CA Aix-en-Provence, ch. 3-4, 26 septembre 2024, n° 20/09371
AIX-EN-PROVENCE
Arrêt
Infirmation partielle
PARTIES
Demandeur :
Saint Laurent Moto (SARL)
Défendeur :
Sonepar Méditerranée (SAS)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Chalbos
Vice-président :
Mme Vignon
Conseiller :
Mme Martin
Avocats :
Me Daval-Guedj, Me Juston, Me Pujol
EXPOSE DU LITIGE
Le 1er novembre 1996, la SCI Notre-Dame, bailleresse principale, a consenti un bail commercial à la société CECI, preneuse principale, aux droits de laquelle vient la société Sonepar méditerranée.
Le bail principal stipule une clause résolutoire pour défaut de paiement d'une seule trimestrialité de loyer un mois après commandement ou sommation à personne demeurée infructueuse.
Par convention conclue le 4 février 1998 intitulée 'bail de sous-location commerciale', la preneuse principale, la société CECI, a consenti à la société Saint Laurent moto, sous-locataire, une sous-location à usage commercial, pour une partie des lieux loués.
Le bail commercial de la sous-location, intitulé 'bail de sous-location commerciale' stipule une clause résolutoire en ces termes : 'pour l'application du présent contrat de sous-location des dispositions relatives à la clause résolutoire du bail commercial, il est substitué le locataire principal au bailleur et le sous-locataire au preneur'.
Le prix de la sous-location à usage commercial consistait en un loyer annuel de base de 180 000 francs hors taxes hors charges hors remboursement de l'impôt foncier.
Un litige s'est noué entre les parties concernant leur compte.
Plusieurs procédures ont opposé les parties, dont la présente procédure, suite à trois commandements de payer distincts délivrés par la preneuse principale à la sous-locataire et qui sont les suivants :
- le 28 janvier 2015 un commandement de payer la somme de 44.215,16 euros au titre des loyers des 2ème, 3ème, 4ème trimestres 2014 et de la taxe foncière 2014,
- le 15 février 2018 un commandement de payer visant la clause résolutoire à la sous-locataire pour un montant de 27.991,77 euros dont 27 743, 74 euros de loyers(ce commandement étant l'objet de la présente procédure),
- le 11 avril 2019 un commandement de payer le loyer du troisième trimestre 2018 et d'une taxe foncière pour 2018.
Par acte d'huissier du 15 mars 2018 la société Saint Laurent moto a fait assigner la société Sonepar méditerranée devant le tribunal de grande instance de Grasse en opposition du commandement de payer délivré par elle le 15 février 2018 invoquant en particulier la nullité de cet acte.
Par jugement prononcé le 7 septembre 2020, le tribunal judiciaire de Grasse a statué en ces termes :
- reçoit la société Saint-Laurent Moto en son opposition au commandement de payer délivré par la société Sonepar Méditerranée le 15 février 2018,
- déboute la société Saint Laurent moto de sa demande de nullité du commandement de payer visant la clause résolutoire délivré le 15 février 2018,
- condamne la société Saint Laurent moto à payer à la société Sonepar méditerranée la somme de 24.735,71 euros au titre des loyers, charges et taxes impayés, suivant décompte arrêté au 11 novembre 2019,
- dit que cette somme produira intérêts au taux légal à compter du 15.02.2018,
- constate l'acquisition de plein droit de la clause résolutoire visée au commandement de payer du 15 février 2018,
- constate la résiliation du bail de sous location commerciale à effet au 1 er février 1998 conclu entre la SA CECI, locataire principal, aux droits de laquelle agit la SAS Sonepar méditerranée, et la SARL Saint Laurent moto, en présence de la SCI Notre Dame, bailleresse,
- ordonne l'expulsion de la Société Saint Laurent moto, ainsi que de tout occupant de son chef des lieux occupés sis à [Adresse 3], dans le délai d'un mois à compter de la signification dudit jugement et ce au besoin, avec le concours de la force publique,
- ordonne en tant que de besoin le transport et la séquestration des meubles et objets mobiliers garnissant les lieux loués dans un garde meuble ou tel autre lieu du choix du locataire principal, après rédaction d'un inventaire précis desdits biens dans le cadre du procès verbal d'expulsion,
- fixe l'indemnité d'occupation mensuelle à la somme de 4.500 euros mensuelle à compter de ladite décision et jusqu'à libération effective des locaux,
- déboute la SARL Saint Laurent moto de sa demande de délais de paiement,
- déboute la SAS Sonepar méditerranée de sa demande de dommages et intérêts pour résistance abusive,
- rejette toutes demandes plus amples ou contraires,
- condamne la SARL Saint Laurent moto au paiement d'une somme de 2.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamne la SARL Saint Laurent moto aux entiers dépens de l'instance, en ce compris le coût du commandement de payer visant la clause résolutoire du 15 février 2018, soit 248, 03 euros,
Pour condamner la sous-locataire à payer à la preneuse principale une somme de 24 735, 71 euros, le tribunal a estimé que cette dernière justifiait bien d'une créance de ce montant au 11 novembre 2019 et qu'elle avait bien tenu compte des versements effectués par la preneuse principale postérieurement à la délivrance du commandement attaqué.
Pour constater l'acquisition de la clause résolutoire à compter du 15 mars 2018 et ordonner l'expulsion des lieux de la sous-locataire, le tribunal retenait que le commandement de payer était valide.
La société Saint-Laurent moto a formé un appel le 1er octobre 2 020.
La déclaration d'appel est ainsi rédigée : 'L'appel tend à la nullité, l'annulation et la réformation de la décision en ce qu'elle :
- déboute la SARL Saint Laurent moto de sa demande de nullité du commandement de payer visant la clause résolutoire délivré le 15 février 2018,
- condamne la SARL Saint Laurent moto à payer à la SAS Sonepar méditerranée la somme de 24.735,71 euros, au titre des loyers, charges et taxes impayées, suivant décompte arrêté au 11 novembre 2019,
- dit que cette somme produira intérêts au taux légal à compter du 15 février 2018,
- constate l'acquisition de plein droit de la clause résolutoire visée au commandement de
payer du 15 février 2018,
- constate la résiliation du bail de sous-location commerciale à effet au 1er février 1998 conclu entre la SA CECI, locataire principal, aux droits de laquelle agit la SAS Sonepar méditerranée, et la SARL Saint Laurent moto, en présence de la SCI Notre-Dame, bailleresse,
- ordonne l'expulsion de la SARL Saint Laurent moto ainsi que de tout occupant de son chef des lieux occupés sis à [Adresse 3], dans le délai d'un mois à compter de la signification du présent jugement et ce, au besoin avec le concours de la force publique,
- ordonne autant que de besoin le transport et la séquestration des meubles et objets mobiliers garnissant les lieux dans un garde-meuble ou tel autre lieu du choix du locataire principal, après rédaction d'un inventaire précis desdits biens dans le cadre du procès-verbal d'expulsion,
- fixe l'indemnité d'occupation mensuelle en contrepartie de l'occupation des locaux sis à [Adresse 3], dans un bâtiment à usage d'entrepôt et d'activités industrielles d'une surface au sol de 3.300 m2, à la somme de 4.500 euros pat mois à compter de la présente décision et jusqu'à la libération effective des lieux,
- déboute la SARL Saint Laurent moto de sa demande de délais de paiement,
- déboute la SAS Sonepar méditerranée de sa demande de dommages et intérêts pour résistance abusive,
- rejette toute demande plus ample ou contraire,
- condamne la SARL Saint Laurent moto à payer à la SAS Sonepar méditerranée la somme de 2.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ,
- condamne la SARL Saint Laurent moto aux entiers dépens de l'instance, en ce compris le coût du commandement de payer visant la clause résolutoire du 15 février 2018 soit 248,03 euros.
Par jugement prononcé le 20 octobre 2020, le tribunal de commerce d'Antibes a ouvert une procédure de sauvegarde à l'égard de la Société Saint Laurent moto et a désigné la SELARL MJ [Y], prise en la personne de Maître [L] [Y], es qualité de mandataire judiciaire.
Le 17 novembre 2020, la preneuse principale déclarait sa créance sur la sous-locataire entre les mains du mandataire judiciaire.
Concernant la créance déclarée, la preneuse principale indiquait :'je vous remercie d'accuser réception de la déclaration de créance de la société Sonepar méditerranée au montant inséré au sein du jugement en date du 7 septembre 2020 et mentionnant une somme que j'arrondis à 25 000 euros'.
L'instruction de la procédure a été clôturée par ordonnance prononcée le 14 mai 2024.
PRÉTENTIONS ET MOYENS
Par conclusions notifiées par voie électronique le 29 juin 2021, la société Saint-Laurent Moto et la société MJ [Y], mandataire judiciaire, demandent à la cour de :
vu les dispositions des articles L622-1, L 622-7, L622-21, L622-22 et L 622-26 du code de commerce,
vu les dispositions de l'article 1353 du code civil,
- donner acte à la SELARL MJ [Y], prise en la personne de Maître [L] [Y] es qualité de mandataire judiciaire de son intervention volontaire à la présente procédure
- constater qu'une procédure de sauvegarde a été ouverte à l'égard de la SARL Saint Laurent moto selon jugement du 20 octobre 2020,
- constater que le jugement du 7 septembre 2020 n'était pas passé en force de chose jugée au jour du jugement d'ouverture de la procédure de sauvegarde,
en conséquence
- infirmer le jugement entrepris dans toutes ses dispositions, à l'exception de celles ayant débouté la société Sonepar de sa demande de dommages et intérêts,
et statuant de nouveau :
- déclarer irrecevable et à défaut débouter la société Sonepar méditerranée de ses demandes tendant à voir constater l'acquisition de la clause résolutoire, à voir résilier la convention de sous-location commerciale, à voir ordonner l'expulsion de la SARL Saint Laurent moto, à voir ordonner le transport et la séquestration des meubles et objets mobiliers et à voir fixer une indemnité d'occupation,
- déclarer irrecevable et à défaut débouter la société Sonepar de l'ensemble de ses demandes de condamnation à paiement présentées à l'encontre de la société Saint Laurent moto,
- débouter la société Sonepar méditerranée de toute demande de fixation au passif de la société Saint Laurent moto du prétendu arriéré de loyers et de charges ,
- débouter la société Sonepar méditerranée de toute demande de fixation au passif de la société Saint Laurent moto au titre de l'article 700 et des dépens,
- subsidiairement sur ce point, juger que seule la somme de 264, 29 euros pourra être inscrite au passif de la société Saint-Laurent Moto au titre de l'article 700 et des dépens,
- débouter la société Sonepar du surplus de ses demandes,
- condamner la société Sonepar Méditerranée au paiement au profit de la société Saint-Laurent Moto d'une somme de 3.500 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ,
- la condamner aux entiers dépens de première instance et d'appel, ces derniers distraits.
Par conclusions notifiées par voie électronique le 12 juillet 2021, la société Sonepar Méditerranée demande à la cour de :
vu les dispositions des articles L 145-41 et 621-29 du code de commerce,
vu les articles L622-22 du code de commerce et R622-20 du code de commerce,
- confirmer le jugement,
- constater la résiliation du bail commercial liant la Société Sonepar méditerranée à la Société Saint Laurent moto du 4 février 1998 au vu de la mauvaise foi de la société Saint Laurent moto qui abuse du système de protection des procédures collectives,
- débouter la société Saint Laurent moto de toutes ses demandes, fins et prétentions, y compris de sa demande de délais,
- ordonner l'expulsion de la société Saint Laurent moto ainsi que tous occupants de son chef et ce au besoin avec l'aide et l'assistance de la force publique et d'un serrurier,
- condamner la société Saint Laurent moto à verser à la société Sonepar méditerranée la somme de 24 735.71 euros en principal au 11 novembre 2019 sous deniers ou quittance au titre des loyers dus,
- fixer une indemnité d'occupation due par la société Saint Laurent moto à la somme de 4.500 euros par mois à compter de la décision à intervenir et jusqu'à expulsion effective des lieux loués,
- condamner la société Saint Laurent moto à verser à la société Sonepar méditerranée la somme de 8000 euros à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive et réparation de son préjudice financier,
- condamner la société Saint Laurent moto à verser à la Société Sonepar Méditer année la somme de 3.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'en tous les frais et dépens incluant le coût du commandement de payer visant la clause résolutoire signifié le 28 janvier 2015 d'un montant de 248.03 euros,
à titre très subsidiaire, si la cour considère que la société Sonepar méditerranée ne peut maintenir les demandes présentées devant le premier juge :
- fixer la créance de la Société Sonepar méditerranée a la somme de 25 000 euros à la procédure collective de la société Saint Laurent moto,
- constater la suspension de la procédure de résiliation du contrat et d'expulsion au vu de la mesure de sauvegarde de justice de la société Saint Laurent moto,
- condamner la société Saint Laurent moto à verser à la société Sonepar méditerranée la somme de 8000 euros à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive et réparation de son préjudice financier,
- condamner la Société saint Laurent moto à verser à la société Sonepar méditerranée la somme de 3.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'en tous les frais et dépens incluant le coût du commandement de payer visant la clause résolutoire signifié le 28 janvier 2015 d'un montant de 248.03 euros.
MOTIFS
En l'absence d'opposition, il est donné acte à la SELARL MJ [Y], prise en la personne de Maître [L] [Y] en qualité de mandataire judiciaire, de son intervention volontaire à la présente procédure
1-sur la demande de la preneuse principale de confirmation du jugement en ce qu'il rejette la demande de nullité du commandement de payer du 15 février 2018
En l'absence de demande d'opposition sur ce point, le jugement est confirmé en ce qu'il reçoit la société Saint Laurent moto en son opposition au commandement de payer du 15 février 2018.
Alors que la société preneuse principale demande la confirmation du jugement en toutes ses dispositions, ce qui inclut donc également une demande de confirmation du chef de jugement qui rejette la demande de la sous-locataire de nullité du commandement du 15 février 2018, cette dernière ne maintient plus ses moyens développés en première instance qui tendaient à l'annulation du commandement de payer du 15 février 2018.
En conséquence, le jugement est confirmé en ce qu'il déboute la société Saint Laurent moto de sa demande de nullité du commandement de payer visant la clause résolutoire délivré le 15 février 2018.
2-sur la demande de la sous-locataire d'infirmation du jugement concernant les délais de paiement
L'appelante sollicite l'infirmation du jugement notamment en ce qu'il rejette sa demande de délais de paiement, tout en s'abstenant de présenter une demande, à hauteur d'appel, de tels délais de paiement.
De son côté, l'intimée sollicite la confirmation du jugement en toutes ses dispositions, ce qui signifie donc qu'elle sollicite la confirmation du chef de jugement ayant rejeté la demande de la sous-locataire de délais de paiement.
La cour ne peut que confirmer le jugement en ce qu'il rejette la demande de délais de paiement de la société Saint Laurent moto, laquelle bénéficie en tout état de cause d'une procédure de sauvegarde.
3-sur la demande de la sous-locataire tendant à voir déclarer irrecevables et à défaut infondées les demandes de la preneuse principale de constat de l'acquisition de la clause résolutoire, de résiliation de la convention de sous-location commerciale, d'expulsion, de transport des meubles et en indemnités d'occupation
Aux termes de l'article L145-41 du code de commerce :Toute clause insérée dans le bail prévoyant la résiliation de plein droit ne produit effet qu'un mois après un commandement demeuré infructueux. Le commandement doit, à peine de nullité, mentionner ce délai.Les juges saisis d'une demande présentée dans les formes et conditions prévues à l'article 1343-5 du code civil peuvent, en accordant des délais, suspendre la réalisation et les effets des clauses de résiliation, lorsque la résiliation n'est pas constatée ou prononcée par une décision de justice ayant acquis l'autorité de la chose jugée. La clause résolutoire ne joue pas, si le locataire se libère dans les conditions fixées par le juge.
Selon l'article L622-21 du code de commerce dans sa version en vigueur du 15 février 2009 au 1er octobre 2021:
I.-Le jugement d'ouverture interrompt ou interdit toute action en justice de la part de tous les créanciers dont la créance n'est pas mentionnée au I de l'article L. 622-17 et tendant :
1° A la condamnation du débiteur au paiement d'une somme d'argent ,
2° A la résolution d'un contrat pour défaut de paiement d'une somme d'argent.
II.-Il arrête ou interdit également toute procédure d'exécution de la part de ces créanciers tant sur les meubles que sur les immeubles ainsi que toute procédure de distribution n'ayant pas produit un effet attributif avant le jugement d'ouverture.
III.-Les délais impartis à peine de déchéance ou de résolution des droits sont en conséquence interrompus.
L'article L622-22 du même code ajoute :Sous réserve des dispositions de l'article L. 625-3, les instances en cours sont interrompues jusqu'à ce que le créancier poursuivant ait procédé à la déclaration de sa créance. Elles sont alors reprises de plein droit, le mandataire judiciaire et, le cas échéant, l'administrateur ou le commissaire à l'exécution du plan nommé en application de l'article L. 626-25 dûment appelés, mais tendent uniquement à la constatation des créances et à la fixation de leur montant.
Le débiteur, partie à l'instance, informe le créancier poursuivant de l'ouverture de la procédure dans les dix jours de celle-ci.
L'article 539 du code de procédure civile prévoit :Le délai de recours par une voie ordinaire suspend l'exécution du jugement. Le recours exercé dans le délai est également suspensif.
Enfin, selon l'article 500 du même code :'A force de chose jugée le jugement qui n'est susceptible d'aucun recours suspensif d'exécution.Le jugement susceptible d'un tel recours acquiert la même force à l'expiration du délai du recours si ce dernier n'a pas été exercé dans le délai'.
Pour obtenir la réformation du jugement en ce qu'il constate l'acquisition de plein droit de la clause résolutoire visée au commandement de payer du 15 février 2018 ainsi que la résiliation de la sous-location et en ce qu'il ordonne l'expulsion de la sous-locataire, cette dernière soutient que :
- le jugement constatant la résiliation et prononçant son expulsion a été prononcé le 7 septembre 2020,
- par jugement en date du 20 octobre 2020, le tribunal de commerce d'Antibes a ouvert pour son compte une procédure de sauvegarde,
- aux termes des dispositions de l'article L622-21 du code de commerce applicable à la procédure de sauvegarde, le jugement d'ouverture interrompt ou interdit toute action en justice de la part de tous les créanciers dont la créance n'est pas mentionnée au I de l'article L. 622-17 et tendant notamment à la résolution d'un contrat pour défaut de paiement d'une somme d'argent,
- ne peut être poursuivie l'action en constatation de l'acquisition de la clause résolutoire dès lors qu'à la date du jugement d'ouverture, l'acquisition de la clause résolutoire, pour défaut de paiement d'un arriéré locatif antérieur à ce jugement, n'avait encore été constatée par aucune décision de justice passée en force de chose jugée.
De son côté, pour justifier sa demande de résiliation de la convention de sous-location, la preneuse principale invoque, d'une part, la clause résolutoire prévue dans cette convention et d'autre part, le commandement de payer délivré le 15 février 2018 en application de ladite clause.
Il est de principe que le contrat de bail est en cours tant que l'action introduite n'a donné lieu à aucune décision passée en force de chose jugée.
En conséquence, l'action en constatation de la clause résolutoire de plein droit d'un bail commercial en cours au jour du jugement d'ouverture de la procédure collective du preneur est une action qui tend à la résiliation d'un contrat pour défaut de paiement d'une somme d'argent de la part du débiteur et, à ce titre, est interrompue par l'ouverture de la procédure collective du preneur.
Il est encore acquis que la résiliation d'un contrat de bail commercial par le jeu d'une clause résolutoire n'étant acquise qu'une fois cette résiliation constatée par une décision passée en force de chose jugée, la demande du bailleur, formulée postérieurement à l'ouverture d'une procédure collective à l'encontre du preneur et tendant à faire constater la résiliation du bail commercial sur le fondement d'une clause résolutoire visant des loyers dus antérieurement à l'ouverture de la procédure est soumise à l'arrêt des poursuites individuelles.
A contrario, le bailleur peut se prévaloir des effets de la résiliation du bail uniquement si le jugement constatant l'acquisition de la clause résolutoire était passé en force de chose jugée avant l'ouverture de la procédure collective.
En l'espèce, la preneuse principale sollicite l'acquisition de la clause résolutoire insérée au contrat de sous-location du 4 février 1998 en invoquant le défaut de paiement des loyers par la sous-locataire.
Le défaut de paiement dont la preneuse principale entend se prévaloir concerne des loyers antérieurs au jugement prononçant la sauvegarde de la sous-locataire et rendu le 20 octobre 2020.
En l'espèce dès lors qu'il existe un jugement d'ouverture d'une procédure collective au bénéfice de la sous-locataire, la question qui se pose est celle de savoir si la règle de l'interruption de l'action en justice est applicable et si elle est de nature à rendre irrecevable la demande de constat de l'acquisition de la clause résolutoire pour défaut de paiement ou des charges échus antérieurement au jour du jugement d'ouverture de la procédure.
Pour savoir si la règle de l'interruption de l'action en justice en résolution de la sous-location est en l'espèce applicable, il faut au préalable déterminer si la sous-location était encore en cours au moment du jugement d'ouverture de la sauvegarde (prononcé le 20 octobre 2020) compte tenu de la date du jugement querellé (7 septembre 2020) qui constate la résiliation de la sous-location commerciale.
Or, il n'est pas contesté par la preneuse principale qu'au moment où le jugement d'ouverture de la sauvegarde a été prononcé, le délai pour faire appel contre le jugement constatant la résiliation du bail était encore ouvert et que ce jugement constatant la résiliation du bail n'était donc pas passé en force de chose jugée.
En conséquence, la cour, qui constate qu'une procédure collective était ouverte à l'encontre du preneur, doit respecter les effets attachés au principe de l'interdiction des poursuites individuelles.
L'action de la société Sonepar méditerranée tendant au constat de l'acquisition de la clause résolutoire est donc irrecevable.
Pour s'opposer à l'irrecevabilité de sa demande de constat de résiliation du bail découlant de l'existence d'une procédure collective, la preneuse principale oppose les deux moyens de droit suivants :
- la sous-locataire est de mauvaise foi dans l'utilisation de la procédure de sauvegarde,
- elle est en droit d'exercer son action en résiliation au bail car même si cette action a été interrompue par l'ouverture de la procédure collective, les deux conditions cumulatives nécessaires à sa reprise sont en l'espèce réunies, à savoir le fait qu'elle a déclaré sa créance et qu'elle a mis en cause le mandataire judiciaire.
S'agissant du moyen opposé par la preneuse principale, tiré de la mauvaise foi de la sous-locataire dans l'utilisation des procédures collectives, celui-ci est inopérant dès lors qu'une décision de justice, qui a autorité de la chose jugée, a ouvert une procédure de sauvegarde à l'encontre de cette dernière selon jugement du 20 octobre 2020. Cette procédure de sauvegarde s'impose à la cour et le moyen tiré de la mauvaise foi ne pouvait être opposé que devant la juridiction compétente, soit le tribunal de commerce d'Antibes.
S'agissant du moyen opposé par la preneuse, tiré de son supposé droit de reprendre son action en constat de la résiliation du bail, il n'est pas plus pertinent. En effet, la clause résolutoire d'un bail commercial pour défaut de paiement des loyers et charges n'est définitivement acquise avant l'ouverture de la procédure collective du preneur qu'en vertu d'une décision de justice passée en force de chose jugée avant la date d'ouverture et, en l'absence d'une telle décision, le bailleur ne peut plus poursuivre l'action tendant à la constatation de la résiliation du bail.
De plus, lorsque l'action est reprise à l'initiative du bailleur dans les conditions des articles L. 621-22 et R. 622-20 du code de commerce, elle ne peut tendre qu'à la fixation de la créance au passif de la procédure collective du preneur.
Les moyens de la société Sonepar méditerranée sont donc écartés.
Infirmant le jugement et faisant droit aux demandes de la société Saint Laurent moto,la cour déclare irrecevables les demandes de la la société Sonepar méditerranée en constat de la résiliation du bail, en expulsion, en fixation d'une indemnité d'occupation et tendant à voir ordonner le transport et la séquestration des meubles et objets mobiliers.
3-sur la demande de la preneuse principale de condamnation de la sous-locataire en paiement à hauteur de 24.735,71 euros,
Selon l'article L622-21 du code de commerce :I.-Le jugement d'ouverture interrompt ou interdit toute action en justice de la part de tous les créanciers dont la créance n'est pas mentionnée au I de l'article L. 622-17 et tendant :
1° A la condamnation du débiteur au paiement d'une somme d'argent ;
2° A la résolution d'un contrat pour défaut de paiement d'une somme d'argent.
II.-Il arrête ou interdit également toute procédure d'exécution de la part de ces créanciers tant sur les meubles que sur les immeubles ainsi que toute procédure de Distribution n'ayant pas produit un effet attributif avant le jugement d'ouverture.
III.-Les délais impartis à peine de déchéance ou de résolution des droits sont en conséquence interrompus.
L'article L622-17 du même code ajoute :I.-Les créances nées régulièrement après le jugement d'ouverture pour les besoins du déroulement de la procédure ou de la période d'observation, ou en contrepartie d'une prestation fournie au débiteur pendant cette période, sont payées à leur échéance.
Aux termes de l'article L622-22 du même code : Sous réserve des dispositions de l'article L. 625-3, les instances en cours sont interrompues jusqu'à ce que le créancier poursuivant ait procédé à la déclaration de sa créance. Elles sont alors reprises de plein droit, le mandataire judiciaire et, le cas échéant, l'administrateur ou le commissaire à l'exécution du plan nommé en application de l'article L. 626-25 dûment appelés, mais tendent uniquement à la constatation des créances et à la fixation de leur montant.Le débiteur, partie à l'instance, informe le créancier poursuivant de l'ouverture de la procédure dans les dix jours de celle-ci
L'article L622-28 du code de commerce dispose enfin :Le jugement d'ouverture arrête le cours des intérêts légaux et conventionnels, ainsi que de tous intérêts de retard et majorations, à moins qu'il ne s'agisse des intérêts résultant de contrats de prêt conclus pour une durée égale ou supérieure à un an ou de contrats assortis d'un paiement différé d'un an ou plus. Les personnes physiques coobligées ou ayant consenti une sûreté personnelle ou ayant affecté ou cédé un bien en garantie peuvent se prévaloir des dispositions du présent alinéa.
Le jugement d'ouverture suspend jusqu'au jugement arrêtant le plan ou prononçant la liquidation toute action contre les personnes physiques coobligées ou ayant consenti une sûreté personnelle ou ayant affecté ou cédé un bien en garantie. Le tribunal peut ensuite leur accorder des délais ou un différé de paiement dans la limite de deux ans.Les créanciers bénéficiaires de ces garanties peuvent prendre des mesures conservatoires.
La société Sonepar méditerranée sollicite la confirmation du jugement concernant les loyers, charges, taxes impayées en ce qu'il a condamné la société sous-locataire à lui régler la somme de 24.735,71 euros au titre d'une créance concernant des sommes dues entre 2016 et 2019.
Concernant sa condamnation à payer cette créance, la société sous-locataire demande que le jugement soit infirmé et que la demande en ce sens soit déclarée irrecevable au motif que ces sommes, à les supposer justifiées, sont antérieures au jugement d'ouverture de la procédure collective.
En l'espèce, il est exact que la dette à laquelle la société Saint Laurent moto a été condamnée est antérieure au jugement d'ouverture de la procédure de sauvegarde.
Dès lors, en application de la règle de l'arrêt des poursuites individuelles, il y a lieu d'infirmer le jugement en ce qu'il prononce une condamnation contre la société Saint-Laurent moto.
Si aucune condamnation ne peut être prononcée contre la sous-locataire, il y a lieu d'examiner si, en revanche, la preneuse principale est en droit d'obtenir la fixation de sa créance au passif de la procédure de sauvegarde de la sous-locataire et ce à hauteur du montant réclamé ( 24 735,71 euros).
Or, la preneuse principale a réalisé les démarches suivantes requises par l'article L 622-22 du code de commerce, ce qui lui ouvre le droit d'obtenir la fixation de sa créance au passif de la sous-locataire :
- elle a déclaré sa créance le 17 novembre 2020 en ces termes : « le montant inséré au sein du jugement en date du 7 septembre 2020 et mentionnant une somme que j'arrondie à 25.000 euros »,
- le mandataire judiciaire est intervenu volontairement à l'instance.
Pour soutenir que la déclaration de créance réalisée par la preneuse principale est irrégulière et ne donne pas le droit à cette dernière d'obtenir une fixation de sa créance, la sous-locataire estime que cette déclaration de créance ne vise aucunement les intérêts échus avant le jugement d'ouverture.
Cependant, ce moyen ne peut faire échec à la demande de la preneuse principale de fixation de sa créance, en présence d'une déclaration de créance renvoyant, pour le détail, au jugement du 7 septembre 2020, lequel précise les condamnations prononcées contre la société Saint Laurent moto.
Ainsi, contrairement à ce qu'affirme la société Saint Laurent moto, l'intimée est en droit d'obtenir la fixation d'une créance, si elle est fondée, et ce dans la limite toutefois de la somme déclarée de 25 000 euros.
De plus, s'agissant des intérêts de retard, il y a lieu de rappeler que le jugement d'ouverture arrête le cours des intérêts légaux et conventionnels.
En conséquence, la cour infirme le jugement en ce qu'il :
- condamne la SARL Saint Laurent moto à payer à la SAS Sonepar méditerranée la somme de 24.735,71 euros, au titre des loyers, charges et taxes impayées, suivant décompte arrêté 11 novembre 2019,
- dit que cette somme produira intérêts au taux légal à compter du 15 février 2018.
4-sur la demande subsidiaire de la preneuse principale de fixation d'une créance de 25 000 euros au passif de la sous-locataire
L'article 1728 du code civil dispose :Le preneur est tenu de deux obligations principales :
1° D'user de la chose louée raisonnablement, et suivant la destination qui lui a été donnée par le bail, ou suivant celle présumée d'après les circonstances, à défaut de convention ,
2° De payer le prix du bail aux termes convenus.
Vu l'article 1134 ancien du code civil,
L'article 1315 du code civil ajoute :Celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver.Réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation.
La preneuse principale se prévaut d'une créance déclarée à hauteur de 25 000 euros qu'elle détiendrait à l'encontre de la sous-locataire et plus précisément d'une somme de 24 735.71 euros en principal au 11 novembre 2019.
Concernant le principal réclamé, à hauteur de 24 735, 71 euros, il est détaillé par la société Sonepar méditerranée dans sa pièce 14 et correspond aux sommes suivantes :
- les loyers du 4ème trimestre 2019 à hauteur de 13 315, 31 euros,
- les taxes foncières 2016 ,2017 , 2018 à hauteur de 4.908 euros, 5.082 euros, 7 329 euros
- un virement de la sous-locataire, déduit des sommes précédentes, à hauteur de 5 899, 20 euros au 14 mai 2019.
La société Saint Laurent moto conteste le bien-fondé des montants réclamés tant au titre des loyers que des taxes foncières et allègue avoir effectué des règlements dont la bailleresse n'aurait pas tenu compte.
- sur le reliquat des loyers échus impayés
S'agissant des loyers réclamés, dus pour le 4ème trimestre 2019, ce montant s'établit à 13 315, 31 euros pour les loyers du 4ème trimestre 2019.
- sur les taxes foncières
Concernant les taxes foncières dues pour 2016 ,2017, 2018,le bail de sous-location commerciale en date du 4 février 1998 stipule :« Outre les charges relatives à son exploitation, le sous-locataire supportera la quote-part de l'impôt foncier au prorata des surfaces sous-loués. »
Il est de principe qu'il incombe au bailleur qui réclame au preneur de lui rembourser, conformément au contrat de bail commercial le prévoyant, un ensemble de dépenses et de taxes, d'établir sa créance en démontrant l'existence et le montant de ces charges.
En l'espèce, la société Sonepar méditerranée fait à juste titre observer que la Société Sonepar Méditerranée, à qui incombe la charge de démontrer l'existence et le montant des taxes foncières réclamées, ne justifie pas du montant desdites taxes pour 2016 et 2017, en s'abstenant de produire tout document utile et en particulier les avis d'impôt concernés.
Ainsi, il doit être considéré que la société Sonepar méditerranée ne justifie pas de la créance d'un montant total de 9990 euros au titre des taxes foncières dues pour 2016 et pour 2017.
La demande de la société Sonepar méditerranée, en fixation de créance, au titre des taxes foncières 2016 et 2017 est rejetée.
Concernant la taxe foncière 2018, la sous-locataire ne conteste pas que la preneuse principale en a justifié, tout en soutenant que :
- la somme de 7329, 60 euros inclurait une somme de 1192 euros au titre de la taxe ordures ménagères
- il a déjà payé une partie de la somme de 7 329, 60 euros en ayant procédé à un paiement de 5 899, 20 euros.
Toutefois, pour ce qui est de la taxe ordures ménagères, il ne ressort pas suffisamment des pièces produites par la société Saint Laurent moto que la somme de
7 329, 60 euros, qui lui est réclamée par la preneuse principale, comprendrait la taxe ordure ménagère à hauteur de 1192 euros.
Ensuite, le virement de 5 899, 20 euros, allégué par la sous-locataire, a déjà été enregistré et pris en compte par la preneuse principale, qui le note sur sa pièce 14 et le déduit des dettes réclamées. Néanmoins, ce virement devra effectivement venir en déduction du total dû arrêté par la cour.
Ainsi, au titre du principal dû, le montant dû par la société Saint Laurent moto est de 7 329 euros au titre de la taxe foncière 2018.
- sur les règlements allégués par la société locataire
Concernant les règlements allégués et qui n'auraient pas été pris en considération par la preneuse principale, la sous-locataire affirme qu'ils sont les suivants :
- une somme totale de 26 630, 62 euros au titre du 4ème trimestre 2017 et du 1er trimestre 2018,
- un virement à hauteur de 5 899, 20 euros le 14 mai 2019,
- deux virements chacun de 8875, 88 euros (le 6 décembre 2019) et de 4438,43 euros (le 20 décembre 2019) et ce en règlement du loyer dû pour le 4ème trimestre 2019.
S'agissant des règlements à hauteur d'un montant total de 26 630, 62 euros, l'appelante indique elle-même qu'ils concernent les loyers du 4ème trimestre 2017 et du 1er trimestre 2018. Or, le principal réclamé par la preneuse principale, au titre des loyers échus impayés, est celui correspondant à des loyers différents, soit ceux dûs pour le 4ème trimestre 2019 et ce à hauteur de 13 315, 31 euros.
Ainsi, les paiements de 26 630, 62 euros faits par la sous-locataire ne s'imputent pas sur la créance litigieuse.
S'agissant ensuite du paiement de 5 899, 20 euros, la cour a précédemment jugé que la société Sonepar méditerranée l'avait bien pris en considération puisqu'elle le mentionne sur sa pièce 14 et le déduit des sommes réclamées dans le cadre de cette instance. Néanmoins, ce virement devra effectivement venir en déduction du total dû arrêté par la cour.
Pour ce qui est enfin des deux virements de 8875, 88 euros (le 6 décembre 2019) et de 4438,43 euros (le 20 décembre 2019), non seulement la société Saint Laurent moto démontre les avoir effectués au profit de la preneuse principale mais, en outre, il ne ressort ni des écritures, ni des pièces versées aux débats, que la société Sonepar méditerranée en aurait tenu compte.
Il sera donc tenu compte de ces deux paiements pour déterminer le montant de la créance alléguée.
- sur le montant total dû
Finalement, le détail du principal dû s'établit ainsi :
- les loyers du 4ème trimestre 2019 à hauteur de 13 315, 31 euros,
- la taxe foncière 2018 pour 7 329 euros,
- un virement de la sous-locataire, à déduire des sommes précédentes, à hauteur de
5 899, 20 euros au 14 mai 2019,
- deux virements de la sous-locataire, à déduire des sommes précédentes, d'un montant total de 13 314, 31 euros.
La créance à fixer au passif de la sous-locataire, au titre du principal, est de
1431, 80 euros.
Infirmant le jugement, la cour fixe la créance de la société Sonepar méditerranée au passif de la procédure collective de la société Saint Laurent moto à hauteur de
1431, 80 euros (au titre des loyers du 4ème trimestre 2019, de la taxe foncière 2018 pour 7329 euros, dont il a été déduit des virements de 5 899, 20 euros, 8875, 88 euros, 4438,43 euros).
4-sur les condamnations prononcées en première instance au titre de l'article 700 et des dépens
La société sous-locataire sollicite l'infirmation du jugement en ce qu'il l'a condamnée aux dépens et à payer, au bénéfice de la société Sonepar méditerranée,une somme de 2000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Pour s'opposer à sa condamnation à ce titre, la société Saint Laurent moto soutient d'abord que la créancière n'a pas déclaré ses supposées créances au titre de l'article 700 et de dépens entre les mains du mandataire judiciaire. La société Saint Laurent moto ajoute que la déclaration de créance faite par la créancière portait sur une somme de
25 000 euros et que le principal allégué étant alors de 24 735,71 euros, la fixation au passif ne pourrait en tout état de cause que porter sur le reliquat, soit 264,29 euros.
Les sommes litigieuses (article 700 et dépens) sont des créances de la locataire principale nées antérieurement au jugement ouvrant la procédure collective prononcé le 20 octobre 2020.
S'agissant de créances antérieures à l'ouverture de la procédure de sauvegarde, elles ne peuvent désormais plus faire l'objet d'aucune condamnation et devaient, en outre, être déclarées par la créancière.
La question qui se pose est donc de savoir si ces créances alléguées peuvent faire l'objet d'une fixation au passif de la liquidation judiciaire de l'appelante.
Contrairement à ce que soutient l'appelante, la créancière a bien déclaré ses créances au titre de l'article 700 et des dépens découlant du jugement de première instance du 7 septembre 2020.
En effet, cette dernière produit la copie de son courrier de déclaration de créance du 17 novembre 2020, entre les mains du mandataire judiciaire de la société Saint Laurent moto dans lequel elle mentionne qu'elle déclare une somme arrondie à 25 000 euros et qui couvre le' montant inséré au sein du jugement en date du 7 septembre 2020".
En ayant déclaré 'le montant inséréré au sein du jugement en date du 7 septembre 2020", la société créancière avait donc bien également déclaré, sur le principe à tout le moins, ses créances au titre de l'article 700 et des dépens auxquels la sous-locataire avait été condamnée par ledit jugement.
En revanche, comme le fait à juste titre observer la société sous-locataire, le montant déclaré par la créancière, limité à 25 000 euros, ne peut intégrer les créances au titre de l'article 700 et des dépens qu'à hauteur de la seule somme de 264,29 euros dès lors que le principal déclaré était de 24 735, 71 euros.
En conséquence, infirmant le jugement, la cour fixe au passif de la société Saint Laurent moto la somme de 264, 29 euros au titre des créances de la société Sonepar méditerranée sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et des dépens.
5-sur la demande de la preneuse principale de dommages-intérêts pour résistance abusive
Vu l'article L 622-21 du code de commerce précédemment cité selon laquelle le jugement d'ouverture interrompt ou interdit toute action en justice de la part de tous les créanciers dont la créance n'est pas mentionnée au I de l'article L. 622-17 et tendant :
1° A la condamnation du débiteur au paiement d'une somme d'argent ;
Vu l'article L622-17 du code de commerce lequel dispose que I.-Les créances nées régulièrement après le jugement d'ouverture pour les besoins du déroulement de la procédure ou de la période d'observation, ou en contrepartie d'une prestation fournie au débiteur pendant cette période, sont payées à leur échéance.
L'article L 622-22 du code de commerce ajoute :Sous réserve des dispositions de l'article L. 625-3, les instances en cours sont interrompues jusqu'à ce que le créancier poursuivant ait procédé à la déclaration de sa créance. Elles sont alors reprises de plein droit, le mandataire judiciaire et, le cas échéant, l'administrateur ou le commissaire à l'exécution du plan nommé en application de l'article L. 626-25 dûment appelés, mais tendent uniquement à la constatation des créances et à la fixation de leur montant.
En espèce, la preneuse principale sollicite la condamnation de la sous-locataire à lui payer une indemnité de 8000 euros au titre de la résistance abusive au paiement de cette dernière.
Cependant, si on considère que cette créance est née antérieurement au jugement d'ouverture de la procédure collective, elle est alors soumise à l'arrêt des poursuites individuelles. Elle ne pourrait donc faire l'objet d'une fixation au passif de la débitrice que si elle a été déclarée par la société preneuse principale.
Or, en l'espèce, la société Sonepar méditerranée ne démontre pas que cette créance de dommages-intérêts, à la supposée fondée, aurait été déclarée entre les mains du mandataire judiciaire. En effet, le jugement a débouté la preneuse principale de sa demande de dommages-intérêts pour résistance abusive et la déclaration de créance concerne seulement le 'montant inséré au sein du jugement en date du 7 septembre 2020".
Ensuite, si on considère que cette créance est née postérieurement au jugement d'ouverture, il s'agit cependant d'une créance qui n'entre pas dans la catégorie des créances visées par l'article L 622-17 I du code de commerce et qui est donc soumise au régime de l'article L 622-21 du même code.
En conséquence, la créancière est irrecevable à solliciter la condamnation de la débitrice à lui payer une indemnité de 8000 euros au titre de la résistance abusive.
Infirmant le jugement en ce qu'il déboute la société Sonepar méditerranée de sa demande de dommages-intérêts pour résistance abusive, la cour déclare irrecevable une telle prétention.
6-sur les frais du procès
En application de l'article 700 du code de procédure civile, la cour, faisant partiellement droit à l'appel la société Saint Laurent moto, dit que chaque partie supportera la charge de ses frais de procès. Les demandes réciproques à ce titre sont rejetées.
Concernant les dépens, il n'est pas inéquitable de dire que chacune d'entre elles supportera la charge de ses propres dépens.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement, par mise à disposition au greffe, contradictoirement :
- donne acte à la SELARL MJ [Y], prise en la personne de Maître [L] [Y] en qualité de mandataire judiciaire, de son intervention volontaire à la présente procédure,
- confirme le jugement en ce qu'il reçoit la société Saint Laurent moto en son opposition au commandement de payer du 15 février 2018 visant la clause résolutoire et en ce qu'il la déboute de ses demandes de nullité de ce dernier,
- infirme le jugement sur le surplus de ses dispositions soumises à la cour,
statuant à nouveau et y ajoutant,
- déclare irrecevables les demandes de la société Sonepar méditerranée en constat de la résiliation du bail, en expulsion, en fixation d'une indemnité d'occupation et tendant à voir ordonner le transport et la séquestration des meubles et objets mobiliers ainsi qu'aux fins de condamnation ou fixation d'une créance de 8000 euros de dommages-intérêts pour résistance abusive contre la société Saint Laurent moto,
- rejette la demande de la société Sonepar méditerranée, en fixation de créance, au titre des taxes foncières 2016 et 2017 à hauteur d'un montant total de 9990 euros,
- fixe au passif de la société Saint Laurent moto les créances suivantes de la société Sonepar méditerranée :
- 1431, 80 euros au titre du principal dû (loyers du 4ème trimestre 2019, taxe foncière 2018 pour 7329 euros dont il a été déduit des virements de 5 899, 20 euros,
8875, 88 euros, 4438,43 euros )
- 264, 29 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et des dépens en première instance,
- rejette le surplus des demandes,
- rejette les demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile et dit que chaque partie supportera la charge de ses propres frais de procès,
- dit que chaque partie supportera la charge de ses dépens en appel.