Cass. 3e civ., 14 décembre 2004, n° 03-18.222
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. WEBER
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Bordeaux, 30 juin 2003), que la société civile immobilière (SCI) Myrtil a chargé la société Baber, entrepreneur, depuis lors en liquidation judiciaire, de la construction d'un bâtiment industriel destiné à abriter l'activité de la Société centrale de recyclage, aux droits de laquelle vient la société Onyx, sous la maîtrise d'oeuvre de la société Christian X..., assurée par la Société mutuelle d'assurance du bâtiment et des travaux publics (SMABTP) ; que la société Baber a sous-traité à la société Colas Sud Ouest l'exécution du revêtement de sol de l'atelier ; que des désordres ayant été constatés, le maître de l'ouvrage et l'utilisateur ont sollicité la réparation de leur préjudice ;
Sur le premier moyen du pourvoi U 03-18.222 et le premier moyen du pourvoi A 03-18.550, réunis :
Vu l'article 1147 du Code civil ;
Attendu que pour rejeter les demandes formées par les sociétés Murtil et Onyx contre la société Christian X... et son assureur, l'arrêt entièrement infirmatif retient qu'en l'absence de réception le maître de l'ouvrage est exclusivement fondé à invoquer la responsabilité contractuelle, et qu'il n'est pas établi ni même allégué que la non-conformité du revêtement serait imputable à une erreur de conception du maître d'oeuvre ;
Qu'en statuant ainsi, sans rechercher comme il le lui était demandé, si la société Christian X...n'avait pas manqué à l'obligation de conseil du maître d'oeuvre en n'alertant pas la société Myrtil sur les risques courus du fait de l'insuffisante épaisseur du revêtement de sol de l'atelier, compte tenu des contraintes spécifiques qu'il aurait à supporter, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision de ce chef ;
Et sur le second moyen du pourvoi U 03-18.222 et le second moyen du pourvoi A 03-18.550, réunis :
Vu l'article 1147 du Code civil ;
Attendu que pour rejeter les demandes formées par les sociétés Myrtil et Onyx contre la société Colas Sud Ouest, l'arrêt retient que le sol de l'atelier correspond à un trafic courant de transporteur, qu'il n'est pas justifié que l'entrepreneur principal ait attiré l'attention du sous-traitant sur la nature des contraintes imposées au revêtement et que la responsabilité délictuelle de la société Colas Sud Ouest vis-à-vis du maître de l'ouvrage, et sa responsabilité contractuelle vis-à-vis de la société Baber ne peuvent être invoquées ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'il appartenait à l'entrepreneur sous-traitant de se renseigner lui-même sur les contraintes spécifiques que le revêtement qu'il allait placer aurait à supporter, sans rechercher si, en sa qualité de spécialiste, la société Colas Sud Ouest avait procédé à ces investigations, la cour d'appel n'a donné de base légale à sa décision de ce chef ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 30 juin 2003, entre les parties, par la cour d'appel de Bordeaux ;
remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Poitiers ;
Condamne, ensemble, les sociétés Christian X... et Colas sud-ouest aux dépens des pourvois ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette toutes les demandes de ce chef ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze décembre deux mille quatre.