CA Paris, Pôle 5 ch. 11, 13 septembre 2024, n° 22/07793
PARIS
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
BLH Conseils (SARL)
Défendeur :
Experconnect (SARL)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Ardisson
Conseillers :
Mme L'Eleu de la Simone, Mme Guillemain
Avocats :
Me Rousseau, Me Boccon Gibod
FAITS ET PROCEDURE
La SARL Experconnect a pour activité la fourniture de prestations de conseil à caractère scientifique et technique.
Celle-ci a été sollicitée par la société Naval Group, qui conçoit des systèmes navals de défense, pour l'assister afin de répondre à un appel d'offres de la Direction générale des armées, concernant sur les systèmes embarqués porteurs d'intelligence artificielle.
Le 20 juillet 2018, la SARL Experconnect a conclu avec la SARL BLH Conseils (la société BLH), spécialisée dans le domaine de l'intelligence artificielle, un contrat de sous-traitance pour réaliser une prestation de conseil. Il était stipulé, dans l'Annexe 1, que la mission se déroulerait du 23 juillet au 31 octobre 2018, pour une durée estimée de quarante jours sur cette période, en contrepartie d'un montant forfaitaire de 48.000 € hors taxe et hors frais, avec une facturation mensuelle, prévue a minima, sur la base d'un rapport d'avancement signé par le client et le sous-traitant.
La société BLH a édité une facture de 57.600 € TTC, à la date du 15 novembre 2018. N'ayant obtenu aucun règlement, la société BLH a, le 19 février 2019, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, mis en demeure la société Experconnect de s'acquitter du prix de sa prestation.
Par courrier du 8 mars 2019, la société Experconnect lui a opposé le non-respect de ses obligations contractuelles, au motif que les documents transmis ne correspondaient pas aux livrables attendus, tout en lui proposant de lui régler, à titre amiable, une somme de 12.000 € HT équivalente à dix jours de prestations.
Suivant exploit du 1er août 2019, la société BLH a fait assigner la société Experconnect devant le juge des référés du tribunal de commerce de Paris, à l'effet d'obtenir sa condamnation à lui verser le montant total de sa facture.
Par ordonnance en date du 25 octobre 2019, le président du tribunal de commerce de Paris a condamné la société Experconnect à verser par provision à la société BLH la somme de 12.000 € avec intérêts au taux de trois fois le taux d'intérêt légal à compter du 17 avril 2019, celle de 40 € au titre de l'indemnité forfaitaire pour frais de recouvrement, ainsi qu'une somme de 1.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et les dépens.
Puis, le 8 septembre 2020, la société BLH a fait assigner au fond la société Experconnect devant le tribunal de commerce de Paris.
Par jugement en date du 18 octobre 2021, le tribunal de commerce de Paris a :
- Condamné la société Experconnect à verser à la société BLH la somme de 14.400 € avec intérêts au taux égal à trois fois le taux d'intérêt légal à compter du 19 février 2019, dont devrait être retranchée la somme de 12.287,99 € d'ores et déjà réglée par la société Experconnect à titre de provision, et a débouté la société BLH du surplus de sa demande,
- Condamné la société Experconnect au paiement de la somme de 40 € au titre d'indemnité forfaitaire de recouvrement, tout en disant que ce montant de 40 € n'aurait pas lieu d'être versé car déjà payé à la société BLH à titre de provision,
- Débouté la société BLH de sa demande de dommages et intérêts pour dénigrement,
- Débouté la société Experconnect de sa demande de dommages et intérêts pour préjudice d'image,
- Débouté les parties de leurs demandes autres, plus amples ou contraires,
- Rappelé que l'exécution provisoire était de droit,
- Condamné la société Experconnect au paiement de la somme de 1.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, tout en disant que ce montant de
1.000 € n'aurait pas lieu d'être versé car déjà payé à la société BLH à titre de provision,
- Condamné la société Experconnect aux dépens, dont ceux à recouvrer par le greffe, liquidés à la somme de 74,50 € dont 12,20 € de TVA.
La société BLH a formé appel du jugement, par déclaration du 15 avril 2022.
Par conclusions communiquées par voie électronique, le 7 octobre 2022, la société Experconnect a interjeté un appel incident.
Dans ses dernières conclusions, transmises par voie électronique, le 5 janvier 2023, la SARL BLH Conseils demande à la Cour, au visa des articles 1103, 1104, 1194 et 1217 du code civil, de :
« Infirmer le jugement du 18 octobre 2021 en ce qu'il a :
Débouté partiellement la société BLH CONSEILS de sa demande tendant à la condamnation de la société EXPERCONNECT à lui verser la somme de 57.600 € TTC, outre intérêts conventionnels à compter du 19 février 2019 ;
Débouté la société BLH CONSEILS de sa demande tendant à la condamnation de la société EXPERCONNECT à lui verser la somme de 5.000 € à titre de dommages et intérêts ;
Débouté partiellement la société BLH CONSEILS de sa demande tendant à la condamnation de la société EXPERCONNECT à lui verser la somme de 5.000 € au titre des frais irrépétibles ;
Débouté la société BLH CONSEILS de ses demandes autres, plus amples ou contraires.
Confirmer le jugement du 18 octobre 2021 en ce qu'il a débouté EXPERCONNECT de sa demande de dommages et intérêts pour préjudice d'image.
Et par conséquent statuant de nouveau :
Juger la société BLH CONSEILS tant recevable que bien fondée en ses demandes ;
En conséquence :
Condamner la société EXPERCONNECT à lui payer :
la somme principale de 57.600 € TTC, augmentée des intérêts conventionnels de retard au taux de trois fois le taux d'intérêt légal à compter du 19 février 2019, date de la première mise en demeure, étant précisé que le Président du tribunal de commerce de Paris a condamné la société EXPERCONNECT par ordonnance du 27 septembre 2019 à payer , à titre de provision, la somme de 12.000 € à la société BLH CONSEILS ;
la somme de 40 € au titre de l'indemnité forfaitaire pour frais de recouvrement, étant précisé que le Président du tribunal de commerce de Paris a condamné la société EXPERCONNECT par ordonnance du 27 septembre 2019 à payer , à titre de provision, la somme de 40 € à la société BLH CONSEILS ;
A défaut :
Juger qu'elle a la pleine propriété du document Word (pièce n° 11) adressé le 8 novembre 2018 et qu'elle peut en disposer librement.
En tout état de cause :
Condamner la société EXPERCONNECT à lui payer :
la somme 5.000 € au titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice moral résultant du dénigrement injustifié ;
la somme de 7.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile comprenant les frais de première instance et d'appel ;
les entiers dépens.
Rejeter l'ensemble des demandes formulées par la société EXPERCONNECT à l'encontre de BLH CONSEILS. »
Dans ses dernières conclusions, communiquées par voie électronique, le 7 octobre 2022, la SARL Experconnect demande à la Cour, sur le fondement de l'article 1217 du code civil et de l'article 564 du code de procédure civile, de :
« CONFIRMER le jugement rendu le 18 octobre 2021 par le Tribunal de commerce de Paris en ce qu'il a :
Condamné Experconnect à verser à BLH la somme de 14 400€ TTC avec intérêts au taux égal à trois fois le taux légal à compter du 19 février 2019, date de la mise en demeure somme de laquelle sera retranché le montant déjà versé par Experconnect à titre de provision au titre de la facture à savoir la somme de 12 787,99€ et débouté BLH pour le surplus de sa demande ;
Condamné Experconnect à la somme de 40€ au titre d'indemnité forfaitaire de recouvrement, mais dit que ce montant de 40€ n'a pas lieu d'être versé car déjà payé à BLH à titre de provision ;
Débouté BLH de sa demande de dommages et intérêts pour dénigrement ;
Débouté BLH de ses demandes autres, plus amples ou contraires ;
INFIRMER le jugement rendu le 18 octobre 2021 par le Tribunal de commerce de Paris en ce qu'il a débouté Experconnect de sa demande de dommages et intérêts pour préjudice d'image et statuant à nouveau :
CONDAMNER la société BLH Conseils à verser à la société Experconnect la somme de 10.000 euros à titre de dommages-intérêts pour l'indemniser du préjudice d'image subi ;
EN TOUT ETAT DE CAUSE
DECLARER que la demande de revendication de la propriété du document Word adressé le 8 novembre 2018 par BLH Conseils est nouvelle en appel et donc irrecevable ;
DEBOUTER la société BLH Conseils de l'intégralité de ses demandes ;
CONDAMNER la société BLH Conseils à verser à la société Experconnect la somme de 10.000 euros au titre de l'article 700 CPC ainsi qu'aux entiers dépens. »
Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, il est fait expressément référence aux écritures des parties susvisées quant à l'exposé détaillé de leurs prétentions et moyens respectifs.
L'ordonnance de clôture est intervenue le 25 avril 2024.
MOTIFS DE LA DECISION
Sur le paiement du prix de la prestation
Enoncé des moyens
La société BLH prétend qu'elle a exécuté la prestation conformément aux termes du contrat, de sorte qu'elle est fondée, en application de l'article 1217 du code civil, à solliciter son exécution forcée, afin d'obtenir le paiement de sa facture. Elle fait valoir qu'il n'appartenait pas à la société Experconnect d'apprécier la qualité de ses travaux, faute de capacité technique. Elle rappelle qu'elle a adressé un compte-rendu de réunion, le 5 septembre 2018, ainsi qu'un rapport d'avancement le 19 septembre suivant, et qu'elle a alerté son cocontractant des difficultés rencontrées pour respecter les délais. Elle ajoute qu'elle a transmis à la société Experconnect un livrable global, le 16 octobre, avant de l'envoyer à la société Naval Group, qu'elle a ensuite synthétisé dans un document Word, au mois de novembre 2018. Elle souligne que son cocontractant n'a élevé aucune contestation au moment de la réception de la facture. Elle prétend ainsi que le refus de paiement de la société Experconnect repose sur des prétextes subjectifs, cependant que la qualité de son travail a été reconnue par M. [H] [I], vice-président de la société Naval Group. Elle souligne, enfin, que la société Experconnect n'a jamais transmis la facture litigieuse au client final, et qu'elle n'a pas estimé utile non plus de mettre fin prématurément au contrat. Elle estime que la société Experconnect lui a causé un préjudice moral, en la dénigrant, dont elle sollicite en sus la réparation.
Pour sa part, la société Experconnect soutient que la société BLH n'a pas exécuté les prestations prévues dans le contrat. Elle souligne, à cet égard, qu'en dépit des prévisions contractuelles, la société BLH ne lui a pas transmis les rapports d'avancement mensuels signés par la société Naval Group, qu'elle ne l'a pas informée des difficultés rencontrées, et qu'elle ne lui a pas remis les deux livrables prévus à l'Annexe 1, non plus que les factures mensuelles qui devaient être établies sur la base des rapports d'avancement. Selon elle, la société BLH lui a transmis uniquement un premier rapport d'avancement le 19 septembre 2018, qui était incomplet, et n'a été pas été validé. Elle ajoute que la société BLH a adressé un document intitulé « Memo confidentiel » à la société Naval Group, remettant en cause sa stratégie, avant de lui envoyer directement sa facture, de sorte que cette dernière a souhaité mettre fin à leur collaboration. Elle explique que, pour cette raison, elle n'a pas jugé utile de lui notifier de manière formelle la résiliation du contrat. Elle réplique que le courriel de M. [I], qui entretient une relation amicale avec le dirigeant de la société BLH, ne permet pas de démontrer que celle-ci a rempli ses obligations contractuelles. Elle estime être fondée, dans ces conditions, à solliciter une réduction du prix à hauteur de 14.400 € TTC, correspondant à dix jours de travail, en rappelant qu'elle s'est d'ores et déjà acquittée de cette somme.
Réponse de la Cour
L'article 1217 du code civil, dans sa version issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, applicable aux faits de la cause, dispose :
« La partie envers laquelle l'engagement n'a pas été exécuté, ou l'a été imparfaitement, peut :
- refuser d'exécuter ou suspendre l'exécution de sa propre obligation ;
- poursuivre l'exécution forcée en nature de l'obligation ;
- solliciter une réduction du prix ;
- provoquer la résolution du contrat ;
- demander réparation des conséquences de l'inexécution.
Les sanctions qui ne sont pas incompatibles peuvent être cumulées ; des dommages et intérêts peuvent toujours s'y ajouter. »
L'article 1223 du même code, dans sa rédaction résultant de l'ordonnance précitée, précise que :
« Le créancier peut, après mise en demeure, accepter une exécution imparfaite du contrat et solliciter une réduction proportionnelle du prix.
S'il n'a pas encore payé, le créancier notifie sa décision de réduire le prix dans les meilleurs délais. »
En l'occurrence, l'article 1 de l'Annexe 1 du contrat de sous-traitance, signé le 20 juillet 2018, stipule que « L'avis demandé (à la société BLH) portera sur l'analyse des orientations de la feuille de route, de sa pertinence par rapport aux développements de R&D portés par les meilleurs acteurs scientifiques reconnus dans le domaine Intelligence Artificielle, l'identification et l'animation d'un écosystème des start-Ups pertinentes dans l'IA, le soutien à la rédaction de l'offre vers le client en prenant en compte tous ces éléments.
La prestation comprendra :
Dans un premier temps, le recueil des orientations stratégiques auprès des experts. Ce recueil se fait au travers de réunions de travail et fait l'objet d'un compterendu qui nécessitera une acceptation en interne.
Suite à ce compte-rendu, en accord avec les experts, le titulaire donne son avis sur les briques technologiques et les domaines de R&D qu'il convient de développer pour atteindre les objectifs de la feuille de route qui sera établie, identifie les Start-Ups pertinentes en cohérence avec les objectifs à atteindre de la feuille de route, propose une première rédaction de l'offre technique. Cet avis s'appuie sur sa connaissance du domaine Intelligence Artificielle et sur les recherches qu'il effectue dans ce domaine. »
Il ajoute que la prestation inclut deux « livrables », à savoir :
« Compte-rendu formulant le recueil des orientations stratégiques de Naval Group dans le domaine de l'Intelligence Artificielle.
Date de besoin : 15 septembre 2018
Document donnant l'avis d'expert sur les domaines à mettre en 'uvre et sur les briques technologiques à développer pour atteindre les objectifs de la feuille de route de Naval Group, l'identification des Start-Ups pertinentes en cohérence avec les objectifs à atteindre de la feuille de route, une première version de l'offre technique.
Date de besoin : 15 octobre 2018. »
Or, comme l'a relevé le tribunal, le premier livrable qui devait être remis le 15 septembre 2018 n'a pas été communiqué dans le délai requis. La société BLH justifie ainsi tout au plus avoir adressé, le 19 septembre 2018, à la société Naval Group un document intitulé « Rapport d'avancement », qui ne contient qu'une page et demie faisant état de trois réunions, résumées en quelques lignes, et d'une durée de travail de quatorze jours.
Le 25 septembre 2018, la société BLH a ensuite transmis directement à la société Naval Group un « Memo confidentiel », destiné à l'alerter sur les difficultés rencontrées pour mener à bien sa mission, qui ne correspondait pas à la prestation commandée, ce que son dirigeant, M. [V], a d'ailleurs reconnu dans un courriel du 16 octobre 2018.
Ce même jour, la société BLH a envoyé successivement à la société Experconnect et à la société Naval Group un document Mindjet, suivi, le 8 novembre 2018, d'un dossier de synthèse converti en Word.
La première version du document, sous forme Mindjet, comprend uniquement un plan, qui n'est manifestement pas exploitable. Le document de synthèse, transmis au mois de novembre 2018, qui compte dix-sept pages, n'inclut lui-même aucune « identification des start-ups pertinentes » et ne contient aucune version d'une offre technique, alors que ces prestations étaient prévues dans le contrat comme étant essentielles.
La société Experconnect est donc fondée à soutenir que la société BLH a exécuté imparfaitement la prestation, en ne fournissant pas les livrables convenus, sans qu'il puisse lui être reproché d'avoir procédé à une analyse subjective de la qualité du travail accompli.
Contrairement à ce qui est allégué, le témoignage de M. [I], vice-président au sein de la société Naval Group, émis en faveur de la société BLH, ne suffit nullement à démontrer que celle-ci aurait accompli les prestations attendues. Il ressort, en effet, de l'attestation établie par l'intéressé, ainsi que du courriel qu'il a envoyé le 28 février 2019, qu'il entretient une relation amicale avec à M. [V], et que, selon ses dires, il n'a procédé qu'à une lecture rapide des documents adressés par celui-ci, sachant qu'il exerçait des responsabilités étrangères à la mission dévolue de la société BLH. Le témoignage de M. [I] n'apparaît donc pas pertinent, d'un point de vue technique.
A cela s'ajoute que la société BLH n'a pas transmis à la société Experconnect les rapports d'exécution mensuels visés l'article 2.4 du contrat, devant être signés par la société Naval Group, à l'exception du rapport d'avancement envoyé le 19 septembre, qui n'a pas été validé ; le courriel du 5 septembre 2018 adressé à la société Naval Group ne contient, quant à lui, aucun compte-rendu détaillé de la réunion auquel il est fait allusion et ne répond pas aux conditions de formes exigées par l'article 2.4. Elle n'a, par ailleurs, établi aucune facturation mensuelle, imposée par l'article 5 de l'Annexe 1.
En outre, la société BLH s'est ouverte de difficultés auxquelles elle prétendait être confrontée uniquement auprès du client final alors que, selon les prévisions de l'article 2.4, il lui appartenait d'en informer directement la société Experconnect. En tout état de cause, la société BLH ne produit aucun courrier de relance justifiant que son cocontractant n'aurait pas donné suite à ses demandes d'assistance.
L'argument selon lequel la société Experconnect n'a élevé aucune contestation avant de recevoir la facture litigieuse est lui-même inopérant, dès lors que la société Naval Group, avait indiqué à la société BLH, par courriel du 16 octobre 2018, souhaiter mettre un terme à leur collaboration, suite à l'envoi du « Memo confidentiel », en lui précisant que les documents produits ne correspondaient pas au besoin exprimé, M. [V] ayant attendu ce même jour pour lui adresser, quelques heures plus tard, le premier document Mindjet, communiqué concomitamment à la société Experconnect.
La demande de réduction du prix de la société Experconnect, fondée sur l'exécution imparfaite de la prestation, apparaît ainsi légitime, sans qu'il puisse lui être reproché de s'être abstenue de résilier formellement le contrat, ces deux sanctions étant alternatives. Peu importe également qu'elle n'ait pas transmis la facture litigieuse à la société Naval Group qui, dans son courriel du 16 octobre 2018, avait d'ores et déjà informé M. [V] qu'elle entendait réduire le prix de la prestation.
Il convient, dans ce prolongement, d'approuver l'analyse du tribunal de commerce ayant estimé que les prestations réalisées par la société BLH ont nécessité dix jours de travail, sur une base journalière de 1.440 € TTC, et de dire que le prix sera réduit proportionnellement à hauteur de 14.400 € TTC.
Le jugement sera ainsi confirmé en ce qu'il a condamné la société Experconnect à payer à la société BLH la somme de 14.400 €, avec intérêts au taux égal à trois fois le taux d'intérêt légal à compter du 19 février 2019, outre la somme de 40 € au titre de l'indemnité forfaitaire de recouvrement.
Par suite des explications qui précèdent, la société BLH ne pourra être que déboutée de sa demande de dommages et intérêts à raison de prétendus actes de dénigrement commis par la société Experconnect. Le jugement sera ainsi également confirmé de ce chef de rejet.
Sur la demande de revendication du document adressé le 8 novembre 2018 par la société BLH
Enoncé des moyens
La société BLH revendique la propriété du document Word transmis au mois de novembre 2018. Elle réplique que sa demande, qui n'est que la conséquence du rejet de ses prétentions visant à obtenir le paiement du travail qu'elle a accompli, est recevable.
La société intimée, invoquant les dispositions de l'article 564 du code de procédure civile, prétend que la demande de revendication de la propriété du document Word, transmis par la société BLH, est irrecevable, pour avoir été formulée la première fois en cause appel. Sur le fond, pour s'opposer à la demande, elle fait valoir que, selon les stipulations du contrat, la propriété du document litigieux appartient au client.
Réponse de la Cour
Selon l'article 564 du code de procédure civile, « A peine d'irrecevabilité relevée d'office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d'un fait. »
La demande subsidiaire en revendication de la propriété du document transmis au mois de novembre 2018, formulée par la société BLH, doit être déclarée recevable dès lors qu'elle est la conséquence de la défense à la demande en réduction du prix de la société Experconnect.
Le prix de la prestation ayant été seulement réduit, les stipulations du contrat qui prévoient que celle-ci demeure la propriété entière et exclusive du client final (article 12) ont vocation à s'appliquer. La société BLH sera donc déboutée de sa demande de revendication de la propriété du document qu'elle a adressé le 8 novembre 2018.
Sur la demande de la société Experconnect en réparation de son préjudice d'image
Enoncé des moyens
La société Experconnect prétend que le comportement de la société BLH à l'égard de la société Naval Group a mis en danger la relation de confiance avec sa cliente.
La société appelante réplique que la société Experconnect ne rapporte pas la preuve de ses allégations.
Réponse de la Cour
En l'occurrence, le tribunal a estimé à raison que la société Experconnect ne produisait aucun élément tendant à établir la preuve d'un préjudice d'image, et l'a déboutée de sa demande à juste titre.
Sur les autres demandes
La société BLH succombant au recours, le jugement sera confirmé en ce qu'il a statué sur les dépens et les frais irrépétibles.
Statuant de ces chefs en cause d'appel, la Cour la condamnera aux dépens, ainsi qu'à payer à la société Experconnect une indemnité de 3.500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
CONFIRME le jugement en ses dispositions soumises à la Cour,
Y AJOUTANT,
Déclare recevable la demande de la SARL BLH Conseils en revendication de la propriété du document Word qu'elle a adressé le 8 novembre 2018,
Rejette la demande de la SARL BLH Conseils en revendication de la propriété dudit document,
CONDAMNE la SARL BLH Conseils aux dépens de l'appel,
CONDAMNE la SARL BLH Conseils à payer à la SARL Experconnect la somme de 3.500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.