins d'Athéna de l'intégralité de ses fins et conclusions ;
subsidiairement :
constater le refus de la SARL Les Jardins d'Athéna d'effectuer le préavis et donc l'absence de contrepartie au paiement d'une indemnité à ce titre,
débouter la SARL Les Jardins d'Athéna de sa demande en paiement du préavis;
plus subsidiairement :
juger que la lettre recommandée avec accusé de réception du 14 novembre 2019 constitue la date de départ du délai de préavis prétendument allégué, et, plus subsidiairement, le fixer au 15 novembre 2019 date acceptée par la demanderesse dans son courriel du 14 novembre 2019 ;
en conséquence, débouter la demanderesse de toutes conclusions tendant à se voir allouer des montants complémentaires la débouter de toutes autres conclusions plus amples ou contraires ;
plus subsidiairement :
juger que par application des alinéas 1° et 5° de l'article R.212-1 du code de la consommation, la clause d'indemnisation figurant en II 3.1 « résiliation du contrat » du règlement de fonctionnement est inopposable et réputée non écrite ;
en conséquence :
débouter la société Les Jardins d'Athéna de ses conclusions tendant à se voir allouer un montant au titre de cette clause ;
plus subsidiairement encore :
constater que l'indemnité calculée au visa de l'article 3.1 résiliation du contrat à l'avenant de la micro-crèche s'analyse en une clause pénale ;
juger que cette clause sera réduite à 1 euro ;
en conséquence :
débouter la société Les Jardins d'Athéna de toutes fins et conclusions contraires de ce chef ;
sur demande reconventionnelle :
juger que la rupture unilatérale et brutale émanant de la société Les Jardins d'Athéna en date du 14 novembre 2019 constitue une rupture abusive du contrat, et qu'en tout état de cause la société a refusé abusivement d'effectuer le préavis,
en conséquence :
condamner la SARL Les Jardins d'Athéna à lui payer le montant de 3339,12 euros à titre de dommages et intérêts ;
condamner la SARL Les Jardins d'Athéna à payer à Me Heichelbech la somme de 2000 euros au titre de l'article 700 alinéa 2 du code de procédure civile et aux dépens ;
débouter la SARL Les Jardins d'Athéna de son appel incident et de ses demandes en paiement d'une indemnité de résiliation, de dommages et intérêts, indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile et dépens.
Sur la rupture du contrat et le préavis, Mme [X] fait état de ce que les attestations produites par la société Les Jardins d'Athéna émanent de subordonnés de la crèche et qu'elle n'est pas en mesure d'en produire puisqu'elle était seule le 14 novembre 2019.
Elle considère que la lecture des SMS échangés permet de réaliser que la gérante de la société Les Jardins d'Athéna a du ressentiment et refuse toute communication et solution à l'amiable alors qu'elle a proposé de revenir avec son fils pour effectuer le préavis et signer les papiers relatifs à l'avenant.
Elle argue de ce que les attestations produites par la société Les Jardins d'Athéna comportent des contradictions.
Elle demande à la cour de la faire profiter du doute sur l'origine de la rupture du fait de sa position de faiblesse.
Mme [X] fait valoir que la SARL Les Jardins d'Athéna ne pouvait imposer un préavis de deux mois à défaut d'information précontractuelle et qu'elle a, cependant, accepté de faire ce préavis ; la gérante de la société s'y est opposée alors que la « transmission » administrative et informatique de son fils avait débuté dans les locaux de la crèche, en restituant toutes ses affaires et en supprimant administrativement son fils de l'application MEEKO. Elle en déduit que la société Les Jardins d'Athéna ne peut demander le paiement du préavis.
Elle souligne que le contrat d'accueil prévoit la possibilité pour la crèche de résilier le contrat en cas d'atteinte morale des parents sur le personnel, laquelle semble lui être reprochée, aucun préavis n'étant dû dans cette hypothèse.
Elle soutient que la crèche a gravement manqué à son obligation d'information précontractuelle et qu'elle n'a pas approuvé le règlement qui n'a donc aucune valeur contractuelle, soulignant qu'il contenait des clauses contraires au droit de la consommation.
Mme [X] expose encore que la clause indemnitaire est contraire aux articles R.212-1- 1° et R.212-1-5° du code de la consommation et doit donc être déclarée abusive puisqu'elle est de nature à contraindre le consommateur à exécuter ses obligations alors que, réciproquement, le professionnel n'exécuterait pas ses obligations de délivrance ou de garantie d'un bien ou son obligation de fourniture d'un service.
Mme [X] considère que la clause pénale doit être réduite à 1 euro au regard des situations respectives des parties.
Elle ajoute que la société Les Jardins d'Athéna n'ayant bénéficié d'aucun mandat de prélèvement pour les factures contestées, les frais de rejet d'un montant de 31,20 euros ne doivent pas être accordés.
Elle conteste l'abus de procédure reproché puisqu'elle n'a fait qu'exercer son droit d'appel pour contester de lourdes condamnations et mettre en lumière les conditions de signature du contrat.
Aux termes de ses conclusions transmises par voie électronique le 31 janvier 2023, la société Les Jardins d'Athéna demande à la cour de :
Sur l'appel principal :
le déclarer mal fondé ;
débouter Mme [B] [X] de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions ;
confirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Strasbourg en date du 29 juin 2022 en ce qu'il a :
condamné Mme [X] à :
* lui payer la somme de 4 274,68 euros au titre des cinq factures non acquittées,
* lui payer la somme de 31,20 euros au titre des frais de rejet de prélèvements,
* une indemnité de résiliation,
débouté Mme [X] de sa demande de dommages et intérêts,
condamné Mme [X] au paiement de la somme de 3000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers frais et dépens;
Sur son appel incident :
infirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Strasbourg le 29 juin 2022 en ce qu'il a limité la condamnation de Mme [X] à la somme de 1500 euros au titre de l'indemnité de résiliation équivalente à la moitié de la somme totale des mois restants ;
statuant à nouveau, condamner Mme [B] [X] à lui payer :
la somme de 7 684,72 euros au titre de l'indemnité de résiliation équivalente à la moitié de la somme totale des mois restants,
la somme de 500 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice matériel subi du fait de la résistance abusive de Mme [X] dans le règlement des montants mis à sa charge ;
- en tout état de cause, condamner Mme [B] [X] :
à lui payer la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure à hauteur d'appel,
aux entiers frais et dépens nés de la procédure à hauteur d'appel, y compris l'intégralité des frais, émoluments et honoraires liés à une éventuelle exécution de la décision à intervenir par voie d'huissier.
Rappelant les dispositions des articles 1194 et 1217 du code civil, la société Les Jardins d'Athéna expose qu'un contrat d'accueil régulier a été signé par les parties le 24 octobre 2019 lequel s'impose à elles, les modalités de résiliation étant prévues en son article 6 ; ce contrat renvoie expressément au règlement de fonctionnement de la micro-crèche qui prévoit en son paragraphe 3.1 des dispositions sur la résiliation du contrat d'accueil à l'initiative des parents dans le cadre d'un accueil régulier et notamment un préavis dont la durée est fixée à deux mois à compter de la date de réception de la lettre recommandée avec accusé de réception notifiant la résiliation adressée à la société Les Jardins d'Athéna, la période de préavis donnant lieu à la même facturation que le montant habituel et une indemnité en cas de non-respect du préavis correspondant à 50 % de la somme totale des mois restants, dans l'hypothèse d'une résiliation à l'initiative des parents.
Elle fait valoir que Mme [X] n'a subi aucune contrainte lorsqu'elle a signé le contrat qui renvoie expressément au règlement de fonctionnement dont elle a nécessairement eu connaissance puisqu'elle a souhaité vouloir le modifier par avenant lequel, au final, n'a pas été signé.
La société Les Jardins d'Athéna entend rappeler que le 14 novembre 2019, Mme [X] a manifesté, oralement, sa volonté de mettre fin au contrat et donc de retirer son enfant de la crèche.
Elle indique qu'elle a précisé à Mme [X], oralement et par courriel du 18 novembre 2019, les modalités de résiliation du contrat à l'initiative des parents, l'intéressée n'ayant jamais justifié d'un des cas prévus au contrat permettant de résilier le contrat d'accueil.
Elle ajoute qu'elle n'a jamais manifesté sa volonté de mettre fin au contrat et conteste, d'ailleurs, y avoir mis fin. Elle se prévaut de l'existence de témoignages de ses salariés de nature à donner des éclaircissements sur le comportement déplacé adopté par Mme [X] le 14 novembre 2019 laquelle n'a jamais plus redéposé son enfant à la crèche par la suite.
Elle souligne qu'en décembre 2019, alors que Mme [X] avait retiré son enfant depuis plus de quinze jours, elle-même a retiré l'enfant de l'application informatique MEEKO.
Elle argue de ce que, compte tenu des stipulations contractuelles, Mme [X] était tenue de s'acquitter des factures mensuelles sur la totalité de la période de son engagement, soit jusqu'au 22 octobre 2020.
Elle indique que pour favoriser la résolution amiable du litige, alors même qu'aucun écrit n'avait été adressé par Mme [X], elle a accepté d'enregistrer la demande de résiliation du contrat à l'initiative du parent malgré l'absence de motif prévu au contrat, en fixant le point de départ du délai de préavis au 15 novembre 2019.
Elle précise que le préavis ayant débuté le 15 novembre 2019, Mme [X] est redevable des différentes factures mises en compte sur la période du 23 octobre 2019 (date d'accueil de l'enfant) au 14 janvier 2020 inclus (terme du préavis de deux mois), soit un montant total de 4 274,68 euros qu'elle détaille comme suit :
- 75 euros au titre des frais d'inscription (facture du 23 octobre 2019)
- 72,25 euros au titre de l'adaptation sur la période du 23 au 25 octobre 2019 (facture du 31 octobre 2019)
- 1 669,56 euros au titre du mois de novembre 2019 (facture du 30 novembre 2019)
- 1 664,56 euros au titre du mois de décembre 2019 (facture du 31 décembre 2019)
- 793,31 euros au titre de la période du 1er au 14 janvier 2020 inclus (facture du 14 janvier 2020).
Elle expose qu'à ce montant s'ajoutent :
des frais de rejet de prélèvements de 31,20 euros dans la mesure où Mme [X] a fait opposition au prélèvement automatique mis en place auprès de sa banque,
une indemnité d'un montant égal à 50 % de la somme totale des mois restants soit 7 684,72 euros ; le contrat devant courir jusqu'au 22 octobre « 2019 », il restait donc, au 15 janvier « 2019 », date du terme du préavis, 9 mois et 7 jours à courir, soit un montant total de 15 369,44 euros ((1 664,56 euros x 9 mois) + 1 664,56 euros x 7/30 = 14 981,04 + 388,40).
La société Les Jardins d'Athéna invoque la résistance abusive et injustifiée de Mme [X], ce qui l'a :
contrainte à accomplir de nombreuses diligences pour tenter d'obtenir le paiement de ses factures impayées, ce qui a mobilisé le personnel et donc des heures de travail inutilement dans la mesure où la vocation de la crèche est de s'occuper des enfants,
privée de la jouissance des fonds pourtant indispensables à la bonne conduite de la crèche qui venait tout juste d'ouvrir ses portes.
Elle fait état de ce qu'elle n'a pu réattribuer la place à un autre enfant, ce qui lui a occasionné une perte de chiffre d'affaires, de ce que, par son comportement inacceptable dans une telle institution, Mme [X] a perturbé les enfants et personnes travaillant sur place.
La société Les Jardins d'Athéna prétend que les articles R .212-1 1° et R.212-1 5° du code de la consommation ne permettent pas de retenir que les articles 6 du contrat d'accueil et 3 du règlement de fonctionnement s'analysent en des clauses abusives puisque :
le contrat d'accueil régulier soumis à Mme [X] fait expressément référence au règlement de fonctionnement, l'intéressée ayant pris connaissance des deux documents avant signature,
l'article 3 en cause prévoit que la résiliation à l'initiative des parents ouvre droit à une indemnité au profit de la micro-crèche d'un montant égal à 50 % de la somme totale des mois restants et n'est pas une clause entrant dans le champ d'application de l'article R.212-1 5° susvisé puisqu'elle ne créé pas de déséquilibre manifeste mais est destinée à compenser le préjudice subi par la crèche du fait de la résiliation du contrat et s'analyse donc comme une clause pénale parfaitement licite.
S'agissant de la demande indemnitaire de Mme [X], la société Les Jardins d'Athéna entend rappeler que celle-ci est à l'initiative de la rupture.
En application de l'article 455 du code de procédure civile, la cour renvoie expressément, pour plus ample exposé des prétentions et moyens des parties aux conclusions transmises aux dates susvisées.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Au préalable, il y a lieu d'indiquer qu'aux termes de l'article 954, alinéa 3, du code de procédure civile, la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n'examine les moyens au soutien de ces prétentions que s'ils sont invoqués dans la discussion.
Ne constituent pas des prétentions au sens de l'article 4 du code de procédure civile les demandes des parties tendant à « juger» ou «constater», en ce que, hors les cas prévus par la loi, elles ne sont pas susceptibles d'emporter de conséquences juridiques mais constituent en réalité des moyens ou arguments, de sorte que la cour doit y répondre qu'à la condition qu'ils viennent au soutien de la prétention formulée dans le dispositif des conclusions et, en tout état de cause pas dans son dispositif mais dans ses motifs.
I) Sur les demandes formulées au titre du contrat du 24 octobre 2019
Aux termes des dispositions combinées de l'article 1194 du code civil, les contrats obligent non seulement à ce qui y est exprimé mais encore à toutes les suites que leur donnent l'équité, l'usage ou la loi.
L'article 3 du contrat liant les parties signé le 24 octobre 2019 et consacré aux modalités d'accueil de l'enfant fait état de l'existence d'un règlement de fonctionnement qui détaille les conditions globales d'accueil ; il mentionne que les parents déclarent avoir pris connaissance dudit règlement et du projet éducatif de la micro-crèche et s'engagent à les respecter dans leur intégralité.
S'il est vrai que Mme [X] n'a pas signé le règlement en cause, il n'en demeure pas moins qu'à la signature du contrat, elle a reconnu avoir pris cette connaissance et s'est engagée à le respecter ; elle ne démontre pas ne pas avoir été mise en mesure d'avoir connaissance de la teneur de ce règlement avant de signer le contrat, de sorte que ce document lui est opposable.
Le contrat du 24 octobre 2019 prévoit plusieurs hypothèses de résiliation libellées comme suit : « Résiliation du contrat d'accueil à l'initiative des parents », « Résiliation du contrat d'accueil à l'initiative de la crèche » et « Autres cas de résiliations », cette dernière hypothèse renvoyant au seul cas de la résiliation d'un commun accord.
L'analyse des pièces produites par les parties permet de vérifier que le 14 novembre 2019, sans avoir, au préalable, notifié dans les formes et pour les motifs prévus au contrat, sa volonté de résilier ce dernier, Mme [X] a adressé un SMS à la SARL Les Jardins d'Athéna aux termes duquel elle indiquait que pendant le préavis de deux mois, son fils allait continuer à venir à la crèche.
Dès lors qu'elle a invoqué l'exécution du préavis, Mme [X] a nécessairement exclu l'hypothèse de la résiliation du contrat à l'initiative de la crèche prévue en l'article 6 dudit contrat lequel précise clairement que, dans ce cas, il n'y a pas de préavis et a donc entendu se placer dans un des deux autres cas de résiliation à savoir celui de « la résiliation du contrat d'accueil à l'initiative des parents » ou celui des « autres cas de résiliations ».
De son côté, la société Les Jardins d'Athéna, bien qu'elle ne se soit pas vue notifier par Mme [X] la résiliation du contrat dans les formes et pour les motifs qui y sont prévus en cas de résiliation à l'initiative des parents, n'en a pas, pour autant, exigé la poursuite jusqu'à son terme, ce dont il se déduit qu'elle a accepté le principe même de la résiliation, étant souligné que la situation n'entrait dans aucun de ces cas de résiliation.
Il y a donc lieu de considérer que les parties se sont placées dans l'hypothèse des « Autres cas de résiliations » visant la résiliation d'un commun accord.
Mme [X] soutient qu'étant disposée à exécuter ce préavis, elle s'est présentée à la crèche, le 14 novembre 2019, dans l'après-midi, pour y déposer son enfant mais que la gérante ne l'a pas autorisée à le faire et lui en a restitué les affaires, ce qu'elle ne démontre, cependant, pas.
Dès lors, elle est tenue au paiement des sommes dues au titre des deux mois de préavis lequel court à compter du 15 novembre 2019 jusqu'au 14 janvier 2020 tel que demandé. La société Les Jardins d'Athéna réclame également à juste titre le paiement de factures antérieures au préavis que Mme [X] n'a pas réglées, le total des sommes dues au titre du préavis et des sommes antérieures étant justifié à hauteur de 4 274,68 euros.
L'indemnité prévue à l'article 3 du règlement de fonctionnement pour le cas de résiliation à l'initiative des parents n'est pas due par Mme [X] dès lors qu'il a été retenu que la résiliation ne devait pas être considérée comme une résiliation à l'initiative de cette dernière.
S'agissant des frais liés au rejet des prélèvements effectués par la société Les Jardins d'Athéna sur le compte bancaire de Mme [X], cette dernière a indiqué dans ses conclusions qu'elle n'avait pas de carnets de chèques, de sorte que le paiement des factures à la société Les Jardins d'Athéna ne pouvait se faire que par prélèvements tel que cela résulte de l'article 5 du règlement de fonctionnement qui précise qu'en cas de défaut de paiement, les frais bancaires sont à la charge des parents. Mme [X] est donc redevable envers la société Les Jardins d'Athéna, à ce titre, de la somme de 31,20 euros justifiée par les extraits de compte bancaire de la société.
* Il y a lieu de condamner Mme [X] à payer à la société Les Jardins d'Athéna la somme de 4 305,88 euros (4 274,68 € + 31,20 €) avec intérêts au taux légal à compter du 29 juin 2022, date du jugement entrepris. La société Les Jardins d'Athéna est déboutée du surplus de ses demandes.
Le jugement entrepris est donc infirmé de ce chef.
II) Sur les demandes de dommages et intérêts
La résistance de Mme [X] au paiement était en partie justifiée, de sorte qu'il y a lieu de débouter la société Les Jardins d'Athéna de sa demande de dommages et intérêts. Le jugement entrepris est confirmé de ce chef.
Il a été considéré que l'initiative de la résiliation du contrat avait été commune et que Mme [X] ne démontrait pas avoir été empêchée d'exécuter le préavis, de sorte qu'il n'y a pas lieu de faire droit à sa demande de dommages et intérêts. Le jugement entrepris est confirmé de ce chef.
III) Sur les dépens et les frais de procédure non compris dans les dépens
Le jugement entrepris est infirmé de ces chefs.
Chaque partie est condamnée à supporter la charge de ses propres dépens exposés en premier ressort et en appel.
Les demandes d'indemnités sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile sont rejetées.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe, après débats en audience publique et après en avoir délibéré :
INFIRME le jugement du tribunal judiciaire de Strasbourg du 29 juin 2022 en ce qu'il a :
condamné Mme [B] [X] à payer à l'EURL Les Jardins d'Athéna la somme de 5 805,88 euros avec intérêt légal à compter du jour du jugement;
condamné Mme [B] [X] aux dépens et à payer à l'EURL Les Jardins d'Athéna la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
LE CONFIRME pour le surplus, dans les limites de l'appel ;
Statuant de nouveau sur les seuls points infirmés et y ajoutant :
CONDAMNE Mme [B] [X] à payer à la SARL Les Jardins d'Athéna la somme de 4 305,88 euros (quatre mille trois cent cinq euros et quatre-vingt-huit centimes) avec intérêts au taux légal à compter du 29 juin 2022 ;
DÉBOUTE la SARL Les Jardins d'Athéna du surplus de ses demandes formulées au titre de la résiliation du contrat du 24 octobre 2019 ;
CONDAMNE chaque partie à supporter la charge de ses propres dépens exposés en premier ressort et en appel ;
REJETTE les demandes d'indemnités fondées sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais de procédure non compris dans les dépens exposés par les parties en premier ressort et à hauteur d'appel.
La greffière, La conseillère,