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Décisions

CA Bordeaux, 2e ch. civ., 3 octobre 2024, n° 21/00652

BORDEAUX

Arrêt

Autre

CA Bordeaux n° 21/00652

3 octobre 2024

COUR D'APPEL DE BORDEAUX

DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE

--------------------------

ARRÊT DU : 03 OCTOBRE 2024

N° RG 21/00652 - N° Portalis DBVJ-V-B7F-L5L5

Monsieur [P] [Y]

Madame [K] [S] épouse [Y]

c/

Monsieur [E] [C], [O] [V]

Madame [R] [J] [V] NEE [X]

Madame [H] [A]

Monsieur [W] [A]

S.A. CHARLET NAUTIC

Nature de la décision : AU FOND

Grosse délivrée le :

aux avocats

Décision déférée à la cour : jugement rendu le 10 novembre 2020 par le TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de BORDEAUX (chambre : 5, RG : 18/03831) suivant déclaration d'appel du 03 février 2021

APPELANTS :

[P] [Y]

né le 10 Décembre 1976 à [Localité 8]

de nationalité Française

Profession : Employé Municipal,

demeurant [Adresse 3]

[K] [S] épouse [Y]

née le 08 Mars 1970 à [Localité 9] (ALLEMAGNE)

de nationalité Française

Profession : Enseignante,

demeurant [Adresse 3]

Représentés par Me Dominique BASTROT, avocat au barreau de BORDEAUX

INTIMÉS :

[E] [C], [O] [V]

né le 18 Octobre 1969 à [Localité 5]

de nationalité Française

Profession : Agent de sécurité,

demeurant [Adresse 11]

[R] [J] [V] NEE [X]

née le 04 Août 1970 à [Localité 4]

de nationalité Française

Profession : Cadre commercial,

demeurant [Adresse 1]

Représentés par Me Maxime GRAVELLIER de l'AARPI GRAVELLIER - LIEF - DE LAGAUSIE - RODRIGUES, avocat au barreau de BORDEAUX

[H] [A]

née le 20 Décembre 1966 à [Localité 10]

de nationalité Française,

demeurant [Adresse 2]

sur appel provoqué de M. [E] [V] et Mme [R] [V] en date du 04.05.21

[W] [A]

né le 28 Juin 1966 à [Localité 6]

de nationalité Française,

demeurant [Adresse 2]

sur appel provoqué de M. [E] [V] et Mme [R] [V] en date du 04.05.21

Représentés par Me Claire SAINT-JEVIN de la SELARL SAINT-JEVIN, avocat au barreau de BORDEAUX

La Société Anonyme CHARLET NAUTIC,

SA immatriculée au RCS de MONT DE MARSAN sous le n° 395 322 845, dont le siège social est sis [Adresse 7], prise en la personne de son représentant légal domicilié audit siège ès-qualité

sur appel provoqué de M et Mme [A] en date du 20.07.21

Représentée par Me Françoise PILLET de la SELARL COULAUD-PILLET, avocat au barreau de BORDEAUX

et assistée de Me Ariane LAMI SOURZAC, avocat au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 04 juillet 2024 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Jacques BOUDY, Président qui a fait un rapport oral de l'affaire avant les plaidoiries,

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Monsieur Jacques BOUDY, Président,

Monsieur Rémi FIGEROU, Conseiller,

Madame Christine DEFOY, Conseiller,

Greffier lors des débats : Madame Audrey COLLIN

ARRÊT :

- contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile.

* * *

EXPOSÉ DU LITIGE :

Selon un bon de commande signé le 12 novembre 2006, Monsieur [W] [A] et Madame [H] [A] ont acquis un navire de marque Quicksilver, Open Flamingo 5.25, équipé d'un moteur de 80 cv de marque Mercury, d'une remorque Satellite et divers accessoires pour un prix de 20 115 euros TTC, auprès de la société Charlet Nautic.

Avant la cession du navire, ce dernier avait été donné en location pendant une période de six mois au cours de la saison estivale de 2006, comme l'indique le bon de commande précité.

Les époux [A] ont utilisé ce navire sans difficulté particulière pendant sept ans, au cours des saisons estivales de 2007 à 2014. Pendant cette période, ils ont confié l'entretien du navire à la société Charlet Nautic.

Les époux [A] ont cédé leur navire à Monsieur [E] [V] et Madame [R] [V] le 8 mars 2015 pour un prix de 10 000 euros.

Les époux [V] ont par la suite cédé le navire à Monsieur [P] [Y] et Madame [K] [S] épouse [Y]. La première visite du bateau a eu lieu le 19 mars 2016. La vente a été décidée ce jour là avec le versement d'un acompte de 1000 euros. Le bateau a été livré, et l'acte de vente signé le 1 er avril 2016. Le bateau a été vendu à un prix de 11 000 euros.

Après avoir pris possession du navire, les époux [Y] exposent avoir découvert différent désordres structurels, l'un consistant en une fissure du plancher du bateau et l'autre en la présence de dégradations de la résine polyester de la coque du bateau, phénomène qualifié d'osmose. Un rapport d'expertise réalisé à la suite d'une réunion non contradictoire a été rendu le 29 avril 2016.

Par courrier recommandé en date du 5 mai 2016, les époux [Y] ont sollicité auprès des époux [V] la résolution de la vente et le remboursement du prix versé.

Par courrier recommandé en date du 17 mai 2016, les époux [V] ont refusé la résolution de la vente et ont proposé une somme de 500 euros afin de contribuer aux réparations du navire.

Par assignation en date du 29 août 2016, les époux [Y] ont assigné les époux [V] en référé devant le Président du tribunal de grande instance de Bordeaux, aux fins de désignation d'un expert judiciaire. Les époux [V] ont appelé à la cause les époux [A] par assignation en date du 3 novembre 2016.

Par ordonnance du 5 décembre 2016, le juge des référés a désigné M. [M] en qualité d'expert judiciaire. Le rapport d'expertise a été remis le 15 mars 2017.

Par acte du 16 avril 2018, les époux [Y] ont assigné les époux [V] devant le tribunal de grande instance de Bordeaux aux fins d'obtenir la résolution de la vente et des dommages et intérêts.

Par acte du 7 juin 2018, les époux [V] ont appelé en garantie les époux [A], sollicitant leur condamnation à les relever indemnes de toute somme éventuellement mise à leur charge.

Par acte du 10 décembre 2018, les époux [A] ont appelé en garantie la société Charlet Nautic, sollicitant sa condamnation à les relever indemnes de toute somme éventuellement mise à leur charge.

Par jugement en date du 10 novembre 2020, le tribunal judiciaire de Bordeaux a :

- débouté les époux [Y] de leur demande,

- dit que chaque partie conservait à sa charge les frais engagés non compris dans les dépens,

- condamné in solidum les époux [Y] aux dépens.

Par déclaration électronique en date du 3 février 2021, les époux [Y] ont interjeté appel du jugement.

Dans leurs dernières conclusions en date du 26 mars 2024, les époux [Y] demandent à la cour, sur le fondement des articles 1224 et suivants, 1602, 1603, 1604, 1625, 1641, 1642 et 1644 du code civil :

- de réformer la décision entreprise en toutes ses dispositions,

- de prononcer en conséquence la résolution de la vente intervenue entre eux, acquéreurs, et les époux [V], vendeurs, à titre principal sur le fondement de la garantie des vices cachés ; à titre subsidiaire sur le fondement de la garantie de conformité de la vente,

encore plus subsidiairement,

- de prononcer la nullité de la vente sur le fondement du vice du consentement, et plus exactement pour dol,

en tout état de cause,

- de dire que les vendeurs ont manqué à leurs obligations contractuelles ou précontractuelles sur le fondement des articles 1104 ou 1602 du code civil,

- d'ordonner la restitution du bateau objet de la vente en date du 1er avril 2016 par les époux [Y],

- d'ordonner la restitution de la somme de 11 000 euros par les époux [V] et les condamner en tant que de besoin à payer cette somme avec intérêts au taux légal à

compter de la mise en demeure en date du 5 mai 2016,

- de condamner les époux [V] à leur payer la somme de 2 629,05 euros au titre de leur préjudice financier et 8 000 euros au titre de leur préjudice de jouissance,

- de les condamner à leurs payer la somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- de les condamner aux entiers dépens de l'instance, en ce compris les frais d'expertise réglés par leurs soins et ceux de la procédure en référé, toutes taxes comprises.

Dans leurs dernières conclusions en date du 20 juillet 2021, les époux [V] demandent à la cour, sur le fondement des articles 1604, 1641 et 1137 du code civil :

à titre principal,

- de confirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions,

en conséquence,

- de débouter les époux [Y] de leur demande de résolution de la vente, principalement sur la garantie des vices cachés, subsidiairement sur le défaut de délivrance conforme,

- de les débouter de leur demande au titre des préjudices financier et de jouissance prétendument subis,

statuant à nouveau,

- de les débouter de leur demande, présentée à titre infiniment subsidiaire, de nullité de la vente pour dol,

à titre subsidiaire (c'est-à-dire si la cour devait ordonner la résolution de la vente du navire survenue entre eux et les époux [Y]) et statuant à nouveau,

- d'ordonner la résolution de la vente conclue entre eux et les époux [A],

- de condamner solidairement les époux [A] à leur restituer la somme de 10 000 euros correspondant au prix d'achat du bateau au mois de mars 2015,

- de les condamner à reprendre possession du bateau à leurs frais,

- de les condamner à les garantir et les relever indemnes des condamnations susceptibles d'être prononcées à leur encontre au bénéfice des époux [Y] du chef des préjudices financier et de jouissance allégués,

à titre infiniment subsidiaire, si la cour devait ordonner la nullité de la vente survenue entre eux et les époux [Y] sur le fondement du dol et statuant à nouveau,

- d'ordonner la nullité de la vente intervenue entre eux et les époux [A],

- de condamner solidairement les époux [A] à leur restituer la somme de 10 000 euros correspondant au prix d'achat du bateau au mois de mars 2015,

- de les condamner à reprendre possession du bateau à leurs frais,

- de les condamner à les garantir et les relever indemnes des condamnations susceptibles d'être prononcées à leur encontre au bénéfice des époux [Y] du chef des préjudices financier et de jouissance allégués,

en tout état de cause,

- de condamner toute partie succombante à leur payer la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre condamnation aux entiers dépens.

Dans leurs dernières conclusions en date du 6 janvier 2022, les époux [A] demandent à la cour, sur le fondement des articles 1134 et suivants anciens et 1641 et suivants du code civil :

à titre principal,

- de dire et juger que le litige relève de la garantie des vices cachés, seul fondement juridique d'une action qui vise la résolution de la vente d'une chose impropre à l'usage auquel on la destine,

- de dire et juger que l'action des époux [Y] contre les époux [V] n'est pas fondée à raison du caractère apparent du vice à la date de la vente de 2016,

dès lors,

- de confirmer le jugement,

subsidiairement,

- de dire et juger que le caractère de gravité du vice à la date de la vente entre eux et les époux [V] en 2015, n'est pas démontré,

dès lors,

- de débouter les époux [V] de leur appel en garantie à leur encontre,

très subsidiairement,

- de dire et juger que la société Charlet Nautic a engagé sa responsabilité contractuelle au titre du défaut de conseil qu'il lui incombait de donner aux époux [A] tant en qualité de vendeur que de professionnel en charge de l'entretien du navire,

dès lors,

- de limiter toute éventuelle condamnation à hauteur de la restitution du prix,

- de condamner la société Charlet Nautic à les relever indemnes et les garantir de toute éventuelle condamnation,

- de condamner les époux [V] in solidum ou tout succombant au paiement d'une somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens.

Dans ses dernières conclusions en date du 10 janvier 2023, la société Charlet Nautic demande à la cour, sur le fondement des articles 1641 et suivants du code civil et L. 5113-5 du code des transports:

- de confirmer le jugement dont appel en toutes ses dispositions,

subsidiairement,

- de déclarer l'action engagée par les époux [A] à son encontre prescrite,

en conséquence,

- de les débouter de toutes leurs demandes,

reconventionnellement,

- de les condamner et tous succombants à lui payer la somme de 5 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- de les condamner aux entiers dépens de première instance et d'appel.

MOTIFS DE LA DÉCISION

I-Sur la résolution de la vente intervenue entre les M. et Mme [Y], acquéreurs, et M. et Mme [V], vendeurs sur le fondement de la garantie des vices cachés, ainsi que l'indemnisation éventuelle des préjudices subis,

1. Sur la garantie des vices cachés

Une expertise judiciaire a eu lieu le 16 janvier 2017 sur le bateau Quicksilver open Flamengo 5.25. M. et Mme [Y], M. [V], ainsi que M. [A] étaient présents sur les lieux. Dans son rapport d'expertise datant du 15 mars 2017, l'expert judiciaire évoque 'la présence de désordres composés en deux parties distinctes.' En effet, il existe 'une cassure de la liaison du plancher intérieur sur le fond de coque et un phénomène d'une réaction chimico/ physique dite d'osmose sur les oeuvres vives.' L'expert judiciaire explique qu'au 'vu de la conception, les dommages structurels intérieurs ont commencé à se propager dès la mise en service du bateau et se sont aggravés dans le temps'. 'La dégradation des éléments structurels à l'intérieur de la coque provient d'un vice de fabrication par un manque de renfort et de matière dans des endroits qui subissent des contraintes importantes en cours de navigation. Le phénomène d'osmose est généré par un défaut d'entretien et de précaution dès la mise à l'eau et en service du bateau.' L'expert judiciaire relève également que 'dans son état actuel, le navire est impropre à la navigation. Des réparations structurelles doivent être effectuées avant une quelconque navigation. Le phénomène d'osmose doit être traité car la réaction chimique dans la masse ne peut qu'aggraver la solidité et la pérennité de la coque, générer des contraintes supplémentaires sur la structure intérieure.' L'expert judiciaire relève que 'le phénomène d'osmose a été visible après le nettoyage du bateau effectué par M. [V].' Il explique également 'qu'une personne attentive peut chercher, analyser et comprendre après avoir pris renseignement auprès de personnes compétentes ou après avoir fait appel à un expert qui effectuera une visite détaillée et donnera son appréciation'.

M. et Mme [Y] veulent obtenir la résolution de la vente conclue avec les époux [V] sur le fondement de la garantie des vices cachés. Les époux [V] font valoir que les conditions de la garantie des vices cachés ne sont pas réunies puisqu'il n'est pas établi que les désordres étaient non apparents au moment de la vente.

Selon l'article 1641 du code civil, le vendeur est tenu de la garantie à raison des défauts cachés de la chose vendue qui la rendent impropre à l'usage auquel on la destine ou qui diminuent tellement cet usage, que l'acheteur ne l'aurait pas acquise ou n'en aurait donné qu'un moindre prix, s'il les avait connus. Pour engager la garantie des vices cachés à l'égard des vendeurs, les acquéreurs doivent démontrer l'existence d'un vice inhérent à la chose, un vice antérieur à la vente, un vice caché à la date de la vente et un vice d'une gravité telle qu'il rend la chose impropre à l'usage auquel elle est destinée.

L'article 1642 du code civil précise que le vendeur n'est pas tenu des vices apparents et dont l'acheteur a pu se convaincre lui-même.

Il résulte de l'article 1643 que le vendeur est tenu de la garantie des vices cachés même s'il n'en avait pas lui-même connaissance sauf s'il a été convenu entre les parties une clause d'exclusion de garantie dans cette hypothèse.

En l'espèce, le tribunal a rejeté la demande de résolution de la vente sur le fondement de la garantie des vices cachés au motif que 'c'est à bon droit que les époux [V], soutiennent que les époux [Y], bien que non professionnels de la navigation, pouvaient par un examen attentif du bateau constater la présence de bullage consécutif aux phénomènes d'osmose ainsi que les fissures dans la cabine, en demandant lors de la visite à faire dégager la cabine de nature à permettre un examen complet de l'état du bateau, sans se contenter des factures remises par le vendeur.' 'Par conséquent, à défaut de rapporter la preuve du caractère caché du vice, les époux [Y] ont été déboutés de leur demande.'

Afin de retenir ou non la présence de vices cachés sur le navire antérieurement à la vente, il convient de déterminer la date de celle-ci. La vente est parfaite entre les parties, et la propriété est acquise de droit à l'acheteur à l'égard du vendeur, dès qu'on a convenu de la chose et du prix. Le versement d'un acompte confirme l'accord de volonté définitif des parties à la vente grâce à un paiement partiel anticipé de la somme due.

En l'espèce, M. et Mme [V] ont posté une annonce sur le site 'Le bon coin' afin de vendre le bateau à moteur de marque Quicksilver modèle Open Flamingo 5.25. Cette annonce constitue une offre de vente. M. et Mme [Y] ont rencontré les époux [V] le 19 mars 2016 afin de réaliser une visite du bateau. La vente a été décidée le jour même pour un montant de 11 000 euros, par le versement d'un acompte de 1000 euros aux époux [V]. Par conséquent, la vente était parfaite entre les époux [Y] et les époux [V] lors de cette visite puisqu'il a été convenu de la chose et du prix et qu'un acompte a été versé.

Au vu de l'expertise judiciaire, les fissures et le phénomène d'osmose existaient antérieurement à la vente intervenue entre les époux [Y] et les époux [V], de sorte que la condition de l'antériorité du vice est caractérisée. Il n'est pas contesté que les fissures et le phénomène d'osmose sont inhérents au bateau, de sorte que la condition d'un vice inhérent à la chose est caractérisée. De plus, l'expertise révèle également que le navire est impropre à la navigation de sorte que la condition de la présence d'un vice d'une telle gravité qu'il rend la chose impropre à l'usage auquel elle est destinée est caractérisée.

S'agissant de la condition de l'apparence du vice lors de la vente, en l'espèce, il n'a été possible de constater le phénomène d'osmose et les désordres structurels que le 1er avril 2016 lorsque M. [Y] est venu prendre possession du bateau. En effet, c'est à ce moment là que la cabine du bateau a été rangée et vidée et que les fissures ont pu être visibles pour les acquéreurs. Or, la vente a été conclue en définitive dès le 19 mars 2016, de sorte qu'il faut apprécier l'existence des vices cachés à ce moment là. Dès lors, le fait que le bateau soit encombré le jour de la vente par la présence de matériel dans la cabine, mais également que la coque du bateau soit immergée permet d'établir que les vices n'étaient pas apparents au moment de la vente. Effectivement, la présence de matériel dans la cabine a empêché M. et Mme [Y] de constater la présence des fissures. Puis, le fait que le bateau soit dans l'eau les ont empêché d'apercevoir le phénomène d'osmose.

De surcroît, il ne peut être exigé de l'acquéreur d'un navire de plaisance qu'il sollicite l'avis d'un spécialiste.

Par conséquent, le navire était bien affecté d'un vice caché et le jugement du tribunal doit être infirmé.

2. Sur les conséquences de la présence d'un vice caché

a) Résolution de la vente

M. et Mme [Y] sollicitent la résolution de la vente sur le fondement de la garantie des vices cachés. Ils demandent la restitution du prix par le vendeur.

Selon l'article 1644 du code civil dans les cas des articles 1641 et 1643, l'acheteur a le choix de rendre la chose et de se faire restituer le prix, ou de garder la chose et de se faire rendre une partie du prix. Le juge n'a pas à motiver sa décision sur ce point (Civ 3ème 20 octobre 2010 n°09-16.788). Ce choix offert à l'acheteur s'exerce sans qu'il ait à le justifier (Civ 1er 5 mai 1982).

En l'espèce, M. et Mme [Y] sollicitent la restitution du prix de vente. Ils restitueront quant à eux le bateau aux vendeurs. C'est un libre choix de l'acheteur. Les parties devront donc restituer la chose et le prix, soit le bateau Quicksilver pour les époux [Y] et la somme de 11 000 euros pour les époux [V].

b) Le préjudice financier et de jouissance

Les époux [Y] sollicitent la réparation de leur préjudice financier à hauteur de 2629, 05 euros TTC, ainsi que de leur préjudice de jouissance à hauteur de 8000 euros. Ils estiment que les époux [V] avaient connaissance des vices affectant le bateau.

Selon l'article 1645 du code civil si le vendeur connaissait les vices de la chose, il est tenu, outre la restitution du prix qu'il en a reçu de tous les dommages et intérêts envers l'acheteur.

En l'espèce, l'expert relève que M. [V] avait connaissance des désordres avant de livrer le bateau à M. et Mme [Y]. Les désordres se sont aggravés au fur et à mesure du temps. Les époux [V] expliquent qu'ils n'avaient absolument pas connaissance des désordres puisque le bateau était en parfait état de fonctionnement, et que celui-ci pouvait naviguer parfaitement.

Or, en utilisant le bateau pendant une durée d'un an, ils ont nécessairement eu connaissance des désordres affectant le bateau et notamment de la présence de fissures dans la cabine puisqu'ils y stockaient du matériel. Cela signifie qu'ils y pénétraient régulièrement. Les époux [V] auraient dû informer les époux [Y] de la présence des fissures dans la cabine, cela justifiant une diminution du prix ainsi que des réparations. Or, les époux [V] ont vendu leur bateau à 11 000 euros, soit 1000 euros de plus que le prix auquel ils l'avaient acheté. La mauvaise fois des époux [V] est donc caractérisée. Par conséquent, les époux [V] peuvent se voir condamner à verser aux époux [Y] des dommages et intérêts en réparation des préjudices subis.

S'agissant du préjudice financier, les époux [Y] ont contracté un prêt afin de financer partiellement l'acquisition du navire. Les frais financiers exposés à raison du prêt s'élèvent à 1267,96 euros. Ils ont également conclu un contrat d'assurance auprès de la société April Marine afin de garantir les risques concernant le bateau pour un montant s'élevant à 1361,09 euros au 26 mars 2024. Dès lors, leur préjudice financier, devant être réparé par les époux [V] s'élève à 2629,05 euros.

S'agissant du préjudice de jouissance, les époux [Y] sollicitent une somme de 8000 euros. Ils expliquent cette somme par le fait qu'ils ont dû louer un bateau afin de pouvoir naviguer. Or, rien n'indique qu'en l'absence de vice, les époux [Y] auraient utilisé leur bateau de manière similaire à celui de location. De plus, aucun contrat de location ou de facture ne sont fournis afin de justifier l'allégation d'une telle somme. De ce fait, s'il est incontestable que les époux [Y] ont subi un préjudice de jouissance du fait de l'impossibilité d'utiliser leur bateau, il convient de réduire le montant à la somme de 4000 euros.

Sur l'appel en garantie des époux [V] à l'encontre des époux [A] sur le terrain de la garantie des vices cachés,

Les époux [V] engagent la responsabilité des époux [A], vendeur du bateau litigieux, sur le terrain de la garantie des vices cachés puisque, selon eux les vices affectant le bateau préexistaient à leur acquisition.

En l'espèce, la vente entre les époux [V] acquéreurs, et les époux [A] vendeurs, est intervenue en mars 2015 pour un montant de 10 000 euros, bateau vendu par la suite en 2016 aux époux [Y] pour un montant de 11 000 euros.

L'action récursoire exercée par le vendeur d'un bien affecté d'un vice caché contre son propre vendeur ne peut prospérer que si les conditions de la garantie des vices cachés sont remplies à son égard.

En l'espèce, il n'est pas contesté et il résulte durapport d'expertise, que le phénomène d'osmose ainsi que les dommages structurels intérieurs préexistaient à la vente conclue entre les époux [V] et les époux [A] et étaient inhérents à la chose. Toutefois, les époux [V] ont usé du bateau pendant la période estivale de 2015 sans rencontrer la moindre difficulté. De ce fait, la preuve n'est pas rapportée qu'à la date de la vente conclue entre les époux [V] et [A], le vice dont est affecté le bateau était d'une telle gravité qu'il rendait la chose vendue impropre à son usage. Par conséquent, les conditions pour exercer l'action en garantie des vices cachés par M. et Mme [V] ne sont pas réunies.

Sur l'application de l'article 700 du code de procédure civile et les dépens,

Les époux [V], succombant devant la cour d'appel, seront condamnés aux dépens conformément aux dispositions de l'article 696 du code de procédure civile. Ils seront également condamnés à payer sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile la somme de 3000 euros aux époux [Y] et celle de 3000 € aux époux [A].

Il n'y a pas lieu de faire application de ce texte au profit des autres parties.

PAR CES MOTIFS :

La cour,

Réforme le jugement entrepris et statuant à nouveau,

Prononce la résolution de la vente intervenue entre M. [P] [Y] et Mme [K] [Y], acquéreurs, et M. [E] [V] et Mme [R] [V], vendeurs, sur le fondement de la garantie des vices cachés,

Ordonne la restitution du bateau objet de la vente par M. et Mme [Y],

Ordonne la restitution de la somme de 11 000 euros par M. et Mme [V],

Condamne M. et Mme [V] à payer à M. et Mme [Y] la somme de 2629,05 euros au titre de leur préjudice financier et 4000 euros au titre de leur préjudice de jouissance,

Déboute M. et Mme [V] de leur demande en garantie à l'encontre de M. [W] [A] et Mme [H] [A],

Déboute M. et Mme [V] du surplus de leurs demandes,

Condamne M. et Mme [V] à payer, in solidum, à M. et Mme [Y] la somme de 3000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne M. et Mme [V] à payer, in solidum, à M. et Mme [A] la somme de 3000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne M. et Mme [V] aux entiers dépens de première instance et d'appel.

Le présent arrêt a été signé par Monsieur Jacques BOUDY, président, et par Madame Audrey COLLIN, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier, Le Président,