Décisions
CA Colmar, ch. 2 a, 26 septembre 2024, n° 22/00038
COLMAR
Arrêt
Autre
MINUTE N° 360/2024
Copie exécutoire
aux avocats
Le 26 septembre 2024
La greffière,
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE COLMAR
DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE
ARRÊT DU 26 SEPTEMBRE 2024
Numéro d'inscription au répertoire général : 2 A N° RG 22/00038 -
N° Portalis DBVW-V-B7G-HXSD
Décision déférée à la cour : 07 Décembre 2021 par le tribunal judiciaire de Mulhouse
APPELANT et INTIMÉ SUR APPEL INCIDENT :
Monsieur [R] [Z]
demeurant [Adresse 2]
représenté par Me Raphaël REINS, Avocat à la cour
INTIMÉS et APPELANTS SUR APPEL INCIDENT :
Monsieur [X] [L] et
Madame [F] [H] épouse [L]
demeurant tous deux [Adresse 5]
représentés par Me Joseph WETZEL, Avocat à la cour
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 24 Janvier 2024, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Myriam DENORT, Conseillère, chargée du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Madame Myriam DENORT, Conseillère, faisant fonction de présidente
Madame Murielle ROBERT-NICOUD, Conseillère
Madame Nathalie HERY, Conseillère,
qui en ont délibéré.
Greffière lors des débats : Madame Corinne ARMSPACH-SENGLE
ARRÊT contradictoire
- prononcé publiquement, après prorogation le 15 mai 2024, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.
- signé par Madame Myriam DENORT, conseillère faisant fonction de présidente, et Madame Corinne ARMSPACH-SENGLE, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
FAITS ET PROCÉDURE
Le 11 juillet 2019, M. [X] [L], époux de Mme [F] [H], a signé avec M. [R] [Z] et au profit de ce dernier une promesse synallagmatique de vente portant sur une maison d'habitation et son jardin situés [Adresse 5], la parcelle étant cadastrée section [Cadastre 3], n° [Cadastre 1]/[Cadastre 4], le prix de vente s'élevant à 454 000 euros.
Parmi les conditions suspensives stipulées dans cette convention, l'une tenait à l'obtention, par l'acquéreur, d'un prêt d'un montant maximum de 490 000 euros, d'une durée de cinq ans et au taux d'intérêt maximal de 5 % l'an, contracté auprès de tout établissement financier, le dépôt du dossier de prêt devant intervenir au plus tard le 25 juillet 2019 et la réception de l'offre au plus tard le 11 septembre 2019.
Par lettre recommandée du 20 septembre 2019, reçue le 23 septembre par M. [Z], M. [L] a sollicité le paiement du prix de vente en l'étude de Me [B], notaire, sous 8 jours, indiquant qu'à défaut, il lui serait réclamé le montant des pénalités, soit 45 400 euros représentant 10 % de ce prix de vente.
Par une lettre recommandée avec avis de réception du 23 novembre, reçue le 30 novembre 2019, il a mis M. [Z] en demeure de justifier sous huitaine de l'obtention ou non du prêt et des démarches accomplies pour l'obtenir, ajoutant qu'à défaut, lui-même serait libéré de tout engagement.
Le 27 décembre 2019, à défaut d'obtention d'un prêt par l'acquéreur, un procès-verbal de carence a été dressé par Me [C] [V], notaire administrateur de l'étude de Me [W] [B], notaire à [Localité 7], en présence des deux parties, une sommation de s'y présenter afin de procéder à la réitération de l'acte ayant été adressée à M. [Z] par huissier de justice le 11 décembre 2019.
Saisi par les époux [L]-[H] aux fins de condamnation de M. [Z] à leur payer la somme de 45 400 euros à titre de dommages-intérêts au titre de la clause pénale, le tribunal judiciaire de Mulhouse a, par jugement du 7 décembre 2021, condamné ce dernier à régler aux demandeurs les somme de 30 000 euros en application de la clause pénale stipulée dans la promesse synallagmatique de vente signée le 11 juillet 2019, avec intérêts au taux légal à compter du 30 janvier 2020, ainsi que la somme de 1 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.
Il a débouté M. [Z] de sa demande formée au titre de l'article 700 du code de procédure civile et rappelé l'exécution provisoire de droit de la décision.
Le tribunal, rappelant les dispositions de l'article 1304-3 du code civil, selon lesquels la condition suspensive est réputée accomplie si celui qui y avait intérêt en a empêché l'accomplissement, a également rappelé les termes de la condition suspensive relative à l'obtention d'un prêt mentionné plus haut, précisant que l'acte stipulait que l'acquéreur s'engageait à déposer simultanément deux demandes de prêt, la réception de l'offre devant intervenir au plus tard le 11 septembre 2019. L'acquéreur devait justifier des diligences accomplies par lui pour l'obtention de ce prêt par la production de tout refus de prêt émanant des organismes prêteurs, précisant la date du dépôt de la demande, ainsi que le montant, la durée et le taux du prêt sollicité.
Or, M. [Z] ne produisait qu'un unique courrier de refus de prêt de 490 000 euros émanant d'une banque turque et daté du 20 décembre 2019, sans mention de la durée et du taux d'intérêt du prêt sollicité. Le défendeur ne rapportait donc pas la preuve du dépôt de deux demandes de deux prêts simultanées, conformes aux stipulations du compromis de vente, si bien que la défaillance de la condition suspensive d'obtention du prêt, ainsi que ses conséquences contractuelles, à savoir le défaut de signature de l'acte authentique et la caducité de la promesse synallagmatique de vente, lui étaient imputables.
Rappelant les dispositions de l'article 1231-5 du code civil et que la caducité de la promesse synallagmatique de vente n'était pas de nature à remettre en cause la validité de la clause pénale stipulée à l'acte, le tribunal a considéré que, dans la mesure où le défaut de réalisation de la condition suspensive d'obtention du prêt était imputable à l'acquéreur, cette condition suspensive était réputée accomplie, conformément aux dispositions de l'article 1304-3 du code civil, et qu'au vu de la mise en demeure du 20 septembre 2019, la clause pénale stipulée avait vocation à s'appliquer, en raison du comportement fautif de l'acquéreur.
Si le montant de celle-ci avait vocation à s'imputer sur le dépôt de garantie stipulé dans la promesse synallagmatique de vente à la charge de l'acquéreur, il n'avait pas lieu d'être limité au montant de ce dépôt de garantie et, en tout état de cause, celui-ci n'avait pas été réglé par M. [Z].
Cependant, si le montant de la clause pénale stipulée entre les parties s'élevait à 45 400 euros, le tribunal l'a réduit à la somme de 30 000 euros en raison de son montant excessif au regard de la durée réduite d'immobilisation du bien et de l'absence de lien entre les frais liés au déménagement et au bail d'habitation conclu par les époux [L]-[H] plus de cinq mois avant la signature du compromis.
M. [Z] a interjeté appel de ce jugement le 29 décembre 2021.
La clôture de l'instruction a été prononcée par ordonnance du 7 novembre 2023.
MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES
Aux termes de ses dernières conclusions récapitulatives transmises par voie électronique le 21 octobre 2023, M. [Z] sollicite que son appel principal soit déclaré recevable et bien fondé et qu'il soit fait droit à l'ensemble de ses prétentions. Il sollicite l'infirmation du jugement déféré en chacune de ses dispositions, qu'il détaille et que la cour, statuant à nouveau :
- à titre principal, déclare irrecevables et en tout cas mal fondées les demandes des intimés et qu'elle les déboute de l'ensemble de leurs prétentions,
- subsidiairement, réduise le montant de la condamnation mise à sa charge à une plus juste mesure,
- déclare l'appel incident irrecevable et en tout cas mal fondé et le rejette,
- rejette la demande des intimés tendant à sa condamnation à leur verser la somme de 45 500 euros à titre de dommages-intérêts, en application de la clause pénale contractuelle,
- en tout état de cause, condamne les intimés aux entiers frais et dépens de première instance et d'appel, ainsi qu'à lui verser la somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, au titre de la procédure d'appel.
En premier lieu, M. [Z] invoque une mauvaise interprétation des faits par le tribunal, aux motifs que la seule sanction prévue en cas de non-respect des conditions relatives à l'obtention du prêt était selon lui le non-remboursement du dépôt de garantie s'il avait été réglé par l'acquéreur. Celui-ci n'ayant pas été versé, le principe de ce versement était caduc et aucune sanction ne peut s'appliquer, s'agissant du non-respect des conditions d'obtention du prêt allégué.
En second lieu, la clause pénale, telle qu'elle est stipulée, ne s'applique que lorsque toutes les conditions relatives à l'exécution du compromis sont réunies et que, malgré cela, l'une des parties ne régularise pas l'acte authentique. Or, l'appelant fait valoir que M. [L] s'obligeait, d'après la promesse synallagmatique de vente, à obtenir la radiation de l'inscription, au Livre foncier, du droit de retour conventionnel existant au profit de ses parents, mais qu'il n'a pas lui-même justifié avoir rempli cette obligation lors du rendez-vous chez le notaire du 27 décembre 2020 (en réalité 2019), en vue de la réitération de la vente par acte authentique, ce dont il résulte qu'en tout état de cause, l'acte authentique ne pouvait être signé le 27 décembre 2020 (en réalité 2019), en l'absence de certitude de ce que le père de M. [L] aurait « validé » la mainlevée au jour de la signature de cet acte.
Par ailleurs, M. [Z] conteste tout comportement fautif de sa part, estimant avoir tout mis en 'uvre pour obtenir le prêt sollicité, mais qu'au vu de son âge, 72 ans lors de sa demande de prêt, ses chances de l'obtenir et de réaliser la condition suspensive étaient très réduites, voire nulles. Il ajoute que la banque turque sollicitée a tardé à lui transmettre son refus, malgré ses nombreuses relances, mais que, vraisemblablement, aucune banque française ne lui aurait en tout état de cause accordé un tel prêt immobilier.
Enfin, à titre subsidiaire, M. [Z] soutient que, le compromis de vente étant caduc, les intimés ne peuvent réclamer aucune indemnité au titre de la clause pénale.
Par ailleurs, le préjudice invoqué par les intimés n'est établi ni dans son principe, ni dans son montant, et le montant de la clause pénale est excessif. L'appelant reprend sur ce point les motifs du jugement entrepris, soutenant cependant que le préjudice des intimés est faible, voire nul dans la mesure où ces derniers ont vendu leur bien immobilier et qu'ils avaient déjà un acheteur potentiel en attente dès le début de la première instance.
De plus, rien ne les contraignait à prendre un logement en location cinq mois avant la signature du compromis de vente et plus de deux mois après la date à laquelle ils prétendent que celui-ci aurait dû être signé, si bien que les intimés ont fait preuve d'une anticipation imprudente et coupable.
Aux termes de leurs dernières conclusions récapitulatives transmises par voie électronique le 31 août 2023, les époux [L]-[H] sollicitent, au visa des articles « L 1231-5 » et 1304-3 du code civil, que l'appel de M. [Z] soit déclaré recevable et mal fondé et qu'il soit débouté de l'ensemble de ses fins et conclusions. Les intimés sollicitent la confirmation de la décision entreprise, sauf sur le montant de la clause pénale, et que la cour, statuant à nouveau sur ce seul point constituant l'appel incident, condamne le défendeur à leur payer :
- un montant de 45 400 euros à titre de dommages-intérêts, au titre de la clause pénale contractuelle,
- la somme de 4 000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi que tous les dépens.
Les intimés reprennent à leur compte le raisonnement du tribunal, sauf sur la modération de la clause pénale, au motif que M. [Z] a été de mauvaise foi dans ses promesses non tenues, alors qu'il les avait parfaitement mis en confiance. Ils ajoutent qu'avant la saisine de la juridiction, ils ont adressé plusieurs lettres recommandées au défendeur afin de trouver une solution hors contentieux, en vain, le notaire ayant lui-même recherché une solution amiable.
Sur la mainlevée relative à l'inscription du droit de retour incombant à M. [L], les intimés affirment que, d'une part le père du vendeur l'aurait validée au jour de la signature de l'acte notarié et qu'il n'avait pas à le faire avant cette signature, et d'autre part que la jurisprudence impose au vendeur de démontrer que le bénéficiaire de la promesse a empêché la réalisation de la condition d'obtention du prêt stipulé qu'après que l'acquéreur a prouvé avoir accompli les diligences nécessaires à l'obtention du prêt. Or, M. [Z] n'a pas rapporté cette preuve et n'a pas effectué les démarches que lui imposait le « compromis ».
S'agissant de leur préjudice, les intimés expliquent qu'initialement, le « compromis de vente » au bénéfice de M. [Z] devait être signé en décembre 2018 et que l'acquéreur, invoquant l'absence de difficultés de financement, avait indiqué que l'acte de vente pourrait être signé au plus tard au printemps 2019. C'est sur la base de la confiance qu'il leur avait inspirée qu'ils ont pris une location, d'autant plus qu'il leur avait assuré qu'il leur en rembourserait les frais.
Par ailleurs, les époux [L]-[H] contestent avoir eu un acquéreur potentiel en attente, indiquant simplement avoir changé de mandataire pour la vente de la maison, qui n'a été réalisée qu'en septembre 2020, soit plus d'un an après la signature du « compromis de vente » avec M. [Z].
Ils invoquent des frais de déménagement, de location d'un véhicule de déménagement, de location de logement, d'assurance locative et de procès-verbal d'entrée des lieux, ainsi que l'absence de motif de réduction de la clause pénale.
* Pour l'exposé complet des prétentions et moyens des parties, la cour se réfère à leurs conclusions notifiées et transmises aux dates susvisées.
MOTIFS
I ' Sur la demande des époux [L]-[H] relative à l'application de la clause pénale
Le tribunal a rappelé les termes de l'article 1304-3 du code civil. La condition suspensive relative au prêt de l'acquéreur, stipulée dans la promesse synallagmatique de vente signée entre les parties le 11 juillet 2019, tenait à l'obtention d'un prêt d'un montant maximal de 490 000 euros, d'une durée de cinq ans et au taux d'intérêt maximal de 5 % l'an, auprès de tout établissement financier, le dépôt du dossier de prêt devant intervenir au plus tard le 25 juillet 2019 et la réception de l'offre au plus tard le 11 septembre 2019.
Or, comme l'a relevé le tribunal, alors que l'acquéreur s'était engagé contractuellement, en cas de non obtention du financement demandé, à justifier de deux refus de prêt répondant aux caractéristiques ci-dessus, il n'a communiqué au
vendeur qu'un courrier de la seule banque turque ZIRAAT BANKSAI du 20 décembre 2019 relatif à un refus de prêt opposé à une demande du 1er novembre 2019, portant sur un prêt d'un montant de 490 000 euros, sans aucune précision sur la durée et le taux d'intérêt.
M. [Z] était âgé de 74 ans lors de la signature de la promesse synallagmatique de vente. Le montant du prêt projeté, destiné à financer la totalité de l'acquisition, était très élevé, pour une durée de remboursement fort brève, d'autant plus au regard de ce montant. Cependant, il ne fournit aucun élément sur ses revenus et sur sa situation financière et patrimoniale à cette période. Dès lors, il n'est aucunement démontré que ses chances de remboursement d'un tel prêt étaient réduites, voire nulles comme il l'allègue.
En conséquence, il doit être considéré, comme l'a retenu le tribunal, que la non réalisation de la condition suspensive relative à l'obtention du prêt immobilier par l'acquéreur est imputable à M. [Z], qui, par sa carence, en a empêché l'accomplissement, et que, dès lors, cette condition suspensive est réputée accomplie.
Les termes de la promesse synallagmatique de vente relatifs à la clause pénale, rappelés par le tribunal, mentionnent que la somme de 45 400 euros devra être versée au cas où, toutes les conditions relatives à l'exécution des présentes étant accomplies, l'une des parties ne régulariserait pas l'acte authentique et ne satisferait pas ainsi aux obligations alors exigibles.
C'est donc à tort que M. [Z] prétend que la seule sanction prévue en cas de non-respect des conditions relatives à l'obtention du prêt est le non-remboursement du dépôt de garantie, s'il a été réglé par l'acquéreur, l'appelant méconnaissant ces stipulations ainsi que les dispositions de l'article 1304-3 du code civil et leurs conséquences, quant à l'application de la clause pénale, telles que rappelées plus haut.
Par ailleurs, dans la promesse synallagmatique de vente du 11 juillet 2019, le vendeur s'obligeait lui-même à obtenir la radiation des inscriptions au Livre foncier du droit de retour conventionnel de ce bien au profit de chacun de ses parents, et ce au plus tard le jour de la signature de l'acte authentique, sans qu'il résulte des termes de ce contrat que cette obligation ait été stipulée à titre de condition suspensive.
Dès lors que la condition relative à l'obtention du prêt nécessaire au financement de l'acquisition du bien immobilier n'était pas remplie par l'acquéreur et que ce dernier ne disposait pas de ce financement, M. [L], sachant que la signature de l'acte authentique de vente avec M. [Z] était impossible, n'avait pas à obtenir, pour le rendez-vous du 27 décembre 2019 devant le notaire, la radiation des inscriptions du droit de retour conventionnel de ce bien au profit de son père (sa mère étant décédée), puisque cette radiation ne devait avoir lieu qu'en vue de la signature de l'acte de vente. De plus, si cette obligation à la charge du vendeur n'a pas été inscrite dans la promesse synallagmatique comme une condition suspensive de la signature de l'acte de vente, c'est parce qu'aucun aléa ne l'accompagnait et qu'elle devait être obtenue avec certitude.
C'est pourquoi il doit être retenu que, quand bien même M. [L] n'a pas justifié de cette radiation le 27 décembre 2019, ce qui n'est pas contesté, toutes les conditions relatives à l'exécution de la promesse synallagmatique de vente étaient accomplies à cette date, mais que l'une des parties, précisément M. [Z], par sa carence, n'a pas été en mesure de régulariser l'acte authentique et, ainsi, n'a donc pas satisfait aux obligations alors exigibles.
Enfin, une jurisprudence constante retient que la caducité de la promesse synallagmatique de vente énoncée par l'article 42 de la loi du 1er juin 1924 ne porte que sur le transfert de droits immobiliers et ne concerne pas la clause pénale qui doit précisément produire effet en cas de non-réitération de la vente en la forme authentique, par suite de la défaillance fautive de l'une des parties. Dès lors, M. [Z] ne peut se prévaloir de la caducité de la promesse synallagmatique de vente du 11 juillet 2019 pour se soustraire à l'application de la clause pénale prévue contractuellement.
En conséquence, les conditions d'application de cette clause pénale étant remplies, celle-ci doit être mise en 'uvre. Cependant, l'article 1231-5 du code civil permettant au juge, notamment, de réduire la pénalité convenue si elle est manifestement excessive par rapport au préjudice effectivement subi, il convient de relever que le vendeur invoque un préjudice important constitué de frais de déménagement et de location d'un véhicule de déménagement, de location d'un logement, d'assurance locative et de procès-verbal d'entrée des lieux'
Or, l'examen des pièces produites fait apparaître que, la promesse synallagmatique de vente ayant été signée entre les parties le 11 juillet 2019, les époux [L]-[H] ont pris à bail un logement, à [Localité 6] (68), à compter du 1er février 2019, et qu'un déménagement a été effectué du 7 au 9 février 2019. Ils ont cependant donné leur congé de ce logement le 4 juin 2019, avant même la signature de la promesse synallagmatique de vente, en indiquant à leur bailleur qu'ils libéreraient leur logement au plus tard le 1er juillet 2019, l'état des lieux de sortie ayant été effectué le 3 juillet 2019.
Force est donc de constater, au vu de ces éléments, comme l'a fait le tribunal, l'absence totale de lien entre les frais liés à la location de ce logement ainsi que tous les frais annexes et la défaillance de M. [Z], puisque non seulement le bail a pris effet plusieurs mois avant la signature de la promesse synallagmatique de vente, mais ledit logement a été également libéré avant cette signature. Les intimés ne démontrent pas non plus que la date de signature de la promesse synallagmatique de vente initialement prévue était située en décembre 2018, et, en tout état de cause, le bail n'a été conclu que début 2019. En outre, l'engagement d'une location avant même la signature de la promesse synallagmatique de vente ne pouvait qu'être largement prématurée.
Il en résulte que le seul préjudice imputable à la carence de M. [Z] a été la nécessité de trouver un autre acquéreur ainsi que le retard dans la vente du bien immobilier qui en a découlé, les intimés indiquant que cette vente est intervenue en septembre 2020.
En tout état de cause, ce seul préjudice justifie une réduction de la clause pénale incluse dans la promesse synallagmatique de vente du 11 juillet 2019 et la condamnation de M. [Z] à régler aux intimés la somme de 22 000 euros à ce titre. En conséquence, le jugement déféré sera infirmé quant au montant de la condamnation de M. [Z] prononcée à ce titre et il sera statué en ce sens.
II - Sur les dépens et les frais non compris dans les dépens
Le jugement déféré étant confirmé au principal sur le principe de la condamnation de M. [Z], il le sera également en ses dispositions relatives aux dépens et aux frais exclus des dépens de première instance.
La demande subsidiaire de M. [Z] étant accueillie et l'appel incident des époux [L]-[H] étant rejeté, chaque partie conservera la charge de ses dépens d'appel et les demandes réciproques des parties fondées sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, au titre des frais non compris dans les dépens engagés par ces dernières en appel, seront rejetées.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant contradictoirement, publiquement, par mise à disposition de l'arrêt au greffe, conformément aux dispositions de l'article 450, alinéa 2 du code de procédure civile,
CONFIRME le jugement rendu entre les parties le 7 décembre 2021 par le tribunal judiciaire de Mulhouse, sauf en ce qu'il a condamné M. [R] [Z] à payer à M. [X] [L] et à Mme [F] [H], épouse [L], la somme de 30 000,00 euros en application de la clause pénale,
Statuant à nouveau sur ce seul chef et ajoutant au dit jugement,
CONDAMNE M. [R] [Z] à régler à M. [X] [L] et Mme [F] [H], épouse [L], la somme de 22 000,00 euros (vingt deux mille euros), avec intérêts au taux légal à compter du 30 janvier 2020, en application de la clause pénale stipulée dans la promesse synallagmatique de vente signée le 11 juillet 2019,
CONDAMNE chaque partie à conserver la charge de ses dépens d'appel,
REJETTE les demandes réciproques présentées par les parties sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, au titre des frais exclus des dépens qu'elles ont engagés en appel.
La greffière, La conseillère,
Copie exécutoire
aux avocats
Le 26 septembre 2024
La greffière,
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE COLMAR
DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE
ARRÊT DU 26 SEPTEMBRE 2024
Numéro d'inscription au répertoire général : 2 A N° RG 22/00038 -
N° Portalis DBVW-V-B7G-HXSD
Décision déférée à la cour : 07 Décembre 2021 par le tribunal judiciaire de Mulhouse
APPELANT et INTIMÉ SUR APPEL INCIDENT :
Monsieur [R] [Z]
demeurant [Adresse 2]
représenté par Me Raphaël REINS, Avocat à la cour
INTIMÉS et APPELANTS SUR APPEL INCIDENT :
Monsieur [X] [L] et
Madame [F] [H] épouse [L]
demeurant tous deux [Adresse 5]
représentés par Me Joseph WETZEL, Avocat à la cour
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 24 Janvier 2024, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Myriam DENORT, Conseillère, chargée du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Madame Myriam DENORT, Conseillère, faisant fonction de présidente
Madame Murielle ROBERT-NICOUD, Conseillère
Madame Nathalie HERY, Conseillère,
qui en ont délibéré.
Greffière lors des débats : Madame Corinne ARMSPACH-SENGLE
ARRÊT contradictoire
- prononcé publiquement, après prorogation le 15 mai 2024, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.
- signé par Madame Myriam DENORT, conseillère faisant fonction de présidente, et Madame Corinne ARMSPACH-SENGLE, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
FAITS ET PROCÉDURE
Le 11 juillet 2019, M. [X] [L], époux de Mme [F] [H], a signé avec M. [R] [Z] et au profit de ce dernier une promesse synallagmatique de vente portant sur une maison d'habitation et son jardin situés [Adresse 5], la parcelle étant cadastrée section [Cadastre 3], n° [Cadastre 1]/[Cadastre 4], le prix de vente s'élevant à 454 000 euros.
Parmi les conditions suspensives stipulées dans cette convention, l'une tenait à l'obtention, par l'acquéreur, d'un prêt d'un montant maximum de 490 000 euros, d'une durée de cinq ans et au taux d'intérêt maximal de 5 % l'an, contracté auprès de tout établissement financier, le dépôt du dossier de prêt devant intervenir au plus tard le 25 juillet 2019 et la réception de l'offre au plus tard le 11 septembre 2019.
Par lettre recommandée du 20 septembre 2019, reçue le 23 septembre par M. [Z], M. [L] a sollicité le paiement du prix de vente en l'étude de Me [B], notaire, sous 8 jours, indiquant qu'à défaut, il lui serait réclamé le montant des pénalités, soit 45 400 euros représentant 10 % de ce prix de vente.
Par une lettre recommandée avec avis de réception du 23 novembre, reçue le 30 novembre 2019, il a mis M. [Z] en demeure de justifier sous huitaine de l'obtention ou non du prêt et des démarches accomplies pour l'obtenir, ajoutant qu'à défaut, lui-même serait libéré de tout engagement.
Le 27 décembre 2019, à défaut d'obtention d'un prêt par l'acquéreur, un procès-verbal de carence a été dressé par Me [C] [V], notaire administrateur de l'étude de Me [W] [B], notaire à [Localité 7], en présence des deux parties, une sommation de s'y présenter afin de procéder à la réitération de l'acte ayant été adressée à M. [Z] par huissier de justice le 11 décembre 2019.
Saisi par les époux [L]-[H] aux fins de condamnation de M. [Z] à leur payer la somme de 45 400 euros à titre de dommages-intérêts au titre de la clause pénale, le tribunal judiciaire de Mulhouse a, par jugement du 7 décembre 2021, condamné ce dernier à régler aux demandeurs les somme de 30 000 euros en application de la clause pénale stipulée dans la promesse synallagmatique de vente signée le 11 juillet 2019, avec intérêts au taux légal à compter du 30 janvier 2020, ainsi que la somme de 1 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.
Il a débouté M. [Z] de sa demande formée au titre de l'article 700 du code de procédure civile et rappelé l'exécution provisoire de droit de la décision.
Le tribunal, rappelant les dispositions de l'article 1304-3 du code civil, selon lesquels la condition suspensive est réputée accomplie si celui qui y avait intérêt en a empêché l'accomplissement, a également rappelé les termes de la condition suspensive relative à l'obtention d'un prêt mentionné plus haut, précisant que l'acte stipulait que l'acquéreur s'engageait à déposer simultanément deux demandes de prêt, la réception de l'offre devant intervenir au plus tard le 11 septembre 2019. L'acquéreur devait justifier des diligences accomplies par lui pour l'obtention de ce prêt par la production de tout refus de prêt émanant des organismes prêteurs, précisant la date du dépôt de la demande, ainsi que le montant, la durée et le taux du prêt sollicité.
Or, M. [Z] ne produisait qu'un unique courrier de refus de prêt de 490 000 euros émanant d'une banque turque et daté du 20 décembre 2019, sans mention de la durée et du taux d'intérêt du prêt sollicité. Le défendeur ne rapportait donc pas la preuve du dépôt de deux demandes de deux prêts simultanées, conformes aux stipulations du compromis de vente, si bien que la défaillance de la condition suspensive d'obtention du prêt, ainsi que ses conséquences contractuelles, à savoir le défaut de signature de l'acte authentique et la caducité de la promesse synallagmatique de vente, lui étaient imputables.
Rappelant les dispositions de l'article 1231-5 du code civil et que la caducité de la promesse synallagmatique de vente n'était pas de nature à remettre en cause la validité de la clause pénale stipulée à l'acte, le tribunal a considéré que, dans la mesure où le défaut de réalisation de la condition suspensive d'obtention du prêt était imputable à l'acquéreur, cette condition suspensive était réputée accomplie, conformément aux dispositions de l'article 1304-3 du code civil, et qu'au vu de la mise en demeure du 20 septembre 2019, la clause pénale stipulée avait vocation à s'appliquer, en raison du comportement fautif de l'acquéreur.
Si le montant de celle-ci avait vocation à s'imputer sur le dépôt de garantie stipulé dans la promesse synallagmatique de vente à la charge de l'acquéreur, il n'avait pas lieu d'être limité au montant de ce dépôt de garantie et, en tout état de cause, celui-ci n'avait pas été réglé par M. [Z].
Cependant, si le montant de la clause pénale stipulée entre les parties s'élevait à 45 400 euros, le tribunal l'a réduit à la somme de 30 000 euros en raison de son montant excessif au regard de la durée réduite d'immobilisation du bien et de l'absence de lien entre les frais liés au déménagement et au bail d'habitation conclu par les époux [L]-[H] plus de cinq mois avant la signature du compromis.
M. [Z] a interjeté appel de ce jugement le 29 décembre 2021.
La clôture de l'instruction a été prononcée par ordonnance du 7 novembre 2023.
MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES
Aux termes de ses dernières conclusions récapitulatives transmises par voie électronique le 21 octobre 2023, M. [Z] sollicite que son appel principal soit déclaré recevable et bien fondé et qu'il soit fait droit à l'ensemble de ses prétentions. Il sollicite l'infirmation du jugement déféré en chacune de ses dispositions, qu'il détaille et que la cour, statuant à nouveau :
- à titre principal, déclare irrecevables et en tout cas mal fondées les demandes des intimés et qu'elle les déboute de l'ensemble de leurs prétentions,
- subsidiairement, réduise le montant de la condamnation mise à sa charge à une plus juste mesure,
- déclare l'appel incident irrecevable et en tout cas mal fondé et le rejette,
- rejette la demande des intimés tendant à sa condamnation à leur verser la somme de 45 500 euros à titre de dommages-intérêts, en application de la clause pénale contractuelle,
- en tout état de cause, condamne les intimés aux entiers frais et dépens de première instance et d'appel, ainsi qu'à lui verser la somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, au titre de la procédure d'appel.
En premier lieu, M. [Z] invoque une mauvaise interprétation des faits par le tribunal, aux motifs que la seule sanction prévue en cas de non-respect des conditions relatives à l'obtention du prêt était selon lui le non-remboursement du dépôt de garantie s'il avait été réglé par l'acquéreur. Celui-ci n'ayant pas été versé, le principe de ce versement était caduc et aucune sanction ne peut s'appliquer, s'agissant du non-respect des conditions d'obtention du prêt allégué.
En second lieu, la clause pénale, telle qu'elle est stipulée, ne s'applique que lorsque toutes les conditions relatives à l'exécution du compromis sont réunies et que, malgré cela, l'une des parties ne régularise pas l'acte authentique. Or, l'appelant fait valoir que M. [L] s'obligeait, d'après la promesse synallagmatique de vente, à obtenir la radiation de l'inscription, au Livre foncier, du droit de retour conventionnel existant au profit de ses parents, mais qu'il n'a pas lui-même justifié avoir rempli cette obligation lors du rendez-vous chez le notaire du 27 décembre 2020 (en réalité 2019), en vue de la réitération de la vente par acte authentique, ce dont il résulte qu'en tout état de cause, l'acte authentique ne pouvait être signé le 27 décembre 2020 (en réalité 2019), en l'absence de certitude de ce que le père de M. [L] aurait « validé » la mainlevée au jour de la signature de cet acte.
Par ailleurs, M. [Z] conteste tout comportement fautif de sa part, estimant avoir tout mis en 'uvre pour obtenir le prêt sollicité, mais qu'au vu de son âge, 72 ans lors de sa demande de prêt, ses chances de l'obtenir et de réaliser la condition suspensive étaient très réduites, voire nulles. Il ajoute que la banque turque sollicitée a tardé à lui transmettre son refus, malgré ses nombreuses relances, mais que, vraisemblablement, aucune banque française ne lui aurait en tout état de cause accordé un tel prêt immobilier.
Enfin, à titre subsidiaire, M. [Z] soutient que, le compromis de vente étant caduc, les intimés ne peuvent réclamer aucune indemnité au titre de la clause pénale.
Par ailleurs, le préjudice invoqué par les intimés n'est établi ni dans son principe, ni dans son montant, et le montant de la clause pénale est excessif. L'appelant reprend sur ce point les motifs du jugement entrepris, soutenant cependant que le préjudice des intimés est faible, voire nul dans la mesure où ces derniers ont vendu leur bien immobilier et qu'ils avaient déjà un acheteur potentiel en attente dès le début de la première instance.
De plus, rien ne les contraignait à prendre un logement en location cinq mois avant la signature du compromis de vente et plus de deux mois après la date à laquelle ils prétendent que celui-ci aurait dû être signé, si bien que les intimés ont fait preuve d'une anticipation imprudente et coupable.
Aux termes de leurs dernières conclusions récapitulatives transmises par voie électronique le 31 août 2023, les époux [L]-[H] sollicitent, au visa des articles « L 1231-5 » et 1304-3 du code civil, que l'appel de M. [Z] soit déclaré recevable et mal fondé et qu'il soit débouté de l'ensemble de ses fins et conclusions. Les intimés sollicitent la confirmation de la décision entreprise, sauf sur le montant de la clause pénale, et que la cour, statuant à nouveau sur ce seul point constituant l'appel incident, condamne le défendeur à leur payer :
- un montant de 45 400 euros à titre de dommages-intérêts, au titre de la clause pénale contractuelle,
- la somme de 4 000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi que tous les dépens.
Les intimés reprennent à leur compte le raisonnement du tribunal, sauf sur la modération de la clause pénale, au motif que M. [Z] a été de mauvaise foi dans ses promesses non tenues, alors qu'il les avait parfaitement mis en confiance. Ils ajoutent qu'avant la saisine de la juridiction, ils ont adressé plusieurs lettres recommandées au défendeur afin de trouver une solution hors contentieux, en vain, le notaire ayant lui-même recherché une solution amiable.
Sur la mainlevée relative à l'inscription du droit de retour incombant à M. [L], les intimés affirment que, d'une part le père du vendeur l'aurait validée au jour de la signature de l'acte notarié et qu'il n'avait pas à le faire avant cette signature, et d'autre part que la jurisprudence impose au vendeur de démontrer que le bénéficiaire de la promesse a empêché la réalisation de la condition d'obtention du prêt stipulé qu'après que l'acquéreur a prouvé avoir accompli les diligences nécessaires à l'obtention du prêt. Or, M. [Z] n'a pas rapporté cette preuve et n'a pas effectué les démarches que lui imposait le « compromis ».
S'agissant de leur préjudice, les intimés expliquent qu'initialement, le « compromis de vente » au bénéfice de M. [Z] devait être signé en décembre 2018 et que l'acquéreur, invoquant l'absence de difficultés de financement, avait indiqué que l'acte de vente pourrait être signé au plus tard au printemps 2019. C'est sur la base de la confiance qu'il leur avait inspirée qu'ils ont pris une location, d'autant plus qu'il leur avait assuré qu'il leur en rembourserait les frais.
Par ailleurs, les époux [L]-[H] contestent avoir eu un acquéreur potentiel en attente, indiquant simplement avoir changé de mandataire pour la vente de la maison, qui n'a été réalisée qu'en septembre 2020, soit plus d'un an après la signature du « compromis de vente » avec M. [Z].
Ils invoquent des frais de déménagement, de location d'un véhicule de déménagement, de location de logement, d'assurance locative et de procès-verbal d'entrée des lieux, ainsi que l'absence de motif de réduction de la clause pénale.
* Pour l'exposé complet des prétentions et moyens des parties, la cour se réfère à leurs conclusions notifiées et transmises aux dates susvisées.
MOTIFS
I ' Sur la demande des époux [L]-[H] relative à l'application de la clause pénale
Le tribunal a rappelé les termes de l'article 1304-3 du code civil. La condition suspensive relative au prêt de l'acquéreur, stipulée dans la promesse synallagmatique de vente signée entre les parties le 11 juillet 2019, tenait à l'obtention d'un prêt d'un montant maximal de 490 000 euros, d'une durée de cinq ans et au taux d'intérêt maximal de 5 % l'an, auprès de tout établissement financier, le dépôt du dossier de prêt devant intervenir au plus tard le 25 juillet 2019 et la réception de l'offre au plus tard le 11 septembre 2019.
Or, comme l'a relevé le tribunal, alors que l'acquéreur s'était engagé contractuellement, en cas de non obtention du financement demandé, à justifier de deux refus de prêt répondant aux caractéristiques ci-dessus, il n'a communiqué au
vendeur qu'un courrier de la seule banque turque ZIRAAT BANKSAI du 20 décembre 2019 relatif à un refus de prêt opposé à une demande du 1er novembre 2019, portant sur un prêt d'un montant de 490 000 euros, sans aucune précision sur la durée et le taux d'intérêt.
M. [Z] était âgé de 74 ans lors de la signature de la promesse synallagmatique de vente. Le montant du prêt projeté, destiné à financer la totalité de l'acquisition, était très élevé, pour une durée de remboursement fort brève, d'autant plus au regard de ce montant. Cependant, il ne fournit aucun élément sur ses revenus et sur sa situation financière et patrimoniale à cette période. Dès lors, il n'est aucunement démontré que ses chances de remboursement d'un tel prêt étaient réduites, voire nulles comme il l'allègue.
En conséquence, il doit être considéré, comme l'a retenu le tribunal, que la non réalisation de la condition suspensive relative à l'obtention du prêt immobilier par l'acquéreur est imputable à M. [Z], qui, par sa carence, en a empêché l'accomplissement, et que, dès lors, cette condition suspensive est réputée accomplie.
Les termes de la promesse synallagmatique de vente relatifs à la clause pénale, rappelés par le tribunal, mentionnent que la somme de 45 400 euros devra être versée au cas où, toutes les conditions relatives à l'exécution des présentes étant accomplies, l'une des parties ne régulariserait pas l'acte authentique et ne satisferait pas ainsi aux obligations alors exigibles.
C'est donc à tort que M. [Z] prétend que la seule sanction prévue en cas de non-respect des conditions relatives à l'obtention du prêt est le non-remboursement du dépôt de garantie, s'il a été réglé par l'acquéreur, l'appelant méconnaissant ces stipulations ainsi que les dispositions de l'article 1304-3 du code civil et leurs conséquences, quant à l'application de la clause pénale, telles que rappelées plus haut.
Par ailleurs, dans la promesse synallagmatique de vente du 11 juillet 2019, le vendeur s'obligeait lui-même à obtenir la radiation des inscriptions au Livre foncier du droit de retour conventionnel de ce bien au profit de chacun de ses parents, et ce au plus tard le jour de la signature de l'acte authentique, sans qu'il résulte des termes de ce contrat que cette obligation ait été stipulée à titre de condition suspensive.
Dès lors que la condition relative à l'obtention du prêt nécessaire au financement de l'acquisition du bien immobilier n'était pas remplie par l'acquéreur et que ce dernier ne disposait pas de ce financement, M. [L], sachant que la signature de l'acte authentique de vente avec M. [Z] était impossible, n'avait pas à obtenir, pour le rendez-vous du 27 décembre 2019 devant le notaire, la radiation des inscriptions du droit de retour conventionnel de ce bien au profit de son père (sa mère étant décédée), puisque cette radiation ne devait avoir lieu qu'en vue de la signature de l'acte de vente. De plus, si cette obligation à la charge du vendeur n'a pas été inscrite dans la promesse synallagmatique comme une condition suspensive de la signature de l'acte de vente, c'est parce qu'aucun aléa ne l'accompagnait et qu'elle devait être obtenue avec certitude.
C'est pourquoi il doit être retenu que, quand bien même M. [L] n'a pas justifié de cette radiation le 27 décembre 2019, ce qui n'est pas contesté, toutes les conditions relatives à l'exécution de la promesse synallagmatique de vente étaient accomplies à cette date, mais que l'une des parties, précisément M. [Z], par sa carence, n'a pas été en mesure de régulariser l'acte authentique et, ainsi, n'a donc pas satisfait aux obligations alors exigibles.
Enfin, une jurisprudence constante retient que la caducité de la promesse synallagmatique de vente énoncée par l'article 42 de la loi du 1er juin 1924 ne porte que sur le transfert de droits immobiliers et ne concerne pas la clause pénale qui doit précisément produire effet en cas de non-réitération de la vente en la forme authentique, par suite de la défaillance fautive de l'une des parties. Dès lors, M. [Z] ne peut se prévaloir de la caducité de la promesse synallagmatique de vente du 11 juillet 2019 pour se soustraire à l'application de la clause pénale prévue contractuellement.
En conséquence, les conditions d'application de cette clause pénale étant remplies, celle-ci doit être mise en 'uvre. Cependant, l'article 1231-5 du code civil permettant au juge, notamment, de réduire la pénalité convenue si elle est manifestement excessive par rapport au préjudice effectivement subi, il convient de relever que le vendeur invoque un préjudice important constitué de frais de déménagement et de location d'un véhicule de déménagement, de location d'un logement, d'assurance locative et de procès-verbal d'entrée des lieux'
Or, l'examen des pièces produites fait apparaître que, la promesse synallagmatique de vente ayant été signée entre les parties le 11 juillet 2019, les époux [L]-[H] ont pris à bail un logement, à [Localité 6] (68), à compter du 1er février 2019, et qu'un déménagement a été effectué du 7 au 9 février 2019. Ils ont cependant donné leur congé de ce logement le 4 juin 2019, avant même la signature de la promesse synallagmatique de vente, en indiquant à leur bailleur qu'ils libéreraient leur logement au plus tard le 1er juillet 2019, l'état des lieux de sortie ayant été effectué le 3 juillet 2019.
Force est donc de constater, au vu de ces éléments, comme l'a fait le tribunal, l'absence totale de lien entre les frais liés à la location de ce logement ainsi que tous les frais annexes et la défaillance de M. [Z], puisque non seulement le bail a pris effet plusieurs mois avant la signature de la promesse synallagmatique de vente, mais ledit logement a été également libéré avant cette signature. Les intimés ne démontrent pas non plus que la date de signature de la promesse synallagmatique de vente initialement prévue était située en décembre 2018, et, en tout état de cause, le bail n'a été conclu que début 2019. En outre, l'engagement d'une location avant même la signature de la promesse synallagmatique de vente ne pouvait qu'être largement prématurée.
Il en résulte que le seul préjudice imputable à la carence de M. [Z] a été la nécessité de trouver un autre acquéreur ainsi que le retard dans la vente du bien immobilier qui en a découlé, les intimés indiquant que cette vente est intervenue en septembre 2020.
En tout état de cause, ce seul préjudice justifie une réduction de la clause pénale incluse dans la promesse synallagmatique de vente du 11 juillet 2019 et la condamnation de M. [Z] à régler aux intimés la somme de 22 000 euros à ce titre. En conséquence, le jugement déféré sera infirmé quant au montant de la condamnation de M. [Z] prononcée à ce titre et il sera statué en ce sens.
II - Sur les dépens et les frais non compris dans les dépens
Le jugement déféré étant confirmé au principal sur le principe de la condamnation de M. [Z], il le sera également en ses dispositions relatives aux dépens et aux frais exclus des dépens de première instance.
La demande subsidiaire de M. [Z] étant accueillie et l'appel incident des époux [L]-[H] étant rejeté, chaque partie conservera la charge de ses dépens d'appel et les demandes réciproques des parties fondées sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, au titre des frais non compris dans les dépens engagés par ces dernières en appel, seront rejetées.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant contradictoirement, publiquement, par mise à disposition de l'arrêt au greffe, conformément aux dispositions de l'article 450, alinéa 2 du code de procédure civile,
CONFIRME le jugement rendu entre les parties le 7 décembre 2021 par le tribunal judiciaire de Mulhouse, sauf en ce qu'il a condamné M. [R] [Z] à payer à M. [X] [L] et à Mme [F] [H], épouse [L], la somme de 30 000,00 euros en application de la clause pénale,
Statuant à nouveau sur ce seul chef et ajoutant au dit jugement,
CONDAMNE M. [R] [Z] à régler à M. [X] [L] et Mme [F] [H], épouse [L], la somme de 22 000,00 euros (vingt deux mille euros), avec intérêts au taux légal à compter du 30 janvier 2020, en application de la clause pénale stipulée dans la promesse synallagmatique de vente signée le 11 juillet 2019,
CONDAMNE chaque partie à conserver la charge de ses dépens d'appel,
REJETTE les demandes réciproques présentées par les parties sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, au titre des frais exclus des dépens qu'elles ont engagés en appel.
La greffière, La conseillère,