CA Bastia, ch. civ. sect. 2, 9 octobre 2024, n° 23/00544
BASTIA
Arrêt
Infirmation partielle
PARTIES
Demandeur :
Boucherie des Chemins (SAS)
Défendeur :
Boucherie des Éleveurs (SAS)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Lebreton
Conseillers :
Mme Zamo, M. Desgens
Avocats :
Me Bronzini de Caraffa, Me Chiron, Me Theret
EXPOSE DES FAITS :
Par ordonnance de référé du 19 juillet 2023, le président du tribunal de commerce de Bastia s'est déclaré compétent et a ordonné à [N] [S] et à la société boucherie des [Adresse 6] de restituer sans délai le fourgon de marque Ford ranger immatriculé [Immatriculation 4] loué à la société Viaxel sous astreinte de 150 euros par jour de retard à compter du prononcé de la décision pendant trois mois ; a ordonné à [N] [S] et à la société
boucherie des [Adresse 6] de restituer sans délai les clés du local loué par la requérante à la société U caminu sise à [Adresse 6], mitoyen à celui dans lequel elle exerce son commerce de boucherie de sorte que la boucherie des éleveurs puisse en retrouver une jouissance paisible immédiat sous astreinte de 150 euros par jour à compter du prononcé de la décision pendant trois mois ; a ordonné à [N] [S] et à la société boucherie des [Adresse 6] de libérer le local loué à la société U caminu sise à [Adresse 6] mitoyen à celui dans lequel elle exerce son commerce de boucherie de sorte que la boucherie des éleveurs puisse en retrouver une jouissance paisible immédiat sous astreinte de 150 euros par jour à compter du prononcé de la décision pendant trois mois ; a interdit l'ouverture et l'exploitation du fonds envisagé dans le local loué par la société et mitoyen au local affecté à la reception de la clientèle sous astreinte de 150 euros par jour à compter du prononcé de la décision pendant trois mois ; a condamné au paiement de la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens, en ce compris les frais de greffe de 57,65 euros.
Par déclaration au greffe le 3 août 2023, [N] [S] et la société boucherie des [Adresse 6] ont interjeté appel tendant à l'infirmation de l'ordonnance, en ce que le tribunal s'est déclaré compétent et a ordonné à [N] [S] et à la société boucherie des [Adresse 6] de restituer sans délai le fourgon de marque Ford ranger immatriculé [Immatriculation 4] loué à la société Viaxel sous astreinte de 150 euros par jour de retard à compter du prononcé de la décision pendant trois mois ; a ordonné à [N] [S] et à la société boucherie des [Adresse 6] de restituer sans délai les clés du local loué par la requérante à la société U caminu sise à [Adresse 6], mitoyen à celui dans lequel elle exerce son commerce de boucherie de sorte que la boucherie des éleveurs puisse en retrouver une jouissance paisible immédiat sous astreinte de 150 euros par jour à compter du prononcé de la décision pendant trois mois ; a ordonné à [N] [S] et à la société boucherie des [Adresse 6] de libérer le local loué à la société U caminu sise à [Adresse 6] mitoyen à celui dans lequel elle exerce son commerce de boucherie de sorte que la boucherie des éleveurs puisse en retrouver une jouissance paisible immédiat sous astreinte de 150 euros par jour à compter du prononcé de la décision pendant trois mois ; a interdit l'ouverture et l'exploitation du fonds envisagé dans le local loué par la société et mitoyen au local affecté à la reception de la clientèle sous astreinte de 150 euros par jour à compter du prononcé de la décision pendant trois mois ; a condamné au paiement de la somme de 1000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens, en ce compris les frais de greffe de 57,65 euros.
Dans ses dernières conclusions notifiées par RPVA du 29 novembre 2023, que la cour vise pour l'exposé des moyens et prétentions, les appelants sollicitent :
Réformer l'ordonnance en ce qu'elle : Se déclare compétente pour statuer sur le litige ;
Rejette la demande d'irrecevabilité pour défaut de qualité pour agir ;
Ordonne à Monsieur [N] [S], à la SAS BOUCHERIE DES [Adresse 6] et à
toute personne entre les mains desquelles il pourrait se trouver de restituer sans délai le fourgon de marque FORD RANGER immatriculé [Immatriculation 5] loué par la SAS BOUCHERIE DES ÉLEVEURS à la société VIAXEL sous astreinte de 150 euros par jour de retard à compter du prononcé de la décision pendant trois mois,
Ordonne à Monsieur [N] [S] et à la SAS BOUCHERIE DES [Adresse 6] de restituer sans délai les clés du local loué par la requérante à la société U CAMINU sis à [Adresse 6], mitoyen à celui dans lequel elle exerce son commerce et utilisé par la requérante à usage de réserve sous astreinte de 150 euros par jour de retard à compter du prononcé de la décision pendant trois mois ;
Ordonne à Monsieur [N] [S], à la SAS BOUCHERIE DES [Adresse 6] et à tous occupants de leur chef, de libérer le local loué par la requérante à 1a société U CAMINU sis à [Adresse 6], mitoyen à celui dans lequel elle exerce son commerce de boucherie de sorte que la BOUCHERIE DES ÉLEVEURS puisse en retrouver une jouissance paisible immédiate, et ce, sous astreinte de 150 euros par jour de retard à compter du prononcé de la décision pendant trois mois ;
Interdit l'ouverture et l'exploitation du fonds envisagé par la SAS BOUCHERIE DES [Adresse 6] dans le local loué par la société requérante et mitoyen au local affecté à la réception de la clientèle sous astreinte de 150 euros par jour de retard à compter du prononcé de la décision pendant trois mois ;
Condamne solidairement Monsieur [N] [S] et la SAS BOUCHERIE DES [Adresse 6] au paiement de la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens en ce compris les frais de greffe s'élevant à la somme de 57,65 euros.
- Statuant à nouveau :
- Juger irrecevable l'assignation pour défaut de qualité pour agir ;
- Subsidiairement, juger le tribunal de commerce d'Ajaccio incompétent et renvoyer les parties devant le tribunal judiciaire d'Ajaccio ;
- A titre infiniment subsidiaire, juger le juge des référés incompétent et renvoyer les parties à se pourvoir au fonds ;
- A titre encore plus subsidiaire, débouter la SAS Boucherie des éleveurs de ses demandes - Rejeter comme nouvelles les demandes au titre du remboursement des échéances du véhicule, du paiement de l'assurance et d'une condamnation provisionnelle au titre du préjudice de jouissance ;
- Condamner la société par actions simplifiée BOUCHERIE DES ÉLEVEURS à payer à la société par actions simplifiée BOUCHERIE DES [Adresse 6] et Monsieur [N] [S] la somme de 5 000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile ;
- Condamner la Société par actions simplifiée BOUCHERIE DES ÉLEVEURS aux entiers dépens.
Dans ses dernières conclusions notifiées par RPVA du 1er mai 2024, que la cour vise pour l'exposé des moyens et prétentions, l'intimée sollicite l'irrecevabilité des pièces n°4 et 5 communiquées après l'ordonnance de clôture.
Dans ses dernières conclusions notifiées par RPVA le 4 octobre 2023, l'intimée sollicite la confirmation de l'ordonnance du 19 juillet 2023, la condamnation des appelants au paiement d'une somme de 4 154,46 euros à titre provisionnel outre intérêts légaux à compter de la décision à intervenir, condamner les appelants à lui payer une indemnité au titre du préjudice résultant de la perte de jouissance du véhicule du 15 décembre 2022 au 30 août 2023 à raison de 100 euros par jour, soit 25 800 euros, ordonner la capitalisation, fixer une nouvelle astreinte pendant une durée de trois mois de restitution des locaux et d'interdiction d'ouverture, débouter les appelants de toutes leurs demandes et les condamner au paiement d'une somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
SUR CE
Sur le défaut de qualité pour agir :
Les appelants contestent le fait que [V] [S] était président au moment de l'assignation. Ils indiquent que suite à une convocation irrégulière, une fausse assemblée générale a validé la désignation de ce dernier en qualité de président, il ne peut donc se prévaloir de sa turpitude et du caractère frauduleux de l'assemblée générale pour revendiquer la qualité de président, la mention sur le Kbis ne pouvant avoir de valeur qu'à l'égard des tiers.
L'intimée produit aux débats un Kbis de la société en date du 19 décembre 2022 qui montre que le président était [V] [S].
Selon l'article 32 du code de procédure civile, est irrecevable toute prétention émise par une personne dépourvue du droit d'agir.
En l'espèce, la cour relève qu'à la date de l'assignation des 30 et 31 mars 2023, [V] [S] était bien le président de la société boucherie des éleveurs, au vu du Kbis produit aux débats.
La question de la fausseté de l'assemblée générale et de la désignation du président n'a pas été tranchée par une décision de justice et dès lors le Kbis a une valeur probante.
[V] [S] avait donc bien qualité pour agir, l'action est donc recevable.
Sur la compétence :
Les appelants contestent la compétence de la juridiction commerciale, considérant que l'assignation ne précise pas le fondement juridique, de sorte qu'on ignore la motivation des demandes, ils sollicitent la compétence du tribunal judiciaire.
L'intimée indique que la demanderesse est une société commerciale et la défenderesse est une société commerciale, c'est un litige qui oppose deux sociétés commerciales qui exercent des actes de commerce, l'article 721-3 du code de commerce s'applique bien et le président du tribunal est bien compétent.
Selon l'article 721-3 du code de commerce, les tribunaux de commerce connaissent des contestations relatives aux engagements entre commerçants, de celles relatives aux sociétés commerciales, aux actes de commerce entre toutes personnes.
La cour relève qu'en l'espèce, la société boucherie des [Adresse 6] et la société boucherie des éleveurs sont deux sociétés commerciales, au vu des kbis produits aux débats et au vu des statuts produits.
Il s'agit donc bien d'un litige qui oppose deux sociétés comerciales conformément à l'article 721-3 du code du commerce.
Par ailleurs,[N] [S] était associé à concurrence de 10% dans la société la boucherie des éléveurs, que le litige qui les oppose est relatif à de la concurrence déloyale.
Il s'agit donc bien d'une contestation qui relève de la compétence des tribunaux de commerce.
L'exception d'incompétence sera donc rejetée.
Sur la compétence du juge des référés :
Les appelants indiquent que les conditions des articles 872 et 873 du code de procédure civile ne sont pas réunies et que dès lors, le juge des référés était incompétent pour statuer.
En réponse, les intimés indiquent qu'[N] [S] a ouvert un commerce totalement similaire à celui de [V] [S] dans un local mitoyen, il a commis des fautes et des actes de concurrence déloyale, cela constitue un trouble manifestement illicite, l'urgence étant également caractérisé.
La cour relève que selon l'article 872 du code de procédure civile, dans tous les cas d'urgence, le président du tribunal de commerce peut, dans les limites de sa compétence, ordonner en référé toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l'existence d'un différend.
Selon l'article 873 du code de procédure civile, le président peut, même en présence d'une contestation sérieuse prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser le trouble manifestement illicite.
Dans les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, il peut accorder une provision au créancier, 'ou ordonner l'exécution de l'obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire."
La cour examine donc la situation afin de déterminer si les conditions d'intervention du juge des référés étaient réunies en examinant les points soulevés.
En l'espèce, les statuts de la société boucherie des éleveurs du 17 janvier 2018 produits aux débats, montrent qu'il s'agit d'une société qui a pour objet la boucherie, charcuterie, vente de produits à base de viande, vente de produits alimentaires, rotisserie société constituée entre [V] [S] (90 % des parts, 900 euros) et [N] [S] (10 % des parts, 100 euros).
[V] [S] a été président de cette société au départ de sa constitution, puis [N] [S] a été nommé président le 19 octobre 2020, [V] [S] étant président à la date de l'assignation comme démontré supra.
La société boucherie des éléveurs a conclu le 1er décembre 2017, un bail commercial avec la société U caminu portant sur un local commercial sis [Adresse 6] à [Localité 7] pour une activité de boucherie.
Sur la restitution du véhicule :
Selon l'article 872 du code de procédure civile, dans tous les cas d'urgence, le président du tribunal de commerce peut, dans les limites de sa compétence, ordonner en référé toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l'existence d'un différend.
Selon l'article 873 du code de procédure civile, le président peut, même en présence d'une contestation sérieuse prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser le trouble manifestement illicite.
La cour relève qu'en l'espèce, il n'est pas contesté que le véhicule immatriculé Ford ranger immatriculé [Immatriculation 4] a fait l'objet du contrat de crédit-bail souscrit par la société boucherie des éléveurs le 12 janvier 2021, le dirigeant de droit de la société à cette date était d'ailleurs [N] [S].
Le fait qu'[N] [S] ait été salarié de la société boucherie des éleveurs et le président au vu des bulletins de salaire produits aux débats de juin à août 2022, ne justifie pas qu'il n'ait pas restitué le véhicule qu'il détenait sans droit ni titre, ce d'autant que le 7 mars 2023, il était mis en demeure par la société de restituer le véhicule.
L'attestation de [C] [S] produite aux débats pour indiquer qu'[N] [S] n'était pas en possession du véhicule n'est corroborée par aucun autre élément et n'est pas régulière dans la mesure où aucune pièce d'identité n'est annexée à l'attestation afin de vérifier l'identité et la signature.
La cour relève qu'il est constant que le juge des référés a compétence pour statuer en présence d'un trouble manifestement illicite et qu'en l'espèce, monsieur [N] [S] s'est approprié le véhicule et l'a conservé sans droit ni titre, car seule la société était le crédit preneur du véhicule Ford ranger au moment de l'assignation et réglait les loyers, lesquels étant dûment payés par la société la boucherie des éleveurs au vu des piècs comptables produites.
La cour confirme donc que le juge des référés avait pleinement compétence pour statuer sur la demande de restitution du véhicule en raison d'un trouble manifestement illicite et qu'il l'a fait à bon droit, l'appropriation illicite par [N] [S] constituait donc bien un trouble manifestement illicite, ce qui justifiait la compétence du juge des référés lorsqu'il a rendu sa décision le 19 juillet 2023.
La décision sera donc confirmée sur ce point.
Il convient de relever que le trouble manifestement illicite a cessé le 30 août 2023, lorsqu'[N] [S] a restitué le véhicule Ford ranger.
Sur les demandes relatives au paiement des loyers payés à la société Viaxel pendant 8 mois, la demande au titre du préjudice de jouissance et la demande au titre du contra d'assurance:
Les appelants considèrent qu'il s'agit de demandes nouvelles qui sont irrecevables, ce que l'intimée conteste.
Selon l'article 564 du code de procédure civile, à peine d'irrecevabilité soulevée d'office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers ou la survenance ou de la révélation d'un fait.
La cour relève qu'en l'espèce, les demandes relatives au paiement des loyers payés à la société Viaxel pendant 8 mois, la demande au titre du préjudice de jouissance et la demande au titre du contrat d'assurance, sont des demandes nouvelles, qu'il convient de déclarer irrecevables.
S'agissant de la restitution du local à usage de réserve :
Les appelantes indiquent qu'elles disposent d'un bail et qu'elle est légitime à l'occuper, ce bail étant postérieur au bail de la boucherie des éleveurs.
L'intimée indique que le bail produit est celui d'une société qui n'existait pas le 1er janvier 2023.
La cour constate l'existence d'un bail daté du 1er février 2022 entre la société boucherie des éleveurs et la société U Caminu pour un local commercial sis [Adresse 6] à [Localité 7], ladite société étant représentée par [N] [S] et un autre bail daté du 1er janvier 2023 pour les mêmes locaux entre la société boucherie des [Adresse 6] et la société U Caminu.
La cour relève que les pièces produites montrent que les loyers pour le second local sont payés par la boucherie des éléveurs qui a produit les relevés de comptes jusqu'au mois de novembre 2022.
A l'inverse, la boucherie [Adresse 6] ne justifie d'aucun paiement de loyers depuis janvier 2023.
Selon l'article 1842 du code civil, les sociétés autres que les sociétés en participation jouissent de la personnalité morale à compter de leur immatriculation.
Selon l'article L 210-6 du code de commerce, les sociétés commerciales jouissent de la personnalité morale à dater de leur immatriculation.
Selon l'article 873 du code de procédure civile, le président peut, même en présence d'une contestation sérieuse prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser le trouble manifestement illicite.
S'agissant des sociétés en cours de formation, seuls les associés peuvent souscrire des engagements au nom de la société en formation et non la société elle-même.
Or, en l'espèce, c'est la société en cours de formation qui a conclu le bail, il s'agit là d'une nullité absolue.
En présence d'une nullité absolue, laquelle est d'ailleurs soulevée, le juge des référés ne peut prendre en considération le bail du 1er janvier 2023.
Ainsi, en présence d'un seul bail valable, de la preuve par le preneur, la boucherie des éleveurs du paiement des loyers pour le montant indiqué sur le bail (1 250 euros), la cour considère constate l'existence d'un trouble manifestement illicite consistant en l'occupation sans droit ni titre du local sis [Adresse 6] à [Localité 7] par la boucherie des [Adresse 6].
La violation du droit du preneur et l'occupation illicite de la société boucherie des [Adresse 6] constitue un trouble manifestement illicite.
Sur les mesures à prendre sur le fondement du trouble manifestement illicite, le juge des référés peut souverainement ordonner la restitution des clés et la libération du local sous astreinte afin d'assurer l'effectivité de la décision.
La décision des premiers juges est donc justifiée par l'existence d'un trouble manifestement illicite et sera confirmée.
Sur la demande d'une nouvelle astreinte, elle sera ordonnée, les appelants seront condamnés au paiement d'une astreinte de 300 euros par jour de retard en cas d'inexécution dans le délai de deux mois à compter de la signification de la présente décision pour la restitution du local et des clés.
Sur l'interdiction d'ouverture et d'exploitation du fonds :
Les appelants indiquent qu'il n'y a aucune preuve d'acte de concurrence déloyale, ni confusion, ni désorganisation de l'entreprise rivale, ni dénigrement.
L'intimée explique que les appelants se sont emparés du local qui lui servait d'annexe, les recettes de la boucherie ont été détournées, le véhicule ford Ranger a été détourné, son employé a été aperçu dans le local soustrait alors qu'il était en arrêt maladie, ils ont ainsi commis des fautes constitutives de concurrence déloyale.
La cour relève que la concurrence déloyale s'entend de tout acte de concurrence contraire aux usages honnêtes en matière commerciale et doivent notamment être interdits tous faits quelconques de nature à créer une confusion par n'importe quel moyen avec l'activité commerciale de concurrent.
La notion de concurrence déloyale doit être appréciée au regard du principe de la liberté du commerce sauf en cas de faute par la création d'un risque de confusion dans l'esprit de la clientèle ou par l'existence d'une captation parasitaire, circonstances attentatoires à l'exercice paisible et loyal du commerce.
L'appréciation de la faute au regard du risque de confusion doit résulter d'une approche concrète et circonstanciée des faits.Il ne s'agit pas de faire la preuve d'un préjudice, mais seulement l'existence d'un risque de préjudice.
Sur la désorganisation, s'il n'est pas contesté que l'employé de la boucherie des éleveurs, monsieur [D], a été vu dans le local destiné à la réserve avec [N] [S], il n'a pas pour autant été employé par ce dernier officiellement ; à défaut de preuve de connivence avec [N] [S], l'arrêt de travail du 12 janvier 2023 au 31 mars 2023 de monsieur [D] ne ne constitue pas un élément de désorganisation.
Sur les actes fautifs, si les vidéos produites aux débats montrent un certain nombre d'agissements curieux d'[N] [S], qui garde des billets ou en jette un, aucune poursuite ou condamnation d'[N] [S] n'atteste de l'existence d'infractions.
Si ces actes font écho à l'attestation de l'expert comptable du 27 février 2023 qui a constaté que du 5 octobre 2022 au 19 décembre 2022, aucun dépôt en espèce n'avait été effectué, ils ne constituent pas pour autant des actes de concurrence déloyale susceptibles de caractériser un trouble manifestement illicite.
La cour relève qu'il est acquis que la cour statuant en appel de référé, apprécie souverainement l'existence d'un trouble manifestement illicite caractérisé par des actes fautifs de concurrence déloyale.
La cour relève qu'en l'espèce, l'existence d'actes de concurrence déloyale n'ont pas été démontrés et que dès lors, il n'y a pas de trouble manifestement illicite.
En conséquence, la décision sera infirmée en ce sens.
Sur la capitalisation des intérêts :
Selon l'article 1343-2 du code civil, les intérêts échus, dus au moins pour une année entière, produisent intérêts si le contrat l'a prévu ou si une décision de justice le précise.
En l'espèce, il sera fait droit à la demande de capitalisation des intérêts échus dus au moins pour une année entière.
L'équité commande que la décision au titre de l'article 700 du code de procédure civile prononcée par le premier juge soit confirmée, ainsi que la condamnation aux dépens.
En cause d'appel, l'équité commande que la société boucherie des [Adresse 6] et [N] [S] soient solidairement condamnés au paiement d'une somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens d'appel.
PAR CES MOTIFS
Statuant par arrêt rendu contradictoire,
La cour,
REJETTE l'irrecevabilité soulevée par la société boucherie des [Adresse 6] et [N] [S] au titre du défaut de qualité pour agir
EN CONSEQUENCE
DECLARE RECEVABLE l'action de [V] [S]
REJETTE l'exception d'incompétence du tribunal de commerce
soulevée par la société boucherie des [Adresse 6] et [N] [S]
REJETTE l'exception d'incompétence du juge des référés soulevée par la société boucherie des [Adresse 6] et [N] [S]
INFIRME l'ordonnance de référé du tribunal de commerce d'Ajaccio du 19 juillet 2023
en ce qu'elle a prononcé une interdiction d'ouverture et d'exploitation du fonds envisagé par les requis dans le local loué par la société requérant et mitoyen au local affecté à la réception de la clientèle sous astreinte de 150 euros par jour de retard à compter du prononcé de la décision pendant trois mois
STATUANT A NOUVEAU
DEBOUTE la société boucherie des éleveurs de sa demande de prononcé d'une inetrdiction d'ouverture et d'exploitation du fonds envisagé par les requis dans le local loué par la société requérant et mitoyen au local affecté à la réception de la clientèle sous astreinte de 150 euros par jour de retard à compter du prononcé de la décision pendant trois mois
CONFIRME l'ordonnance de référé du tribunal de commerce d'Ajaccio du 19 juillet 2023 pour le surplus
Y AJOUTANT
DECLARE IRRECEVABLES les demandes de la société boucherie des éleveurs relatives au paiement des loyers, au titre du préjudice de jouissance etau titre du contrat d'assurance
ASSORTIT d'une nouvelle astreinte de 300 euros par jour de retard, à compter de la signification de la présente décision, les obligations ordonnées à [N] [S] et à
la société boucherie des [Adresse 6],de restituer les clés du local loué et de libérer le local loué par la société boucherie des éleveurs à la société U Caminu sis [Adresse 6] à [Localité 7], mitoyen à celui dans lequel elle exerce son commerce et utilisé à usage de réserve
CONSTATE que le véhicule Ford Ranger immatriculé [Immatriculation 4] a été restitué le 30 août 2023
DÉBOUTE la société boucherie des [Adresse 6] et [N] [S] de toutes leurs
autres demandes
CONDAMNE solidairement la société boucherie des [Adresse 6] et [N] [S] à payer la société boucherie des éleveurs une somme de 2000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel
ORDONNE la capitalisation des intérêts
DÉBOUTE la société boucherie des éleveurs de toutes ses autres demandes
CONDAMNE solidairement la société boucherie des [Adresse 6] et [N] [S] aux entiers dépens d'appel