CA Paris, Pôle 4 ch. 2, 24 février 2021, n° 17/15100
PARIS
Arrêt
Infirmation
PARTIES
Défendeur :
Citya Immobilier Pecorari (SARL)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Carrière
Conseillers :
Mme Page, Mme Bret
Avocats :
Me Marques Viera, Me Hoffmann Nabot
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FAITS ET PROCÉDURE
L'ensemble immobilier sis Zac des Guillaumes ... a fait l'objet d'un état descriptif de division et règlement de copropriété, établi le 24 septembre 2010 quant au bâtiment parking et établi le 30 septembre 2010 quant au bâtiment habitation.
Par acte authentique du 15 mars 2011, M. X Z Y a acquis, dans le cadre d'une vente en l'état futur d'achèvement, au sein de l'ensemble immobilier sis Zac des Guillaumes ... :
- le lot 4 composé d'un appartement n°H11 au 1er étage du bâtiment H,
- le lot 36 composé d'un emplacement de voiture n°54 dans le bâtiment parking.
Lors de l'assemblée générale du 14 novembre 2013 de l'immeuble la résidence de Beauvoir ..., les copropriétaires ont désigné comme syndic la SAS Citya Pecorari Immobilier, pour la période du 14 novembre 2013 au 31 janvier 2015.
L'assemblée générale du 4 décembre 2014 a été convoquée par la SARL Citya Immobilier Pecorari le 12 novembre 2014.
Par acte en date du 20 février 2015, M. Y a assigné le syndicat des copropriétaires de l'immeuble la résidence de Beauvoir ... et la SARL Citya Immobilier Pecorari en nullité de la décision de l'assemblée générale du 4 décembre 2014, invoquant, entre autres, le défaut de capacité du syndic pour convoquer l'assemblée générale.
Le syndicat des copropriétaires et la SARL Citya Immobilier Pecorari ont sollicité en défense le débouté des demandes et la condamnation du demandeur au paiement notamment de la somme de 3.000 € à titre de dommages intérêts.
Par jugement contradictoire du 31 mai 2017, le tribunal de grande instance de Bobigny a :
- débouté M. X Z Y de toutes ses demandes,
- débouté le syndicat des copropriétaires de l'immeuble résidence de Beauvoir sis ... de ses autres demandes,
- condamné M. X Z Y au paiement de la somme de 1.800 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné M. X Z Y au paiement des dépens,
- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire.
M. X Z Y a relevé appel de ce jugement par déclaration remise au greffe le 24 juillet 2017.
La procédure devant la cour a été clôturée le 18 novembre 2020.
PRÉTENTIONS DES PARTIES
Vu les conclusions en date du 17 avril 2018 par lesquelles M. X Z Y, appelant, invite la cour, au visa des articles 7 du décret du 17 mars 1967, 17, 18, 25 et 42 de la loi du 10 juillet 1965, à :
- infirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Bobigny le 31 mai 2017,
Statuant à nouveau
- constater l'absence de mandat de syndic du syndicat des copropriétaires de l'immeuble ... (93) de la société Citya Immobilier Pecorari, SARL au capital de 1.344.255 €, immatriculee au RCS de Paris sous le n° 411 301 039,
En conséquence,
- dire et juger que la société Citya Immobilier Pecorari, SARL au capital de 1.344.255 €, immatriculée au RCS de Paris sous le n° 411 301 039, n'avait pas la capacité de convoquer l'assemblée générale du 4 décembre 2014,
- dire et juger que l'assemblée générale des copropriétaires de l'immeuble sis ... (93) en date du 4 décembre 2014 est nulle et de nul effet,
- condamner la société Citya Immobilier Pecorari, SARL au capital de 1.344.255 €, immatriculée au RCS de Paris sous le n° 411 301 039, au paiement d'une somme de 5.000 € en vertu des dispositions de l'article 700 du cpc et aux entiers dépens dont recouvrement dans les conditions de l'article 699 du code de procédure civile ;
Vu les conclusions en date du 19 décembre 2017 par lesquelles le syndicat des copropriétaires de l'immeuble résidence de Beauvoir ... et la SARL Citya Immobilier de Pecorari, intimés, invitent la cour, au visa del'article 31 du code de procédure civile, la loi n°65-557 du 10 juillet 1965 et le décret n°67-223 du 17 mars 1967, à :
- confirmer le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Bobigny du 31 mai 2017 en ce qu'il a débouté M. X Z Y de ses demandes fins et conclusions,
Y ajoutant
- condamner M. X Z Y à verser au syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier Résidence Beauvoir sis ... représenté par son syndic, la société Citya Immobilier Pecorari, et à la société Citya Immobilier Pecorari la somme de 3.000 € au titre de dommages intérêts,
- condamner M. X Z Y à verser au syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier Résidence Beauvoir sis ... représenté par son syndic, la société Citya Immobilier Pecorari, et à la société Citya Immobilier Pecorari la somme de 3.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner M. X Z Y, aux entiers dépens, lesquels seront recouvrés en application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile,
- ordonner l'exécution provisoire de la décision à intervenir ;
SUR CE,
La cour se réfère, pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens échangés et des prétentions des parties, à la décision déférée et aux dernières conclusions échangées en appel ;
En application de l'article 954 alinéa 2 du code de procédure civile, la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif des conclusions ;
Sur l'intérêt à agir de M. Y
Aux termes de l'article 31 du code de procédure civile, 'L'action est ouverte à tous ceux qui ont un intérêt légitime au succès ou au rejet d'une prétention, sous réserve des cas dans lesquels la loi attribue le droit d'agir aux seules personnes qu'elle qualifie pour élever ou combattre une prétention, ou pour défendre un intérêt déterminé' ;
En l'espèce, M. Y justifiant de sa qualité de copropriétaire justifie d'un intérêt à agir en nullité d'une assemblée générale, quelques soient les lots dont il est propriétaire, sans qu'il n'ait à justifier d'un grief et même s'il ne forme pas d'autre demande que la nullité de cette assemblée générale ;
En conséquence, il y a lieu de rejeter l'exception d'irrecevabilité de l'action en nullité de l'assemblée générale engagée par M. Y, soulevée par le syndicat des copropriétaires et la SARL Citya Immobilier Pecorari, au motif de l'absence d'intérêt à agir de M. Y ;
Sur la demande de prononcer la nullité de l'assemblée générale du 4 décembre 2014
Le demandeur invoque la nullité de l'assemblée générale au motif que le syndic était sans qualité pour la convoquer ; il fait valoir que la société Citya Immobilier avait changé de forme ; de société par actions simplifiée elle était devenue société à responsabilité limitée, et dès lors la société par actions simplifiée qui avait seule recu le mandat de syndic ne pouvait en devenant une société à responsabilité limitée convoquer l'assemblée générale ;
Aux termes de l'article 17 de la loi du 10 juillet 1965, dans sa version applicable à la date de l'assemblée générale du 4 décembre 2014, 'Les décisions du syndicat sont prises en assemblée générale des copropriétaires ; leur exécution est confiée à un syndic placé éventuellement sous le contrôle d'un conseil syndical....' ;
Aux termes de l'article 18 de la loi du 10 juillet 1965, dans sa version applicable à la date de l'assemblée générale du 4 décembre 2014 'I.- Indépendamment des pouvoirs qui lui sont conférés par d'autres dispositions de la présente loi ou par une délibération spéciale de l'assemblée générale, le syndic est chargé, dans les conditions qui seront éventuellement définies par le décret prévu à l'article 47 ci dessous...
IV.- Seul responsable de sa gestion, il ne peut se faire substituer. L'assemblée générale peut seule autoriser, à la majorité prévue par l'article 25, une délégation de pouvoir à une fin déterminée.
V.- En cas d'empêchement du syndic, pour quelque cause que ce soit, le président du conseil syndical peut convoquer une assemblée générale appelée à désigner un nouveau syndic. En cas de carence du syndic et à défaut de stipulation du règlement de copropriété, un administrateur provisoire peut être désigné par décision de justice....' ;
Aux termes de l'article 25 de la loi du 10 juillet 1965, dans sa version applicable à la date de l'assemblée générale du 4 décembre 2014, 'Ne sont adoptées qu'à la majorité des voix de tous les copropriétaires les décisions concernant ...
c) La désignation ou la révocation du ou des syndics et des membres du conseil syndical...' ;
Aux termes de l'article 7 du décret du 17 mars 1967, '...l'assemblée générale est convoquée par le syndic...' ;
Si la convocation est délivrée par un syndic dont les pouvoirs sont expirés, l'assemblée générale est annulable ;
La loi du 10 juillet 1965, excluant toute substitution du syndic sans un vote de l'assemblée générale des copropriétaires, ne permet pas à une société titulaire d'un mandat de syndic de dessaisir les copropriétaires de leur pouvoir exclusif de désignation du syndic par le moyen d'une opération de fusion absorption ayant pour résultat, après disparition de sa personnalité morale, de lui substituer la société absorbante, personne morale distincte ;
En l'espèce, suite à une opération de fusion absorption, la SAS Citya Pecorari Immobilier a été absorbée par la société Gestion Immobilière Plaine Saint Denis le 31 décembre 2013 et a été radiée du registre du commerce et des sociétés le 14 mars 2014 (pièce 6) ; l'extrait Kbis de la SARL Citya Immobilier Pecorari mentionne que cette société a été immatriculée le 8 avril 2014 et que la SAS Citya Pecorari Immobilier a participé à l'opération de fusion (pièce 7) ;
Il en résulte que la personnalité morale de la SAS Citya Pecorari Immobilier a disparu lors de l'opération de fusion absorption et que la société absorbante, la SARL Citya Immobilier Pecorari, ayant une personne morale distincte, ne pouvait pas se substituer à la société titulaire du mandat de syndic, sans un vote de l'assemblée générale ;
Ainsi la SARL Citya Immobilier Pecorari n'avait pas la qualité de syndic et ne pouvait pas valablement convoquer, à la date du 12 novembre 2014, l'assemblée générale qui s'est tenue le 4 décembre 2014 ;
En conséquence, le jugement doit être infirmé en ce qu'il a débouté M. Y de sa demande de prononcer l'annulation de l'assemblée générale du 4 décembre 2014 ;
Et il convient de prononcer l'annulation de l'assemblée générale du 4 décembre 2014 ;
Sur la demande de dommages et intérêts du syndicat des copropriétaires pour procédure abusive
Le syndicat des copropriétaires et la SARL Citya Immobilier Pecorari succombant en l'instance, il convient de confirmer le jugement en ce qu'il a débouté le syndicat des copropriétaires de sa demande de dommages et intérêts et d'ajouter le débouté de la demande de la SARL Citya Immobilier Pecorari au même titre ;
Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile
Le sens du présent arrêt conduit à infirmer le jugement sur les dépens et l'application qui y a été faite des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
Le syndicat des copropriétaires et la SARL Citya Immobilier Pecorari, partie perdante, doivent être condamnés aux dépens de première instance et d'appel et il convient de condamner la SARL Citya Immobilier Pecorari à payer à M. Y la somme de 4.000 € par application de l'article 700 du code de procédure civile en cause de première instance et d'appel ;
Le sens du présent arrêt conduit à rejeter la demande par application de l'article 700 du code de procédure civile formulée par le syndicat des copropriétaires et la SARL Citya Immobilier Pecorari ;
PAR CES MOTIFS
LA COUR
Statuant par mise à disposition au greffe, contradictoirement,
Infirme le jugement, excepté en ce qu'il a débouté le syndicat des copropriétaires de l'immeuble résidence de Beauvoir sis ... de sa demande de dommages et intérêts ;
Statuant sur les chefs réformés et y ajoutant,
Rejette l'exception d'irrecevabilité de l'action de M. X Z Y, soulevée par le syndicat des copropriétaires de l'immeuble résidence de Beauvoir sis ... et la SARL Citya Immobilier Pecorari, au motif de l'absence d'intérêt à agir ;
Prononce l'annulation de l'assemblée générale du 4 décembre 2014 ;
Déboute la SARL Citya Immobilier Pecorari de sa demande de dommages et intérêts ;
Condamne la SARL Citya Immobilier Pecorari à payer à M. X Z Y la somme de 4.000 € par application de l'article 700 du code de procédure civile, en cause de première instance et d'appel ;
Condamne le syndicat des copropriétaires de l'immeuble résidence de Beauvoir sis ... et la SARL Citya Immobilier Pecorari aux dépens de première instance et d'appel qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile ;
Rejette toute autre demande.