Livv
Décisions

CA Bordeaux, 1re ch. civ., 8 octobre 2024, n° 24/00371

BORDEAUX

Arrêt

Confirmation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Poirel

Conseillers :

Mme Vallee, M. Breard

Avocats :

Me Fonrouge, Me Croyere, Me De Mascureau, Me Taillard, Me Cuif, Me Contis

TJ Toulouse, pôle civil, du 6 sept. 2018…

6 septembre 2018

EXPOSE DU LITIGE ET DE LA PROCÉDURE

[I] [C], [M] [A] épouse [C], [Z] [V], [K] [P], [O] [J] épouse [P], [D] [F], [E] [U] épouse [F] et [H] [N] sont des médecins spécialisés en pneumologie qui exercent leur activité au sein de la Clinique [19] à [Localité 18] (31). Cette activité s'est développée à partir d'un contrat d'association du 31 mars 1989 conclu entre les fondateurs, les docteurs [L] et [F], les autres médecins ayant progressivement intégré cette activité.

Un protocole d'accord en date du 12 avril 2012, qui avait pour objet l'intégration progressive dans l'association de [W] [T], précisait que cette activité avait la forme d'une association déclarée comme constituant sur le plan fiscal une société de fait dans laquelle le droit de présentation était détenu indivisément et de manière égalitaire par chacun des médecins.

Il rappelait également qu'avait été constituée, le 31 mars 1989, une société civile de moyens (SCM) au capital de 200.000 francs ayant pour objet exclusif de faciliter l'activité professionnelle des membres par la mise en commun des moyens utiles à l'exercice de la profession.

Il prévoyait après une période d'essai et, en cas de poursuite, la cession des droits indivis détenus dans la société de fait, soit 1/6° par médecin, pour la somme totale de 218001euros. En contrepartie, les médecins devaient faciliter l'installation de [W] [T] en le présentant à leur clientèle comme associé et en mettant à sa disposition le fichier client et la documentation, sans porter atteinte au principe du libre choix du praticien par le malade.

Selon le protocole, chacun conservait son indépendance médicale et acceptait la mise en commun des honoraires. Il était également prévu que les parties convenaient de demeurer associés pendant une période s'étendant jusqu'au 31 décembre 2016 au moins et qu'en conséquence, il ne saurait être mis fin à l'association avant cette date.

Il était stipulé l'absence de versement d'une indemnité au praticien qui renoncerait à exercer la médecine en commun dans le cadre du groupement et qui ne présentait pas de successeur dans son activité au sein du groupe.

Enfin, il était prévu que le praticien décidant de son retrait de la société de fait renonçait à être associé dans la société civile de moyens constituée entre les signataires et s'obligeait en conséquence à céder ses parts.

Les conjoints des médecins sont intervenus à l'acte pour autoriser la cession des droits indivis.

Le 29 novembre 2012, étaient signés entre les parties :

- une convention de cession des parts sociales de la SCM au prix de 999 euros au total concernant chacun des 5 associés au profit de M. [T] qui détenait alors 333 parts sur Ies 2000 parts représentatives du capital social, les épouses des cédants intervenant à l'acte.

- une convention par cédant portant sur la cession des droits indivis détenus dans la société de fait représentant l'équivalent de 1/30° de la totalité des droits de la société de fait. Elle précisait que les parties reconnaissaient que la convention provoquait sur le plan fiscal une diminution de la valeur incorporelle que constitue le droit de présentation de la clientèle représenté par les droits de la société dans la société de fait figurant à l'actif professionnel du cédant et que l'indemnité reçue, de 43.600,20 euros (par cédant) était la contrepartie de cette diminution.

- un avenant au contrat d'exercice conjoint d'origine du 31 mars 1989, modifié par les avenants passés à chaque nouvelle entrée de médecin qui précisait les lieux de l'exercice ([Localité 18], [Localité 29] et [Localité 30]) et qui essentiellement reprenait les termes du protocole.

C'est dans ces conditions que les parties exerçaient leurs activités lorsque le 12 mai 2014, le Docteur [W] [T] a annoncé son départ, indiquant qu'il entendait récupérer la somme de 218 001 euros qu'il avait versée, mettant en avant des problèmes de santé.

Un versement de 18.534,76 euros a été effectué à son profit visant à régulariser sa rémunération au titre de la période d'essai.

Après échec de la tentative de conciliation devant l'ordre des médecins le 13 janvier 2015, M. [W] [T] a fait assigner, le 12 septembre 2016, M. [I] [C] et son épouse Mme [M] [A], M.[Z] [V], [K] [P] et son épouse Mme [O] [J], M.[D] [F] et son épouse Mme [E] [U] et M.[H] [N], devant le tribunal de grande instance de Toulouse en nullité de la cession de droits indivis intervenue le 29 novembre 2012 et restitution du prix de cession des parts.

Par jugement rendu le 6 septembre 2018, le tribunal de grande instance de Toulouse a :

- dit n'y avoir lieu à mettre hors de cause Mesdames [C], [P] et [F],

- les a déboutés du surplus de leurs demandes,

- débouté [W] [T] de l'ensemble de ses demandes,

- l'a condamné à payer à M.[K] [Y] [F], M.[K] [P], M. [Z] [V], M. [H] [N] et M.[I] [C] la somme de 500 euros chacun,

- lui a fait injonction de régulariser l'acte de cession des parts de la SCM Pneumoalliez dans le délai d'un mois à compter de la réception de l'acte de cession qui lui sera proposé et ce au prix de l'acte initial.

- l'a condamné aux dépens et à payer à M. [K] [Y] [F], M. [K] [P], M. [Z] [V], M. [H] [N] et M. [I] [C] la somme 1000 euros chacun sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- les a déboutés du surplus de leurs demandes,

- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire.

Par déclaration électronique en date du 30 novembre 2018, M. [W] [T] relevé appel de ce jugement.

Par arrêt du 8 décembre 2021, la cour d'appel de Toulouse a :

- condamné M. [W] [T] à payer à M.[K] [Y] [F], M. [K] [P], M. [Z] [V], M. [H] [N] et M. [I] [C] la somme de 500 euros chacun.

- refusé de prononcer une astreinte pour assortir l'injonction de régulariser l'acte de cession des parts de la SCM Pneumoalliez dans le délai d'un mois à compter de la réception de l'acte de cession qui lui sera proposé et ce au prix de l'acte initial.

Et statuant à nouveau sur les chefs infirmés, et y ajoutant,

- déboute [K] [Y] [F], [K] [P], [Z] [V], [H] [N] et [I] [C] de leur demande de dommages-intérêts,

- prononce à l'encontre de [W] [T] pour une durée de 4 mois, une astreinte de 50 euros par jour à compter de 45 jours après la notification du projet de cession des parts de la SCM Pneumoalliez qui doit être régularisé dans le mois par [W] [T] selon l'injonction confirmée,

- déboute [W] [T] de sa demande de dommages-intérêts,

- confirme le jugement pour le surplus,

- condamne [W] [T] aux dépens d'appel avec distraction conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile,

- condamné [W] [T] à payer à [K] [Y] [F], [K] [P], [Z] [V], [H] [N] et [I] [C] la somme de 300 euros chacun pour les frais irrépétibles d'appel.

M. [W] [T] s'est pourvu en cassation contre cet arrêt.

Par arrêt en date du 20 décembre 2023, la chambre commerciale de la Cour de cassation a :

- cassé, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 8 décembre 2021 par la cour d'appel de Toulouse et renvoyé les parties devant la cour d'appel de Bordeaux,

- condamné MM. [C], [V], [P] [F] et [N] et Mmes [A] épouse [C], [J] épouse [P] et [U] épouse [F] aux dépens,

- rejeté les demandes sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Pour statuer ainsi qu'elle l'a fait, la Cour de cassation a considéré qu'en statuant dans une composition comportant un magistrat qui avait déjà tranché le même litige en première instance, la cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 6 § 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

M. [W] [T] a saisi la cour d'appel de Bordeaux par déclaration de saisine en date du 24 janvier 2024.

M. [W] [T] , dans ses dernières conclusions déposées le 6 juin 2024, demande à la cour de :

Infirmer le jugement du tribunal de grande instance de Toulouse du 6 septembre 2018 en ce qu'il a :

* débouté le Dr [T] de l'ensemble de ses demandes,

* condamné M. [W] [T] à payer à [K] [Y] [F], [K] [P], [Z] [V], [H] [N] et [I] [C] la somme de 500 € chacun.

* lui a fait injonction de régulariser l'acte de cession des parts de la SCM Pneumo Alliez dans le délai d'un mois à compter de la réception de l'acte de cession qui lui sera proposé et ce au prix de l'acte initial,

* condamné M. [W] [T] aux dépens et à payer à MM. [K] [Y] [F], [K] [P], [Z] [V], [H] [N] et [I] [C] la somme 1000 € chacun sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.

- confirmer le jugement pour le surplus,

Statuant à nouveau,

- déclarer M. [W] [T] recevable et bien fondé en toutes ses demandes;

A titre principal,

- condamner le Dr [I] [C] à verser à M. [W] [T] la somme de 43.600,20 € (quarante-trois mille six cent euros et vingt centimes).

- condamner le Dr [Z] [V] à verser à M. [W] [T] la somme de 43.600,20 € (quarante-trois mille six cent euros et vingt centimes).

- condamner le Dr [K] [P] à verser à M. [W] [T] la somme de 43.600,20 € (quarante-trois mille six cent euros et vingt centimes).

- condamner le Dr [K] [F] à verser à M. [W] [T] la somme de 43.600,20 € (quarante-trois mille six cent euros et vingt centimes).

- condamner le Dr [H] [N] à verser à M. [W] [T] la somme de 43.600,20 € (quarante-trois mille six cent euros et vingt centimes).

A titre subsidiaire, sur le fondement des articles 1303 et suivants du Code civil,

- condamner solidairement M.M [K] [Y] [F], [K] [P], [Z] [V], [H] [N] et [I] [C] à verser à M. [W] [T] la somme de 218.001 € (deux cent dix huit mille et un euros).

Plus subsidiairement,

- juger que M. [W] [T] a droit au remboursement de ses droits indivis, à la charge de [K] [Y] [F], [K] [P], [Z] [V], [H] [N] et [I] [C],

Par conséquent, avant dire droit,

- désigner tel expert avec pour mission de déterminer la valeur des droits indivis appartenant à M. [W] [T] à la date de son retrait effectif, soit la date la plus proche du remboursement de ses droit,

Subsidiairement, sur le fondement de l'article 1843-4 du Code civil,

- juger que M. [W] [T] est fondé à saisir le président du tribunal statuant en la forme des référés afin de désigner un expert pour une évaluation de ses droits dans les conditions de cet article,

- faire injonction sous astreinte de 100 € par jour de retard à MM. [K] [Y] [F], [K] [P], [Z] [V], [H] [N] et [I] [C] de communiquer les derniers comptes de l'exercice clos au 31 décembre 2023, comprenant les déclarations 2035 outre le grand livre et tous documents comptables nécessaire à la mission de l'expert.

- condamner à titre provisionnel MM. [K] [Y] [F], [K] [P], [Z] [V], [H] [N] et [I] [C] à verser au Dr [T] la somme de 218.001€.

A titre encore plus subsidiaire,

- déclarer nulle la convention de cession de droits indivis intervenue entre le Dr [I] [C] et M. [W] [T] le 29 novembre 2012.

- déclarer nulle la convention de cession de droits indivis intervenue entre le Dr [Z] [V] et M. [W] [T] le 29 novembre 2012.

- déclarer nulle la convention de cession de droits indivis intervenue entre le Dr [K] [P] et M. [W] [T] le 29 novembre 2012.

- déclarer nulle la convention de cession de droits indivis intervenue entre le Dr [K] [F] et M. [W] [T] le 29 novembre 2012.

- déclarer nulle la convention de cession de droits indivis intervenue entre le Dr [H] [N] et M. [W] [T] le 29 novembre 2012.

En conséquence,

- condamner le Dr [I] [C] à verser à M. [W] [T] la somme de 43.600,20 € (quarante-trois mille six cent euros et vingt centimes).

- condamner le Dr [Z] [V] à verser à M. [W] [T] la somme de 43.600,20 € (quarante-trois mille six cent euros et vingt centimes).

- condamner le Dr [K] [P] à verser à M. [W] [T] la somme de 43.600,20 € (quarante-trois mille six cent euros et vingt centimes).

- condamner le Dr [K] [F] à verser à M. [W] [T] la somme de 43.600,20 € (quarante-trois mille six cent euros et vingt centimes).

- condamner le Dr [H] [N] à verser à M. [W] [T] la somme de 43.600,20 € (quarante-trois mille six cent euros et vingt centimes).

En tout état de cause

- débouter les Drs [F] [P] [V] [N] [C] et Mmes Mme [M] [A], [O] [P] et [E] [U] de toutes leurs demandes, fins et conclusions.

- condamner solidairement les Drs [F] [P] [V] [N] [C] à payer à M. [W] [T] la somme de 8.000 € à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice moral et de la résistance abusive.

- condamner solidairement les Drs [F] [P] [V] [N] [C] à payer à M. [W] [T] la somme de 5.000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

- condamner solidairement [K] [Y] [F], [K] [P], [Z] [V], [H] [N] et [I] [C] aux entiers dépens dont distraction requise au profit de Maître Philippe Leconte, Lexavoue Avocats, avocat aux offres de droit, conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.

Mmes et MM. [F], [P], [C], [V] et [N], dans leurs dernières conclusions du 16 mai 2024, demandent à la cour de :

À titre principal,

1. Confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté le Docteur [T] de l'ensemble de ses demandes ;

2. Débouter le Docteur [T] de l'ensemble de ses demandes y compris de sa demande de provision, de sa demande de désignation d'un expert et de communication de documents comptables ;

3. Sur appel incident, Infirmer le jugement entrepris en ce qu'il n'a que partiellement fait droit aux demandes indemnitaires des intimés liées aux modalités de retrait fautives du Docteur [T] et aux procédures abusivement engagées par lui,

Statuant à nouveau, condamner le Docteur [T] à payer à chacun des Docteurs [F], [P], [V], [N] et [C] les sommes suivantes :

- 10.000,00 € à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice moral né des conditions de son retrait,

- 5.000,00 € à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive,

4. Confirmer le jugement entrepris pour le surplus,

Subsidiairement,

Si par extraordinaire la Cour de Céans décidait d'annuler les conventions litigieuses et d'ordonner la restitution du prix versé par le Docteur [T] ou décidait que la somme de 218 001 euros versée ne l'a pas été en contrepartie de la cession partielle du droit de présentation à la patientèle et en ordonnait le remboursement total ou partiel,

- condamner le Docteur [T] à verser à chacun des Docteurs [F], [P], [V], [N] et [C] la somme de 43600,20 euros sur le fondement de l'enrichissement sans cause,

En tout état de cause,

- condamner le Docteur [T] à payer à chacun des intimés la somme de 5000 € en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile,

- le condamner aux entiers dépens, dont distraction au profit de Maître Annie Taillard, SCP Annie Taillard conformément à l'article 699 du Code de procédure civile.

L'affaire a été fixée à l'audience collégiale du 2 juillet 2024.

L'instruction a été clôturée par ordonnance du 18 juin 2024.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la portée de la cassation :

Selon les dispositions de l'article 623 du code de procédure civile la cassation est totale ou partielle et selon l'article 624 la portée de la cassation est déterminée par le dispositif de l'arrêt qui la prononce. Elle s'étend également à l'ensemble des dispositionsde l'arrêt cassé ayant un lien d'indivisibilité ou de dépendance nécessaire.

Selon l'article 625 alinéa 1 du code de procédure civile, sur les points qu'elle atteint la cassation replace les parties dans l'état elles se trouvaient avant le jugement (ici l'arrêt) cassé.

Il s'ensuit que la cour de renvoi est saisie par l'acte d'appel initial, ainsi que l'était la cour d'appel dont l'arrêt a été cassé, dans la limite du dispositif de l'arrêt de cassation.

En l'espèce, M. le docteur [T] a interjeté appel du jugement du tribunal de grande instance de Toulouse du 6 septembre 2018 limité aux dispositions qui:

- l'ont débouté de l'ensemble de ses demandes,

- l'ont condamné à payer à M. [K] [Y] [F], M. [K] [P], M. [Z] [V], M. [H] [N] et M.[I] [C] la somme de 500 euros chacun,

- lui ont fait injonction de régulariser l'acte de cession des parts de la SCM Pneumo

Alliez dans le délai d'un mois à compter de la réception de l'acte de cession qui lui sera proposé et ce au prix de l'acte initial.

- l'ont condamné aux dépens et à payer à M. [D] [F], M. [K] [P], M. [Z] [V], M. [H] [N] et M. [I] [C] la somme 1.000 euros chacun sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

L'arrêt de la cour d'appel de Toulouse a été cassé en toutes ses dispositions de sorte que la cour d'appel de Bordeaux, statuant en tant que cour de renvoi, est saisie de l'entier litige déféré à la cour d'appel de Toulouse.

Sur le fond :

Sur les demandes principales du Dr [T] :

Le tribunal a rejeté les demandes de M. Le Dr [T] dirigées à l'encontre des médecins en remboursement des sommes versées par lui à chacun des médecins intimés correspondant au montant de ses droits indivis dans la société de fait constituée entre les médecins au motif que la convention de cession de droits indivis s'analysait en une convention de cession du droit de présentation de patientèle dont la somme totale de 218 001 euros constituait la contrepartie, qu'il ne s'agissait dès lors pas d'une somme indivise sur laquelle le Dr [T] aurait conservé des droits et qu'il était fondé à reprendre lors de sa sortie de la société de fait et qu'à défaut d'avoir présenté un successeur, il ne pouvait prétendre à aucune autre indemnité, conformément au contrat faisant la loi des parties.

Le Dr [T] conclut à l'infirmation du jugement entrepris estimant que la requalification opérée par le tribunal n'est pas conforme à la lettre même du contrat, que ce n'est que sur le plan fiscal que les parties ont entendu placer la cession sur le plan de la cession de patientèle, ce alors que le contrat ne prévoyait aucune obligation des médecins correspondant à une cession de patientèle, que les sommes par lui versées l'ont été dans le cadre d'une convention de cession de droits indivis qu'il était fondé à reprendre dès lors que les associés avaient accepté sa sortie de l'indivision, qu'en effet les droits indivis des associés dans une société en participation demeurent, au même titre que les parts valorisables d'une société, la propriété des associés. Quant aux sommes versées entre les mains de chacun des cinq associés, elles constituaient la contre-partie des droits qui lui étaient cédés dans la société en participation dont l'actif était essentiellement constitué par les contrats d'exercice au sein des cliniques [19], [23] et [25].

Selon l'article 12 du code de procédure civile, le juge doit donner ou restituer

leur exacte qualification aux faits ou actes litigieux sans s'arrêter à la dénomination que les parties en auraient proposée. Il doit rechercher au travers les actes la commune intention des parties et dans le doute le contrat s'analyse toujours en faveur de celui qui contracte l'obligation.

Il n'y a cependant pas lieu à requalification lorsque la lettre est claire.

Ainsi, M. [T] rappelle à raison que les clauses d'un contrat s'interprètent les unes par rapport aux autres en donnant à chacune le sens qui respecte la cohérence de l'acte tout entier.

Il convient de préciser que les parties s'accordent à reconnaître l'existence d'une société de fait et plus précisément d'une société en participation c'est à dire une société non immatriculée traduisant la volonté des associés de mise en commun de leur industrie, voire d'apports, avec participation aux bénéfices et aux pertes, société civile régie par les dispositions des articles 1871 et suivants du code civil et c'est effectivement pour des raisons exclusivement fiscales que cette société a été intitulée société de fait.

Les intimés soutiennent à bon droit, à l'instar des premiers juges, que cette société civile n'a précisément aucun capital social mais cela n'exclut pas, ainsi que le fait justement valoir le Dr [T], que des apports aient pu être effectués en indivision dont en l'absence de toute personnalité morale de la société en participation et partant de capital social, chacun des associés serait resté propriétaire indivis.

En effet, selon l'article 1871 du code civil, dans sa version antérieure à l'ordonnance du 23 octobre 2019, les associés peuvent convenir que la société ne sera point immatriculée. La société est dite alors " société en participation ". Elle n'est pas une personne morale et n'est pas soumise à publicité. Elle peut être prouvée par tous moyens.

Les associés conviennent librement de l'objet, du fonctionnement et des conditions de la société en participation, sous réserve de ne pas déroger aux dispositions impératives des articles 1832, 1832-1, 1833, 1836 (2 ème alinéa), 1841, 1844 (1er alinéa) et 1844-1 (2e alinéa).

Selon l'article 1872, à moins qu'une organisation différente n'ait été prévue, les rapports entre associés sont régis par les dispositions applicables aux sociétés civiles dès lors que n'est pas contesté le caractère civil de la société.

Il n'est finalement pas contesté que la convention en litige emportait cession de droits indivis et, dès lors que le droit de présentation de patientèle peut également constituer un droit indivis dans le cadre d'un groupement de médecins, la question posée à la cour par les demandes du Dr [T] ne porte finalement que sur la détermination de l'objet de la convention obligeant également la cour à déterminer à quel titre la somme de 43 600,20 euros a été versée à chacun des médecins associés (218.001 euros au total), en contrepartie de la cession partielle d'un droit de présentation de patientèle ainsi que l'a jugé le tribunal ou, en contre-partie ' de droits indivis' et notamment d'un droit d'exercice au sein des trois cliniques susvisées, ainsi que le soutient le Dr [T].

Le corpus contractuel liant les parties est constitué par le protocole d'accord du 12 avril 2012, les conventions de cession de droits indivis passées avec chacun des médecins du 29 novembre 2012, l'avenant au contrat d'exercice conjoint du 29 novembre 2012 pris en application du protocole et un acte de cession de parts sociales dans la société de moyens, du même jour.

Il s'en évince que les médecins signataires étaient liés entre eux dans le cadre d'une société en participation, peu important qu'elle soit intitulée société de fait, et étaient également associés dans la société civile de moyens permettant la mise en commun des moyens du cabinet.

Il résulte du protocole d'accord signé de tous le 12 avril 2012 qui constitue en quelque sorte l'exposé des motifs de l'accord global, qu'à l'origine les Drs [L] et [F] exerçaient ensemble dans le cadre d'une association de pneumologues avec mise en commun de leurs honoraires, les médecins signataires constituant fiscalement une société de fait, qu'ils ont régulièrement modifié le contrat d'exercice en commun pour tenir compte de l'intégration progressive d'autres praticiens jusqu'au 4 septembre 2009 où chacun des cinq associés détenait un cinquième des droits dans la société de fait et qu'ils avaient constitué dans le même temps avec les mêmes une société civile de moyens.

Le protocole rappelait en son exposé préalable (article 1) que chaque médecin détenait dans le cadre de la société de fait 'un droit de présentation de patientèle indivis et égalitaire' et les intimés prenaient ainsi à l'article 1-3 du protocole l'engagement de 'faciliter l'installation du Dr [T] au sein du cabinet, de lui permettre l'accès à leur fichier client tandis que le Dr [T] prenait l'engagement de respecter le code déontologie des médecins'. A l'article 8, il prévoyait une mise en commun de leurs honoraires comme condition essentielle de leur engagement avec participation au prorata aux frais communs.

C'est donc à tort que le Dr [T] soutient que le contrat ne prévoyait aucune obligation à la charge des médecins de l'ordre de celles résultant habituellement d'un contrat de cession de droit de présentation de patientèle.

C'est également à tort qu'il fait valoir que la cession d'un droit de présentation de patientèle ne peut intervenir qu'au profit d'un successeur et ne pourrait concerner l'hypothèse de son intégration au sein d'un cabinet de médecins alors même qu'est au contraire admis la validité des contrats de cession partielle d'un droit de présentation de patientèle dans le cadre d'un exercice en commun de la médecine par plusieurs praticiens.

Les conventions de cession de droits indivis signées avec chacun des médecins le 29 novembre 2012 prévoyaient en leur article 3 alinéa 1, ainsi que l'observe justement le Dr [T], que 'le cessionnaire aura la pleine et entière propriété des droits présentement cédés au 1er décembre 2012" et à l'alinéa 2 que 'à partir de cette date il aura seul droit à la fraction de bénéfices dégagés par la société de fait et attachés aux droits présentement cédés'.

Cependant la participation aux bénéfices alléguée par l'appelant, comme la participation aux pertes qui en est le pendant, n'est qu'une composante nécessaire de l'entrée en société en participation et elle est la contrepartie de l'apport en industrie de chacun des médecins au groupe. Elle ne constitue pas en soi un actif valorisable au même titre que des parts de société.

Le Dr [T] soutient encore que le contrat avait pour objet la cession des droits de chacun des médecins dans le cadre des différents contrats d'exercice libéral conclus avec les Cliniques, de sorte qu'il aurait acquis une quote-part de la valeur patrimoniale des contrats d'exercice libéral de ses associés.

Or, les intimés observent à raison que ces contrats par nature 'intuitu personae' ne sont pas cessibles et, en tout état de cause, aucune des clauses contractuelles ne relie le versement de la somme aujourd'hui réclamée (43 600,20 euros x5) à ces contrats d'exercice.

En effet, si du fait de son entrée au sein du cabinet de pneumologie le Dr [T] s'est vu de facto faciliter l'exercice au sein des cliniques dans lesquelles exerçaient les médecins du cabinet, la relation contractuelle ayant existé entre celui-ci et les cliniques est étrangère à la relation contractuelle entre les associés.

Le Dr [T], qui n'indique pas sur quels autres droits indivis les contrats de cession auraient pu porter, fait encore valoir que la cession des droits indivis n'a pu porter sur le droit de présentation de patientèle sans quoi l'ordre des médecins s'y serait opposé mais il est admis que si la patientèle est hors du commerce, le droit de présentation de patientèle constitue un droit patrimonial susceptible de faire l'objet d'une convention régie par le droit privé en sorte que la cession du droit de présentation de patientèle n'est pas contraire à la déontologie des médecins dont l'ordre est le garant, étant surabondamment observé qu'au contraire, celui-ci se serait opposé, au nom de cette même déontologie, à une convention de cession du droit d'exercice libéral d'un praticien au sein d'une clinique au profit d'un autre praticien.

Le fait que le Dr. [T] soit devenu associé de la 'société de fait' dont le nom intégrait désormais le sien par suite de l'acquisition de droits indivis dans cette société, n'est pas, contrairement à ce qu'il soutient, de nature à écarter le fait que la société créée entre les médecins portait sur la cession du droit indivis de présentation de patientèle, seule contrepartie du prix.

Pas davantage, l'intervention aux actes des conjointes des médecins n'est de nature à écarter le fait que la convention de droits indivis portait sur la cession du droit de présentation de patientèle, car s'il est exact que celles-ci n'ont aucun droit sur la patientèle, pas plus que n'en ont les médecins, en revanche elles sont susceptibles d'en avoir sur la valeur des droits indivis dans la société de fait, soit sur la valeur du droit de présentation de patientèle.

Enfin, le fait que les parties aient choisi d'inscrire le droit de présentation de patientèle dans le cadre d'une cession de droit indivis d'une société de fait pour des raisons fiscales, n'ôte en rien au fait que le contrat d'exercice en commun avait pour objet essentiel, ainsi qu'il a été précédemment relevé, de conférer à chacun sur la patientèle 'un droit de présentation indivis et égalitaire' (protocole d'accord article 1°) justifiant à lui seul la contrepartie financière. La volonté des parties se situait donc bien ici, seul le choix de la société de fait ayant une motivation fiscale.

Quant à la somme de 43 600,20 euros versée à chacun des cinq médecins du cabinet, il sera relevé qu'il était prévu à l'article 2 des différentes conventions de cession que la cession des droits indivis était 'consentie et acceptée par le Dr [T] moyennant une indemnité de 43 600,20 euros correspondant à 1/30ème des droits du cédant dans la société en participation, et en contrepartie de l'engagement qu'il a pris de le présenter à sa clientèle comme l'un de ses nouveaux associés, de faciliter son intégration, de le faire bénéficier à compter du 1er décembre 2012 au partage au à concurrence du 6ème des bénéfices dégagés et de ne pas se retirer du groupe pendant une période de quatre ans à compter de la date d'effet des présentes et, à l'article 4, que la convention, en ce qu'elle intégrait un nouveau membre, avait pour conséquence fiscale une diminution de la valeur incorporelle que constitue le droit de présentation de patientèle équivalent aux droits du cédant dans la société de fait et que l'indemnité reçue de 218 001 euros, soit 43 600,20 euros pour chacun des membres, était destinée à compenser cette diminution de valeur.

Dès lors, en retenant d'une part que les conventions de cession portaient sur la cession d'un droit indivis de présentation de patientèle et d'autre part, que la somme versée n'avait d'autre contrepartie que la cession du droit de présentation de patientèle, le tribunal, qui n'a d'ailleurs pas requalifié le contrat mais en a précisé l'objet, a fait une juste appréciation des conventions liant les parties

Le Dr [T] soutient encore qu'il serait en droit de reprendre à tout le moins la somme ainsi versée à défaut pour les intimés d'avoir rempli leurs obligations de présentation de patientèle à son égard mais celui-là même qui affirme que par son travail il a participé à l'augmentation substantielle des bénéfices du cabinet, ne saurait raisonnablement soutenir que les intimés auraient manqué à leur obligation de présentation de patientèle à son égard, alors qu'exerçant précédemment à [Localité 28] il n'avait à son arrivée au sein du cabinet aucune patientèle toulousaine.

Quoi qu'il en soit, les intimés justifient suffisamment par les attestations émanant d'une ancienne secrétaire, d'une secrétaire actuelle mais également de nombreux généralistes correspondants du cabinet, que le cabinet proposait le plus souvent aux patients et aux médecins qui appelaient pour obtenir pour leurs patients des rendez-vous rapides, des rendez-vous auprès du Dr [T] dont la disponibilité était supérieure à celle de ses associés dès lors qu'il venait de s'installer à [Localité 29] où il n'avait précisément pas encore de patientèle.

Et dès lors que le contrat n'a pas porté sur une cession de patientèle mais sur un droit de présentation de cette même patientèle, les médecins intimés n'ont pas à justifier que des patients auraient été transférés du cabinet vers le Dr [T], alors qu'ils démontrent suffisamment avoir accompli leur obligation de présentation.

Il est encore notable que le courrier par lequel le Dr [T] annonçait à ses associés son intention de se retirer de la société, pour raison de santé, ne contenait aucun grief adressé à ces derniers quant à l'exécution de leurs obligations.

Le Dr [T] fait encore valoir que les associés ayant accepté son retrait de la société ne sauraient s'opposer à la reprise de ses droits indivis à hauteur de ce qu'il a apporté dans la société conformément aux dispositions de l'article 815 du code civil mais il a été retenu que la somme versée n'était que le contrepartie de la cession par chacun des médecin de leur quote-part du droit indivis de présentation de patientèle, droit dont M. Le Dr [T] a effectivement bénéficié et dont il est encore détenteur à défaut d'avoir trouvé un successeur, de sorte qu'il ne s'agit pas d'un apport qu'il pourrait récupérer, étant devenu propriétaire d'une quote-part de droits indivis.

Or, l'article12 du protocole prévoyait effectivement la possibilité pour le Dr [T], sortant de la société, de trouver un successeur auquel il aurait pu revendre son droit de présentation de gré à gré et à défaut d'agrément de ce successeur par les associés, un droit à indemnisation équivalent à une année de chiffre d'affaires au prorata de ses droits, somme dont il n'est d'ailleurs pas prétendu qu'elle serait inférieure à la somme de 218 001 euros versée par le Dr [T].

Le Dr [T] soutient que les dispositions de l'article 12 ne lui seraient pas applicables dès lors que l'acte de cession ne portait pas sur un droit de présentation de patientèle mais uniquement sur des droits indivis dans la société de fait mais dès lors qu'il a été jugé le contraire, l'application de l'article 12 au cas présent n'est pas critiquable. D'ailleurs, il n'est pas contesté que cet article concerne le droit de présentation de patientèle.

Il s'ensuit que l'ensemble du corpus contractuel visait à la cession d'un droit indivis de présentation de patientèle pour laquelle le Dr [T] a versé lors de son entrée en société une somme totale de 218 001 euros et à permettre au médecin retrayant de retrouver le montant des droits versés à ce titre en respectant la procédure de l'article 12, par la recherche d'un successeur et, à défaut d'agrément de celui-ci, par le biais d'une indemnité et ce à l'exception de toute autre indemnisation.

Dès lors, le Dr [T] qui s'est dispensé de rechercher un successeur alors que le contrat ne prévoyait aucune autre 'indemnisation', ni n'imposait aux associés de racheter les droits cédés au Dr [T], alors qu'au surplus il n'est pas utilement contredit que celui-ci s'est retiré de la société en participation avant le terme contractuellement convenu, ne saurait prétendre à paiement d'aucune somme à ce titre.

Le jugement qui a débouté le Dr [T] de ses demandes sur ce fondement est en conséquence confirmé.

Sur les demandes au titre de l'enrichissement sans cause :

Le Dr.[T] demande subsidiairement à la cour de juger, en cas de requalification du contrat en contrat de cession de droits indivis de présentation de patientèle, que les dispositions de l'article 12 du contrat d'exercice conjoint procureraient un enrichissement sans cause au profit des intimés.

Cependant, la somme versée par le Dr [T] avait pour contrepartie la cession d'un droit de présentation de patientèle dont il a effectivement bénéficié et celui-ci conservant la propriété du droit cédé avait la possibilité de présenter un successeur avec lequel il avait tout loisir de négocier les modalités de la cession, sauf l'obligation prise par les intimés de l'indemniser en cas de refus d'agrément, de sorte que leur enrichissement éventuel n'était pas dépourvu de cause laquelle résidait dans les propres engagements des intimés au profit du Dr [T], qui au demeurant ne justifie nullement s'être appauvri du seul fait du contrat.

Le Dr [T] insiste sur le fait qu'il n'a pu ensuite conserver sa patientèle pour s'être installé comme praticien hospitalier au CHI [Localité 21]-[Localité 17], mais que n'a-t-il pas alors recherché un successeur '

Défaillant dans la charge de la preuve d'un appauvrissement et d'un enrichissement corrélatif dépourvus de cause, le Dr [T] est en conséquence débouté de ses demandes de ce chef.

Sur la demande de retrait de ses droits indivis et d'expertise :

A défaut d'établir quels autres droits indivis lui auraient été cédés par les conventions de cession conclues avec chacun des médecins, l'appelant ne saurait davantage prospérer en sa demande de retrait de la société de ses droits indivis, ni en sa demande subsidiaire d'expertise pour chiffrer le montant de tels droits, ce dont il sera débouté.

Il sera en conséquence également débouté de sa demande de communication de documents comptables aux fins d'expertise sous astreinte et de provision y afférente, ce en quoi il sera ajouté au jugement entrepris.

Sur la nullité des conventions :

* pour erreur sur la substance de l'obligation :

Le Dr [T] conteste le jugement qui l'a débouté de sa demande subsidiaire en nullité du contrat pour erreur soutenant qu'au regard de l'intitulé des actes il s'est trompé sur la nature des droits acquis, pensant acquérir des parts indivises de société et non uniquement un droit de présentation de patientèle, que son consentement a donc été vicié par l'erreur, excusable, portant sur la cause même du contrat ou la nature des droits acquis, ce qui constitue un vice du consentement et justifie le prononcé de la nullité du contrat. Il soutient ainsi que l'erreur résulte ipso facto de la requalification du contrat opérée par le tribunal.

Il a cependant été sus retenu que davantage qu'une requalification, le tribunal a été amené à préciser l'objet de la 'cession de droits indivis', que le droit de présentation de patientèle des médecins d'un cabinet pouvait constituer un droit indivis ayant une valeur patrimoniale susceptible de cession partielle, qu'il résultait clairement des actes en litige qu'aucun autre droit que le droit de présentation de patientèle n'était expressément visé au titre des droits indivis cédés par les différentes conventions liant les médecins et que la seule somme versée dans la société en participation, qui avait par ailleurs pour objet la mise en commun d'une industrie, l'avait été pour dédommager les médecins de l'incidence fiscale résultant pour eux de la cession partielle de ce droit de présentation de patientèle dont elle constituait en conséquence la contrepartie.

Par ailleurs, le contrat prévoyait clairement (article 12 du protocole) la possibilité pour le médecin de se retirer de la société sans perte.

Au contraire, il ne détaillait aucun autre droit indivis, ni ne prévoyait aucune obligation de rachat de ces droits par les associés, ni aucune autre clause indemnitaire, de nature à tromper l'appelant sur la nature des droits acquis.

Le contrat apparaissant ici parfaitement clair, le Dr [T], ne démontre nullement s'être trompé, de manière excusable, sur la substance des droits acquis. Le jugement qui l'a débouté de son action en nullité sur ce fondement est en conséquence confirmé.

* pour absence de cause :

Le Dr [T] demande la réformation du jugement qui l'a débouté de son action en nullité sur ce fondement faisant valoir que la cause d'un contrat synallagmatique résidant dans l'engagement de l'autre, le versement de la somme de 218 001 euros au titre d'un droit de présentation de patientèle serait totalement dépourvu de cause dès lors que les médecins n'étaient tenus d'aucun engagement en contre partie. En effet, il soutient n'avoir nullement bénéficié de la patientèle de ses associés puisque les intimés reconnaissent eux mêmes que chacun devait constituer sa propre clientèle, déplorant (ses conclusions page 34) que 'aucune clientèle n'a été cédée au Dr [T]',

Cependant, ce qui a été cédé ici n'est pas la patientèle en elle même, celle-ci étant effectivement hors du commerce mais, ainsi qu'il a été sus rappelé et retenu tant par le tribunal que par le présent arrêt, la cause de l'engagement du Dr [T], qui avait effectivement pour cause l'engagement de ses associés, résidait dans la cession par ces derniers de leur quote-part du droit indivis de présentation de patientèle et dans les engagements pris en ce sens. Or, il a été retenu plus avant que la présentation de patients au Dr [T], avait été effective et qu'il en était justifié par les intimés mais également au regard du volume d'activité déployé par l'appelant.

Enfin, ces contrats de cession avaient pour cause le contrat de société qui permettait au Dr [T] d'exercer la médecine dans une structure déjà installée, lui ayant permis de se créer rapidement une clientèle.

Il résulte de ce qui précède que le versement de la somme de 218 001 euros par le Dr. [T] avait pour cause les engagements librement et respectivement consentis par les parties et au demeurant respectés par les intimés à son égard, n'ayant été rompus que par son départ anticipé de la société en participation, en sorte que les conventions ne sauraient être dépourvues de cause.

Le jugement qui a débouté le Dr. [T] de ce chef de demande est en conséquence confirmé de même qu'en ce qu'il a fait injonction au Dr [T] de céder ses parts dans la société civile de moyen ainsi que le contrat lui en faisait l'obligation en cas de retrait de la société en participation.

Sur la demande reconventionnelle en dommages et intérêts des intimés :

Le tribunal, après avoir écarté tout préjudice pour les médecins restants en termes de désorganisation du cabinet, a alloué à chacun d'eux une somme de 500 euros de dommages et intérêts en réparation du préjudice moral résultant des propos excessifs du Dr [T] à leur égard en ce qu'il a annoncé au président du conseil de l'ordre son intention de déposer plainte pour abus de confiance et escroquerie à leur égard, ayant écarté toute demande au titre d'une désorganisation résultant du retrait du Dr [T] de la société.

Les intimés forment appel incident de ce chef demandant de leur allouer une somme de 10 000 euros de dommages et intérêts liées aux conditions de son retrait outre 5 000 euros pour procédure abusive.

Le Dr [T] conclut à l'infirmation de la décision entreprise qui a alloué aux intimés des dommages et intérêts pour préjudice moral et au débouté des demandes par eux formulées. Il conteste tout caractère injurieux ou diffamatoires à la menace de poursuites pénales auxquelles il n'a pas donné suite, de même tout préjudice résultant d'un retrait qu'ils ont accepté ou encore avoir abandonné sa patientèle.

La seule attestation d'un patient (pièce 52 des intimés) ou de leur subordonnée (pièce 39) est insuffisante à établir que le Dr [T] aurait quitté le cabinet sans avertir ses patients causant une importante désorganisation au sein du cabinet, le peu d'attestations produites en ce sans attestant le contraire.

Au contraire c'est à bon droit que le tribunal a retenu que le fait d'aviser l'ordre des médecins, qui n'est pas autorité de poursuite en la matière, de son intention de déposer plainte pour abus de confiance et escroquerie contre ses anciens associés, constituait une attitude diffamatoire, peu important que le Dr [T] ne l'ait finalement pas fait, de nature occasionner un préjudice moral à chacun des associés qu'en l'absence de plus ample élément le tribunal a justement indemnisé par l'octroi d'une somme de 500 euros au profit de chacun d'entre eux.

Le jugement qui en a ainsi décidé est en conséquence confirmé.

Quant à la demande de dommages et intérêts pour procédure abusive, il sera rappelé que l'usage du droit d'agir en justice et d'exercer les voies de recours légalement admises, ne dégénèrent en abus que lorsqu'il en est fait usage dans la seule intention de nuire ou par une légèreté blâmable.

Or, il n'est mis en avant aucun élément qui permettrait de retenir que le Dr [T] a fait en l'espèce un usage abusif de ce droit, ce qui ne saurait résulter de sa seule succombance en première instance et en appel, la saisine de la cour de renvoi s'expliquant par la cassation de l'arrêt de la cour d'appel de Toulouse qui n'est pas imputable à l'appelant.

Les Drs [F], [P], [V], [N] et [C] ne sauraient en conséquence prospérer en leur de mande de dommages et intérêts pour procédure abusive.

Sur la demande du Dr [T] de dommages et intérêts pour procédure abusive :

L'issue du présent recours exclut toute condamnation des Drs [F], [P], [V], [N] et [C] en dommages et intérêts pour procédure abusive, de sorte que l'appelant est également débouté de sa demande de ce chef.

Au vu de l'issue du présent recours le jugement qui a statué sur les dépens et frais irrépétibles de première instance est confirmé.

Le Dr [T] qui succombe en son appel en supportera les dépens et sera équitablement condamné à payer à chacun des médecins intimés une somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Statuant sur renvoi de cassation :

Confirme le jugement du tribunal de grande instance de Toulouse du 6 septembre 2018 en toutes ses dispositions.

Y ajoutant :

Rejette le surplus des demandes.

Condamne M. Le Dr [T] à payer à M.M les Drs [F], [P], [V], [N] et [C], chacun, une somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Condamne M. Le Dr [T] aux entiers dépens dont distraction au profit de maître Anne Taillard, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.