Décisions
CA Riom, 1re ch., 1 octobre 2024, n° 22/01965
RIOM
Arrêt
Autre
COUR D'APPEL
DE RIOM
PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE
Du 01 octobre 2024
N° RG 22/01965 - N° Portalis DBVU-V-B7G-F4RQ
- DA- Arrêt n° 400
[K] [S] / [B], [J] [O]
Ordonnance Référé, origine Juge des contentieux de la protection de CLERMONT-FERRAND, décision attaquée en date du 08 Septembre 2022, enregistrée sous le n° 22/00034
Arrêt rendu le MARDI UN OCTOBRE DEUX MILLE VINGT QUATRE
COMPOSITION DE LA COUR lors du délibéré :
M. Philippe VALLEIX, Président
M. Daniel ACQUARONE, Conseiller
Mme Laurence BEDOS, Conseiller
En présence de :
Mme Marlène BERTHET, greffier lors de l'appel des causes et du prononcé
ENTRE :
Mme [K] [S]
[Adresse 1]
[Localité 4]
Représentée par Me Virginie DESSERT de la SCP VILLATTE-DESSERT, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2022/008479 du 28/10/2022 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de CLERMONT-FERRAND)
APPELANTE
ET :
M. [B], [J] [O]
[Adresse 3]
[Localité 2]
Représenté par Me Nathalie DOS ANJOS, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND
Timbre fiscal acquitté
INTIME
DÉBATS :
L'affaire a été débattue à l'audience publique du 27 juin 2024, en application des dispositions de l'article 786 du code de procédure civile, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant M. VALLEIX, rapporteur.
ARRÊT : CONTRADICTOIRE
Prononcé publiquement le 01 octobre 2024 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par M. VALLEIX, président et par Mme BERTHET, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
I. Procédure
Par acte sous-seing-privé du 14 octobre 2019 M. [B] [O] a donné à bail à Mme [K] [S] et à M. [Z] [N] un logement à [Localité 4], moyennant le paiement d'un loyer mensuel de 580 EUR, provision sur charges comprise.
À la suite du départ de M. [N], attesté par M. [O] le 31 décembre 2019, Mme [S] est devenue seule titulaire du bail, suivant avenant du 1er janvier 2020, dans les mêmes conditions que précédemment.
Le 24 janvier 2022 M. [O] a fait signifier à Mme [S] un commandement de payer visant la clause résolutoire insérée au bail, pour la somme principale de 3324,96 EUR.
La commission de coordination des actions de prévention des expulsions locatives a été informée de la situation de Mme [S] le 25 janvier 2022.
Par exploit du 3 mai 2022, M. [O] a fait assigner Mme [S] devant le juge des contentieux de la protection au tribunal judiciaire de Clermont-Ferrand, statuant en référé, afin de voir constater le jeu de la clause résolutoire, ordonner l'expulsion de Mme [S], et la condamner à lui payer diverses sommes provisionnelles.
Mme [S], assignée à l'étude de l'huissier, ne comparaissaient pas.
À l'issue des débats, par ordonnance du 8 septembre 2022, le juge des référés a statué comme suit :
« Nous, Juge des contentieux de la protection,
Statuant publiquement par ordonnance de référé réputée contradictoire en premier ressort, rendue par mise à disposition au greffe,
CONSTATONS la résiliation à compter du 24 mars 2022 du bail conclu le 14 octobre 2019 entre M. [B] [O] et Mme [K] [S],
ORDONNONS, faute de départ volontaire incluant la remise des clefs, l'expulsion de Mme [K] [S] ainsi que tout occupant de son chef, du local sis [Adresse 1], à [Localité 4], assorti d'un garage nº 6 et d'une cave nº 8, si besoin est avec l'assistance de la force publique et d'un serrurier, dans les formes et délais prévus par les articles L. 431-1 et suivants et R. 411-1 et suivants du code des procédures civiles d'exécution, et conformément à l'article L. 433-1 du même code, à procéder à l'enlèvement de tous tes biens mobiliers garnissant les lieux loués et à les faire entreposer dans tel local de son choix aux frais et périls des parties expulsées,
CONDAMNONS Mme [K] [S] à payer à M. [B] [O] les sommes provisionnelles suivantes ;
- 4.101,33 € à valoir sur l'arriéré locatif arrêté au 24 mars 2022, comprenant les loyers, charges et indemnités d'occupation jusqu'à la date de la résiliation fixée au 24 mars 2022 incluse, outre intérêts au taux légal à compter du présent jugement,
- 283,50 € au titre des dégradations locatives commises sur la serrure de la porte d'entrée de l'appartement,
FIXONS l'indemnité d'occupation sans droit ni titre due par Mme [K] [S] à Sa somme mensuelle de 585,61 €, à compter de la résiliation du bail et au besoin la CONDAMNONS à verser à M. [B] [O] à titre provisionnel ladite indemnité mensuelle à compter du 25 mars 2022 et jusqu'à complète libération des lieux, sous déduction des versements intervenus depuis,
CONDAMNONS Mme [K] [S] à payer à M. [B] [O] la somme de 400,00 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens comprenant le coût de l'assignation, du commandement de payer du 24 janvier 2022 et celui de la notification de l'assignation au représentant de l'état dans le département,
RAPPELONS que la présente ordonnance est assortie de plein droit de l'exécution provisoire,
DÉBOUTONS M, [B] [O] du surplus de ses demandes. »
Dans des motifs de sa décision le juge des référés a considéré que la résiliation du bail de plein droit était encourue en raison des manquements de Mme [S] dans le règlement du loyer, et du commandement de payer infructueux régulièrement signifié le 24 janvier 2022. Il a retenu par ailleurs le critère de l'urgence en raison de troubles de voisinage commis par Mme [S], dont justifiait M. [O] au moyen de pièces produites.
***
Mme [K] [S] a fait appel de cette décision le 5 octobre 2022, précisant:
« Objet/Portée de l'appel : L'appel tend à obtenir la nullité, ou à tout le moins la réformation de la décision susvisée en ce qu'elle a : - constaté la résiliation à compter du 24 mars 2022 du bail conclu le 14 octobre 2019 entre M. [B] [O] et Mme [K] [S] ; - ordonné faute de départ volontaire incluant la remise des clés, l'expulsion de Mme [K] [S] ainsi que de tout occupant de son chef, du local sis [Adresse 1], à [Localité 4], assorti d'un garage nº 6 et d'une cave nº 8 si besoin est avec l'assistance de la force publique et d'un serrurier, dans les formes et délais prévus par les articles L. 431-1 et suivants et R. 411-1 et suivants du Code des procédures civiles d'exécution, et conformément à l'article L. 433-1 du même Code, à procéder à l'enlèvement de tous les biens mobiliers garnissant les lieux loués et à les faire entreposer dans tel local de son choix aux frais et périls des parties expulsées ; - condamné Madame [K] [S] à payer à M. [B] [O] les sommes provisionnelles suivantes: 4.101,33 € à valoir sur l'arriéré locatif arrêté au 24 mars 2022 comprenant les loyers, charges et indemnités d'occupation jusqu'à la date de la résiliation fixée au 24 mars 2022 incluse, outre intérêts au taux légal à compter du présent jugement; 283,50 € au titre des dégradations locatives commises sur la serrure de la porte d'entrée de l'appartement ; - fixé l'indemnité d'occupation sans droit ni titre due par Mme [K] [S] à la somme mensuelle de 585,61 € à compter de la résiliation du bail et au besoin la condamne à verser à M. [B] [O] à titre provisionnelle ladite indemnité mensuelle à compter du 25 mars 2022 et jusqu'à complète libération des lieux sous déduction des versements intervenus depuis ; - condamné Mme [K] [S] à payer à M. [B] [O] la somme de 400 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux dépens comprenant le coût de l'assignation, du commandement de payer du 24 janvier 2022 et celui de la notification de l'assignation au représentant de l'état dans le département; - rappelé que la présente ordonnance est assortie de plein droit de l'exécution provisoire. »
Dans ses conclusions ensuite les plus récentes du 13 décembre 2022, Mme [K] [S] demande à la cour de :
« VU l'article 24 V de la loi nº 89-462 du 6 juillet 1989
Il est demandé à la Cour de :
DÉCLARER recevable et bien fondé l'appel interjeté par Mme [S].
INFIRMER le jugement en ce qu'il a :
- Constater le jeu de la clause résolutoire prévue au bail d'habitation conclue entre eux faute pour le locataire de s 'être acquittée des causes du commandement dans le délai de deux mois,
- Ordonner son expulsion et celle de tout occupant de son chef si besoin est, avec le concours de la force publique,
- Condamner Mme [K] [S] à lui payer à titre provisionnel les sommes suivantes :
' 4.101,33 € à valoir sur l 'arriéré locatif arrêté au 24 mars 2022,
' 585,61 € à titre d'indemnité mensuelle d'occupation à compter de la résiliation du bail jusqu'à sa libération effective des lieux,
' 283,50 € au titre des frais de serrurier,
' 800 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance.
Statuant à nouveau,
ACCORDER à Mme [S] un délai de 36 mois pour s'acquitter du solde de la dette, soit 2.944,29 €.
SUSPENDRE la réalisation et les effets des clauses de résiliation.
DIRE ET JUGER que la clause résolutoire sera réputée ne pas avoir joué en cas de paiement par Mme [S] dans le délai de 36 mois. »
***
M. [B] [O] a pris des conclusions nº 2 le 20 juillet 2023, afin de demander à la cour de :
« Vu les articles 834 et 835 du code de procédure civile,
Vu la loi nº 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi nº 86-1290 du 23 décembre 1986
Vu l'absence de contestation sérieuse et l'existence d'un trouble manifestement illicite qu'il convient de faire cesser,
Vu l'article 559 du Code civil,
Vu la Jurisprudence,
Débouter Madame [S] de l'intégralité de ses demandes, dont notamment sa demande de réduction de la dette locative, de délais de paiement et de suspension des effets de la clause résolutoire
Confirmer l'ordonnance du 8 septembre 2022 en ce qu'elle a constaté la résiliation à compter du 24 mars 2022 du bail conclu le 14 octobre 2019 entre Monsieur [B] [O] et Madame [K] [S].
Confirmer l'ordonnance du 8 septembre 2022 en ce qu'elle a ordonné l'expulsion de Madame [S] ainsi que de toutes personnes introduites par cette dernière dans le logement.
Confirmer l'ordonnance du 8 septembre 2022 en ce qu'elle a condamné Madame [K] [S] à payer à Monsieur [B] [O] les sommes provisionnelles suivantes :
- 4.101,33 € à valoir sur l'arriéré locatif arrêté au 24 mars 2022, comprenant les loyers, charges et indemnités d'occupation jusqu'à la date de la résiliation fixée au 24 mars 2022 incluse, outre intérêts au taux légal à compter du présent jugement
- 283,50 € au titre des dégradations locatives commises sur la serrure de la porte d'entrée de l'appartement
Confirmer l'ordonnance du 8 septembre 2022 en ce qu'elle a fixé l'indemnisation d'occupation sans droit ni titre due par Madame [S] à la somme mensuelle de 585,61 € à compter de la résiliation du bail et au besoin la condamner à verser à Monsieur [O] à titre provisionnel, ladite indemnité mensuelle à compter du 25 mars 2022 et jusqu'à sa libération effective des lieux, sous déduction des versements intervenus depuis.
Y ajoutant.
Condamner Madame [K] [S] au paiement d'une somme provisionnelle de 5.002,65 €, arrêtée au 13 avril 2023, au titre du paiement de l'indemnité d'occupation
Confirmer l'ordonnance du 8 septembre 2022 en ce qu'elle a condamné Madame [K] [S] à payer à Monsieur [B] [O] la somme de 400 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens comprenant le coût de l'assignation, du commandement de payer du 24 janvier 2022 et celui de la notification de l'assignation au représentant de l'état dans le département
Y ajoutant
Condamner Madame [S] à payer à Monsieur [O] une somme de 1.500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel ainsi qu'aux entiers dépens d'appel comprenant le coût du procès-verbal de recherche, du commandement de quitter les lieux, de la dénonciation au préfet du commandement de quitter les lieux, du procès-verbal de non-libération volontaire des lieux, de la réquisition de la force publique, du procès-verbal de reprise et des frais d'honoraires à la charge de Monsieur [O]. »
***
La cour, pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des demandes et moyens des parties, fait ici expressément référence au jugement entrepris ainsi qu'aux dernières conclusions déposées, étant précisé que le litige se présente céans de la même manière qu'en première instance.
Une ordonnance du 16 mai 2024 clôture la procédure.
II. Motifs
Bien que dans le dispositif de ses conclusions Mme [S] sollicite l'infirmation du jugement, y compris concernant l'arriéré locatif et l'indemnité mensuelle d'occupation, dans le corps de ses écritures elle conteste uniquement devoir assumer le remplacement d'une serrure ainsi que des frais de nettoyage de la cage d'escalier. D'aucune manière elle ne démontre que le décompte des loyers retenu par le juge des référés serait inexact ; et d'ailleurs son argumentation principale consiste à protester de sa bonne foi afin d'obtenir des délais de règlement à hauteur de 36 mois et la suspension entre-temps des effets de la clause résolutoire.
Concernant les frais de serrurerie, M. [O] produit à son dossier la facture d'un serrurier, qu'il a réglée par carte bancaire, intervenu en urgence le 4 mars 2021, c'est-à-dire pendant le cours du bail, pour l'ouverture d'une porte blindée au [Adresse 1], lieu de la location. Il y a donc lieu à remboursement de ces frais, comme exactement apprécié par le juge des référés.
Concernant le coût du nettoyage de la cage d'escalier, il figure pour 24 EUR dans un décompte de charges du 10 avril 2022, au titre de : « nettoyage liquide vaisselle dans cage escaliers ». M. [O] produit à son dossier un courrier électronique du gestionnaire de la copropriété, lui indiquant que ses locataires avaient mis du liquide vaisselle dans la cage d'escalier, joignant la facture de nettoyage correspondante d'une entreprise pour 24 EUR, et lui précisant : « il me semble difficile d'imputer ce montant à la copropriété ». En conséquence, cette somme est bien due par Mme [S], au titre des dégradations imputables au locataire, parmi de nombreuses autres nuisances et « incivilités » dénoncées par les occupants de l'immeuble à travers plusieurs courriers que M. [O] verse également à son dossier.
Il n'est pas nécessaire au stade du référé d'actualiser la somme provisionnelle due au titre des loyers et des charges, dans la mesure où le premier juge a fixé une indemnité d'occupation, étant précisé que le logement a été définitivement quitté par Mme [S] le 13 avril 2023 ainsi que cela résulte d'un procès-verbal de reprise volontaire des lieux dressé par huissier à cette date.
Aucune raison, ni démonstration pertinente de l'appelante, ne justifie de lui accorder des délais de règlement dont il n'est nullement justifié qu'elle serait en mesure de les respecter.
L'ordonnance sera donc intégralement confirmée, sauf à prendre en considération le départ volontaire de Mme [S] qui rend désormais inutile toute expulsion.
1200 EUR sont justes pour l'article 700 du code de procédure civile devant la cour d'appel.
Mme [S] supportera les dépens d'appel qui seront recouvrés comme il est dit par la loi sur l'aide juridictionnelle, étant précisé que ces dépens comprennent, outre ceux indiqués dans l'ordonnance, le coût du procès-verbal de reprise des lieux dressé le 13 avril 2023.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement et par arrêt contradictoire,
Constate que l'expulsion de Mme [K] [S] est désormais inutile en raison de son départ des lieux et de la reprise de ceux-ci suivant procès-verbal d'huissier dressé le 13 avril 2023 ;
Sous cette unique réserve, confirme l'ordonnance ;
Condamne Mme [K] [S] à payer à M. [B] [O] la somme de 1200 EUR en application de l'article 700 du code de procédure civile devant la cour;
Condamne Mme [K] [S] aux dépens d'appel, comprenant, outre ceux indiqués dans l'ordonnance, le coût du procès-verbal de reprise des lieux dressé le 13 avril 2023, et dit qu'ils seront recouvrés comme il est dit par la loi sur l'aide juridictionnelle ;
Déboute les parties de leurs autres demandes.
Le greffier Le président
DE RIOM
PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE
Du 01 octobre 2024
N° RG 22/01965 - N° Portalis DBVU-V-B7G-F4RQ
- DA- Arrêt n° 400
[K] [S] / [B], [J] [O]
Ordonnance Référé, origine Juge des contentieux de la protection de CLERMONT-FERRAND, décision attaquée en date du 08 Septembre 2022, enregistrée sous le n° 22/00034
Arrêt rendu le MARDI UN OCTOBRE DEUX MILLE VINGT QUATRE
COMPOSITION DE LA COUR lors du délibéré :
M. Philippe VALLEIX, Président
M. Daniel ACQUARONE, Conseiller
Mme Laurence BEDOS, Conseiller
En présence de :
Mme Marlène BERTHET, greffier lors de l'appel des causes et du prononcé
ENTRE :
Mme [K] [S]
[Adresse 1]
[Localité 4]
Représentée par Me Virginie DESSERT de la SCP VILLATTE-DESSERT, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2022/008479 du 28/10/2022 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de CLERMONT-FERRAND)
APPELANTE
ET :
M. [B], [J] [O]
[Adresse 3]
[Localité 2]
Représenté par Me Nathalie DOS ANJOS, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND
Timbre fiscal acquitté
INTIME
DÉBATS :
L'affaire a été débattue à l'audience publique du 27 juin 2024, en application des dispositions de l'article 786 du code de procédure civile, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant M. VALLEIX, rapporteur.
ARRÊT : CONTRADICTOIRE
Prononcé publiquement le 01 octobre 2024 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par M. VALLEIX, président et par Mme BERTHET, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
I. Procédure
Par acte sous-seing-privé du 14 octobre 2019 M. [B] [O] a donné à bail à Mme [K] [S] et à M. [Z] [N] un logement à [Localité 4], moyennant le paiement d'un loyer mensuel de 580 EUR, provision sur charges comprise.
À la suite du départ de M. [N], attesté par M. [O] le 31 décembre 2019, Mme [S] est devenue seule titulaire du bail, suivant avenant du 1er janvier 2020, dans les mêmes conditions que précédemment.
Le 24 janvier 2022 M. [O] a fait signifier à Mme [S] un commandement de payer visant la clause résolutoire insérée au bail, pour la somme principale de 3324,96 EUR.
La commission de coordination des actions de prévention des expulsions locatives a été informée de la situation de Mme [S] le 25 janvier 2022.
Par exploit du 3 mai 2022, M. [O] a fait assigner Mme [S] devant le juge des contentieux de la protection au tribunal judiciaire de Clermont-Ferrand, statuant en référé, afin de voir constater le jeu de la clause résolutoire, ordonner l'expulsion de Mme [S], et la condamner à lui payer diverses sommes provisionnelles.
Mme [S], assignée à l'étude de l'huissier, ne comparaissaient pas.
À l'issue des débats, par ordonnance du 8 septembre 2022, le juge des référés a statué comme suit :
« Nous, Juge des contentieux de la protection,
Statuant publiquement par ordonnance de référé réputée contradictoire en premier ressort, rendue par mise à disposition au greffe,
CONSTATONS la résiliation à compter du 24 mars 2022 du bail conclu le 14 octobre 2019 entre M. [B] [O] et Mme [K] [S],
ORDONNONS, faute de départ volontaire incluant la remise des clefs, l'expulsion de Mme [K] [S] ainsi que tout occupant de son chef, du local sis [Adresse 1], à [Localité 4], assorti d'un garage nº 6 et d'une cave nº 8, si besoin est avec l'assistance de la force publique et d'un serrurier, dans les formes et délais prévus par les articles L. 431-1 et suivants et R. 411-1 et suivants du code des procédures civiles d'exécution, et conformément à l'article L. 433-1 du même code, à procéder à l'enlèvement de tous tes biens mobiliers garnissant les lieux loués et à les faire entreposer dans tel local de son choix aux frais et périls des parties expulsées,
CONDAMNONS Mme [K] [S] à payer à M. [B] [O] les sommes provisionnelles suivantes ;
- 4.101,33 € à valoir sur l'arriéré locatif arrêté au 24 mars 2022, comprenant les loyers, charges et indemnités d'occupation jusqu'à la date de la résiliation fixée au 24 mars 2022 incluse, outre intérêts au taux légal à compter du présent jugement,
- 283,50 € au titre des dégradations locatives commises sur la serrure de la porte d'entrée de l'appartement,
FIXONS l'indemnité d'occupation sans droit ni titre due par Mme [K] [S] à Sa somme mensuelle de 585,61 €, à compter de la résiliation du bail et au besoin la CONDAMNONS à verser à M. [B] [O] à titre provisionnel ladite indemnité mensuelle à compter du 25 mars 2022 et jusqu'à complète libération des lieux, sous déduction des versements intervenus depuis,
CONDAMNONS Mme [K] [S] à payer à M. [B] [O] la somme de 400,00 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens comprenant le coût de l'assignation, du commandement de payer du 24 janvier 2022 et celui de la notification de l'assignation au représentant de l'état dans le département,
RAPPELONS que la présente ordonnance est assortie de plein droit de l'exécution provisoire,
DÉBOUTONS M, [B] [O] du surplus de ses demandes. »
Dans des motifs de sa décision le juge des référés a considéré que la résiliation du bail de plein droit était encourue en raison des manquements de Mme [S] dans le règlement du loyer, et du commandement de payer infructueux régulièrement signifié le 24 janvier 2022. Il a retenu par ailleurs le critère de l'urgence en raison de troubles de voisinage commis par Mme [S], dont justifiait M. [O] au moyen de pièces produites.
***
Mme [K] [S] a fait appel de cette décision le 5 octobre 2022, précisant:
« Objet/Portée de l'appel : L'appel tend à obtenir la nullité, ou à tout le moins la réformation de la décision susvisée en ce qu'elle a : - constaté la résiliation à compter du 24 mars 2022 du bail conclu le 14 octobre 2019 entre M. [B] [O] et Mme [K] [S] ; - ordonné faute de départ volontaire incluant la remise des clés, l'expulsion de Mme [K] [S] ainsi que de tout occupant de son chef, du local sis [Adresse 1], à [Localité 4], assorti d'un garage nº 6 et d'une cave nº 8 si besoin est avec l'assistance de la force publique et d'un serrurier, dans les formes et délais prévus par les articles L. 431-1 et suivants et R. 411-1 et suivants du Code des procédures civiles d'exécution, et conformément à l'article L. 433-1 du même Code, à procéder à l'enlèvement de tous les biens mobiliers garnissant les lieux loués et à les faire entreposer dans tel local de son choix aux frais et périls des parties expulsées ; - condamné Madame [K] [S] à payer à M. [B] [O] les sommes provisionnelles suivantes: 4.101,33 € à valoir sur l'arriéré locatif arrêté au 24 mars 2022 comprenant les loyers, charges et indemnités d'occupation jusqu'à la date de la résiliation fixée au 24 mars 2022 incluse, outre intérêts au taux légal à compter du présent jugement; 283,50 € au titre des dégradations locatives commises sur la serrure de la porte d'entrée de l'appartement ; - fixé l'indemnité d'occupation sans droit ni titre due par Mme [K] [S] à la somme mensuelle de 585,61 € à compter de la résiliation du bail et au besoin la condamne à verser à M. [B] [O] à titre provisionnelle ladite indemnité mensuelle à compter du 25 mars 2022 et jusqu'à complète libération des lieux sous déduction des versements intervenus depuis ; - condamné Mme [K] [S] à payer à M. [B] [O] la somme de 400 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux dépens comprenant le coût de l'assignation, du commandement de payer du 24 janvier 2022 et celui de la notification de l'assignation au représentant de l'état dans le département; - rappelé que la présente ordonnance est assortie de plein droit de l'exécution provisoire. »
Dans ses conclusions ensuite les plus récentes du 13 décembre 2022, Mme [K] [S] demande à la cour de :
« VU l'article 24 V de la loi nº 89-462 du 6 juillet 1989
Il est demandé à la Cour de :
DÉCLARER recevable et bien fondé l'appel interjeté par Mme [S].
INFIRMER le jugement en ce qu'il a :
- Constater le jeu de la clause résolutoire prévue au bail d'habitation conclue entre eux faute pour le locataire de s 'être acquittée des causes du commandement dans le délai de deux mois,
- Ordonner son expulsion et celle de tout occupant de son chef si besoin est, avec le concours de la force publique,
- Condamner Mme [K] [S] à lui payer à titre provisionnel les sommes suivantes :
' 4.101,33 € à valoir sur l 'arriéré locatif arrêté au 24 mars 2022,
' 585,61 € à titre d'indemnité mensuelle d'occupation à compter de la résiliation du bail jusqu'à sa libération effective des lieux,
' 283,50 € au titre des frais de serrurier,
' 800 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance.
Statuant à nouveau,
ACCORDER à Mme [S] un délai de 36 mois pour s'acquitter du solde de la dette, soit 2.944,29 €.
SUSPENDRE la réalisation et les effets des clauses de résiliation.
DIRE ET JUGER que la clause résolutoire sera réputée ne pas avoir joué en cas de paiement par Mme [S] dans le délai de 36 mois. »
***
M. [B] [O] a pris des conclusions nº 2 le 20 juillet 2023, afin de demander à la cour de :
« Vu les articles 834 et 835 du code de procédure civile,
Vu la loi nº 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi nº 86-1290 du 23 décembre 1986
Vu l'absence de contestation sérieuse et l'existence d'un trouble manifestement illicite qu'il convient de faire cesser,
Vu l'article 559 du Code civil,
Vu la Jurisprudence,
Débouter Madame [S] de l'intégralité de ses demandes, dont notamment sa demande de réduction de la dette locative, de délais de paiement et de suspension des effets de la clause résolutoire
Confirmer l'ordonnance du 8 septembre 2022 en ce qu'elle a constaté la résiliation à compter du 24 mars 2022 du bail conclu le 14 octobre 2019 entre Monsieur [B] [O] et Madame [K] [S].
Confirmer l'ordonnance du 8 septembre 2022 en ce qu'elle a ordonné l'expulsion de Madame [S] ainsi que de toutes personnes introduites par cette dernière dans le logement.
Confirmer l'ordonnance du 8 septembre 2022 en ce qu'elle a condamné Madame [K] [S] à payer à Monsieur [B] [O] les sommes provisionnelles suivantes :
- 4.101,33 € à valoir sur l'arriéré locatif arrêté au 24 mars 2022, comprenant les loyers, charges et indemnités d'occupation jusqu'à la date de la résiliation fixée au 24 mars 2022 incluse, outre intérêts au taux légal à compter du présent jugement
- 283,50 € au titre des dégradations locatives commises sur la serrure de la porte d'entrée de l'appartement
Confirmer l'ordonnance du 8 septembre 2022 en ce qu'elle a fixé l'indemnisation d'occupation sans droit ni titre due par Madame [S] à la somme mensuelle de 585,61 € à compter de la résiliation du bail et au besoin la condamner à verser à Monsieur [O] à titre provisionnel, ladite indemnité mensuelle à compter du 25 mars 2022 et jusqu'à sa libération effective des lieux, sous déduction des versements intervenus depuis.
Y ajoutant.
Condamner Madame [K] [S] au paiement d'une somme provisionnelle de 5.002,65 €, arrêtée au 13 avril 2023, au titre du paiement de l'indemnité d'occupation
Confirmer l'ordonnance du 8 septembre 2022 en ce qu'elle a condamné Madame [K] [S] à payer à Monsieur [B] [O] la somme de 400 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens comprenant le coût de l'assignation, du commandement de payer du 24 janvier 2022 et celui de la notification de l'assignation au représentant de l'état dans le département
Y ajoutant
Condamner Madame [S] à payer à Monsieur [O] une somme de 1.500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel ainsi qu'aux entiers dépens d'appel comprenant le coût du procès-verbal de recherche, du commandement de quitter les lieux, de la dénonciation au préfet du commandement de quitter les lieux, du procès-verbal de non-libération volontaire des lieux, de la réquisition de la force publique, du procès-verbal de reprise et des frais d'honoraires à la charge de Monsieur [O]. »
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La cour, pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des demandes et moyens des parties, fait ici expressément référence au jugement entrepris ainsi qu'aux dernières conclusions déposées, étant précisé que le litige se présente céans de la même manière qu'en première instance.
Une ordonnance du 16 mai 2024 clôture la procédure.
II. Motifs
Bien que dans le dispositif de ses conclusions Mme [S] sollicite l'infirmation du jugement, y compris concernant l'arriéré locatif et l'indemnité mensuelle d'occupation, dans le corps de ses écritures elle conteste uniquement devoir assumer le remplacement d'une serrure ainsi que des frais de nettoyage de la cage d'escalier. D'aucune manière elle ne démontre que le décompte des loyers retenu par le juge des référés serait inexact ; et d'ailleurs son argumentation principale consiste à protester de sa bonne foi afin d'obtenir des délais de règlement à hauteur de 36 mois et la suspension entre-temps des effets de la clause résolutoire.
Concernant les frais de serrurerie, M. [O] produit à son dossier la facture d'un serrurier, qu'il a réglée par carte bancaire, intervenu en urgence le 4 mars 2021, c'est-à-dire pendant le cours du bail, pour l'ouverture d'une porte blindée au [Adresse 1], lieu de la location. Il y a donc lieu à remboursement de ces frais, comme exactement apprécié par le juge des référés.
Concernant le coût du nettoyage de la cage d'escalier, il figure pour 24 EUR dans un décompte de charges du 10 avril 2022, au titre de : « nettoyage liquide vaisselle dans cage escaliers ». M. [O] produit à son dossier un courrier électronique du gestionnaire de la copropriété, lui indiquant que ses locataires avaient mis du liquide vaisselle dans la cage d'escalier, joignant la facture de nettoyage correspondante d'une entreprise pour 24 EUR, et lui précisant : « il me semble difficile d'imputer ce montant à la copropriété ». En conséquence, cette somme est bien due par Mme [S], au titre des dégradations imputables au locataire, parmi de nombreuses autres nuisances et « incivilités » dénoncées par les occupants de l'immeuble à travers plusieurs courriers que M. [O] verse également à son dossier.
Il n'est pas nécessaire au stade du référé d'actualiser la somme provisionnelle due au titre des loyers et des charges, dans la mesure où le premier juge a fixé une indemnité d'occupation, étant précisé que le logement a été définitivement quitté par Mme [S] le 13 avril 2023 ainsi que cela résulte d'un procès-verbal de reprise volontaire des lieux dressé par huissier à cette date.
Aucune raison, ni démonstration pertinente de l'appelante, ne justifie de lui accorder des délais de règlement dont il n'est nullement justifié qu'elle serait en mesure de les respecter.
L'ordonnance sera donc intégralement confirmée, sauf à prendre en considération le départ volontaire de Mme [S] qui rend désormais inutile toute expulsion.
1200 EUR sont justes pour l'article 700 du code de procédure civile devant la cour d'appel.
Mme [S] supportera les dépens d'appel qui seront recouvrés comme il est dit par la loi sur l'aide juridictionnelle, étant précisé que ces dépens comprennent, outre ceux indiqués dans l'ordonnance, le coût du procès-verbal de reprise des lieux dressé le 13 avril 2023.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement et par arrêt contradictoire,
Constate que l'expulsion de Mme [K] [S] est désormais inutile en raison de son départ des lieux et de la reprise de ceux-ci suivant procès-verbal d'huissier dressé le 13 avril 2023 ;
Sous cette unique réserve, confirme l'ordonnance ;
Condamne Mme [K] [S] à payer à M. [B] [O] la somme de 1200 EUR en application de l'article 700 du code de procédure civile devant la cour;
Condamne Mme [K] [S] aux dépens d'appel, comprenant, outre ceux indiqués dans l'ordonnance, le coût du procès-verbal de reprise des lieux dressé le 13 avril 2023, et dit qu'ils seront recouvrés comme il est dit par la loi sur l'aide juridictionnelle ;
Déboute les parties de leurs autres demandes.
Le greffier Le président