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Décisions

CA Paris, Pôle 4 - ch. 2, 25 septembre 2024, n° 22/07601

PARIS

Arrêt

Autre

CA Paris n° 22/07601

25 septembre 2024

Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 2

ARRET DU 25 SEPTEMBRE 2024

(n° , 6 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 22/07601 - N° Portalis 35L7-V-B7G-CFU4W

Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 23 Février 2022 -Juge de la mise en état de TJ BOBIGNY - RG n° 21/03630

APPELANTS

Monsieur [M] [T]

[Adresse 3]

[Localité 8]

Représenté par Me Florian TOSONI, avocat au barreau de PARIS, toque : B1192

Madame [H] [T]

[Adresse 3]

[Localité 8]

Représentée par Me Florian TOSONI, avocat au barreau de PARIS, toque : B1192

INTIME

SYNDICAT DES COPROPRIETAIRES [Adresse 5] A [Localité 8] représenté par son syndic, la SARL CABINET LEDUC ALPHA XI

dont le siège social est : [Adresse 1]

[Localité 6]

Représenté par Me Cécile LEMAISTRE BONNEMAY, avocat au barreau de PARIS, toque : E1286 et assisté de Me Joanne GEORGELIN, avocat au barreau de PARIS, du même cabinet

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 905 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 23 Mai 2024, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant M. Jean-Loup CARRIERE, Président de Chambre, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :

M. Jean-Loup CARRIERE, Président de Chambre

Mme Perrine VERMONT, Conseillère

Mme Caroline BIANCONI-DULIN, Conseillère

Greffier, lors des débats : Mme Dominique CARMENT

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Mme Perrine VERMONT, Conseillère, faisant fonction de président pour le président empêché en vertu de l'article R 312-3 du code de l'organisation judiciaire, et par Madame Dominique CARMENT, greffière présente lors de la mise à disposition.

* * * * * * * * *

FAITS & PROCÉDURE

M. [M] [T] & Mme [H] [T] (ci-après M. & Mme [T]) sont propriétaires du lot n°1 (un appartement au rez-de-chaussée et une cave au sous-sol) de l'état descriptif de division de l'immeuble régit par le statut de la copropriété des immeubles bâtis situé [Adresse 5] à [Localité 8].

Par acte du 12 avril 2021, le syndicat des copropriétaires a assigné M. & Mme [T] devant le tribunal judiciaire de Bobigny aux fins de paiement d'un arriéré de charges de copropriété.

Par conclusions d'incident notifiées le 29 novembre 2021, M. & Mme [T] ont demandé au juge de la mise en état de :

- à titre principal, déclarer nulle l'assignation du 12 avril 2021,

- à titre subsidiaire, déclarer irrecevables les demandes pécuniaires des époux [T] (sic),

- à titre très subsidiaire, déclarer irrecevables les demandes en paiement des charges pour les exercices antérieurs à 2019,

- à titre infiniment subsidiaire, déclarer irrecevables les demandes en paiement des charges pour les exercices 2004 à avril 2011,

dans tous les cas,

- débouter le syndicat des copropriétaires de ses demandes,

- condamner le syndicat des copropriétaires aux dépens de l'incident, ainsi qu'à leur payer la somme de 4.000 € par application de l'article 700 du code de procédure civile.

Au soutien de leur demande en nullité de l'assignation, sur le fondement des articles 56 et 752 du code de procédure civile et L212-5-1 du code de l'organisation judiciaire, M. & Mme [T] ont fait valoir que l'assignation ne comporte aucun moyen de droit, que le 'par ces motifs' est exsangue de fondement juridique et qu'en outre, l'assignation ne comporte pas de mention relative à la procédure sans audience.

Concernant l'irrecevabilité des demandes en paiement antérieures à 2019, sur le fondement de l'article 35-2 du décret du 17 mars 1967, M. & Mme [T] ont fait valoir que le syndicat des copropriétaires ne peut leur réclamer des sommes qui n'ont pas fait l'objet d'un appel de fonds.

Concernant l'irrecevabilité des demandes en paiement antérieures à avril 2021, sur le fondement de l'article 42 de la loi du 10 juillet 1965 et de l'article 2222 du code civil, M. & Mme [T] ont soutenu que ces demandes sont prescrites.

Par conclusions en réponse sur incident notifiées le 7 novembre 2021, le syndicat des copropriétaires a demandé au juge de la mise en état de :

- débouter M. & Mme [T] de leurs demandes,

- condamner M. & Mme [T] aux dépens de l'incident, ainsi qu'à lui payer la somme de 2.000 € par application de l'article 700 du code de procédure civile.

Au soutien de sa contestation de la nullité de l'assignation, le syndicat des copropriétaires a fait valoir que l'assignation n'est pas dépourvue de moyen de droit en ce qu'elle vise l'article 10 de la loi de 1965. En outre, il a indiqué que des conclusions au fond sont venues régulariser l'assignation. De même, sur le fondement de l'article 775 du code de procédure civile, il a soulevé que la présente procédure est de la compétence du tribunal judiciaire devant lequel la procédure est écrite, dès lors l'assignation n'avait pas à indiquer que la procédure pouvait être orale ou exclusivement écrite au choix des parties.

Concernant l'absence d'appels provisionnels, sur le fondement de l'article 35 du décret de 67, le syndicat des copropriétaire a précisé que le syndic peut exiger des provisions sur budget. Ainsi, selon lui, rien n'interdit à un syndicat de fonctionner sur dépenses réelles sans provision.

Concernant la prescription de ses demandes en paiement, le syndicat des copropriétaires a fait valoir que toutes les charges demandées ont été approuvées par l'assemblée générale du 24 novembre 2015 et que cette assemblée n'ayant pas été contestée, toutes les charges sont exigibles.

Il a ajouté que, sur le fondement de la loi Elan et de l'article 2222 du code civil, la prescription n'aura joué son 'uvre qu'en novembre 2023.

Par ordonnance du 23 février 2022, le juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Bobigny a :

- rejeté la nullité de l'assignation soulevée par M. & Mme [T],

- rejeté les fins de non-recevoir soulevées par M. & Mme [T],

- dit que les dépens de l'incident suivront le sort des dépens du fond,

- condamné M. [M] [T] & Mme [H] [T] à verser au syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis [Adresse 4] à [Localité 8] la somme de 1.000 € par application de l'article 700 du code de procédure civile,

- renvoyé l'affaire pour conclusions au fond des défendeurs à l'audience de mise en état du 16 mars 2022,

- rappelé que la présente décision est, de droit, assortie de l'exécution provisoire,

- rejeté le surplus des demandes.

M. [M] [T] & Mme [H] [T] ont relevé appel partiel de cette ordonnance par déclaration remise au greffe le 13 avril 2022.

Par ordonnance du 17 mai 2023, non déférée à la cour, le président de cette chambre a, au visa de l'article 910-3 du code de procédure civile :

- dit n'y avoir lieu de déclarer irrecevables les conclusions du syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis [Adresse 5] à [Localité 8] notifiées le 13 octobre 2022,

- déclaré ces conclusions recevables,

- dit que les dépens de l'incident et l'application de l'article 700 du code de procédure civile suivront le sort de ceux de l'instance au fond.

La procédure devant la cour a été clôturée le 23 mai 2024.

PRÉTENTIONS DES PARTIES

Vu les conclusions notifiées le 30 novembre 2022 par lesquelles M. [M] [T] & Mme [H] [T], appelants, invitent la cour, au visa des articles 905-1, 905-2 du code de procédure civile, 42 de la loi du 10 juillet 1965, 1315 et 2224 du code civil, à :

- les accueillir dans l'intégralité de leurs demandes, dires, fins,

- rejeter le syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis [Adresse 5] à [Localité 8] en l'intégralité de ses demandes, dires, fins et conclusions,

- juger irrecevables les conclusions du 14 octobre 2022 du syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis [Adresse 5] à [Localité 8] pour les raisons développées dans le corps des présentes,

- infirmer l'ordonnance en ce qu'elle a rejeté leurs fins de non-recevoir,

- infirmer l'ordonnance en ce qu'elle les a condamnés à verser au syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis [Adresse 5] à [Localité 8] la somme de 1.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

statuant à nouveau, y ajoutant,

- juger irrecevables les demandes de paiement formées par le syndicat des copropriétaires au titre des charges de copropriété pour les années 2004, 2005, 2006, 2007, 2008, 2009, 2010 et 2011 (jusqu'au 2ème trimestre inclus) comme étant indiscutablement prescrites,

- condamner en toutes hypothèses le syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis [Adresse 5] à [Localité 8] à leur payer la somme de 4.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens de 1ère instance et d'appel ;

Vu les conclusions notifiées le 14 octobre 2022 par lesquelles le syndicat des copropriétaires de l'immeuble [Adresse 5] à [Localité 8], intimé, demande à la cour de :

- confirmer l'ordonnance entreprise,

- débouter M. [M] [T] &Mme [H] [T] de toutes leurs demandes,

subsidiairement,

- fixer à 4.219,41 € les charges prescrites,

- condamner M. [M] [T] & Mme [H] [T] aux dépens, ainsi qu'à lui payer la somme de 2.000 € par application de l'article 700 du code de procédure civile ;

SUR CE,

La cour se réfère, pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens échangés et des prétentions des parties, à la décision déférée et aux dernières conclusions échangées en appel.

En application de l'article 954 alinéa 2 du code de procédure civile, la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif des conclusions.

L'ordonnance n'est pas contestée en ce qu'elle a rejeté la demande de nullité de l'assignation soulevée par M. & Mme [T].

Les conclusions notifiées le 14 octobre 2022 par le syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis [Adresse 5] à [Localité 8] ont été déclarées recevables par l'ordonnance du président de la chambre du 17 mai 2023 qui est définitive pour n'avoir pas été déférée à la cour.

Les moyens soutenus par les appelant ne font que réitérer sans justification complémentaire utile, ceux dont le premier juge a connu et auxquels il a répondu par des motifs pertinents et exacts que la cour adopte, sans qu'il soit nécessaire de suivre les parties dans le détail d'une discussion se situant au niveau d'une simple argumentation.

Il convient seulement de souligner et d'ajouter les points suivants.

Sur la recevabilité des demandes en paiement au visa de l'article 35-2 du décret du 17 mars 1967

L'article 35-2 du décret du 17 mars 1967 indique : 'Pour l'exécution du budget prévisionnel, le syndic adresse à chaque copropriétaire, par lettre simple, préalablement à la date d'exigibilité déterminée par la loi, un avis indiquant le montant de la provision exigible.

Pour les dépenses non comprises dans le budget prévisionnel, le syndic adresse à chaque copropriétaire, par lettre simple, préalablement à la date d'exigibilité déterminée par la décision d'assemblée générale, un avis indiquant le montant de la somme exigible et l'objet de la dépense'.

Le premier juge a justement énoncé que ces diligences, applicables lorsque le syndic réclame des provisions, ne sont pas prescrites à peine de recevabilité d'une demande en justice, en sorte que le débat portant sur la seule exigibilité relève du fond et échappe à la compétence du juge de la mise en état.

Sur la prescription

Aux termes de l'article 2221 du code civil la prescription extinctive est soumise à la loi régissant le droit qu'elle affecte.

Par ailleurs il est constant que lorsque la loi réduit la durée d'une prescription la prescription réduite commence à courir, sauf dispositions contraires, du jour de l'entrée en vigueur de la loi nouvelle, sans que la durée totale ne puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure.

L'article 42 de la loi du 10 juillet 1965 dans sa rédaction nouvelle issue de la loi 2018-1021 a étendu à compter du 28 novembre 2018 la prescription quinquennale de l'article 2224 du code civil aux actions personnelles entre copropriétaires ou entre copropriétaires et syndicat.

Néanmoins en application des dispositions antérieures cette action se prescrivait par dix ans.

Au cas présent, s'agissant des sommes réclamées au titre de l'assemblée générale du 24 novembre 2015, le syndicat dispose donc de la faculté d'agir jusqu'au 22 novembre 2023.

Il importe peu de savoir si cette assemblée générale porte sur des exercices antérieurs dès lors que c'est bien l'approbation des comptes par une décision d'assemblée générale qui fait courir le délai de prescription pour les charges concernées.

En l'espèce, M. & Mme [T] n'ont pas contesté l'assemblée générale et ne peuvent donc opposer une fin de non-recevoir à la quote-part de charges correspondante.

Cela étant, une telle approbation n'empêche pas ces mêmes copropriétaires de contester les sommes qui leur sont réclamées à titre individuel, et notamment en démontrant que la répartition des charges n'a pas été calculée conformément au règlement de copropriété.

Mais, comme l'a dit le premier juge, le débat sur le point de savoir si M. & Mme [T] sont effectivement débiteurs des sommes réclamées au regard des pièces produites par le syndicat et notamment tous les documents utiles pour justifier sa demande, en particulier les procès verbaux des assemblées générales approuvant les comptes [la cour observe qu'en dehors du procès verbal de l'assemblée générale du 24 novembre 2015 qui concerne bien la copropriété du [Adresse 5] à [Localité 8], les autres procès verbaux se rapportent au syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis [Adresse 2] à [Localité 7] qui semble étranger au présent litige], les comptes individuels, le décompte de répartition des charges ainsi que toute pièce utile relèvent du juge du fond.

Sur les dépens et l'application de l'article 700 du code de procédure civile

Le sens du présent arrêt conduit à confirmer l'ordonnance sur les dépens et l'application qui y a été équitablement faite de l'article 700 du code de procédure civile.

M. & Mme [T], parties perdantes, doivent être condamnés aux dépens d'appel, ainsi qu'à payer au syndicat des copropriétaires la somme supplémentaire de 2.000 € par application de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.

Le sens du présent arrêt conduit à rejeter la demande par application de l'article 700 du code de procédure civile formulée par M. & Mme [T].

PAR CES MOTIFS

LA COUR

Statuant par mise à disposition au greffe, contradictoirement,

Confirme l'ordonnance ;

Y ajoutant,

Condamne M. [M] [T] & Mme [H] [T] aux dépens d'appel, ainsi qu'à payer au syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis [Adresse 5] à [Localité 8] la somme supplémentaire de 2.000 € par application de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel ;

Rejette toute autre demande.

LA GREFFIERE P/ LE PRESIDENT EMPECHE