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Décisions

CA Versailles, ch. com. 3-1, 26 septembre 2024, n° 22/05451

VERSAILLES

Arrêt

Infirmation

PARTIES

Demandeur :

Noveane (SAS), Atexo Conseil (SAS)

Défendeur :

Meja (SARL)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Dubois-Stevant

Conseillers :

Mme Gautron-Audic, Mme Meurant

Avocats :

Me Bordessoule de Bellefeuille, Me De Wit, Me Baboin-Jaubert, Me Debray, Me Lopes

T. com. Nanterre, du 31 mars 2022, n° 20…

31 mars 2022

EXPOSE DES FAITS

La société Atexo Conseil exerçait une activité de conseil, d'assistance, d'étude, d'ingénierie, de vente et/ou de location de matériels neufs ou d'occasion dans les domaines de l'informatique, des télécommunications, de la bureautique, des nouvelles technologies de l'information et de la communication.

M. [I] [G] et M. [X] [R] ont été respectivement engagés par la société Atexo Conseil en qualité de consultant les 6 octobre 2011 et 26 février 2013 et à compter du 1er juillet 2017, ils ont occupé les fonctions de directeur associé.

Le 27 juillet 2018, la société Financière De Jéricho, actionnaire unique de la société Atexo Conseil, a cédé l'intégralité de ses actions à la société Noveane, groupe de cabinets de conseils en conduite du changement, transformation numérique, pilotage de projets, organisation et de systèmes d'informations.

Le 31 août 2018, MM. [R] et [G] ont régularisé avec leur employeur des ruptures conventionnelles de leur contrat de travail à effet au 14 octobre 2018 et, par la suite, la société Atexo Conseil leur a confié plusieurs missions en qualité de sous-traitant.

Le 5 octobre 2018, la société Atexo Conseil a adressé à MM. [R] et [G] un projet de contrat de prestations de service qui, en raison d'un désaccord des parties concernant la clause de non concurrence, n'a pas été signé.

Le 17 octobre 2018, MM. [R] et [G] ont créé la SARL Meja exerçant une activité de conseil en organisation et systèmes d'information.

Le 22 octobre 2018, la société Atexo Conseil a demandé à la société Meja de cesser immédiatement toute prestation de sous-traitance auprès de ses clients.

Le 7 novembre 2018, la société Meja a adressé à la société Atexo Conseil une facture d'un montant total de 18.092,36 euros TTC au titre des prestations de sous-traitance que cette dernière a refusé de régler, malgré une relance du 14 décembre 2018.

Le 26 novembre 2018, la société Meja a déposé sa candidature dans le cadre d'un appel d'offres émis par la ville de [Localité 7], sur la plate-forme dématéralisée des marchés publics en utilisant les codes d'accès de la société Atexo Conseil.

Par lettres recommandées avec accusé de réception du 21 décembre 2018, le conseil de la société Atexo Conseil a fait sommation à MM. [R] et [G] ainsi qu'à la société Meja de retirer sous 48 heures l'offre déposée auprès de la ville de [Localité 7] au nom de la société Atexo Conseil et de lui restituer tous les documents lui appartenant. Il leur a également fait défense d'embaucher ou de recourir aux services de M. [C], salarié de la société Atexo Conseil apparaissant dans l'offre de la société Meja et a exigé l'annulation de la facture du 7 novembre 2018 par l'émission d'un avoir correspondant.

Par lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 3 janvier 2019, le conseil de la société Meja a contesté les demandes de la société Atexo Conseil et a réclamé le règlement de la facture impayée.

C'est dans ces circonstances que, par acte d'huissier de justice du 20 mai 2019, les sociétés Atexo Conseil et Noveane ont fait assigner la société Meja devant le tribunal de commerce de Nanterre afin d'obtenir l'indemnisation de leurs préjudices consécutifs à la concurrence déloyale invoquée.

Par jugement du 31 mars 2022, le tribunal de commerce de Nanterre a débouté la société Noveane, venant aux droits en cours d'instance de la société Atexo Conseil, de ses demandes et l'a condamnée à payer à la société Meja la somme de 18.092,36 euros, au titre de la facture n°201811/4 du 12 novembre 2018, avec intérêts au taux légal à compter du 14 décembre 2018, outre celle de 7.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens.

Par déclaration du 25 août 2022, la société Noveane, venant aux droits de la société Atexo Conseil, a interjeté appel de ce jugement.

Dès lors que le jugement n'était pas joint à la déclaration d'appel, la société Noveane, venant aux droits de la société Atexo Conseil, a déposé un deuxième acte d'appel comprenant le jugement le 25 août 2022.

Les instances ont été jointes par ordonnance du 25 mai 2023.

Par dernières conclusions remises au greffe et notifiées par rpva le 13 mars 2024, la société Noveane agissant tant en son nom propre que comme venant aux droits de la société Atexo Conseil demande à la cour d'infirmer le jugement en toutes ses dispositions et statuant à nouveau, de :

- faire injonction à la société Meja d'avoir à :

- restituer tout support, document, rapport, offre, base de données qu'elle détient de la société Atexo Conseil à compter du jugement à intervenir et sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

- cesser toute utilisation de la marque, ou de tout support, document, rapport, offre ou base de données propriété de la société Atexo Conseil sous astreinte de 5.000 euros par infraction constatée ;

- cesser de recruter, directement ou indirectement, des salariés de la société Atexo Conseil sous astreinte de 10.000 euros par infraction constatée ;

- condamner la société Meja à régler :

- la somme de 50.000 euros à la société Atexo Conseil au titre du détournement de savoir-faire spécifique subi ;

- la somme de 20.000 euros à la société Atexo Conseil au titre du trouble commercial et de la désorganisation subie par l'entreprise ;

- la somme de 20.000 euros à la société Atexo Conseil au titre de la perte de chance de remporter des marchés auprès de la Ville de [Localité 7] ;

- la somme de 10.000 euros à chacune des deux sociétés Atexo Conseil et Noveane au titre du préjudice moral subi résultant des l'usurpation des nom, documents, identifiants et réputation de la société ;

- condamner la société Meja au paiement de la somme de 8.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile au profit de la société Atexo Conseil et de la société Noveane, ainsi qu'aux dépens dont distraction au profit de Me Pierre Bordessoule de Bellefeuille ;

- la débouter de toutes ses autres fins demandes et conclusions.

Par dernières conclusions remises au greffe et notifiées par rpva le 2 mai 2024, la société Meja demande à la cour de :

à titre liminaire,

- juger que la société Noveane n'a valablement émis aucune prétention à l'encontre des chefs du jugement qui l'ont condamnée à lui payer les sommes de 18.092,36 euros au titre de la facture n°201811/4 du 12 novembre 2018, avec intérêts au taux légal à compter du 14 décembre 2018 et de 7.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

en conséquence,

- confirmer le jugement de ces chefs,

sur le fond, à titre principal,

- confirmer le jugement en toutes ses dispositions et débouter la société Noveane tant en son nom personnel qu'en ce qu'elle vient aux droits de la société Atexo Conseil de l'ensemble de ses demandes;

à titre subsidiaire,

- ramener l'indemnisation de la société Noveane à de plus justes proportions lesquelles ne sauraient excéder l'euro symbolique ;

- la débouter de ses demandes d'injonctions ;

sur la demande reconventionnelle formulée en première instance,

à titre principal,

- juger que le chef du jugement ayant condamné la société Noveane au paiement de la somme de 18.092,36 euros au titre de la facture du 12 novembre 2018 est définitif et a autorité de la chose jugée;

à titre subsidiaire,

- confirmer le jugement de ce chef ;

en tout état de cause,

- condamner la société Noveane, à titre personnel et en ce qu'elle vient aux droits de la société Atexo Conseil, à lui payer une somme de 15.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens d'appel dont distraction au profit de Me Christophe Debray.

La clôture de l'instruction a été prononcée le 16 mai 2024.

Pour un exposé complet des faits et de la procédure, la cour renvoie expressément au jugement déféré et aux écritures des parties ainsi que cela est prescrit par l'article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS

Sur la demande principale au titre de la concurrence déloyale et du parasitisme

Au visa des articles 1240 et 1241 du code civil, la société Noveane reproche à la société Meja des actes de concurrence déloyale et de parasitisme.

L'article 1240 du code civil dispose que : « Tout fait de l'homme qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer ».

Par ailleurs, selon l'article 1241 du même code, « Chacun est responsable du dommage qu'il a causé non seulement par son fait, mais encore par son imprudence ».

Sur le parasitisme

La société Noveane explique que la société Meja a utilisé les identifiant et mot de passe de la société Atexo Conseil pour accéder à la plateforme de dématérialisation des marchés publics, afin de participer à un appel d'offre émis par la ville de [Localité 7] de manière illégale et déloyale. Elle reproche par ailleurs à l'intimée d'avoir copié son document modèle de réponse à appel d'offres, en relevant onze points de plagiat, détournement ou similitude démontrant son intention de s'accaparer son nom, sa réputation et son savoir-faire. Elle lui fait également grief d'avoir repris à son compte des références de missions qu'elle a conduites afin d'appuyer sa candidature, caractérisant à nouveau un détournement de son savoir-faire, ainsi qu'un risque de confusion.

La société Meja répond que la société Noveane ne fait pas état d'agissements systématiques et/ou répétés, se limitant à invoquer un seul acte consistant en sa réponse à l'appel d'offres de la ville de [Localité 7]. Elle soutient que l'utilisation des identifiant et mot de passe de la société Atexo Conseil est une simple erreur et ne saurait constituer un acte de parasitisme, ce d'autant que concomitamment, elle exécutait des missions de sous-traitance au profit de la société Atexo Conseil. Elle considère qu'il ne peut être soutenu qu'elle s'est accaparée un savoir-faire qui serait propre à la société Atexo Conseil, dès lors que ses cogérants sont d'anciens salariés de cette dernière et sont, à ce titre, légitimes à utiliser l'expérience qu'ils ont acquise chez leur ancien employeur.

Elle indique que la prétendue copie servile de documents de la société Atexo Conseil ne peut pas plus être retenue dès lors que ces documents ne bénéficient d'aucune originalité ou notoriété qui serait démontrée par l'appelante et que le caractère répétitif de la reproduction n'est pas établi. Elle précise que les références citées dans l'offre correspondent aux missions accomplies par les consultants proposés à la ville de [Localité 7]. La société Meja estime que la confusion invoquée n'est pas démontrée et que l'appelante ne rapporte pas la preuve de l'élément intentionnel du parasitisme allégué.

Le parasitisme consiste en un ensemble de comportements par lesquels un agent économique s'immisce dans le sillage d'un autre afin de tirer profit, sans rien dépenser, des investissements, d'un savoir-faire, de la notoriété ou du travail intellectuel d'autrui produisant une valeur économique individualisée et générant un avantage concurrentiel.

Il est constant que les sociétés Atexo Conseil et Meja exercent une activité concurrente dans le même domaine d'activité.

La société Meja ne conteste pas avoir utilisé, pour déposer sa réponse à l'appel d'offres de la ville de [Localité 7] sur la plateforme de dématérialisation des marchés publics, l'identifiant et le mot de passe de la société Atexo Conseil. Si elle prétend avoir commis une erreur dans la précipitation liée à l'échéance, du fait de l'enregistrement sur le navigateur Chrome associé au compte Google de M. [R] des identifiant et mot de passe de la société Atexo Conseil, elle ne produit aucun élément de preuve permettant de corroborer ses dires. Le dépôt de l'offre a certes été réalisé un quart d'heure avant l'expiration du délai imparti par le pouvoir adjudicateur et la société Meja établit qu'elle était inscrite depuis le 19 novembre 2018 sur la base AWS-fournisseurs. Toutefois, le procès-verbal de constat dressé par huissier le 20 décembre 2018 établit que l'attestation de dépôt de l'offre et le bordereau de contrôle du pli dématérialisé figurant sur la plateforme de dématérialisation des marchés publics AWS mentionnent en qualité de candidat : « Atexo Conseil ». Ce point n'a manifestement pas échappé à la société Meja puisque dans les cases destinées à l'identité du signataire elle a pris soin de préciser son nom à huit reprises : « MEJA [I] [G] » (souligné par la cour). A la date de dépôt de l'offre, la société Meja exécutait des missions de sous-traitance pour la société Atexo Conseil. Cependant, cet élément est indifférent puisque l'offre déposée est sans lien avec ces missions. Il n'est au demeurant pas démontré que dans le cadre de ces missions, la société Meja a été chargée de répondre à un appel d'offres pour le compte de la société Atexo Conseil.

Par ailleurs, si l'examen comparatif de l'offre déposée par la société Meja et de celles élaborées par la société Atexo Conseil dans le cadre d'appels d'offres émis par la ville de [Localité 6] et Neotoa ne permet pas de mettre en évidence de similitudes significatives dans leur structure globale et leur forme, il établit néanmoins que :

- la société Meja a repris, de manière presque identique, dans la partie consacrée à la synthèse de son offre en page 1, deux paragraphes figurant dans les offres de la société Atexo Conseil :

- offre de la société Meja : « Nous disposons d'une connaissance approfondie de l'environnement des collectivités territoriales, et notamment des villes tant dans leurs principes d'organisation et de fonctionnement (dont passation de marchés publics) que dans leurs contextes "métier" : attributions, réglementations associées, modes d'intervention, etc : » ;

- offre de la société Atexo Conseil : « Notre connaissance approfondie de l'environnement des collectivités territoriales, dans leurs principes d'organisation et de fonctionnement (dont passation de marchés publics), dans leurs contextes "métier" (réglementations associées, modes d'intervention, ') et système d'information (applicatifs métiers, transverses, normes de sécurité, d'accessibilité) » ;

- offre de la société Meja : « Notre veille permanente sur l'innovation et l'apport des nouvelles technologies dans l'environnement de travail

o Innovations technologiques (RSE, Outils collaboratifs, Chatbots, Intelligence Artificielle, Internet des objets, Big Data, BYOD, Mobilité, virtualisation et hyperconvergence, échanges de données en temps réel, etc.)

o Évolutions méthodologiques : co-design et user design, approche disruptive, projets agiles et DEVOPS, etc.

o Révolutions des usages : usages mobiles, télétravail, fonctionnement en réseau, bureaux mobiles, recherches sémantiques, travail collaboratif, services aux clients (espaces clients, interaction clients), relation usager, etc. » ;

- offre de la société Atexo Conseil : « Sa veille permanente sur l'innovation et l'apport des nouvelles technologies dans l'environnement de travail

- Innovations technologiques (RSE, Outils collaboratifs, Chatbots, Intelligence Artificielle, Internet des objets, Big Data, BYOD, Mobilité, virtualisation et hyperconvergence, échanges de données en temps réel, etc.)

- Évolutions méthodologiques : co design et user design, approche disruptive, projets agiles et DEVOPS, etc.

- Révolutions des usages : usages mobiles, télétravail, fonctionnement en réseau, bureaux mobiles, recherches sémantiques, travail collaboratif, services aux clients (espaces clients, interaction clients), relation usager, etc. » ;

- l'intimée a utilisé une présentation similaire de l'équipe affectée au projet détaillant dans une première partie les compétences, tout d'abord méthodologiques, puis fonctionnelles et techniques, puis dans une seconde partie, les principales références dans le domaine de la consultation ;

- elle a de surcroît établi une liste des références appartenant à la société Atexo Conseil ; il est ainsi fait état de dix-sept missions accomplies pour des collectivités publiques d'envergure telles que l'établissement public foncier de la région Rhône Alpes, Grenoble Alpes Métropole, les villes de [Localité 9], [Localité 8], [Localité 10], [Localité 5], les départements de Saône et Loire, de Loire Atlantique, des Landes, les métropoles du Grand Lyon, d'Orléans, de Lille ou encore pour le ministère des finances publiques et la société Bnp Paribas Real Estate ;

- la société Meja a utilisé, pour présenter un exemple de livrable en page 24, un document créé par la société Atexo Conseil en avril 2016 ;

- elle a reproduit en page 27 de son offre un schéma représentant un « exemple de processus cible : engagement par bon de commande » qui est la copie servile d'un schéma intitulé « Exemple de processus complexe existant : engagement par bon de commande », figurant dans un mémoire technique établi par la société Atexo Conseil pour Métropole de Lyon le 23 février 2017 ;

- l'intimée a utilisé en pages 31 à 34 de son offre dix documents (schémas, carte et tableaux) réalisés par la société Atexo Conseil dans le cadre de missions en mai 2014, novembre 2016 et mai 2017 ;

- le schéma figurant en page 35 appartient également à la société Atexo Conseil puisque son nom et son logo y figurent.

Ces éléments démontrent que la société Meja a utilisé les codes d'accès de la société Atexo Conseil, ainsi que des documents créés, donc appartenant à la société Atexo Conseil, qu'elle a reproduits de manière quasi identique deux paragraphes et un modèle de présentation de l'équipe affectée à la mission issus des offres de cette dernière et qu'elle s'est prévalue des missions exécutées par la société Atexo Conseil.

Contrairement à ce que soutient la société Meja, ces documents, visuels et explications sont le fruit d'un travail intellectuel réalisé par les collaborateurs rémunérés par la société Atexo Conseil, dont elle s'est elle-même dispensée en se les appropriant, ce qui lui a permis de répondre dans le délai imparti à l'appel d'offres de la ville de [Localité 7]. En considération des nombreux marchés que la société Atexo Conseil s'est vue attribuer grâce à l'ensemble de ces éléments par des collectivités territoriales d'envergure, l'intimée ne saurait s'exonérer de sa responsabilité en arguant d'une absence d'originalité des éléments usurpés.

De même, la société Meja se prévaut vainement d'une utilisation légitime par MM. [R] et [G] de l'expérience acquise chez leur ancien employeur, alors qu'il s'est agi d'un détournement d'éléments appartenant à la société Atexo Conseil. Si les deux anciens salariés de la société Atexo Conseil ont collaboré aux missions citées en références dans leur offre, cette circonstance ne leur permettait pas de les attribuer à la société Meja, qui a ainsi usurpé la notoriété acquise par cette dernière dans le cadre des missions accomplies avec les collectivités territoriales aussi importantes que celles précitées.

L'ensemble des éléments détournés (documents, visuels, explications, références de marchés) est donc constitutif d'une valeur économique individualisée. Il est à l'origine d'un avantage concurrentiel dont la société Meja a indûment profité.

L'élément intentionnel du parasitisme ainsi caractérisé résulte de la pluralité des détournements susvisés, qui sont nécessairement délibérés.

Il importe peu, s'agissant de la caractérisation de la faute, que la société Atexo Conseil n'ait pas entendu candidater dans le cadre de l'appel d'offres en cause et si l'intimée soutient qu'elle en aurait été incapable, à défaut de disposer des compétences requises, aucun élément de preuve ne permet de corroborer cette affirmation au demeurant indifférente.

La délivrance par la société Atexo Conseil à MM. [R] et [G] d'un certificat de travail attestant de ce que les salariés ont quitté l'entreprise libres de tout engagement est également inopérante, la faute reprochée quant à l'usurpation des documents susvisés procédant nécessairement d'actes de détournement dissimulés.

Enfin, la société Meja se prévaut vainement de l'absence de démonstration d'agissements systématiques et/ou répétés qui n'est pas une condition du parasitisme.

La responsabilité de la société Meja est par conséquent engagée sur le fondement de l'article 1240 du code civil.

En revanche, la société Noveane soutient que la société Meja a détourné à son profit le savoir-faire de la société Atexo Conseil en imitant, voire recopiant, ses documents, visuels, explications et modèles. Elle ajoute que la société Atexo Conseil a développé un savoir-faire de pointe dans le domaine de la gestion des marchés publics et notamment dans leur dématérialisation, laquelle est un élément clé des services proposés à ses clients. Cependant, l'appelante ne rapporte pas la preuve de l'existence du savoir-faire allégué. En effet, le savoir-faire consiste en un ensemble d'informations de nature technique, industrielle ou commerciale non-brevetées, résultant de l'expérience, qui est secret, substantiel et identifié. Or, l'appelante se limite à invoquer l'existence d'un savoir-faire de la société Atexo Conseil sans précisément le définir, ne permettant ainsi pas à la cour de vérifier qu'il remplit les conditions de confidentialité, de substantialité et d'identification. La responsabilité de la société Meja ne sera par conséquent pas retenue à ce titre.

Sur la concurrence déloyale

Sur la confusion

La société Noveane expose que le dépôt par la société Meja d'une offre sous l'identité numérique de la société Atexo Conseil, l'utilisation de son logo, de ses documents, des références de ses clients ont généré une confusion, confirmée par le courriel que la ville de [Localité 7] a adressé à cette dernière au sujet de sa candidature.

La société Meja répond que la confusion invoquée n'est pas démontrée. Elle soutient que la ville de [Localité 7] lui a confirmé avoir compris qu'elle était seule candidate dans le cadre de l'appel d'offres.

Le fait de créer, fût-ce par imprudence ou négligence, une confusion ou un risque de confusion avec l'entreprise d'un concurrent ou avec ses produits ou services constitue un acte de concurrence déloyale.

L'appréciation de la faute au regard du risque de confusion doit résulter d'une approche concrète et circonstanciée des faits de la cause prenant en compte notamment le caractère plus ou moins servile, systématique ou répétitif de la reproduction ou de l'imitation, l'ancienneté de l'usage, l'originalité et la notoriété de la prestation copiée.

Comme indiqué supra, au regard de leur activité, les société Atexo Conseil et Meja sont en situation de concurrence directe et effective. La société Atexo Conseil a été créée le 6 avril 1999, soit bien avant la société Meja, qui a été immatriculée le 17 octobre 2018.

Par ailleurs, la société Atexo Conseil établit avoir remporté plusieurs appels d'offre émis par des collectivités territoriales d'envergure, démontrant ainsi sa notoriété dans le secteur d'activité et le marché considérés.

Il ressort de la pièce n°20 communiquée par la société Atexo Conseil que cette dernière avait déjà réalisé une mission pour la métropole de Lyon.

Les appropriations précitées concernant les documents et les références, conjuguées à l'utilisation des identifiant et mot de passe de la société Atexo Conseil, à la mention du nom de cette dernière en qualité de candidat, à la reproduction de son nom et de son logo en page 35 de l'offre et à la présentation d'une équipe composée d'anciens salariés de la société Atexo Conseil, MM. [R] et [G], et même d'un salarié, M. [C], qui était toujours en poste au sein de la société Atexo Conseil sont à l'origine d'un risque de confusion pour le pouvoir adjudicateur quant à l'identité du candidat.

Ce risque est confirmé par l'échange de courriels intervenu les 4 et 7 décembre 2018 entre la société Atexo Conseil et l'agent du service marchés publics de la ville de [Localité 7]. En effet, répondant à la demande de la société Atexo Conseil de lui communiquer l'offre déposée à son nom, l'agent lui a répondu ceci : « le fichier Zip de votre offre vous a été retourné ' » (souligné par la cour), sans identifier que l'offre avait été déposée par la société Meja.

Si l'intimée soutient qu'au cours d'un entretien téléphonique, la ville de [Localité 7] lui a confirmé qu'elle avait bien compris qu'elle seule s'était portée candidate, aucun élément de preuve ne permet de corroborer cette affirmation, qui est démentie par le courriel précité.

Il importe peu que la société Noveane n'établisse pas comment la société Atexo Conseil a été informée de la candidature de la société Meja ou qu'elle n'ait pas entendu se porter candidate dans le cadre de l'appel d'offres en cause pour lequel elle n'aurait pas disposé des compétences requises ou encore que MM. [R] et [G] figuraient toujours sur le site internet de la société Atexo Conseil le 11 février 2020, ces éléments étant inopérants.

Enfin, la société Meja se prévaut à nouveau vainement de l'absence de démonstration d'agissements systématiques et/ou répétés qui n'est pas une condition de la concurrence déloyale.

La responsabilité de la société Meja est engagée sur le fondement des dispositions de l'article 1240 du code civil.

Sur la désorganisation

La société Noveane soutient encore que les faits précités ont entraîné une désorganisation de la société Atexo Conseil dans un contexte délicat de transition et de réorganisation à la suite de son rachat par le groupe Noveane, à l'origine du départ d'autres salariés. Elle souligne que parmi les cinq consultants salariés référencés de la société Meja, quatre ont travaillé pour la société Atexo Conseil sans que l'intimée ne se soit assurée qu'ils étaient libérés de leur clause de non-concurrence. L'appelante considère que la démission de ces salariés, très spécialisés dans le secteur en tension des systèmes d'information, pour être embauchés simultanément par la société Meja, caractérise un fait de débauchage illicite. Elle rappelle que la société Meja revendique les références de ses clients et que M. [C], présenté dans l'offre comme collaborateur de la société Meja, était son salarié à la date du dépôt de l'offre.

La société Meja conteste tout débauchage illicite, expliquant qu'à la suite du rachat de la société Atexo Conseil par la société Noveana, de nombreux salariés ont quitté l'entreprise en raison d'un climat social dégradé. Elle relève que l'appelante ne rapporte pas la preuve de démarches positives de sa part pour débaucher le personnel de la société Atexo Conseil, ni celle de la désorganisation alléguée.

Le débauchage est libre dès lors qu'il ne s'accompagne pas d'un acte déloyal. Il sera considéré comme fautif s'il s'avère massif ou s'il est à l'origine d'une désorganisation de l'entreprise. Par ailleurs, le démarchage de la clientèle est également libre, mais ne doit pas s'accompagner de procédés déloyaux.

S'agissant du débauchage, la société Noveane n'établit pas que les salariés ayant quitté la société Atexo Conseil pour rejoindre la société Meja, y compris M. [C], ont démissionné à la suite d'un acte positif déloyale de débauchage de cette dernière. S'il n'est pas discuté que 4 des 5 consultants de la société Meja sont d'anciens salariés de la société Atexo Conseil, ce seul élément ne permet toutefois pas de caractériser un débauchage déloyal. En effet, l'appelante ne communique aucune information concernant la composition des effectifs de la société Atexo Conseil, de sorte qu'il n'est pas démontré que la démission de ces quatre consultants caractérise un débauchage massif et aucun élément de preuve n'évoque une désorganisation consécutive de la société Atexo Conseil.

La société Noveane soutient que les démissions de ces quatre salariés sont intervenues dans un laps de temps très resserré générant une désorganisation. Cependant, elle ne fournit pas la date de ces démissions, hormis celle de M. [T] qui est insuffisante à justifier ses dires.

La société Noveane reproche encore à la société Meja l'embauche de salariés liés à la société Atexo Conseil par une clause de non-concurrence. Toutefois, l'appelante ne peut se contenter d'invoquer le caractère usuel des clauses de non concurrence dans les contrats de travail des ingénieurs conseil sans démontrer que les salariés embauchés par la société Meja étaient effectivement liés par une telle clause. Or, elle ne communique pas les contrats de travail de ces personnels. La cour relève que l'attestation produite en pièce n°33 précise que M. [T] a quitté l'entreprise « libre de tout engagement ».

S'agissant de la clientèle, la société Meja s'est limitée à déposer une candidature dans le cadre d'un seul appel d'offres dont l'issue n'est pas justifiée et l'appropriation des références des clients de la société Atexo Conseil dans le cadre de cet appel d'offres ne caractérise pas un détournement effectif de cette clientèle.

Dans ces conditions, le fait fautif n'est pas établi.

Sur les demandes d'injonction

Compte tenu des faits de parasitisme et de concurrence déloyale précédemment caractérisés, il convient de faire droit aux demandes de l'appelante tendant à ce qu'il soit fait injonction à la société Meja de :

- restituer tout support, document, rapport, offre, base de données appartenant à la société Atexo Conseil utilisés afin de répondre à l'appel d'offre de la ville de [Localité 7] et produits dans le cadre de la procédure judiciaire sous astreinte de 100 euros par jour de retard passé le délai de 15 jours suivant la signification de l'arrêt ; cette astreinte courra pendant 4 mois ;

- cesser d'utiliser la marque, dont l'existence n'est pas contestée, ainsi que tout support, document, rapport, offre, base de données appartenant à la société Atexo Conseil sous astreinte de 2.000 euros par manquement constaté à compter de la signification de l'arrêt.

En revanche, en l'absence de démonstration du débauchage illicite invoqué par l'appelante, elle doit être déboutée de sa demande tendant à ce qu'il soit fait injonction à la société Meja de cesser de recruter directement ou indirectement tout personnel employé par la société Atexo Conseil sous astreinte.

Sur les demandes indemnitaires

Sur la demande au titre du détournement du savoir-faire

La société Noveane sollicite tant dans les motifs qu'au dispositif de ses conclusions l'octroi d'une somme de 50.000 euros au titre du seul détournement de son savoir-faire.

Si l'existence d'actes de parasitisme et de concurrence déloyale est caractérisée, le détournement du savoir-faire invoqué par l'appelante n'a pas été retenu à défaut pour elle de démontrer son existence qui est contestée par la société Meja.

Dans ces conditions, la demande indemnitaire ne peut aboutir. Le jugement est confirmé sur ce point.

Sur la demande au titre du trouble commercial et de la désorganisation

La société Noveane réclame une indemnité de 20.000 euros au titre du trouble commercial et de la désorganisation subie du fait du débauchage illicite et du détournement de la clientèle.

Cependant, ces fautes n'ayant pas été caractérisées à l'encontre de la société Meja, l'appelante doit, par confirmation du jugement, être déboutée de sa demande.

Sur la demande au titre de la perte de chance

La société Noveane sollicite une indemnité de 20.000 euros au titre de la perte de chance de remporter des marchés auprès de la ville de [Localité 7].

Toutefois, aucun élément de preuve ne permet de démontrer que la société Noveane est désormais discréditée auprès de la ville de [Localité 7].

Par ailleurs, l'appelante indique que la société Meja a déposé sa candidature dans le cadre de l'appel d'offres émis par la ville de [Localité 7] un quart d'heure avant l'échéance, empêchant la société Atexo Conseil de candidater. Toutefois, aucun élément probant n'établit que cette dernière entendait répondre à l'appel d'offres.

Enfin, il n'est pas établi que la société Meja a remporté l'appel d'offres en cause, la pièce n°11 dont l'appelante se prévaut n'étant que la candidature déposée par l'intimée.

En conséquence, par confirmation du jugement, elle doit être déboutée de sa demande en paiement de la somme de 20.000 euros de dommages et intérêts.

Sur le préjudice moral

La société Noveane réclame, en son nom personnel et comme venant aux droits de la société Atexo Conseil, deux sommes de 10.000 euros de dommages et intérêts au titre du préjudice moral.

En matière de responsabilité pour concurrence déloyale, il s'infère nécessairement un préjudice, fût-il seulement moral, de toute pratique consistant, pour son auteur à s'affranchir d'une règlementation impérative dont le respect a nécessairement un coût, ce qui, dès lors, lui donne un avantage concurrentiel indû.

Le parasitisme et la confusion entretenue par la société Meja ont causé un préjudice moral à la société Atexo Conseil, aux droits de laquelle vient la société Noveane, que la cour indemnisera à hauteur de 6.000 euros compte tenu de ce qu'il est reproché et retenu à l'égard de la société Meja un seul agissement préjudiciable.

En revanche, la société Noveane ne justifiant d'aucun préjudice personnel résultant des actes de parasitisme et de concurrence déloyale retenus à l'encontre de la société Meja, elle sera déboutée de sa demande indemnitaire au titre du préjudice moral.

Sur la demande reconventionnelle en paiement de facture

La société Meja expose que les premières conclusions d'appelant de la société Noveane sollicitent l'infirmation du jugement en toutes ses dispositions, sans émettre dans le dispositif de ces conclusions de prétention relative à sa demande reconventionnelle en paiement de sa facture accueillie par les premiers juges. Elle ajoute que dans le corps des mêmes conclusions, aucun développement ne se rapporte à ce chef du jugement que l'appelante critiquait pourtant aux termes de ses déclarations d'appel. L'intimée en conclut que la cour n'est pas saisie de ce chef de jugement, qu'elle ne pourra que confirmer.

Sur le fond, elle soutient avoir justifié dès le mois de décembre 2019 chacune des prestations facturées, qui correspondent aux commandes figurant en annexes des projets de contrats de sous-traitance que la société Atexo Conseil a établis.

La société Noveane conclut au rejet du moyen de procédure soulevé par la société Meja en affirmant que la déclaration d'appel vise bien le chef du jugement l'ayant condamnée au paiement de ladite facture, tout comme ses premières conclusions d'appelante. Elle s'oppose à la demande en paiement, expliquant que le contrat dont se prévaut la société Meja n'a pas été signé par la société Atexo Conseil. Elle souligne que les négociations n'ont pu aboutir du fait du refus de la société Meja de voir insérer dans le contrat une clause de non-débauchage et de concurrence loyale. Elle souligne que la première facture se limitait à la somme de 8.039,01 euros contre 15.076,96 euros HT désormais. Elle soutient que la société Meja entend se faire payer des prestations qui avaient déjà été réalisées par ses fondateurs en tant que salariés de la société Atexo Conseil.

Aux termes de l'article 562 du code de procédure civile, « l'appel défère à la cour la connaissance des chefs de jugement qu'il critique expressément et de ceux qui en dépendent ».

Il résulte de la déclaration d'appel de la société Noveane que cette dernière a déféré à la cour le chef du jugement l'ayant condamnée au paiement de la somme de 18.092,36 euros au titre de la facture de la société Meja n°201811/4 du 12 novembre 2018 avec intérêts au taux légal à compter du 14 décembre 2018.

En vertu de l'article 908 du même code, l'appelant dispose d'un délai de trois mois à compter de la déclaration d'appel pour remettre ses conclusions au greffe et en application de l'article 954 du code précité, ces écritures doivent formuler expressément des prétentions. La cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif.

L'article 910-4 du code de procédure civile précise que : « A peine d'irrecevabilité, relevée d'office, les parties doivent présenter, dès les conclusions mentionnées aux articles 905-2 et 908 à 910, l'ensemble de leurs prétentions sur le fond. L'irrecevabilité peut également être invoquée par la partie contre laquelle sont formées des prétentions ultérieures ».

La société Noveane a notifié ses premières conclusions d'appelante le 27 octobre 2022 et a demandé à la cour de :

« - recevoir l'appel interjeté par la société Noveane, venant aux droits de la société Atexo Conseil, et le juger bien fondé

en conséquence,

- infirmer le jugement du tribunal de commerce de Nanterre du 31 mars 2022 en toutes ses dispositions,

statuant à nouveau,

- juger que la société Meja a commis des actes de concurrence déloyale envers les sociétés Atexo Conseil et Noveane,

- faire injonction à la société Meja d'avoir à restituer tout support, document, rapport, offre, base de données qu'elle détient de la société Atexo Conseil à compter du jugement à intervenir et sous astreinte de 100 euros par jour de retard,

- faire injonction à la société MEJA d'avoir à cesser toute utilisation de la marque, ou de tout support, document, rapport, offre ou base de données propriété de la société Atexo Conseil sous astreinte de 5.000 euros par infraction constatée,

- faire injonction à la société Meja d'avoir à cesser de recruter, directement ou indirectement, de salariés de la société Atexo Conseil sous astreinte de 10.000 euros par infraction constatée,

- condamner la société Meja à régler la somme de 50.000 euros à Atexo Conseil au titre du détournement de savoir-faire spécifique subi,

- condamner la société Meja à régler la somme de 20.000 euros à Atexo Conseil au titre du trouble commercial et de la désorganisation subie par l'entreprise,

- condamner la société Meja à régler la somme de 20.000 euros à Atexo Conseil au titre de la perte de chance de remporter des marchés auprès de la ville de [Localité 7],

- condamner la société Meja à régler la somme de 10.000 euros à chacune des deux sociétés Atexo Conseil et Noveane au titre du préjudice moral subi résultant de l'usurpation du nom, documents, identifiants et réputation de la société Atexo Conseil,

- condamner la société Meja au paiement de la somme de 8.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile au profit de la société Atexo Conseil et de la société Noveane ;

- condamner la société Meja aux entiers dépens dont distraction au profit de Me Pierre Bordessoule de Bellefeuille dans le cadre de l'article 699 du code de procédure civile ».

Il ressort ainsi de ces éléments que si la société Noveane a bien déféré à la cour le chef du jugement l'ayant condamnée au paiement de la facture du 14 décembre 2018, puis conclu à l'infirmation du jugement en toutes ses dispositions, elle n'a pas formulé de prétention tendant au débouté de la société Meja de sa demande en paiement de sa facture. Comme le souligne l'intimée, les premières conclusions d'appelante ne comportent aucun moyen de droit ou de fait relatif au rejet de la demande en paiement de la facture précitée.

La société Noveane a ajouté une prétention (« la débouter de toutes ses autres fins demandes et conclusions ») et développé des moyens de fait et de droit à son soutien dans ses conclusions n°2 notifiées le 13 mars 2024. Cependant, en application de l'article 910-4 précité, la demande est irrecevable.

En conséquence, la cour ne peut que confirmer le jugement en ce qu'il a condamné la société Noveane au paiement de la somme de 18.092,36 euros au titre de la facture n°201811/4 du 12 novembre 2018 avec intérêts au taux légal à compter du 14 décembre 2018.

Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile

Au visa des articles 562, 908, 910-4 et 954 du code de procédure civile, la société Meja sollicite la confirmation du jugement en ce qu'il a condamné la société Noveane au paiement de la somme de 7.000 euros au titre de l'article 700 du code précité, relevant que l'appelante n'a pas émis de prétention au titre de ce chef de condamnation dans ses premières conclusions d'appelante.

La société Noveane conclut au rejet du moyen d'irrecevabilité affirmant que la déclaration d'appel vise bien le chef du jugement l'ayant condamnée au paiement de frais irrépétibles, tout comme ses premières conclusions d'appelante.

Il résulte de la déclaration d'appel de la société Noveane que cette dernière a déféré à la cour le chef du jugement l'ayant condamnée au paiement de la somme de la somme de 7.000 euros au titre des frais irrépétibles. Cependant, au regard du dispositif des premières conclusions d'appelantes notifiées le 27 octobre 2022 et rappelé supra, il apparaît que la société Noveane n'a pas formulé expressément de prétention tendant au débouté de la société Meja de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Néanmoins, dès lors que la société Noveane a, dès ses premières conclusions, demandé l'infirmation du jugement en toutes ses dispositions et la condamnation de la société Meja sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, elle a implicitement mais nécessairement demandé le rejet de la demande fondée sur ces mêmes dispositions formée par la société Meja en première instance.

Au regard de la solution du litige, le jugement sera infirmé des chefs des dépens et de l'article 700 du code de procédure civile.

Partie perdante, la société Meja sera condamnée aux dépens de première instance et d'appel et ne peut prétendre à une indemnité pour frais irrépétibles. Elle sera en revanche condamnée à payer la somme de 8.000 euros au titre des frais irrépétibles exposés par l'appelante en première instance et en cause d'appel.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant par arrêt contradictoire,

Infirme le jugement entrepris, sauf en celle de ses dispositions relative à la demande en paiement de la facture n°201811/4 du 12 novembre 2018 ;

Statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant,

Dit que la société Meja a commis des actes de parasitisme et de concurrence déloyale au préjudice de la société Atexo Conseil à laquelle la société Noveane vient aux droits ;

En conséquence,

Condamne la société Meja à payer à la société Noveane, venant aux droits de la société Atexo Conseil, la somme de 6.000 euros au titre du préjudice moral ;

Enjoint à la société Meja de restituer à la société Noveane tout support, document, rapport, offre, base de données appartenant à la société Atexo Conseil utilisés afin de répondre à l'appel d'offres de la ville de [Localité 7] et produits dans le cadre de la procédure judiciaire sous astreinte de 100 euros par jour de retard passé le délai de 15 jours suivant la signification de l'arrêt ;

Dit que cette astreinte courra pendant 4 mois ;

Enjoint à la société Meja de cesser d'utiliser la marque Atexo Conseil, ainsi que tout support, document, rapport, offre, base de données appartenant à la société Atexo Conseil sous astreinte de 2.000 euros par manquement constaté à compter de la signification de l'arrêt ;

Déboute la société Noveane de ses autres demandes indemnitaires ;

Condamne la société Meja aux dépens de première instance et d'appel ;

Condamne la société Meja à payer à la société Noveane la somme de 8.000 euros au titre des frais irrépétibles exposés en première instance et en cause d'appel.

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Madame Florence DUBOIS-STEVANT, Présidente, et par M. BELLANCOURT, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.