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Décisions

CA Colmar, 2e ch. A, 26 septembre 2024, n° 22/00614

COLMAR

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Chrisnath (SCI)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Denort

Conseillers :

Mme Robert-Nicoud, Mme Hery

Avocats :

Me Boudet, Me Frick

TJ Strasbourg, du 16 nov. 2021, n° 22/00…

16 novembre 2021

FAITS ET PROCÉDURE

Mme [O] [I] est propriétaire d'un appartement sis [Adresse 1] à [Localité 5] (67).

Souhaitant vendre ce bien, elle a confié un mandat de vente non exclusif à M. [S] [W], agent immobilier.

M. [W] lui a soumis le 11 août 2019 une offre d'achat de M [U] [D] pour un montant de 140 000 euros, expirant le 16 août 2019.

Le 12 août 2019, Mme [O] [I] a accepté cette offre, sous réserve de la signature dans un délai d'un mois d'un avant-contrat incluant les clauses d'usage et les diagnostics obligatoires.

Par acte d'huissier du 10 février 2020, la SCI Chrisnath et M. [D] ont fait attraire Mme [I] devant le tribunal judiciaire de Strasbourg aux fins, notamment, de faire constater la vente.

Le tribunal judiciaire de Strasbourg, par un jugement du 16 novembre 2021, rectifié par un jugement du 25 janvier 2022, a :

- débouté la SCI Chrisnath et M [D] de leurs prétentions

- débouté Mme [I] de sa demande de dommages et intérêts

- condamné in solidum la SCI Christnath et M [D] à payer à Mme [I] la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile

- condamné in solidum la SCI Christnath et M [D] aux dépens

Le tribunal a constaté que, d'une part, l'offre de M [D] avait été émise par ce dernier en son nom personnel et qu'il ne résultait d'aucune pièce que Mme [I] eût accepté que l'acquéreur puisse être substitué par la SCI Christnath, cette question n'ayant, au vu des pièces produites, même pas été évoquée et que, d'autre part, aucune pièce produite par les demandeurs ne permettait de conclure que la cession de contrat était intervenue postérieurement, et ce d'autant plus qu'un tel acte doit être constaté par écrit à peine de nullité, conformément à l'article 1216 du code civil. Il a dès lors considéré qu'en l'absence de clause autorisant la substitution ou de cession de contrat acceptée ultérieurement et par écrit par Mme [I], cette dernière n'avait commis aucune faute en refusant de signer l'acte authentique de vente avec la SCI Christnath.

Le 08 février 2022, la SCI Chrisnath et M [D] ont interjeté appel de ces jugements, leur appel tendant à l'annulation, respectivement l'infirmation voire la réformation des jugements entrepris en ce qu'ils les déboutent de leurs prétentions, les condamnent in solidum à payer à Mme [I] la somme de 2 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile et en ce qu'ils les condamnent in solidum aux dépens.

La clôture de l'instruction a été prononcée par ordonnance du 5 septembre 2023.

MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Aux termes de leurs dernières conclusions du 06 mars 2023, transmises par voie électronique le 07 mars, la SCI Chrisnath et M [D] demandent à la cour d'infirmer les jugements en ce qu'ils les déboutent de leurs prétentions, les condamnent in solidum à payer à Mme [I] la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux dépens,

Et statuant à nouveau, de :

A titre principal :

- constater la vente de l'appartement litigieux et des lots y afférents, désignés précisément dans ses conclusions

- dire et juger que l'arrêt à intervenir tiendra lieu d'acte authentique autorisant la SCI Chrisnath à faire transcrire en son nom la propriété des biens

- autoriser la SCI Chrisnath à faire transcrire en son nom au livre foncier la propriété des biens sur présentation de l'arrêt à intervenir

Très subsidiairement :

- condamner Mme [I] à verser à la SCI Chrisnath une somme de 25 300 euros de dommages et intérêts

- condamner Mme [I] à verser à M [D] une somme de 3 000 euros de dommages et intérêts

Sur appel incident :

- débouter Mme [I] de l'ensemble de ses fins et conclusions

En toute hypothèse :

- condamner Mme [I] aux entiers frais et dépens de la procédure

- condamner Mme [I] à payer à chacun d'eux une somme de 1 500 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile.

Ils font valoir que :

- Sur la substitution de la SCI Chrisnath à M [D]

L'offre et l'acceptation intervenues ne comportent aucune condition relative à une substitution d'acquéreur. C'est donc l'article 1216 du code civil qui s'applique.

Cet article ne soumet l'accord du cédé à aucun formalisme. Le seul écrit nécessaire est celui constatant la cession de la qualité de partie au contrat entre le cédant et le cessionnaire, sans que le cédé n'ait à intervenir à cet acte. La notification de la cession n'est pas non plus obligatoire car cet article prévoit que le cédé puisse « prendre acte » de la cession.

En l'espèce, aux termes des échanges intervenus au sujet de la rédaction du compromis, Mme [I] a eu connaissance de la substitution et l'a acceptée, car elle n'a manifesté aucune réserve à ce sujet et a poursuivi ses diligences en vue de la signature de l'acte. Il ne s'agissait donc pas pour elle d'une condition essentielle de la vente.

L'intimée ne peut pas faire valoir la nullité de la cession et la date de la cession lui est indifférente car, en tout état de cause, ils restent tenus avec M [D] de leurs obligations réciproques.

- Sur les conditions de la vente qui ne seraient pas réunies

1) Concernant le délai prévu pour la signature du 'compromis'

D'une part, ce délai n'était pas impératif. D'autre part, en poursuivant les opérations de rédaction du compromis au-delà du délai prévu, Mme [I] a renoncé à cette condition. Enfin, le dépassement du délai prévu n'est imputable à aucune des parties. Il est la conséquence de difficultés pour réunir les éléments nécessaires à la rédaction du compromis. Une fois le dossier complet, le notaire a effectivement mis moins d'un mois pour rédiger le projet de compromis.

2) Concernant les clauses d'usage qui n'auraient pas été incluses dans le projet de compromis

La notion de 'clauses d'usage' est imprécise et ne peut donc pas constituer une condition valable de la vente. En matière immobilière, il n'existe pas d' « acte-type ». Elle pourrait éventuellement s'entendre de l'exclusion de toute clause exorbitante du droit commun, et cela a été le cas en l'espèce. La clause de garantie des vices cachés insérée, qui est débattue, est celle rappelant l'état de la jurisprudence, qui assimile celui qui réalise des travaux au vendeur professionnel, et qui, tenu de connaître les vices, ne peut se prévaloir d'une clause de non-garantie des vices cachés.

Ainsi, les conditions de la vente sont réunies, les parties ayant trouvé un accord sur la chose et le prix. L'article 42 de la loi du 1er juin 1924 peut donc s'appliquer et la vente être constatée.

- Sur la demande subsidiaire d'indemnisation des préjudices subis :

- Pour la SCI Chrisnath :

Le refus de signature du 'compromis 'par Mme [I] est une faute,

Un premier préjudice correspond à la perte de la possibilité d'acquérir la propriété des biens immobiliers, qu'elle évalue à une somme équivalente à la pénalité prévue dans le projet de compromis, à savoir 14 000 euros,

Un second préjudice correspond à l'achat d'une cuisine ; certain de la signature du 'compromis', M [D] a anticipé son installation en commandant une cuisine et a versé 3 000 € d'acompte au cuisiniste qui entend obtenir l'intégralité du paiement de la commande.

- Pour M [D]

M [D] envisageait d'occuper le bien litigieux et il subit donc un préjudice moral relatif à son impossibilité d'obtenir des conditions de logement plus agréables.

- Sur la demande de dommages et intérêts de Mme [I]

La demande de Mme [I] n'est pas justifiée, car elle était assistée par un notaire pour signer l'acte et les acquéreurs n'ont pas délibérément retardé la signature du « compromis » mais ont, au contraire, tout fait pour l'accélérer.

**

Aux termes de ses dernières conclusions récapitulatives du 19 décembre 2022, transmises par voie électronique le même jour, Mme [I] demande à la cour de :

- rejeter l'appel principal, débouter les appelants de l'intégralité de leurs fins et conclusions et de confirmer les décisions entreprises en toutes leurs dispositions, sauf en ce qu'elles l'ont déboutée de sa demande d'indemnisation de son préjudice.

Sur appel incident :

- Déclarer l'appel incident recevable et bien fondé,

- Infirmer les décisions entreprises en ce qu'elles l'ont déboutée de sa demande de dommages et intérêts

Et statuant à nouveau :

- Condamner solidairement la SCI Chrisnath et M [D] à lui régler la somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts,

En tout état de cause :

- Condamner solidairement la SCI Chrisnath et M [D] à lui régler la somme de 3 500 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,

- Condamner solidairement la SCI Chrisnath et M [D] aux frais et dépens de la procédure,

Elle fait valoir que :

- S'agissant des conditions de vente non réunies :

1) Le délai a expiré sans qu'aucune nouvelle offre d'achat n'ait été émise par M [D], qui n'a pas non plus sollicité une prolongation du délai. Elle a été diligente dans la transmission des documents pour que le 'compromis' puisse être rédigé dans le délai prévu et impute le dépassement du délai à M [D].

2 ) Concernant les clauses d'usage

Mme [I] reproche à l'acquéreur d'avoir notamment fait insérer dans le projet de « compromis de vente » une clause excluant l'exonération du vendeur de la garantie des vices cachés s'il avait la qualité de professionnel de l'immobilier ou de la construction, ou s'il était réputé ou s'être comporté comme tel. Or, dans le cadre de son activité professionnelle passée, elle avait aidé à la commercialisation, lors de leur construction, de deux immeubles.

De plus, le 13 novembre 2019, la veille du rendez-vous prévu pour la signature du 'compromis', l'acquéreur avait encore formulé trois pages d'observation et notamment exigé l'insertion d'une clause alourdissant les garanties à sa charge, celle-ci excluant le vendeur non professionnel ayant lui-même réalisé des travaux de l'exonération de la garantie des vices cachés. Or, elle avait apporté de nombreuses plus-values à ce bien vingt ans plus tôt.

Elle ajoute que son notaire lui a indiqué qu'elle n'avait nulle obligation d'accepter ces dernières modifications et qu'elle-même, âgée de 81 ans, a été effrayée par les demandes formulées en dernière minute par l'acquéreur et par les conséquences juridiques potentielles des demandes d'extension de charges et de conditions figurant au compromis de vente, si bien qu'elle a renoncé à la vente et mis son appartement en location.

3 ) Concernant la substitution d'acquéreur :

L'offre d'achat qu'elle a acceptée émanait de M [D] en son nom personnel. Elle n'a eu connaissance de la renonciation de ce dernier à son projet d'acquisition au profit de la SCI Chrisnath qu'une fois réceptionné le premier projet de compromis, le 31 octobre 2019.

L'offre d'achat ne peut avoir d'effet juridique à l'égard d'un tiers, d'autant que M [D] n'a pas qualité pour engager la SCI, mais elle s'impose aux parties à l'acte dans les termes fixés.

Depuis la réforme du droit des contrats, la clause de substitution doit respecter les conditions de l'article 1216 du code civil. Elle doit être rédigée par écrit, être acceptée expressément et être notifiée au vendeur pour lui être opposable.

En l'espèce, la faculté de substitution n'a pas été prévue dans l'offre d'achat et la cession n'a pas été acceptée ultérieurement. La fixation d'un rendez-vous chez le notaire ne vaut pas accord à la substitution. Cet accord doit être clair et non équivoque et aucune preuve du respect du formalisme imposé n'est apportée.

- Concernant les demandes d'indemnisation formulées par les appelants

La demande d'indemnisation de M [D] sur le fondement de la responsabilité contractuelle est irrecevable, car il n'a aucun lien contractuel avec la venderesse, suite à sa renonciation à son offre d'achat au profit de la SCI Chrisnath.

La demande d'indemnisation de la SCI Chrisnath au titre d'une perte de chance d'acquérir la propriété d'un bien qui l'« intéressait » ne démontre ni une faute ni un préjudice et il n'existe pas de lien contractuel entre la SCI et Mme [I].

La référence de la partie adverse à la clause pénale prévue dans le projet de compromis n'est pas pertinente, car le compromis n'a pas été signé.

Le manque de diligences de l'acquéreur empêche tout reproche de rupture brutale des pourparlers envers Mme [I].

L'achat d'une cuisine, en l'absence de compromis signé et passé le délai de signature prévu, relève d'une précipitation de l'acheteur. Par ailleurs, aucun document contractuel n'est produit, ni même la preuve du paiement à hauteur de 11 300 euros. Il est souligné que la commande a été passée au nom de M [D].

- Sur sa demande d'indemnisation

Elle considère que la demande de la partie adverse présente le caractère d'une procédure abusive et vexatoire.

Elle estime également que le retard dans la signature du compromis a entraîné une immobilisation de son bien entraînant une perte de revenus locatifs.

Enfin, elle reproche à la partie adverse sa tentative de lui imposer une modification contractuelle et la production d'une attestation de témoin mensongère.

Pour l'exposé complet des prétentions et moyens des parties, la cour se réfère à leurs conclusions notifiées et transmises aux dates susvisées.

MOTIFS

I ' Sur les demandes principales des appelants

L'offre d'achat de M [U] [D] du 11 août 2019 a été acceptée le 12 août 2019 par Mme [O] [I], « sous réserve de la signature dans un délai d'un mois d'un avant-contrat incluant les clauses d'usage et les diagnostics obligatoires ».

1° - Sur le délai d'un mois pour signer l' « avant-contrat »

Ainsi que le soutiennent les appelants, le dépassement de ce délai n'apparaît imputable à aucune des parties, mais tient manifestement à des difficultés de coordination de leurs notaires respectifs pour la rédaction de la promesse synallagmatique de vente et à des retards de transmission de documents qui en sont résultés. En tout état de cause, Mme [I] n'a pas entendu s'en prévaloir, ayant au contraire poursuivi les démarches en vue de la rédaction du « compromis de vente », si bien qu'il ne peut en être tiré de motif de caducité de son acceptation de l'offre d'achat.

2°- Sur les « clauses d'usage » susceptibles d'être incluses dans la promesse synallagmatique de vente

Le projet transmis par le notaire le 31 octobre 2019 de la venderesse contenait une clause d'exonération de la garantie des vices cachés, tout en précisant que cette exonération de garantie ne s'appliquait pas, d'une part si le vendeur avait la qualité de professionnel de l'immobilier ou de la construction, ou s'il était réputé ou s'était comporté comme tel, et d'autre part s'il était prouvé par l'acquéreur, dans les délais légaux, que les vices cachés étaient en réalité connus du vendeur.

Cependant, de telles clauses relatives aux exclusions de l'exonération de la garantie des vices cachés applicables aux vendeurs professionnels et aux vices connus du vendeur n'ont rien d'inhabituel et peuvent être considérées comme des clauses d'usage, étant de plus conformes à la jurisprudence en la matière.

Si, la veille au soir de la date prévue pour la signature de la promesse synallagmatique de vente, deux pages d'observations contenant des modifications ou compléments à apporter au projet ont été transmises à la venderesse à la demande de l'acquéreur, qui disposait depuis près de deux semaines du projet initial, la plupart de ces modifications ou compléments comportaient des précisions nécessaires, notamment sur les modalités de financement de l'achat du bien, ou purement objectives, la seule critiquée par Mme [I] étant celle relative à l'exclusion de l'exonération de la garantie des vices cachés dans le cas de travaux réalisés par le vendeur, même non professionnel.

Or, là encore, une telle clause ne peut être exclue des « clauses d'usage » dans la mesure où elle est relativement habituelle dans le cas où, précisément, le bien immobilier a fait l'objet de travaux réalisés par le vendeur.

Dès lors, il ne peut être considéré que les conditions de la vente n'étaient pas réunies du fait de l'insertion, dans le projet de promesse synallagmatique de vente, des clauses précitées à l'initiative de l'acquéreur.

3° - Sur la cession de la qualité d'acquéreur à la SCI Chrisnath

Il résulte des dispositions de l'article 1216 du code civil issu de l'ordonnance n°2016-131 du 10 février 2016 que, si la cession à un tiers de la qualité de partie au contrat doit être constatée par écrit à peine de nullité, cette nullité n'apparaît que relative, si bien que seul le cédant ou le cessionnaire n'est susceptible de l'invoquer. Il en résulte que Mme [I] n'a pas qualité pour se prévaloir de l'absence de cession écrite de la qualité d'acquéreur de son bien immobilier par M. [D] à la SCI Chrisnath.

S'agissant de l'accord du co-contractant, soit le « cédé », il convient de souligner tout d'abord que, selon ce même texte légal, la cession produit effet à l'égard du cédé lorsque le contrat conclu entre le cédant et le cessionnaire lui est notifié ou lorsqu'il en prend acte dans la seule hypothèse où il a donné son accord par avance, notamment dans le contrat conclu initialement avec celui qui est devenu le cédant. Or, dans la situation présente, en acceptant l'offre de M. [D], Mme [I] n'a pas donné son accord pour une cession future de la qualité d'acquéreur par ce dernier, ce dont il résulte que la simple notification de la cession à la SCI Chrisnath ou la prise d'acte de celle-ci par la venderesse ne peut suffire à démontrer l'existence de cet accord, qu'il appartient donc aux appelants de prouver.

Aucune forme n'étant exigée, il doit être cependant démontré qu'il s'agit d'un accord manifestant une volonté claire et non équivoque, la preuve pouvant en être rapportée par tout moyen.

A ce titre, rien ne vient démentir les allégations de Mme [I] selon lesquelles elle n'a pas eu connaissance des correspondances échangées entre les notaires respectifs des parties et n'a appris la substitution d'acquéreur qu'en recevant le projet de promesse synallagmatique de vente transmis par son propre notaire le 31 octobre 2019. D'ailleurs, dans un courriel que lui a adressé l'agent immobilier en charge de la vente le 27 septembre 2019, M. [D] était toujours désigné en tant qu'acquéreur.

Si Mme [I] a accepté le rendez-vous à l'étude du notaire de l'acquéreur fixé au 14 novembre 2019 pour signature de cette promesse synallagmatique de vente, sans émettre d'observation sur l'identité de l'acquéreur mentionnée sur le projet reçu, sa venue à ce rendez-vous ne suffit pas à manifester de sa part un accord non équivoque à la substitution d'acquéreur convenue entre M. [D] et la SCI Chrisnath, dans la mesure où, précisément, lors de ce rendez-vous, elle a refusé de signer cette convention.

Dès lors, et quels que soient les motifs invoqués par sa fille, dans des courriels et courriers adressés postérieurement aux notaires des parties, pour expliquer ce refus, l'existence d'un accord non équivoque de la venderesse à la cession de la qualité d'acquéreur de son bien à la SCI Chrisnath par M. [D] n'est pas démontrée. En conséquence, la cession de la qualité d'acquéreur entre les appelants, pour l'achat du bien immobilier promis à M. [D], ne lui est pas opposable et la vente ne s'est donc pas formée au profit de la SCI Chrisnath. Le jugement déféré doit donc être confirmé en ce qu'il a rejeté l'ensemble des demandes de M. [D] et de la SCI Chrisnath portant sur la vente de l'immeuble de Mme [I] à cette SCI.

4°) Sur les demandes de dommages et intérêts

La cession de la qualité d'acquéreur à la vente de son bien immobilier n'étant pas opposable à Mme [I], aucune faute ne peut lui être reprochée, susceptible d'avoir causé un quelconque dommage à l'un ou l'autre des appelants.

Il en résulte que le jugement déféré doit également être confirmé en ce qu'il a rejeté les demandes de dommages et intérêts de M. [D] et de la SCI Chrisnath.

II - Sur la demande de dommages et intérêts de Mme [I]

Dans la situation présente, si les demandes de M. [D] et de la SCI Chrisnath sont toutes rejetées, rien ne caractérise de leur part une quelconque mauvaise foi, intention de nuire, voire même une légèreté blâmable ou une erreur grossière équipollente au dol, ce dont il résulte que l'exercice de leur action en justice contre Mme [I] ne constitue aucun abus de droit de leur part.

Par ailleurs, rien ne démontre que le long délai écoulé entre l'acceptation de l'offre d'achat de M. [D] par la venderesse et la date fixée pour la signature de la promesse synallagmatique de vente soit imputable à un comportement fautif de l'un ou l'autre des appelants, de même que l'absence de signature de cette convention ou la volonté d'y ajouter des clauses particulières, qui n'excédaient pas l'exercice normal de leurs droits.

En conséquence, la demande de dommages et intérêts de Mme [I] est infondée et le jugement déféré doit être confirmé en ce qu'il l'a rejetée.

III - Sur les dépens et les frais non compris dans les dépens

Le jugement déféré étant confirmé en ses dispositions principales, il le sera également en ses dispositions relatives aux dépens et aux frais exclus des dépens de première instance.

Pour les mêmes motifs, les appelants assumeront les dépens d'appel et seront déboutés de leurs demandes fondées sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, au titre des frais non compris dans les dépens qu'ils ont engagés en appel. En revanche, ils seront condamnés au même titre et sur le même fondement à régler à Mme [I] la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant contradictoirement, publiquement, par mise à disposition de l'arrêt au greffe, conformément aux dispositions de l'article 450, alinéa 2 du code de procédure civile,

CONFIRME en toutes ses dispositions le jugement rendu entre les parties le 16 novembre 2021 par le tribunal judiciaire de Strasbourg rectifié par le jugement du 25 janvier 2022,

CONDAMNE M. [U] [D] et la SCI Chrisnath aux dépens d'appel,

REJETTE la demande de M. [U] [D] et de la SCI Chrisnath fondée sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, au titre des frais exclus des dépens qu'ils ont engagés en appel,

CONDAMNE in solidum M . [U] [D] et la SCI Chrisnath à régler à Mme [O] [I] la somme de 2 000,00 (deux mille) euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.