CA Bastia, ch. civ. sect. 1, 25 septembre 2024, n° 21/00818
BASTIA
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
Gabriel 2012 (SCI), Société d'Exploitation du Cabinet (SAS)
Défendeur :
Société d'Exploitation du Cabinet (SAS)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Jouve
Conseillers :
Mme Bettelani, M. Delegove
Avocats :
Me Casabianca Croce, Me Poletti, Me Canarelli, Me Balesi-Romanacce, Me De Angelis, Me Peres, Me Barratier, Me Pianelli-Coque
EXPOSÉ DU LITIGE :
Par actes des 19 et 23 septembre 2019, la SCI GABRIEL 2012 a fait assigner Messieurs [B] et [H] [L], Maître [J] [Z], notaire, Monsieur [U] [M] ès qualités d'administrateur provisoire de la copropriété située [Adresse 1] et la caisse de Crédit mutuel de Bastia, devant le tribunal de grande instance de Bastia en exposant :
- qu'elle a été créé pour les besoins d'une acquisition immobilière, que les
fonctions de gérant sont occupées par Monsieur [O] [R] et que le 21 décembre 2015, suivant actes passés en l'étude de Maître [Z], elle a conclu avec Messieurs [B] et [H] [L] un compromis de vente portant sur un bien situé [Adresse 1] à [Localité 3] composé d'un local au rez-de-chaussée (lot n°7) et d'un appartement comportant quatre pièces et un réduit (lot n°8),
- que dans la mesure où le premier étage était affecté à l'habitation et où elle était un 'non professionnel de l'immobilier', le notaire lui a notifié les délais de rétractation prévus à l'article L 271-1 du code de la construction et de l'habitation,
- que les diagnostics techniques immobiliers ont été confiés par les vendeurs à Monsieur [S] et que l'état parasitaire a révélé l'absence de termites dans le lot n°7 et des indices d'infestation de termites dans le lot n°8,
- qu'afin de pouvoir vendre le bien, Messieurs [L] se sont engagés à prendre en charge le traitement parasitaire du lot n°8 et ont fait appel à la société E FACCIATE ISULANE pour y procéder,
- que la vente a ainsi été conclue le 18 avril 2016 pour un prix de 89 000 €,
- que toutefois, au moment des travaux de réfection, il est apparu que l'appartement était affecté de désordres graves,
- qu'elle a fait réaliser plusieurs expertises qui ont mis en évidence que le traitement parasitaire avait été minimaliste et inefficace, que l'infestation était très avancée, une poutre principale de rive du plancher haut était pourrie, elles ont conclu à la nécessité de réaliser un nouveau traitement parasitaire, de conforter le mur de refend de la zone de l'escalier intérieur afin de stabiliser sa structure menaçant de s'effondrer et de renforcer la structure du plancher du plafond haut en raison des bois endommagés,
- qu'elle a été contrainte d'effectuer des travaux conservatoires en urgence en raison de la dangerosité des lieux,
- de surcroît, lors de la vente, l'appartement du premier étage était très encombré par du mobilier, empêchant l'accès au réduit situé au fond du logement,
- que Monsieur [R] n'ayant pas été en mesure de visiter intégralement les lieux, s'est fié aux vendeurs et à l'agent immobilier,
- que lorsque, suite à l'acquisition, il a enlevé le mobilier, il a pu pénétrer dans le réduit et a découvert un endroit fortement dégradé comportant des éléments de cuisine et de salle de bains disparates et vétustes, des WC turcs, dans un état de dégradation et d'insalubrité extrême ainsi que des canalisations et gaines techniques apparentes semblant dépendre de la copropriété voire même de l'immeuble voisin,
- que la gravité de l'infestation de termites ainsi que l'état de délabrement d'une partie de l'appartement lui ont été sciemment cachés, à ce jour le lot n°8 demeure inhabitable et qu'il ne pourrait en être autrement compris de travaux considérables et coûteux elle ne peut assumer,
- que s'agissant du lot n°7, il a été donné à bail à une société exerçant l'activité de traiteur,
- qu'elle est un non professionnel de l'immobilier pour avoir été créée deux semaines avant la signature du compromis de vente et que ses associés n'ont aucune expérience en matière immobilière, qu'en effet Monsieur [R] est commerçant et que son épouse, associée, n'exerce aucune activité,
- que conformément à l'article 1137 du code civil, le dol est le fait pour un cocontractant d'obtenir le consentement de l'autre par des man'uvres ou des mensonges,
- qu'en l'espèce, Messieurs [L] ont volontairement dissimulé à Monsieur [R] le véritable état de l'appartement, qu'en effet le plâtre et la peinture posés sur les murs et plafonds camouflaient la dégradation de la structure de sorte que l'appartement semblait en bon état apparent et qu'un acquéreur profane ne pouvait se rendre compte de l'état réel de dégradation des lieux,
- que Monsieur [C] qui a aidé au déblaiement du local, confirme que les poutres des plafonds étaient recouvertes de plusieurs centimètres de plâtre dissimulant leur état de décomposition,
- que Monsieur [S] a noté l'encombrement des lieux et a précisé n'avoir pu effectuer un diagnostic thermique complet dans la mesure où il n'a pas reçu l'autorisation d'effectuer des investigations destructrices sur la structure du plancher,
- que bien que le compromis de vente du 21 décembre 2015 mentionne que l'acquéreur déclare avoir connaissance des conclusions de l'état parasitaire et 'en faire son affaire personnelle', en réalité cela n'a guère été le cas,
- que pour le mettre en confiance, les vendeurs se sont engagés à réaliser à leurs frais le traitement contre les termites mais que la société E FACCIATE ISULANE mandatée pour le faire n'est pas spécialisée dans le traitement des termites mais dans le ravalement des façades,
- que le traitement a donc été réalisé à l'économie, sans respect des règles de l'art et n'a lieu aucun effet sur l'infestation,
- que Monsieur [P] a noté le traitement minimaliste effectué par la société E FACCIATE ISULANE et qu'en l'absence d'investigations concernant les structures porteuses, il ne pouvait valider leur qualité intrinsèque,
- que le bureau d'études ESBC a relevé la nécessité de conforter en urgence le mur de refend de la cage de l'escalier intérieur, l'importante détérioration d'une poutre en bois principale de rive, des flèches importantes au niveau des poutres en bois principales du plancher haut de l'appartement, une zone de plancher où la structure est visible, attaquée par les termites, la nécessité de renforcer la structure du plancher et de déposer l'ensemble de l'habillage de cette structure afin d'en vérifier l'état et de réaliser un traitement efficace,
- qu'en outre, un étaiement provisoire a été préconisé en raison des désordres graves sur la structure existante,
- que la SAS [Y]-SUMMA, expert immobilier, a confirmé que le traitement parasitaire n'a pas été réalisé dans les règles de l'art,
- que leurs démarches sont restées vaines et que les dommages continuent de s'aggraver, ce qui a été constaté le 2 mai 2019,
- que la gravité de l'infestation parasitaire et l'état de délabrement de la structure de l'appartement sont des éléments déterminants influents sur la décision d'acquérir et leur dissimulation par les vendeurs justifie l'annulation de la vente du lot n°8 pour dol,
- qu'en outre, si Monsieur [R] avait connu l'état du réduit fortement dégradé et insalubre, traversé au surplus par des gaines extérieures, il n'aurait pas conclu cette vente,
- que le lot n°7 ayant une superficie de 23,86 m2 et le lot n°8 de 54,21 m2 la nullité de la vente du lot n°8 entraîne la restitution de la somme de 61 800 €,
- que la responsabilité des vendeurs est engagée sur le fondement de l'article 1240 du code civil et ce, alors qu'elle a engagé divers frais (émoluments du notaire, dépenses conservatoires : 2 667,50 € sauf à parfaire, dépenses de rénovation : 15 000 € à parfaire, dépenses nécessaires à la constatation des dommages : 3 360 € sauf à parfaire),
- qu'elle a également subi un préjudice de jouissance et un préjudice moral,
- que l'agent immobilier est tenu d'une obligation d'information et de conseil, qu'il doit fournir à l'acheteur des informations objectives lui permettant d'opérer un choix éclairé, qu'en l'espèce, Monsieur [M] ne pouvait ignorer le véritable état du bien,
- que la responsabilité de Maître [Z], pour manquement à son devoir de conseil, est également engagée puisque la clause selon laquelle l'acquéreur a eu connaissance du diagnostic et déclare en faire son affaire personnelle est une clause de
type inappropriée en l'espèce car non conforme à la situation concrète dans la mesure où les vendeurs ont fait le choix d'effectuer à leurs frais le traitement antiparasitaire entre le compromis et la vente,
- qu'à aucun moment, elle n'a entendu faire son affaire personnelle du traitement antiparasitaire et que la facture a été annexée à l'acte de vente,
- qu'à l'évidence la clause type est en contradiction avec les éléments factuels et qu'elle démontre que le notaire n'a pas accompli son devoir de conseil,
- qu'elle a dû faire désigner un administrateur aux fins d'organiser la copropriété car elle était dépourvue de syndic,
- que suivant l'ordonnance du 28 mars 2019, Monsieur [M] a été désigné en cette qualité et que dans la mesure où les dommages affectent les parties communes, elle l'a attrait afin que la décision à intervenir lui soit opposable,
- que la caisse de Crédit mutuel de [Localité 3] lui a consenti un prêt de 122'000 € et que la décision à intervenir devra lui être déclarée commune et opposable,
- que subsidiairement, la responsabilité des vendeurs est recherchée pour manquement à leur devoir d'information précontractuelle,
- que le vendeur doit communiquer toutes les informations dont il dispose, en particulier celles affectant la jouissance du bien mais qu'il n'a pas signalé les dégradations importantes affectant l'appartement ainsi que l'insalubrité et la présence de canalisations et de gaines apparentes,
- qu'il y a donc lieu de prononcer la nullité de la vente pour dol, de condamner Messieurs [L] à lui restituer la somme de 61'800 €, de condamner in solidum Messieurs [L], Maître [Z] à lui payer les émoluments du notaire (mémoire), les dépenses conservatoires (2 667,50 € à parfaire), les dépenses de rénovation (18'374,50 € à parfaire), les dépenses nécessaires à la constatation des dommages (3 360 € à parfaire), à réparer son préjudice moral (30'000 €), subsidiairement d'ordonner une expertise, de déclarer la décision à intervenir commune et opposable à Monsieur [M], et de condamner in solidum Messieurs [L], Monsieur [M] et Maître [Z] à lui verser la somme de 10'000 € en application de l'article 700, le tout avec exécution provisoire,
- très subsidiairement, il convient de déclarer Messieurs [L] responsables pour manquement au devoir d'information précontractuelle, Monsieur [M] et Maître [Z] responsables pour défaut d'information et de conseil et de les condamner in solidum à réparer les préjudices subis outre 10'000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile, le tout avec exécution provisoire.
Par acte du 3 août 2020, la SCI GABRIEL 2012 a fait assigner la société d'exploitation du cabinet [K] [M] (SAS) aux fins de la voir condamner au lieu et place de Monsieur [K] [M] et d'obtenir le versement d'une provision dans l'hypothèse où une expertise viendrait à être ordonnée.
Le 19 octobre 2021, le tribunal judiciaire de Bastia par jugement réputé contradictoire, a :
- déclaré irrecevables les demandes présentées contre Monsieur [K] [M] et donné acte à la société d'exploitation du cabinet [K] [M] de son intervention volontaire,
- débouté la SCI GABRIEL 2012 de ses demandes,
- l'a condamnée à payer à Messieurs [L], à la société d'exploitation du cabinet [K] [M] et à Maître [Z] la somme de 3 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné Messieurs [L] aux dépens dont distraction au profit des avocats de la cause.
APPEL :
La SCI GABRIEL 2012 a interjeté appel le 25 novembre 2021. Son recours porte sur le rejet de ses demandes et sa condamnation sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.
Par arrêt contradictoire avant dire droit du 8 novembre 2023, la cour a :
- reçu l'appel formé par la SCI GABRIEL 2012,
- rejeté la demande d'irrecevabilité présentée par la société d'exploitation du cabinet [K] [M],
- et afin d'emblée de déterminer précisément le périmètre de la demande dont elle est principalement saisie par la SCI GABRIEL 2012, ordonné la réouverture des débats afin que les parties concluent sur les points ci-dessous évoqués :
sur quel fondement juridique serait-il envisageable d'annuler partiellement la vente ' quelles conséquences tirer des réponses à apporter '
Notamment dans l'hypothèse de l'indivisibilité :
quelle est la position de la SCI GABRIEL 2012 sur l'objet de ses demandes, maintenues en l'état '
sur le retour en l'état antérieur concernant le lot n°7, sort du bail ' restitution au vendeur du montant des loyers ' avec production des pièces permettant de statuer,
- révoqué l'ordonnance de clôture du 1er mars 2023,
- reçu les écritures et les pièces déposées par les parties postérieurement à cette date et jusqu'au 12 janvier 2024 inclus,
- clôturé la procédure au 12 janvier 2024,
- renvoyé la présente procédure à l'audience collégiale du 22 janvier 2024 à 8 heures 30 pour y être plaidée,
- sursis à statuer sur le surplus des autres demandes présentées,
- réservé les dépens.
La SCI GABRIEL a notifié ses dernières conclusions par voie électronique le 11 janvier 2024.
Messieurs [W] et [H] [L] ont notifié les leurs par voie électronique le 2 janvier 2024.
La Caisse de crédit mutuel de [Localité 3] a notifié les siennes par voie électronique le 9 janvier 2024.
La société d'exploitation du cabinet [K] [M] avait notifié ses conclusions par voie électronique, avant la réouverture des débats, le 18 mai 2022.
Maître [J] [Z] également avait notifié ses écritures par voie électronique le 28 février 2023.
Monsieur [U] [M] ès qualités d'administrateur provisoire de la copropriété située [Adresse 1] est défaillant.
L'affaire a été ré-évoquée à l'audience du 27 mai 2024 où elle a été retenue. Le délibéré a été fixé au 25 septembre 2024.
PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :
La SCI GABRIEL 2012 qui conclut à l'infirmation du jugement déféré en toutes ses dispositions, sollicite :
I ) sur la responsabilité des vendeurs :
- que soit déclarée recevable son action en garantie des vices cachés, suite à la vente du lot n°8,
- qu'en tout état de cause, Messieurs [L] soient déclarés responsables de man'uvres et réticence dolosive,
En conséquence,
La résolution partielle de la vente du lot 8 et la résolution partielle de l'emprunt :
- que soit prononcée la résolution partielle de la vente du lot n°8 pour vices cachés et en tout état de cause l'annulation partielle de la vente du lot 8 pour dol, ainsi que la résolution partielle du prêt consenti par la CAISSE DE CRÉDIT MUTUEL de [Localité 3] pour le lot n°8,
- que Messieurs [H] et [W] [L], vendeurs, soient déboutés de leur demande d'expertise aux fins d'évaluer le prix du lot 8,
- qu'ils soient condamnés :
à lui restituer le prix de vente, soit la somme de 44 500€ avec les intérêts au taux légal à compter du 18 avril 2016, et la capitalisation des intérêts à chaque échéance annuelle, (article 1343-2 du code civil) outre tous les frais bancaires et tous frais annexes demeurés ou qui demeureraient à sa charge,
à lui rembourser le capital correspondant au lot annulé, soit la somme de 77 500 €,
à lui rembourser les échéances d'emprunt, frais et cotisations réglées au
CRÉDIT MUTUEL jusqu'au jour de l'annulation, conformément au tableau d'amortissement du prêt. (échéances mensuelles de 873,06 €),
à lui rembourser les taxes foncières relatives au lot 8,
à réparer les préjudices subis par elle, soit :
* 30 000 € en réparation de son préjudice moral,
outre les postes ci-après, à déterminer par voie d'expertise, soit :
* les émoluments du notaire (relatifs à la vente du lot 8),
* les dépenses conservatoires liées à la mise en place de l'étaiement du plancher haut : 2 667,50 €, sauf à parfaire (pièce n°8),
* les dépenses réalisées pour rénover le lot n°8 : 15 000 € sauf à parfaire (pièce n°7),
* les dépenses nécessaires à la constatation des dommages et des risques (rapports d'expertise [P], [Y], ESBC, procès-verbal de constat SCP DE PETRICONI) : 3 360 €, sauf à parfaire (pièce n°19),
* le préjudice de jouissance du fait de l'impossibilité de conclure un bail d'habitation et d'avoir des revenus locatifs : mémoire,
* toutes sommes réclamées par le CRÉDIT MUTUEL de [Localité 3] et/ou toute autre partie ou tiers, en conséquence de l'annulation de la vente du lot n°8,
- la condamnation de messieurs [H] et [W] [L], vendeurs à la garantir de toute restitution et/ou condamnation à l'égard du CRÉDIT MUTUEL de [Localité 3] et de toute autre partie ou tiers, en conséquence de la résolution ou de l'annulation de la vente du lot n°8,
En cas de résolution ou d'annulation de la vente des lots n° 7 et 8 entraînant la résolution totale de l'emprunt :
- la condamnation de Messieurs [H] et [W] [L], vendeurs :
à restituer le prix soit la somme de 89 000 € avec les intérêts au taux légal à compter du 18 avril 2016, et la capitalisation des intérêts à chaque échéance annuelle, (article 1343-2 du code civil) outre tous les frais bancaires et tous frais annexes demeurés ou qui demeureraient à sa charge,
à la garantir de toutes demandes de condamnation à l'égard de la CAISSE DE CRÉDIT MUTUEL de [Localité 3] au titre de la résolution du prêt avec toutes les conséquences de droit,
à lui rembourser les échéances du prêt, des frais et cotisations d'assurance réglées par elle à la CAISSE DE CRÉDIT MUTUEL de [Localité 3], jusqu'à la date de l'annulation, conformément au tableau d'amortissement du prêt. (échéances mensuelles de 873,06 €),
à rembourser les taxes foncières relatives aux lots n°7 et 8,
à rembourser les frais notariés correspondant à la vente des lots 7 et 8,
à réparer les préjudices subis par elle, soit :
* 30 000 € en réparation de son préjudice moral,
outre les postes ci-après, à déterminer par voie d'expertise, soit :
* les dépenses conservatoires liées à la mise en place de l'étaiement du plancher haut: 2 667,50 €, sauf à parfaire (pièce n°8),
* les dépenses réalisées pour rénover le lot n°8 : 15 000 € sauf à parfaire (pièce n°7),
* les dépenses nécessaires à la constatation des dommages et des risques (rapports d'expertise [P], [Y], ESBC, procès-verbal de constat SCP DE PETRICONI) : 3 360 €, sauf à parfaire (pièce n°19),
* le préjudice de jouissance du fait de l'impossibilité de conclure un bail d'habitation et d'avoir des revenus locatifs : mémoire,
* toutes sommes réclamées par le CRÉDIT MUTUEL de [Localité 3] et/ou toute autre partie ou tiers, en conséquence de l'annulation de la vente du lot n°8,
- la condamnation de Messieurs [H] et [W] [L], vendeurs, à la garantir de toute restitution et/ou condamnation à l'égard du CRÉDIT MUTUEL de [Localité 3] et de toute autre partie ou tiers, en conséquence de la résolution ou de l'annulation de la vente des lots n°7 et 8,
A défaut de résolution ou d'annulation de la vente :
- que Messieurs [H] et [W] [L] soient déclarés responsables pour défaut d'information précontractuelle à son égard,
- en conséquence, leur condamnation au paiement des préjudices subis par elle, soit :
- 30 000 € en réparation de son préjudice moral en raison des nombreux tracas,
- outre les postes ci-après, à fixer par voie d'expertise, soit :
* les émoluments du notaire (relatifs à la vente du lot 8),
* les dépenses conservatoires liées à la mise en place de l'étaiement du plancher haut : 2 667,50 €, sauf à parfaire (pièce n°8),
* les dépenses réalisées pour rénover le lot n°8 : 15 000 € sauf à parfaire (pièce n°7),
* les dépenses nécessaires à la constatation des dommages et des risques (rapports d'expertise [P], [Y], ESBC, procès-verbal de constat SCP DE PETRICONI) : 3 360 €, sauf à parfaire (pièce n°19),
* le préjudice de jouissance du fait de l'impossibilité de conclure un bail d'habitation et d'avoir des revenus locatifs : mémoire,
- à titre subsidiaire, leur condamnation pour perte de chance, à lui payer à la somme de 100 000 € soit :
la perte de chance d'acheter à un prix nettement inférieur,
la perte de chance de louer le local à usage d'habitation,
la perte de chance d'économiser les frais notariés, les frais bancaires, les frais d'expertise, les travaux conservatoires, les frais de procès-verbal de constat, le surcoût des travaux de remise en état du local (traitement parasitaire et reconstruction des poutres et du plancher' travaux assainissement et de remise en état du réduit),
la perte de chance d'économiser le coût du procès.
II ) Sur la responsabilité conjointe du notaire et de l'agent immobilier :
- que la SAS D'EXPLOITATION CABINET [K] [M] soit déclarée responsable pour manquement à son devoir d'information et de conseil à son égard,
- que Maître [J] [Z] soit déclaré responsable pour manquement à son devoir d'information et de conseil à son égard,
- la condamnation de la SAS D'EXPLOITATION CABINET [K] [M] et de Maître [J] [Z] à lui payer in solidum avec Messieurs [H] et [W] [L], les sommes ci-après, à titre de dommages intérêts :
30 000 € en réparation de son préjudice moral en raison des nombreux tracas,
outre les postes ci-après, à fixer par voie d'expertise, soit :
* les émoluments de Maître [Z] (relatifs à la vente du lot 8),
* les dépenses conservatoires liées à la mise en place de l'étaiement du plancher haut: 2 667,50 €, sauf à parfaire (pièce n°8),
* les dépenses réalisées pour rénover le lot n°8 : 15 000€, sauf à parfaire (pièce n°7),
* les dépenses nécessaires à la constatation des dommages et des risques (rapports d'expertise [P], [Y], ESBC, procès-verbal de constat SCP DE PETRICONI) : 3 360 €, sauf à parfaire (pièce n°19),
* le préjudice de jouissance du fait de l'impossibilité de conclure un bail d'habitation et d'avoir des revenus locatifs : mémoire,
- subsidiairement, la condamnation de la SAS D'EXPLOITATION CABINET [K] [M] et de Maître [J] [Z] à lui payer in solidum avec Messieurs [H] et [W] [L], pour perte de chance, la somme de 100 000 €, correspondant à :
la perte de chance d'acheter à un prix nettement inférieur,
la perte de chance de louer le local à usage d'habitation,
la perte de chance d'économiser les frais notariés, les frais bancaires, les frais d'expertise, les travaux conservatoires, les frais de procès-verbal de constat, le surcoût des travaux de remise en état du local (traitement parasitaire et reconstruction des poutres et du plancher' travaux d'assainissement et de remise en état du réduit),
la perte de chance d'économiser le coût du procès.
EN TOUT ETAT DE CAUSE :
* Avant dire droit sur ses préjudices,
- la désignation d'un expert spécialiste en construction/immobilier, avec la mission d'usage pour décrire les dommages affectant le lot n°8 et déterminer des dégradations liées à la vétusté, pour décrire les ouvrages et éléments se trouvant dans le réduit situé dans le lot 8, déterminer la provenance des ouvrages, canalisations et gaines techniques traversant le réduit, pour préciser la nature des matériaux les composant et les conséquences et sujétions liées à leur présence de ces ouvrages ainsi que leur éventuelle dangerosité, et le cas échéant préconiser et chiffrer les mesures nécessaires pour y remédier, évaluer le traitement contre les termites et préconiser le cas échéant les mesures et traitements nécessaires ainsi que leur coût, pour dire si l'appartement est habitable et conforme aux normes sanitaires, préconiser et chiffrer le cas échéant, le coût des travaux nécessaire, évaluer les préjudices subis, déterminer le surcoût des travaux dus à l'infestation parasitaire, à l'état de vétusté, et à la conformité aux normes sanitaires, déterminer le préjudice financier consécutif à l'annulation de la vente à l'égard du CRÉDIT MUTUEL,
- la condamnation in solidum de Messieurs [H] et [W] [L], de la SAS D'EXPLOITATION DU CABINET [K] [M] et de Maître [J] [Z] à lui payer une indemnité provisionnelle de 50 000 €,
- la condamnation de Messieurs [H] et [W] [L] à la garantir de toute restitution et/ou condamnation à l'égard du CRÉDIT MUTUEL de [Localité 3] et de toute autre partie ou tiers, en conséquence de l'annulation de la vente du lot n°8.
- le rejet des demandes présentées par Messieurs [H] et [W] [L],
- que la décision à intervenir soit déclarée commune et opposable à Monsieur [U] [M], administrateur provisoire de la copropriété sis[Adresse 1]s à [Localité 3] et à la CAISSE DE CRÉDIT MUTUEL de [Localité 3],
- la condamnation des responsables à relever et garantir la SCI GABRIEL 2012, de toutes condamnations à l'égard du CRÉDIT MUTUEL, en principal frais et intérêts,
- la condamnation in solidum de Messieurs [H] et [W] [L], vendeurs, de la SAS société d'exploitation [K] [M] et de Maître [J] [Z] à lui payer la somme de 10 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance,
- que soit ordonnée la publication de l'arrêt à intervenir à la conservation des hypothèques de [Localité 3].
Messieurs [B] et [H] [L] sollicitent :
- le constat de l'abandon de la demande d'annulation de la vente sur le fondement du dol,
- le rejet des prétentions de l'appelante sur le fondement des vices cachés,
- qu'elle soit déboutée des fins de son recours,
en conséquence,
- la confirmation du jugement déféré en toutes ses dispositions,
- très subsidiairement et dans l'hypothèse d'une résolution de la vente, qu'il soit jugé que cette dernière portera sur les deux lots vendus, du fait de l'unité à l'acte de vente et de condamner la société appelante à la répétition des loyers perçus depuis l'acquisition, soit 33 300 €, et ce TTC, sauf à l'appelante à justifier du paiement de la TVA qui sera à déduire,
- à titre infiniment subsidiaire, en cas de dissociation des deux lots et de la résolution limitée au lot n° 8, la désignation avant dire droit d'un expert aux fins d'évaluation de sa valeur,
- le rejet des prétentions du Crédit mutuel sur appel incident,
- dans l'hypothèse d'une condamnation in solidum entre les concluants, le notaire instrumentaire et l'agent immobilier à titre de réparation des dommages allégués par l'appelant, qu'il soit dit et jugé que le notaire et l'agent immobilier devront les relever, garantir de la totalité des sommes qui pourraient être mises à leur charge,
- la condamnation de la société appelante à payer à chacun des concluants la somme de 7 500 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.
La Caisse de crédit mutuel sollicite :
* à titre principal,
- la confirmation du jugement déféré sauf en ce qu'il n'a pas fait droit à sa demande fondée sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et des dépens,
- et statuant à nouveau sur ces chefs, la condamnation des parties succombantes à lui payer la somme de 3 000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens,
* à titre subsidiaire, en cas d'annulation de la vente partielle ou totale,
- le constat que cette annulation entraîne l'annulation du contrat de prêt souscrit auprès d'elle,
- en conséquence, que soit ordonnée à son profit la restitution par la SCI GABRIEL 2012 de la somme correspondant au capital emprunté pour l'acquisition des deux lots, soit la somme de 122 000 €, déduction faite des échéances payées jusqu'au jour de l'annulation,
- la condamnation conjointe et solidaire de Messieurs [L], de Maître [Z], de la société d'exploitation du cabinet [K] [M] et de Monsieur [K] [M] à l'indemniser du préjudice résultant de l'annulation de la vente,
- en conséquence leur condamnation conjointe et solidaire au paiement :
des intérêts échus au jour de l'annulation de la vente à intervenir (totalité des sommes versées à compter de l'ouverture du prêt, hors assurance),
au titre de la perte de chance de percevoir les intérêts à échoir, soit du 15 mai 2020 au 15 août 2031, la somme de 15 805,05 €,
au titre de son remboursement, du montant des frais payés à hauteur de 368 € (356 € de coût d'inscription de l'hypothèque et 12 € de frais de fiche hypothécaire),
- leur condamnation solidaire au paiement de la somme de 4 000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.
Maître [Z] sollicite :
- la confirmation du jugement en toutes ses dispositions,
- y ajoutant, la condamnation de l'appelante à lui payer la somme de 10 000 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens,
- que soit déclarée irrecevable, en application des dispositions des articles 564 et 910-4 du code de procédure civile, la demande de garantie formulée par les consorts [L] à son encontre,
au besoin,
- qu'il soit constaté et jugé que le notaire n'a commis aucun manquement susceptible d'engager sa responsabilité civile professionnelle,
- qu'il soit constaté et jugé par ailleurs que la société appelante ne justifie pas d'un préjudice réparable en lien de causalité avec le manquement reproché,
- le rejet de l'ensemble des demandes des différentes parties dirigées à son encontre.
La société d'exploitation du cabinet [K] [M] qui conclut à la confirmation du jugement déféré, sollicite [concernant les points non encore jugés] :
* à titre principal,
- qu'il soit jugé que la société appelante manque radicalement à rapporter la preuve d'un quelconque manquement de sa part,
- que soit prononcée sa mise hors de cause,
- le rejet de l'ensemble des demandes adverses,
* à titre subsidiaire,
- qu'il soit jugé que la société appelante manque radicalement à rapporter la preuve de l'existence d'un lien de causalité directe entre les préjudices allégués et le manquement reproché,
- le rejet de l'ensemble des demandes formées à son encontre,
* à titre éminemment subsidiaire,
- qu'il soit jugé que la société appelante manque radicalement à rapporter la preuve de la réalité de l'étendue des préjudices qu'elle allègue,
- le rejet de l'ensemble des demandes formées à son encontre,
* en tout état de cause,
- la condamnation de la SCI GABRIEL 2012 à lui payer la somme de 5 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- la condamnation de la SCI GABRIEL 2012 aux entiers dépens de l'instance avec distraction au profit de son conseil.
Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, la cour renvoie aux conclusions et aux pièces déposées conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.
MOTIFS DE LA DÉCISION :
Sur la garantie des vices cachés :
En cause d'appel, la SCI GABRIEL 2012 invoque en premier lieu et pour la première fois, la responsabilité des vendeurs au titre de la garantie des vices cachés et sollicite la résolution de la vente.
Contrairement à ce que soutiennent ses adversaires, cette demande n'est pas irrecevable car, si le moyen juridique est nouveau, la prétention qu'il sous-tend ne l'est pas puisqu'il s'agit toujours, de même que sur le fondement du dol jusque-là invoqué, d'obtenir l'anéantissement de la vente.
Trois vices cachés affectant le lot n°8 sont évoqués, la vétusté et la dégradation du plancher haut ainsi que la défaillance structurelle du mur de refend, une infestation parasitaire généralisée et l'insalubrité d'un réduit à usage de WC comportant la présence de canalisations douteuses (amiante).
L'article 1641 du code civil dispose que : Le vendeur est tenu de la garantie à raison des défauts cachés de la chose vendue qui la rendent impropre à l'usage auquel on la destine, ou qui diminuent tellement cet usage, que l'acheteur ne l'aurait pas acquise, ou n'en aurait donné qu'un moindre prix, s'il les avait connus.
L'article 1643 du même code ajoute : Il est tenu des vices cachés, quand même il ne les aurait pas connus.
Avant d'examiner chaque désordre, il convient de préciser le contexte de la transaction et que pour la cour, vu la situation de l'immeuble, la vétusté des locaux et notamment du lot n°8 inhabité et manifestement insalubre, le montant de l'acquisition, il est évident que l'usage auquel l'appartement de l'étage était destiné, n'était pas de l'habiter en l'état et qu'un tel projet supposerait de conséquents travaux de réhabilitation ultérieurs à la charge de l'acheteur.
Il n'est pas inutile de relever également d'une part, que l'objet social de la SCI GABRIEL 2012 prévoit l'Acquisition, revente, location, gestion et administration civile de tous biens et droits caractérisant ainsi une activité de professionnel de l'immobilier, et d'autre part, qu'à titre personnel, Monsieur [R], son gérant a également été gérant d'une société spécialisée dans les diagnostics immobiliers, et que si c'est son frère qui avait les compétences techniques, il lui était loisible de lui demander conseil.
Concernant la constatation et l'évaluation de la vétusté et de la dégradation du plancher haut ainsi que de la défaillance structurelle du mur de refend, il y a lieu de relever que les attestations versées (pièces n°18 et 19) pour en justifier n'émanent pas comme il est indiqué dans les écritures de l'appelante des corps de métiers qui sont intervenus pour réaliser les travaux de rénovation mais du frère et de deux amis du gérant de la SCI GABRIEL 2012 qui ne sont intervenus dans les lieux que pour le déblaiement et pour le premier, pour la pose d'une climatisation dans le lot n°7 non litigieux.
Restent donc le rapport d'expertise établi par Monsieur [E] [P] le 30 septembre 2016 et le diagnostic technique réalisé le 23 octobre 2017 par Monsieur [F] [T], ingénieur BET, pour le compte de sa société, la SARL ESBC.
Le rapprochement des deux documents interroge. En effet, à la suite de sa visite des locaux le 22 septembre 2016 en présence de Monsieur [T], Monsieur [P] indique, sous réserve de la réalisation d'un état parasitaire des éléments porteurs, concernant l'étage R+1 : l'état apparent des poutres ne donne aucun signe caractéristique de déstabilisation imminente des structures en place et concernant l'étage R+2 : l'examen apparent des structures plancher et poutres ne relève aucun signe de mouvement
structurel concernant le plancher de Monsieur [O] [R]. Or, à la suite de la même visite, Monsieur [T] dans son diagnostic rédigé le 23 octobre 2017, lui, relève sur le mur de refend, un tassement de la structure causant le flambement de l'appui central en bois, constate que les poutres bois principales présentent des flèches importantes, signale qu'une des poutres bois principales de rive est localement endommagée par un phénomène de pourrissement lié à l'humidité et à des pénétrations d'eau, fait état d'une zone du plancher où la structure est visible qui semble avoir été 'attaquée' par les termites, indiquant que la stabilité générale du plancher et sa sécurité sont remises en cause, il préconise un étaiement provisoire.
Il existe une réelle incompatibilité entre ces deux avis émis à un mois d'écart par deux professionnels qui se sont rendus ensemble sur les lieux dans le même but, et alors comment comprendre une telle divergence de vues sur la solidité de l'ouvrage ou l'aspect d'une poutre principale ' La force probante du second diagnostic concluant à des désordres majeurs s'en trouve donc compromise.
Dans le contexte précité de l'achat dans un immeuble de conception ancienne, d'un appartement vétuste, en très mauvais état apparent, insalubre et inhabitable, nécessitant à l'évidence d'importants travaux de réfection, il n'apparaît pas que le défaut caché précité, même si son importance réelle n'était pas totalement visible, a intrinsèquement rendu le bien impropre à sa destination de bien à réhabiliter obligatoirement pour l'habiter. Le montant du prix global de la transaction tenant compte de cet état de fait, l'estimation précise du coût de la rénovation constitue dans ce type d'opération, un risque que l'acheteur qui en l'espèce n'est pas totalement profane, doit intégrer et, le cas échéant assumer.
Le deuxième vice lié à l'infestation par les termites est d'une autre ampleur et indiscutablement par l'importance des désordres constatés et le coût des travaux que nécessite la reprise des éléments bois (plancher et poutres), compromet l'usage et la destination du bien tels que précédemment définis, et interfère sur la décision d'achat et l'acceptation du prix à payer.
Sur son caractère caché ou au contraire connu par la SCI GABRIEL 2012, celle-ci soutient que si effectivement elle avait connaissance de la présence de termites en un lieu déterminé, le plafond des WC, elle ne pouvait se douter que l'infestation était généralisée et que la structure du plancher était gravement atteinte.
Une clause de l'acte de vente du 18 avril 2019 (page 15) intitulée TERMITES mentionne :
L'ENSEMBLE IMMOBILIER se trouve dans une zone délimitée par arrêté préfectoral comme étant infestée par les termites susceptibles de l'être.
En ce qui concerne les parties privatives :
./..
Lot 8 :
Un état parasitaire délivré par le cabinet [S] le 7 décembre 2015 est annexé.
Ces conclusions sont les suivantes : 'Le présent examen fait état d'indices de l'infestation de termites le jour de la visite.'
Il convient de préciser que le traitement dudit bien a déjà été réalisé par le vendeur, comme l'atteste une facture de la société 'E FACCIATE ISULANE' en date du 23 mars 2016 qui demeure annexée aux présentes.
L'ACQUÉREUR déclare en avoir préalablement connaissance et en faire son affaire personnelle.
Dans le rapport établi par le cabinet [S], il est relevé au niveau des WC un indice d'infestation de termites souterrains dans le plafond et sur les bois. Il est précisé, outre l'encombrement des autres pièces par du mobilier et divers objets, qu'un certain nombre de faces des ouvrages ou de parties d'ouvrages en bois n'ont pu être examinées en raison de leur inaccessibilité sans démontage, lequel en raison de son caractère destructif n'a pas été autorisé par les propriétaires. Il est également noté concernant toutes les pièces de l'appartement l'indice d'infestation d'agents de dégradation biologique du bois (vrillettes et champignons de pourriture fibreuse).
En connaissance de ces éléments, l'appelante, exerçant une activité de marchand de biens qui lors de l'acquisition en l'état, a pris le risque de déclarer à deux reprises faire du problème son affaire personnelle, ne peut prétendre avoir ignoré l'importance du phénomène et surtout avoir été dans l'impossibilité d'envisager ses possibles évolutions et conséquences sachant que le bien est situé dans une zone géographique sensible, que toutes les parties de l'appartement n'étaient pas accessibles ou alors difficilement, que le diagnostic termites était accompagné d'importantes réserves et zones d'ombre, que l'efficacité du traitement appliqué par la société 'E FACCIATE ISULANE' était forcément compromise du fait de ces difficultés matérielles et enfin que, par ailleurs l'ensemble des pièces en bois était infesté par des agents de dégradation biologique (vrillettes et champignons qui supposent un taux d'humidité important), le pourrissement de la poutre principale de rive du fait de la présence d'eau ayant d'ailleurs été retenu comme cause d'atteinte à sa solidité par Monsieur [T].
Le troisième vice invoqué par l'appelante à savoir l'insalubrité d'un réduit comportant la présence de canalisations 'douteuses' n'est guère étayé par les pièces versées au dossier. En fait cependant état, le document établi le 7 décembre 2015 par le cabinet [S], annexé à l'acte de vente, qui indique pour le moins succinctement concernant le lot 8 : Il a été repéré des matériaux et produits contenant de l'amiante.
Outre que ces éléments ne permettent pas d'apprécier utilement l'incidence de ce constat, il convient d'adopter le même raisonnement que pour les termites, l'acquéreuse ayant également déclaré devant le notaire avoir pris connaissance du document et faire du problème son affaire.
La demande d'indemnisation fondée sur la garantie des vices cachés sera donc rejetée.
Sur le dol :
Contrairement à ce que soutiennent les consorts [L], la SCI GABRIEL 2012 qui entend voir dans ses dernières conclusions : DÉCLARER en tout état de cause, Messieurs [H] et [W] [L] responsables de man'uvres et réticence dolosive, maintient ses prétentions sur le fondement du dol.
L'appelante les avait développées et soutenues dans ses conclusions initiales du 21 mars 2023. Y renvoyant, elle ne les a pas reproduites dans ses dernières conclusions axées sur les points, objet de la réouverture des débats.
Elle soutient que les vendeurs ont sciemment dissimulé à son gérant le véritable état de l'appartement et elle énumère les différents éléments qui selon elle, caractérisent les man'uvres et la réticence dolosive de ces cocontractants.
Elle évoque tout d'abord l'encombrement des lieux qui a notamment empêché le diagnostiqueur de travailler dans des conditions normales et a permis la dissimulation d'un réduit fortement dégradé.
Elle considère ensuite que l'état réel du lot 8 a été camouflé par plusieurs couches de peinture donnant l'illusion de son état d'un bon état apparent et que la mission du diagnostiqueur a été volontairement limitée par l'interdiction qui lui a été faite de procéder à des sondages destructifs.
Les consorts [L] qui contestent cette accusation, font valoir qu'ayant hérité du bien litigieux en 2015, ils ont décidé de le vendre en l'état, par l'intermédiaire d'une agence immobilière, sans aucune intervention de leur part autre que la réalisation des diagnostics exigés par la loi.
L'argument développé par l'appelante ne saurait prospérer dans la mesure où il n'est nullement démontré le caractère prétendument intentionnel de l'encombrement dont Monsieur [R] n'a d'ailleurs jamais demandé à ce qu'il y soit remédié, alors qu'il ne conteste pas avoir, avant la vente définitive, disposé des clés des lieux lui permettant d'accéder aux locaux à sa convenance et en conséquence de pouvoir faire valoir ses doléances. Il ne résulte pas non plus des pièces du dossier que les plâtres et peintures masquant les boiseries litigieuses aient été posés récemment et a fortiori dans un but de tromperie. L'existence d'une man'uvre frauduleuse délibérée n'est pas non plus établie s'agissant de l'absence d'autorisation de procéder à des sondages que peut justifier leur caractère destructif non souhaité par les propriétaires.
En toute logique, le traitement parasitaire jugé minimaliste et inefficace par l'appelante ne peut être analysé comme une manoeuvre dolosive puisqu'au contraire, son efficacité aurait été plus convaincante. Quant à ses défauts d'exécution, ils résultent plutôt d'un souci d'économie et/ou d'un mauvais choix du prestataire.
L'absence de remise des documents obligatoires légaux concernant l'état des parties communes s'explique par l'absence de syndic et n'est en rien imputable aux actuels vendeurs qui n'en peuvent mais. Quant au défaut d'information expresse de l'acquéreur de cette obligation qui lui causerait préjudice, cette critique est inopérante en présence d'une société qui exerçant une activité de marchand de biens, est, au moins faut-il le souhaiter, au fait des pièces qui doivent être produites lors de la vente d'un bien dépendant d'un ensemble immobilier soumis au régime de la copropriété. Concernant l'infestation par les termites et la présence d'amiante, il a précédemment été jugé que, exerçant une activité de marchand de biens, elle était suffisamment informée et avisée pour apprécier la portée de l'achat d'un tel logement.
Enfin, concernant la gravité des désordres dont il est soutenu que les vendeurs informés l'auraient volontairement cachée à leur cocontractante, la cour faisant siens sur ce point les motifs de la décision déférée, retient à son tour que les constatations effectuées en 2017 ne permettent pas, à elles seules, de prouver que les consorts [L], en auraient eu connaissance en 2016.
Sur le défaut d'information précontractuelle :
Sans qu'il soit nécessaire de les reprendre, les éléments relatifs aux circonstances de l'espèce et au comportement des vendeurs, développés et retenus par la cour pour exclure la garantie des vices cachés et le dol, permettent d'exclure également leur responsabilité au titre de leur obligation précontractuelle d'information, étant précisé qu'en toute hypothèse, l'article 1112-1 du code civil instauré par l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 sur lequel la demande est fondée, n'est pas applicable à l'espèce pour n'être entré en vigueur que le 1er octobre 2016.
Sur le manquement de l'agence immobilière des obligations professionnelles :
La SCI GABRIEL 2012 invoque à l'encontre de la société d'exploitation du cabinet [K] [M] qui a été mandatée par les consorts [L] pour effectuer la transaction relative au bien litigieux et qui auparavant avait été chargée par le précédent propriétaire de sa gestion, le manquement à l'obligation de vérifier les caractéristiques de l'immeuble concerné ainsi que le manquement à son obligation d'information et de conseil de l'acheteur.
L'appelante reproche ainsi à l'agent immobilier de ne pas lui avoir fourni les éléments techniques, qui lui auraient permis d'apprécier de façon éclairée la réalité de l'état du bien qu'elle allait acquérir, cette argumentation est pour le moins paradoxale alors que pour certains désordres considérés forcément comme apparents pour son adversaire, elle a fait plaider ici qu'il s'agissait de vices cachés. Concernant l'infestation par les termites et la présence d'amiante, il a été jugé que la société requérante qui est professionnelle de l'immobilier, en avait été suffisamment informée avant de prendre le risque d'acheter un bien en très mauvais état à rénover de façon conséquente. L'existence de man'uvres dolosives a également été écartée.
L'agence a régulièrement annexé au compromis le diagnostic technique réalisé par le cabinet [S]. Matériellement, en l'absence de syndic, elle n'a pas pu le faire pour les documents obligatoires légaux concernant l'état des parties communes. Elle a négocié le prix de vente soit 89'000 € net vendeur déduction faite de sa commission de 9 000 €, avec une valeur initialement estimée pour le local du rez-de-chaussée d'une superficie de 23,86 m2 à 45'000 € et pour l'appartement litigieux d'une superficie de 54,21 m2 à 40 000 € (tenant compte manifestement de son très mauvais état).
Dans ce contexte, la SCI GABRIEL 2012 ne démontre nullement en quoi l'agent immobilier qui n'est pas un professionnel du bâtiment ou de la construction, aurait pu disposer de plus d'informations pertinentes qu'il aurait omis ou refusé de lui communiquer.
Le jugement qui a débouté l'intéressée sera donc confirmé sur ce point.
Sur la responsabilité du notaire :
La SCI GABRIEL 2012 considère que Maître [Z] a manqué à son devoir d'information et de conseil.
Il a déjà été répondu plus haut aux moyens relatifs à la perception de la réalité de l'état du bien, à la fiabilité des diagnostics termites et amiante, à l'activité prétendument non professionnelle de l'acquéreuse et à l'absence d'annexion des documents obligatoires légaux concernant l'état des parties communes.
Le notaire dans la rédaction de l'acte de vente a valablement porté les mentions relatives à la présence de termites et d'amiante. Dès l'établissement du compromis, il avait annexé le rapport établi par la cabinet [S] et a rajouté la facture du traitement des insectes lors de l'établissement de l'acte de vente. En présence d'un immeuble à l'évidence en très mauvais étant et n'étant pas un technicien en ces matières, il ne saurait lui être reproché de ne pas avoir suffisamment signalé les éventuels défauts de ces diagnostics et de ces travaux. Il a par contre ainsi convenablement attiré l'attention de la société sur l'existence des problèmes affectant l'appartement et en indiquant qu'elle en faisait son affaire, il a recueilli sa réponse de contractante avisée engagée dans une opération d'acquisition d'un bien supposant une rénovation importante.
Le jugement qui a débouté l'intéressée sera donc également confirmé sur ce point.
Sur les autres demandes :
Compte tenu du rejet de toutes les prétentions de la SCI GABRIEL 2012 relatives à la garantie des vices cachés, au dol, au défaut d'information précontractuelle ainsi qu'à la reconnaissance de la responsabilité professionnelle du notaire ou de l'agent immobilier, doivent être également rejetées car dénuées de fondement ou sans objet, toutes les autres demandes d'annulation, de résolution, d'indemnisation, d'expertise ou de relever garantir, plus amples ou contraires présentées par elle ainsi que subsidiairement par les autres parties.
La présente décision n'ayant aucune incidence directe sur la gestion des parties communes, il n'y a pas lieu non plus de faire droit à la demande de la SCI GABRIEL 2012 tendant à la voir déclarer commune et opposable à Monsieur [M] en sa qualité d'administrateur provisoire de la copropriété, sachant qu'intimé, il est partie à la présente procédure.
Sur les frais irrépétibles et les dépens :
Il ne paraît pas inéquitable de condamner, en cause d'appel, la SCI GABRIEL 2012 qui succombe à nouveau, à payer aux consorts [L] la somme de 5 000 € et à Maître [J] [Z], à la société d'exploitation du cabinet [K] [M] et la Caisse de crédit mutuel de Bastia, à chacun, la somme de 3 000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure
PAR CES MOTIFS
Vu l'arrêt avant dire droit du 8 novembre 2023,
La cour, statuant par arrêt rendu par défaut,
- confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions,
et y ajoutant,
- déboute la SCI GABRIEL 2012 de sa demande fondée sur la garantie des vices cachés,
- condamne la SCI GABRIEL 2012, en cause d'appel, à payer à Messieurs [W] et [H] [L] la somme de 5 000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamne la SCI GABRIEL 2012, en cause d'appel, à payer à Maître [J] [Z], à la société d'exploitation du cabinet [K] [M] et la Caisse de crédit mutuel de Bastia, à chacun, la somme de 3 000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure,
- déboute les parties de toutes leurs autres demandes plus amples ou contraires,
- condamne la SCI GABRIEL 2012 aux dépens d'appel.