CA Paris, Pôle 5 ch. 1, 9 octobre 2024, n° 22/09305
PARIS
Arrêt
Infirmation partielle
PARTIES
Demandeur :
Grossiste Distributeur de Matériel Électrique (SARL)
Défendeur :
LGKH (SAS)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Douillet
Conseillers :
Mme Barutel, Mme Bohée
Avocats :
Me Quemere, Me Money, Me Afula
EXPOSÉ DU LITIGE
La société GROSSISTE DISTRIBUTEUR DE MATERIEL ELECTRIQUE (ci-après, société GDME), est une société à responsabilité limitée immatriculée au RCS d'Evry, dont le siège social est situé à [Localité 8], et qui exerce une activité d'achat et de vente en gros de matériel électrique depuis le 1er décembre 2002.
M. [M] [Z] et M. [J] [F], embauchés par la société GDME en qualité de « vendeur-préparateur », respectivement le 20 avril 2015 et le 22 avril 2013, ont démissionné, le premier le 24 mai 2017 avec effet au 24 juin 2017, le second le 30 juin 2017 avec effet au 28 juillet 2017.
Ils ont été tous les deux embauchés par la société LGKH, M. [Z] le 1er septembre 2017 et M. [F] le 31 août 2017.
La société LGKH, immatriculée au RCS d'Evry, dont le siège social est situé à [Localité 7] et dont le gérant était M. [A] [P], exerce la même activité que la société GDME. Elle a été créée le 21 avril 2017.
La société GDME considère que la société LGKH, en concertation avec MM. [Z] et [F], a commis des actes de concurrence déloyale en débauchant ces salariés stratégiques, représentant sa force de vente, et en détournant sa clientèle, ce qui a entraîné la désorganisation de son activité et une chute importante de son chiffre d'affaires.
Le 13 septembre 2017, autorisée par ordonnance rendue sur requête par le président du tribunal de grande instance d'Evry sur le fondement de l'article 145 du code de procédure civile, elle a fait procéder à un constat d'huissier dans ses propres locaux, et le 20 mars 2018, sur ordonnance rendue sur requête par le même magistrat et sur le même fondement, elle a fait procéder à un autre constat dans les locaux de la société LGKH.
Le 30 novembre 2018, la société LGKH a assigné la société GDME en référé aux fins de rétractation de l'ordonnance ayant autorisé les opérations de constat dans ses locaux. Par ordonnance de référé du 30 novembre 2018, le président du TGI d'Evry a dit n'y avoir lieu à rétractation et a condamné la société LGKH aux dépens ainsi que sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
C'est ainsi que par actes du 22 février 2019, après une vaine tentative de résolution amiable du litige, la société GDME a assigné la société LGKH, MM. [Z] et [F] devant le tribunal de commerce d'Evry pour obtenir réparation des actes de concurrence déloyale dont elle estime avoir été victime.
Parallèlement à la procédure au fond, la société GDME a obtenu une ordonnance sur requête rendue par le juge de l'exécution du TGI d'Evry afin de faire pratiquer une saisie conservatoire sur les comptes de la société LGKH pour garantir la somme de 1 200 000 €, saisie qui a été pratiquée le 11 octobre 2019. Par ordonnance du 10 mars 2020, le juge de l'exécution a rejeté les demandes de mainlevée de la saisie conservatoire de la société LGKH et a condamné cette dernière aux dépens ainsi que sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Le 24 février 2020, le tribunal de commerce d'Evry a prononcé l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire à l'égard de la société GDME, avec pour date de cessation des paiements le 31 janvier 2020. Le 14 juin 2021, un plan de redressement a été mis en place.
C'est dans ce contexte que par jugement rendu le 16 mars 2022, le tribunal de commerce d'Evry :
s'est dit compétent pour juger de l'affaire ;
a dit que la société LGKH, MM. [M] [Z] et [J] [F] ont commis des actes de concurrence déloyale à l'encontre de la société GDME,
dit que la responsabilité délictuelle de la société LGKH, MM. [Z] et [F] est engagée envers la société GDME ;
débouté la société GDME de sa demande envers la société LGKH de voir cesser ses actes de concurrence déloyale ;
débouté la société GDME de sa demande de réparation de préjudice moral ;
condamné la société LGKH, MM. [Z] et [F], in solidum, à verser à la société GDME la somme de 150 000 € à titre de dommages-intérêts ;
débouté la société GDME de sa demande d'une amende civile de 10 000 € sur le fondement de l'article 32-1 du code de procédure civile ;
condamné la société LGKH, MM. [Z] et [F], in solidum, à verser à la société GDME la somme de 5 000 € à titre de réparation d'une procédure dilatoire ;
condamné la société LGKH, MM. [Z] et [F], in solidum, à verser la société GDME la somme de 23 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
ordonné l'exécution provisoire ;
condamné la société LGKH, MM. [Z] et [F], in solidum, aux dépens de l'instance, en ce compris les frais de signification de l'acte introductif de la présente instance et en ce compris les frais de greffe liquidés à la somme de 157,70 euros TTC.
La société GDME a interjeté appel de ce jugement le 10 mai 2022.
Dans ses dernières conclusions numérotées 3, transmises le 9 février 2024, la société GDME, appelante, demande à la cour de :
Vu les articles 31-1 et 700 du code de procédure civile,
Vu l'article 6 de la CEDH,
infirmer le jugement en ce qu'il a :
débouté la société GDME de sa demande envers la société LGKH de voir cesser ses actes de concurrence déloyale au préjudice de la société GDME,
débouté la société GDME de sa demande de réparation de préjudice moral à hauteur 50.000 €,
réduit la condamnation de la société LGKH, MM. [Z] et [F], in solidum, à verser à la société GDME la somme de 150.000 € à titre de dommages et intérêts alors que la demande formulée par la société GDME s'élevait à 2.2769.365,13 €,
débouté la société GDME de sa demande de condamnation à une amende civile de 10.000 € sur le fondement de l'article 32-1 du code de procédure civile,
condamné la société LGKH, MM. [Z] et [F], in solidum, à verser à la société GDME la somme de 5.000 € à titre de réparation pour procédure dilatoire alors que la demande formulée par la société GDME s'élevait à 10.000 €,
y ajoutant,
condamner la société LGKH, MM. [Z] et [F], in solidum, à verser à la société GDME les sommes suivantes :
1.792.694,60 € en réparation du préjudice financier subi se décomposant comme suit :
660.324,60 € au titre de la valeur de la clientèle détournée,
1.132.370 € (283.092,50 € x 4 ans) au titre de la perte de marge brute,
50.000 € à titre de préjudice d'organisation,
50.000,00 € à titre de préjudice moral,
30.000,00 € au titre du préjudice d'image,
condamner la société LGKH, MM. [Z] et [F], in solidum, à verser à la société GDME une amende civile de 10.000 € sur le fondement de l'article 32-1 du code de procédure civile,
condamner la société LGKH, MM. [Z] et [F], in solidum, à verser à la société GDME la somme de 10.000 € à titre de dommages et intérêts au regard de l'attitude dilatoire adoptée par la société LGKH, MM. [Z] et [F],
condamner la société LGKH, MM. [Z] et [F], in solidum, à verser à la société GDME les sommes suivantes :
35.000 € au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile (première instance),
15.000 € au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile (procédure appel),
débouter la société LGKH, MM. [Z] et [F] de l'ensemble de leurs demandes formulées au titre de l'appel incident,
ordonner aux frais de la société LGKH, MM. [Z] et [F], à titre de complément de dommages et intérêts, l'insertion par extrait ou en entier du jugement à intervenir dans trois journaux et revues aux choix de la société GDME pour un montant de 15.000 €,
ordonner à la société LGKH, MM. [Z] et [F], de cesser tout acte de concurrence déloyale, dès le jour de la décision à intervenir, à peine d'astreinte de 5.000 € par jour de retard et par infractions constatées,
condamner la société LGKH, MM. [Z] et [F], in solidum, aux entiers dépens.
Dans leurs dernières conclusions numérotées 3, transmises le 22 mai 2024, la société LGKH, MM. [Z] et [F], intimés et appelants incidents, demandent à la cour de :
Vu les articles L. 1411-1 et suivants du code du travail,
Vu les articles 1240 et 1241 du code civil (1382 et 1383 ancien),
Vu les articles 6, 9, 32-1, 49, 700, 901 du code de procédure civile,
confirmer le jugement en ce qu'il a :
débouté la société GMDE de sa demande envers la société LGKH de voir cesser ses actes de concurrence déloyale,
débouté la société GMDE de sa demande réparation de préjudice moral,
débouté la société GDME de sa demande d'une amende civile de 10.000 euros sur le fondement de l'article 32-1 du code de procédure civile,
par appel incident,
infirmer le jugement en ce qu'il a :
dit que la société LGKH, MM. [Z] et [F] ont commis des actes de concurrence déloyale « et condamné ces derniers à verser à la société GMDE »,
dit que la responsabilité délictuelle la société LGKH, MM. [Z] et [F] est engagée envers la société GDME,
condamné la société LGKH, MM. [Z] et [F] à verser à la société GMDE la somme de 150.000 euros à titre de dommages et intérêts,
condamné la société LGKH, MM. [Z] et [F] à verser à la société GMDE la somme de 5.000 euros à titre de réparation d'une procédure dilatoire,
condamné la société LGKH, MM. [Z] et [F] à verser à la société GMDE la somme de 23.000 euros à titre sur le fondement de l'article 700 du code procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens,
en conséquence, juger à nouveau :
recevoir l'intégralité des moyens et prétentions des défendeurs,
à titre principal,
dire qu'aucun acte de concurrence déloyale n'a été commis par la société LGKH et par MM. [Z] et [F] au préjudice de la société GDME,
dire qu'il n'existe pas de lien de causalité entre les difficultés financières de la société GDME et le départ de MM. [Z] et [F] et le début d'activité de la société LGKH,
dire que la juridiction prud'homale était exclusivement compétente pour trancher de la question de la violation par le salarié de ses obligations contractuelles,
y faisant droit,
juger que la responsabilité délictuelle de la société LGKH et de MM. [Z] et [F] ne peut être engagée,
juger que les demandes de la société GDME à l'égard de MM. [Z] et [F] sont infondées,
juger que la société GDME ne justifie pas de ses préjudices,
débouter la société GDME de sa demande tendant à voir condamner les intimés à lui verser la somme de 1.792.694,60 euros au titre du préjudice financier,
débouter la société GDME de sa demande tendant à voir condamner les intimés à lui verser la somme de 50.000 euros au titre du préjudice moral,
débouter la société GDME de sa demande tendant à voir condamner les intimés à lui verser la somme de 50.000 euros au titre du préjudice d'image,
débouter la société GDME de sa demande tendant à voir condamner les intimés à lui verser la somme de 50.000 euros au titre du préjudice d'organisation,
débouter la société GDME de sa demande tendant à voir condamner les intimés à lui verser la somme de 10.000,00 euros de dommages et intérêts pour attitude dilatoire adoptées par les intimés,
débouter la société GDME de sa demande tendant à voir condamner les intimés de cesser tout acte de concurrence déloyale, dès les jours de la décision à intervenir, à peine d'astreinte la somme de 5.000 euros par jours de retard et par infraction constatées,
débouter la société GDME de sa demande tendant à voir ordonner aux frais des intimés, l'insertion de la décision à intervenir dans trois journaux et revenues au choix de la société GMDE pour un montant 15.000 euros,
condamner la société GMDE à verser aux intimés la somme de 15.000 euros au titres frais exposé dans le cadre de la première instance, ainsi qu'aux entiers dépens et à défaut ramener ce montant à de plus juste proportion,
à titre subsidiaire,
juger que la société GDME ne justifie pas de son préjudice financier et ce faisant, ramener à de plus justes proportions le montant de la condamnation prononcée dans la décision déférée,
en tout état de cause,
débouter la société GDME de l'ensemble de ses demandes,
débouter la société GDME de sa demande tendant à voir les intimés condamnés à lui verser la somme de 15.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
condamner la société GDME à verser à la société LGKH et aux MM. [Z] et [F] la somme de 15.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
condamner la société GDME aux entiers dépens.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 28 mai 2024.
MOTIFS DE LA DÉCISION
En application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, il est expressément renvoyé, pour un exposé exhaustif des prétentions et moyens des parties, aux conclusions écrites qu'elles ont transmises, telles que susvisées.
Sur les demandes en concurrence déloyale de la société GMDE
Sur la recevabilité des demandes formées à l'encontre de MM. [Z] et [F]
MM. [Z] et [F] ainsi que la société LGKH estiment que la juridiction prud'homale était exclusivement compétente pour trancher la question de la violation par les salariés de leurs obligations contractuelles ; que la question de l'existence d'un manquement d'un salarié à son obligation de loyauté et/ou de confidentialité relève exclusivement de la compétence de la juridiction prud'homale ; que l'action en concurrence déloyale devant le tribunal de commerce d'Evry aurait dû intervenir dans le prolongement de l'action prud'hommale, visant à constater l'existence de manquement commis par les salariés.
La société GDME ne répond pas sur ce point.
C'est par de justes motifs, que la cour adopte, que le tribunal de commerce a rejeté l'exception d'incompétence soulevée en relevant que les demandes de la société GMDE étaient fondées exclusivement sur la responsabilité délictuelle de ses deux anciens salariés, au visa de l'article 1240 du code civil, et aucunement sur leur responsabilité contractuelle.
Le jugement sera donc confirmé sur ce point.
Sur la matérialité des actes de concurrence déloyale
La société GDME dénonce (i) le débauchage ciblé de ses « salariés clefs », (ii) le détournement d'informations sensibles et confidentielles, (iii) le détournement fautif de sa clientèle, (iv) ayant entraîné une désorganisation de son activité et une baisse importante de son chiffre d'affaires.
La société LGKH, MM. [Z] et [F] répondent que, alors que le principe est celui de la liberté du commerce, de l'industrie et de la concurrence, les actes reprochés ne sont pas constitutifs d'actes de concurrence déloyale, le lien de causalité entre les prétendus actes de concurrence déloyale et les préjudices allégués n'étant, de plus, nullement démontré.
La cour rappelle que les actes de concurrence déloyale sont sanctionnés au titre de la responsabilité de droit commun prévue à l'article 1240 du code civil lorsqu'ils excédent les limites admises dans l'exercice des activités économiques, au nom du principe de la liberté du commerce et de l'industrie. Fondée sur les dispositions des articles 1240 et 1241 du code civil, l'action en responsabilité pour concurrence déloyale suppose la réunion de trois éléments, soit une faute commise par la personne dont la responsabilité est recherchée, un dommage et un lien de causalité entre le dommage et le comportement reproché.
Il est acquis, en application du principe de la liberté du commerce et de l'industrie et de la libre concurrence, que l'embauche du salarié d'une entreprise concurrente n'est pas en elle-même fautive, dès lors que l'activité nouvellement exercée par ce salarié n'était pas interdite par une clause contractuelle et qu'elle n'a pas été accompagnée d'actes déloyaux ou de pratiques illicites. Cependant, le débauchage massif de salariés d'une société procédant de man'uvres déloyales émanant d'une société concurrente ayant conduit à sa désorganisation constitue un comportement fautif. De même, si le démarchage de la clientèle d'autrui, fût-ce par un ancien salarié, est en principe libre au nom des principes précités qui impliquent que les opérateurs économiques intervenant sur un même secteur d'activité se mettent en concurrence pour conquérir et retenir la clientèle, le détournement de la clientèle d'un concurrent est en revanche répréhensible s'il résulte de l'emploi de manoeuvres déloyales et frauduleuses et, plus généralement, de tous moyens illicites caractérisant une faute délictuelle.
Il incombe à la partie qui prétend avoir subi des actes de concurrence déloyale d'en rapporter la preuve.
Sur le débauchage ciblé de salariés clé
La société GDME fait valoir que MM. [Z] et [F] constituaient à eux deux le personnel clé et stratégique de la société, étaient en possession d'informations privilégiées et avaient accès à des données stratégiques ; qu'ils ont démissionné concomitamment, le premier en mai 2017, le second en juin 2017, et ont été immédiatement embauchés par la société LGKH ; que les pièces découvertes lors des opérations de constat ont révélé que dès avril 2017, LGKH avait prévu les conditions de leur embauche, plus favorables, notamment sur le plan financier, que celles dont ils bénéficiaient chez GDME, que le recrutement de MM. [Z] et [F] était déjà « validé », alors même que ces derniers n'ont présenté leur démission que plusieurs mois plus tard, et que la société LGKH souhaitait capitaliser sur les expériences et les connaissances professionnelles acquises par ces salariés chez GDME ; que ces débauchages ciblés et planifiés en fraude des droits de la société GDME caractérisent des actes de concurrence déloyale.
La société LGKH, MM. [Z] et [F] répondent qu'en l'absence de toute clause de non concurrence, il était normal et légitime que les deux salariés aient pu partir travailler chez un concurrent ; que leur qualification professionnelle ne pouvait que les conduire à rechercher un nouvel employeur dans le secteur des grossistes de matériel électriques, où il est fréquent que des salariés partent travailler chez des concurrents ; qu'aucun acte effectif de concurrence n'a été accompli, ni avant ni après le terme des contrats de travail ; que LGKH n'a pas été créée ni pensée par M. [Z], lequel a simplement accepté de rejoindre un ami d'enfance, M. [P], dont il connaissait le projet, en qualité de salarié, dans l'entreprise que celui-ci envisageait de créer ; que c'est dans ce contexte que M. [Z] a reçu le business plan rédigé par M. [P] ; qu'aucun comportement déloyal ne peut se déduire de ce document qui envisage le recrutement de MM. [Z] et [F] en qualité de salariés et non en qualité d'associés ou de gérants ; que ni M. [Z] ni M. [F] ne disposait de poste clé au sein de l'entreprise GDME ou d'un poste nécessitant un niveau de qualification élevée et très spécialisé ; qu'ils ne constituaient donc à pas à eux seuls, la « force de vente » de GMDE ; que GDME ne démontre pas en quoi le départ des deux salariés a entraîné la désorganisation du fonctionnement de l'entreprise, dès lors que procéder au remplacement de salariés à la suite de leur départ et former les nouveaux arrivants relèvent de la vie normale d'une entreprise.
Ceci étant exposé, il est acquis que les départs de MM. [Z] et [F], tous deux « vendeurs-préparateurs » au sein de la société GDME, sont concomitants, le premier ayant démissionné le 24 mai 2017 tandis que le second démissionnait le 30 juin 2017, et que ces départs ont suivi de peu la création de la société LGKH, immatriculée le 21 avril 2017, avec pour nom commercial « La Maison de l'électricien ». Il est établi que les deux anciens salariés de la société GDME ont été recrutés le même jour, 31 août 2017, par la société LGKH.
Il est constant que les sociétés GDME et LGKH ont des activités directement concurrentes ' le commerce en gros de matériel électrique ' et que leurs locaux sont situés non loin l'un de l'autre (une dizaine de kilomètres), ce qui, au regard de la nature de l'activité peut être considéré comme relevant d'une même zone de chalandise.
M. [Z] a été embauché par la société LGKH en qualité de « responsable magasin » avec une rémunération brute mensuelle de 2 700 euros alors qu'il percevait un salaire de 2 580 euros bruts au sein de la société GDME ; M. [F] s'est vu proposer également un poste de « responsable magasin » rémunéré, lui, 2 400 euros bruts mensuels, alors que son salaire mensuel précédent était de 1 650 euros bruts, ce qui constitue une substantielle augmentation.
L'extrait du registre unique du personnel produit par l'appelante montre que l'entreprise comptait au moment du départ de MM. [Z] et [F], outre son directeur, six salariés, dont quatre « vendeurs-préparateurs », de sorte que le départ des deux salariés, représentant, non pas, à eux seuls, la force de vente de l'entreprise comme il est prétendu, mais la moitié de cette force de vente, a nécessairement eu un impact sur son fonctionnement, peu important le faible degré de qualification allégué des intéressés.
Toutes ces circonstances doivent être appréciées au regard du fait que les opérations de constat menées dans les locaux de la société GDME le 13 septembre 2017 ont permis la découverte, sur l'ordinateur professionnel laissé par M. [Z], d'un document « Business plan ' La maison de l'électricien » portant la date de janvier 2017 (« 01/2017 »), indiquant qu' « A l'ouverture, l'équipe sera constituée d'un responsable magasin et d'agents de comptoir expérimentés bénéficiant d'une expérience significative dans le négoce. Ils sont connus et reconnus par les différents acteurs du marché, professionnels et fournisseurs », présentant la future entreprise comme comptant, outre un président (M. [P]) et un magasinier devant être recruté, deux salariés opérationnels, soit un « responsable magasin » « déjà validé », M. [Z], et un « responsable comptoir » « déjà validé », M. [F], comportant des informations personnelles concernant ces deux futurs salariés (numéros de téléphone portables, adresses, dates et lieux de naissance, situation de famille, nombre d'enfants à charge) dont les curriculum vitae étaient annexés, et annonçant que « La Maison de l'Electricien [allait] capitaliser sur les expériences professionnelles de [M] [Z] et [J] [F] qui entretiennent une relation de confiance et de longue date avec ces professionnels et qui ont les mêmes attentes ». Ce document révèle donc que dès janvier 2017, bien avant les démissions des deux salariés, la société LGKH en cours de formation avait programmé le recrutement MM. [Z] et [F], composant la moitié de la force de vente de la société GDME, avec lesquels elle avait déjà manifestement établi des contacts et sur l'expérience et les contacts professionnels desquels elle comptait « capitaliser ».
En outre, lors du constat opéré le 20 mars 2018 dans les locaux de la société LGKH, l'huissier instrumentaire, consignant les déclarations de M. [Z], a indiqué que « la société LGKH a été ouverte en septembre 2017 à l'initiative de Monsieur [A] [P], lequel m'a débauché et a pu profiter de son réseau. [M] [Z] et [A] [P] étaient des amis d'enfance. [A] [P] était chargé de gérer le côté financier et [M] [Z] jouissait d'une bonne réputation et d'un réseau solide ». Un procès-verbal de constat réalisé sur le compte Facebook de la société LA MAISON DE L'ELECTRICIEN (LGKH) le 24 juin 2019 confirme que la société mettait particulièrement en avant la présence de MM. [Z] et [F] en son sein, indiquant « [M] et [J], forts de leur expérience, vous accompagneront dans la réalisation de vos projets par leur écoute et l'établissement de vos devis ».
Sur le détournement d'informations sensibles et confidentielles
La société GDME soutient que la société LGKH, par le biais de MM. [Z] et [F], a obtenu des informations ciblées, stratégiques et confidentielles la concernant, telles que la liste de ses clients et fournisseurs, ses conditions commerciales, ses grilles tarifaires et sa politique des prix ; que la société LGKH s'est ainsi trouvée en possession d'informations privilégiées réunies par la société GDME puisque le fichier prétendument créé via le site « Societe.com », censé référencer de « potentiels partenaires » dans un rayon de 30 km, correspond en réalité au fichier clients de la société GDME, certaines des entreprises référencées se situant d'ailleurs à plus de 300 km du siège de la société LGKH ; que ce fichier contient trois feuillets respectivement dénommés « listing clients », « listing prospects 91 » et « listing prospects 75 », ce qui démontre bien qu'il ne s'agit pas de « potentiels partenaires » ; que toutes les références contenues dans ce fichier font partie du fichier clients de la société GDME, en ce compris les fautes de frappe affectant le fichier GDME.
La société LGKH, MM. [Z] et [F] opposent que GDME prétend que l'ensemble des références contenues dans le fichier « listing clients » identifié dans le procès-verbal de constat fait partie de son fichier clients, sans jamais justifier de la réalité de ce dernier ; que GDME ne justifie donc aucunement de ses relations commerciales avec la liste des clients prétendument détournés sur la période de 2017/2016 jusqu'à ce jour ; que le détournement n'est pas établi en ce que la venue de l'huissier et de l'informaticien au sein de la société GDME n'a pas permis d'établir l'envoi ou l'impression d'un quelconque fichier client et ou fournisseur par MM. [Z] et [F], mais simplement le fait que ces fichiers étaient éventuellement présents sur un poste à disposition de la société GDME durant de longues semaines faisant suite aux départs des salariés ; que le constat n'a pas permis d'établir la réception d'un quelconque fichier clients ou fournisseurs mais au contraire l'existence de fichiers créés et donc nouveaux, preuve de l'absence de tout détournement ; que la société GDME n'a procédé à aucun comparatif avec son fichier fournisseurs ; que le procès-verbal de constat du 13 septembre 2017 et ses annexes ne démontrent aucunement l'existence de man'uvres frauduleuses ou démarches fautives de la part des intimés ; qu'il n'est donc pas démontré que LGKH ait été en possession du fichier clients et du fichier fournisseurs de GDME.
Ceci étant exposé, le seul fait, pour une société à la création de laquelle a participé l'ancien salarié d'un concurrent, de détenir des informations confidentielles relatives à l'activité de ce dernier et obtenues par ce salarié pendant l'exécution de son contrat de travail, constitue un acte de concurrence déloyale (Cass, 7 décembre 2022, Foncia Marne la Vallée).
En l'espèce, il ressort du constat d'huissier établi le 20 mars 2018 (pièce 4 appelante) que se trouvait sur le poste informatique utilisé par M. [Z] au sein de la société LGKH une liste de clients au sujet de laquelle M. [Z] a déclaré qu'elle avait été créée via le site societe.com référençant de potentiels partenaires dans un rayon de 30 kms. La société GDME objecte que certaines entreprises clientes se trouvent à plus de 30 kms du siège de la société LGKH dans des départements très éloignés de l'Essonne (Vienne, Jura, Guadeloupe), voire à l'étranger (Budapest), que ce fichier contient les mêmes fautes de frappe que celles contenues dans son propre fichier clients et qu'il a en réalité été extrait de celui-ci. Cependant, les pièces au dossier ne permettent pas à la cour de vérifier que le fichier trouvé sur l'ordinateur de M. [Z] au sein de la société LGKH provient du fichier de la société GDME tel qu'il a été trouvé sur l'ordinateur précédemment utilisé par M. [Z] dans les locaux de cette dernière lors du constat réalisé le 13 septembre 2017 (pièce 2 appelante) : en effet, ce constat effectué au sein de la société GDME comprend (en annexe 7) une photographie listant de façon manifestement incomplète le « palmarès clients 2017 » de la société GDME comportant environ 25 noms d'entreprises (pour certains illisibles) alors que le constat effectué au sein de la société LGKH (pièce 4 appelante) comporte une fiche annexée, au demeurant non répertoriée au sein du bordereau de pièces du constat, ne comportant ni intitulé ni numérotation, qui consiste en une liste de deux pages de plus de deux cents entreprises, quasiment illisible en raison de la taille des caractères et de la mauvaise qualité d'impression, ne faisant en tout état de cause nullement ressortir les « trois feuillets (') dénommés : LISTING CLIENTS, LISTING PROSPECTS 91 et LISTING PROSPECTS 75 » invoqués en page 36 des conclusions de l'appelante, de sorte qu'il n'est pas possible de procéder utilement à une comparaison des deux listes et de dire si des noms de clients de la société GDME se retrouvent sur la liste trouvée dans les locaux de la société LGKH. Aucune comparaison n'est par ailleurs proposée par l'appelante en ce qui concerne les fournisseurs des deux sociétés. La cour constate en outre que la société appelante s'abstient de comparer ou même de commenter la liste trouvée au sein de la société LGKH et les deux listes ' fournies curieusement par cette dernière (pièces 50 et 52 intimés) ', qui sont présentées comme le fichier fournisseurs et le tableau clients de la société GDME. L'examen de ces pièces et de la pièce 4 de l'appelante, pour autant qu'il est possible compte tenu de la petitesse des caractères et de la mauvaise qualité de l'impression, ne permet pas de conclure que, comme le soutient l'appelante, le contenu du fichier clients trouvé sur l'ordinateur de M. [Z] a été puisé, y compris avec les fautes de frappe, dans le fichier clients de la société GDME.
Pour autant, dans un courriel adressé à M. [H] le 24 août 2017, M. [Z], avant même son embauche par la société LGKH, indique : « Je me présente je suis [M] [Z] anciennement GDME à [Localité 12] et je me permets de venir vers vous et de vous envoyer une liste de prix des produits que j'avais l'habitude de vous fournir. Je suis dorénavant distributeur indépendant en matériel électrique situé à [Localité 7] et propose une offre de produits assez large ainsi que des services. Je vous laisse découvrir l'offre de prix. Si vous avez des questions n'hésitez pas à me contacter » (pièce 37 appelante). Cette pièce suffit à établir que M. [Z], pour le compte et au profit de la société LGKH, son futur employeur, a utilisé des informations confidentielles concernant les prix pratiqués par la société GDME pour un certain nombre de produits pour proposer ces mêmes produits, à des prix manifestement inférieurs, à un client de cette dernière avec lequel il était précédemment en relation, ce qui caractérise un comportement déloyal.
Est par ailleurs produit un courriel adressé le 16 novembre 2017 par la société LGKH ([J] [F]) à la société RAM FIXATION (M. [G]), un fournisseur, l'invitant à « regarder le prix des références 59210 & 93762 », suivi d'un courriel du 20 novembre 2017 dans lequel M. [G] invite une collègue à modifier les conditions proposées à la société LGKH pour « lui faire les mêmes conditions que GDME 91 [Localité 12] y compris pour les prix nets, avec en plus un 50 + 20 sur la famille Ramtub et la famille bande perforée » (pièces 39 et 40 appelante), ce qui tend à établir que, comme le plaide l'appelante, la société LGKH s'est prévalue, auprès de fournisseurs, des conditions tarifaires appliquées à la société GDME pour négocier les siennes, ce qui n'a été possible que parce qu'elle détenait des informations confidentielles appartenant à cette dernière, ce qui caractérise un comportement déloyal.
Le grief de détournement d'informations sensibles et confidentielles apparaît ainsi fondé.
Sur le détournement de clientèle
La société GDME soutient que grâce aux informations confidentielles qu'ils ont détournées, la société LGKH, MM. [Z] et [F] ont pu s'emparer de sa stratégie commerciale en vue de détourner les clients ; qu'ainsi, la société LGKH s'est contentée de reprendre les propositions commerciales établies par GDME afin de capter sans effort sa clientèle ; que les intimés ont démarché les clients de GDME en usant de procédés déloyaux, à savoir en utilisant des données privilégiées appartenant à la société GDME (fichier clients, liste de fournisseurs, tarifs pratiqués, offres commerciales), en usant de leur qualité d'anciens employés de GDME afin de bénéficier du crédit de cette dernière auprès des clients démarchés et en utilisant leurs connaissances acquises lors de leur activité au sein de GDME quant aux besoins et exigences des clients ; qu'en outre, dans le cadre de ses rapports avec la clientèle détournée, LGKH a eu recours aux fournisseurs de la société GDME et s'est prévalue des conditions tarifaires appliquées à la société GDME pour négocier les siennes ; que le démarchage fautif de sa clientèle a été reconnu à deux reprises par les intimés.
Les intimés soutiennent que GDME ne démontre ni l'existence de man'uvres déloyales en vue de détourner les clients de sa société, ni la captation avérée de sa clientèle par la société LGKH ; que si MM. [Z] et [F] ont bien adressé des courriels à des professionnels du secteur, ils n'ont utilisé aucun procédé déloyal ; que dans aucun des courriels produits, ces deux salariés ne dénigrent la société GDME ou ses produits, pas plus qu'il n'est mis en avant une politique de prix agressive ou tout autre procédé de nature à emporter la qualification d'acte de concurrence déloyale ; que MM. [Z] et [F] se contentent d'aviser ces entreprises de leur changement d'employeur, afin d'éviter tout ambiguïté ou quiproquo, et de communiquer une liste de produits de la société LGKH ; qu'il ne s'agit pas d'un démarchage systématique ; que les deux salariés n'étaient liés par aucune clause de confidentialité à l'égard de leur ancien employeur et que la référence à la société GDME ne leur a procuré aucun avantage pas plus qu'à leur nouvel employeur ; qu'aucune adresse email ou nom de personnes physiques ne se trouvant dans les fichiers clients retrouvés, il ne peut être soutenu que MM. [Z] et [F] se sont servis des fichiers détournés par eux pour contacter les clients ; que l'existence de ces sociétés clientes étaient des informations disponibles pour tout un chacun et leurs coordonnées aisément accessibles sur différents sites internet répertoriant les activités par secteur et zones géographiques ; qu'en dépit des saisies effectuées au sein des sociétés GDME et LGKH, seuls quelques mails non pertinents ont pu être relevés, sur des fichiers clients prétendument volés contenant plus de mille références ; que GDME ne prouve pas que les clients ayant reçu les courriels litigieux ont choisi de travailler avec LGKH et n'ont plus sollicité GDME ; que l'appelante ne rapporte pas la preuve d'actes déloyaux commis par les intimés en vue de détourner la clientèle, notamment par l'exploitation déloyale d'informations confidentielles.
Ceci étant exposé, il a été vu ci-dessus que M. [Z], au profit de la société LGKH, a démarché un client ([H]) de la société GDME en lui proposant des prix inférieurs pour des produits qu'il lui avait précédemment fournis lorsqu'il était salarié de la société GDME, ce qui n'a été possible qu'en utilisant des données sensibles de son précédent employeur et caractérise ainsi un comportement déloyal. Il n'est cependant pas démontré que ce client a été effectivement détourné par la société LGKH.
La société appelante se prévaut par ailleurs vainement de trois courriels dans lesquels M. [F] annonce à des clients ou fournisseurs qu'il a quitté la société GDME et travaille désormais pour une entreprise concurrente à [Localité 7] avec M. [Z], et les invite à visiter le site de la nouvelle société ou leur indique qu'il les recevra avec plaisir dans ses locaux (pièces 34 à 36), ce qui correspond à une démarche légitime de la part d'un salarié exerçant des fonctions de « vendeur » qui informe des personnes avec lesquelles il était en relations suivies de l'évolution de sa situation professionnelle, et ne traduit, en soi, aucun détournement déloyal de clientèle.
De même, la société GDME ne peut invoquer utilement les propos tenus à l'huissier de justice par M. [Z], lors des opérations de constat au sein de la société LGKH, qui a indiqué : « S'agissant du réseau clients et fournisseurs, les premiers contacts téléphoniques sont intervenus à compter d'aout 2017 », ce dont on ne peut déduire un aveu de démarchage déloyal de clientèle. Et si MM. [Z] et [F] ont reconnu, dans des conclusions communiquées en première instance, avoir « bien démarché quatorze clients de la société GDME », ils ont toujours contesté avoir recouru à des procédés déloyaux pour ce faire, étant souligné qu'il est courant, notamment dans de petites entreprises comme en l'espèce, que des commerciaux entretiennent des relations suivies, voire personnelles, avec des clients ou des fournisseurs, dont ils connaissent par conséquent les coordonnées et qu'ils peuvent dans leur nouvel emploi contacter sans déloyauté, fût-ce au profit d'une entreprise concurrente. Il est souligné en outre que ni M. [Z] ni M. [F] n'était tenu par une clause de non concurrence ou de confidentialité à l'égard de la société GDME.
Par ailleurs, comme le plaident les intimés, la société appelante n'explicite pas comment elle « a été en mesure d'identifier » les 244 clients prétendument détournés qu'elle liste en pages 46 à 48 de ses écritures, dont les noms ne coïncident pas avec ceux de la liste du procès-verbal de constat du 20 mars 2018, pour autant que la cour puisse le vérifier précisément compte tenu de la très faible lisibilité de ladite liste, ni de justifier que ces 244 clients ont été effectivement détournés par la société LGKH.
De son côté, la société LGKH justifie (sa pièce 43) que de nombreuses sociétés listées dans les écritures de l'appelante, ont été radiées du registre du commerce et des sociétés ou ont fermé sur une période comprise entre juin 2014 et septembre 2022. Elle fournit en outre une attestation de son expert-comptable, le cabinet ADICCT CONSEIL, ainsi qu'elle en justifie (pièces 59 et 64), indiquant que la société, de sa création jusqu'au 31 août 2022, n'a pas réalisé de chiffre d'affaires avec 120 de ces 244 clients, et il n'est pas démontré que les 124 clients avec lesquels elle reconnaît ainsi implicitement avoir réalisé un chiffre d'affaires ont été détournés de façon déloyale, la clientèle étant volatile comme le confirment les pièces 39 et 40 précitées révélant qu'un fournisseur accepte la demande d'un client de s'aligner sur les prix inférieurs proposés à un autre client pour ne pas risquer de le perdre, et certains clients ayant pu librement décider de suivre M. [Z] et M. [F], avec lesquels ils étaient précédemment en relation, dans la nouvelle entreprise.
En définitive, au vu des pièces produites par la société GDME à qui la charge de la preuve incombe, le grief de détournement de clientèle ne peut être retenu.
Sur la désorganisation de l'activité de la société GDME et la baisse de son chiffre d'affaires
La société GDME soutient qu'elle se trouve désorganisée à la suite des agissements fautifs et déloyaux ; que les démissions concomitantes avant la période de congé estival des deux anciens salariés expérimentés, au rôle clé et qui représentaient à eux deux la force de vente de l'entreprise, l'ont contrainte à recruter en urgence pour pallier au débauchage fautif, à former les nouveaux salariés sur un logiciel spécifique, à familiariser les salariés avec son stock de 5 000 références et à les présenter à sa clientèle, ainsi qu'à les familiariser aux habitudes, attentes de ses clients, ce qui était de nature à engendrer des erreurs ou retards dans le traitement des commandes ; qu'à l'égard de la clientèle détournée, LGKH pratique systématiquement des tarifs inférieurs à ceux habituellement pratiqués par GDME et a recours au même fournisseur ; que les actes de concurrence déloyale commis par les intimés démontrent une intention de nuire à son égard et caractérisent un abus de la liberté du commerce qui lui cause un trouble commercial ; que de fait, ces actes ont un impact important sur son chiffre d'affaires ; qu'en août 2017, GDME a réalisé un chiffre d'affaires de 52 917,00 € contre 65 488,00 € sur la même période en 2016, soit une baisse de chiffre d'affaires de 19,20 % dès le démarrage effectif de l'activité de la société LGKH composée de ses deux anciens salariés ; que son expert-comptable a constaté que la perte du chiffre d'affaires constatée sur la période août 2017 / octobre 2017 par rapport à l'année précédente sur la même période et qui concerne des clients réguliers de la société GDME a été de 111 273 € ; qu'ensuite, GDME a subi une baisse constante de son niveau d'activité ainsi qu'il ressort de l'attestation comptable EURO COMPTA FINANCE (une baisse de 41,84 % entre les mois de décembre 2016 et de décembre 2017 ; de 22,77 % entre janvier et mai 2017 et janvier et mai 2018 ; plus de 830 000 € de perte de chiffre d'affaires entre 2016 et 2020) ; que les actes déloyaux remettent donc en question la pérennité financière de GDME, alors même qu'elle se présente sur le marché depuis près de 20 ans et jouit d'une renommée évidente, fruit de ses investissements et de son travail ; que ces actes ont entraîné son placement redressement judiciaire (du 23 février 2020 au 14 juin 2021).
Les intimés répondent que GDME ne démontre pas en quoi le départ de MM. [Z] et [F] a entraîné la désorganisation du fonctionnement de l'entreprise dès lors que procéder au remplacement de salariés à la suite de leur départ et former les nouveaux arrivants relèvent de la vie normale d'une entrepris et que la faible importance de ces salariés pour la continuité de l'activité de la société GDME est corroborée par le peu d'intérêt qui leur a été porté du temps où ils faisaient partie de ses effectifs ; que par ailleurs, les difficultés financières de GDME sont antérieures au départ de ces deux salariés et n'ont aucun lien de causalité avec les actes reprochés ; que la chute du chiffre d'affaires de la société GDME a en effet débuté de façon significative en 2015 et non à la suite du départ de MM. [Z] et [F] et du démarrage de l'activité de la société LGKH ; que l'on constate par ailleurs que postérieurement à la création de LGKH, les résultats financiers de GDME sont positifs, alors même qu'à la période à laquelle LGKH s'est constituée, GDME était déjà dans des difficultés financières sérieuses ; que dans le cadre du redressement judiciaire, situation dont elle n'a pu sortir que grâce à la somme perçue suite au jugement, la date de cessation des paiements a d'ailleurs été fixée au 31 janvier 2020, soit une date très éloignée de la création de LGKH ; que GDME a refusé de communiquer le rapport du mandataire judiciaire ; que si les intimés étaient réellement à l'origine des actes de concurrence déloyale prétendus, la société GDME aurait subi une perte de son chiffre d'affaires de manière continue à compter du mois d'avril 2017 (constitution de LGKH), ce qui n'est pas le cas ; qu'après vérification auprès de son expert-comptable, LGKH n'a pas réalisé de chiffre d'affaires avec les clients prétendument captés ; que les difficultés financières de GDME peuvent être liées à la gestion douteuse de M. [V], gérant de fait de la société, précédemment gérant de deux sociétés dans le même secteur d'activité qui ont toutes deux été placées en liquidation judiciaire.
Ceci étant exposé, le départ concomitant de MM. [Z] et [F] en mai et juin 2017, afin de rejoindre immédiatement la société LGKH concurrente, comme cela avait été programmé depuis plusieurs mois, et alors que les salariés débauchés ont utilisé des informations confidentielles concernant les prix pratiqués par la société qui était leur ancien employeur ou les conditions tarifaires dont elle bénéficiait en tant que cliente, a nécessairement entraîné une désorganisation de la société GDME. Cette désorganisation doit cependant être relativisée dans une large mesure eu égard au fait que MM. [Z] et [F] ne représentaient pas l'intégralité de la force de vente de la société GDME, constituée de quatre « vendeurs-préparateurs », mais seulement de la moitié de cette force de vente, qu'il n'est pas justifié que ces deux salariés bénéficiaient d'une formation, d'une ancienneté ou de responsabilités particulièrement importantes par rapport à leurs collègues demeurés dans l'entreprise et que, comme le souligne la société intimée, le remplacement de salariés démissionnaires relève de la vie normale d'une entreprise, la société appelante reconnaissant au demeurant avoir recruté deux préparateurs-vendeurs dès le 30 août et 1er septembre 2017, soit très peu de temps après le départ de MM. [Z] et [F], et un autre le 4 décembre 2017 (dès le départ, le 30 novembre, de l'une de ces nouvelles recrues). Elle doit être relativisée également en tenant compte du fait que ces deux salariés n'étaient pas tenus par une clause de non-concurrence et qu'il n'est pas contraire aux usages normaux du commerce que des salariés non soumis à un engagement de non concurrence soient recrutés par une entreprise intervenant dans le même secteur d'activité à raison de leurs compétences et de leur expérience acquises auprès d'un précédent employeur.
Les documents comptables produits au débat par les parties montrent par ailleurs que le chiffre d'affaires de la société GDME s'élevait à 2 336 916 € au 31 décembre 2014, avant de connaître une baisse régulière ensuite pour passer à 1 554 519 € au 31 décembre 2015 (pièce 9 LGKH), 1 467 388 € au 31 décembre 2016, 1 237 104 € au 31 décembre 2017 et 1 058 974 € au 31 décembre 2018, puis une hausse en 2019/2020 (1 212 216 € au 31 juin 2020) (pièces 45, 66 et 69 GDME). La forte baisse enregistrée en 2015, qui marque le début d'une diminution continue jusqu'en 2018, intervient donc avant le départ de MM. [Z] et [F] (mai / juin 2017) et la création de la société LGKH (avril 2017). Au titre de l'année 2017 (départ de salariés et création de la société LGKH), la pièce 42 de l'appelante montre que la baisse de chiffre d'affaires commence dès le début de l'année, soit avant les faits litigieux. La cour relève en outre que le résultat net en 2018, année qui suit immédiatement les faits litigieux, est positif (11 857 €) alors qu'il était de -176 618 € à la fin de l'année 2015 qui précède ces mêmes faits.
Il s'ensuit que si le débauchage déloyal des deux salariés qui ont apporté à la société nouvelle des informations sensibles ou confidentielles dont elle a pu tirer profit pour les besoins de son activité concurrente à celle de la société GDME, faits constitutifs de concurrence déloyale, a nécessairement entraîné une certaine désorganisation de l'entreprise, le lien de causalité entre ces faits et la perte alléguée de chiffre d'affaires, et partant de marge brute, n'est pas établi.
Sur l'imputabilité des faits de concurrence déloyale
La société GDME soutient que, comme le tribunal de commerce l'a reconnu, MM. [Z] et [F] ont commis conjointement des fautes de concurrence déloyale à son préjudice et que leur responsabilité doit en conséquence être engagée ; que dès le début de l'activité de la société LGKH, ils ont démarché sa clientèle en adressant, à la chaîne, des courriels d'information sur les tarifs pratiqués par la LKGH, que M. [F] n'a pas manqué de reconnaitre de manière explicite que M. [Z] « a monté » « l'agence » », ce que l'intéressé a confirmé à l'huissier de justice ; qu'au sein de LGKH, MM. [Z] et [F] ont bien plus que la simple qualité de salariés ; qu'ils jouissent en effet de la qualité de dirigeants, dans la mesure où ils ont tous deux accès au logiciel de gestion 1K (logiciel intégré de gestion commerciale et de comptabilité pour la gestion des PME de négoce) en « priorité 9 » correspondant au niveau maximum d'autorisation d'accès, ayant donc un accès à l'ensemble des données, sans aucune restriction et notamment la comptabilité, la trésorerie, les salaires ; qu'ils n'hésitent d'ailleurs pas à mettre en avant leurs qualités de dirigeant auprès de tiers.
Les intimés répondent que la société GDME n'a pas saisi le conseil de prud'hommes à l'encontre de ses deux anciens salariés alors qu'elle se prévaut d'actes de déloyauté de leur part dans l'exécution de leurs contrats de travail ; que l'action en concurrence déloyale devant le tribunal de commerce aurait dû intervenir dans le prolongement d'une action prud'hommale visant à constater l'existence d'un manquement des salariés ; qu'en l'état, il n'est donc pas établi que MM. [Z] et [F] ont manqué à leurs obligations à l'égard de la société GDME en leur qualité d'anciens salariés ; qu'en l'absence de toute clause de non concurrence, il est légitime que MM. [Z] et [F] aient pu partir travailler chez un concurrent ; que leur qualification professionnelle ne pouvait que les conduire à rechercher un nouvel employeur dans le secteur des grossistes de matériel électriques, où il est fréquent que des salariés partent travailler chez des concurrents ; qu'aucun acte effectif de concurrence n'a été commis, ni avant ni après le terme des contrats de travail ; que la société LGKH n'a pas été créée ni pensée par M. [Z] qui a simplement accepté de rejoindre son ami d'enfance dont il connaissait le projet, en qualité de salarié, dans l'entreprise que celui-ci envisageait de créer ; que c'est dans ce contexte que M. [Z] a reçu le business plan réalisé par M. [P] ; qu'aucun comportement déloyal ne peut se déduire de ce document qui envisage le recrutement de MM. [Z] et [F] en qualité de salariés et non en qualité d'associés ou de gérants ; que ni M. [Z], ni M. [F] ne disposait de poste clé au sein de l'entreprise GDME ou d'un poste nécessitant un niveau de qualification élevée et très spécialisée.
Ceci étant exposé, il a été dit que l'action de la société GMDE dirigée à l'encontre de MM. [Z] et [F] était fondée exclusivement sur la responsabilité délictuelle de ses deux anciens salariés, au visa de l'article 1240 du code civil, et aucunement sur leur responsabilité contractuelle. Cette action ne nécessitait pas comme préalable la reconnaissance par une juridiction prud'homale de la faute contractuelle des salariés.
Par ailleurs, il ressort des développements qui précèdent que MM. [Z] et [F] ont été étroitement associés à la création de la société LGKH, M. [Z] étant même en possession du business plan de celle-ci, et qu'ils ont utilisé, l'un et l'autre, dans le cadre de leurs fonctions au sein de la société nouvellement créée, des informations sensibles ou confidentielles provenant de leur ancien employeur.
Le rôle de M. [Z] dans la création de la société LGKH est confirmé par un courriel du 30 août 2017 adressé par M. [F] à « [B] » de la société BCE dans lequel il indique « Pour la petite nouvelle, j'ai quitté GDME et je travaille maintenant dans l'agence que [M] a monté à [Localité 7] » (pièce 34 appelante), par le fait que le business plan de la future société daté de janvier 2017 a été retrouvé sur son poste informatique comme il a été dit et par le sigle LGKH qui constitue la dénomination sociale de la société et qui représente manifestement la réunion des initiales de [A] [P] et de [M] [Z].
En outre, un procès-verbal de constat réalisé le 24 juin 2019 sur le compte Facebook « [M] [J] » créé par les deux anciens salariés mentionne à la rubrique « Emploi » : « La Maison de l'électricien ' Direction ' [Localité 7] ' Grossiste matériels électrique ».
Le tribunal sera donc approuvé en ce qu'il a condamné in solidum les deux anciens salariés et la société LGKH à réparer le préjudice subi par la société GDME. Les modalités de cette condamnation, tenant compte de l'implication et de la responsabilité de chacun dans la commission des actes délictuels, seront précisées ci-après.
Sur les réparations
Les demandes indemnitaires
Pour les raisons qui ont été exposées précédemment, la société GDME sera déboutée de sa demande au titre d'un préjudice financier résultant de la valeur de la clientèle détournée et de sa perte de marge brute.
Le préjudice né de la désorganisation qu'elle a subie du fait du débauchage ciblé de deux de ses vendeurs et de l'appropriation qui a été faite de données sensibles et confidentielles qui ont été détenues et utilisées par une entreprise directement concurrente, dans un contexte où elle connaissait déjà des problèmes financiers, sera indemnisée par l'allocation d'une somme de 30 000 €.
Le préjudice moral né d'actes délictuels commis notamment par d'anciens salariés au profit d'un concurrent direct sera indemnisé par l'allocation de la somme de 10 000 €.
Les intimés, qui ont tous concouru par leurs actes à la réalisation du préjudice de la société GDME, supporteront ces condamnations in solidum. Toutefois, compte tenu de leur implication respective dans la responsabilité des actes délictuels, qui ont essentiellement profité à la société LGKH, ils seront tenus, dans leurs relations entre eux, à hauteur de 6% chacun pour ce qui concerne MM. [Z] et [F], et de 88% pour ce qui est de la société LGKH.
Aucun préjudice d'image n'étant démontré, la société appelante sera déboutée de ce chef.
Le jugement sera réformé en ce sens.
Les autres mesures
Compte tenu de l'ancienneté des faits, le jugement sera confirmé en ce qu'il a rejeté la demande de la société GDME tendant à voir ordonner à la société LGKH la cessation des actes de concurrence déloyale constatés et la publication du jugement.
Sur les demandes de la société GDME au titre de l'amende civile et de l'attitude dilatoire des défendeurs en première instance
La société GDME demande que la société LGKH et MM. [Z] et [F] soient condamnés à lui verser une amende civile de 10 000 € sur le fondement de l'article 32-1 du code de procédure civile, outre une somme de 10 000 € à titre de dommages intérêts. Elle soutient qu'en première instance, les défendeurs ont adopté un comportement qui n'est pas digne de justiciables de bonne foi, ne cessant de multiplier les moyens dilatoires en soulevant un incident de procédure avant de s'en désister, en attendant plus de deux ans avant de remettre en cause l'authenticité d'une pièce versée au débat (le procès-verbal de constat du 20 mars 2018) alors qu'ils avaient connaissance de cette pièce depuis le début de la procédure et en remettant en cause la qualité de M. [V] au sein de la société GDME.
La société LGKH et MM. [Z] et [F] répondent que le fait de solliciter un incident puis de se raviser ne relève pas d'une attitude dilatoire mais d'une stratégie de défense qui peut évoluer au fil du temps si cela s'avère nécessaire ; que c'est de manière légitime, après plusieurs demandes restées sans réponse de communication du procès-verbal de constat du 20 mars 2018 dans son intégralité, qu'ils ont remis en cause ce constat d'huissier ; qu'ils n'ont nullement souhaité retarder le jugement, sollicitant à de nombreuses reprises la clôture de la procédure et le renvoi de l'affaire à une date de plaidoiries ; que de son côté, la société GDME est restée silencieuse face à différentes sommations de communiquer des éléments nécessaires aux droits de la défense.
Sur l'amende civile
Aux termes de l'article 32-1 du code de procédure civile, « Celui qui agit en justice de manière dilatoire ou abusive peut être condamné à une amende civile d'un maximum de 10 000 euros, sans préjudice des dommages-intérêts qui seraient réclamés ».
L'amende civile est une amende prononcée par le juge s'il estime que l'action du demandeur est abusive. Elle n'est pas assimilable à des dommages et intérêts, son montant ne revenant pas au défendeur mais au Trésor public. Sa mise en oeuvre n'appartient pas aux parties et la cour estime que les conditions d'application de ces dispositions ne sont, en l'espèce, pas réunies.
Le jugement sera par conséquent confirmé en ce qu'il a rejeté cette demande de la société GDME.
Sur les dommages et intérêts pour comportement dilatoire en première instance
Il ressort des pièces versées au dossier par la société LGKH qu'elle a adressé plusieurs sommations de communiquer à la société GDME tendant à la communication, notamment, du CD-ROM annexé au constat d'huissier du 20 mars 2018 (avril 2021) et des bilans et comptes de résultat des exercices comptables de cette société pour les années 2015 à 2018 (mai 2019, juin 2019). Sa mise en cause, même tardive, du procès-verbal précité réalisé le 20 mars 2018 dans ses locaux ne paraît pas abusive compte tenu des carences présentées par les deux procès-verbaux de constat produits par la société GDME, telles que relevées dans les développements qui précèdent.
Par ailleurs, le comportement dilatoire de la société LGKH ne peut résulter du fait qu'elle s'est désistée d'un incident de procédure en première instance.
Le jugement sera par conséquent infirmé en ce qu'il a condamné in solidum la société LGKH, MM. [Z] et [F] à verser à la société GDME la somme de 5 000 € à titre de réparation d'une procédure dilatoire et la société GDME se verra déboutée de sa demande présentée en cause d'appel tendant à l'augmentation de ces dommages et intérêts.
Sur les dépens et frais irrépétibles
La société GDME, d'une part, la société LGKH et MM. [Z] et [F], d'autre part, succombant sur une partie de leurs prétentions respectives en appel, chaque partie supportera les dépens afférents à l'exercice de cette voie de recours et conservera la charge de ses frais non compris dans les dépens exposés devant la cour, les dispositions prises sur les dépens et les frais irrépétibles de première instance étant confirmées.
PAR CES MOTIFS,
Confirme le jugement sauf en ce qu'il a :
débouté la société GDME de sa demande de réparation de préjudice moral,
condamné la société LGKH, MM. [Z] et [F], in solidum, à verser à la société GDME la somme de 150 000 € à titre de dommages-intérêts,
condamné la société LGKH, MM. [Z] et [F], in solidum, à verser à la société GDME la somme de 5 000 € à titre de réparation d'une procédure dilatoire,
L'infirme de ces chefs,
Statuant à nouveau et y ajoutant,
Condamne in solidum la société LGKH, MM. [Z] et [F] à payer à la société GDME la somme de 40 000 € en réparation de son préjudice de désorganisation et de son préjudice moral nés des actes de concurrence déloyale,
Dit que la société LGKH sera tenue à hauteur de 88 % de ces condamnations et MM. [Z] et [F] à hauteur de 6 % chacun,
Déboute la société GDME de ses demandes au titre du préjudice financier né du détournement de clientèle et de la perte de marge brute, du préjudice d'image et pour comportement dilatoire,
Dit que chaque partie supportera les dépens afférents à la procédure d'appel et conservera la charge de ses frais non compris dans les dépens exposés devant la cour.