CA Chambéry, 1re ch., 1 octobre 2024, n° 16/02065
CHAMBÉRY
Autre
Autre
PARTIES
Demandeur :
CLG (SCI), Étude Bouvet & Guygonnet (SELARL)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Pirat
Conseillers :
Mme Reaidy, Mme Real del Sarte
Avocats :
Me Dormeval, SCP Thèmes, SCP Perez et Chat
Faits et procédure
Suivant acte authentique du 9 août 2006, la Sci CLG, propriétaire d'un ensemble constituant un centre commercial et de loisirs situé à Voglans (73420), a donné à bail à la société [Localité 10] Bowling un local dépendant de ce centre commercial, à savoir une surface utile approximativement d'activité d'environ 2 050 m² et un local dit « local n°2 », pour une durée de neuf années à dater du 8 janvier 2007, moyennant un loyer annuel de 205 000 euros HT payable trimestriellement et d'avance, outre charges et remboursement au bailleur de la taxe foncière.
Un litige est survenu entre les parties à propos de l'obligation d'entretien du centre commercial et de fourniture d'un environnement commercial favorable incombant à la bailleresse, ainsi qu'au sujet des facturations par cette dernière de charges et de taxes foncières jugées excessives par le preneur et non justifiées.
Par ordonnance du 29 juillet 2008, le juge des référés du tribunal de grande instance de Chambéry, saisi à la requête de la société [Localité 10] Bowling, a désigné M. [J] [C] en qualité d'expert, lequel a déposé son rapport le 7 mai 2010.
Considérant que la Sci CLG ne respectait pas les obligations nées du bail et les dispositions des articles 1719 et suivants du code civil, la société [Localité 10] Bowling a fait assigner cette dernière à jour fixe le 20 août 2009 notamment aux fins de voir condamner la Sci CLG à lui payer la somme de 200 000 euros par an à titre de dommages et intérêts destinés à compenser le préjudice global.
Par jugement du 1er avril 2010 le tribunal de grande instance de Chambéry a :
- Dit que la Sci CLG avait manqué à ses obligations d'entretien du centre commercial et de fourniture à la société [Localité 10] Bowling d'un environnement commercial favorable ;
- Dit que ces manquements avaient causé un préjudice à la société [Localité 10] Bowling ;
- Ordonné la réouverture des débats sur l'appréciation de ce préjudice et renvoyé l'affaire à la mise en état ;
- Dit que la Sci CLG n'avait pas respecté ses obligations tirées de l'article L125-5 du code de l'environnement vis à vis de la société [Localité 10] Bowling ;
- Ordonné en conséquence une mesure d'expertise en désignant M. [C] avec pour mission de déterminer si les pistes du bowling sont affectés de désordres et/ou défaillances et en déterminer les causes, de déterminer si les éventuels désordres et/ou défaillances sont en lien avec le fait que le zone est exposée aux risques naturels et donner tous les éléments permettant d'apprécier leurs conséquences quant à l'activité exercée et au montant du loyer du local, donner des éléments de chiffrage dudit loyer ;
- Rejeté la demande de la société [Localité 10] Bowling tendant à ce que le loyer commercial soit, dans l'attente du résultat de l'expertise, d'ores et déjà fixé à la somme annuelle de 117 500 euros ;
- Ordonné la réouverture des débats sur l'appréciation du préjudice et renvoyé l'affaire à la mise en état en invitant les parties à produire toutes les pièces utiles et le rapport définitif de l'expert judiciaire.
Ce faisant, le tribunal a retenu que le mauvais entretien, la finition défectueuse des sols, les défaillances récurrentes des escalators et les retards apportés au remplacement des sources de lumière en panne dans les parties communes étaient établies et ressortaient de la responsabilité du bailleur, que le bail et ses annexes définissaient la signalétique publicitaire du centre commercial, que la bailleresse s'était bien réservée ce rôle et devait en supporter les conséquences, concernant les défaillances de la signalétique de base, que la non-constitution de l'association des commerçants et les non-respects du règlement intérieur étaient de la responsabilité de la Sci CGL, que cette dernière avait ainsi manqué à ses obligations d'entretien du centre commercial et de fourniture à ses locataires d'un environnement commercial fiable, que ces manquements avaient causé un préjudice à la société [Localité 10] Bowling.
Par arrêt du 13 septembre 2011, la cour de céans a confirmé le jugement entrepris en ce qu'il a dit que la bailleresse avait manqué à ses obligations d'entretien du centre commercial et de fourniture à sa locataire d'un environnement commercial favorable, retenu la responsabilité contractuelle de la Sci CLG à l'égard de la société [Localité 10] Bowling, dit que ces manquements ont causé un préjudice à la locataire et ordonné une expertise judiciaire. Elle a infirmé le jugement en ce qu'il a retenu la responsabilité de la bailleresse pour défaut de constitution de l'association des commerçants.
Le pourvoi en cassation formé par la Sci CLG contre cet arrêt a été rejeté le 5 juin 2013.
Entre temps, à la suite de la déclaration de cessation des paiements de la société [Localité 10] Bowling, le tribunal de commerce de Chambéry, par jugement du 25 juillet 2011, a prononcé l'ouverture du redressement judiciaire de cette dernière.
Par jugement en date du 10 septembre 2012 cette même juridiction a validé un plan de continuation par apurement du passif et désigné Me [S] [H], ès qualités de commissaire à l'exécution du plan de la société.
Par acte d'huissier du 28 décembre 2012, la société [Localité 10] Bowling a fait assigner son bailleur au visa des dispositions des articles 1719 et suivants du code civil et du décret du 30 septembre 1953 devant le tribunal de grande instance de Chambéry, notamment aux fins de voir condamner la Sci CLG à lui payer à titre de provision la somme de 60 689,09 euros au titre du trop-perçu sur les charges et refacturation de travaux de mise en place du réseau d'évacuation des eaux usées.
Par jugement du 12 septembre 2016, assorti de l'exécution provisoire, le tribunal de grande instance de Chambéry a :
- Condamné la Sci CLG à fournir à la société [Localité 10] Bowling la justification des charges par elle réglées au titre des exercices 2010/2011, 2011/2012, 2012/2013 et 2013/2014, sous peine d'une astreinte de 1 000 euros par jour de retard à compter d'un délai d'un mois à compter de la signification du jugement ;
- Dit que les charges locatives, en ce compris les impôts et taxes en leur principe et leur quantum doivent être calculées sur la base du rapport de l'expert judiciaire, M. [C] ;
- Dit que le minimum de charges spécifiées au bail à titre indicatif est devenu caduc ;
- Fixé la provision annuelle dont est redevable la société [Localité 10] Bowling à l'égard de la Sci CLG à la somme de 41 275, 63 euros HT ;
- Fixé provisionnellement la créance de la Sci CLG à l'égard de la société [Localité 10] Bowling à la somme de 71 884,86 euros TTC, arrêtée au 31 mars 2014 au titre du trop-perçu sur les charges et refacturation de travaux mis en place du réseau d'évacuation des eaux usées ;
- Condamné la Sci CLG à assurer un entretien de l'ensemble commercial, en ce compris le nettoyage des parties communes, un éclairage normal du centre, un chauffage également normal, mais aussi une signalétique, notamment la mise en place du panneau tri-vision et la remise en état des portes bannières et adhésifs constituant la signalétique à ses frais dans le délai d'un mois à compter de la signification du présent jugement, sous peine d'une astreinte de 1 000 euros par jour de retard ;
- Condamné la Sci CLG à payer à la société [Localité 10] Bowling une somme de 1 000 euros pour toute infraction ultérieure, constatée dans l'obligation d'entretien, telle que définie ci-dessus ;
- Débouté la Sci CLG de toutes ses demandes ;
- Fixé la créance de la Sci CLG à l'égard de la société [Localité 10] Bowling à la somme de 6 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Dans l'intervalle, la Sci CLG a été placée sous sauvegarde de justice suivant jugement du tribunal de commerce de Chambéry du 24 octobre 2014. Un plan de sauvegarde a été ensuite adopté.
Par déclaration au greffe du 20 septembre 2016, la Sci CLG, Me [F], ès qualités d'administrateur judiciaire, et la société Etude Bouvet & Guyonnet, ès qualités de mandataire judiciaire, ont interjeté appel de la décision en toutes ses dispositions.
Par un arrêt du 5 juin 2018, la première chambre civile de la cour de céans a :
- Confirmé le jugement entrepris en ce qu'il a :
- dit que les charges locatives, en ce compris les impôts et taxes en leur principe et leur quantum doivent être calculées sur la base du rapport de l'expert judiciaire, M. [C],
- dit que le minimum de charges spécifiées au bail à titre indicatif est devenu caduc,
- fixé la provision annuelle dont est redevable la société [Localité 10] Bowling à l'égard de la Sci CLG à la somme de 41 275, 63 euros HT,
- condamné la Sci CLG à assurer un entretien de l'ensemble commercial, en ce compris le nettoyage des parties communes, un éclairage normal du centre, un chauffage également normal, mais aussi une signalétique, notamment la mise en place du panneau tri-vision et la remise en état des portes bannières et adhésifs constituant la signalétique à ses frais dans le délai d'un mois à compter de la signification du présent jugement, sous peine d'une astreinte de 1 000 euros par jour de retard,
- condamné la Sci CLG à payer à la société [Localité 10] Bowling une somme de 1 000 euros pour toute infraction ultérieure, constatée dans l'obligation d'entretien, telle que définie ci-dessus ;
- Infirmé pour le surplus et statuant à nouveau ;
- Dit n'y avoir lieu en l'état de fixer provisionnellement la créance de la société [Localité 10] Bowling à l'égard de la Sci CLG au titre du remboursement du trop-perçu des charges ;
- Condamné la Sci CLG, Me [F] ès qualités et la société Etude Bouvet & Guyonnet es qualité au paiement de la somme de 6 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles exposés en première instance ainsi qu'aux dépens de première instance incluant les frais d'expertise avec distraction de ces derniers au profit de Me Connille avocat ;
Y ajoutant,
- Ordonné une mesure d'expertise ;
- Désigné en qualité d'expert M. [C] [Adresse 4] [Localité 7], lequel aura pour mission de :
- se rendre au siège de la société bailleresse [Adresse 8] à [Localité 10] ou dans tout autre local utilisé pour l'administration et la gestion du centre commercial de [Localité 9],
- se faire remettre tout document ou justificatifs relatifs aux charges afférentes aux parties à usage commun du centre commercial et notamment tous contrats de prestations de service, conclus par la bailleresse, tous justificatifs des charges communes exposées pour la période allant de l'exercice 2008-2009 à l'exercice 2017-2018 inclus,
- examiner ces documents,
- déterminer, au regard notamment des contestations émises par la société [Localité 10] Bowling, les sommes dépensées par la société bailleresse au titre des charges afférentes aux parties à usage commun du centre commercial sur la période allant de l'exercice 2008-2009 à l'exercice 2017-2018 inclus,
- vérifier en fonction de l'état des lieux que les quotes-parts des charges afférentes aux parties à usage commun correspondent toujours à celles déterminées dans le précédent rapport d'expertise du 10 mai 2010,
Dans la négative déterminer la ou les dates de modification et déterminer la ou les nouvelles quotes-parts des charges afférentes aux parties à usage commun et privatif incombant aux locataires de l'immeuble et notamment celle incombant à la société [Localité 10] Bowling,
- faire le compte entre les parties arrêté à la date du 31 mars 2018, dernier jour de l'exercice 2017-2018 ;
- Dit que l'expert accomplira sa mission conformément aux dispositions des articles 273 à 283 du code de procédure civile, qu'en particulier il pourra recueillir de toutes personnes informées des déclarations, qu'il aura la faculté de s'adjoindre tous spécialistes de son choix dans une spécialité distincte de la sienne, à charge pour lui de joindre leur avis à son rapport ;
- Dit que l'expert fera connaître sans délai son acceptation et qu'en cas de refus ou d'empêchement légitime, il sera pourvu aussitôt à son remplacement ;
- Dit que l'expert commencera ses opérations dès qu'il aura été avisé par le greffe de la consignation par les parties de la provision mise à leur charge ou du versement de la première échéance ;
- Dit que la société [Localité 10] Bowling devra consigner à la Régie des Avances et Recettes de la cour une somme de 3 000 euros à valoir sur les frais d'expertise avant le 20 juillet 2018 ;
- Rappelé qu'à défaut de consignation dans le délai imparti, la désignation de l'expert est caduque,
- Dit qu'à l'issue de la première, et au plus tard de la deuxième réunion des parties, l'expert soumettra au conseiller chargé du contrôle des expertises et communiquera aux parties un état prévisionnel détaillé de ses frais et honoraires, et, en cas d'insuffisance de la provision allouée, demandera la consignation d'une provision supplémentaire ;
- Dit que l'expert devra déposer son rapport en double exemplaire au greffe avant le 30 janvier 2019 sauf prorogation qui lui serait accordée par le magistrat chargé du suivi de l'expertise, à sa requête,
- Rappelé que l'article 173 du code de procédure civile fait obligation à l'expert d'adresser une copie de son rapport à chacune des parties ou, pour elles, à leur avocat ;
- Désigné pour surveiller les opérations d'expertise, le conseiller de la mise en état de la 1ère chambre civile ;
- Dans cette attente, sursis à statuer sur l'ensemble des demandes respectives en paiement, ainsi que sur les frais irrépétibles et les dépens d'appel.
Par ordonnance du 2 mai 2019, le conseiller de la mise en état chargé du suivi des expertises a :
- Dit n'y avoir lieu à remplacement de l'expert ;
- Prorogé le délai imparti à l'expert pour déposer son rapport au 15 octobre 2019,
- Dit n'y avoir lieu à paiement des frais visés à l'article 700 du code de procédure civile exposés en cause d'appel ;
- Dit que les dépens suivront le sort de l'instance principale.
L'expert a rendu son rapport le 31 octobre 2019.
Prétentions et moyens des parties
Par dernières écritures du 31 janvier 2024, régulièrement notifiées par voie de communication électronique, la Sci CLG, Me [F] et la société Etude Bouvet & Guyonnet sollicitent l'infirmation de la décision et demandent à la cour de :
- Dire et juger prescrite la demande en nullité de bail commercial formée par la société [Localité 10] Bowling ;
- Dire et juger que cette demande se heurte à l'autorité de la chose jugée ;
- En tout hypothèse, dire et juger valable le bail commercial en date du 9 août 2006 ;
- Débouter en conséquence la société [Localité 10] Bowling de sa demande de nullité du contrat de bail en date du 9 août 2006 ;
Réformant le jugement rendu le 12 septembre 2016 par le tribunal de grande instance de Chambéry ;
- Dire et juger recevable et bien fondée la demande reconventionnelle de la Sci CLG ;
- Dire et juger recevables les demandes de la Sci CLG pour les exercices postérieurs au 31 mars 2018 ;
- La dire et juger bien fondée ;
- Condamner la société [Localité 10] Bowling à payer à la Sci CLG la somme de 379.947,23 euros TTC, au titre de l'arriéré des charges provisoirement arrêté au 31 mars 2021.
- Débouter la société [Localité 10] Bowling de sa demande visant à la voir rembourser par la Sci CLG des sommes versées à titre de provision sur charges pour les exercices 2018/2019 à 2022/203 ;
- Débouter la société [Localité 10] Bowling de ses autres demandes ;
- Condamner la société [Localité 10] Bowling à payer à la Sci CLG la somme de 15 000 euros, en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
- La condamner enfin aux entiers dépens de première instance et d'appel, en ce compris les frais d'expertise, avec application, au profit de la SCP Pierre Perez & Catherine Chat, des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Par dernières écritures du 30 janvier 2024, régulièrement notifiées par voie de communication électronique, société [Localité 10] Bowling sollicite de la cour de :
- Juger que le bail établi en date du 9 août 2006 par acte notarié de Me [V], notaire associé en résidence à [Localité 7] sis [Adresse 3] est nul et de nul effet ;
- Débouter la société Sci CLG de toutes ses demandes, fins et conclusions ;
En toute hypothèse,
- Juger que le montant de la créance de la Sci CLG ne saurait excéder la somme de 132 997,66 euros au titre de solde du paiement des charges et taxes foncières pour les exercices 2007-2008 à 2017-2018 ;
- Juger que cette somme ne sera assortie d'aucuns intérêts, pénalités ou autres clauses ;
- Fixer, pour les exercices postérieurs au 31 mars 2018, la date de prise d'effet du changement de destination de la surface de bureaux au R+2 et du nouveau ratio de 321,78/1000 au 27 juin 2019 ;
- Fixer, pour les exercices postérieurs au 31 mars 2018, la date de prise d'effet du changement de destination de la réserve Guy Degrenne en surface commerciale et du nouveau ratio de 320,90/1000 au 1er décembre 2020 ;
- Juger irrecevables les demandes de la Sci CLG pour les exercices postérieurs au 31 mars 2018 et tout état de cause mal fondées, en conséquence débouter la Sci CLG de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;
- Condamner la Sci CLG à lui rembourser les sommes versées à titre de provisions sur charges pour les exercices dont les charges n'ont pas été justifiées, à savoir exercices (2018-2019 à 2022-2023) pour un montant total de provisions de 5 x 49 530,76 euros ou encore 247 653,80 euros ;
- Condamner la Sci CLG à lui payer les frais d'expertise, soit la somme de 13 915,92 euros ;
- Condamner la Sci CLG à lui payer une somme identique au coût de l'expert pour frais engagés par sa propre structure en temps et en moyens, soit la somme de 13 915,92 euros ;
- Condamner la Sci CLG à la somme de 30 000 euros au titre de la réparation de son préjudice moral ;
- Débouter la Sci CLG de toutes ses autres demandes, fins et conclusions ;
- Condamner la Sci CLG à lui payer la somme de 20 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
- Condamner la Sci CLG aux entiers frais et dépens avec pour ceux d'appel application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile au profit de Me Dormeval, avocate.
Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des prétentions des parties, la cour se réfère à leurs conclusions visées par le greffe et développées lors de l'audience ainsi qu'à la décision entreprise.
Une ordonnance en date du 5 février 2024 a clôturé l'instruction de la procédure. L'affaire a été plaidée à l'audience du 2 avril 2024.
MOTIFS ET DÉCISION
I - Sur la fin de non recevoir liée au caractère nouveau de la demande de la société CLG relative au paiement des charges entre le 1 avril 2018 et le 31 mars 2021 ou le 31 mars 2023 :
Aux termes de l'article 564 du code de procédure civile, 'à peine d'irrecevabilité relevée d'office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d'un fait'. L'article 565 du même code précise quant à lui que 'les prétentions ne sont pas nouvelles dès lors qu'elles tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge, même si leur fondement juridique est différent'. Enfin, l'article 566 permet enfin aux parties d'ajouter aux prétentions soumises au premier juge 'les demandes qui en sont l'accessoire, la conséquence ou le complément nécessaire'.
La cour d'appel est tenue d'examiner, au regard de chacune des exceptions prévues aux textes susvisés, au besoin d'office, si la demande nouvelle est recevable (cour de cassation Civ 2ème, 17 septembre 2020, n°19-17.449). Les exceptions au principe de l'irrecevabilité des demandes nouvelles en appel doivent être interprétées de façon restrictive dès lors qu'elles atteignent le principe du double degré de juridiction. Le mot 'fin' au sens de l'article 565 précité s'entend comme étant le but poursuivi ou le résultat recherché par l'auteur de cette demande ou de cette prétention, le but étant différent de l'objet de la demande même tous deux sont liés. La cour d'appel doit notamment rechercher, selon le critère de l'article 70 du code de procédure civile, si la demande dont il est soutenu qu'elle est nouvelle, lorsqu'elle émane du défendeur en première instance, se rattache aux prétentions originaires par un lien suffisant (2e Civ., 29 mai 1979, pourvoi n 76-12.543, 3e Civ., 9 février 2017, n 15-26.822) que les juges apprécient souverainement (3e Civ., 27 janvier 2015, pourvoi n 13-24.869).
La jurisprudence a pu estimer que constitue un complément de la demande originaire, recevable en cause d'appel, la demande additionnelle en payement de charges échues postérieurement au jugement et se rapportant à des appels de fonds qui concernent des travaux d'entretien.(3e Civ., 15 octobre 1975, pourvoi n° 74-11.941) alors que la juridiction de première instance avait été saisie par un syndicat de copropriété en demande de condamnation en payement de charges de copropriété.
En l'espèce, un arrêt avant dire droit a circonscrit le litige en sollicitant de l'expert d'examiner les comptes entre les parties arrêtés au 31 mars 2018. La demande de la bailleresse tendant au paiement des charges dues entre le 1er avril 2018 et le 31 mars 2023 ou le 31 mars 2021 (erreur manifestement de date dans le dispositif des écritures par rapport au tableau de calcul) doit cependant s'analyser comme une demande qui se rattache à ses prétentions d'origine par un lien suffisant : la bailleresse demande le remboursement du solde des charges incombant à la société [Localité 10] Bowling en application du bail commercial qui les lie. D'ailleurs, les parties avaient sollicité du juge de première instance qu'il statue sur la listispendance des demandes liées aux charges sur la période considérée, magistrat qui a considéré qu'il avait litispendance.Au demeurant, les parties ont multiplié les procédures d'une façon telle que leurs actions en perdent leur cohérence.
II - Sur l'exception de nullité du bail commercial
La société [Localité 10] Bowling soutient que le bail commercial notarié conclu le 9 août 2006 entre les parties est nul dès lors qu'il a été conclu par la société [Localité 10] Bowling en cours d'immatriculation représentée par ses deux cogérants, alors qu'elle n'a disposé de la personnalité morale qu'à compter du 5 septembre 2006, date de son immatriculation au RCS. Selon elle, il s'agit d'une nullité absolue qui ne peut être couverte par des actes d'exécution et l'exception de nullité qu'elle soulève en défense à une demande en paiement de charges est pépétuelle. Enfin, elle se fonde sur ses statuts définitifs qui ne contiennent aucune clause de reprise des contrats par elle avant son immatriculation.
La société CLG soutient que l'action en nullité du contrat de bail est prescrite et qu'en tout état de cause, l'exception de nullité ne peut être invoquée dès lors que le contrat a reçu exécution et a servi de fondements à plusieurs actions juridiques de la société [Localité 10] Bowling. Par ailleurs, elle estime que le contrat est en tout état de cause valable car les cogérants ont expressément indiqué qu'ils agissaient pour le compte de la société en formation, laquelle a ensuite exécuté le contrat.
Sur ce,
Il est certain que la société [Localité 10] Bowling soulève la nullité du contrat de bail commercial pour la première fois dans ses écritures d'appel en date du 28 décembre 2020, alors qu'elle avait elle-même initié des procédures judiciaires à l'encontre de sa bailleresse en exécution des obligations énoncées dans ce contrat (voir notamment arrêt du 13 septembre 2011, jugement du 7 octobre 2021 sur assignation du 31 juillet 2019). Il est certain aussi que la société [Localité 10] Bowling a exécuté le contrat litigieux pendant 14 ans avant de prétendre à sa nullité, occupant les lieux et réglant les loyers.
Aux termes de l'article 1185 du code civil, 'l'exception de nullité ne se prescrit pas si elle se rapporte à un contrat qui n'a reçu aucune exécution'. En l'espèce, tel n'est pas le cas, car comme indiqué ci-dessus le contrat s'est exécuté pendant 14 ans avant que ne soit excipée la nullité du contrat de bail, de sorte que cette exception s'est prescrite puisque le délai de prescription de son action, prévue par l'article 1304 ancien du code civil était de 5 ans (article 1304 du code civil : 'Dans tous les cas où l'action en nullité ou en reScision d'une convention n'est pas limitée à un moindre temps par une loi particulière, cette action dure cinq ans.').
En conséquence, l'exception de nullité, à la supposer fondée, ce qui n'est au demeurant pas le cas en l'espèce, est prescrite.
En effet, la nullité du contrat n'est pas fondée. La jurisprudence selon laquelle seuls pouvaient être repris par une société après son immatriculation les actes accomplis au nom ou pour le compte, voire au nom et pour le compte d'une société en formation et que toute autre formule, telle que celle indiquant que l'acte était conclu par la société en cours d'immatriculation, représenté par tel ou tel de ses associé ou dirigeant, ce qui interdisait toute possibilité de reprise, laquelle ne pouvait être opérée que selon l'une des trois modalité prévues par l'article R 210-6 du code de commerce, a été assouplie. Désormais, la nullité ne sera plus encourue s'il est possible d'établir que l'acte a été conclu pour le nom ou pour le compte de la société en formation et que cette société puisse ensuite, après avoir acquis la personnalité juridique décider de reprendre les engagements souscrits. Le juge a donc le pouvoir d'apprécier souverainement, par un examen de l'ensemble des circonstances, tant intrinsèques à l'acte qu'extrinsèques, si la commune intention des parties n'était pas que l'acte fût conclu au nom ou pour le compte de la société en formation et que cette société puisse ensuite, après avoir acquis la personnalité juridique, décider de reprendre les engagements souscrits (voir notamment Com. 29 nov. 2023, FS-B+R, n° 22-12.865). Or en l'espèce, l'acte notarié de bail fait référence à la situation de la société qui est 'en cours d'immatriculation' et à ses statuts, plus particulièrement leur article 30 qui donne pourvoir aux gérants de signer l'acte. Par ailleurs, le siège social de la société [Localité 10] Bowling est située dans les locaux loués. Certes, il est indiqué que les statuts sont en date du 25 juillet 2006 et il est exact que ces statuts n'ont pas été signés par la gérante de la société E.A.C mais ils sont identiques, pour la partie produite, à ceux signés le 25 août 2006 et déposés au greffe du tribunal de commerce le 5 septembre 2006, lesquels, contrairement à ce que soutient la société [Localité 10] Bowling, prévoient dans leur article 30 également l'autorisation donnée au gérant de signer le bail commercial consenti par la société CLG avec la mention suivante : ' ces actes et engagements seront réputés avoir été faits et souscrits dès l'origine par la société, après vérification par l'assemblée des associés, postérieurement à l'immatriculation de la société au registre du commerce et des sociétés de leur conformité avec le mandat ci dessus défini et au plus par l'approbation des comptes du premier exercice social', cette mention permettant la reprise du contrat de bail par la société, conformément à l'article R210-6 al 3 du code de commerce qui prévoit :'En outre, les actionnaires peuvent, dans les statuts, ou par acte séparé, donner mandat à l'un ou plusieurs d'entre eux de prendre des engagements pour le compte de la société. Sous réserve qu'ils soient déterminés et que leurs modalités soient précisées par le mandat, l'immatriculation de la société au registre du commerce et des sociétés emporte reprise de ces engagements par la société.'. Il résulte donc de l'ensemble de ces éléments que la commune intention des parties était que l'acte fût conclu au nom ou pour le compte de la société en formation, de sorte que la nullité de cet acte n'était pas encourue.
III - Sur les charges sur la période entre le 1er avril 2007 au 31 mars 2008
Dans son arrêt en date du 5 juin 2018, la cour a dit que les charges incombant à la société [Localité 10] s'élevait à la somme de 49 365,56 euros TTC, au vu des pièces produites et du rapport d'expertise de M. [J] [C], étant précisé que la somme de 49 365.56 euros se décompose comme suit : 39 974,37 euros au titre des charges et 9 391,19 euros au titre de la quote part de la taxe foncière et d'ordures ménagères, l'arrêt du 5 juin contenant une erreur matérielle puisqu'il est écrit que la somme de 49 365,56 euros est 'hors taxe foncière et ordures ménagères'.
Par ailleurs, la cour a aussi estimé que la facture de raccordement des eaux usées réglée par la société [Localité 10] Bowling devait être prise en charge par la société CLG. Cette facture représentait un montant de 13 620,32 euros TTC.
Alors que la société [Localité 10] Bowling a versé la somme de 58 644,48 euros au titre des provisions sur charge (hors taxes foncière et ordures ménagères), elle n'aurait dû verser que la somme de 39 974,37 euros, outre 9 391,19 euros pour les taxes. En conséquence, la société CLG lui doit au titre de cet exercice en trop perçu et remboursement, la somme de 22 899,22 euros ttc se décomposant comme suit : 9 278,90 euros trop perçu et 13 620,32 euros remboursement de facture.
IV - Sur les charges sur la période entre le 1er avril 2008 et le 31 mars 2018
La société CLG se fonde sur le rapport d'expertise de M. [L] [C] mais y apporte deux corrections : l'une concerne la régularisation de factures considérées comme manquantes par l'expert, la seconde concerne la répartition des charges en fonction des horaires d'ouverture du bowling exploité par la société [Localité 10] Bowling. Elle considère que la somme due par la société [Localité 10] Bowling au titre des charges à partir du 1er avril 2008 au 31 mars 2018 s'élève à la somme de 388 229,88 euros TTC -
La société [Localité 10] Bowling sollicite que le montant des charges pour la période considérée soit fixée à la somme de 132 997,66 euros sans intérêts. Elle estime qu'il faut prendre la méthode de calcul des charges validé par le BET Fluides ADFet indique que le compte entre les parties doit comprendre le montant de la régularisation relative à l'exercice 2007-2008 et celui de la régularisation relative aux exercices 2008-2009 à 2017-2018.
1 - Sur la répartition des charges en fonction des horaires d'ouverture du bowling
La société CLG soutient que l'amplitude des horaires d'ouverture du bowling étant supérieure à celle des autres magasins, il convient d'en tenir compte pour effectuer la répartition des charges d'électricité, chauffage/climatisation, gaz et nettoyage. C'est ainsi par exemple que pour la période du 1er avril 2007 au 31 août 2022, pour le poste chauffage/climatisation et le poste gaz, sur 57,71 % des charges qui doivent être réparties, 44,86 % doivent être répartis aux millièmes (339,22/1000) et 46.73 % directement à la société [Localité 10] Bowling ; sur le poste électricité, sur les 100 % des charges à répartir, 44,86 % doivent être répartis aux millièmes et 46.73 % directement à la société [Localité 10] Bowling. Pour le ménage, elle propose une charge de 3 077 euros HT directement imputable à la société [Localité 10] Bowling représentant la facture globale moyenne annuelle de ménage divisée par 365 jours et multipliée par 52 jours (bowling seul ouvert le dimanche). En se basant sur le montant des factures retenu par l'expert, pour ces postes, elle a recalculé la répartition de ces factures.
Bien que les tableaux qu'elle présente ne sont pas fondés, comme le soutient la société [Localité 10] Bowling, sur des chiffres invérifiables, la cour ayant pu aisément retracé le contenu des tableaux présentés et la logique de leur construction, la société CLG n'est pourtant pas recevable à soutenir que les charges de gaz, électricité, chauffage/climatisation et ménage doivent être réparties en fonction des horaires d'ouverture. Certes, l'expert [L] [C], dans son rapport, page 11, a pu indiquer 'cependant, il est exact de souligner que l'amplitude des horaires d'ouverture de [Localité 10] Bowling est supérieure à celle des autres magasins du mail. Les magasins du mail ne devraient donc pas avoir à régler la globalité de l'électricité afférente aux communs'. Sur la base de cette remarque, l'expert a proposé un tableau prenant en compte cet élément, 'sous réserve de l'appréciation souveraine du tribunal' et dans ses conclusions, a rappelé 'de même, un tableau particulier de réparation des charges d'éclairage du centre est proposé page 11 afin de répondre au problème soulevé de l'amplitude des horaires d'ouverture de Voglans Bowling qui est supérieure à celle des autres magasins du mail. Ce point reste soumis à l'appréciation souveraine du tribunal'.
Mais si l'expert n'a pas pris connaissance a priori de l'ensemble de l'arrêt de la cour rendu le 5 juin 2018, ce qui l'a conduit à présenter cette observation, il ne peut être de même pour les parties et c'est à juste titre que la société [Localité 10] Bowling rappelle les dispositions de cet arrêt. En effet, la cour, dans son arrêt définitif précité, a confirmé le jugement dont appel, rendu le 12 septembre 2016 par le tribunal de grande instance de Chambéry, ' en ce qu'il a dit que les charges locatives en ce compris les impôts et taxes en leur principe et leur quantum doivent être calculées sur la base du rapport de l'expert judiciaire, M. ([J]) [C]' avec la motivation suivante, après avoir rappelé que le bailleur soutenait 'qu'il convient d'y ajouter (pour la répartition des charges) un paramètre prenant en compte les horaires d'ouverture des magasins :
' (pour mémoire, rappel des clauses du bail sur le règlement de la taxe foncière et sur le règlement des charges).
En effet, la prise en compte des horaires d'ouverture conduit à dispenser de charges tous les locaux qui n'auraient pas été loués au cours des différents exercices puisque fermés et sans horaires d'exploitation et ainsi à reporter ces dernières sur les autres locaux3.
Ainsi, cette question ayant été tranchée par une décision ayant autorité de la chose jugée, il n'y a pas lieu de retenir les tableaux de calcul de la société CLG ni les développements en réponse de la société [Localité 10] Bowling.
2 - Sur la répartition des charges selon la méthode de calcul du Bet fluides ADF
La société [Localité 10] Bowling conteste la répartition des charges de chauffage/climatisation en raison des observations de l'expert [L] [C], page 7 de son rapport, aux termes desquelles il indique que les calculs de proratisation qu'il a effectués sont théoriques, que sa méthode de répartition, identique à celle du précédent expert, demeure relativement abstraite, étant difficile de savoir 'précisément qui chauffe qui'. Elle estime que l'expert aurait dû s'adjoindre un expert technique, comme elle lui avait suggéré dans son dire n°5 en recherchant, pour une plus juste répartition, la liste des diffuseurs, leurs caractéristiques de débit et leurs réglages ou encore dans son dire n°9 en adoptant une méthodologie fondée sur le principe selon lequel le nombre de calories/frigories diffusées dans le local dépend essentiellement du nombre et du débit des diffuseurs installés et non de la surface et elle a fait procéder à une étude par le Bet Agence des Fluides qui a établi un compte rendu le 19 décembre 2019.
Cependant, l'expert a pu indiquer que si le raisonnement de la société [Localité 10] Bowling était intéressant, il ne le retenait pas compte tenu de la configuration du centre commercial, puisque tous les magasins étaient ouverts sur la galerie, de sorte que l'ensemble des systèmes de chauffage se trouvant dans les parties privatives profitaient aux parties communes et inversement. La société [Localité 10] Bowling n'apporte pas de réelles contestations sur cette situation à l'exception de la mention d'une réserve (magasin Belhome) qui serait selon elle étanche et qui dispose d'un diffuseur. Par ailleurs, la méthode qu'elle propose part du postulat que chacun des magasins soit équipé des mêmes types de diffuseurs et elle imposerait un recalcul dès qu'un diffuseur défectueux serait remplacé par un diffuseur plus moderne, outre le fait que sa complexité serait de nature à engendrer des contestations. Enfin, concernant 'le rapport ' de la société ADF, il s'agit en réalité d'un courrier rédigé après visite non contradictoire des lieux, sans qu'il soit précisé si tous les lieux y compris privatifs ont été visités et quels ont été les documents dont le responsable du bet a disposé. Ce dernier a conclu, sans motivation étayée, mais en procédant par affirmation, que la répartition à la surface n'était manifestement pas adaptée à la configuration du site, que la méthodologie présentée par la société [Localité 10] Bowling était plus proche d'une répartition juste et équitable, tout en indiquant qu'il serait peut être nécessaire d'effectuer un relevé complet des différents piquages pour connaître précisément le débit global du rooftop des parties communes et les débits servant à chauffer chaque entité commerciale. En tout état de cause, le fait que ce bet préconise encore l'ajout d'un autre facteur complique la méthodologie proposée par la société [Localité 10] Bowling et à supposer cette méthodologie adaptée, ce qui n'est pas démontré, manifestement la fragilise. En conséquence de ces éléments, la méthode proposée par l'expert qui a consisté à établir un prorata selon les surfaces y compris des réserves pour déterminer la quote part des parties communes dans la surface chauffée est adaptée à la situation et sera retenue pour établir le compte entre les parties, d'autant que l'expert a tenu compte du fait que le magasin Belhome literie bénéficiait du chauffage des parties communes, ainsi qu'une réserve du magasin fly, et le magasin ligne Roset (pages10 et 11 du rapport) modifiant les comptes initiaux (voir réponse au dire page 75 du rapport).
3 - Sur la réintégration des factures manquantes
Cinq dépenses alléguées par la société CLG ont été écartées par l'expert [L] [C] en raison de la non production des factures correspondantes.
La société CLG les produit aux débats devant la cour :
- exercice 2011/2012 : facture Lamurbianco pour une livraison de fuel d'un montant de 164,57 euros HT. Il convient dès lors d'ajouter cette facture au montant des charges retenues par l'expert pour cet exercice de sorte que le montant définitif sera de 130 950.42 euros HT (130 785,85 euros + 164,57 euros) ;
- exercice 2013-2014 : facture Sicli n°023258736 du 5 septembre 2013 d'un montant de 704,84 euros HT, facture relative à la vérification des trappes de désenfumage (pièce 549). Cependant, il y aura lieu, comme l'expert l'a fait pour les autres factures de même type (exemple page 228 du rapport), de défalquer le coût de la vérification de deux trappes de désenfumage (exécutoires de fumées) dès lors que le mail n'en compte que 7 et non 9 soit une somme de 136.64 euros HT
Il convient dès lors d'ajouter cette facture corrigée au montant des charges retenues par l'expert pour cet exercice de sorte que le montant définitif sera de 64 561,49 euros HT (63 993,29 euros + 568.20 euros)
- exercice 2014-2015 : facture sicli n°024378560 du ''8" décembre 2014 d'un montant de 83,88 euros HT soit 100,66 euros TTC pièce 547 relative à la vérification d'extincteurs. L'examen du tableau établi par l'expert, page 34 de son rapport, permet de voir que cette facture a déjà été prise en compte au 28 décembre. Surtout, la facture pièce 547 est la même que la facture pièce 514 comptabilisé par l'expert au 28 décembre (le chiffre 1 de la date '18" étant mal imprimé), avec les mêmes références. La société CLG prétend que la facture pièce 547 a été retrouvée après les opérations d'expertise et elle la date du 8 décembre ce qui n'est pas possible, l'intervention de vérification ayant eu lieu le 14 décembre 2014. En conséquence, la pièce 547 est un double de la pièce 514 qui a déjà été prise en compte par l'expert. Le montant des charges pour l'exercice 2014-2015 ne sera donc pas modifié.
- exercice 2016-2017 : la société CLG sollicite que soient prises en compte deux factures non produites devant l'expert, la facture Investirenova d'un montant de 15 166,62 euros HT (pièce 550) et la facture Investirenova d'un montant de 6 500 euros HT (pièce 551). Ces factures correspondent aux prestations d'entretien du 1er avril 2016 au 31 octobre 2016 (nettoyage des parties communes selon contrat) et la maintenance hebdomadaire des sprinklers du 1er avril 2016 au 31 mars 2017. Il y a lieu de constater que :
- sur les autres exercices, de façon régulière, les factures d'entretien ont été retenues par l'expert sous réserve pour les deux premiers exercices examinés de l'existence de factures d'un autre prestataire Andréoni.;
- il n'existe pas de factures Andréoni sur l'exercice 2016-2017 et l'expert n'a pris en compte aucune facture Invesrirenova relative à l'entretien puisqu'aucune facture ne lui a été produite ;
- les montants des factures versées aux débats devant la cour sont dans les mêmes proportions que la tarification mensuelle, entretien des sprinklers compris, de l'exercice précédent et même un peu inférieur (2 707 euros au lieu de 2 916 euros). En l'absence de contestation de la société [Localité 10] Bowling à l'exception du fait que cette société Investirenova aurait les mêmes dirigeants que la société CLG, ces factures seront prises en compte.
Il convient dès lors d'ajouter ces factures au montant des charges retenues par l'expert pour cet exercice de sorte que le montant définitif sera de 143 264,74 euros HT (121 598,12 euros + 21 666.62 euros), montant en adéquation avec le montant de l'exercice suivant retenu par l'expert.
4 - Sur le compte entre les parties du 1 avril 2008 au 31 mars 2018
' sur le montant des charges
Tableau établi sur la base du tableau de l'expert page 56 du rapport, la cour considérant au vu des éléments déjà exposés que le calcul des millièmes effectué par l'expert doit être retenu.
exercice
période exercice
montant ht
quote part
montant charges dues HT
2008/2009
96635,6
339.22/1000
32780,95
2009/2010
103920,82
339.22/1000
35252,26
2010/2011
123895,22
339.22/1000
42028,02
2011/2012
130950,42
339.22/1000
44421
2012/2013
121134,91
339.22/1000
41091,66
2013/2014
1/4/2013 - 31/12/2013
64561,49
339.22/1000
21900,54
2013/2014
1/1/2014 - 31/03/2014
59454,34
339.22/1000
20168,24
2014/2015
1/4/2014 - 31/08/2014
34286,7
339.22/1000
11630,81
2014/2015
1/9/2014 - 27/03/2015
82366,3
337.59/1000
27806,36
2015/2016
133211,24
330.79/1000
44065,21
2016/2017
143264,74
330.79/1000
47390,54
2017/2018
144 744.07
330.79/1000
47880,18
total
416 415,77
' sur la différence entre les sommes versées par la société [Localité 10] Bowling et les sommes dues
nb : tableau établi à partir du tableau de l'expert page 57 à l'exception de la colonne sur le montant total de la taxe foncière non contesté.
exercice
charges dues HT
loyers appelés
taxe foncière
dû HT
total dû ht
tva %
total dû ttc
sommes versées VB
sommes dues
par VB
2008/2009
32780,95
219754
14 074.67
266609,62
19.6
318865,11
340633,94
- 21768,83
2009/2010
35252,26
232199,51
14544,5
281996,26
19.6
337267,53
307708,71
29558,82
2010/2011
42028,02
225466,32
16559,89
284154,23
19.6
339848,45
329457,52
10390,93
2011/2012
44421
230289,72
17177,2
291887,92
19.6
349097,95
312666,62
36431,33
2012/2013
41091,66
241591,74
18093,44
300776,84
19.6
359729,1
348743,71
10985,39
2013/2014
21900,54
187515,75
18741,01
228157,3
19.6
272876,13
357921,08
- 85044,95
2013/2014
20168,24
61501,87
81670,11
20
98004,13
98004,13
2014/2015
11630,81
245115,44
18909,61
275655,86
20
330787,03
354138,53
- 23351,5
2014/2015
27806,36
18987,3
46793,66
20
56152,39
56152,39
2015/2016
44065,21
243025,69
18604,73
305695,64
20
366834,77
351367,94
15466,83
2016/2017
47390,54
242493,9
18949,75
308834,19
20
370601,02
325502,35
45098,67
2017/2018
47880,18
244871,19
18859,44
311610,82
20
373932,98
343376,19
30556,79
total
416415,77
730390,78
94310,83
2976427,48
3565099,64
3371516,59
202480
En conséquence sur la période entre le 1er avril 2008 et le 31 mars 2018, la société [Localité 10] Bowling reste devoir au titre des charges et taxes foncières la somme de 202 480 euros à la société CLG.
' sur les pénalités de retard
La société CLG sollicite pour les exercices 2008-2018 une pénalité de retard de 9 520,99 euros HT dont le détail figure dans sa pièce 552 (lettre recommandée avec accusé de réception en date du 27 octobre 2008).soit :
- facture du 1-4-2008 : 66 339 euros ht loyer et charges : clause pénale de 6 633,90 euros et intérêts de retard 1 % soit 66.33 euros ; (pièce 15)
- facture du 1 juillet 2008 de 12 500 euros HT charges : clause pénale de 1 250 et intérêts de retard de 1 % soit 50 euros ; (pièce 16)
- facture du 16 septembre 2008 de 18 008,17 euros taxe foncière : clause pénale de 1 505,70 euros et intérêts de retard de 1 % soit 15.06 euros. (Pièce 17)
Le bail prévoit dans son article 15 que le loyer est payable par trimestre d'avance le 1er jour du trimestre. Il en est de même de la provision pour charges (article 16). Par ailleurs, l'article 17 stipule que le défaut ou le retard de paiement au 15 du premier mois du trimestre d'un seul terme de loyer ou des charges incombant au preneur, entraînera de plein droit à titre de clause pénale une majoration de 10 % des sommes dues, qui porteront intérêt dans les mêmes conditions au tuax de 1 % par mois de retard. En outre, l'article 20 C) rappelle qu'en cas de défaut de paiement du loyer, des accessoires et des sommes exigibles à chaque terme, ces sommes seront de plein droit, sans aucune formalité ou mise en demeure, majorées à titre de clause pénale non réductible de 10 % de leur montant, outre intérêts sur ces sommes et sur la clause pénale à hauteur de 1 % par mois de retard.
L'article du code civil applicable en 2008 et relatif à la clause pénale était l'article 1152 qui prévoyait : 'Lorsque la convention porte que celui qui manquera de l'exécuter payera une certaine somme à titre de dommages-intérêts, il ne peut être alloué à l'autre partie une somme plus forte, ni moindre.
Néanmoins, le juge peut, même d'office, modérer ou augmenter la peine qui avait été convenue, si elle est manifestement excessive ou dérisoire. Toute stipulation contraire sera réputée non écrite'. Ainsi, le caractère non réductible de la clause pénale, visé dans le bail, doit être réputé non écrit.
S'agissant du retard du paiement des charges à hauteur de 12 500 euros HT dans chacune des premières factures et du paiement de la taxe foncière de 15 057 euros HT (3 ème facture), le montant de ces charges était contesté et les opérations d'expertise ont démontré que pour l'année 2008, la société [Localité 10] Bowling a versé en trop la somme de 21 768,83 euros, de sorte que la clause pénale, au regard de cette situation, ne peut qu'être considérée comme étant excessive et sera réduite à 0 euro. S'agissant du retard du paiement de loyer qui n'est pas contesté, le montant de la clause pénale de 10 % est excessive par rapport au montant du loyer et sera réduite à 5 %. En conséquence, le montant des pénalités sera fixé à la somme de 2 718,86 euros HT selon le calcul suivant : 2 718,86 euros [53 839 euros HT x 5 % + 1 % (53 839 euros HT x 5 % )]
' sur les comptes entre les parties
En définitive, sur la période entre le 1er avril 2008 et le 31 mars 2018, la société [Localité 10] Bowling reste devoir au titre des charges et taxes foncières et des pénalités de retard la somme de 205 198,86 euros HT (soit 202 480 +2 718.86 ) à la société CLG.
V Sur les charges dues entre le 1er avril 2018 et le 31 mars 2023
' sur le montant du solde de charges sollicité par la société CLG
Pour justifier des charges facturées, la société CLG produit le compte tiers de la société [Localité 10] Bowling (pièce 554) qui n'est que la comptabilisation des factures qu'elle a elle-même émises, et les factures qu'elle a établies à l'adresse de sa preneuse entre 2018 et 2021, en tout 27 pièces soit les pièces 623, 625, 627 à 652 et non comme elle indique les pièces 554 à 652. Elle ne produit en tout état de cause aucun justificatif des dépenses réalisées qui permettrait d'examiner le bien fondé des factures de solde fournies uniquement au demeurant pour deux exercices et par ailleurs bien peu convaincantes, en raison de leur caractère en définitive incertain. En effet, la facture du solde de l'exercice 2018/2019 d'un montant de 10 176 euros HT (pièce 631), est suivie d'un avoir du même montant ( pièce 645) puis enfin suivie d'une autre facture avec un solde 5 409,65 euros (pièce 646). Il en est de même pour la facture du solde de l'exercice 2019/2020 de 9 386,61 euros HT (pièce 637), suivie d'un avoir du même montant (pièce 644) puis suivie d'une facture modificative(pièce 647) avec un solde de 1 682,71 euros et la mention 'solde 2018-2019".
En outre, il est à noter qu'une partie des factures concernant la période post 1er avril 2018 mentionne une quote part de 340,31 millièmes et une partie des factures mentionne la quote part de 330.79 millièmes, sans que la société CLG ne fournisse des explications sur ces incohérences et alors que la dernière quote part calculée par l'expert était de 330.79 millièmes .
Par ailleurs, l'extrait du grand livre comptable de la société CLG concernant l'exercice 2020-2021 et versé par la société [Localité 10] Bowling (pièce 99) est effectivement, comme cette dernière le soutient, incomplet et illisible. Enfin, la société [Localité 10] Bowling avait sollicité la copie des justificatifs pour 2018 à 2020 par courrier de son avocat du 6 octobre 2020, puis du 27 juillet 2023 elle a également sollicité les justificatifs de l'exercice 2020-2021 par courrier du 21 juin 2021 (pièce 84-1 de la société [Localité 10] Bowling) et mais n'a rien obtenu.
Egalement, la société CLG sollicite, dans la motivation de ses conclusions, la somme de 379 947,23 euros plus pénalités du 1er avril 2008 au 31 mars 2023 dont la somme de 144 242,32 euros pour la période entre le 1er avril 2018 et le 31 mars 2023 (voir tableau intitulé compte entre les partie au 31/3/2023) tout en spécifiant que les loyers impayés ne sont pas inclus dans cette somme, qui comprend le solde des charges, de la taxe foncière et les pénalités de retard à hauteur de 6 902,21 euros, mais en indiquant ensuite qu'elle produit tous les justificatifs des charges pour la période du 31 mars 2018 au 31 mars 2021 et en demandant dans son dispositif le paiement de la somme de 379 947,23 euros TTC au titre de l'arriéré des loyers et des charges provisoirement arrêté au 31 mars 2021, de sorte qu'il existe des contradictions dans sa position.
Enfin, la société CLG ne s'explique pas sur le changement de millièmes opposé par la société [Localité 10] Bowling au 1er décembre 2020 avec le changement de destination de la réserve du magasin Guy Degrenne ou encore le montant important des charges sur la période de fermeture de 241 jours dans le cadre de la pandémie de Covid-19.
En conséquence, la Sci CGLl sera déboutée de ses prétentions concernant les charges entre le 1er avril 2018 et le 31 mars 2021 comme mentionné dans le dispositif de ses écritures, la cour n'étant saisie que par le dit dispositif.
' sur la fixation d'une nouvelle quote part pour la société [Localité 10] Bowling
La société [Localité 10] Bowling sollicite la fixation du montant de ses millièmes à :
- 321,78/1000 entre le 27 juin 2019 et le 1er décembre 2020, arguant d'un changement de destination de la surface de bureaux au R+2 ;
- 320.90/1000 à partir du 1er décembre 2020, arguant d'un changement de destination de la réserve du magasin Guy Degrenne en surface commerciale.
La société [Localité 10] Bowling ne rapporte pas la preuve de ses allégations. Aucune pièce justificative démontrant le changement de destination des locaux susvisés n'est produite aux débats.
En conséquence, ses demandes de modification de sa quote part de millièmes pour ces périodes ne peuvent qu'être rejetées.
La quote part retenue à partir de l'exercice 2015-2016 jusqu'au 31 mars 2018 par l'expert soit 330.79 millièmes et retenue par la cour, sera donc celui applicable pour la période postérieure au 1er avril 2018 jusqu'au 31 mars 2024.
' sur le remboursement des provisions sur charges pour les exercices 2018-2019 à 2022-2023
La société [Localité 10] Bowling soutient que la société CLG doit lui rembourser la somme de 247 653,80 euros au titre des provisions qu'elle a versées pendant les exercices susmentionnés, faute pour la société CLG d'avoir justifié des charges.
Le bailleur doit, pour conserver les provisions sur charges qu'il a reçues du preneur, justifier du montant des dépenses et que, faute d'y satisfaire il doit restituer au preneur les sommes versées au titre des provisions. ( ci 3ème 7 avril 2010 pouurvoi 09-11.977, civ17 septembre 2020 pourvoi 19.14-168). Ainsi, la bailleresse doit, pour conserver, en les affectant à sa créance de remboursement, les sommes versées au titre des provisions, justifier le montant des dépense et que faute d'y satisfaire, elle doit restituer à la preneuse les sommes versées au titre des provisions. Comme déjà motivé, la société CLG n'a pas justifié des charges par la production des factures, bien que la société [Localité 10] Bowling les lui aient demandées et n'en justifie toujours pas devant la cour, alors même que la situation pour les exercices précédents avaient donné lieu à deux expertises, lesquelles ont permis de vérifier la réalité des charges alléguées. En outre, si l'article R145-36 du code de commerce n'est pas applicable au bail signé en 2006 et a priori non renouvelé, le contrat de bail liant les parties prévoit, dans son paragraphe 16, le remboursement des charges, (lequel n'est pas forfaitaire puisqu'aucune somme fixe n'est prévue), le paiement ' de la quote part des charges et honoraires de gestion lui incombant définitivement ou par provisions le premier jour de chaque trimestre', mais il prévoit aussi, comme l'a rappelé le juge de première instance que la ventilation des charges 's'effectuera à livre ouvert'. Dans ce bail, les dépenses à la charge du preneur sont inventoriées, il est donc débiteur d'une créance probable mais dont le montant est incertain et seul le bailleut détient les éléments prouvant qu'il a effectué les dépenses au remboursement desquelles le locataire s'est engagé.
La société [Localité 10] Bowling soutient avoir versé 5 provisions de 49 530,76 euros au cours des 5 exercices 2018-2019, 2019-2020, 2020-2021, 2021-2022 et 2022-2023.
En revanche, si la société [Localité 10] Bowling affirme avoir versé la somme de 49 530,76 par exercice sur les charges hors taxe foncière, elle n'en apporte pas la preuve pour chaque exercice. En effet, l'examen des pièces versées aux débats qu'il s'agisse de celles versées par la société [Localité 10] Bowling ou de celles versées par la société CLG, démontre que tous les versements allégués ne sont pas justifiés.
- pour l'exercice 2018-2019, les quatre versements trimestriels de 10 318,91 euros chacun sont prouvés par la pièce 646 de la société CLG : facture de régularisation F01612 du 24 septembre 2020 et en partie par la pièce 54 de la société [Localité 10] Bowling qui est une synthèse établie par la société CLG des sommes facturées et réglées depuis 2007 jusqu'au 5 octobre 2018 ;
- pour l'exercice 2019-2020, les quatre versements trimestriels de 10 318,91 euros chacun sont prouvés par la pièce 647 de la société CLG : facture de régularisation F01613 du 24 septembre 2020 et en partie par le grand livre tiers pièce 554 de la société CLG sur lequel deux paiements de 90 990,61 euros incluant loyers et provisions pour charges sont inscrits pour les trimestres 3T20,4T20.
Il est donc établi que la société [Localité 10] Bowling a versé pour ces deux exercices la somme totale de 82 551.28 euros
Par ailleurs, la société [Localité 10] Bowling, par le biais de son avocat, a sollicité les justificatifs des dépenses de ces exercices, sans que la société CLG ne justifie les lui avoir envoyés : courrier de son avocat en date du 6 octobre 2020 indiquant que la société [Localité 10] Bowling a reçu deux factures de régularisation (sus-visées) pour les exercices 2018-2019 et 2019-2020 mais avec un simple extrait du grand livre analytique de la société CLG sans qu'aucune facture n'ait été produite, de sorte qu'elle les demande.
Au vu de ces éléments, la Sci CLG sera condamnée à rembourser à la société [Localité 10] Bowling la somme de 82 551, 28 euros correspondant aux provisions pour charges hors taxe foncière versées au cours des exercices 2018-2019 et 2019-2020. La société [Localité 10] Bowling sera déboutée de sa demande pour les autres exercices.
La compensation sera ordonnée entre les condamnations prononcées en vertu du contrat de bail.
VI Sur les autres demandes de la société [Localité 10] Bowling
La société [Localité 10] Bowling excipe du comportement inexcusable de sa bailleresse dans le calcul des charges, la différence entre la demande en paiement de la société CLG et les montants retenus par l'expert ne résultant pas, selon elle, uniquement du dévoiement du chauffage.
' sur le coût de l'expertise
La société [Localité 10] Bowling demande la prise en charge par la société CLG des frais d'expertise de M. [L] [C] d'un montant de 13 915,92 euros (pièce 71). Le coût de l'expertise sera inclus dans les dépens de la présente instance.
' le coût des travaux supportés par elle-même pour les opérations d'expertise
La société [Localité 10] Bowling demande à ce titre la somme de 13 915,92 euros. Cependant, cette demande doit être incluse dans la demande d'indemnité procédurale, puisqu'il s'agit de frais irrépétibles.
' sur le préjudice moral,
La société [Localité 10] Bowling sollicite à ce titre la somme de 30 000 euros considérant que la société CLG s'est montrée malhonnête dans ses prétentions relatives aux charges.
Il est certain que les sommes sollicitées par la société CLG au titre des charges et de la taxe foncière ne correspondaient pas à la réalité de la situation, en raison, comme cela résulte du rapport d'expertise, du dévoiement du chauffage et de nombreux autres éléments tels que le ratio erroné appliqué sur la taxe foncière, les changements de destination de certains locaux non déclarés, des surfaces non déclarées, le nombre de RIA et d'exécutoires dans les parties communes incorrects, le nombre des roofs tops (1 au lieu de 3), la double facturation Investirenova et Andréoni, la surfacturaction de la société Investirenova pour la mise en peinture de poteaux, des factures en doublon ou manquantes, des travaux de remise en état suite à un sinistre pris en charge par l'assurance, des factures liées à des gros travaux. La nécessité pour la société [Localité 10] Bowling d'être dans l'obligation de contester sur de nombreux exercices les charges facturées, d'assigner sa bailleresse en justice pour obtenir le justificatif des charges, étant au surplus précisé que la société CLG a même fourni des factures devant la cour, ne les ayant pas retrouvéES au stade des opérations d'expertise, a incontestablement créé pour cette dernière un préjudice moral qui sera justement évalué à la somme de 5 000 euros.
VII Sur les mesures accessoires
Succombant à titre principal,, la société CLG sera condamnée aux dépens de l'instance d'appel qui comprendront les frais d'expertise de M. [L] [C] d'un montant de 13 915,92 euros. Ces dépens seront distraits au profit de Me Clarisse Dormeval sur son affirmation de droits.
Par ailleurs, l'équité commande de faire droit à la demande de la société [Localité 10] Bowling concernant ses frais irrépétibles qui compte tenu de la durée de la procédure et des opérations d'expertise sera fixée à la somme de 15 000 euros. La demande de la société CLG au titre de cette même indemnité procédurale sera rejetée.
PAR CES MOTIFS,
La cour, statuant publiquement, contradictoirement et après en avoir délibéré conformément à la loi,
Vu l'arrêt en date du 5 juin 2018,
Déboute la société [Localité 10] Bowling de sa fin de non recevoir liée au caractère nouveau de la demande de la société CLG concernant le paiement des charges pour la période entre le 1er avril 2018 et le 31 mars 2021,
Déclare prescrite l'exception de nullité du bail commercial soulevée par la société [Localité 10] Bowling,
Condamne la société CLG à payer à la société [Localité 10] Bowling :
- la somme de 22 899,22 euros représentant le trop perçu pour charges sur l'exercice 2007-2008 (hors taxe foncière) et en remboursement de la facture de raccordement des eaux usées ;
- la somme de 82 551,28 euros au titre du remboursement des provisions sur charges versées sur les exercices 2018-2019 et 2019-2020,
Condamne la société [Localité 10] Bowling à payer à la société CLG :
- la somme de 202 480 euros HT correspond au solde dû sur les charges et taxe foncière au titre des exercices du 1er avril 2008 au 31 mars 2018,
- la somme de 2 718,86 au titre des pénalités de retard sur les exercices du 1er avril 2008 au 31 mars 2018,
Ordonne la compensation entre les condamnations liées au contrat de bail,
Condamne la société CLG à payer à la société [Localité 10] Bowling la somme de 5 000 euros au titre de son préjudice moral,
Déboute la société CLG de sa demande en paiement du solde des charges au titre des exercices 2018-2019, 2019-2020, 2020-2021,
Fixe pour les exercices postérieurs au 31 mars 2018 jusqu'au 31-03-2024, la quote-part de la société [Localité 10] Bowling dans les charges du centre commercial à 330,79 millièmes,
Déboute la société [Localité 10] Bowling de ses demandes tendant à :
- voir fixer, pour les exercices postérieurs au 31 mars 2018, la date de prise d'effet du changement de destination de la surface de bureaux au R+2 et du nouveau ratio de 321,78/1000 au 27 juin 2019 ;
- voir fixer, pour les exercices postérieurs au 31 mars 2018, la date de prise d'effet du changement de destination de la réserve Guy Degrenne en surface commerciale et du nouveau ratio de 320,90/1000 au 1er décembre 2020 ;
- voir condamner la Sci CLG à lui rembourser les provisions sur charges qu'elle soutient avoir versées sur les exercices 2020-2021, 2021-2022 et 2022-2023,
Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires,
Condamne la Sci CLG aux dépens de l'instance d'appel, qui comprendront les frais d'expertise de M. [L] [C] d'un montant de 13 915,92 euros, dépens distraits au profit de Me Clarisse Dormeval sur son affirmation de droits
Déboute la Sci CLG de sa demande d'indemnité procédurale,
Condamne la Sci CLG à payer à la société [Localité 10] Bowling une indemnité procédurale en cause d'appel à hauteur de 15 000 euros.
Arrêt Contradictoire rendu publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,
et signé par Hélène PIRAT, Présidente et Sylvie LAVAL, Greffier.
Le Greffier, La Présidente,
Copie délivrée le 01 octobre 2024
à
la SCP PEREZ ET CHAT
Me Clarisse DORMEVAL
Copie exécutoire délivrée le 01 octobre 2024
à
Me Clarisse DORMEVAL