CA Douai, 1re ch. sect. 1, 26 septembre 2024, n° 22/05259
DOUAI
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Défendeur :
Lock Way Bat (SAS)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Poupet
Conseillers :
M. Vitse, Mme Miller
Avocats :
Me Millot, Me Olejniczak
***
Le 9 avril 2018, Mme [W] [N] a conclu avec la SAS Lock Way Bat un contrat prévoyant la dépose, la fourniture et la pose de menuiseries extérieures en PVC équipées de volets roulants motorisés, d'un portail et d'une porte de garage, pour la somme totale de 25 300 euros TTC.
Le 2 décembre 2018, elle a conclu avec la même société un contrat portant sur la fourniture et la pose d'un meuble-verrière pour un montant de 1 537,15 euros TTC.
Se plaignant de différents désordres et de malfaçons dans l'exécution des travaux, et après avoir mis en demeure de la société Lock Way Bat et obtenu successivement l'organisation d'une expertise amiable d'assurance, puis d'une expertise judiciaire ordonnée par le juge des référés du tribunal judiciaire de Lille le 3 novembre 2020, Mme [N] a fait assigner la société Lock Way Bat devant le tribunal judiciaire de Lille par acte du 8 octobre 2021 aux fins, notamment, d'obtenir :
- à titre principal, sa condamnation au paiement de la somme de 1 614 euros pour inexécution contractuelle et, à titre subsidiaire, la résolution du contrat conclu le 2 décembre 2018 et sa condamnation à lui verser la somme de 1'614 euros,
- la réduction du prix du contrat conclu le 9 avril 2018 à hauteur de 1 250 euros, ainsi que la condamnation de la défenderesse à lui verser cette somme,
- sa condamnation à lui payer la somme de 700 euros au titre de la garantie de parfait achèvement, celle de 4 400 euros au titre de la garantie biennale.
Elle a en outre sollicité, à l'audience du 4 juillet 2022, la résolution partielle du contrat du 9 avril 2018 en ce qui concerne la prestation relative au portail automatisé et la condamnation de la défenderesse à lui payer la somme de 4 700 euros.
Par jugement du 10 octobre 2022, le tribunal judiciaire de Lille a :
- rejeté la demande de constat de la résolution du contrat conclu entre les parties le 2 décembre 2018, ainsi que la demande de restitution y afférente ;
- prononcé la résolution judiciaire du contrat conclu entre les parties le 2 décembre 2018 à la date du 16 février 2020 ;
- condamné la société Lock Way Bat à payer à la demanderesse la somme de 1 076 euros en restitution du prix versé, outre intérêts au taux légal à compter du 16 février 2020 ;
- réduit de 1 250 euros le prix prévu par le contrat conclu le 9 avril 2018, le prix total s'élevant désormais à la somme de 24 050 euros TTC ;
- condamné la société Lock Way Bat à verser à Mme [N] la somme de 1 250 euros au titre du trop perçu ;
- débouté Mme [N] de sa demande de résolution partielle du contrat conclu le 9 avril 2018';
- débouté celle-ci de sa demande de condamnation en paiement sur le fondement de la garantie de parfait achèvement ;
- condamné la société Lock Way Bat à payer à Mme [N] la somme de 50 euros au titre de la garantie biennale, ainsi que celle de 500 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice de jouissance ;
- condamné la société Lock Way Bat, outre aux dépens, à verser à Mme [N] la somme de 1'500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Mme [N] a interjeté appel de ce jugement et, aux termes de ses conclusions remises le 12 février 2023, demande à la cour, au visa des articles 1217 et suivants et 1231-1 du code civil, et de l'article 700 du code de procédure civile, de réformer le jugement dont appel en ce qu'il a rejeté ses demandes formulées au titre de l'exécution imparfaite du contrat conclu le 9 avril 2018 avec la société Lock Way Bat et, statuant à nouveau, de :
- ordonner la résolution partielle du marché de travaux concernant la prestation divisible de fourniture et installation du portail automatique motorisé ;
- à défaut, prononcer la réduction du prix du devis du 9 avril 2018 à hauteur de 4 350 euros du fait de l'exécution imparfaite de ses obligations par l'intimée ;
et, en tout état de cause, de :
- condamner la société Lock Way Bat à lui rembourser la somme de 4 350 euros ;
- la condamner à lui payer la somme de 350 euros à titre des dommages et intérêts en réparation du préjudice résultant de la nécessité de déposer le portail actuellement installé ;
- la condamner aux dépens et à lui verser la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- confirmer la décision pour le surplus.
Bien qu'elle ait constitué avocat devant la cour, la société Lock Way Bat n'a pas conclu.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Aux termes de l'article 954 du code de procédure civile, la partie qui ne conclut pas ou qui, sans énoncer de nouveaux moyens, demande la confirmation du jugement est réputée s'en approprier les motifs.
A titre liminaire, il convient d'observer que l'appel interjeté par Mme [N] ne porte que sur les conséquences de l'inexécution défectueuse, par la société Lock Way
Bat, de sa prestation d'installation du portail automatisé prévu au contrat du 9 avril 2018 conclu entre les parties.
Sur la demande principale de résolution partielle du contrat conclu le 9 avril 2018
Mme [N] estime que l'exécution imparfaite de l'installation du portail, ayant conduit à la survenance d'aléas dans le fonctionnement de celui-ci, justifie la résolution partielle du contrat conclu le 9 avril 2018, la prestation litigieuse étant séparable du reste du contrat.
Sur ce
Aux termes de l'article 1217 du code civil, la partie envers laquelle l'engagement n'a pas été exécuté, ou l'a été imparfaitement, peut :
- refuser d'exécuter ou suspendre l'exécution de sa propre obligation ;
- poursuivre l'exécution forcée en nature de l'obligation ;
- obtenir une réduction du prix ;
- provoquer la résolution du contrat ;
- demander réparation des conséquences de l'inexécution.
Les sanctions qui ne sont pas incompatibles peuvent être cumulées ; des dommages et intérêts peuvent toujours s'y ajouter.
Aux termes de l'article 1224 dudit code, la résolution résulte soit de l'application d'une clause résolutoire soit, en cas d'inexécution suffisamment grave, d'une notification du créancier au débiteur ou d'une décision de justice.
En l'espèce, l'expert judiciaire a constaté dans son rapport remis le 12 avril 2021, à l'instar de l'expert mandaté par la protection juridique de l'appelante avant lui, un léger grincement lorsque la porte coulissante du portail était actionnée, mais aussi quelques défauts d'installation, à savoir une inversion de la coulisse haute du portail, de surcroît non protégée, une dénivellation le long du rail et un léger décalage des crémaillères posées côte à côte.
Cependant, à aucun moment l'expert judiciaire ne relève un défaut de fonctionnement du portail dont 'la motorisation, le système de coulisse, le déplacement latéral et l'enclenchement de la fermeture/ouverture du portail fonctionne (sic) normalement' si bien que les défauts décrits s'apparentent plus à des défauts de finition qu'à des défauts entravant le bon fonctionnement du portail, les dires de l'appelante s'agissant du blocage de celui-ci en cas de fortes ou de basses températures n'étant corroborés ni par les constatations de l'expert judiciaire, dont l'intervention a eu lieu en janvier 2021, ni par aucune autre pièce du dossier.
Par conséquent, les désordres allégués, qui ne sont pas de nature à compromettre la solidité de l'ouvrage, à le rendre impropre à sa destination et ne l'affectent pas dans l'un de ses éléments constitutifs, ne présentent pas une gravité telle qu'elle justifierait la résolution, même partielle, du contrat conclu entre les parties, ce d'autant que ces désordres sont réparables.
Il y a donc lieu, par confirmation de la décision entreprise, de débouter Mme [N] de sa demande de résolution partielle du contrat litigieux.
Sur la demande subsidiaire de réduction du prix
Mme [N] sollicite, à défaut de prononcé de la résolution partielle du contrat, la réduction du prix à concurrence de l'absence de l'installation fonctionnelle et conforme du portail, augmenté des frais qu'elle a été contrainte d'engager pour la dépose du portail.
Sur ce
Vu l'article 1217 du code civil, précité, en ce qu'il offre à la partie envers laquelle l'engagement n'a pas été exécuté, ou l'a été imparfaitement, la possibilité de solliciter la réduction du prix,
Aux termes de l'article 1223 du même code, en cas d'exécution imparfaite de la prestation, le créancier peut, après mise en demeure et s'il n'a pas encore payé tout ou partie de la prestation, notifier dans les meilleurs délais au débiteur sa décision d'en réduire de manière proportionnelle le prix. L'acceptation par le débiteur de la décision de réduction du prix du créancier doit être rédigée par écrit.
Si le créancier a déjà payé, à défaut d'accord entre les parties, il peut demander au juge la réduction du prix.
En l'espèce, Mme [N], qui a vainement mis en demeure, à deux reprises, la société intimée de parfaire les travaux d'installation du portail, a payé l'entièreté de la facture n° 20180614-000001 éditée le 14 juin 2018.
Les parties n'ont pas trouvé d'accord sur une éventuelle résolution amiable du litige et, à défaut de présentation d'un devis de réparation par les parties, l'expert judiciaire a chiffré le prix des réparations nécessaires à la reprise des désordres du portail à la somme de 1 500 euros TTC.
Mme [N] ne démontre enfin pas qu'aucune entreprise ne serait susceptible d'intervenir sur son portail pour remédier aux défauts constatés, alors que l'expert mentionne simplement la nécessité d'un réglage et non celle d'une dépose complète du portail avec remplacement de celui-ci.
Au vu de ces éléments, il y a lieu d'ordonner la réduction du prix de la prestation 'Fourniture et pose Portail avec portillon' prévue au contrat du 9 avril 2018 à hauteur du montant des réparations à effectuer, soit 1 500 euros, et de condamner la société intimée au paiement de cette somme.
Sur la demande de dommages et intérêts complémentaires au titre de la dépose du portail
Vu l'article 1217 du code civil précité ;
Mme [N] sollicite le versement de la somme de 350 euros au titre des dommages et intérêts pour l'indemnisation du préjudice résultant de la nécessité de déposer le portail installé par la société intimée.
Cependant, l'expertise n'a pas mis en évidence la nécessité de déposer le portail litigieux, un simple réglage s'avérant suffisant.
En outre, Mme [N] ne justifie pas d'un préjudice distinct de celui déjà indemnisé par les dommages et intérêts précédemment alloués pour les travaux de réglage du portail, tels qu'estimés par l'expert.
Elle sera en conséquence déboutée de sa demande de dommages et intérêts complémentaires.
Sur les autres demandes
La société Lock Way Bat, succombant en cause d'appel, sera tenue aux entiers dépens de première instance et d'appel, en ce compris les frais de l'expertise judiciaire.
Il convient, par ailleurs, de la condamner à verser à Mme [N] la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour,
statuant dans les limites de l'appel,
confirme le jugement de première instance en ce qu'il a débouté Mme [W] [N] de sa demande de résolution partielle du contrat conclu le 9 avril 2018,
et, y ajoutant,
ordonne la réduction du prix de la prestation 'Fourniture et pose de portail avec portillon' prévue au contrat du 9 avril 2018 à hauteur de la somme de 1 500 euros TTC,
condamne la SAS Lock Way Bat à verser à Mme [W] [N] la somme de 1 500 euros au titre de la réduction du prix de la prestation 'Fourniture et pose de portail avec portillon' du contrat conclu le 9 avril 2018,
déboute Mme [W] [N] de sa demande de dommages et intérêts complémentaires,
condamne la société Lock Way Bat aux dépens, en ce compris les frais d'expertise judiciaire,
la condamne à payer à Mme [W] [N] la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.