CA Lyon, 1re ch. civ. A, 3 octobre 2024, n° 20/05720
LYON
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
Heliflex France (SAS)
Défendeur :
Heliflex Tubos e Mangueiras (Sté)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Wyon
Conseillers :
Mme Seitz, M. Gauthier
Avocats :
Me Dumoulin - Adam, Me Lorang Avocats, Me Advaloria, Société d'Avocats
Mme [H] [B] est titulaire de la marque française semi figurative Heliflex n° 3050634, déposée le 5 septembre 2000, en classe 17 désignant les tuyaux et tubes flexibles non métalliques. L'enregistrement de la marque a été renouvelé en 2010 et 2020.
Par contrat du 3 mars 2010, Mme [B] a cédé une licence exclusive à la société à responsabilité limitée Heliflex France, créée en 1970 et dont Mme [B] est la gérante, qui exerce une activité de vente de tuyaux et tubes flexibles en caoutchouc et PVC.
Ce contrat a été publié au Registre national des marques le 24 octobre 2016.
La société de droit espagnol Heliflex Tubos e Mangeiras a été son fournisseur de 2010 à 2014. Elle a procédé, le 3 novembre 2015, au dépôt, notamment pour la France, de la marque internationale Heliflex, enregistrée sous le n° 1295665, en classes 11, 17 et 19.
Le 28 octobre 2016, la société Heliflex France a fait réaliser un procès-verbal de constat, sur Internet, visant notamment à établir l'exploitation du signe Heliflex par la société Heliflex Tubos e Mangeiras.
Par ordonnance du 14 novembre 2016, la société Heliflex France a été autorisée à faire pratiquer une saisie contrefaçon qui a été réalisée, le 15 novembre 2016, sur le stand tenu par la société Heliflex Tubos e Mangeiras à l'occasion du salon « Piscine global ».
Le 17 novembre 2016, la société Heliflex France a fait constater que la société Heliflex Tubos e Mangeiras continuait d'exposer dans les mêmes conditions.
Par acte d'huissier de justice du 14 décembre 2016, Mme [B] et la société Heliflex France ont fait assigner la société Heliflex Tubos e Mangeiras devant le tribunal de grande instance, devenu tribunal judiciaire, de Lyon.
Par jugement du 25 août 2020, le tribunal judiciaire de Lyon a :
- dit que la contrefaçon de la marque Heliflex n° 3050634 se trouve établie au préjudice de Mme [B] ;
- condamné en conséquence la société Heliflex Tubos e Mangeiras à verser à Mme [B] la somme forfaitaire de 10'000 euros au titre de son préjudice patrimonial et celle de 2 000 euros au titre de son préjudice moral ;
- interdit à la société Heliflex Tubos e Mangeiras d'utiliser la dénomination Heliflex associée à la commercialisation, et notamment l'exportation vers la France, de tuyaux, et ce sous astreinte de 100 euros par infraction constatée passé un délai de deux mois à compter de la signification du jugement, pour une durée de trois mois ;
- dit qu'il n'y a pas lieu de se réserver la liquidation judiciaire de l'astreinte ainsi prononcée;
- débouté Mme [B] et la société Heliflex France de leur demande tendant à faire interdiction à la société Heliflex Tubos e Mangeiras de communiquer par tout moyen et sur tout support, y compris Internet, accessible depuis le territoire français sous le nom Heliflex;
- dit que l'atteinte au droit de marque constituant la contrefaçon de la marque Heliflex n° 3050634 n'est pas constituée au préjudice de la société Heliflex France ;
- dit que le dépôt de la marque Heliflex n° 12 95 655 est intervenu en fraude des droits de Mme [B] ;
- ordonné en conséquence le transfert de la marque internationale Heliflex n° 12 95 665 en ce qu'elle désigne la France et pour les :
- « produits en matière plastique (produits semi-finis) destinés à l'industrie »,
- les « flexibles en caoutchouc et tubes et tuyaux non métalliques (y compris les tuyaux flexibles, tubes et tuyaux flexibles renforcés et tubes et tuyaux en polyéthylène), leurs parties et accessoires compris dans cette classe »
- les « tubes et tuyaux rigides non métalliques, leurs parties et accessoires non compris dans cette classe » ;
- débouté Mme [B] de sa demande de transfert de la marque internationale Heliflex n° 12 95 665 en ce qu'elle désigne la France pour les autres produits visés au dépôt ;
- débouté la société Heliflex Tubos e Mangeiras de sa demande de dommages et intérêts formée à titre reconventionnel ;
- condamné la société Heliflex Tubos e Mangeiras à payer à Mme [B] la somme de 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamné la société Heliflex Tubos e Mangeiras aux entiers dépens de l'instance, en ce compris les frais occasionnés par la réalisation des procès-verbaux de saisie contrefaçon, dont distraction au profit de Maître Lorang, avocat au barreau de Lyon ;
- ordonné l'exécution provisoire du jugement ;
- rejeté toute demande plus ample ou contraire des parties.
Par déclaration transmise au greffe le 19 octobre 2020, Mme [B] et la société Heliflex France ont relevé appel de cette décision.
Par déclaration transmise au greffe le 2 décembre 2020, la société Heliflex Tubos e Mangeiras a relevé appel de cette décision.
Par ordonnance du 30 mars 2021, le conseiller de la mise en état a déclaré caduc l'appel de la société Heliflex Tubos e Mangeiras.
Dans leurs dernières conclusions, n° 3, déposées le 8 novembre 2021, Mme [B] et la société Heliflex France demandent à la cour de :
- confirmer le jugement en ce qu'il a :
- dit que la contrefaçon de la marque Heliflex n° 3050634 se trouve établie au préjudice de Mme [B] ;
- interdit à la société Heliflex Tubos e Mangeiras d'utiliser la dénomination Heliflex associée à la commercialisation, et notamment l'exportation vers la France, de tuyaux, et ce sous astreinte de 100 euros par infraction constatée passé un délai de deux mois à compter de la signification du jugement, durée de trois mois ;
- dit que le dépôt de la marque Heliflex n° 3050634 a été fait en fraude des droits de Mme [B]
- ordonné en conséquence le transfert de la marque internationale Heliflex n° 12 95 665 en ce qu'elle désigne la France et pour les :
- « produits en matière plastique (produits semi-finis) destinés à l'industrie »,
- les « flexibles en caoutchouc et tubes et tuyaux non métalliques (y compris les tuyaux flexibles, tubes et tuyaux flexibles renforcés et tubes et tuyaux en polyéthylène), leurs parties et accessoires compris dans cette classe »
- les « tubes et tuyaux rigides non métalliques, leurs parties et accessoires non compris dans cette classe » ;
- débouté la société Heliflex Tubos e Mangeiras de sa demande de dommages et intérêts formés à titre reconventionnel ;
- condamné la société Heliflex Tubos e Mangeiras à payer à Mme [B] la somme de 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- ordonné l'exécution provisoire du jugement ;
- rejeté toute demande plus ample ou contraire des parties.
- réformer le jugement en ce qu'il a :
- condamné en conséquence la société Heliflex Tubos e Mangeiras à verser à Mme [B] la somme forfaitaire de 10'000 euros au titre de son préjudice patrimonial et celle de 2000 euros au titre de son préjudice moral ;
- dit qu'il n'y a pas lieu de se réserver la liquidation judiciaire de l'astreinte ainsi prononcée ;
- débouté Mme [B] et la société Heliflex France de leur demande tendant à faire interdiction à la société Heliflex Tubos e Mangeiras de communiquer par tout moyen et sur tout support, y compris Internet, accessible depuis le territoire français sous le nom Heliflex ;
- dit que l'atteinte au droit de marque constituant la contrefaçon de la marque Heliflex n° 3050634 n'est pas constituée au préjudice de la société Heliflex France ;
- débouté Mme [B] de sa demande de transfert de la marque internationale Heliflex n° 12 95 665 en ce qu'elle désigne la France pour les autres produits visés au dépôt ;
- condamné la société Heliflex Tubos e Mangeiras à payer à Mme [B] la somme de 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- rejeté toute demande plus ample ou contraire des parties.
Statuant à nouveau :
- recevoir Mme [B] et la société Heliflex France en leurs demandes, les déclarer bien fondées et y faisant droit,
- juger que la société Heliflex Tubos e Mangeiras, en déposant le 3 novembre 2015 la marque contrefaisante internationale semi figurative Heliflex désignant la France sous le numéro 1295665 en classe 11,17 et 19, visant notamment : « les produits en matière plastique (produits semi-finis) destinés à l'industrie (') flexible en caoutchouc et tubes et tuyaux non métalliques (y compris tubes et tuyaux flexibles, tubes et tuyaux flexibles renforcés et tubes et tuyaux en polyéthylène) » a commis des actes de contrefaçon par dépôt de marque en violation des droits de Mme [B] et de la société Heliflex France ;
- juger qu'en offrant à la vente, en apportant et en vendant sur tout support de communication des tuyaux en caoutchouc et PVC reproduisant de manière quasi servile la marque antérieure française Heliflex n° 3050634, la société Heliflex Tubos e Mangeiras a commis des actes de contrefaçon par imitation de marque en violation de leurs droits ;
- juger qu'en communiquant sur son site Internet http://heliflex.pt/'!=fr pour offrir la vente des tuyaux en caoutchouc PVC sous la marque antérieure française Heliflex n° 3050634, la société Heliflex Tubos e Mangeiras a commis des actes de contrefaçon par imitation de marque en violation de leurs droits ;
- juger que la société Heliflex Tubos e Mangeiras, en déposant le 3 novembre 2015 la marque contrefaisante internationale semi figurative Heliflex désignant la France sous le numéro 1295665 en classe 11,17 et 19, visant notamment : « les produits en matière plastique (produits semi-finis) destinés à l'industrie (') flexible en caoutchouc et tubes et tuyaux non métalliques (y compris tubes et tuyaux flexibles, tubes et tuyaux flexibles renforcés et tubes et tuyaux en polyéthylène) » a effectué un dépôt de marque frauduleux en violation de leurs droits;
En conséquence :
- interdire à la société Heliflex Tubos e Mangeiras tout usage, importation, exportation, promotion, offre à la vente et vente, sur l'ensemble du territoire français des produits sous le nom « Heliflex », ce sous astreinte de 100 euros par infraction constatée et par jour de retard à compter de la décision à intervenir ;
- interdire à la société Heliflex Tubos e Mangeiras de communiquer par tout moyen et sur tout support, y compris sur internet, accessible depuis et sur le territoire français via un site rédigé en langue française sous le nom « Heliflex » et, ce, sous astreinte de 100 euros par infraction constatée et par jour de retard à compter de la signification de la décision à intervenir ;
- condamner la société Heliflex Tubos e Mangeiras à verser à Mme [B] :
- 10'000 euros en réparation du préjudice résultant des actes de contrefaçon par dépôt contrefaisant ;
- 50'000 euros en réparation du préjudice commercial résultant des actes de contrefaçon par usage d'une marque contrefaisante ;
- 10'000 euros en réparation du préjudice résultant du dépôt frauduleux d'une marque contrefaisante ;
- 25 000 euros en réparation du préjudice moral subi ;
- condamner la société Heliflex Tubos e Mangeiras à verser à la société Heliflex France :
- 10'000 euros en réparation du préjudice résultant des actes de contrefaçon par dépôt contrefaisant ;
- 150'000 euros en réparation du préjudice commercial résultant des actes de contrefaçon par usage d'une marque contrefaisante ;
- 20'000 euros en réparation du préjudice résultant du dépôt frauduleux d'une marque contrefaisante ;
- 25 000 euros en réparation du préjudice moral subi ;
- ordonner le transfert immédiat de la marque contrefaisante internationale Heliflex n° 1295665 dans sa partie désignant la France et l'ensemble de ses produits et services au profit de Mme [B] une inscription modificative inhérente à la cession au Registre international des marques aux frais de la société Heliflex Tubos e Mangeiras ;
En tout état de cause :
- débouter la société Heliflex Tubos e Mangeiras de l'intégralité de ses demandes, fins et prétentions ;
- débouter la même de l'intégralité de ses demandes, fins et prétentions formulées en appel incident en application de la décision de caducité du 30 mars 2021 ;
- se réserver la liquidation des astreintes ;
- condamner la société Heliflex Tubos e Mangeiras à leur verser la somme de 10'000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamner la même aux entiers dépens, avec distraction au profit de Maître Lorang, comprenant les frais de constat de huissier de procès-verbaux de saisie contrefaçon.
Dans ses conclusions n° 2 déposées le 14 septembre 2021, la société Heliflex Tubos e Mangeiras demande à la cour de :
A titre principal et d'appel incident :
- infirmer le jugement en ce qu'il a dit que la contrefaçon de la marque Heliflex n°3050634 se trouve établie au préjudice de Mme [B] ;
En conséquence :
- débouter Mme [B] et la société Heliflex France de l'ensemble de leurs prétentions ;
- A titre subsidiaire :
- confirmer le jugement en ce qu'il a :
- dit qu'il n'y a pas lieu de se réserver la liquidation de l'astreinte judiciaire ainsi prononcée ;
- débouté les appelants de leur demande tendant à lui faire interdiction de communiquer par tous moyens et sur tous supports, y compris internet, accessibles depuis le territoire français sous le nom « HELIFLEX » ;
- dit que l'atteinte au droit de marque constituant la contrefaçon de la marque Heliflex n°3050634 n'est pas constituée au préjudice de la société Heliflex France ;
- débouté Mme [B] de sa demande de transfert de la marque internationale HELIFLEX n° 12 95 665 en ce qu'elle désigne la France pour les autres produits visés au dépôt ;
- rejeté toute demande plus ample ou contraire des parties ;
En conséquence, débouter Mme [B] et la société Heliflex France de l'ensemble de leurs prétentions ;
- en tout état de cause :
- condamner solidairement les appelants à lui verser la somme de 10 000 euros à titre de dommages-intérêts ;
- condamner solidairement les mêmes à lui payer la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.
L'instruction a été clôturée par ordonnance du 9 novembre 2021.
Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, il y a lieu de se reporter aux conclusions des parties ci-dessus visées, pour un plus ample exposé de leurs prétentions et moyens.
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MOTIFS DE LA DECISION
Sur la recevabilité de l'appel incident de la société Heliflex Tubos e Mangeiras
Les appelantes soutiennent qu'en raison de ce que l'appel principal de la société Heliflex Tubos e Mangeiras a été déclaré caduc par ordonnance du conseiller de la mise en état du 30 mars 2021, celle-ci ne serait pas recevable en son appel incident.
Cependant, outre le fait que les appelantes ne formulent pas de prétention d'irrecevabilité de l'appel incident dans leurs conclusions, il convient de rappeler que si l'article 911-1 du code de procédure civile interdit, en son alinéa 3, à l'appelant, dont la déclaration a été frappée de caducité ou dont l'appel a été déclaré irrecevable, de réitérer un appel principal contre le même jugement et à l'égard de la même partie, et interdit, en son alinéa 4, à l'intimé qui n'a pas formé d'appel incident ou provoqué dans les délais requis ou dont l'appel incident ou provoqué a été déclaré irrecevable, de former un appel principal, il ne fait pas obstacle à ce que l'appelant dont la déclaration d'appel a été frappée de caducité, devenu intimé sur un appel principal limité du même jugement, de critiquer à nouveau la disposition du jugement lui faisant grief en formant un appel incident.
Dès lors, la recevabilité de l'appel incident formé par la société Heliflex Tubos e Mangeiras ne peut être contestée.
Il sera à cet égard relevé que, aux termes du dispositif de ses conclusions, l'intimée demande l'infirmation du jugement en ce qu'il a retenu qu'une contrefaçon était établie au préjudice de Mme [B] et que, en conséquence, celle-ci soit déboutée de l'ensemble de ses demandes. Elle demande la confirmation du jugement, en ce qu'il a rejeté les demandes plus amples ou contraires des parties et sollicite en conséquence le rejet des demandes de la société Heliflex France.
Sur la portée de l'appel principal formé par Mme [B] et la société Heliflex France
Il convient de relever que les appelantes, dans le dispositif de leurs écritures, qui seul lie la cour quant aux prétentions sur lesquelles elle doit statuer en application de l'article 954 du code de procédure civile, demande à la fois de confirmer et d'infirmer le jugement en ce qu'il a rejeté les demandes plus amples ou contraires des parties et en ce qu'il a condamné la société Heliflex Portugal à leur payer la somme de 4 000 euros.
Ces chefs de dispositif du jugement sont visés dans la déclaration d'appel.
Sur le premier de ces chefs dispositif contradictoires (rejet des demandes plus amples ou contraires), dans la mesure où les appelants demandent par ailleurs à la cour de réformer le jugement sur le montant des sommes qui leur ont été allouées et présentent des prétentions à cet égard et que, dans le corps des écritures, elles énumèrent les chefs de dispositif dont elles demandent la confirmation (p. 11 et 12) sans mentionner le chef de dispositif litigieux, dont il est seulement mentionné la réformation, il y a lieu de considérer qu'il s'agit d'une erreur purement matérielle du dispositif des conclusions.
Il sera ainsi considéré que les appelantes sollicitent la réformation du jugement, en ce qu'il a rejeté les demandes plus amples ou contraires des parties et notamment le surplus de leurs demandes indemnitaires.
En ce qui concerne le second de ces chefs dispositif (article 700), la contradiction figure tant dans le dispositif que dans le corps des écritures.
De cette contradiction, la cour ne peut déduire être saisie d'une demande d'infirmation.
Le jugement ne pourra, dès lors, qu'être confirmé de ce chef.
Sur la contrefaçon de marque
Il convient de rappeler que la société Heliflex soutient dans son appel principal que la contrefaçon doit être retenue également à son égard et que la société Heliflex Tubos, dans son appel incident, conteste toute contrefaçon, tant à l'égard de la société Heliflex France que de Mme [B].
À titre infirmatif, l'intimée soutient ainsi que l'action en contrefaçon engagée ne vise pas l'origine des produits mais vise simplement à éliminer un concurrent qui était autrefois un partenaire d'affaires.
Elle conteste toute contrefaçon de sa part.
Elle fait état de ce qu'elle a été immatriculée en 1969 alors que la société Heliflex France l'a été en 1979 et qu'elle a utilisé la dénomination Heliflex en premier.
Elle argue de ce qu'elle a déposée la marque Heliflex en 1982.
Elle se prévaut de disposer d'une dénomination sociale antérieure à la marque invoquée par les appelants.
Elle soutient qu'en raison des liens économiques entre les parties, une marque enregistrée et une dénomination sociale peuvent coexister sans entraîner de risque de confusion sur l'origine des produits.
Elle écarte toute confusion dans l'esprit du public, en l'absence de similitudes entre les produits. Elle se prévaut à cet égard des liens économiques entre les parties, les produits ayant été fabriqués par elle et distribués par la société Heliflex France, et de la connaissance par le consommateur du domaine respectif des sociétés.
Elle indique que la société appelante commercialise des tuyaux flexibles en VPC avec spire de renfort, pour résister aux termites tandis qu'elle-même fabrique des tuyaux transparents pour les piscines.
Elle reproche au jugement de ne pas tenir compte des différences visuelles significatives entre les deux marques.
À titre confirmatif, les appelantes écartent tout droit antérieur détenu par la société portugaise pouvant être liée à sa dénomination sociale et tout effet au dépôt d'une marque portugaise Heliflex et à la fabrication par le passé des produits par l'intimée et les liens économiques qui existaient alors entre les deux sociétés.
Elle souligne que la société Heliflex a été créée en 1970.
Au visa de l'article L. 711-1 (devenu 711-3) du code de la propriété intellectuelle, elles soutiennent que la société portugaise a déposé un signe portant atteinte aux droits antérieurs de Mme [B] et à ceux de sa licenciée, la société Heliflex France, ce qui constitue des agissements contrefaisants, par dépôt, à leur égard puisque les signes sont similaires, sur le plan visuel, phonétique et intellectuel, concernent des produits identiques, similaires ou fortement connexes, ce qui risque de créer une confusion dans l'esprit du consommateur et, ce, d'autant plus fortement que les parties ont été en relations commerciales par le passé.
Elles soutiennent, concernant l'impression visuelle des marques, que c'est l'impression d'ensemble qui importe et que le critère de la confusion s'évalue en fonction d'un consommateur d'attention moyenne et lorsque ce dernier ne dispose pas des marques sous les yeux et en garde un souvenir imparfait.
Au visa des articles L. 716-1 (devenu L. 716-4) et L. 716-3 du code de la propriété intellectuelle, elles se prévalent également de ce que l'intimé a commis des actes de contrefaçon par usage contrefaisant, caractérisés par le procès-verbal de saisie-contrefaçon du 17 novembre 2016, qui établit que l'intimée a fait usage de la marque contrefaisante dans la vie des affaires, en offrant à la vente sur le territoire national des tuyaux plastiques à destination du marché français reproduisant la marque antérieure et en communiquant, diffusant et faisant la promotion, des produits qu'elle vendait.
Elles soutiennent à cet égard que l'intimée utilise un signe similaire à la marque antérieure, que les produits étaient identiques ou similaires, comme ayant la même nature, la même fonction, la même destination et la même utilisation.
Les produits en cause et les signes en cause étant strictement identiques, elles réfutent que le consommateur moyen ait pu distinguer les domaines respectifs des sociétés, qui évoluent dans le même secteur économique des tuyaux, et que les marques soient réputées ou notoires.
Elles considèrent que les liens économiques passés entre les parties ajoutent au risque de confusion et qu'il en résulte une erreur sur l'origine du produit.
Elles approuvent le tribunal d'avoir retenu une confusion par risque d'association.
Sur ce,
Selon l'article L. 716-1 du code de la propriété intellectuelle, en sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2019-1169 du 13 novembre 2019, l'atteinte portée au droit du propriétaire de la marque constitue une contrefaçon engageant la responsabilité civile de son auteur. Constitue une atteinte aux droits de la marque la violation des interdictions prévues aux articles L. 713-2, L. 713-3 et L. 713-4.
L'article L. 713-3, en sa rédaction applicable au litige, dispose que sont interdits, sauf autorisation du propriétaire, s'il peut en résulter un risque de confusion dans l'esprit du public:
a) La reproduction, l'usage ou l'apposition d'une marque, ainsi que l'usage d'une marque reproduite, pour des produits ou services similaires à ceux désignés dans l'enregistrement;
b) L'imitation d'une marque et l'usage d'une marque imitée, pour des produits ou services identiques ou similaires à ceux désignés dans l'enregistrement.
En cas d'imitation de la marque, par un usage du signe litigieux effectué sans le consentement de son titulaire, prenant place dans la vie des affaires et concernant des produits ou services identiques ou similaires à ceux pour lesquels la marque opposée a été enregistrée, il résulte des textes susvisés qu'il y a lieu d'opérer une comparaison d'ensemble des signes en présence, en fonction de leurs éléments distinctifs et dominants en se plaçant au moment où s'opère le choix entre les différents produits mise sur le marché vis-à-vis d'un consommateur normalement informé et raisonnablement attentif et avisé.
Par ailleurs, il résulte des articles L. 713-2, L. 713-3 et L. 716-1 du code de la propriété intellectuelle, tels qu'interprétés à la lumière de la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE, arrêt du 3 mars 2016, Daimler, C-179/15, points 26 et 27) que la demande d'enregistrement d'un signe en tant que marque ne constitue pas un acte de contrefaçon.
En l'espèce, au regard de ce qui précède, il doit être retenu que la demande des appelantes visant à ce que soit retenue la contrefaçon par le seul dépôt de la marque litigieuse doit être rejetée.
Le tribunal n'ayant dans son jugement pas statué sur une telle contrefaçon, pourtant invoquée en première instance, il n'y a pas lieu à infirmation de ce chef.
Concernant la contrefaçon par usage, le principe de territorialité de la marque ne permet pas de considérer comme opérant le fait que l'intimée ait déposée une marque Heliflex en Espagne en 1982. Au demeurant, elle ne justifie pas de son maintien au moment ou Mme [B] a déposé sa marque en France en 2000, étant rappelé que celle-ci soutient, sans être contredite, que cette marque a expiré.
De la même manière, il est sans emport que la société portugaise ait eu une dénomination sociale comportant le terme Heliflex, soit quelques mois avant la société française ou jusqu'au dépôt de la marque par Mme [B].
A cet égard, c'est la validité de la marque internationale, seconde, déposée le 3 novembre 2015 qui est en litige et non celle de la marque première déposée par Mme [B].
Il sera relevé en outre que si l'existence des relations économiques entre les parties est un fait constant, l'appelante fait état, sans être contredite, d'une cessation de l'accord commercial le 2 décembre 2014, soit avant le dépôt de la marque seconde.
C'est par des motifs pertinents, qui répondent aux conclusions d'appel et que la cour approuve, que le tribunal a retenu, en fonction de la classe 17 pour laquelle la marque première a été déposée, que la société portugaise commercialisait sous la marque seconde des produits identiques, s'agissant de tuyaux, ou produits similaires, s'agissant de flexibles, à ceux commercialisés par la société française.
Il résulte en outre suffisamment des deux procès-verbaux de constats d'huissiers, que les appelantes ont fait établir les 28 octobre et 17 novembre 2016 que l'intimée a fait usage du signe litigieux dans la vie des affaires.
Par ailleurs, le tribunal sera pareillement approuvé en ce qu'il a relevé les similitudes entre la marque première et la marque seconde, en considérant que les éléments figuratifs composant la marque semi-figurative déposée par Mme [B] étaient secondaires par rapport à l'élément verbal « Heliflex », ce qui constitue un néologisme commun aux deux marques et qui, en ce qu'il est particulièrement mis en valeur par une représentation sur fond rouge, constitue l'élément dominant de la marque arguée de contrefaçon.
A considérer les deux marques, prises en leur ensemble, il y a lieu de confirmer le jugement en ce qu'il a retenu l'existence de similitudes.
En raison de cette similitude et de l'application de la marque seconde sur des produits identiques ou similaires à ceux protégés par la marque première, il y a lieu également de retenir l'existence d'un risque de confusion dans l'esprit d'un consommateur normalement informé et raisonnablement attentif et avisé, ce qui porte atteinte à la fonction de la marque première.
Contrairement à ce que soutient l'intimée, l'existence de liens économiques entre les parties, ayant cessé avant le dépôt de la marque litigieuse, ne pouvait qu'accroître le risque d'association et en conséquence celui de confusion du consommateur quant à l'origine des produits.
Par ailleurs, c'est sans offre de preuve que l'intimée soutient que ses produits seraient destinés à une clientèle distincte de celle de la société française ou qu'elle disposerait auprès du public français d'une renommée telle qu'aucune confusion ne soit possible, étant en outre rappelé que la marque litigieuse ne porte pas mention de ce que la société titulaire était portugaise.
Le jugement sera ainsi approuvé en ce qu'il a retenu une contrefaçon par usage au préjudice de Mme [B].
En ce qui concerne la société Heliflex France, il sera rappelé que l'article L. 716-5, en sa rédaction applicable au litige, prévoit que l'action civile en contrefaçon est engagée par le propriétaire de la marque. Toutefois, le bénéficiaire d'un droit exclusif d'exploitation peut agir en contrefaçon, sauf stipulation contraire du contrat si, après mise en demeure, le titulaire n'exerce pas ce droit.
Par ailleurs, toute partie à un contrat de licence est recevable à intervenir dans l'instance en contrefaçon engagée par une autre partie afin d'obtenir la réparation du préjudice qui lui est propre.
En l'espèce, il doit être rappelé qu'il est constant que la société Heliflex France est titulaire d'un contrat de licence exclusive conclu le 3 mars 2010, publié le 24 octobre 2016.
La titulaire de la marque première ayant engagé une action en contrefaçon contre l'intimé, la société ne peut agir sur le fondement de cette action.
La demande visant au constat de la contrefaçon au détriment de la société Heliflex France ne peut, dès lors, être accueillie et le jugement sera confirmé de ce chef.
Sur la revendication de la marque contrefaisante
A titre partiellement infirmatif, au visa de l'article L. 712-6 du code de la propriété intellectuelle, les appelantes soutiennent qu'il est établi que l'intimée avait connaissance des droits et de l'usage antérieur de la marque première et qu'elle a voulu leur nuire, puisqu'elle a utilisé cette marque pour des tubes ou des tuyaux, et a profité de la confusion provoquée dans l'esprit du public, de sorte que la fraude est caractérisée.
Elles considèrent que, à tout le moins, l'intimée a eu l'intention de s'insérer dans le sillage de la marque antérieure.
En conséquence, Mme [B] demande la confirmation du jugement, en ce qu'il lui accordé le transfert de la marque pour certains produits mais sollicite l'infirmation du jugement pour ne pas avoir transféré la marque dans sa totalité, en raison de ce que les produits libellés dans le dépôt frauduleux sont identiques, fortement similaires et connexes à ceux libellés dans le dépôt antérieur.
À titre infirmatif, l'intimée conteste tout caractère frauduleux à son dépôt de marque, puisque celle qui est invoquée par les appelantes a été déposée en méconnaissance de ses propres droits de propriété industrielle. Elle écarte toute possibilité de transfert de marques.
Sur ce,
Selon l'article L. 712-6 du code de la propriété intellectuelle , si un enregistrement a été demandé soit en fraude des droits d'un tiers, soit en violation d'une obligation légale ou conventionnelle, la personne qui estime avoir un droit sur la marque peut revendiquer sa propriété en justice.
La CJUE a dit pour droit que l'existence de la mauvaise foi doit être appréciée globalement, en tenant compte de tous les facteurs pertinents du cas d'espèce et existant au moment du dépôt de la demande d'enregistrement, tels que, entre autres, le fait que le demandeur savait ou aurait dû savoir qu'un tiers utilisait un signe identique ou similaire pour un produit identique ou similaire. Toutefois, la circonstance que le demandeur sait ou doit savoir qu'un tiers utilise un tel signe ne suffit pas, à elle seule, pour établir l'existence de la mauvaise foi de ce demandeur. Il convient, en outre, de prendre en considération l'intention dudit demandeur au moment du dépôt de la demande d'enregistrement d'une marque, élément subjectif qui doit être déterminé par référence aux circonstances objectives du cas d'espèce (CJUE, 11 juin 2009, Chocoladefabriken Lindt & Sprüngli, C-529/07, Rec. p. I-4893, points 37 et 40 à 42 ; 27 juin 2013, Malaysia Dairy Industries, C-320/12, point 36).
Ainsi, il résulte du texte susvisé, interprété à la lumière des articles 3, paragraphe 2, sous d), et 4, paragraphe 4, sous g), de la directive 2008/95/CE du 22 octobre 2008 que, pour établir qu'une marque a été déposée en fraude de ses droits, le tiers doit démontrer, d'une part, que le déposant avait connaissance de l'utilisation par lui d'un signe identique ou similaire au signe déposé en tant que marque, d'autre part, que ce dernier avait l'intention soit de porter atteinte à ses intérêts d'une manière non conforme aux usages honnêtes, soit d'obtenir un droit exclusif à des fins autres que celles relevant des fonctions d'une marque.
En l'espèce, en raison des relations contractuelles entre les parties, entre 2010 et 2014, et de ce que la société portugaise a été ainsi le fournisseur de la société française durant cette période, en vertu d'un accord commercial conclu le 2 décembre 2010 et qui a pris fin le 2 décembre 2014, il ne peut qu'être retenu que l'intimée avait connaissance de la marque déposée en 2000 par l'appelante et que le dépôt litigieux, en 2015, résulte d'une manoeuvre subreptice accomplie en connaissance du droit antérieur de la société française.
Cette connaissance ainsi que l'usage de la marque litigieuse pour des produits identiques et similaires traduit manifestent l'intention de l'intimée d'évincer, à tout le moins partiellement, la société appelante d'une partie du marché sur lequel elle pouvait commercialiser ses produits jusqu'alors.
De surcroît, les appelantes se prévalent en outre de ce que l'intimée a déposée le 23 mars 2021 une demande d'enregistrement de marque semi-figurative européenne ainsi constituée :
Si la régularité de cette marque ne saurait être débattue devant la présente cour, sa similitude avec la marque déposée en 2010 (terme Heliflex, couleur) permet de considérer que le dépôt litigieux de 2015 s'inscrit dans une volonté continue et soutenue de la société portugaise de porter atteinte aux intérêts de la société française et, ce, en raison du caractère contrefaisant, d'une manière non conforme aux usages honnêtes.
Le jugement ne pourra, dès lors, qu'être confirmé en ce qu'il a retenu que le dépôt de la marque international Heliflex n° 3050634 était frauduleux.
En application du texte susvisé, le jugement sera également confirmé en ce qu'il a ordonné le transfert de cette marque, en ce qu'elle désigne la France, au profit de Mme [B] et en ce qu'il a limité ce transfert aux classes n° 17 ( Produits en matières plastiques (produits semi-finis) destinés à l'industrie ; flexibles en caoutchouc et tubes et tuyaux non métalliques (y compris tubes et tuyaux flexibles, tubes et tuyaux flexibles renforcés et tubes et tuyaux en polyéthylène), leurs parties et accessoires compris dans cette classe) et n° 19 (Tubes et tuyaux rigides non métalliques, leurs parties et accessoires compris dans cette classe.) qui, seules, correspondent aux produits qui présentent un lien avec ceux désignés par Mme [B] lors de son dépôt, ce qui ne saurait s'appliquer à la classe 11, pour laquelle la marque litigieuse a été également déposée le 3 novembre 2015.
C'est au demeurant par pure affirmation que Mme [B] soutient que tous les produits libellés dans le dépôt frauduleux sont identiques, fortement similaires et connexes à ceux libellés dans son dépôt antérieur.
L'appel de la société Heliflex, visant à ce que le transfert soit ordonné pour le surplus du périmètre de protection résultant du dépôt litigieux, sera rejeté de ce chef.
Sur les préjudices
À titre infirmatif, sur les montants, et sur le principe à l'égard de la société Heliflex France, les appelantes, au visa de l'article L. 716-14 du code de la propriété intellectuelle, considèrent qu'il y a lieu de distinguer les préjudices découlant du dépôt, de l'usage de la marque contrefaisante et celui lié au dépôt frauduleux.
Elles considèrent que la société Heliflex France est la principale victime des agissements de l'intimée et doit être indemnisée.
Elles font valoir que la contrefaçon par dépôt de la marque a contribué à une dilution de la valeur de la marque et que la perte de valeur qui en résulte doit être indemnisée par l'allocation, à chacune des appelantes, de la somme de 10 000 euros.
Elles soutiennent que la contrefaçon par usage de la marque contrefaisante leur a causé un préjudice commercial, constitué de perte de redevances de licence pour Mme [B] et d'une perte partielle de marché pour la société Heliflex France. Elles demandent, respectivement, à ce titre l'allocation des sommes de 50 000 et 150 000 euros.
Elles arguent de ce qu'elles ont en outre subi un préjudice résultant d'un dépôt frauduleux, dont elles demandent l'indemnisation par une évaluation forfaitaire à 20 000 euros pour la société et 10 000 euros pour Mme [B].
Elles se prévalent par ailleurs d'un préjudice moral, faisant état de ce que les agissements perdurent depuis 2012, et sollicitent à ce titre, chacune, l'allocation des sommes de 25 000 euros.
À titre confirmatif, mais subsidiairement, l'intimée soutient que la demande de la société Heliflex France est incohérente pour soutenir, d'un côté, un risque de confusion, de l'autre, que la marque litigieuse dispose d'une grande valeur patrimoniale et d'une renommée nationale pour justifier de son préjudice. Elle considère que les demandes indemnitaires sont excessives et non justifiées, en ce qui concerne le préjudice commercial.
Elle considère que la demande pour préjudice moral ne repose que sur de simples affirmations.
Sur ce
Les appelantes sollicitent l'indemnisation de leur préjudices à raison du dépôt de marque contrefaisante. Toutefois, comme ci-dessus analysé, dans la mesure où le seul dépôt d'une marque ne peut être considéré comme une contrefaçon, les demandes des appelantes concernant les préjudices qu'elles auraient subis à ce titre, et pour lesquelles elles sollicitent chacune l'allocation de la somme de 10 000 euros, ne peuvent qu'être rejetées.
En ce qui concerne la contrefaçon par usage d'une marque contrefaisante, seule retenue en l'espèce, il sera rappelé comme le tribunal que l'article L. 716-14 du code de la propriété intellectuelle prévoit, en sa rédaction applicable au litige :
« Pour fixer les dommages et intérêts, la juridiction prend en considération distinctement :
1° Les conséquences économiques négatives de la contrefaçon, dont le manque à gagner et la perte subis par la partie lésée ;
2° Le préjudice moral causé à cette dernière ;
3° Et les bénéfices réalisés par le contrefacteur, y compris les économies d'investissements intellectuels, matériels et promotionnels que celui-ci a retirées de la contrefaçon.
Toutefois, la juridiction peut, à titre d'alternative et sur demande de la partie lésée, allouer à titre de dommages et intérêts une somme forfaitaire qui ne peut être inférieure au montant des redevances ou droits qui auraient été dus si le contrefacteur avait demandé l'autorisation d'utiliser le droit auquel il a porté atteinte. »
Il incombe à la partie lésée de rapporter la preuve de l'importance de son préjudice. Le code de la propriété intellectuelle lui permet en outre d'obtenir sur requête les documents nécessaires à l'évaluation de son préjudice par le biais d'une saisie-contrefaçon sur le fondement de l'article L 716-4-7 du même code, ou solliciter de la juridiction saisie toute mesure d'instruction légalement admissible sur le fondement de l'article L 716-4-8.
En l'espèce, et comme cela a été précédemment indiqué, en application de l'article L. 716-5 du code de la propriété intellectuelle, la société Heliflex France ne peut agir en contrefaçon en présence de l'action menée par la titulaire de la marque contrefaite.
En conséquence, elle ne saurait se prévaloir utilement, comme elle le fait, des dispositions de l'article L. 716-14 du code de la propriété intellectuelle pour démontrer l'existence et la teneur du préjudice qu'elle invoque à raison des agissements de l'intimée.
Par ailleurs, si l'article L. 716-5 du même code prévoit en son deuxième alinéa que toute partie à un contrat de licence est recevable à intervenir dans l'instance en contrefaçon engagée par une autre partie afin d'obtenir la réparation du préjudice qui lui est propre, il y a lieu de relever que la société Heliflex France soutient qu'elle a perdu partiellement des parts de marché en faisant notamment état d'une baisse de son chiffre d'affaires entre 2014 et 2015.
Or, il ressort des écritures des appelantes que le contrat de licence exclusive n'a été publié que le 24 octobre 2016. Antérieurement à cette date, il n'était dès lors pas opposable à l'intimée. Il n'est justifié par la société Heliflex France d'aucun élément démontrant l'existence d'un préjudice pour la période postérieure à cette date, étant rappelé en outre que les faits de contrefaçon par usage ont été en outre constatés les 28 octobre et 17 novembre 2016.
Dans ces conditions, il doit être retenu que la société Heliflex France ne fait pas la démonstration de l'existence d'un préjudice postérieur à la date à laquelle elle pouvait se prévaloir des droits issus de son contrat de licence exclusive d'exploitation de la marque.
Il en est tout autant du préjudice moral qu'elle invoque.
Ses demandes indemnitaires ne peuvent dès lors, qu'être rejetées et le jugement sera confirmé de ce chef.
Le préjudice commercial de Mme [B] résulte de son manque à gagner en terme de redevances.
Elle produit le contrat de licence mais celui-ci est expurgé des conditions de rémunération.
Toutefois, pour la période de 2015 à 2016, la société Heliflex France fait état d'une baisse de chiffre d'affaires, de 650 754 euros, suffisamment justifiée par l'attestation de son expert-comptable.
Ce chiffre d'affaires est habituellement un élément de référence - avec un taux moyen de 6% - du montant de la redevance due par le licencié exclusif d'une marque au titulaire de celle-ci.
Dans ces conditions, il y a lieu de faire droit à sa demande d'indemnisation, au titre de son manque à gagner, à hauteur de 39 500 euros.
Le jugement sera réformé de ce chef.
Concernant l'indemnisation du préjudice résultant du dépôt frauduleux, il repose sur la responsabilité civile délictuelle de l'intimée.
Si le caractère frauduleux du dépôt, ci-dessus confirmé, établit la faute de l'intimée, les appelantes ne justifient d'aucun préjudice qui soit distinct du préjudice commercial dont elles se prévalent au titre de la contrefaçon d'usage.
Leurs demandes à ce titre seront, dès lors, rejetées.
Quant au préjudice moral, il convient de relever que le dépôt de marque litigieux fait suite à quatre années de relations économiques entre les parties et que la commercialisation de ses produits par la société portugaise, sous la marque seconde, a nécessairement créé des difficultés dans les conditions d'exploitation de la marque première, ce qui a occasionné une préoccupation indue pour la titulaire de la marque, quant à la pérennité de l'exploitation de celle-ci.
Le jugement sera ainsi confirmé en ce qu'il a alloué la somme de 2 000 euros à ce titre à Mme [B].
Sur les demandes d'interdiction
Les appelantes demandent la confirmation du jugement en ce qu'il a interdit l'utilisation de la dénomination Heliflex à l'intimée mais l'infirmation du jugement en ce qu'il a rejeté l'interdiction de communication par tous moyens et tous supports, considérant que leur demande n'est pas excessive, en fonction du principe de territorialité, et que la communication sur internet en vue de la commercialisation constitue également un usage de la vie des affaires.
En conséquence de la revendication de la marque litigieuse, elles demandent que l'usage de la marque Heliflex soit interdit à l'intimée.
C'est par des motifs pertinents, qui répondent aux conclusions d'appel et que la cour adopte, que le tribunal a prononcé une mesure d'interdiction de commercialisation, sous astreinte, à l'égard de la société portugaise et qu'elle a en revanche écarté la demande d'interdiction de communication, sollicitée de manière itérative par les appelantes, en considération de ce que la marque dont elles se prévalent est française et déposée pour des produits limitativement énumérés.
Le jugement sera confirmé de ce chef.
Sur les autres demandes
L'intimée, invoquant la mauvaise foi des appelantes, sur le fondement de l'article 32-1 du code de procédure civile. Elle réclame à ce titre le versement de la somme de 10 000 euros.
La cour ayant confirmé le principe de sa responsabilité, tant à l'égard de Mme [B] que de la société Heliflex France, sa demande ne pourra qu'être rejetée, étant en outre rappelé que seule la juridiction peut prendre l'initiative de condamner une partie sur le fondement de l'article 32-1 du code de procédure civile.
Le jugement sera confirmé de ce chef.
Il n'y a pas lieu, pour la cour, de se réserver la liquidation de l'astreinte.
L'intimée perd en cette instance et elle devra supporter les dépens d'appel.
Par ailleurs, l'équité commande de condamner l'intimée à payer aux appelantes la somme globale de 10 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
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PAR CES MOTIFS
La cour,
Statuant par arrêt contradictoire, rendu en dernier ressort et par mise à disposition au greffe,
Confirme le jugement, sauf en ce qu'il a :
- condamné la société Heliflex Tubos e Mangueiras à verser à Mme [B] la somme de forfaitaire de 10 000 euros au titre de son préjudice patrimonial ;
L'infirmant de ces chefs et statuant à nouveau :
- condamne la société la société Heliflex Tubos e Mangueiras à verser à Mme [B] la somme de forfaitaire de 39 500 euros au titre de son préjudice patrimonial ;
Y AJOUTANT,
Rejette les demandes de Mme [B] et de la société Heliflex France fondées sur la contrefaçon par dépôt de marque ;
Rejette la demande de la société Heliflex France au titre de l'indemnisation de son préjudice patrimonial et de son préjudice moral ;
Rejette la demande visant à ce que la cour se réserve la liquidation de l'astreinte ;
Condamne la société Heliflex Tubos e Mangueiras à supporter les dépens d'appel, avec distraction au profit de Me Lorang, en application de l'article 699 du code de procédure civile;
Condamne la société Heliflex Tubos e Mangueiras à payer à Mme [B] et la société Heliflex France la somme globale de 10 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et rejette sa demande au titre des frais irrépétibles.