CA Douai, 2e ch. sect. 1, 26 septembre 2024, n° 22/05526
DOUAI
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
Musthane (SAS)
Défendeur :
Les Thermes de la Reine (SARL)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Gilles
Conseillers :
Mme Mimiague, Mme Bubbe
Avocats :
Me Laurent, Me Lefevre, Me Camus-Demailly, Me Paulian
EXPOSÉ DU LITIGE
Suivant devis établi le 6 janvier 2017 accepté le 7 janvier suivant, la société Les thermes de la reine, qui exploitait un établissement thermal sur la commune de [Localité 2] a commandé auprès de la société Musthane un réservoir de stockage thermal d'une contenance de 30 m3 (structure souple en élastomère) pour le prix de 15 902 euros HT.
Le réservoir a été livré à la société Les thermes de la reine en avril 2017 et la facture intégralement réglée.
La société Les thermes de la reine a installé le réservoir en janvier 2019 et constaté après un test de quinze jours la rupture d'un des angles. La société Musthane a contesté toute responsabilité et proposé la livraison d'une nouvelle bâche au prix de 19 120 euros HT livrable dans un délai de six à huit semaines. L'assureur de la société Les thermes de la reine a fait diligenter le 3 mai 2019 une expertise à laquelle la société Musthane, convoquée, n'a pas participé.
Par ordonnance du 16 janvier 2020 le juge des référés du tribunal de commerce de Lille Métropole, saisi par la société Les thermes de la reine, a désigné un expert judiciaire qui a déposé son rapport le 4 août 2021.
Considérant qu'il en résultait que le sinistre avait pour origine un défaut de fabrication de la bâche, la société Les thermes de la reine a assigné la société Musthane devant le tribunal de commerce de Lille Métropole aux fins d'obtenir le remboursement du coût de la bâche et des dépenses engagées pour installer des cuves en inox en remplacement. La société Musthane lui a opposé le défaut d'intérêt et de qualité à agir à raison de la cession du fonds de commerce, subsidiairement, l'absence de preuve d'un vice caché.
Par jugement du 8 novembre 2022 le tribunal, retenant que la responsabilité des désordres était imputable à chaque partie à hauteur de 50 %, a :
- jugé que la société Les thermes de la reine est toujours propriétaire de la bâche défectueuse et que son action rédhibitoire est donc recevable,
- condamné la société Musthane à lui payer la somme de 25 005,93 euros HT correspondant à 50 % du coût d'achat de la bâche et 50 % du coût d'installation des deux cuves en inox acquises en remplacement,
- condamné la société Musthane à lui payer la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné la société Musthane aux entiers dépens taxés et liquidés à la somme de 69,59 euros en ce qui concerne les frais de greffe, ainsi que les frais taxés de M. [H] [B], expert judiciaire, à hauteur de 6 734,86 euros selon ordonnance de taxe.
Par déclaration reçue au greffe de la cour le 2 décembre 2022 la société Musthane a relevé appel aux fins d'annulation ou d'infirmation de ce jugement, déférant à la cour l'ensemble de ses chefs.
La société Les thermes de la reine a formé appel incident par conclusions remises au greffe et notifiées par voie électronique le 5 mai 2023.
Aux termes de ses dernières conclusions remises au greffe et notifiées par voie électronique le 26 janvier 2024 la société Musthane demande à la cour de :
- déclarer recevable et bien fondé son appel,
- infirmer le jugement dans les termes de la déclaration d'appel,
statuant à nouveau,
- sur l'absence d'intérêt et de qualité à agir :
- juger que la société Les thermes de la reine n'est plus propriétaire du fonds de commerce comprenant notamment le réservoir thermal de 30m3 acquis auprès d'elle, et que l'action rédhibitoire a été transférée au nouveau propriétaire du fonds de commerce,
- en conséquence, déclarer l'action rédhibitoire engagée par la société Les thermes de la reine irrecevable pour défaut d'intérêt et de qualité à agir et la débouter de l'ensemble de ses demandes,
- sur l'absence de vice caché,
- juger que la société Les thermes de la reine échoue à démontrer l'existence d'un vice caché,
- en conséquence, la débouter de l'ensemble de ses demandes,
- subsidiairement, sur le montant dû au titre de l'action rédhibitoire,
1. juger que seules les factures émises par un plombier peuvent être retenues au titre du préjudice ainsi que l'acquisition des deux cuves en inox et leur livraison, en conséquence, juger que le préjudice de la société Les thermes de la reine est limité aux factures de plomberie, à l'acquisition des cuves en inox mais sur la somme de 750 euros (50 % de 1 500 euros) et au coût de la livraison 900 euros (50 % de 1 800 euros),
2. juger que pour déterminer l'évaluation du dommage il doit être tenu compte du choix de la société Les thermes de la reine dans la solution de remplacement qui a pour effet d'augmenter très fortement le préjudice, en conséquence, juger que le préjudice devra être ramené à la somme de 17 511 euros,
- sur l'appel incident, juger que la société Les thermes de la reine échoue à démontrer l'existence d'un vice caché, la débouter de son appel incident et de l'ensemble de ses demandes,
- en tout état de cause, la condamner à lui verser la somme de 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens d'appel, et la condamner à lui payer la somme de 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour la première instance et aux entiers dépens de première instance.
Aux termes de ses dernières conclusions remises au greffe et notifiées par voie électronique le 28 décembre 2023 la société Les thermes de la reine demande à la cour de :
- la juger recevable et bien fondée dans l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
- confirmer le jugement en toutes ses dispositions,
- par conséquent, débouter la société Musthane de toutes ses demandes,
- infirmer le jugement en ce qu'il a condamné la société Musthane à lui verser la somme de 7 951 euros HT correspondant à 50 % du prix d'achat de la bâche en 2017,
- statuant à nouveau,
- juger qu'elle subit un vice caché imputable à la société Musthane,
- débouter la société Musthane de toute demande contraire,
- la condamner à lui payer la somme de 15 902 euros HT correspondant au prix d'achat de la bâche en 2017,
- en tout état de cause,
- condamner la société Musthane au paiement d'une indemnité de 4 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- la condamner aux entiers dépens comprenant les frais taxés de l'expert judiciaire à hauteur de 6 734,86 euros selon ordonnance de taxe du greffe,
- débouter la société Musthane de sa demande de condamnation au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- la débouter de sa demande au titre des dépens.
En application de l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux écritures des parties pour l'exposé de leurs moyens.
La clôture de l'instruction est intervenue le 17 avril 2024 et l'affaire a été renvoyée à l'audience de plaidoiries du 22 mai suivant.
MOTIFS
Sur l'intérêt et la qualité à agir de la société Les thermes de la reine
La société Musthane soutient que l'action sur le fondement de la garantie des vices cachés est réservée au propriétaire du réservoir thermal de 30 m3, que la société Les thermes de la reine a vendu le 13 décembre 2019 son fonds de commerce comprenant les éléments corporels affectés à l'activité professionnelle du commerçant, parmi lesquels le réservoir litigieux, dès lors que la cession concerne tous les éléments du fonds de commerce à défaut d'exclusion expresse, qu'en outre la société Les thermes de la reine ne démontre pas être restée en possession du matériel litigieux et que la seule détention de la bâche par sa gérante ne démontre pas qu'elle en serait encore propriétaire.
L'argumentation de la société Musthane ne concerne pas le défaut de qualité à agir de la société Les thermes de la reine qui intervient au soutien de ses propres intérêts, représentée par son représentant légal, et qui a en conséquence qualité à agir.
Par ailleurs, s'agissant de l'intérêt à agir, il ressort de l'inventaire auquel l'acte de vente du fonds de commerce renvoie concernant le 'mobilier commercial, les agencements et le matériel servant à l'exploitation' compris dans le fonds de commerce cédé, annexé à l'acte, qui ne mentionne pas cette bâche, et des attestations établies par le notaire et par le maire de la commune de [Localité 2], cessionnaire du fonds, mêmes maladroitement rédigées, que cette bâche a été exclue de la vente et que la société Les thermes de la reine reste seule concernée par la procédure en cours contre la société Musthane. Il est acquis en outre que la gérante de la société Les thermes de la reine est en possession de la bâche litigieuse, laquelle vaut titre en matière mobilière, rien n'indiquant qu'elle l'aurait acquise à titre personnel.
C'est dès lors à bon droit que le premier juge a considéré que la société Les thermes de la reine était recevable à exercer l'action en vice caché. Il convient en conséquence de confirmer le jugement en ce qu'il a dit l'action rédhibitoire de la société recevable.
Sur l'application de la garantie des vices cachés
En vertu de l'article 1641 du code civil, le vendeur est tenu de la garantie à raison des défauts cachés de la chose vendue qui la rendent impropre à l'usage auquel on la destine, ou qui diminuent tellement cet usage que l'acheteur ne l'aurait pas acquise, ou n'en aurait donné qu'un moindre prix, s'il les avait connus.
Le premier juge a relevé, d'une part, que la bâche avait été stockée dans son emballage d'origine, sans avoir été vérifiée, ce qui n'a pas permis de voir si elle était affectée d'un désordre, malfaçon ou non conformité, d'autre part, que le stockage s'était fait dans les conditions définies par la société Musthane et que ce n'est qu'après une utilisation d'une quinzaine de jours que la fuite avait été constatée, enfin, que les conditions d'installation du réservoir n'avaient pu être examinées et qu'il n'était pas possible d'écarter qu'une mauvaise installation soit à l'origine de la détérioration de la bâche, que l'expert avait constaté l'existence d'un trou et d'une déchirure à l'un des angles qui sont à l'origine de la fuite, n'avait pu certifier que cela constituait un vice caché et que, 'compte tenu de cette incertitude', il y avait lieu de retenir une responsabilité partagée à 50/50 entre les deux sociétés.
La société Les thermes de la reine se fonde, comme devant le premier juge, sur la garantie des vices cachés.
La société Musthane lui oppose qu'elle n'établit pas que les trois conditions prévues à l'article 1641 du code civil soient réunies, à savoir, l'existence d'un vice, la gravité du vice et son antériorité par rapport à la vente. Elle relève en particulier que l'existence du vice et son antériorité ne sont pas établis dès lors qu'il subsiste un doute sur la cause de l'état défectueux de la chose parce qu'il n'est pas possible d'écarter la possibilité qu'une mauvaise installation (des plis auraient pu générer des tensions supérieures à la normale du fait du raccourcissement des dimensions de la bâche par rapport au réservoir rigide) ou une mauvaise utilisation de la bâche soient à l'origine du désordre ; à cet égard elle relève que l'expert n'a pas contrôlé les dimensions du contenant en béton recevant la bâche qui peut avoir une incidence sur la pression à l'intérieur de la citerne, susceptible de générer la rupture d'un des angles, ni les conditions de remplissage qui ont pu aussi provoquer une augmentation de la pression à des valeurs supérieures à ce qui est admis.
La cour constate qu'après examen de la bâche litigieuse, l'expert judiciaire a constaté la présence d'un trou dans l'angle de la bâche ainsi que d'une 'déchirure à l'un des angles du matériel' à l'origine de la fuite, précisant que le 'positionnement de cette fente d'environ 2 cm de long se situe sur l'un des angles de la partie supérieure de la citerne et correspond au point de jointures des 2 côtés de la citerne permettant sa fermeture pour former l'angle de la citerne', confirmant l'expertise diligentée par l'assureur de la société Les thermes de la reine qui a constaté qu'un des angles s'était rompu et la présence d'une 'fente de 2 cm le long du joint de fermeture de la bâche' et le 'recouvrement de la membrane décollé au droit du joint de fermeture de la bâche', précisant que 'ces deux défaillances correspondent à la zone de fuite constatée par l'assuré 15 jours après pose de la bâche'.
Si l'expert judiciaire explique qu'il n'a pas examiné les conditions d'utilisation ou d'installation de la bâche, au motif que celle-ci n'était plus en place dans son logement, et n'a pas donné son avis quant à l'incidence des conditions d'utilisation de la bâche sur l'apparition désordres (il se borne à indiquer quelle est la fonction de la citerne et les conséquences de l'absence de citerne pour l'exploitation du site, le rapport reprend en annexe ses réponses aux dires du conseil de la société Musthane quant à la question d'une éventuelle surpression. Il précise en effet, au regard notamment du schéma de circulation de l'eau thermale (annexe 28) qu' 'il n'est pas possible qu'une surpression soit à l'origine de la déchirure de la cuve à cet endroit', il relève des incohérences dans les affirmations de la société Musthane quant à la pression admise à l'intérieur de la bâche (confusion entre pression de gonflage et pression à l'intérieur de la bâche) et il précise que 'la déchirure se situe sur un coin supérieur, cependant la pression maximale se situe dans le fond de la bâche. Aussi il ne semble pas possible qu'une surpression soit à l'origine de la déchirure de la cuve à cet endroit'. Le rapport d'expertise privé communiqué par la société Musthane qui analyse le rapport d'expertise judiciaire ne fait que remettre en question les affirmations de l'expert judiciaire et émettre des hypothèses non vérifiées.
En tout état de cause, si l'expert judiciaire ne répond pas à l'ensemble des interrogations de la société Musthane et s'il ne répond pas de manière ferme quant à l'existence d'un vice caché ('le désordre dont est affectée la bâche semble constituer un vice caché'), il affirme que le matériel présente une 'malfaçon' qui 'se caractérise par une ouverture, un trou à l'un des angles (...) ainsi qu'une déchirure/décollement de la toile au droit du joint de fermeture de la bâche' en précisant 'on peut émettre un doute sur la qualité de la soudure par vulcanisation propre à ce type de matériau' et conclut que 'le désordre constaté pourrait être une défaillance au niveau de la liaison par vulcanisation dans l'un des angles de la citerne, mauvaise juxtaposition de la toile lors de l'opération de vulcanisation, fragilité de la toile' ; il estime que le 'désordre subi par Les thermes de la reine met cependant en évidence un défaut de fabrication que l'ont peut appeler vice caché'.
De son côté, l'expert missionné par l'assureur, affirme que les deux défaillances qu'il a constatées 'correspondent au traitement du joint assurant la liaison entre les lés des deux côtés de la bâche. Ce joint est un point faible et il ne devrait pas être positionné dans un angle qui connaît les plus fortes sollicitations mécaniques' et précise que'l'examen des trois autres angles montre qu'ils n'ont pas été traités de la même façon (...), les autres collages (ou soudures') ne sont pas disposés dans l'angle mais en partie courante. Ils ne présentent aucun décollement ou fente', ce qui ne fait pas l'objet de contestation. Il précise par ailleurs que 'l'examen du bâtiment où [la bâche] se trouvait ne met en évidence aucun défaut qui puisse expliquer cet incident. Les crochets d'ancrage sont en place et les voiles en béton sont recouverts d'un feutre qui empêche toute altération, par frottement ou perforation, de l'enveloppe de la bâche' et conclut que 'le sinistre n'est donc pas causé par un défaut de pose, mais par un défaut de fabrication de la bâche, en particulier le traitement d'un angle'.
Enfin, l'expert judiciaire exclut la mise en cause des conditions de stockage de la bâche, expliquant, suite à la visite du lieu de stockage, que le 'stockage de la citerne s'est fait dans le respect des conditions définies au paragraphe Stockage entretien des charges souples pour essais, sur le site de la SAS Musthane dans l'onglet NOTICE via le manuel d'utilisation des réservoirs souples (à la date de rédaction du présent pré-rapport). Notice se rapprochant le plus du matériel concerné par notre affaire' et précise que 'les conditions de stockage indiquées sur le site de la SAS Musthane ne précisent pas de valeur de durée de stockage'.
Il est acquis par ailleurs, comme le constate l'expert judiciaire, que la citerne litigieuse est inutilisable.
Ces constations matérielles et avis techniques des experts ainsi que les circonstances dans lesquelles le désordre est apparu (quinze jours après une installation et après une période de test vidange/remplissage) permettent d'établir que la bâche litigieuse était atteinte d'un défaut la rendant impropre à l'usage auquel elle était destinée, antérieur à la vente, dont l'acquéreur n'a pu se rendre compte que lors de son utilisation de la bâche, constituant ainsi un vice caché, et en conséquence d'exclure un désordre lié à une mauvaise utilisation ou installation.
Sur les demandes de la société Les thermes de la reine
Vu les articles 1644, 1645 et 1647 du code civil, et dès lors qu'il est établi que la bâche litigieuse est inutilisable, la société Les thermes de la reine est en droit de réclamer l'intégralité du remboursement du prix (15 902 euros). Il sera dès lors fait droit à sa demande.
En outre, dès lors qu'il résulte de l'article 1645 une présomption irréfragable de connaissance par le vendeur professionnel du vice de la chose vendue, l'acheteur est en l'espèce en droit de réclamer des dommages-intérêts en réparation du préjudice subi à raison du vice caché.
S'agissant de la demande de dommages-intérêts, la société Les thermes de la reine demande la confirmation du montant alloué en première instance correspondant à la moitié des frais supportés pour la mise en place des cuves de remplacement (coûts des cuves en inox, frais de transport, frais d'installation), étant relevé que le premier juge a fixé le montant en retenant un partage de responsabilité qui n'a pas lieu d'être dès lors que la garantie des vices cachés trouve à s'appliquer.
La société Les thermes de la reine subit un préjudice lié à la nécessité de mettre en place un système de remplacement et ce, en urgence, compte tenu de contraintes économiques (ouverture des thermes pour la saison au mois de mars 2019). La cour constate que si la société Musthane a proposé un devis de fourniture d'une bâche neuve celui-ci, daté du 11 février 2019, mentionne un délai de livraison de six à huit semaines et supposait le règlement du prix (19 120 euros auquel elle appliquait une remise de 20 %).
La société Musthane relève que la société Les thermes de la reine ne peut expliquer avoir été contrainte de recourir à un remplacement par deux cuves sous prétexte que les délais de fourniture d'une bâche n'étaient pas compatibles avec les dates de début de la saison alors que, au regard des dates des factures de transport et d'installation, les deux cuves n'ont été mises en place qu'au mois de mai 2019 et qu'il y a lieu d'évaluer le préjudice au regard du coût de la bâche de remplacement proposée.
Toutefois les dates des différentes factures ne sont pas en soi déterminantes pour déterminer la date d'installation, étant relevé que la facture de transport des cuves a été émise le 22 mai alors que l'expert amiable a pu constater le 3 mai que les nouvelles citernes étaient déjà en service, et que la facture d'achat des cuves est datée du 19 février 2019. De plus, l'entrepreneur M. [R] a établi une attestation datée du 14 décembre 2023, certes ne comprenant pas les mentions prévues à l'article 202 du code de procédure civile, mais signée et portant le cachet de l'entreprise et à laquelle est jointe la copie de sa carte d'identité, pour indiquer avoir transporté les deux cuves le 20 février 2019 et les avoir mises en place à réception. La société Les thermes de la reine, qui explique qu'elle n'a pas subi de préjudice d'exploitation dont elle n'aurait pas manqué le cas échéant de réclamer réparation, justifie d'une activité à compter du 4 mars 2019. Ces éléments tendent à démontrer que l'installation a été mise en place avant le mois de mars. En tout état de cause, il doit être admis que la société Les thermes de la reine était légitime à tout mettre en oeuvre pour obtenir une nouvelle installation dans des délais plus brefs que ceux proposés par la société Musthane qui ne permettaient pas l'exercice immédiat d'une activité. Par ailleurs, l'expert judiciaire ne remet pas en cause l'opportunité du choix des cuves en inox, relevant que le coût des seules cuves d'occasion était inférieur à celui d'une bâche neuve.
Dès lors le préjudice de la société Les thermes de la reine doit être évalué au regard des frais qu'elle a effectivement engagés et non uniquement au regard du coût d'une nouvelle bâche. Le préjudice correspond au montant supporté en sus des frais engagés initialement pour la mise en place d'une bâche (frais qu'elle aurait de toute façon supportés si la bâche n'avait pas été défectueuse), peu importe qu'elle ait par la suite revendu les cuves lors de la cession du fonds de commerce, qui correspond au montant de la totalité des frais liés à la mise en place des cuves en inox (34 109,86 euros, selon factures communiquées par la société Les thermes de la reine et retenue par l'expert judiciaire duquel doit être déduit les frais initiaux (15 902 euros) soit une somme de 18 207,86 euros, ramenée à 17 054,93 euros au regard de la demande de la société Les thermes de la reine qui conclut à la confirmation du jugement sur le montant alloué au titre du remplacement de la bâche défectueuse.
Il convient dès lors d'infirmer le jugement s'agissant du montant total de la condamnation prononcée contre la société Musthane et de prononcer une condamnation à hauteur de 32 956,93 euros.
Sur les demandes accessoires
Vu les articles 696 et 700 du code de procédure civile, il convient de confirmer les chefs du jugement relatifs aux dépens (incluant les frais d'expertise) et à la condamnation au titre de l'article 700 du code de procédure civile, de mettre les dépens d'appel à la charge de la société Musthane et d'allouer à l'intimée la somme de 2 000 euros à titre d'indemnité de procédure.
PAR CES MOTIFS
La cour,
Réforme le jugement en ce qu'il a condamné la société Musthane à payer à la société Les thermes de la reine la somme de 25 005,93 euros HT correspondant à 50 % du coût d'achat de la bâche et 50 % du coût d'installation des deux cuves en inox acquises en remplacement ;
Confirme le jugement pour le surplus ;
Statuant à nouveau sur le chef infirmé,
Condamne la société Musthane à payer à la société Les thermes de la reine la somme de 32 956,93 euros (correspondant à 15 902,00 euros en remboursement du prix et 17 054,93 euros à titre de dommages-intérêts) ;
y ajoutant,
Condamne la société Musthane à payer à la société Les thermes de la reine la somme de 2 000,00 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamne la société Musthane aux dépens d'appel.