Livv
Décisions

CA Grenoble, ch. com., 3 octobre 2024, n° 24/01807

GRENOBLE

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Défendeur :

Urssaf Rhône-Alpes

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Figuet

Conseillers :

M. Bruno, Mme Faivre

Avocats :

Me Fraisse, Me Nisol, Me Viel, Me Herpin

T. com. Romans sur Isère, du 23 avr. 202…

23 avril 2024

Faits et procédure

M. [P] [B] [G] a pour activité le commerce d'alimentation spécialisé dans les produits exotiques.

Par acte du 21 février 2024, l'Urssaf Rhône- Alpes l'a assigné devant le tribunal de commerce de Romans sur Isère en redressement judiciaire.

Par jugement du 23 avril 2023, le tribunal de commerce de Romans sur Isère a notamment :

- déclaré la liquidation judiciaire de M. [P] [B] [G],

- fixé provisoirement la date de cessation des paiements au 21 février 2024,

- nommé M. [R] [Y] en qualité de juge commissaire,

- nommé Me [R] [M] en qualité de liquidateur,

- désigné la Scp de Lostalot-Monteillet pour réaliser l'inventaire et la prisée du patrimoine du débiteur,

- déclaré les dépens frais privilégiés de justice.

Par déclaration du 7 mai 2024, M. [P] [B] [G] a interjeté appel de cette décision en toutes ses dispositions.

La clôture de l'instruction a été prononcée le 5 septembre 2024.

Prétentions et moyens de M. [P] [B] [G]

Par conclusions remises le 27 juin 2024, il demande à la cour de :

- infirmer le jugement rendu le 23 avril 2024 par le tribunal de commerce de Romans sur Isère en ce qu'il a :

* déclaré la liquidation judiciaire simplifiée de M. [P] [B] [G],

* fixé provisoirement la date de cessation des paiements au 21 février 2014,

* nommé M. [R] [Y] en qualité de juge commissaire,

* nommé Me [R] [M] en qualité de liquidateur,

* désigné la Scp de Lostalot-Monteillet pour réaliser l'inventaire et la prisée du patrimoine du débiteur,

* invité le comité d'entreprise, le délégué du personnel ou à défaut les salariés à désigner leur représentant et à procéder au dépôt au greffe du procès-verbal d'élection du représentant des salariés,

* fixé au 23 octobre 2024 la date limite de l'examen de la clôture de la procédure, conformément aux dispositions de l'article L.643-9 du code de commerce,

* fixé l'examen de clôture au rôle du tribunal à l'audience d'administration du 21 octobre 2024 à 10h,

* fixé le délai dans lequel le représentant des créanciers devra avoir établi la liste des créances déclarées à quatre mois à compter de la date de parution du jugement déclaratif au bulletin officiel des annonces civiles et commerciales ' BODACC

* dit que la procédure de liquidation judiciaire sera diligentée conformément aux dispositions du code de commerce,

* déclaré les dépens et frais privilégiés de justice et ordonné la notification du présent jugement au débiteur par les soins du greffier de ce tribunal,

Statuant à nouveau,

- juger bien fondé M. [P] [B] [G] de l'entièreté de ses demandes, fins et prétentions,

- juger qu'il n'y a pas lieu à déclarer M. [P] [B] [G] en liquidation judiciaire,

- juger qu'il n'y a pas lieu à déclarer M. [P] [B] [G] en redressement judiciaire

- condamner l'Urssaf Rhône- Alpes au paiement de la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner l'Urssaf Rhône- Alpes aux dépens.

Il fait valoir que :

- il appartient au créancier de prouver que le débiteur est dans l'impossibilité de faire face à son passif exigible avec son actif disponible,

- il n'est pas démontré en l'espèce qu'il se trouve en état de cessation de paiements et que son redressement est impossible,

- aucune mesure d'exécution forcée n'a été diligentée.

Prétentions et moyens de Me [R] [M]

Par conclusions remises le 10 juillet 2024, il demande à la cour de :

- confirmer le jugement déféré en ce qu'il a prononcé la liquidation judiciaire de M. [P] [B] [G] ,

- subsidiairement, prononcer le redressement judiciaire de M. [P] [B] [G],

- tirer les dépens en frais privilégiés de procédure.

Il fait remarquer que :

- le commissaire de justice ayant signifié le jugement a constaté que le local commercial était entièrement vide,

- M. [P] [B] [G] ne dispose pas d'une boîte aux lettres à son nom,

- il y a lieu de s'interroger sur l'effectivité de son activité,

- il ne communique aucun élément sur sa situation comptable, ni prévisionnel,

- les créances déclarées s'élèvent à la somme de 47.494,09 euros,

- elles sont exigibles et anciennes,

- M. [P] [B] [G] est donc bien en état de cessation des paiements,

- le redressement est donc manifestement impossible en l'absence de toute activité,

- M. [P] [B] [G] ne collabore pas depuis le jugement de liquidation judiciaire,

- le jugement doit donc être confirmé.

Prétentions et moyens de l'Urssaf Rhône- Alpes

Par conclusions remises le 25 juillet 2024, elle demande à la cour de :

- débouter M. [P] [B] [G] de l'ensemble de ses prétentions et demandes,

- confirmer le jugement rendu le 23 avril 2024 par le tribunal de commerce de Romans sur Isère en ce qu'il a prononcé l'ouverture d'une procédure de liquidation judiciaire à l'encontre de M. [P] [B] [G],

A titre subsidiaire,

- prononcer l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire à l'encontre de M. [P] [B] [G],

En tout état de cause,

- dire que les dépens seront compris dans les frais privilégiés de la procédure collective de M. [P] [B] [G].

Elle expose que :

- elle a décerné une contrainte le 27 mars 2023 d'un montant de 6.566,42 euros correspondant à des cotisations sur salaires ensuite d'un redressement pour travail dissimulé,

- les deux saisies-attribution qu'elle a fait pratiquer les 23 août et 23 octobre 2023 se sont révélées infructueuses,

- il en résulte que M. [P] [B] [G] ne dispose pas d'un actif disponible pour faire face à son passif exigible et qu'il se trouve en état de cessation des paiements,

- M. [P] [B] [G] était parfaitement informé des poursuites diligentées à son encontre puisqu'il a adressé plusieurs mails au commissaire de justice pour lui annoncer des réglements partiels qu'il n'a jamais effectués,

- le passif déclaré s'élève à la somme totale de 47.494,09 euros résultant de créances anciennes et M. [P] [B] [G] ne démontre pas qu'il dispose d'une trésorerie suffisante pour désintéresser ses créanciers,

- il semble que M. [P] [B] [G] n'exerce aucune activité puisque le commissaire de justice a relaté que le local commercial est vide,

- il n'est pas justifié que le redressement est possible d'autant que M. [P] [B] [G] refuse de collaborer avec les organes de la procédure.

Conclusions du ministère public

Par avis du 2 septembre 2024, il requiert la confirmation du jugement en faisant valoir que le montant important du passif impayé démontre l'état de cessation des paiements et justifie le prononcé de la liquidation judiciaire. Il a repris oralement ses conclusions à l'audience.

Motifs de la décision

En application de l'article L. 681-1 du code de commerce, il est institué une procédure de redressement judiciaire ouverte à tout débiteur qui dans l'impossibilité de faire face au passif exigible avec son actif disponible est en état de cessation des paiements. La procédure de redressement judiciaire est destinée est destinée à permettre la poursuite de l'activité de l'entreprise, le maintien de l'emploi et l'apurement du passif.

Aux termes de l'article L. 640-1 du code de commerce, il est institué une procédure de liquidation judiciaire ouverte à tout débiteur en cessation des paiements et dont le redressement est manifestement impossible.

1) Sur l'état de cessation des paiements

En l'espèce, les créances échues déclarées entre les mains du liquidateur s'élèvent à la somme de 49.067,19 euros dont 35.825 euros déclaré par l'Urssaf à titre privilégié. Ces créances sont anciennes pour une grande partie (contrainte pour des cotisations de février 2022, facture de Promocash du 22 novembre 2022).

Les saisies attribution diligentées par l'Urssaf les 23 août et 12 octobre 2023 se sont révélées infructueuses, les soldes débiteurs des comptes ne permettant pas le réglement des créances.

M. [P] [B] [G] n'a communiqué aucun document au liquidateur et n'a donc pas produit les relevés bancaires réclamés par Me [M] par courrier recommandé avec accusé de réception du 4 juin 2024.

Il reconnaît au demeurant ne pouvoir procéder au règlement de ses dettes puisqu'il indique dans ses conclusions vouloir obtenir un échéancier de l'Urssaf.

En conséquence, M. [P] [B] [G] se trouve en état de cessation des paiements.

2) Sur le redressement du débiteur

Il résulte des actes de commissaire de justice délivrés à M. [P] [B] [G] (signification de contraintes, dénonciation de saisie-attribution, assignation) et du courrier du commissaire-priseur judiciaire qu'au siège de l'entreprise, il n'existe aucune boîte aux lettres au nom de M. [P] [B] [G] (Délices d'Afrique).

Lors de la signification du jugement le 30 avril 2024, le commissaire de justice a constaté qu'aucune personne répondant à l'identification du destinataire de l'acte n'y a son établissement et a noté que l'adresse déclarée correspond à un local commercial avec porte vitrée et vitrine laissant entrevoir que celui-ci est entièrement vide.

M. [P] [B] [G] qui ne collabore pas avec le liquidateur n'a communiqué aucun document comptable relatif à son activité antérieure. Il ne produit aucun prévisionnel .

En l'absence d'activité étayée par des documents, au regard d'un local commercial vide, rien ne permet de considérer qu'une poursuite de l'activité est possible d'autant qu'aucun élément financier ou comptable n'est produit.

Le redressement est donc manifestement impossible. C'est à juste titre que le tribunal a prononcé la liquidation judiciaire de M. [P] [B] [G].

Les dépens seront tirés en frais privilégiés de procédure collective.

PAR CES MOTIFS

La Cour statuant publiquement, contradictoirement, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile, après en avoir délibéré conformément à la loi,

Confirme le jugement rendu le 23 avril 2024 par le tribunal de commerce de Romans sur Isère en toutes ses dispositions soumises à la cour.

Dit que les dépens seront tirés en frais privilégiés de procédure collective.