CA Paris, Pôle 4 ch. 5, 24 avril 2024, n° 22/00933
PARIS
Arrêt
Infirmation partielle
PARTIES
Demandeur :
Génie Civil Bâtiment du Centre (SARL)
Défendeur :
Racine (SA)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Jariel
Conseillers :
Mme Delacourt, Mme Szlamovicz
Avocats :
Me Cabanes, Me Couette, Me Lesenechal, Me Pelerin
EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCEDURE
Par acte d'engagement daté du 26 mai 2016 et signé le 12 mai 2017, la SCCV Les parisiennes de [Localité 7], en qualité de maître de l'ouvrage, a engagé une opération de construction d'un ensemble immobilier de cinquante logements, cinquante-deux places de parking en sous-sol et un laboratoire en rez-de-chaussée, sur deux terrains situés [Adresse 3]), pour un montant global et forfaitaire de 2 100 000 euros HT.
Sont notamment intervenues à l'acte de construire :
- la société Génie civil bâtiment du centre (la société GBC) pour le lot n° 1 relatif au gros oeuvre,
- la société Racine, en qualité de maître d'oeuvre d'exécution.
Dès le mois d'avril 2017, des difficultés sont apparues entre les parties ayant donné lieu à de nombreux échanges par lettres recommandées avec demande d'avis de réception.
Le 1er février 2018, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, la SCCV Les parisiennes de [Localité 7] a mis en demeure la société GBC de se mettre en conformité avec les stipulations du marché dans un délai de 10 jours en s'appuyant sur les constatations du maître d'oeuvre notifiées à la société GBC la veille.
Le 19 février 2018, la SCCV Les parisiennes de [Localité 7] a fait établir un constat d'huissier de l'état du chantier.
Le 23 février 2018, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception adressée à la société GBC, la SCCV Les parisiennes de [Localité 7] a résilié le marché qui la liait à la société GBC en déclarant prendre acte de sa défaillance dans l'exécution de ses obligations contractuelles et de l'expiration du délai imparti pour remédier aux difficultés évoquées dans son courrier du 1er février 2018.
Le 27 février 2018, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, la société GBC a contesté les reproches en effectuant un rappel de sa mission.
Le 21 mars 2018, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, la société GBC a mis en demeure la SCCV Les parisiennes de [Localité 7] d'avoir à lui régler les sommes non encore payées ainsi que le solde du compte prorata.
Le 25 juin 2018, elle a établi son mémoire définitif de 129 587,97 euros TTC, incluant 42 900 euros à titre de dédommagement pour rupture abusive.
Le 14 septembre 2018, la SCCV Les parisiennes de [Localité 7] a validé le décompte général définitif faisant état d'un solde dû par la société GBC de 696 475,30 euros.
Le 1er octobre 2018, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, la société GBC a contesté ce décompte et la résiliation du marché.
Le 19 octobre 2018, saisi par la société GBC, le juge des référés du tribunal de grande instance de Paris a ordonné une expertise judiciaire et a désigné pour y procéder M. [G].
Le 30 octobre 2019, l'expert a déposé son rapport en l'état.
Le 19 octobre 2018, la SCCV Les parisiennes de [Localité 7] a fait assigner la société GBC devant le tribunal de grande instance de Créteil, en présence de la société Racine, pour obtenir la somme de 696 475,30 euros.
Le 23 octobre 2018, la société GBC a fait assigner devant le tribunal de grande instance de Paris la SCCV
Les parisiennes de [Localité 7] pour obtenir le paiement des sommes de 86 687,97 euros au titre des prestations réalisées non payées, 42 900 euros au titre du préjudice subi du fait de la résiliation et 72 473,04 euros en vertu de la délégation qui lui a été consentie au titre de la gestion du compte prorata.
Le 16 juillet 2019, le juge de la mise en état du tribunal de grande instance de Créteil s'est dessaisi au profit du tribunal de grande instance de Paris.
Les deux instances ont fait l'objet d'une jonction le 2 décembre 2019.
Par jugement du 30 novembre 2021, le tribunal judiciaire de Paris a statué en ces termes :
Condamne la SCCV Les parisiennes de [Localité 7] à payer à la société GBC la somme de 83 236,38 euros TTC au titre du solde du marché ;
Condamne la SCCV Les parisiennes de [Localité 7] à payer à la société GBC la somme de 2 145 euros TTC au titre de la perte de marge engendrée par la résiliation du contrat ;
Dit que les sommes précitées seront majorées du taux d'intérêt appliqué par la banque centrale européenne à son opération de refinancement la plus récente majoré de 10 points de pourcentage à compter 27 juillet 2018 ;
Déboute société GBC du surplus de ses demandes ;
Déboute la SCCV Les parisiennes de [Localité 7] de l'ensemble de ses demandes ;
Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires ;
Dit n'y avoir lieu à condamnation en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamne la SCCV les parisiennes de [Localité 7] aux entiers dépens ;
Autorise le recouvrement direct des dépens dans les conditions prévues à l'article 699 du code de procédure civile ;
Ordonne l'exécution provisoire du présent jugement.
Le 7 janvier 2022, la société GBC a interjeté appel du jugement, intimant devant la cour :
- la société Racine,
- la SCCV Les parisiennes de [Localité 7].
(n° RG 22/00933)
Par déclaration du 20 janvier 2022, la SCCV Les parisiennes de [Localité 7] a interjeté appel du même jugement, intimant devant la cour :
- la société GBC,
- la société Racine.
(n° RG 22/01885)
EXPOSE DES PRÉTENTIONS DES PARTIES
Dans ses conclusions d'appelant notifiées dans le dossier RG 22/00933 par RPVA le 1er avril 2022, la société GBC demande à la cour, au visa des articles 1103, 1336, 1338 et 1793 du code civil, de :
Réformer le jugement critiqué en ce qu'il a débouté la société GBC des demandes suivantes :
- impayé de 3 451,59 euros dû au titre des prestations réalisées (point 1.1 du jugement),
- défaut d'amortissement des frais généraux évalués à 3 005 euros (frais de chantier), 4 290 euros (frais de siège) et 4 290 euros (autres frais généraux) au titre de l'indemnisation de la résiliation fautive (point 1.2 du jugement),
- gestion du compte prorata pour 72 473,04 euros TTC (point 1.3 du jugement),
- frais irrépétibles (point III c du jugement),
Par voie de conséquence :
Condamner la SCCV Les parisiennes de [Localité 7] à lui verser une somme de 86 687,97 euros TTC au titre des prestations réalisées (après application donc de la TVA), assortie des intérêts moratoires calculés à compter du 27 juillet 2018, au taux d'intérêt appliqué par la Banque centrale européenne à son opération de refinancement la plus récente majoré de 10 points de pourcentage,
Condamner la SCCV Les parisiennes de [Localité 7] à lui verser une somme de 8 627,39 euros au titre du préjudice subi du fait de la résiliation (somme donc non soumise à TVA), assortie des intérêts moratoires calculés à compter du 27 juillet 2018, au taux d'intérêt appliqué par la Banque centrale européenne à son opération de refinancement la plus récente majoré de 10 points de pourcentage,
Condamner la SCCV Les parisiennes de [Localité 7] à lui verser une somme de 72 473,04 euros TTC, en vertu de la délégation qui lui a été consentie au titre de la gestion du compte prorata, assortie des intérêts moratoires calculés à compter du 26 avril 2018, au taux d'intérêt appliqué par la Banque centrale européenne à son opération de refinancement la plus récente majoré de 10 points de pourcentage,
Condamner la SCCV du Bourdonnais aux dépens et à lui verser une somme de 15 000 euros au titre des frais visés à l'article 700 du Code de procédure civile.
Dans ses conclusions notifiées dans le dossier RG 22/01885, par voie électronique le 7 octobre 2022 la SCCV Les parisiennes de [Localité 7] demande à la cour de :
Infirmer le jugement du tribunal judiciaire de Paris du 30 novembre 2021 en ce qu'il a :
" - condamné la SCCV Les parisiennes de [Localité 7] à payer à la société GCBC la somme de 83 236,38 euros TTC au titre du solde du marché,
- condamné la SCCV Les parisiennes de [Localité 7] à payer à la société GCBC la somme de 2 145 euros TTC au titre de la perte de marge engendrée par la résiliation du contrat ;
- dit que les sommes précitées seront majorées du taux d'intérêt appliqué par la banque centrale européenne à son opération de refinancement la plus récente majoré de 10 points de pourcentage à compter 27 juillet 2018 ;
- débouté la SCCV Les parisiennes de [Localité 7] de l'ensemble de ses demandes ;
- débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires ;
- dit n'y avoir lieu à condamnation en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamné la SCCV Les parisiennes de [Localité 7] aux entiers dépens ;
- autorise le recouvrement direct des dépens dans les conditions prévues à l'article 699 du code de procédure civile ;
- ordonne l'exécution provisoire du présent jugement ".
Plus généralement,
Infirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions ;
Statuant à nouveau :
Sur les demandes de la société GBC,
Dire et juger la SCCV Les parisiennes de [Localité 7] recevable et bien fondée en ses demandes,
Dire et juger que la société GBC a commis de nombreuses fautes dans l'exécution de son marché et que ces fautes impliquent que cette société soit condamnée à verser à la SCCV Les parisiennes de [Localité 7] les sommes dues en vertu du décompte général définitif approuvé par le maître d'oeuvre et la maîtrise d'ouvrage, et à l'indemniser de l'ensemble des préjudices qu'elle a subi du fait de cette résiliation et de l'exécution fautive du marché.
Dire et juger que la SCCV Les parisiennes de [Localité 7] est bien fondée à solliciter le versement de la somme de 696 475,30 euros selon le décompte général définitif vérifié par le maître d'oeuvre,
Constater que la SCCV Les parisiennes de [Localité 7] n'entend pas réclamer dans le cadre de la présente instance les sommes relatives aux poutres et réseaux sous dallage pour lesquels une expertise judiciaire a été sollicitée par la société GCBC et qu'elle réserve ses droits quant aux sommes qu'elle est fondée à réclamer à ce titre,
Dire et juger les demandes formulées par la société GCBC à l'encontre de la SCCV Les parisiennes de [Localité 7] sont mal fondées, et, y faisant droit,
Rejeter les demandes de la société GCBC,
Condamner la société GCBC à verser à la SCCV Les parisiennes de [Localité 7] la somme de 696 475,30 euros,
Par conséquent
Débouter la société GCBC de toutes ses demandes, fins et conclusions ;
A titre subsidiaire,
Dans l'hypothèse où par impossible la cour viendrait à entrer en voie de condamnation à l'encontre de la SCCV Les parisiennes de [Localité 7],
Dire et juger que la responsabilité de la société Racine, maître d'oeuvre d'exécution est engagée,
En conséquence,
Condamner la société Racine à garantir la SCCV Les parisiennes de [Localité 7] de toutes condamnations à intervenir à son encontre au titre des demandes formulées par la société Racine,
- condamner la société Racine à indemniser la SCCV Les parisiennes de [Localité 7] des préjudices subis dans le cadre de l'exécution du marché de travaux de la société GCBC, pour le montant réclamée à la société GCBC, à savoir la somme de 696 475, 30 euros.
Débouter la société racine de ses demandes en tout état de cause,
Condamner la société GCBC et la société Racine à payer à la SCCV Les parisiennes de [Localité 7], la somme de 10 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Condamner la société GCBC et la société Racine aux entiers dépens, qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Dans ses conclusions notifiées dans le dossier RG 22/01885, par voie électronique le 6 janvier 2023, la société GBC demande à la cour de :
Confirmer le jugement critiqué en ce qu'il a :
- condamné la SCCV Les parisiennes de [Localité 7] à lui payer une somme de 83 236,38 euros TTC
- condamné la SCCV Les parisiennes de [Localité 7] à lui payer la somme de 2 145 euros TTC au titre de la perte de marge engendrée par la résiliation du contrat ;
- dit que les sommes précitées seraient majorées du taux d'intérêt appliqué par la banque centrale européenne à son opération de refinancement la plus récente majoré de 10 points de pourcentage à compter 27 juillet 2018 ;
- débouté la SCCV Les parisiennes de [Localité 7] de l'ensemble de ses demandes ;
Réformer le jugement critiqué en ce qu'il a débouté la société GBC des demandes suivantes :
- impayé de 3 451,59 euros dû au titre des prestations réalisées (point 1.1 du jugement),
- défaut d'amortissement des frais généraux évalués à 3 005 euros (frais de chantier), 4 290 euros (frais de siège) et 4 290 euros (autres frais généraux) au titre de l'indemnisation de la résiliation fautive (point 1.2 du jugement),
- gestion du compte prorata pour 72 473,04 euros TTC (point 1.3 du jugement),
- frais irrépétibles (point III c du jugement),
Par voie de conséquence :
Condamner la SCCV Les parisiennes de [Localité 7] à lui verser une somme de 86 687,97 euros TTC au titre des prestations réalisées (après application donc de la TVA), assortie des intérêts moratoires calculés à compter du 27 juillet 2018, au taux d'intérêt appliqué par la banque centrale européenne à son opération de refinancement la plus récente majoré de 10 points de pourcentage,
Condamner la SCCV Les parisiennes de [Localité 7] à lui verser une somme de 8 627,39 euros au titre du préjudice subi du fait de la résiliation (somme donc non soumise à TVA), assortie des intérêts moratoires calculés à compter du 27 juillet 2018, au taux d'intérêt appliqué par la banque centrale européenne à son opération de refinancement la plus récente majoré de 10 points de pourcentage,
Condamner la SCCV Les parisiennes de [Localité 7] à lui verser une somme de 72 473,04 euros TTC, en vertu de la délégation qui lui a été consentie au titre de la gestion du compte prorata, assortie des intérêts moratoires calculés à compter du 26 avril 2018, au taux d'intérêt appliqué par la banque centrale européenne à son opération de refinancement la plus récente majoré de 10 points de pourcentage,
Condamner la SCCV du bourdonnais [sic] aux dépens et à lui verser une somme de 15 000 euros au titre des frais visés à l'article 700 du code de procédure civile.
La société Racine a reçu signification à personne morale de la déclaration d'appel de la SCCV Les parisiennes de [Localité 7], le 14 mars 2022 et signification à personne morale le 10 mars 2022 de la déclaration d'appel de la société GCBC, et n'a pas constitué avocat.
La clôture a été prononcée par ordonnance du 23 janvier 2024 et l'affaire a été appelée à l'audience du 7 février 2024.
A l'issue de l'audience, l'affaire a été mis en délibéré.
MOTIVATION
Sur la jonction
Selon l'article 367 du code de procédure civile, le juge peut, à la demande des parties ou d'office, ordonner la jonction de plusieurs instances pendantes devant lui s'il existe entre les litiges un lien tel qu'il soit de l'intérêt d'une bonne justice de les faire instruire ou juger ensemble.
Au cas d'espèce, il est de l'intérêt d'une bonne justice de prononcer la jonction des instances enregistrées sous les numéros RG 22/01885 et RG 22/00933, sous le numéro le plus ancien soit le RG 22/00933.
Sur le droit applicable
L'entrepreneur a signé l'acte d'engagement le 26 mai 2016 et le maître d'ouvrage l'a régularisé le 12 mai 2017, soit près d'un an après.
Selon l'ordre de service (OS) n° 01 du 26 juillet 2016 dont il est établi qu'il a été porté à la connaissance de la société GBC au plus tard le 27 juillet 2016, le maître d'ouvrage a notifié à l'entrepreneur que la date d'origine du délai contractuel était fixée au 14 avril 2016 et que l'entreprise était invitée à prendre les dispositions nécessaires permettant le démarrage de ses travaux, consécutivement à la prise de possession des lieux le 26 mai 2016.
Compte tenu de la date de signature de l'acte par la société GBC et de la volonté exprimée par le maître d'ouvrage de faire remonter le délai contractuel à la date du 14 avril 2016 ; les dispositions légales applicables en matière contractuelle seront celles antérieures à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016.
Sur la demande de constat
Les demandes de " dire et juger " et visant à " constater " de la SCCV Les parisiennes de [Localité 7] ne saisissent pas la cour de prétentions au sens des articles 4 et 954 du code de procédure civile.
La cour n'en est donc pas saisie.
Sur le solde du prix du marché
Moyens des parties
La société GBC fait valoir qu'elle doit être payée des prestations qu'elle a réalisées, des travaux supplémentaires autorisés par écrit au prix convenu par le maître d'ouvrage dans les ordres de service n° 2, 4 et 8 et d'un impayé sur la situation n° 13.
Elle soutient que cette demande n'est d'ailleurs pas contestée par la SCCV Les parisiennes de [Localité 7].
Elle fournit à ce titre son mémoire définitif adressé au maître d'ouvrage, le 25 juin 2018.
La SCCV Les parisiennes de [Localité 7] sollicite le débouté des demandes de la société GBC mais elle conclut exclusivement sur les fautes commises par la société GBC et ses manquements dans l'exécution du marché justifiant les déductions pratiquées et dont elle demande le paiement.
Réponse de la cour
Selon l'article 1134 du code civil dans sa version antérieure à l'ordonnance précitée, les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites et elles doivent être exécutées de bonne foi.
En application de l'article 1787 du code civil, lorsqu'un architecte ou un entrepreneur s'est chargé de la construction à forfait d'un bâtiment, d'après un plan arrêté et convenu avec le propriétaire du sol, il ne peut demander aucune augmentation du prix, ni sous le prétexte de l'augmentation de la main-d'oeuvre ou des matériaux, ni sous celui de changements ou d'augmentations faits sur ce plan, si ces changements ou augmentations n'ont pas été autorisés par écrit, et le prix convenu avec le propriétaire.
Selon l'acte d'engagement, les travaux du lot n° 1 relatifs au gros oeuvre ont été confiés par la SCCV Les parisiennes de [Localité 7] à la société GBC pour un prix de 2 520 000 euros TTC.
Selon la clause 32 des clauses administratives particulières (CCAP), les prix sont fermes, forfaitaires, non actualisables et non révisables.
La clause 38 du cahier des clauses administratives générales (CCAG) est relative au mémoire et aux décomptes définitifs.
En application du principe de la réparation intégrale du préjudice sans perte ni profit, les éventuelles fautes commises par la société GBC, ne la privent pas du droit à la rémunération correspondant à la partie exécutée de sa mission.
Dès lors, les préjudices, qui pourraient découler des fautes et manquements revendiqués par la SCCV
Les parisiennes de [Localité 7], ne sont pas de nature à faire obstacle au paiement des prestations réalisées par l'entreprise.
Au cas d'espèce, à l'appui de ses prétentions, la société GBC a produit son mémoire définitif indiquant un décompte final de 83 236,38 euros TCC, montant retenu par le premier juge au titre des prestations restant dues.
S'agissant de l'impayé sur la situation n° 13, déjà réclamé devant le tribunal, la société GBC n'apporte aucun élément nouveau alors que cet impayé a été inclus " pour mémoire " dans son mémoire définitif.
La SCCV Les parisiennes de [Localité 7] n'établit pas que la société GBC resterait débitrice d'obligations nées du contrat.
Par suite, elle ne peut se prévaloir du mécanisme de l'exception d'inexécution pour échapper au paiement du solde des prestations de cette société.
En l'absence de contestation utile et d'élément nouveau soumis à son appréciation, la cour estime que le premier juge, par des motifs pertinents qu'elle approuve, a fait une exacte appréciation des faits de la cause et des droits des parties.
Il convient en conséquence de confirmer la décision déférée qui a condamné la SCCV Les parisiennes de [Localité 7] à payer à la société GBC la somme de 83 236,38 euros TTC au titre du solde du marché et dit que cette somme sera majorée du taux d'intérêt appliqué par la banque centrale européenne à son opération de refinancement la plus récente majoré de 10 points de pourcentage à compter 27 juillet 2018, l'application de ce taux d'intérêt n'étant pas contesté.
Sur l'exécution du marché
Moyens des parties
La SCCV Les parisiennes de [Localité 7] prétend que la société GBC a commis de nombreuses fautes dans l'exécution de son marché justifiant que l'entreprise l'indemnise des préjudices qu'elle a subis du fait de la résiliation et de l'exécution fautive du marché.
Pour justifier la résiliation contractuelle et la responsabilité contractuelle, la SCCV Les parisiennes de [Localité 7] fait valoir les défaillances de la société GBC constatées dès janvier 2017, en matière de conformité d'ouvrages, d'inachèvement des travaux, d'effectif insuffisant sur site, de retard.
Elle précise qu'elle a pris acte de la défaillance de la société GBC dans l'exécution des obligations contractuelles et de l'expiration du délai imparti pour prononcer la résiliation du contrat par courrier du 23 février 2018, en application de l'article 49.2 du CCAG.
Elle soutient également que la société GBC n'a pas respecté les règles de l'art dans l'exécution de ses prestations contrairement aux dispositions de l'article 3.2.1.8 du CCAG, ni le calendrier d'exécution contrairement aux dispositions de l'article 3.2.1.10 du CCAG.
La SCCV Les parisiennes de [Localité 7] précise que, selon les dispositions de l'article 17.6 du CCAG, l'entreprise doit respecter le délai général et les dates et les délais partiels qui la concernent.
Elle estime établir la preuve des manquements de la société GBC dans l'exécution du marché au titre des malfaçons nécessitant des reprises, des non-conformités contractuelles, des non-conformités au regard des règles de l'art, des travaux non réalisés, des travaux réalisés avec retard.
Elle soutient que cette exécution est fautive et justifie également ses demandes indemnitaires.
Elle réclame le montant du décompte général définitif établi par le maître d'oeuvre à 696 475, 30 euros TTC au passif de la société GBC et à titre d'indemnisation.
La SCCV Les parisiennes de [Localité 7] réclame les pénalités de retard qui sont applicables en cas de non-respect des délais partiels et elle fait valoir que, dans son courrier du 31 janvier 2018, le gros oeuvre présentait un retard d'exécution de 527 jours pour les bâtiments A et B et de 492 jours pour le bâtiment C et que, dans son décompte définitif, le maître d'oeuvre a retenu 268 jours à 1 279,20 euros la journée, soit une somme de 342 825,60 euros.
Elle argue que les défaillances de la société GBC ont nécessité des reprises par :
- la société EMG construction pour le réseau des eaux pluviales du bâtiment C, la reprise des réseaux sous-dallage du bâtiment C, la reprise des fissures béton avant livraison et la reprise de poutres du sous-sol pour 102 409 euros HT,
- la société Gestivert pour la reprise et l'achèvement des aménagements extérieurs pour 45 917 euros HT.
Elle soutient également des frais divers à hauteur de 128 585,29 euros TTC et le compte interentreprises pour 70 982,40 euros TTC.
La société GBC fait valoir qu'elle n'a commis aucune faute et qu'un retard ne peut fonder une mesure de résiliation que pour autant qu'il ait une réalité contractuelle.
Elle indique que la résiliation est intervenue en l'absence de tout retard contractuel à la date du 23 février 2018, d'autant qu'elle bénéficiait alors d'un délai allant jusqu'au 9 mars 2018 pour lever les dernières réserves signalées lors des opérations préalables à la réception des ouvrages.
Elle conteste précisément les manquements qui lui sont reprochés au titre de l'exécution fautive du marché faisant valoir que les défaillances portent sur des demandes de devis de travaux supplémentaires qui s'expliquent par les lacunes de la société Racine, que les pièces produites émanent du maître d’oeuvre qui est à l'origine des difficultés rencontrées, que des manquements sont reprochés sur des travaux qui ne lui incombaient pas et que d'autres sont des réserves dont elle a assuré la reprise ou qu'elle a contestées.
La société GBC impute au cabinet Racine, maître d'oeuvre d'exécution, l'impréparation du démarrage des travaux, la synthèse, les visas, la direction du chantier.
Elle indique que les prestations VRD n'ont jamais été incluses dans le marché mais faisaient l'objet d'un lot spécifique, comme la plomberie-chauffage-eau chaude-ventilation-meubles de salle de bains et l'électricité.
Elle soutient que le constat d'huissier n'apporte aucun élément technique et qu'en l'absence de lien avec la liste des reproches formulés, il est inexploitable.
Elle s'oppose aux pénalités de retard que la SCCV Les parisiennes de [Localité 7] lui impute sans apporter d'éléments de calcul valable, indiquant que les 299 jours mis en évidence par le maître d'œuvre et ramenés à 268 jours ne sont pas justifiés et que le calcul ne repose sur aucun fondement contractuel.
Elle fait valoir que le délai contractuel n'était pas échu au jour de la résiliation même dans l'hypothèse où le point de départ serait fixé à l'ordre de service (OS) n° 1 délivré le 26 juillet 2016 et ce d'autant que cet OS a été refusé par la société GBC laquelle a sollicité une modification de la date de prise de possession du terrain ainsi qu'une prise en compte de l'absence, à la date de sa notification, des plans " archi recalés " dans l'attente des plans de réservation des autres lots.
Réponse de la cour
Selon l'article 1134 du code civil dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites et elles doivent être exécutées de bonne foi.
Selon l'article 1147 du code civil dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, le débiteur est condamné, s'il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts, soit à raison de l'inexécution de l'obligation, soit à raison du retard dans l'exécution toutes les fois qu'il ne justifie pas que l'inexécution provient d'une cause étrangère qui ne peut lui être imputée, encore qu'il n'y ait eu aucune mauvaise foi de sa part.
La résiliation du marché par la SCCV Les parisiennes de [Localité 7]
Selon la clause 49.2 du CCAG, le marché est résilié de plein droit, sans aucune formalité judiciaire, si l'entrepreneur ne remplit pas ses obligations dans le délai de 10 jours, à compter de la mise en demeure qui lui a été signifiée par lettre recommandée avec demande d'avis de réception ou par acte extrajudiciaire, à compter de la réception de la mise en demeure.
Cette clause résolutoire impose la preuve de l'existence des manquements invoqués et doit être mise en oeuvre de bonne foi (3e Civ., 25 janvier 1983, pourvoi n° 81-12.647, Bull. n° 21).
Par lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 31 janvier 2018, la société Racine a transmis à la société GBC la liste des travaux restant et elle l'a mise en demeure de réaliser ceux-ci sous 10 jours à réception du courrier.
Dans cette lettre, la société Racine a mentionné qu'un état serait établi par ses soins à l'échéance, qu'une réalisation partielle la conduirait à constater l'incapacité de la société GBC à terminer l'opération et que le maître d'ouvrage en tirerait les conséquences au regard de l'article 49.2 du CCAG.
A cette lettre était jointe une liste de 40 points à traiter comprenant 7 non-conformités et 33 travaux restant à réaliser.
Par lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 1er février, le maître d'ouvrage s'est référé à ce courrier du maître d'oeuvre d'exécution pour mettre en demeure la société GBC de se mettre en conformité avec les stipulations du marché dans un délai de 10 jours à défaut de quoi elle serait amenée à constater la résiliation du marché en application de l'article 49.2 du CCAG.
Par lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 22 février 2018, la société Racine a mis en demeure la société GBC de lever ses réserves dans le cadre des opérations préalables (OPR) à la réception des bâtiments B et C pour le 2 mars 2018 pour le bâtiment C et pour le 9 mars 2018 pour le bâtiment B.
La liste des réserves jointes à cette mise en demeure portait sur les points suivants concernant exclusivement le bâtiment B :
- revoir finition becquet, lot C101, logement,
- traiter la fissure du mur de gauche dans le séjour, lot C105,
- boucher le trou derrière le sèche-serviette dans la salle de bains du lot C 106,
- finir le muret sur la terrasse du lot C301,
- faire le passage d'eau dans le support béton du pare-vue sur la terrasse du lot C 301,
- finir le muret sur la terrasse du lot C 302,
- faire le passage d'eau dans le support béton du pare-vue sur la terrasse du lot C302.
Par lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 23 février 2018, la SCCV Les parisiennes de [Localité 7] a notifié à la société GBC qu'elle faisait suite à sa lettre du 1er février 2018 et qu'elle résiliait le marché sur la base du constat d'huissier du 19 février 2018, au motif que l'entreprise s'était montrée défaillante dans l'exécution de ses obligations contractuelles et que le délai qui lui avait été imparti pour remédier aux difficultés évoquées avait largement expiré.
Par lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 27 février 2018, la société GBC a indiqué que l'ensemble des réserves avait été levé sur les deux bâtiments B et C.
La résiliation du marché par le maître d'ouvrage est fondée sur un constat d'huissier du 19 février 2018, antérieur à la mise en demeure de la société GBC par le maître d'oeuvre du 22 février 2022 laquelle accordait un délai à l'entreprise pour finaliser les réserves OPR jusqu'à début mars 2018
Les éventuels manquements de l'entreprise relevés le 19 février 2018 dans le constat d'huissier étaient donc inopérants pour servir de fondement à la résiliation alors même que l'entreprise disposait à compter du 22 février 2018, d'un délai pour finaliser les travaux dans la perspective des opérations préalables à la réception et qu'un état devait être établi à l'expiration de ce délai, par le maître d'oeuvre attestant ou non de leur réalisation.
Ainsi, la mise en oeuvre de la clause résolutoire de l'article 49.2 du CCAG n'a pas été mise en oeuvre de bonne foi par le maître d'ouvrage. Elle présente un caractère abusif et la résiliation du contrat par le maître d'ouvrage du 23 février 2018 est fautive à l'égard de la société GBC.
En conséquence, le jugement du tribunal judiciaire de Paris du 30 novembre 2021, sera confirmé quant au débouté des demandes de la SCCV Les parisiennes de [Localité 7] tendant à la condamnation de la société GBC en lien avec la résiliation.
La responsabilité contractuelle de la société GBC
Aux termes de l'article 1156 du code civil dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, on doit dans les conventions rechercher quelle a été la commune intention des parties plutôt que s'arrêter au sens littéral des termes.
Selon les dispositions du contrat d'engagement, les travaux tous corps d'état sont exécutés dans le délai de 20 mois à compter de la date fixée par l'ordre de service n° 1 de démarrage des travaux, incluant une période de préparation de un à trois mois aux termes de l'article 8.1 du CCAG.
Cette phase de préparation permet l'organisation et la vie commune, la planification et la coordination temporelle des études aboutissant à l'établissement du calendrier détaillé des travaux, notamment.
En application de la clause 3.2.10 du CCAG, l'entreprise doit respecter le calendrier d'exécution.
Selon la clause 17.1 du CCAP, le délai global d'exécution des travaux pour l'ensemble de l'opération est fixé à 22 mois à compter de la délivrance de l'OS n° 1.
Il doit donc être considéré que le délai de 22 mois prévu au CCAP inclut la période de préparation.
En application de la clause 17.6 du CCAG, l'entreprise doit respecter le délai général et également de façon impérative les dates et les délais partiels la concernant et tout retard, soit pour le délai général, soit pour chaque délai partiel, donne lieu de plein droit, par la seule échéance de chaque terme, et sans mise en demeure, à une pénalité dont le montant est défini par l'article 41 du présent cahier, est retenu sur les sommes dues et prélevé sur le versement de l'acompte suivant l'expiration du délai au calendrier, sans préjudice du recours du maître d'ouvrage, en cas d'insuffisance, aux sanctions prévues au présent cahier.
En l'espèce, l'OS n° 1 a déterminé une date d'origine du délai contractuel au 14 avril 2016 et une date de démarrage des travaux consécutive à la prise de possession des lieux du 26 mai 2016.
Cet OS n'est ni signé ni daté par la société GBC qui a juste apposé son tampon sur l'accusé de réception et qui a contesté la date de démarrage des travaux par courrier électronique du 27 juillet 2016 en indiquant " Pour faire suite à la réunion de ce matin, au sujet de l'ordre de service, pouvez-vous modifier les date contractuel [sic] de prise de possession du terrain. "
Il doit donc être considéré que c'est à cette date du 27 juillet 2016 que l'ordre de service a été délivré à la société GBC.
Ainsi, en application des stipulations contractuelles, le délai de 22 mois a démarré le 27 juillet 2016 et la société GBC devait en principe bénéficier d'un délai allant jusqu'au 27 mai 2018 pour exécuter ses prestations contractuelles.
S'agissant des prestations de la société GBC, la SCCV Les parisiennes de [Localité 7] fait valoir des défaillances consistant dans des malfaçons nécessitant des reprises, des non-conformités contractuelles, des non-conformités au regard des règles de l'art, des travaux non-réalisés, de travaux réalisés avec retard.
- Les non-conformités contractuelles et au regard des règles de l'art
Le tableau des travaux restant à réaliser et des non-conformités joint à la lettre du 31 janvier 2018 adressée à la société GBC par le maître d'oeuvre mentionne sept non-conformités.
Cette liste est reprise par le maître d'ouvrage dans sa lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 1er février 2018 :
- reprendre les EP en diamètre 100 en extérieurs, bâtiments AB,
- réaliser les étanchéités des éléments béton contre terre en façades, bâtiments ABC,
- couper les longrines béton des pare-vues pour passage d'eau dans les logements des bâtiments ABC,
- la reprise du hall suivant compte-rendu du 28 mars 2017, dans les parties communes du bâtiment B,
- faire l'ouverture de la VH palière RDC des partie communes du bâtiment A,
- faire l'ouverture de la VH palière PH R+4 dans les parties communes du bâtiment A,
- désolidariser l'escalier des parties communes du bâtiment C.
La société GBC produit le cahier des clauses techniques et particulières (CCTP) relatives au lot gros oeuvre daté du 10 décembre 2015 et également les CCTP des lots 16-plomberie sanitaire, chauffage eau chaude-ventilation et meubles salle de bains et le CCTP du lot 17-électricité.
Un extrait du CCTP du lot n° 1 a d'ailleurs été inséré dans la lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 27 février 2018 adressée par la société GBC au maître d'ouvrage.
Il résulte des mentions reproduites du CCTP que le lot VRD était un lot spécifique.
Ainsi aucune demande de la SCCV Les parisiennes de [Localité 7] concernant les prestations VRD ne peut être reprochée à la société GBC ; ainsi en est-il des canalisations EU-EV-EP en extérieur, des collectes EP, des séparateurs et pénétration dans le bâtiment, des regards EU/EV/EP, des regards pour les évacuations des eaux usées, de prestations électriques comme les fourreaux depuis le coffret extérieur jusqu'au bâtiment en pied de colonne, des fourreaux de pénétration dans le bâtiment.
La SCCV Les parisiennes de [Localité 7] n'apporte pas d'élément pour contester les affirmations de la société GBC dans sa lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 27 février 2018 adressée au maître d'oeuvre et indiquant que toutes les réserves des bâtiments B et C avaient été levées.
Par lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 27 février 2018, la société GBC a également informé la SCCV Les parisiennes de [Localité 7] que les travaux sur les ventilations palières du bâtiment A avaient été réalisés ainsi que la finalisation des travaux de reprise du hall du bâtiment B et la pose de la désolidarisation de l'escalier du bâtiment C et que les travaux de RVD ne relevaient pas du lot n° 1.
Ainsi, les non-conformités reprochées par la SCCV Les parisiennes de [Localité 7] ne sont pas établies et ne peuvent motiver l'engagement de la responsabilité contractuelle de l'entreprise.
- Les reprises, les travaux restant à réaliser, les inexécutions
Il n'est pas produit de calendrier général d'exécution mais un document communiqué sous l'intitulé " planning marché GBC " qui est signé par plusieurs titulaires de lots et par la société GBC.
Au vu de ce planning qui porte le tampon de la société GBC, celle-ci disposait de 234 jours à compter du 22 août 2016 pour réaliser le gros oeuvre des bâtiments A et C (soit jusqu'au 12 janvier 2017) et 95 jours à compter du 26 septembre 2016 pour réaliser le gros oeuvre du bâtiment C (soit jusqu'au 30 décembre 2016).
Il résulte du contrat d'engagement, de l'OS n°1, du planning, qu'il n'est pas possible de fixer le point de départ du démarrage des travaux qui a fluctué entre la date de réception de l'OS n° 1, la date de prise de possession des lieux, les dates fixées au planning-marché.
Les parties ont également dérogé au planning de 2016 car selon le compte-rendu contradictoire spécifique au gros oeuvre du 7 juillet 2017, la fin du cycle pour les bâtiments A et B était fixé à mars 2017.
Le maître d'oeuvre a également estimé dans ce compte rendu que la société GBC avait provoqué un retard de deux mois, ce qui a pour conséquence de fixer une autre date d'échéance des travaux au mois de mai 2017.
Au vu des pièces produites, il n'est pas possible de déterminer la commune intention des parties quant au réel point de départ du délai d'exécution du marché par la société GBC.
En conséquence, seul le point de départ contractuellement prévu à la réception de l'OS n° 1 est retenu soit à la date du 27 juillet 2016 à partir de laquelle la société GBC disposait de 22 mois pour réaliser ses prestations.
Au 31 janvier 2018, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception adressée à la société GBC, le maître d'oeuvre a listé 33 travaux restant à réaliser consistant dans des finitions, des rebouchages, qualifiées de réserves OPR par la société Racine.
Par lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 27 février 2018, la société GBC a indiqué que l'ensemble des réserves avaient été levées sur les deux bâtiments B et C.
La SCCV Les parisiennes de [Localité 7] est défaillante dans la preuve des retards reprochés à la société GBC en ce qu'elle n'apporte pas la preuve que le point de départ du chantier contractuellement prévu ne doit pas s'appliquer pour calculer le délai général d'exécution réel du chantier, ni les échéances des délais partiels qu'elle revendique.
Elle ne démontre pas non plus que les travaux restant à réaliser à la date du 31 janvier 2018 sont restés inexécutés.
En conséquence, les retards d'exécution et les travaux restant à réaliser ne peuvent motiver l'engagement de la responsabilité contractuelle de l'entreprise.
En l'absence de preuve des manquements de la société GBC, les demandes indemnitaires subséquentes de la SCCV Les parisiennes de [Localité 7] à l'encontre de la société GBC sont rejetées.
En conséquence, le jugement est confirmé.
Sur les demandes de la société GBC au titre de la résiliation abusive du marché
Moyens des parties
La société GBC fait valoir que la résiliation abusive du marché par le maître d'ouvrage lui a causé un manque à gagner sur les prestations non réalisées.
Elle soutient également qu'elle a subi un préjudice moral consistant dans l'atteinte à sa réputation professionnelle, des frais d'immobilisation de personnel et de matériel et des défauts d'amortissement des frais généraux.
Elle calcule sa demande indemnitaire en appliquant au chiffre d'affaires non réalisé de 43 136,95 euros un taux de 15 % et réclame ainsi une somme de 6 470,54 euros au titre du défaut d'amortissement à laquelle elle ajoute une perte de marge de 5 %, soit la somme de 2 156,85 euros.
La société GBC réclame donc la somme de 8 627,39 euros assortie des intérêts moratoires calculés à compter du 27 juillet 2018 au taux d'intérêt appliqué par la Banque centrale européenne à son opération de refinancement la plus récente majorée de 10 points de pourcentage.
Elle demande également le paiement de la gestion du compte prorata qu'elle a assumé en qualité de titulaire du lot gros oeuvre.
Elle fait valoir que l'obligation de paiement n'est pas contestée par le maître d'ouvrage et qu'elle a respecté le processus contractuel.
Elle demande la condamnation de la SCCV Les parisiennes de [Localité 7] à lui payer la somme de 72 473,04 euros à ce titre.
La SCCV Les parisiennes de [Localité 7] soutient que la société GBC n'a pas droit au paiement de la somme de 72 473,04 euros au titre du compte prorata puisqu'elle n'a pas respecté les obligations de l'article 47.3 du CCAG en n'envoyant pas l'attestation prévue.
Elle indique que l'entreprise est dans l'incapacité de démontrer un fonctionnement régulier du compte prorata.
Elle soulève également qu'aucune pièce ne justifie les autres demandes indemnitaires de la société GBC au titre de la résiliation abusive.
Réponse de la cour
Selon l'article 1134 du code civil dans sa version antérieure à l'ordonnance précitée, les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites.
- Le manque à gagner
Seul le préjudice direct et certain, présentant un lien de causalité avec le fait dommageable peut être indemnisé par l'auteur du dommage et la réparation d'une perte de chance, qui doit être mesurée à la chance perdue, ne peut être égale à l'avantage qu'aurait procuré cette chance si elle s'était réalisée.
Le mémoire définitif de la société GBC du 25 juin 2018 présente une demande de dédommagement pour rupture abusive de 42 900 euros dont l'entreprise donne le détail en page 5 de sa pièce 22.
Elle a formé sa demande indemnitaire devant le tribunal sur cette base.
Devant la cour, elle a modifié ses demandes et réclame désormais un manque à gagner au titre de la marge perdue et du défaut d'amortissement calculé par application de pourcentages du chiffre d'affaires non réalisé qu'elle fixe à 43 136,95 euros.
Elle fait valoir qu'elle n'a pas pu faire amortir ou couvrir la part de ses frais généraux qui ne font pas l'objet de prix spécifiques dans le cadre du marché et qu'elle a dû exposer en pure perte.
Or, la société GBC n'établit pas la réalité de son préjudice ni au titre du ratio de rentabilité du marché ni au titre du défaut d'amortissement des frais généraux.
En conséquence, le jugement sera infirmé quant à la condamnation de la SCCV Les parisiennes de [Localité 7] à payer à la société GBC la somme de 2 145 euros TTC au titre de la marge brute et y ajoutant, la cour rejettera également la demande de la société GBC au titre du défaut d'amortissement.
Ainsi les demandes indemnitaires de la société GBC modifiées dans leur calcul devant la cour seront rejetées.
- Le compte prorata
Selon la clause 47.3 du CCAG, dans les 90 jours qui suivent la réception des travaux, la personne chargée de la tenue du compte prorata, adresse au maître d'oeuvre une attestation faisant apparaître la situation de chaque entrepreneur vis-à-vis du compte prorata.
Les parties en cause sont également liées par la convention pour l'établissement, la gestion et le règlement du compte prorata qui indique que celui-ci est tenu par la société GBC dont la rémunération est prévue à hauteur de 10 % du montant TTC des dépenses inscrites au compte prorata dont le budget prévisionnel est fixé à hauteur de 2 % du marché à titre indicatif.
En l'absence de réception, les dispositions de la clause 47. 3 relatives au processus formel mis en place pour la validation du solde du compte prorata n'ont pas vocation à s'appliquer.
La société GBC réclame le paiement de la somme de 72 473,04 euros TTC en vertu de la délégation qui lui a été consentie au titre de la gestion du compte prorata.
ne peut servir de base à la demande indemnitaire formée par la société GBC.
Cette somme correspond à l'appel de fonds n° 3 du 30 janvier 2018 émise avant la résiliation sur la base des dépenses arrêtées au 31 décembre 2017 et que la société GBC estime a minima contractuellement due.
Cette recette du compte prorata Les dépenses communes ou individuelles prévues à l'article 2 de la convention de gestion du compte prorata n'étaient pas toutes à la charge de la société titulaire du lot n° 1- gros oeuvre et pouvaient également relever des titulaires des lots n° 8, 12,19,18.
En l'absence de clôture du compte prorata, la société GBC n'établit pas sa créance et sa demande doit être rejetée.
Elle ne formule pas de demande subsidiaire en paiement de sa rémunération sur cet appel de fonds.
En conséquence, le jugement sera confirmé sur ce point.
Sur la garantie de la société Racine
La SCCV Les parisiennes de [Localité 7] a fait signifier sa déclaration d'appel à la société Racine le 14 mars 2022 et ses conclusions le 26 avril 2022.
Elle demande la garantie de la société Racine laquelle était débitrice d'un devoir de conseil à son égard et dont elle a suivi les recommandations.
Elle fait valoir que sa condamnation proviendrait nécessairement de la défaillance de la société Racine dans l'exécution de cette obligation.
Elle soutient que l'appréciation de l'expert judiciaire qui a préconisé la mise hors de cause de la société Racine n'est pas exploitable dans la mesure où le champ de sa mission était limité.
La société Racine ne comparaît pas.
Réponse de la cour
Aux termes de l'article 6 du code de procédure civile, à l'appui de leurs prétentions, les parties ont la charge d'alléguer les faits propres à les fonder.
Aux termes de l'article 472 du code de procédure civile, si le défendeur ne comparaît pas, il est néanmoins statué sur le fond et le juge ne fait droit à la demande que dans la mesure où il l'estime régulière, recevable et bien fondée.
La SCCV Les parisiennes de [Localité 7] n'allègue aucun fait propre à démontrer la faute de la société Racine dans son obligation de conseil à son égard laquelle ne découle pas nécessairement d'une décision judiciaire qui la condamnerait à indemniser la société GBC.
En conséquence, par adoption des motifs, le jugement est confirmé sur ce point.
Sur les frais du procès
Moyens des parties
La société GBC qui demande la réformation du jugement sur l'absence de condamnation au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ne précise pas si sa demande de condamnation de la SCCV du Bourdonnais [sic] à hauteur de 15 000 euros inclut les frais irrépétibles devant le tribunal.
La société GBC avait demandé également devant le tribunal la condamnation de la SCCV du Bourdonnais [sic] à lui payer la somme de 15 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile qui lui avait été refusée.
En l'absence d'élément nouveau justifiant de remettre en cause l'analyse du premier juge, le jugement sera confirmé en ce qui concerne l'absence de condamnation au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Le sens de l'arrêt conduit à confirmer le jugement sur la condamnation aux dépens.
En appel, chacune des parties conservera la charge de ses propres dépens.
En cause d'appel, l'équité commande de rejeter les demandes réciproques des parties formées au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour,
Prononce la jonction des instances enregistrées sous les numéros RG 22/01885 et RG 22/00933, sous le numéro RG 22/00933 ;
Confirme le jugement en ses dispositions soumises à la cour, sauf en ce qu'il a condamné la SCCV Les parisiennes de [Localité 7] à payer à la société Génie civil bâtiment du centre la somme de 2 145 euros TTC au titre de la perte de marge engendrée par la résiliation du contrat ;
L'infirme sur ce point, statuant à nouveau et y ajoutant,
Rejette les demandes indemnitaires de la société Génie civil bâtiment du centre relatives à la perte de marge et au défaut d'amortissement au titre du préjudice subi du fait de la résiliation ;
Dit que chacune des parties conservera la charge de ses propres dépens d'appel ;
Dit n'y avoir lieu à condamnation en application de l'article 700 du code de procédure civile.